Chambre de la sécurité financière (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0692

 

DATE :

30 juillet 2008

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

Me Bernard Meloche, LL.B.

Membre

M. Gilles Lavoie

Membre

______________________________________________________________________

 

Mme LÉNA THIBAULT, ès qualités de syndic

Partie plaignante

c.

MICHEL PETIT

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

 

[1]           Le 14 mai 2008, à l'Hôtel Delta de Sherbrooke, 2685, rue King Ouest, à Sherbrooke, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni et a procédé à l'audition d'une plainte portée contre l'intimé ainsi libellée :

LA PLAINTE

« À L’ÉGARD DE ANNE FELTEAU

1.          À Sherbrooke, le ou vers le 14 novembre 2000, l’intimé MICHEL PETIT, alors qu’il faisait souscrire sa cliente Anne Felteau à une proposition pour l’émission d’une police d’assurance-vie universelle portant le numéro 04-3904010-6 sur la vie d’Élisabeth Felteau auprès de l’Industrielle-Alliance, a fait défaut, avant de remplir la proposition d’assurance, d’analyser avec le preneur ou l’assuré ses besoins d’assurance et, ce faisant, l’intimé a contrevenu à l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (R.Q.c. D-9.2, r.1.4.001) et à l’article 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2);

2.          À Sherbrooke, le ou vers le 4 mai 2000, l’intimé MICHEL PETIT, alors qu’il faisait souscrire à sa cliente, Anne Felteau, une proposition pour l’émission d’une police d’assurance-vie universelle auprès de l’Industrielle-Alliance d’un capital de 100 000 $ portant le numéro 04-3866775-0, a fait défaut de subordonner son intérêt personnel à celui de sa cliente et a usé d’explications trompeuses afin de favoriser la vente et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 16, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 1.01), adopté en vertu de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2);

3.          À Sherbrooke, le ou vers le 4 mai 2000, l’intimé MICHEL PETIT, alors qu’il faisait souscrire à sa cliente, Anne Felteau, une proposition pour l’émission d’une police d’assurance vie universelle auprès de l’Industrielle-Alliance d’un capital de 100 000 $ portant le numéro 04-3866775-0, a fait défaut, avant de remplir la proposition d’assurance, d’analyser avec le preneur ou l’assuré ses besoins d’assurance et, ce faisant, l’intimé a contrevenu à l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (R.Q.c. D-9.2, r.1.4.001) et 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2);

À L’ÉGARD DE JACQUELINE BOISVERT

4.          À Sherbrooke, le ou vers le 21 août 2000, l’intimé MICHEL PETIT, alors qu’il faisait souscrire sa cliente Jacqueline Boisvert, à une proposition pour l’émission d’une police d’assurance-vie universelle portant le numéro 04-3884959-9 sur la vie de Simon Felteau auprès de l’Industrielle-Alliance, a fait défaut, avant de remplir la proposition d’assurance, d’analyser avec le preneur ou l’assuré ses besoins d’assurance et, ce faisant, l’intimé a contrevenu à l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (R.Q., c. D-9.2, r.1.4.001) et 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2);

5.          À Sherbrooke, le ou vers le 2 juin 1998, l’intimé MICHEL PETIT, alors qu’il faisait souscrire à sa cliente, Jacqueline Boisvert, une proposition pour l’émission d’une police d’assurance-vie universelle Topaz portant le numéro 04-3598043-1 auprès de l’Industrielle-Alliance, a fait défaut d’agir envers sa cliente en conseiller consciencieux et de lui fournir des informations complètes et objectives sur la nature du produit qu’il lui faisait souscrire, notamment en lui laissant croire que la police était payable en 7 ans et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 133, 134, 135, 141 et 157(2) du Règlement du conseil des assurances de personnes sur les intermédiaires de marché en assurances de personnes (R.R.Q., c. i-15.1, r. 0.5), adopté en vertu de la Loi sur les intermédiaires de marché (L.R.Q., c. 48);

6.          À Sherbrooke, le ou vers le 10 juin 1999, l’intimé MICHEL PETIT, alors qu’il modifiait le montant de la protection d’une police d’assurance-vie universelle auprès de l’Industrielle-Alliance d’un capital de 25 000 $ portant le numéro 04-3598043-1 à un capital de 100 000 $, a fait défaut de subordonner son intérêt personnel à celui de sa cliente Jacqueline Boisvert et a usé d’informations trompeuses afin de favoriser une vente et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 140 et 157(2) du Règlement du conseil des assurances de personnes sur les intermédiaires de marché en assurances de personnes (RRQ., c. i-15.1, r. 0.5), adopté en vertu de la Loi sur les intermédiaires de marché (L.R.Q., c. 48);

7.          À Sherbrooke, entre le 2 juin 1998 et le 27 janvier 2006, l’intimé MICHEL PETIT, a fait défaut de s’assurer que le fonds de capitalisation des placements de la police de l’Industrielle-Alliance portant le numéro 04-3598043-1 respectait le mandat de la cliente Jacqueline Boisvert qui désirait effectuer des placements sécuritaires, et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 128, 132 et 145 du Règlement du conseil des assurances de personnes sur les intermédiaires de marché en assurances de personnes (RRQ., c. i-15.1, r. 0.5), adopté en vertu de la Loi sur les intermédiaires de marché (L.R.Q., c. 48) et à l’article 24 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 1.01), adopté en vertu de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D 9.2); »

[2]           D'entrée de jeu, l'intimé enregistra un plaidoyer de culpabilité sur chacun des sept (7) chefs d'accusation contenus à la plainte portée contre lui.

[3]           Les parties procédèrent ensuite à présenter au comité leurs preuve et représentations sur sanction.

LA PREUVE DES PARTIES

[4]           Alors que la plaignante ne fit aucune preuve, l'intimé choisit de témoigner.

[5]           Il déclara avoir quitté la profession en 2005 et être retourné à son occupation antérieure.

[6]           Il relata avoir été de 2003 à 2005 en arrêt de travail à la suite d'un « épuisement professionnel » avec la conséquence qu'il se sentirait encore aujourd'hui « plutôt serré » financièrement parlant.

[7]           Ayant eu l'occasion, par l'entremise de son avocat, de discuter d'éventuelles sanctions avec la plaignante, il se déclara en accord avec les suggestions qui allaient être mises de l'avant par celle-ci. Il réclama cependant que le comité lui accorde un délai d'un an et demi (1 ½) à deux (2) ans tant pour le paiement des amendes qui lui seraient imposées que pour l'acquittement des déboursés.

[8]           Les parties entreprirent ensuite leurs représentations sur sanction.

LES REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[9]           La plaignante, par l'entremise de son procureur, proposa au comité, tout en indiquant qu'il s'agissait de suggestions « communes », l'imposition des sanctions suivantes :

Chefs d'accusation numéros 1, 3 et 4

[10]        La condamnation de l'intimé sur chacun de ces chefs au paiement d'une amende de 1 500 $ (4 500 $ au total).

Chefs d'accusation numéros 2 et 6

[11]        La condamnation de l'intimé sur chacun de ces chefs à une radiation temporaire de dix-huit (18) mois à être purgée de façon concurrente.

Chefs d'accusation numéros 5 et 7

[12]        La condamnation de l'intimé sur chacun de ces chefs à une radiation temporaire de six (6) mois à être purgée de façon concurrente.

[13]        Elle conclut en produisant à l'appui de ses suggestions un cahier d'autorités et en recommandant que l'intimé soit condamné au paiement des déboursés.

[14]        Au plan du délai réclamé par l'intimé pour le paiement des amendes et l'acquittement des déboursés, elle souligna que tout au plus serait-elle en accord avec l'octroi d'un délai de trois (3) mois, tout délai supérieur lui semblant « déraisonnable » dans les circonstances.

REPRÉSENTATIONS DE L'INTIMÉ

[15]        L'intimé débuta ses représentations en confirmant, par l'entremise de son procureur, son accord aux suggestions « communes » présentées par la plaignante sous réserve de sa demande pour qu'un délai d'une année et demie (1 ½) à deux (2) années lui soit accordé pour le paiement des amendes et des déboursés.

[16]        Il indiqua que le paiement des amendes suggérées par la plaignante et l'acquittement des déboursés allaient représenter pour lui un lourd fardeau. Il invoqua à cet égard sa situation financière délicate à la suite de la période « d'épuisement professionnel » vécue de 2003 à 2005.

[17]        Il mentionna ensuite, tel qu'il en avait témoigné, avoir choisi il y a quelque temps de quitter la profession, affirmant que dans de telles circonstances il y avait peu ou pas de risque de récidive de sa part.

[18]        Il signala son absence d'antécédents disciplinaires en quinze (15) ans d'exercice de la profession et la présentation d'un plaidoyer de culpabilité à l'égard de tous les chefs d'accusation portés contre lui.

[19]        Il termina en soulignant l'absence ou le peu d'importance du préjudice causé aux clients en cause et en produisant à son tour certaines autorités.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[20]        L'intimé exerce sa profession depuis environ quinze (15) ans et n'a aucun antécédent disciplinaire.

[21]        Il a admis ses fautes et a plaidé coupable à chacun des chefs d'accusation portés contre lui.

[22]        Si l'on se fie à ses représentations (qui n'ont pas été contredites par la plaignante), les consommateurs en cause auraient subi peu de conséquences préjudiciables de ses actes.

[23]        Enfin, selon ses déclarations, il aurait définitivement abandonné la profession si bien qu'il est loisible de penser que les risques de récidive pourraient être dans son cas inexistants.

Chefs d'accusation numéros 1, 3 et 4

[24]        À ces chefs d'accusation, l'intimé s'est reconnu coupable du défaut, avant de remplir les propositions d'assurance en cause, d'analyser avec ses clients leurs besoins d'assurance en contravention notamment des dispositions de l'article 6 du Règlement sur l'exercice des activités des représentants.

[25]        La « suggestion commune » des parties de condamner l'intimé au paiement d'une amende de 1 500 $ sur chacun de ces chefs, compte tenu notamment de la globalité des amendes qui lui seront ainsi imposées, apparaît, dans les circonstances propres à cette affaire, juste et appropriée.

[26]        Le comité condamnera donc l'intimé au paiement d'une amende de 1 500 $ sur chacun de ces chefs.

Chefs d'accusation numéros 2 et 6

[27]        À ces chefs, l'intimé a reconnu sa culpabilité à l'utilisation d'explications trompeuses afin de favoriser la vente de polices d'assurance-vie universelles et au défaut de subordonner alors son intérêt personnel à celui de ses clientes.

[28]        Il s'agit d'infractions d'une gravité objective importante qui vont au cœur de la profession. Elles dénotent une conduite professionnelle défaillante teintée d'une absence de probité et de transparence. Aussi le comité est d'avis que les recommandations « conjointes » des parties sur ces chefs sont raisonnables et appropriées.

[29]        Le comité imposera donc à l'intimé, sur chacun desdits chefs, une radiation temporaire de dix-huit (18) mois à être purgée de façon concurrente.

Chefs d'accusation numéros 5 et 7

[30]        À ces chefs, l'intimé s'est reconnu coupable dans le premier cas d'avoir transmis à sa cliente une information incomplète et trompeuse et, dans le second, de ne pas s'être assuré que le produit qu'il lui proposait respecte le mandat de cette dernière.

[31]        Après analyse, le comité est d'avis qu'il n'y a pas lieu de s'éloigner des « recommandations communes » des parties. Elles lui apparaissent en l'espèce adaptées aux infractions et de nature à assurer adéquatement la protection du public.

[32]        Le comité imposera donc en conséquence à l'intimé une radiation temporaire de six (6) mois sur chacun de ces chefs à être purgée de façon concurrente.

[33]        Par ailleurs, l'intimé sera également condamné au paiement des déboursés et le comité, en l'absence de la présentation de circonstances qui auraient pu le justifier d'agir autrement, ordonnera la publication de la décision.

[34]        Enfin, relativement à la demande de l'intimé pour que lui soit accordé un délai de un an et demi (1 ½) à deux (2) ans pour le paiement des amendes et l'acquittement des déboursés, le comité ne croit pas qu'il serait approprié qu'il souscrive entièrement à celle-ci.

[35]        Compte tenu de la preuve et des arguments qui lui ont été présentés, le comité est plutôt d'avis, considérant notamment la période « d'épuisement professionnel » qu'a vécue l'intimé et les conséquences que celle-ci a pu avoir sur sa situation financière personnelle, de lui accorder un délai de six (6) mois de la date de la présente décision pour le paiement tant des amendes que des déboursés.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l'intimé sur tous et chacun des sept (7) chefs d'accusation contenus à la plainte;

DÉCLARE l'intimé coupable sur chacun des sept (7) chefs d'accusation contenus à la plainte;

ET, STATUANT SUR LA SANCTION :

IMPOSE à l'intimé sur chacun des chefs 1, 3 et 4 le paiement d'une amende de 1 500 $ (total 4 500 $);

IMPOSE à l'intimé sur chacun des chefs 2 et 6 une radiation temporaire de dix-huit (18) mois à être purgée de façon concurrente;

IMPOSE à l'intimé sur chacun des chefs 5 et 7 une radiation temporaire de six (6) mois à être purgée de façon concurrente;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier, aux frais de l'intimé, un avis de la présente décision dans un journal circulant dans la localité où l'intimé avait son domicile professionnel;

CONDAMNE l'intimé au paiement des déboursés et des frais d'enregistrement conformément aux dispositions de l'article 151 du Code des professions.

ACCORDE à l'intimé un délai de six (6) mois de la date de la présente décision pour le paiement des amendes et l'acquittement des déboursés.

 

 

(s) François Folot

Me FRANÇOIS FOLOT, avocat

Président du comité de discipline

 

(s) Bernard Meloche

Me BERNARD MELOCHE, LL.B.

Membre du comité de discipline

 

(s) Gilles Lavoie

M. GILLES LAVOIE

Membre du comité de discipline

 

 

Me Donald Béchard

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Geneviève Chamberland

HEENAN BLAIKIE

Procureurs de la partie intimée

 

Date d’audience :

14 mai 2008

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.