Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0877

 

DATE :

8 novembre 2012

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LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

M. Denis Petit, A.V.A., Pl. Fin.

Membre

M. Robert Archambault, A.V.A.

Membre

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CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

MARK BOUCHER, conseiller en sécurité financière, conseiller en assurance et rentes collectives et représentant de courtier en épargne collective (numéro de certificat 154660 et numéro BDNI 1252451)

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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[1]           Le 13 juin, à la Commission des lésions professionnelles sise au 500, boulevard René-Lévesque Ouest, 18e étage, Montréal, ainsi que les 13 et 18 septembre 2012, au siège social de la Chambre sis au 300, rue Léo-Pariseau, bureau 2600, Montréal, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s’est réuni et a procédé à l'audition d'une plainte disciplinaire portée contre l'intimé ainsi libellée :

LA PLAINTE

« 1.        À Montréal, le ou vers le 15 décembre 2008, l’intimé a faussement confirmé avoir vu la cliente M.S. signer le formulaire « Electronic insurance application declaration and authorization » nº [...], contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 3);

2.          À Montréal, le ou vers le 15 décembre 2008, l’intimé a indiqué une fausse adresse pour sa cliente M.S. sur la proposition d’assurance-vie nº [...] auprès de Sun Life du Canada, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r. 3). »

[2]           D’entrée de jeu, le 13 juin 2012, la plaignante déposa au dossier une preuve documentaire qui fut cotée P-1 à P-5.

[3]           Par la suite, après qu’elle eut amendé le chef numéro 2 de façon à ce que les termes « a indiqué une fausse adresse pour sa cliente M.S. » soient remplacés par « a indiqué un faux lieu de signature par sa cliente M.S. », l’intimé admit les éléments matériels des infractions qui lui étaient reprochées, et ce, tant aux chefs d’accusation 1 que 2 amendé et fut déclaré coupable de ceux-ci par le comité.

[4]           L’audition sur sanction fut alors reportée au 13 septembre puis au 18 septembre 2012.

LA PREUVE

[5]           Le 18 septembre 2012, les parties avisèrent le comité qu’elles n’entendaient pas déposer d’éléments de preuve additionnels au dossier.

[6]           Elles soumirent ensuite leurs représentations sur sanction.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[7]           La plaignante, par l’entremise de son procureur, débuta ses représentations en indiquant qu’elle recommandait au comité, au plan de la sanction, de condamner l’intimé sous le premier chef au paiement d’une amende de 5 000 $ et sous le second chef, compte tenu de la connexité entre les chefs 1 et 2, de lui imposer une réprimande.

[8]           Elle identifia ensuite les facteurs aggravants ainsi qu’atténuants suivants :

Facteur aggravant :

-               la gravité objective des infractions reprochées, l’intimé ne pouvant ignorer qu’il contournait les règles et qu’il n’était pas autorisé à agir comme il l’a fait;

Facteurs atténuants :

-               des infractions remontant à près de quatre (4) ans;

-               la constatation que l’intimé a cessé d’exercer la profession en juin 2011 et a cessé de détenir un certificat à la fin de la même année ou au début de 2012;

-               son absence d’antécédents disciplinaires;

-               son entière collaboration à l’enquête de la plaignante;

-               l’absence de bénéfice financier pour ce dernier, la police d’assurance souscrite par la cliente n’ayant jamais été émise, cette dernière ayant fait défaut de se soumettre à l’examen médical requis;

-               l’absence chez l’intimé d’intentions malveillantes, ce dernier ayant agi strictement pour « aider » une cliente qui, selon ses affirmations, allait venir à Montréal et se soumettre alors à l’examen médical requis;

-               le souci de l’intimé de bien s’assurer que la signature apposée au document était bien celle de la cliente, et ce, malgré qu’il ne l’ait pas vu signer;

-               une faute isolée tout au long d’une carrière sans tache.

[9]           Elle termina ses représentations en déposant, au soutien de ses suggestions, un cahier d’autorités. Elle réclama enfin la condamnation de l’intimé au paiement des déboursés, signalant toutefois qu’elle n’avait aucune objection, si l’intimé le réclamait, à ce que, pour le paiement de l’amende et des frais, un délai d’une année soit accordé à ce dernier.

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

[10]        L’intimé débuta ses représentations en invoquant qu’il avait agi strictement dans le but de rendre service à une consommatrice dont le père était l’ami de son père.

[11]        Il exposa que ladite cliente devait venir au Québec pour y subir un examen médical. Elle aurait toutefois fait défaut d’agir tel que convenu et sa demande d’assurance serait tombée en déchéance.

[12]        Il affirma que cette dernière avait réclamé que les documents soient « faits » à Montréal parce que, lui aurait-elle déclaré, elle avait l’intention d’y déménager.

[13]        Il aurait strictement voulu aider ou satisfaire la cliente, contenter le père de cette dernière et ainsi faire plaisir au sien. Il n’aurait été animé d’aucune forme d’intention malveillante.

[14]        Il rappela ensuite qu’il avait offert son entière coopération aux autorités et avait entièrement collaboré à l’enquête de la plaignante.

[15]        Il mentionna qu’à son avis le condamner au paiement d’une amende de 5 000 $ serait lui imposer une sanction exagérée.

[16]        Il termina en signalant que depuis le mois de juin 2011, il ne travaillait plus dans le domaine de la distribution de produits d’assurances et/ou financiers, qu’il détenait maintenant un emploi auprès d’un organisme sans but lucratif voué à l’assistance de gens éprouvant des difficultés d’ordre psychologiques et qu’il n’avait pas les moyens de payer une amende de 5 000 $.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[17]        Les faits reprochés à l’intimé remontent à près de quatre (4) ans.

[18]        Ce dernier a depuis quitté l’exercice de la profession.

[19]        Il n’a aucun antécédent disciplinaire et a entièrement collaboré à l’enquête de la plaignante.

[20]        Il consacre maintenant son temps à un organisme caritatif sans but lucratif.

[21]        Il a agi à la demande de son père et a voulu plaire à ce dernier, peut-on penser, en se consacrant trop rapidement aux demandes de la fille de l’ami de ce dernier.

[22]        L’intimé a commis une erreur de jugement. Il n’avait pas à se précipiter. Il lui aurait fallu simplement attendre que la consommatrice vienne au Québec se soumettre à l’examen paramédical prévu pour procéder alors avec elle à la signature des documents en cause.

[23]        L’intimé n’a tiré aucun bénéfice de ses fautes.

[24]        Il n’a pas non plus cherché à favoriser son intérêt personnel puisque de toute façon la police d’assurance en cause ne pouvait être émise tant que la consommatrice ne s’était pas soumise à l’examen paramédical précité.

[25]        L’intimé a simplement voulu démontrer à son père qu’il s’occupait rapidement du dossier de la fille de son ami. Il ne semble pas avoir été animé d’une intention malveillante.

[26]        Il a néanmoins commis, dans le cadre de ses activités professionnelles, des fautes inexcusables.

[27]        Aussi, n’eut été l’ensemble des facteurs tant objectifs que subjectifs qui lui ont été soumis, le comité aurait été tenté de suivre les suggestions de la plaignante.

[28]        Compte tenu toutefois des circonstances propres à cette affaire, que l’intimé, qui n’a tiré aucun profit de ses fautes, n’avait aucun intérêt personnel à se comporter comme il l’a fait si ce n’est pour démontrer à son père qu’il s’occupait rapidement des besoins de la fille de son ami, et compte tenu que les deux (2) fautes qui lui sont reprochées sont étroitement liées, le comité est d’avis que la condamnation de ce dernier au paiement d’une amende de 2 000 $ (l’amende minimale) sous le chef numéro 1 et l’imposition d’une réprimande sous le chef numéro 2 seraient en l’espèce des sanctions justes et appropriées.

[29]        Le comité est également d’avis que l’intimé devrait être condamné au paiement des déboursés conformément à la règle qui veut que la partie qui succombe assume généralement les frais.

[30]        Enfin, compte tenu des représentations des parties et de la situation de l’intimé, le comité consent à accorder à ce dernier un délai de dix-huit (18) mois pour le paiement tant de l’amende que des déboursés.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

DÉCLARE l’intimé coupable des chefs d’accusation 1 et 2 contenus à la plainte amendée;

ET PROCÉDANT SUR SANCTION :

Sous le chef 1 :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 2 000 $;

Sous le chef 2 :

IMPOSE à l’intimé une réprimande;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés, y compris les frais d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, L.R.Q. chap. C-26;

ACCORDE à l’intimé un délai de dix-huit (18) mois pour le paiement tant de l’amende que des déboursés.

 

 

 

(s) François Folot

Me FRANÇOIS FOLOT, avocat

Président du comité de discipline

 

(s) Denis Petit

M. DENIS PETIT, A.V.A., Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

(s) Robert Archambault

M. ROBERT ARCHAMBAULT, A.V.A.

Membre du comité de discipline

 

 

 

Me Jean-François Noiseux

 

BÉLANGER LONGTIN

 

Procureurs de la partie plaignante

 

 

 

L’intimé se représente lui-même.

 

 

 

Dates d’audience :

13 juin, 13 et 18 septembre 2012

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