Chambre de la sécurité financière (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0919

 

DATE :

Le 24 janvier 2013

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Janine Kean

Présidente

 

M. Louis Giguère, A.V.C.

Membre

 

M. Sylvain Jutras, A.V.C., Pl. Fin.

Membre

 

____________________________________________________________________________________

 

CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

 

SYLVAIN PAQUET, conseiller en sécurité financière (numéro de certificat 125724)

Partie intimée

____________________________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

____________________________________________________________________________________

[1]           Les 6 et 7 novembre 2012, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le comité) s'est réuni à la Cour fédérale, sise au Palais de justice de Québec, au 300, boulevard Jean-Lesage, à Québec, pour procéder à l'audition de la plainte disciplinaire portée contre l'intimé le 22 mars 2012.

[2]           D’entrée de jeu, la procureure de l’intimé a informé le comité que l’intimé désirait enregistrer un plaidoyer de culpabilité sous chacun des sept chefs de la plainte. Elle a demandé cependant que le premier chef soit amendé pour retrancher l’article 28 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers auquel il fait référence, celui-ci n’étant pas en vigueur au moment des faits reprochés.

[3]           Les parties ont consenti à procéder en attendant que la plaignante puisse confirmer le tout, ce qu’elle a fait le 23 novembre 2012[1]. En conséquence, la plainte portée contre l’intimé se lit dorénavant comme suit :

LA PLAINTE

 

1.    À Québec, entre les ou vers les 22 mai et 12 juillet 2000, l’intimé n’a pas pris les mesures raisonnables afin d’assurer l’exactitude et l’intégralité des renseignements transmis à sa cliente G.G. sur le plan de paiement modifié pour la police d’assurance vie de Groupe La Mutuelle numéro 908 683 252 UP, en ne l’informant pas que ladite police serait payée à même sa caisse d’accumulation, contrevenant ainsi aux articles 16 (…) de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 12, 13, 14 et 16 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 3) ;

 

2.    À Québec, le ou vers le 22 mai 2000, l’intimé a contrefait ou permis à un tiers de contrefaire la signature de sa cliente G.G. sur la «Demande du plan de paiement modifié» du Groupe La Mutuelle pour la police d’assurance numéro 908 683 252 UP, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 3);

 

3.    À Québec, le ou vers le 22 mai 2000, l’intimé a signé, à titre de témoin, la «Demande du plan de paiement modifié» du Groupe La Mutuelle pour la police d’assurance vie numéro 908 683 252 UP hors la présence de sa cliente G.G., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 3);

 

4.    À Québec, le ou vers le 10 juillet 2000, l’intimé a contrefait ou a permis à un tiers de contrefaire la signature de sa cliente G.G. sur la «Demande de plan de paiement modifié» de Clarica pour la police d’assurance vie numéro 908 683 252 UP, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 3);

 

5.    À Québec, le ou vers le 10 juillet 2000, l’intimé a signé à titre de témoin la «Demande de plan de paiement modifié» de Clarica pour la police d’assurance vie numéro 908 683 252 UP hors la présence de sa cliente G.G., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 3);

 

6.    À Québec, le ou vers le 10 juillet 2000, l’intimé a contrefait ou a permis à un tiers de contrefaire la signature de la cliente G.G. sur un aperçu de la police d’assurance vie numéro 908 683 252 UP de Clarica, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 3);

 

7.    À Québec, le ou vers le 10 juillet 2000, l’intimé a signé à titre de témoin un aperçu de la police d’assurance vie numéro 908 683 252 UP de Clarica hors la présence de sa cliente G.G., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 3).

PLAIDOYER DE CULPABILITÉ

[4]           L’intimé, présent à l’audience, a enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’égard de tous et chacun des sept chefs d’accusation contenus à la plainte, ajoutant être sincèrement désolé pour les clients.

[5]           Le comité a pris acte de son plaidoyer et l’a déclaré coupable, après s’être assuré qu’il comprenait que par celui-ci il reconnaissait les gestes reprochés et que ceux-ci constituaient des infractions déontologiques.

LA PREUVE

[6]           Le procureur de la plaignante a produit de consentement un cahier de pièces (P‑1 à P-32) ainsi que les documents P-31 a) et P-32 a), qui ont été passés en revue par l’enquêteur du bureau de syndique de la Chambre de la sécurité financière.

[7]           La plaignante a fait également entendre G.G. et son époux R.G., les deux consommateurs concernés par la police d’assurance souscrite avec l’intimé, ainsi que l’expert André Münch, spécialiste en documents.

[8]           Ce n’est que lors de la visite du représentant qui remplaçait l’intimé que les consommateurs ont eu connaissance des gestes posés par ce dernier.

[9]           Celui-ci a contrefait, ou a permis à un tiers de contrefaire les signatures de G.G. Il a de plus signé à titre de témoin, hors la présence de sa cliente G.G., sur différents documents, dont le plan de paiement modifié et l’aperçu de la police d’assurance.

[10]        L’expert a confirmé que les signatures en litige n’étaient pas celles de la cliente G.G., sans pour autant pouvoir conclure que l’auteur pouvait être l’intimé, ou même l’époux de la consommatrice.

[11]        R.G. a témoigné n’avoir jamais signé le nom de son épouse.

[12]        L’intimé pour sa part n’a pas témoigné.

[13]        Toutefois, il a déposé un certificat médical attestant de son incapacité de travailler du 18 octobre au 19 novembre inclusivement ainsi qu’une lettre de son employeur, la Financière Manuvie, mettant fin à son contrat de travail en date du 20 juin 2012.

[14]        L’intimé bénéficiait, à compter du 25 juin 2012, du maintien de son revenu et ce, jusqu’à ce qu’il trouve un nouvel emploi, sans toutefois dépasser le maximum de 14 semaines, soit jusqu’au 1er octobre 2012.

[15]        Entre temps, l’intimé a fourni, au soutien d’une demande d’assurance invalidité, des certificats médicaux à Financière Manuvie, qui a refusé sa demande d’assurance invalidité au motif qu’il n’avait pas démontré son invalidité totale. En date du 30 octobre 2012, cette décision faisait l’objet d’une troisième demande de révision, laquelle est toujours en suspens. Si cette troisième demande était refusée, l’intimé aurait pour seul revenu des prestations d’assurance emploi.

REPRÉSENTATIONS DES PARTIES SUR SANCTION

LA PLAIGNANTE

[16]        Le procureur de la plaignante a débuté en rappelant le contexte des infractions.

[17]        En 1998, au moment de leur rencontre avec l’intimé, G.G. détenait deux assurances vie, une de 15 000 $ sur la vie de son époux et une de 10 000 $ sur la sienne, toutes deux souscrites auprès de Sun Life ou autres compagnies d’assurance fusionnées avec celle-ci.

[18]        Les consommateurs vivaient sur un budget modeste et possédaient des connaissances limitées en assurance.

[19]        En mai 2000, par l’entremise de l’intimé, madame a souscrit une assurance additionnelle de 17 000 $ sur la vie de son époux R.G., avec la compagnie AIG (P-12). La prime mensuelle pour cette police était de 55,42 $.

[20]        Étant donné la situation financière limitée des consommateurs, un plan de paiement de primes modifié (PPM) a été complété de sorte que la prime de 42,49 $ payable pour le maintien en vigueur de la police de 15 000 $ a été payée à même la caisse d’accumulation de ladite police.

[21]        Une première demande PPM, complétée en mai 2000, a été refusée par l’assureur, car l’aperçu de l’avenir de la police (illustration) n’avait pas été soumis aux consommateurs.

[22]        L’intimé a complété une deuxième demande en juin 2000 qui a été acceptée de sorte que le plan de paiement a été mis en vigueur dès juillet 2000 (P-14, P-15 et P-16).

[23]        Or, l’intimé a contrefait, ou permis à un tiers de contrefaire, la signature de G.G. sur les deux demandes de PPM. En plus, il a signé comme témoin de la signature de sa cliente, hors la présence de celle-ci.

[24]        En 2008, l’intimé ayant quitté la compagnie Sun Life, un nouveau représentant a été assigné au dossier des clients. Il les a rencontrés et informés que des décisions devaient être prises, étant donné qu’en fonction du PPM, la police d’assurance prendrait fin dans les douze mois suivants.

[25]        G.G. a expliqué au nouveau représentant qu’elle croyait que la prime de 55,42 $ qu’elle payait couvrait les deux assurances, soit celle de 15 000 $ qu’elle détenait auparavant et celle de 17 000 $ contractée avec l’intimé en 2000.

[26]        G.G., invitée à se prononcer sur les demandes de PPM, aperçus ou illustrations, sur lesquels apparaissait sa signature, a indiqué qu’il ne s’agissait pas de la sienne (P‑14, P-15 et P-16).

[27]        Sur réception des déclarations assermentées de G.G. le confirmant, Sun Life lui a remboursé 4 000 $ équivalant à la caisse d’accumulation épuisée par le PPM.

[28]        Ensuite, le procureur de la plaignante a mentionné les facteurs aggravants suivants :

a)     La gravité objective des infractions;

b)     L’atteinte à l’image de la profession;

c)     La vulnérabilité des consommateurs qui avaient peu de connaissance en assurance, des moyens financiers limités et une entière confiance en l’intimé;

d)     L’existence de préméditation de l’intimé qui a rempli une première demande et une seconde suite au refus de la première par la compagnie;

e)     L’absence d’honnêteté de l’intimé qui a fourni une version trompeuse à l’enquêteur, ajoutant même que la consommatrice avait signé devant lui les trois formulaires, ce qui rend sa collaboration à l’enquête discutable;

f)      La répétition par l’intimé du geste de contrefaçon ou d’inciter un tiers à contrefaire à deux reprises au mois de mai et juillet 2000, ce qui laisse entrevoir un risque de récidive important.

[29]        Quant aux facteurs atténuants, il a identifié :

a)    L’absence d’antécédent disciplinaire;

b)    L’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité;

c)    L’inactivité professionnelle de l’intimé au moment des audiences sur sanction et sa situation financière incertaine (SI-3);

d)    Le temps écoulé depuis la commission des infractions en 2000;

e)    L’existence d’un seul événement, une seule transaction et un seul couple;

f)     L’absence de préjudice pécuniaire pour les consommateurs, étant donné le remboursement par Sun Life.

[30]        Pour le chef 1, concernant le défaut d’avoir pris les mesures nécessaires pour informer les consommateurs adéquatement du PPM, il a suggéré une amende de
5 000 $ en déposant à l’appui les décisions antérieures rendues par le comité dans Burns, Grenier et Côté[2] qu’il a pris soin de commenter.

[31]        Pour les chefs 2, 4 et 6 de contrefaçon de signature, il a recommandé une radiation temporaire de trois mois, à purger de façon concurrente à compter de la date de réinscription de l’intimé. Il a déposé au soutien les décisions Le Corvec, Blais et Mejlaoui[3] où des périodes de radiations semblables ont été imposées.

[32]        Pour chacun des chefs 3, 5 et 7 reprochant d’avoir signé comme témoin de la signature de la cliente hors sa présence, il a proposé d’imposer le paiement d’une amende de 5 000 $, pour un total de 15 000 $. Il a déposé au soutien les décisions rendues dans les affaires Ardouin, Baillargeon, Proteau et Tremblay[4].

[33]        Il a terminé en demandant la publication de la décision et la condamnation de l’intimé aux déboursés.

L’INTIMÉ

[34]        La procureure de l’intimé a fait valoir que les décisions rendues dans les affaires Blais[5] et Proteau[6], déposées par la plaignante, étaient le résultat de recommandations communes, et que par conséquent ces décisions ne pouvaient servir de référence au comité.

[35]        En ce qui concerne l’affaire Baillargeon[7], elle a souligné que le chef 2 était fort semblable au chef 1 en l’espèce. Or, l’amende ordonnée était de 3 000 $, et non de 5 000 $ comme réclamée par la plaignante. Quant à la durée de la radiation dans le cas de contrefaçon, elle a attiré l’attention du comité au paragraphe 65 de cette décision où le comité réfère à l’arrêt Brazeau[8] de la Cour du Québec qui prononça une radiation pour une période de deux mois.

[36]        De façon générale, elle a avancé que donner suite aux recommandations de la plaignante aurait pour effet de priver l’intimé d’exercer sa profession pendant trois mois en plus de devoir payer les amendes totales suggérées de 20 000 $.

[37]        Ensuite, elle a insisté sur les facteurs suivants qui militaient pour l’intimé :

a)     Son peu d’expérience au moment des infractions (trois ans d’exercice);

b)     L’absence de plainte portée contre lui depuis les gestes reprochés malgré qu’il ait maintenant acquis près de 15 ans d’expérience;

c)     L’absence de préjudice pécuniaire pour les consommateurs;

d)     L’existence d’un seul événement et une seule transaction;

e)     L’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité.

[38]        Elle a suggéré pour le chef 1 l’amende minimale de 2 000 $ en s’appuyant sur la décision rendue en 2009 dans l’affaire Gauthier[9] où une telle amende a été imposée.

[39]        Quant aux chefs 2, 4 et 6 relatifs à la contrefaçon de signature, elle a recommandé une radiation de deux mois, à purger de façon concurrente, signalant que la décision Brazeau[10] de la Cour du Québec, qui était citée dans la majorité des décisions du comité, établissait un délai moyen et non minimal. La période de radiation de deux mois pouvait être augmentée ou diminuée en fonction des facteurs aggravants et atténuants propres à chaque dossier comme dans l’affaire Bouchard[11], où le comité imposa une période de radiation d’un mois à l’intimé.

[40]        En ce qui concerne les chefs 3, 5 et 7, elle a invoqué l’affaire Paquin Varennes[12], y voyant un parallèle à faire avec le peu d’années d’expérience de l’intimée et le présent dossier.

[41]        Pour ces derniers chefs reprochant d’avoir signé comme témoin de la signature de la cliente hors de sa présence, elle a suggéré d’imposer une réprimande. Imposer une autre sanction pour ces chefs serait, à son avis, excessif puisqu’il s’agit des mêmes documents, des mêmes dates, des mêmes consommateurs que pour les chefs de contrefaçon de signature.

[42]        Elle a conclu en demandant au comité d’accorder à l’intimé un délai de douze mois pour le paiement des amendes et des débours.

RÉPLIQUE

[43]        Le procureur de la plaignante a rétorqué qu’il n’y avait pas dédoublement d’infractions. L’infraction d’avoir signé à titre de témoin hors la présence des clients constituait une infraction distincte. Ce faisant, l’intimé a privé l’assureur de sa possibilité de vérifier l’authenticité de la signature des consommateurs alors qu’il est en droit de faire confiance à son représentant lorsque celui-ci signe comme témoin de la signature de son client.

[44]       Il a terminé en disant que la décision Paquin Varennes se distinguait de la présente affaire en ce que la bonne foi de la représentante n’était pas en cause. Elle avait témoigné qu’elle s’était fiée à son adjointe qui l’avait assurée que la cliente avait signé.

ANALYSE ET MOTIFS

[45]        Conformément à l’article 154 du Code des professions, le comité consigne par écrit la décision sur culpabilité rendue séance tenante contre l’intimé donnant ainsi acte à l’enregistrement de son plaidoyer de culpabilité et le déclarant coupable sous chacun des sept chefs de la plainte portée contre lui.

[46]        Aussi, après avoir procédé à l’étude des différentes décisions que les parties lui ont soumises, le comité estime que les recommandations de la plaignante ne tiennent pas compte notamment de l’effet global des sanctions proposées.

[47]        L’employeur de l’intimé a mis fin à son contrat en juin 2012. L’intimé était sans revenu depuis le 1er octobre 2012 et toujours sans emploi lors de l’audience sur sanction.

[48]        Bien qu’il soit en révision de la décision de la compagnie d’assurance au sujet de prestation d’assurance invalidité, il vit une situation difficile financièrement.

[49]        Toutefois, les infractions reprochées sont objectivement graves.

[50]        Les renseignements transmis par l’intimé à G.G. n’étaient pas exacts et complets. G.G. avait compris que la caisse d’accumulation la dégageait de payer les primes d’une des assurances contractée préalablement et ce, pour toute sa vie. L’intimé ne lui a pas fourni tous les renseignements nécessaires pour faire ce choix. L’intimé ne lui a, de surcroît, jamais fait signer le formulaire pour le PPM et elle n’a jamais pris connaissance de l’aperçu établissant le sort de la police selon ce plan.

[51]        Les faits en l’espèce mettent sérieusement en doute la probité de l’intimé au moment des événements. Celui-ci a contrefait, ou a induit un tiers à contrefaire, la signature de sa cliente à trois reprises et, au surplus, a paraphé comme témoin de la signature de sa cliente hors sa présence, tout en sachant qu’il ne s’agissait pas de la sienne.

[52]        L’intimé a prémédité ses gestes, a continué de nier huit ans plus tard, lors de sa version des faits à l’enquêteur en 2009, ajoutant même que la cliente avait signé en sa présence. Or, tous les formulaires avaient été remplis à l’insu de sa cliente.

[53]        Les représentants doivent aussi être conscients que leur signature comme témoin de celle de leurs clients est importante et lourde de conséquences si faussement apposée car elle dégage ainsi l’assureur de vérifications supplémentaires. Cette façon de pratiquer menace directement la confiance de l’assureur envers le représentant.

[54]        Enfin, aucune preuve de regrets ou remords n’a été présentée formellement, l’intimé n’ayant pas témoigné devant le comité. Toutefois, au moment d’enregistrer son plaidoyer de culpabilité, l’intimé a indiqué qu’il regrettait les torts causés aux clients.

[55]        Le comité retient aussi que l’intimé n’avait que trois ans d’expérience au moment des événements.

[56]        Par conséquent, considérant tant les facteurs objectifs que subjectifs, aggravants qu’atténuants et l’individualisation de la sanction, afin d’éviter un effet global excessif, le comité condamnera l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $ sous chacun des chefs 1 et 3 pour un total de 10 000 $, et lui imposera une réprimande sous chacun des chefs 5 et 7 qui concernent le même événement.

[57]        Pour les chefs 2, 4 et 6 de contrefaçon, le comité estime que la préméditation de ces gestes par l’intimé et leur répétition justifient une période de radiation de trois mois sur chacun des chefs, à être purgée de façon concurrente afin de répondre au principe de dissuasion et d’exemplarité dont le comité doit tenir compte lors de la détermination de la sanction.  

[58]        Pour la détermination des sanctions, le comité a également considéré les déboursés qui comprennent les frais d’expert, auxquels l’intimé sera condamné, la règle voulant que celui qui succombe doive défrayer les frais.

[59]        Le comité ordonnera la publication de la décision.

[60]        Finalement, le comité donnera suite à la demande de l’intimé et lui accordera un délai de 18 mois, étant donné sa situation financière, pour le paiement des amendes et des déboursés.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé sous chacun des sept chefs d’accusation portés contre lui;

DÉCLARE l’intimé coupable sous chacun des sept chefs contenus à la plainte.

ET PROCÉDANT SUR SANCTION :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $ sous chacun des chefs d’accusation 1 et 3 pour un total de 10 000 $;

ORDONNE, sous chacun des chefs d’accusation 2, 4 et 6, la radiation temporaire de l’intimé comme membre de la Chambre de la sécurité financière et ce, pour une période de trois mois, à être purgée de façon concurrente;

IMPOSE à l’intimé, sur chacun des chefs d’accusation 5 et 7, une réprimande;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier, aux frais de l’intimé, un avis de la présente décision dans un journal circulant dans le lieu où ce dernier a eu son domicile professionnel et dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément aux dispositions de l’alinéa 5 de l’article 156 du Code des professions (L.R.Q. c. C-26);

CONDAMNE l’intimé au paiement des débours, y compris les frais d’expert, conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions
(L.R.Q., c. C-26);

ACCORDE à l’intimé un délai de 18 mois pour le paiement des dites amendes et des débours, lequel devra s’effectuer au moyen de versements mensuels égaux, sous peine de déchéance du terme et sous peine de non-renouvellement de son certificat émis par l’Autorité des marchés financiers dans toutes les disciplines où il lui est permis d’agir.

 

 

 

(s) Janine Kean

Me Janine Kean

Présidente du comité de discipline

 

 

(s) Louis Giguère

M. Louis Giguère, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

 

(s) Sylvain Jutras

M. Sylvain Jutras, A.V.C., Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

Me Mathieu Cardinal

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Ioana Moïse

GINGRAS VALLERAND BARMA LAROCHE AMYOT

Procureurs de la partie intimée

 

Dates d’audience :

Les 6 et 7 novembre 2012

 

COPIE CONFORME À L'ORIGINAL SIGNÉ



[1] Par lettre datée du 23 novembre 2012, la partie plaignante confirma demander l’amendement au motif initialement invoqué par la partie intimée.

[2] Lévesque c. Norman Burns, CD00-0731, décision sur sanction du 1er mars 2010; Thibault c. Henri-Paul Grenier, CD00-0727, décision sur culpabilité du 30 avril 2009 et décision sur sanction du 14 décembre 2009; Rioux c. Alain Côté, CD00-0633, décision sur culpabilité du 30 mai 2007 et décision sur sanction du 17 janvier 2008.

[3] Champagne c. Dominique Le Corvec, CD00-0776, décision sur culpabilité du 31 août 2010 et décision sur sanction du 31 mai 2011; Lelièvre c. Marc Blais, CD00-0838, décision sur culpabilité et sanction du 18 juillet 2011; Champagne c. Abdesselam Mejlaoui, CD00-0898, décision sur culpabilité et sanction du 27 septembre 2012.

[4] Champagne c. Yvan Ardouin, CD00-0864, décision sur culpabilité et sanction du 14 février 2012; Lévesque c. Marcel Baillargeon, CD00-0777, décision sur culpabilité du 25 mars 2010 et décision sur sanction du 20 septembre 2010; Champagne c. Martin Proteau, CD00-0880, décision sur culpabilité et sanction du 12 avril 2012; Champagne c. Sébastien Tremblay, CD00-0865, décision sur culpabilité et sanction du 14 février 2012.

[5] Lelièvre c. Marc Blais, préc., note 3.

[6] Champagne c. Martin Proteau, préc., note 4.

[7] Lévesque c. Marcel Baillargeon, préc., note 4.

[8] Me Micheline Rioux c. Maurice Brazeau, 2006 QCCQ 11715 (CanLII), décision de la Cour du Québec du 7 novembre 2006.

[9] Thibault c. Pierre-Jacques Gauthier, CD00-0660, décision sur culpabilité du 20 juillet 2009 et décision sur sanction du 7 décembre 2009.

[10] Me Micheline Rioux c. Maurice Brazeau, préc. note 8.

[11] Champagne c. Jeannot Bouchard, CD00-0876, décision sur culpabilité et sanction du 15 février 2012.

[12]   Lelièvre c. Valéry Paquin Varennes, CD00-0873, décision sur culpabilité du 29 mars 2012 et décision sur sanction du 27 août 2012.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.