Chambre de la sécurité financière (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0929

 

DATE :

16 janvier 2013

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

Mme Ginette Racine, A.V.C.

Membre

M. Claude Trudel, A.V.A.

Membre

______________________________________________________________________

 

NATHALIE LELIÈVRE, ès qualités de syndique adjointe de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

LOUISE DEMERS, conseillère en sécurité financière et représentante de courtier en épargne collective (no de certificat 109367, BDNI 1515621)

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

 

[1]           Le 30 novembre 2012, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni au siège social de la Chambre sis au 300, rue Léo-Pariseau, bureau 2600, Montréal, et a procédé à l'audition d’une plainte disciplinaire portée contre l’intimée ainsi libellée :

LA PLAINTE

 

« 1.       À Laval, le ou vers le 16 décembre 2009, l’intimée, a signé, à titre de témoin de la signature de M.B. et de L.D.S., les formulaires de proposition relative aux fonds distincts pour les comptes [...] et [...] Catégorie Plus de Empire Vie hors la présence de M.B. et de L.D.S., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

 

2.          À Laval, le ou vers le 16 décembre 2009, l’intimée a signé, à titre de « conseiller » les formulaires de proposition relative aux fonds distincts pour les comptes [...] et [...] Catégorie Plus, de Empire Vie sans avoir agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3). »

PLAIDOYER DE CULPABILITÉ

[2]           D’entrée de jeu, l’intimée, qui était accompagnée de son procureur, enregistra un plaidoyer de culpabilité à l’endroit de chacun des deux (2) chefs d’accusation contenus à la plainte.

[3]           Après l’enregistrement de son plaidoyer, les parties présentèrent au comité leurs preuve et représentations respectives sur sanction.

PREUVE DES PARTIES

[4]           Alors que la plaignante versa au dossier, en plus de l’attestation de droit de pratique (P-1), une preuve documentaire cotée SP-1 et SP-2, elle ne fit entendre aucun témoin.

[5]           Quant à l’intimée, elle déposa un document qui fut coté sous la cote I-1.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[6]           La plaignante, par l’entremise de son procureur, débuta ensuite ses représentations en mentionnant au comité que les parties avaient convenu de lui soumettre des « recommandations communes » sur sanction.

[7]           Elle affirma que celles-ci s’étaient entendues pour proposer au comité de condamner l’intimée sous le premier chef au paiement d’une amende de 5 000 $ et sous le second chef de lui imposer une réprimande. Elle indiqua qu’elles avaient de plus convenu de recommander qu’elle soit condamnée au paiement des déboursés.

[8]           Puis, à l’aide des pièces déposées, elle exposa le contexte factuel rattaché aux infractions.

[9]           Tout en signalant la gravité de celles-ci, elle identifia néanmoins les facteurs atténuants suivants :

-           l’absence d’antécédents disciplinaires de l’intimée;

-           sa collaboration entière avec l’enquêteur du bureau de la syndique;

-           la reconnaissance de ses fautes et l’enregistrement par cette dernière à la première occasion d’un plaidoyer de culpabilité;

-           l’absence d’intention malicieuse ou malhonnête;

-           un risque de récidive faible sinon nul, l’intimée ayant pris des mesures pour ne pas répéter les infractions qui lui sont reprochées;

-           l’absence de préjudice subi par les consommateurs en cause;

-           deux (2) chefs d’accusation découlant d’un seul et même événement;

signalant qu’avant d’en arriver aux suggestions précitées, elle avait « mis en balance » d’une part la gravité objective des fautes et, d’autre part, les facteurs atténuants mentionnés.

[10]        Elle termina ses représentations en déposant, au soutien de ses recommandations, la décision rendue par le comité dans l’affaire Michel Côté[1].

[11]        Dans cette affaire le représentant, reconnu coupable d’avoir faussement signé comme témoin à la signature de ses clients, a été condamné au paiement d’une amende de 5 000 $ sous l’un des chefs et à une réprimande sous les autres chefs.

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉE

[12]        Le procureur de l’intimée entreprit ses représentations en spécifiant que sa cliente, quoique fautive, avait agi en l’absence d’intention malicieuse ou malveillante.

[13]        Il invoqua la bonne foi de cette dernière ainsi que sa volonté d’agir à l’avenir en toute conformité aux lois et aux règlements. À cet égard, il expliqua qu’elle avait pris des « mesures correctives » pour éviter de répéter les infractions qui lui ont été reprochées.

[14]        Ensuite, après avoir mentionné qu’elle avait dix-sept (17) ans d’expérience et aucun antécédent disciplinaire, il souligna sa coopération exemplaire avec les autorités, signalant que sa collaboration se concluait par l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité aux deux (2) chefs d’accusation contenus à la plainte.

[15]        Il termina en déclarant que sa cliente, au passé irréprochable, jouissait d’une excellente réputation au sein de la profession et que les risques de récidive dans son cas étaient nuls.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[16]        L’intimée a dix-sept (17) ans d’expérience à titre de représentante et aucun antécédent disciplinaire.

[17]        Sa probité ou sa bonne foi ne sont aucunement en cause.

[18]        Elle a collaboré de façon exemplaire à l’enquête de la syndique. Elle lui a admis sans réticence tous les faits à la source des infractions qui lui sont reprochées.

[19]        À la première occasion, elle a enregistré un plaidoyer de culpabilité aux deux (2) chefs d’accusation portés contre elle.

[20]        Malgré que deux (2) chefs d’accusation aient été portés, ses fautes sont en réalité rattachées à un seul et même événement.

[21]        Elle a signé, à titre de « conseiller » ainsi qu’à titre de témoin à la signature des conjoints en cause, les formulaires de propositions relatives aux fonds distincts souscrits par ces derniers, et ce, sans avoir été témoin de leur signature et sans avoir agi comme leur représentante. Elle a signé au côté de la signature d’un autre représentant.

[22]        Selon ses affirmations, si elle a apposé sa signature sur lesdits documents ce n’était qu’à titre de directrice de sa succursale, son objectif étant d’attester qu’elle s’était bien assurée que les demandes par ailleurs déjà signées par un autre représentant étaient conformes.

[23]        C’est donc à titre de responsable du cabinet qu’elle a apposé sa signature sur les documents et non à titre de représentante ou de « conseillère » des clients. Elle aurait toutefois négligé de prêter attention à l’endroit où elle apposait ses signatures et aurait ainsi commis les infractions qui lui sont reprochées.

[24]        Bien qu’elle ait agi sans intention malveillante, elle a néanmoins commis d’indiscutables fautes de négligence.

[25]        Au titre des sanctions, les parties ont conjointement recommandé qu’il lui soit imposé le paiement d’une amende de 5 000 $ sous le premier chef ainsi qu’une réprimande sous le second et qu’elle soit condamnée au paiement des déboursés.

[26]        La Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Douglas[2] a clairement indiqué la voie à suivre lorsque les parties sont parvenues à s’entendre pour présenter au tribunal des « recommandations conjointes ».

[27]        Elle a indiqué que celles-ci ne devraient être écartées que si le tribunal les juge inappropriées, déraisonnables, contraires à l’intérêt public ou est d’avis qu’elles sont de nature à discréditer l’administration de la justice[3].

[28]        En l’instance, tel n’est pas le cas. Le comité est plutôt d’avis que dans le contexte particulier décrit par les parties et après considération des éléments tant objectifs que subjectifs qui lui ont été exposés, les sanctions proposées sont justes et raisonnables.

[29]        Le comité donnera donc suite aux recommandations des parties.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité enregistré par l’intimée à l’endroit de chacun des deux (2) chefs d’accusation mentionnés à la plainte;

DÉCLARE l’intimée coupable de chacun des deux (2) chefs d’accusation (1 et 2) contenus à la plainte;

ET PROCÉDANT SUR SANCTION :

Sous le chef numéro 1 :

CONDAMNE l’intimée au paiement d’une amende de 5 000 $;

Sous le chef numéro 2 :

IMPOSE à l’intimée une réprimande;

CONDAMNE             l’intimée au paiement des déboursés, y compris les frais d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, L.R.Q. chap. C-26.

 

 

 

 

 

 

 

 

(s) François Folot

Me FRANÇOIS FOLOT

Président du comité de discipline

 

(s) Ginette Racine

Mme GINETTE RACINE, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

(s) Claude Trudel

M. CLAUDE TRUDEL, A.V.A.

Membre du comité de discipline

 

 

 

 

Me Alain Galarneau

 

POULIOT, CARON, PRÉVOST, BELISLE, GALARNEAU

 

Procureurs de la partie plaignante

 

 

 

Me Maxime Gauthier

 

Procureur de la partie intimée

 

 

 

Date d’audience :

30 novembre 2012

COPIE CONFORME À L'ORIGINAL SIGNÉ



[1]     Caroline Champagne c. Michel Côté, CD00-0837, décision sur culpabilité et sanction en date du 5 avril 2011.

[2]     R. c. Douglas, 2002, 162 CCC 3rd, 37.

[3]     Ce principe a été repris par le Tribunal des professions notamment dans Maurice Malouin c. Maryse Laliberté, 2002 QCTP 15 CanLII.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.