Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N°:

CD00-0654

 

DATE :

1er mars 2010

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Janine Kean

Présidente

M. Kaddis Sidaros, A.V.A., Pl. fin.

Membre

M. Felice Torre, A.V.A., Pl. fin.

Membre

______________________________________________________________________

 

LÉNA THIBAULT, ès qualités de syndic adjoint de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

MARC DA COSTA, conseiller en sécurité financière et représentant en épargne collective

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ

______________________________________________________________________

 

[1]          Le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (« CSF ») s’est réuni les 14, 15 et 16 mai 2007 au Palais de Justice de Montréal, les 5 et 6 juin, le 6 septembre, les 5, 6, 26, 27, 28, 29 et 30 novembre 2007 à son siège social, le 19 juin 2008 à la Commission des lésions professionnelles, le 2 juillet 2008 au Palais de Justice de Montréal et de nouveau le 7 août 2008 à son siège social pour procéder à l’audition d’une plainte disciplinaire amendée portée contre l’intimé. 

[2]          L’intimé, par l’entremise de son procureur, enregistra un plaidoyer de non culpabilité sur chacun des 27 chefs d’accusation contenus à la plainte amendée.

[3]          Au soutien de sa plainte, la plaignante fit entendre les consommateurs et Mme Yolande Gervais, expert en écriture.  Seul l’intimé témoigna en défense.

[4]          Il apparaît opportun de rapporter le contexte précédent la présente décision.

[5]          Le témoignage de l’intimé prit fin le 30 novembre 2007.  Toutefois, le procureur de la défense désirant faire entendre M. Chris Ochiai, président de Toyoko, demanda une remise au motif de l’incapacité de celui-ci, depuis juillet 2007, de témoigner pour cause de maladie.  Dans les circonstances, le  comité a tenu des appels conférences pour assurer le suivi du dossier et la poursuite de l’audition fut fixée aux 19 et 20 juin 2008. 

[6]          Au mois de mai 2008, le procureur de l’intimé demanda une remise de ces dates au motif que M. Ochiai était toujours incapable de témoigner.  Cette demande fut contestée et le comité accorda un délai pour produire une preuve médicale attestant que M. Ochiai n’était pas apte à témoigner.  Le 16 juin 2008, en l’absence d’une telle preuve et après avoir entendu les deux parties, le comité rejeta la demande de remise. 

[7]          Le 19 juin 2008, avisé par le procureur de l’intimé de son intention de cesser d’occuper, le comité a entendu les parties sur cette demande.  Or, pendant que le comité s’était retiré pour délibérer, le procureur de l’intimé quitta les lieux sans autre avis.  Au retour du comité dans la salle d’audience, l’intimé, par ailleurs, était présent. 

[8]          Le comité rendit, séance tenante, sa décision refusant la demande de cesser d’occuper du procureur de l’intimé et remit au 2 juillet 2008 l’audition, date à laquelle l’intimé s’était déclaré disponible.  Le comité ordonna également qu’un subpoena soit signifié au témoin de l’intimé, M. Ochiai, pour cette date.  À la demande du comité, l’intimé fournit son adresse résidentielle aux fins de la signification de l’avis d’audition précisant notamment le lieu de l’audition.

[9]          Le 2 juillet 2008, le comité constatant l’absence de l’intimé et de son témoin, fut avisé que les significations de l’avis d’audition à l’intimé ainsi que le subpoena à son témoin avaient échoué.  L’intimé avait déménagé de l’adresse fournie au comité au cours de l’audition du 19 juin 2008 et M. Ochiai était aussi déménagé sans laisser d’adresse.

[10]       Le comité, dans les circonstances, reporta encore une fois la poursuite de l’audition et un nouvel avis d’audition fut signifié à l’intimé, cette fois, par voie des journaux pour le 7 août 2008.  Quant à son procureur, il refusa la signification des avis d’audition. 

[11]       Le 7 août 2008, après avoir constaté l’absence de l’intimé, le comité, à la demande du procureur de la plaignante déclara la preuve de l’intimé close.  Aucune contre preuve ne fut présentée.  Ainsi, le comité ordonna la production de plaidoiries écrites et fixa un échéancier aux parties.  Le délai accordé à la partie intimée expirait en décembre 2008.  Seule la plaignante fit parvenir ses arguments.

[12]       Ceci étant précisé, nous procéderons à l’analyse et aux motifs de la décision. Pour plus de commodité, le résumé des faits et l’analyse seront présentés sous chaque chef ou série de chefs de même nature.

CHEFS 1, 2, 3, 10, 11,12 et 27

[13]       Essentiellement, cette série de chefs reprochent à l’intimé d’avoir effectué de multiples transactions qui n’étaient pas dans l’intérêt des clients et généraient des frais importants et ce, sans avoir obtenu leur autorisation.

Clients William et Patricia Rose (chefs 1, 2 et 3)

1.                   À Montréal, entre le ou vers le 7 juillet 2000 et le ou vers le 19 octobre 2000, l’intimé Marc Da Costa a procédé à plusieurs échanges (« switchs ») ou transferts de fonds Mackenzie dans le portefeuille de son client William Rose et ce, alors que ces multiples transactions n’étaient pas dans l’intérêt de son client, généraient des frais importants et ce, sans avoir obtenu l’autorisation de son client et, ce faisant, l'intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, aux articles 234.1 et 235 du Règlement sur les valeurs mobilières, aux articles 160 et 161 de la Loi sur les valeurs mobilières et à l’article 4 du Règlement sur les règles applicables aux représentants et aux cabinets en valeurs mobilières;

2.                   À Montréal, entre le ou vers le 7 juillet 2000 et le ou vers le 19 octobre 2000, l’intimé Marc Da Costa a procédé à plusieurs échanges (« switchs ») ou transferts de fonds Mackenzie dans le portefeuille de sa cliente Patricia Rose et ce, alors que ces multiples transactions n’étaient pas dans l’intérêt de sa cliente, généraient des frais importants et ce, sans avoir obtenu l’autorisation de sa cliente et, ce faisant, l'intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, aux articles 234.1 et 235 du Règlement sur les valeurs mobilières, aux articles 160 et 161 de la Loi sur les valeurs mobilières et à l’article 4 du Règlement sur les règles applicables aux représentants et aux cabinets en valeurs mobilières;

3.                   À Montréal, entre le ou vers le 14 juin 2002 et le ou vers le 25 janvier 2002, l’intimé Marc Da Costa a procédé à plusieurs échanges (« switchs ») ou transferts de fonds AIC dans le portefeuille de son client William Rose et ce, alors que ces multiples transactions n’étaient pas dans l’intérêt de son client, généraient des frais importants et ce, sans avoir obtenu l’autorisation de son client et, ce faisant, l’intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, aux articles 234.1 et 235 du Règlement sur les valeurs mobilières, aux articles 160 et 161 de la Loi sur les valeurs mobilières et à l’article 4 du Règlement sur les règles applicables aux représentants et aux cabinets en valeurs mobilières;

LES FAITS

[14]      M. William Rose a fait la connaissance de l’intimé, par l’entremise d’un ami à titre de « conseiller financier », vers la fin des années 1990[1].  Il travaillait alors pour la compagnie Pratt & Whitney comme « Applications Analyst » et touchait un salaire annuel d’environ 83 000 $.  Son épouse ne travaillait pas depuis près de huit ou neuf ans.  Il a pris sa retraite en l’an 2000. 

[15]      Selon M. Rose, mis à part leur régime enregistré d’épargne retraite (« REÉR »), ils avaient peu d’expérience en matière d’investissement.  Au moment où ils ont rencontré l’intimé, leurs actifs étaient les suivants :

                    Des REÉR dont la valeur était d’environ 120 000 $[2].

                    La résidence familiale, située dans l’ouest de l’île de Montréal, avait une équité d’environ 54 000 $.

[16]      L’intimé aurait proposé au couple Rose de lui confier leurs REÉR dont ils pourraient faire des retraits à l’abri de l’impôt. 

[17]      Selon M. Rose, le coût du processus pour les clients se limitait à environ 10 % sur ces retraits au lieu des impôts normalement prélevés d’environ 35 % lors de retraits d’un REÉR.  M. Rose affirma que l’intimé ne leur a jamais parlé, hormis les frais d’environ 10 %, qu’il y aurait d’autres frais à encourir.  L’intimé aurait dit que ce système était légal.  Aucun écrit ne constate cette entente.  Ce serait sur cette base que le couple Rose aurait accepté le processus proposé par l’intimé impliquant de faire des « switch-in et switch-out » dans les fonds, dont les frais perçus par Toyoko seraient déposés dans un compte de Toyoko à leur bénéfice à partir duquel les argents leur seraient versés.

[18]      Afin de réaliser cela, M. Rose dit que l’intimé a requis la signature d’un « Exchange Power of Attorney » et une procuration à pouvoirs illimités[3].  L’intimé leur aurait représenté que ces documents étaient nécessaires pour lui permettre de faire des retraits du REÉR sans impact fiscal.

[19]      Les relevés des fonds Mackenzie de M. et Mme Rose en décembre 2000[4], ainsi que ceux des fonds AIC de M. Rose en 2002 (P-4) et les documents intitulés « Transaction Listing » indiquent que l’intimé a procédé à de multiples transactions « switch-in et switch-out » dans les dits fonds[5].

[20]      Certaines de ces transactions ont engendré des frais différés de souscription («DSC» ou « frais de sortie ») puisque les retraits étaient réalisés avant la fin de la période d’application de ces frais.

[21]      Ne pouvant concilier les argents reçus et déposés dans son compte avec les relevés de Toyoko, M. Rose écrivit une lettre à Toyoko.  M. Chris Ochiai, président et officier de la conformité pour Toyoko, lui a répondu le 2 octobre 2003 indiquant que des retraits du fonds Dynamic totalisaient 64 202,96 $.  Or, la conciliation opérée par M. Rose à partir du compte bancaire conjoint du couple, unique compte de banque du couple depuis leur mariage, où les argents étaient déposés, n’indique que des retraits totalisant 53 000 $.


ANALYSE ET DÉCISION (chefs 1 à 3)

[22]      Ces trois chefs reprochent à l’intimé d’avoir procédé à de multiples transactions dans les fonds d’actions Mackenzie et AIC détenus par M. et Mme Rose, alors que ces opérations n’étaient pas dans leur intérêt, généraient des frais importants et n’avaient pas été autorisées par les clients.

[23]      M. Rose a dit que l’intimé n’a jamais communiqué ou même eu de discussions avec lui au sujet de ces transactions effectuées.  Il en est de même de Mme Rose.

[24]      Pour sa part, l’intimé a expliqué qu’il faisait des « switch-in et switch-out » dans les comptes de ses clients William et Patricia Rose pour bénéficier des mouvements de prix des fonds en fonction du marché et, selon lui, pour le bénéfice de ses clients[6]. Ce dernier a même avancé qu’il avait effectué les transactions pour pallier à la volatilité de la valeur du fonds. 

[25]      À titre d’exemple, au sujet des transactions effectuées dans le fonds AIC de M. Rose visées par le chef 3 (P-4), l’intimé indiquera avoir fait les « switches » pour assurer plus de stabilité et, le lendemain, il suit l’objectif inverse soit tenter de faire un profit.  Il dira même, alors qu’il a transigé de petites sommes[7] génèrant des frais importants, qu’il a ainsi voulu « tester le marché »[8].

[26]      Cette explication de l’intimé s’avère farfelue.  Il ne s’agit pas ici d’un titre dont la vente, l’achat et même la revente pourrait s’avérer justifié dans une même semaine ou même journée pour fins de spéculation ou pour bénéficier du marché.

[27]      En l’espèce, il en est tout autrement puisqu’il s’agit de transiger des unités de fonds mutuels composé de nombreux titres.  Ainsi, procéder à des ventes et rachats de ces fonds de façon systématique sur de courtes périodes d’une semaine[9] voire même parfois dans la même journée, qui engagent des frais importants pour les clients, est inutile, onéreux et injustifiable. 

[28]      Comme représenté par le procureur de la plaignante :

«Lorsqu’un investissement est fait dans des fonds de moyen et long terme, il n’y a aucune justification à faire du « day trading », puisque cela génère justement des frais en terme de front end load et back end load[10]

[29]      L’intimé argumentera aussi que sa stratégie était de transférer d’un fonds stable à un fonds de croissance et d’un fonds de croissance à un fonds stable.  Cette explication ne tient pas davantage la route comme l’illustre l’exemple fourni par le procureur de la plaignante, où des entrées et sorties d’environ 20 000 $ entre deux de ces fonds Mackenzie ont fait encourir des frais de plus de 800 $ sans générer aucun profit et sans changer le montant total investi dans chaque fonds (P-56) [11].

[30]      Comment concilier l’objectif de croissance de M. Rose et sa tolérance modérée au risque[12], avec cette série de transactions faites en l’espace d’un an?  Il est difficile de concevoir l’intérêt pour M. Rose de procéder à des retraits de son REÉR engageant ainsi des frais et pénalités.  Cette multiplication des transactions qui donnaient lieu à des commissions n’étaient certes pas dans l’intérêt du client.

[31]      L’intimé prétendit qu’il était en droit d’agir ainsi compte tenu des « Power of attorney » et autres autorisations signées par le couple Rose, ne tient pas non plus.  Les dits «Power of attorney» signés en 1998[13] visaient les fonds Infinity et non les fonds Mackenzie et AIC en litige dans ces trois chefs.  Quant aux procurations à pouvoirs discrétionnaires, elles ont été signées le 30 août 2001, soit à une date postérieure aux infractions alléguées aux chefs 1 et 2[14].

[32]      Quant aux transactions visées par le chef 3, cette dernière autorisation signée en 2001, ne peut non plus servir à disculper l’intimé d’avoir agi comme en l’espèce en faisant ces multiples transactions générant des frais importants dans les comptes de M. Rose qui n’étaient pas dans son intérêt. 

[33]      Cette façon de faire de l’intimé est inadmissible et ébranle sérieusement la protection à laquelle le public est en droit de s’attendre en consultant un professionnel qui œuvre, par surcroît, dans le domaine financier.

[34]      Même s’il est permis de douter de la naïveté des clients à l’égard de la prétendue légalité du processus proposé par l’intimé, ceci ne peut le disculper.  Il ne peut pour autant ignorer les obligations professionnelles auxquelles il est soumis notamment ses devoirs et obligations d’agir de bonne foi, avec honnêteté et loyauté dans ses relations avec ses clients. 

[35]      Estimant que la plaignante s’est déchargée de son fardeau de preuve, le comité déclarera l’intimé coupable sur chacun des chefs 1, 2 et 3.

Clients Winston et Desiree Figueira (chefs 10, 11 et 12)

10.               À Brossard, entre le ou vers le 13 juillet 1998 et le ou vers le mois de juin 2000, l’intimé Marc Da Costa a procédé à plusieurs échanges (« switchs ») ou transferts dans le portefeuille de régimes enregistrés d’épargne retraite de sa cliente Desiree Figueira et ce, alors que ces multiples transactions n’étaient pas dans l’intérêt de sa cliente, généraient des frais importants et ce, sans avoir obtenu l’autorisation de sa cliente et, ce faisant, l'intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, aux articles 234.1 et 235 du Règlement sur les valeurs mobilières, aux articles 160 et 161 de la Loi sur les valeurs mobilières et à l’article 4 du Règlement sur les règles applicables aux représentants et aux cabinets en valeurs mobilières;

11.               À Brossard, entre le ou vers le 13 juillet 1998 et le ou vers le mois de juin 2000, l’intimé Marc Da Costa a procédé à plusieurs échanges (« switchs ») ou transferts dans le portefeuille de régimes enregistrés d’épargne retraite de son client Winston Figueira et ce, alors que ces multiples transactions n’étaient pas dans l’intérêt de son client, généraient des frais importants et ce, sans avoir obtenu l’autorisation de son client et, ce faisant, l'intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, aux articles 234.1 et 235 du Règlement sur les valeurs mobilières, aux articles 160 et 161 de la Loi sur les valeurs mobilières et à l’article 4 du Règlement sur les règles applicables aux représentants et aux cabinets en valeurs mobilières;

12.               À Brossard, entre le ou vers le mois de janvier 1997 et le ou vers le mois de novembre 2000, l’intimé Marc Da Costa a procédé à plusieurs échanges (« switchs ») ou transferts de fonds dans les (…) investissements non enregistrés financés par des prêts leviers 97411935-71, 8263652-42, MF58250, MF72568 et MF73019 de ses clients Winston et Desiree Figueira et ce, alors que ces multiples transactions n’étaient pas dans l’intérêt de ses clients et généraient des frais importants et, ce faisant, l'intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, aux articles 234.1 et 235 du Règlement sur les valeurs mobilières, aux articles 160 et 161 de la Loi sur les valeurs mobilières et à l’article 4 du Règlement sur les règles applicables aux représentants et aux cabinets en valeurs mobilières;

LES FAITS

[36]      En cours d’audition, les chefs 10 et 11 ont fait l’objet d’une demande d’amendements non contestée pour remplacer le mois de mars par le mois de juin.  Cette demande a été accueillie par le comité.

[37]      M. Figueira a connu l’intimé par l’entremise d’un collègue de travail en 1989.  Il travaillait à cette époque comme dessinateur graphique (« graphic designer ») chez CAE.  Il fut mis à pied en 2003 alors qu’il était âgé de 62 ans et n’a pas repris le marché du travail depuis ce temps. M. Figueira n’avait aucune formation en finance ou en économie. Il a cessé de faire affaire avec l’intimé au mois de mars 2001.

[38]      En 1989, le couple Figueira possédait :

                    Une résidence familiale entièrement payée;

                    REÉR d’environ 50 000 $ pour M.;

                    REÉR d’environ 30 000 $ pour Mme.;

                    Deux voitures;

                    Des économies d’environ 242 000 $ dans un compte conjoint.

[39]      Par l’entremise de l’intimé, le couple Figueira a contracté des prêts leviers pour fins d’investissements[15].  Selon M. Figueira, entre 1991 et 1997, il avait des échanges avec l’intimé de façon régulière et mensuelle.  Ce serait en 1998 que commencèrent les difficultés avec l’intimé lorsqu’ils ont voulu mettre fin au dernier prêt à effet levier.

[40]      Quand ils ont cessé de faire affaire avec l’intimé en mars 2001, leur situation financière était :

                    Les comptes REÉR de M. Figueira étaient de 41 464,55 $;

                    Les comptes REÉR de Mme Figueira étaient de 29 072,24 $;

                    Ils avaient une dette conjointe de 96 000 $ en vertu du 4e prêt

à effet levier avec B2B trust;

                    Leur marge de crédit s’élevait à 62 000 $.

ANALYSE ET DÉCISION (chefs 10, 11 et 12)

[41]      Il n’y a pas lieu, en l’espèce, de faire une distinction entre les chefs 10, 11 et le chef 12.  En effet, les reproches sont les mêmes et peu importe que, pour le chef 12, l’argent investi provienne d’argent emprunté et ait été placé dans des fonds non enregistrés plutôt que dans le portefeuille de REÉR des clients.

[42]      Bien que l’intimé faisait parvenir par la poste[16] les formulaires «Exchange Power of Attorney» à ses clients, il ressort de la preuve que le couple Figueira n’a jamais signé ceux-ci et ce malgré la mention contraire sur un formulaire de vente d’actifs.[17] 

[43]      Concernant les explications fournies par l’intimé quant aux motifs des multiples transactions dans les fonds appartenant aux Figueira, elles sont généralement les mêmes que celles rapportées sous les chefs précédents concernant le couple Rose.

[44]      Ainsi, à nouveau, suivant le même raisonnement que celui exposé sous les trois premiers chefs à l’égard des Rose, le comité est d’avis que les chefs 10, 11 et 12 sont bien fondés.

[45]      En conséquence, le comité déclarera l’intimé coupable sur les chefs 10, 11 et 12.

CHEF 27

Client Terrence Brown (chef 27)

27.               À Montréal, entre le ou vers le 20 septembre 1999 et le ou vers le 26 juillet 2000, l’intimé Marc Da Costa a procédé à plusieurs échanges ou transferts de fonds détenus par son client Terrence Brown et ce, alors que ces multiples transactions n’étaient pas dans l’intérêt de son client, généraient des frais importants et ce, sans avoir obtenu l’autorisation de son client et, ce faisant, l’intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, aux articles 234.1 et 235 du Règlement sur les valeurs mobilières, aux articles 160 et 161 de la Loi sur les valeurs mobilières et à l’article 4 du Règlement sur les règles applicables aux représentants et aux cabinets en valeurs mobilières;

LES FAITS

[46]      M. Terrence Brown exerçait, comme travailleur autonome, le métier d’illustrateur après avoir obtenu un diplôme d’études collégiales.  Il a rencontré l’intimé par l’entremise de ses parents en 1993.  À cette époque, son salaire annuel était d’environ 32 000 $.  Il n’avait aucune expérience ou connaissance en investissement mais voulait investir dans un REÉR. 

[47]      Pour la période de 1999 à 2000, M. Brown avait des revenus annuels variant entre 60 000 $ et 70 000 $.

[48]      Aux dires de M. Brown, il n’a rencontré l’intimé qu’une seule fois entre 1993 et 2003.  Les autres communications se sont faites par téléphone à raison de deux fois par année.  À ces occasions, ils discutaient de prêts pour fins des cotisations REÉR. 

[49]      Malgré les mentions de connaissances supérieures en investissements et de tolérance aux risques très élevée apparaissant au profil d’investisseur en date du 1er janvier 1999, M. Brown déclara que ses connaissances en investissements n’avaient pas augmenté depuis sa rencontre avec l’intimé en 1993[18].  Il laissait à l’intimé le soin de gérer le tout.  Il dit qu’il n’a pas eu de discussions avec l’intimé ni pour savoir comment l’argent serait investi ni au sujet des commissions ou frais chargés.

[50]      L’intimé a déclaré avoir utilisé les mêmes stratégies pour les fonds de M. Brown que pour ceux du couple Rose.  Ainsi, pour tenir lieu de son témoignage sous ce chef, une admission, signée le 26 novembre 2007, a été produite par laquelle il est reconnu que, tout comme les « switches » effectués dans les comptes de ses clients William et Patricia Rose, ceux de M. Terence Brown l’avaient été pour bénéficier des mouvements de prix des fonds en fonction du marché.

ANALYSE ET DÉCISION

[51]      L’intimé prétendit avoir eu l’autorisation de son client de procéder à sa discrétion à ces transactions s’appuyant, entre autres, sur une clause contenue sur les formulaires de la Banque Laurentienne pour la souscription des REÉR[19] ainsi que sur des formulaires de retraits et de transferts signés en blanc par son client[20].  M. Brown reconnut sa signature mais ne se souvint pas du contenu de ces documents.

[52]      Le comité a été à même de constater au cours des interrogatoires que M. Brown, dont le témoignage a paru sincère et crédible, avait un niveau de compréhension très limité de ses investissements et documents y afférents. 

[53]      Ces autorisations du client ne peuvent être considérées pour disculper l’intimé de procéder à de multiples transactions qui ne sont pas dans l’intérêt de son client et, générant des frais importants.

[54]       Pour les mêmes motifs que ceux exposés sous les chefs impliquant les couples Rose et Figueira, le comité, estimant que la plaignante s’est déchargée de son fardeau de preuve, en arrive à conclure à la culpabilité de l’intimé sur le chef 27. 

CHEFS 4, 5, 6 et 7 

4.   À Montréal, le ou vers le 18 juillet 2003, l’intimé Marc Da Costa a fait défaut d’agir avec compétence et professionnalisme envers Monsieur Nickolas Sarlis et de s’assurer que les produits qu’il souscrivait correspondaient à sa situation financière et ce, alors que l’intimé a apposé sa signature à titre de représentant sur un document intitulé « Investor Profile » et sur un document intitulé « Quick Loan Disclosure » de ManuLife Bank et alors que l’intimé n’avait jamais rencontré Monsieur Sarlis et que les informations apparaissant sur lesdits documents n’avaient pas fait l’objet de vérifications de sa part et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 16 et 51 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et aux articles 3, 4 et 12 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières;

5.   À Montréal, le ou vers le 18 juillet 2003, l’intimé Marc Da Costa a fait défaut d’agir avec compétence et professionnalisme envers Madame Maria Koklas et de s’assurer que les produits qu’elle souscrivait correspondaient à sa situation financière et ce, alors que l’intimé a apposé sa signature à titre de représentant sur un document intitulé « Quick Loan Disclosure » de ManuLife Bank et alors que l’intimé n’avait jamais rencontré Madame Koklas et que les informations apparaissant sur lesdits documents n’avaient pas fait l’objet de vérifications de sa part et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 16 et 51 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et aux articles 3, 4 et 12 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières;

6.   À Montréal, le ou vers le 3 juin 2004, l’intimé Marc Da Costa a fait défaut d’agir avec compétence et professionnalisme envers Madame Maria Koklas et de s’assurer que les produits qu’elle souscrivait correspondaient à sa situation financière et ce, alors que l’intimé a apposé sa signature à titre de représentant sur un document intitulé « Investor Profile » (…) et alors que l’intimé n’avait jamais rencontré Madame Koklas et que les informations apparaissant sur lesdits documents n’avaient pas fait l’objet de vérifications de sa part et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 16 et 51 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et aux articles 3, 4 et 12 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières;

7.   À Montréal, entre le ou vers le 3 juin 2004 et le ou vers le mois de mars 2005, l’intimé Marc Da Costa a fabriqué ou induit une tierce à fabriquer un document intitulé « Investor Profile » portant la date du 3 juin 2004 et portant une signature de Maria Koklas et, ce faisant, l’intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et aux articles 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières;

LES FAITS

[55]       Au moment des événements, M. Nickolas Sarlis et Mme Maria Koklas étaient mariés.  Ils avaient acheté une maison d’une valeur de 170 000 $, moyennant une mise de fond de 15 000 $.  Leurs salaires annuels respectifs étaient de 40 000 $ et de 35 000 $.

[56]       Entre les mois de juillet et août 2003, suite aux recommandations de Mme Wendy Hannah, une représentante de Manuvie (« Manulife »), M. Sarlis et Mme Koklas ont rencontré à trois ou quatre reprises un dénommé Steve Bromberg, par l’entremise duquel ils ont emprunté et investi dans le but d’améliorer leur situation financière à long terme.  Aux dires du couple, ils n’avaient jamais fait d’investissement avant de le rencontrer.  Selon eux, M. Bromberg était un planificateur financier (« financial planner »). 

[57]       Sous ses conseils, ils ont emprunté et investi dans des fonds communs de placement, des CPG et autres investissements de Manulife ou de ses sociétés affiliées.  Ainsi, ils ont investi chacun 50 000 $ dans des fonds non-enregistrés de Manulife Investments et 7 500 $ dans des REÉR.  Pour ce faire, ils ont emprunté chacun 50 000 $ à Manulife Bank, le 18 juillet 2003 et chacun 7 500 $ chez CitiBank, le 28 juillet 2003.  Le 14 août 2003, un autre emprunt de 2 500 $ au nom de M. Sarlis seulement a aussi été contracté.  

[58]       Après avoir procédé aux investissements, il y aurait eu une seule rencontre aux bureaux de Toyoko mais selon M. Sarlis et Mme Koklas, ils n’auraient jamais rencontré l’intimé.  Ils n’auraient vu le nom de l’intimé comme leur représentant seulement après le premier relevé de placement. 

[59]       Vivant des difficultés financières, dès l’automne 2003, après que M. Sarlis ait quitté son emploi, ils ont communiqué avec M. Bromberg pour lui expliquer qu’ils ne pouvaient poursuivre les paiements d’intérêts exigés sur leurs prêts.  Ce dernier a promis de les contacter pour leur suggérer des solutions, mais n’aurait jamais donné suite malgré qu’ils lui aient laissé de nombreux messages.  Aussi, voyant le nom de l’intimé à titre de représentant sur leurs relevés, M. Sarlis et Mme Koklas tentèrent de le rejoindre mais aussi sans succès.  C’est ainsi qu’ils ont ensuite contacté directement quelqu’un à Manulife Bank qui a su les aider. 

[60]       M. Sarlis et Mme Koklas ont constaté, à la lecture de leurs relevés, que des retraits, dont ils n’étaient pas au courant, avaient été effectués sur leurs investissements.  Enfin, ils se séparèrent en juin 2004 et un divorce suivit un an plus tard en 2005. 

ANALYSE ET DÉCISION

CHEFS 4 et 5

[61]       Ces trois chefs reprochent à l’intimé de ne pas avoir agi avec compétence et professionnalisme et de ne pas s’être assuré que les produits auxquels M. Sarlis et Mme Koklas souscrivaient correspondaient à leurs situations financières alors qu’il a signé à titre de représentant sur les documents intitulés « Quick Loan Disclosure » et « Investor Profile » aux noms de chacun sans avoir rencontré M. Sarlis ni Mme Koklas et sans avoir vérifié les informations inscrites sur ces documents.

[62]       Aucune preuve ne fut présentée démontrant que les produits auxquels ont souscrit M. Sarlis et Mme Koklas ne correspondaient pas à leur situation financière.  En conséquence, le comité ne peut retenir cette partie du chef contre l’intimé.

[63]       Toutefois, quant au défaut d’agir avec compétence et professionnalisme en signant à titre de représentant le « Quick Loan Disclosure » et l’« Investor Profile » aux noms de M. Sarlis et Mme Koklas sans les avoir rencontré et sans avoir, au préalable, vérifié auprès d’eux les informations inscrites sur ces documents et s’être assuré que leurs choix correspondaient à leur situation financière, le comité est d’avis que la preuve permet de soutenir l’infraction reprochée à l’intimé. 

[64]       Ainsi, les dispositions législatives pertinentes sont l’article 16 LDPSF et l’article 3 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières qui se lisent comme suit:


Honnêteté.

16. Un représentant est tenu d’agir avec honnêteté et loyauté dans ses relations avec ses clients.

Compétence.

Il doit agir avec compétence et professionnalisme.

1998, c. 37, a. 16.

3. Le représentant doit s'efforcer, de façon diligente et professionnelle, de connaître la situation financière et personnelle ainsi que les objectifs de placement du client. Les renseignements qu'il obtient d'un client doivent décrire cette situation ainsi que l'évolution de celle-ci.

[65]       M. Sarlis et Mme Koklas ont tous deux affirmé que, même si c’est le nom de l’intimé qui est indiqué sur leurs relevés d’investissement et les autres documents, ils le voyaient pour la première fois le jour de l’audience. 

[66]       De plus, concernant son profil d’investisseur « Investor Profile », M. Sarlis a déclaré ne pas se souvenir l’avoir signé ni même en avoir discuté.

[67]       Pour sa part, l’intimé dit que c’est la réceptionniste de chez Toyoko (son employeur), qui avait obtenu les informations contenues au « Investor Profile » de M. Sarlis par l’entremise de Mme Wendy Hannah de Manulife.  Il prétendit l’avoir signé en présence du client.  Il dit qu’en fonction notamment du salaire de M. Sarlis, il a estimé que les prêts auxquels ils souscrivaient étaient adéquats.

[68]       Ainsi, le témoignage de l’intimé rejoint la version de M. Sarlis à l’effet que ce n’est pas lui qui avait fourni les informations apparaissant à son « Investor Profile ». Devant la preuve contradictoire relativement à une rencontre entre M. Sarlis et l’intimé, le comité préfère le témoignage du couple Sarlis-Koklas qui lui a paru crédible, sincère et correspondre à ce qui s’est véritablement passé, contrairement à celui de l’intimé. 

[69]       Il ressort clairement de la preuve que c’est sur les conseils de M. Bromberg que M. Sarlis et Mme Koklas ont contracté les prêts à effet levier et souscrit aux investissements mentionnés mais c’est l’intimé qui a signé à titre de représentant et a récolté ainsi leur clientèle.  Or, en aucun temps, l’intimé n’a démontré s’être efforcé de connaître la situation financière et personnelle des clients se limitant plutôt à dire qu’il a conclu au caractère adéquat du prêt à la vue du salaire de M. Sarlis.

[70]       Un représentant ne peut signer à ce titre en faisant fi de ses devoirs et obligations déontologiques que lui impose sa profession.  Ainsi, l’intimé devait s’assurer de connaître de façon diligente et professionnelle la situation financière de ses clients en vérifiant auprès d’eux l’exactitude des informations prises à leur sujet par une tierce personne et en s’assurant que les produits en cause leur convenaient.

[71]         Cette façon de faire de l’intimé est inadmissible.  Elle n’est pas celle d’un représentant agissant avec compétence et professionnalisme.  Pour ces raisons, l’intimé sera déclaré coupable des chefs 4 et 5.

CHEF 6 (Mme Koklas)

[72]       Concernant l’« Investor profil » de Mme Koklas et compte tenu de la conclusion de culpabilité de l’intimé à laquelle en arrivera le comité pour le chef 7, il ordonnera l’arrêt conditionnel des procédures à l’égard du chef 6 en vertu du principe interdisant les condamnations multiples.

CHEF 7 (Mme Koklas)

[73]       Ce chef reproche à l’intimé d’avoir fabriqué ou induit une tierce personne à fabriquer un document intitulé « Investor Profile » et portant une signature de Mme Koklas.

[74]       Madame Koklas affirme n’avoir jamais signé le document « Investor Profile » daté du 3 juin 2004.  Elle n’avait jamais eu d’autre contact avec l’intimé depuis la fois où elle l’avait rejoint à l’automne précédent au sujet des difficultés financières que son mari et elle vivait.  Mme Koklas nie avoir rempli le document « Investor Profile » ou avoir eu une discussion avec l’intimé à ce sujet.

[75]       Mme Yolande Gervais, spécialiste en écriture et expert pour la plaignante, conclut que le document du 3 juin 2004, intitulé « Investor Profile », est une photocopie.  Il s’agirait d’une falsification de document par montage mécanique.

[76]        Mme Gervais a de plus déterminé que, sur ce document, la signature de Mme Koklas a été reproduite par une photocopie noir et blanc.  Elle indique également que la date et la signature de l’intimé ont été reproduites avec un photocopieur couleur. 

[77]       Quant à l’intimé, il n’a pas contredit cette preuve. Par ailleurs, il a prétendu qu’un premier « Investor Profile » aurait été préparé un an auparavant au moment où Mme Koklas avait souscrit aux prêts mais aurait été égaré par la réceptionniste, une employée incompétente qui aurait été renvoyée. 

[78]       Ainsi, l’intimé avance qu’au mois de juin 2004, Mme Koklas aurait rempli l’« Investor Profile » elle-même au cours d’une conversation téléphonique avec lui.  Le  document aurait été échangé par télécopieur par la suite.  Il dit l’avoir signé le même jour.  Il dira aussi que les formulaires sont habituellement pré-remplis par la réceptionniste.

[79]       Cette version de l’intimé est cousue de fil blanc.  Le document « Investor Profile » est daté du 3 juin 2004 alors que Mme Koklas a terminé ses relations avec Manulife à l’automne 2003.

[80]       Comme soutenu par le procureur de l’intimé, les explications de l’intimé, notamment concernant les signatures en noir et blanc et en couleur, sont des plus farfelues et ne permettent pas d’invalider tant les conclusions de l’expertise de Mme Gervais que le témoignage honnête et sincère de Mme Koklas qui correspondent davantage aux faits de cette affaire. En conséquence, l’intimé sera déclaré coupable sur le chef 7.


CHEFS 8, 9, 13 à 22 (contrefaçon de signature)

[81]       Tous ces chefs reprochent à l’intimé d’avoir contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature des clients impliqués.

CHEFS 8 et 9

Cliente Audrey Jordan

8.   À Montréal, le ou vers le 25 janvier 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Madame Audrey Jordan sur un document intitulé « Retirement Income Fund Application » sur en-tête de Infinity Mutual Funds et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) du Règlement du Conseil des assurances de personnes sur les intermédiaires de marché en assurance de personnes (ci-après « RCAP ») adopté en vertu de la Loi sur les intermédiaires de marché alors en vigueur;

9.   À Montréal, le ou vers le 15 septembre 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Madame Audrey Jordan à trois reprises dans une adhésion à un FERR, sur des documents intitulés « Application for Retirement Income Fund» et  «New Account Opening Form» sur en-tête de Laurentian Bank of Canada et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

ANALYSE ET DÉCISION

[82]       Mme Jordan et son mari ont connu l’intimé dans les années 1990.  Ils ont investi, par son entremise, environ 80 000 $ dans des REÉR.  Mme Jordan avait 58 ans et travaillait à temps partiel.  Son mari était électricien.  Mme Jordan a déclaré qu’en 1999, bien que le couple se soit rendu compte qu’une rente était versée à titre de FERR dans leurs comptes de banque, ni elle ni son mari ne voulaient transférer les fonds de leurs REÉR dans un FERR.  Leurs plans étaient de percevoir des montants à partir d’un FERR seulement à la retraite, à l’âge de 65 ans.

[83]       D’ailleurs, constatant cela, son mari et elle auraient ordonné à l’intimé de remettre les choses comme avant.  Pour corriger la situation, l’intimé leur a proposé une entente en vertu de laquelle il leur donnait 35 000 $ contre la signature d’une quittance.  C’est ainsi qu’ils ont reçu un chèque de 8 000 $ et un autre de 10 000 $. Également, l’intimé a remis des chèques mensuels de 500 $.  Les chèques étaient signés par M. Ochiai de Toyoko.  Les paiements de 500 $ ont cessé au décès de son mari. 

[84]       Aux dires de Mme Jordan, alors qu’elle consultait les documents concernant les assurances et les investissements du couple, suite au décès de son mari en 2003, elle a remarqué que les signatures, apparaissant sur les documents suivants datés du 25 janvier et du 15 septembre 1999, n’étaient pas les siennes. 

         Un document intitulé « Retirement Income Fund Application » de la compagnie Infinity Mutual Funds, daté du 25 janvier 1999 (P-14) (Chef 8);

         Un document intitulé « Application for Retirement Fund » de la Banque Laurentienne, daté du 15 septembre 1999(P-15, p. 0769) (Chef 9);

         Un document intitulé « New Account Opening Form » de la Banque Laurentienne, daté du 15 septembre 1999 (P-15, p. 0770) (Chef 9);

         Un document sans titre, débutant par les mots « Purchase Instructions », de la Banque Laurentienne, daté du 15 septembre 1999 (P-15 p. 0771) (Chef 9).

[85]       Mme Jordan affirma n’avoir jamais su que l’intimé avait imité sa signature et ajouta que son mari n’avait jamais signé un document à sa place.  Mme Jordan dit que son mari et elle discutaient et prenaient ensemble les décisions relatives aux investissements.

[86]       Selon Mme Yolande Gervais, experte en écriture de la plaignante, la signature de Mme Jordan n’est qu’une fausse signature par imitation rapide (P-18).  Son expertise indique que l’auteur de ces fausses signatures de Mme Jordan est probablement l’intimé. C’est en procédant à des examens de comparaison de signatures authentiques de Mme Jordan et d’écritures de l’intimé qu’elle en est venue à ces conclusions. 

[87]       Pour sa part, l’intimé a reconnu avoir signé à la place de sa cliente mais dit avoir eu l’autorisation verbale de Mme Jordan lui permettant d’effectuer pour elle toute opération de même que le transfert de son REÉR dans un FERR.  Il ajouta avoir fait une erreur en omettant de faire précéder la signature du mot « per ».  Il y a lieu de se demander alors pourquoi il s’est efforcé d’imiter le plus possible la signature de sa cliente.

[88]       Le comité ne peut retenir les explications de l’intimé pour le disculper.  Même s’il avait eu l’autorisation de sa cliente, en aucun temps un représentant ne peut signer à la place d’un client. 

[89]       La prépondérance de la preuve permet de conclure à la culpabilité de l’intimé. En conséquence, il sera déclaré coupable des chefs 8 et 9.

CHEFS 13 à 22

Clients Winston et Desiree Figueira

13.  À Montréal, le ou vers le 8 septembre 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Monsieur Winston Figueira sur un document intitulé « Self-Directed Retirement Savings Plan Application » sur en-tête de Laurentian Bank of Canada afin de transférer les placements du client vers un compte autogéré lui permettant de faire des transactions au nom du client plus aisément et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

14.  À Montréal, le ou vers le 8 septembre 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Madame Desiree Figueira sur un document intitulé « Self-Directed Retirement Savings Plan Application » sur en-tête de Laurentian Bank of Canada afin de transférer les placements du client vers un compte autogéré lui permettant de faire des transactions au nom de sa cliente plus aisément et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

15.  À Montréal, le ou vers le 27 avril 1997, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Monsieur Winston Figueira sur un document ne portant pas de titre sur en-tête de Marc Da Costa, portant une date de télécopie du 27 avril 1997 et donnant instructions de vendre 100 pour cent du Fonds INF portant le numéro 105 et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

16.  À Montréal, le ou vers le 18 août 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Monsieur Winston Figueira sur un document ne portant pas de titre sur en-tête de Marc Da Costa, portant une date de télécopie du 11 juillet 1997 et donnant instructions de vendre 100 pour cent du Fonds INF portant le numéro 102 et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

17.  À Montréal, le ou vers le 18 août 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Monsieur Winston Figueira sur un document ne portant pas de titre sur en-tête de Marc Da Costa, portant une date de télécopie du 12 juillet 1997 et donnant instructions de vendre 100 pour cent du Fonds INF portant le numéro 102 et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

18.  À Montréal, le ou vers le 27 avril 1997, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Madame Desiree Figueira sur un document ne portant pas de titre sur en-tête de Marc Da Costa, portant une date de télécopie du 27 avril 1997 et donnant instructions de vendre 100 pour cent du Fonds INF portant le numéro 105 et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

19.  À Montréal, le ou vers le 20 août 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Monsieur Winston Figueira sur un document ne portant pas de titre sur en-tête de Les Services financiers Toyoko Inc., portant une date de télécopie du 15 juillet 1997 et donnant instructions de vendre 100 pour cent du Fonds INF portant le numéro 105 et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

20.  À Montréal, le ou vers le 20 août 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Madame Desiree Figueira sur un document ne portant pas de titre sur en-tête de Les Services financiers Toyoko Inc., portant une date de télécopie du 15 juillet 1997 et donnant instructions de vendre 100 pour cent du Fonds INF portant le numéro 105 et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

21.  À Montréal, le ou vers le 8 septembre 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Monsieur Winston Figueira sur un document intitulé « Transfer Authorization for Registered Investments » sur en-tête de Laurentian Bank demandant le transfert de Fonds Infinity et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

22.  À Montréal, le ou vers le 8 septembre 1999, l’intimé Marc Da Costa a contrefait ou induit une tierce personne à contrefaire la signature de Monsieur Winston Figueira sur un document intitulé « Transfer Authorization for Registered Investments » sur en-tête de Laurentian Bank demandant le transfert de Fonds AIC et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 132 et 157(2) RCAP;

ANALYSE ET DÉCISION

[90]       Ces chefs reprochent la contrefaçon de signature d’une série de documents qui peuvent être regroupés comme suit :

1.   Des documents intitulés « Self-Directed Retirement Savings Plan Application » de la Banque Laurentienne du Canada, le ou vers le 8 septembre 1999 (chefs 13 et 14);

2.   Des documents sans titre avec en-tête de M. Da Costa ou celle de Les Services Financiers Toyoko Inc., datés du 27 avril 1997, 18 août 1999 et 20 août 1999, en vertu desquels il est demandé de vendre des titres de M. Figueira ou de Mme Figueira (chefs 15 à 20);

3.   Des documents intitulés « Transfer Authorization for Registered Investments » de la Banque Laurentienne, datés du 8 septembre 1999, en vertu desquels il est demandé de transférer des fonds Infinity et AIC au nom de M. Figueira (chefs 21 et 22).

Contrefaçon de signatures de M. Winston Figueira

[91]       M. Figueira n’a pas reconnu comme étant la sienne la signature apparaissant sur le « Self-Directed Retirement Savings Plan Application », daté du 8 septembre 1999 (P‑28, pp. 028-029) (Chef 13).  M. Figueira ajouta même ne pas avoir eu l’intention de souscrire à ce type de plan en septembre 1999.  M. Figueira dit n’avoir jamais autorisé l’intimé ou qui que ce soit d’autres à signer des documents à sa place. 

[92]       M. Figueira a nié également les signatures apparaissant sur tous les  documents en litige le concernant dans les chefs ci-haut rapportés.

Contrefaçon de signatures de Mme Désirée Figueira

[93]       De même, Mme Figueira a déclaré ne pas reconnaître, comme les siennes, les signatures apparaissant sur la série de documents décrits par les chefs la concernant.

Expertise de Mme Yolande Gervais

[94]       Selon l’expert de la plaignante, Mme Yolande Gervais, les Figueira ne seraient, ni l’un ni l’autre, les auteurs des signatures qui se retrouvent sur les documents en litige, et l’intimé en serait probablement l’auteur (P-28, p.12). Il s’agirait de signatures par imitation.

[95]       Quant à l’intimé, il ne nie pas avoir signé à la place de ses clients.  Toutefois, il se justifia en disant avoir reçu un mandat verbal de M. Figueira pour souscrire en son nom et au nom de son épouse à ces régimes d’épargne autogérés ajoutant que M. Figueira ratifiait, par la suite, ses gestes. 

[96]       Il en aurait été de même quant aux documents concernés par les chefs 15 à 22, lesquels autorisent l’intimé à faire des transactions dans leurs investissements auxquelles les Figueira n’avaient pas consentis.  L’intimé, pour sa part, prétendit pour chaque chef qu’il avait un mandat verbal de M. Figueira pour procéder aux transferts de fonds et que ces instructions étaient « ratifiées » par la suite par ce dernier. Il mentionne avoir discuté de chacun de ces documents avec M. Figueira, ce qui est nié par M. Figueira. 

[97]       Au surplus, tel que mentionné par le procureur de la plaignante, l’étude des documents démontre :

 «…une incohérence entre la date apparaissant sur chaque document en litige et celle ou celles apposées par le fax lors de l’émission d’une copie : ces dates sont parfois à plus de 2 ans d’intervalle.»

[98]       M. Figueira affirma, lorsque contre-interrogé quant au prétendu mandat verbal d’agir au nom de son épouse allégué par l’intimé, que lorsqu’un document nécessitait la signature de sa femme, soit cette dernière était présente et signait elle-même, soit il lui apportait les documents à sa résidence afin qu’elle signe, si telle était sa volonté.

[99]       Le comité ne peut retenir la version de l’intimé.  Encore une fois, s’il détenait un mandat verbal pourquoi s’efforcer d’imiter le plus possible leurs signatures. 

[100]    L’imitation de signatures est contraire à l’exercice intègre de la profession. Comment expliquer que l’intimé signait à la place de ses clients alors qu’il déclara, les rencontrer souvent.  Après avoir entendu l’ensemble de la preuve, il est permis de conclure qu’il s’agissait pour l’intimé d’une manière de faire qu’il a adoptée de nombreuses fois, à des dates différentes et au surplus avec de nombreux clients.

[101]    Le comité fait sienne l’opinion suivante avancée par le procureur de la plaignante :

 «Même si nous devions croire M. Da Costa quant à l’autorisation verbale de son client de signer à sa place, une telle pratique devrait être sanctionnée par le Comité de discipline car elle ouvre la porte à des abus et instaure un régime qui va à l’encontre des principes d’ouverture et de transparence essentiels à l’exercice de la pratique des courtiers en épargne collective »

[102]    En conséquence, le comité déclarera l’intimé coupable des chefs 13 à 22.

CHEFS 23

23.  À Brossard, entre le ou vers le mois de juin 1998 et le ou vers le mois de septembre 1998, l’intimé Marc Da Costa a fait défaut de donner suite aux instructions de ses clients Desiree et Winston Figueira de procéder au règlement des prêts leviers qu’il leur avait suggéré de souscrire pour procéder à des investissements non enregistrés (…) et, ce faisant, l’intimé a contrevenu à l’article 235 du Règlement sur les valeurs mobilières et à l’article 145 RCAP;

LES FAITS

[103]    Les faits rapportés ci-après s’ajoutent à ceux rapportés sous les chefs 10, 11 et 12 concernant le couple Figueira et l’intimé.

[104]    Rappelons que l’intimé fut le représentant des Figueira de 1991 à 2001.  Dès le début, l’intimé a élaboré pour le couple un plan financier échelonné sur une période de 10 ans.  M. Figueira avait 50 ans et sa femme 47 ans.  Au cours de ces années, ils ont, par son entremise et suivant ses conseils, contracté quatre (4) prêts et M. Figueira a cessé de contribuer au fonds de pension de son employeur, CAE.

[105]    Selon le couple Figueira, les prêts à effet levier contractés sous les conseils de l’intimé sont les suivants :

                    54 000 $ en 1991, remboursé en 1996 (P-54);

                    100 000 $, contracté en 1996, et remboursé en 1997, avec un profit de 76 000 $;

                    150 000 $, numéro MF 58250, contracté en 1997(P-33);

                    100 000 $, numéro MF 73019, contracté en 2000.

[106]    Ils dirent avoir commencé à éprouver des difficultés avec l’intimé en 1998, lorsqu’ils ont voulu mettre fin au prêt à effet de levier numéro 58250. 

[107]    En mars 2001, les Figueira ont transféré la gestion de leurs investissements à un autre courtier et leur situation financière était celle décrite au paragraphe 40 de la décision.

ANALYSE ET DÉCISION  (chef 23)

[108]    Ce chef reproche à l’intimé de ne pas avoir, entre les mois de juin et septembre 1998, donné suite aux instructions de ses clients lui demandant de régler le prêt levier numéro MF58250 souscrit en 1997.

[109]    Il ressort de la preuve qu’au mois de juin 1998, la valeur des investissements effectués avec le prêt à effet levier numéro MF58250 contracté en 1997 (P-33) au montant de 150 000 $ était maintenant autour de 242 000 $. 

[110]    Selon M. Figueira, constatant qu’ils disposaient d’un profit d’environ 90 000 $, son épouse et lui voulaient en profiter pour rembourser le prêt et conserver la balance pour payer des dettes, notamment une dette fiscale et une hypothèque sur leur nouvelle maison. 

[111]    Questionné par le procureur de la plaignante au sujet des instructions données à l’intimé concernant ce troisième prêt à effet levier, M. Figueira dit:

«That is in June nineteen ninety-eight (1998) I talked to him and we talked and he gave us…give my report in June nineteen ninety-eight (1998). I said this is the time we close the loan, we close the leverage loan, all right. That is the one hundred and fifty dollars ($150) one, which was two hundred and forty-two dollars ($242) at the time. And we asked him to close it.»[21]

[112]    Or, en août 1998, la valeur des investissements faits avec l’argent du prêt à effet levier aurait chuté à 170 000 $, accusant une perte approximative de 70 000 $ comparativement à la valeur au 30 juin 1998.

[113]    Au cours de son témoignage, rendu plus tôt sur sa relation avec l’intimé, M. Figueira déclara qu’il avait eu avec celui-ci depuis le début des échanges mensuels et même davantage mais qu’à partir du moment où il avait demandé à l’intimé de mettre fin (« to close ») à ce prêt, il serait devenu difficile de le rejoindre.

[114]    Ainsi, à propos du rapport suivant, reçu à la fin du mois d’août ou au mois de septembre, M. Figueira dit : 

«:...but in August when we looked at it, the leverage was down to a hundred and seventy thousand dollars ($170,000), the difference of ninety-one thousand dollars ($91,000).  That’s where the problem starts. Now, I need to know what caused it and he gives me the report and say it is all there. And that’s when I get…started to get this type of report and I do not know what these mean. »

Nos soulignements

[115]    En guise d’explications, l’intimé lui aurait dit que les pertes étaient une conséquence du marché et lui a transmis des rapports sur ses investissements (« Transaction Listings ») qui portaient l’entête « Marc Da Costa ». 

[116]    Pour sa part, l’intimé nie avoir reçu, en juin 1998, quelques instructions que ce soit de M. Figueira concernant la fermeture de ce prêt.  Il ajouta que, pour ce faire, il aurait fallu que M. Figueira lui transmette un chèque pour payer la banque ou lui dise de vendre des fonds.

[117]    Il ressort également de la preuve que les remboursements des deux prêts à effet levier précédents ont été faits avec les profits réalisés sur chacun sans causer aucun problème, aux dires même de M. Figueira.  Certes, il est facile de comprendre que les Figueira étaient particulièrement déçus d’avoir manqué l’occasion de retirer leurs billes au plus haut du marché.

[118]    Mais si telles étaient les instructions données à l’intimé en juin 1998 par les Figueira, il est permis de se demander pourquoi, dans ce cas-ci, l’intimé n’y aurait pas donné suite et pourquoi, au mois d’août 1998, les Figueira ne lui ont pas réitéré leurs instructions de rembourser le prêt de 150 000 $ constatant que la valeur des investissements était rendue à 170 000 $ ce qui laissait tout de même un profit de 20 000 $ au lieu de s’exposer à subir des pertes supplémentaires. 

[119]    Le comité est d’avis que la preuve offerte ne supporte pas de façon prépondérante ce chef d’accusation.  Il ne suffit pas pour se décharger de son fardeau de preuve, comme le procureur de la plaignante a semblé l’avancer, que la version des faits fournie par M. Figueira soit plausible.  

[120]    Par conséquent, en l’absence d’une preuve claire, concluante et non ambiguë, il y a lieu de rejeter ce chef 23.

Chef 24  

24.  À Brossard, le ou vers le mois d’octobre 2000, l’intimé Marc Da Costa a fait défaut d’informer adéquatement ses clients Winston et Desiree Figueira alors qu’il leur a représenté que le prêt portant le numéro MF73019 (qui serait autorisé pour une somme de 100 000 $ plutôt que 150 000 $) ne comporterait pas de frais et ce, alors qu’une somme de 2 500 $ a été effectivement retirée du Fonds Synergy détenu par lesdits clients en date du 27 octobre 2000 et, ce faisant, l’intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, aux articles 234.1 et 235 du Règlement sur les valeurs mobilières et à l’article 19 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières;

[121]    Le comité estime que la preuve n’est pas convaincante sur ce chef. 

[122]    Les formulaires d’application, pour ce prêt, font état du choix de trois fonds d’investissement et de 5 % dans la colonne intitulée « fee (%) » pour chacun des fonds[22].  Le relevé du Fonds Synergy, un des trois fonds choisis, en date du 31 décembre 2000 indique que des frais d’entrée de 5 % (2 500 $) ont été prélevés à l’achat desdits fonds, le 27 octobre 2000.

[123]    L’intimé dit avoir rempli ces formulaires et que les Figueira étaient au courant et d’accord avec les frais de 5 %[23], à partir desquels lui a été versée une commission.

[124]    M. Figueira reconnut avoir signé la demande de prêt en octobre 2000[24]. Au sujet de ces frais de 2 500 $, il rapporta les propos qu’il a tenus au cours d’un échange téléphonique avec l’intimé, M. Mario Porco et lui-même :

«I don’t know where Mr. Da Costa was, but Mr. Porco was in Toronto, it was a telephone conversation, three way, and I said, the only thing I will do this leverage investment again is on the stipulations if I invest money nobody take out money out of this account until it reaches the stage where we can pay off our line of credit. He agreed with that. »[25]

[125]    C’est à partir de ces instructions que M. Figueira a conclu que le 2 500 $ prélevé à l’achat du Fonds Synergy a été fait sans son autorisation.  Or, ce 2 500 $ représentent des frais de 5 % sur l’investissement et non pas un retrait tel qu’avancé par M. Figueira.  Celui-ci n’en était pas à son premier prêt à effet levier et investissement de cette nature et il est difficile de croire qu’il ne savait pas que les investissements entraînaient des frais comme d’ailleurs décrits au contrat qu’il a signé.

[126]    La preuve est silencieuse en ce qui concerne les représentations faites aux Figueira par l’intimé à l’effet que le prêt ne comportait pas de frais.  Au surplus, ce sont les investissements et non le prêt qui est la source des frais de 2 500 $ en l’espèce. 

[127]    En conséquence, la plaignante ne s’étant pas déchargée de son fardeau de preuve, l’intimé sera déclaré non coupable sur le chef 24.

Chef 25

25.  À Brossard, le ou vers le 28 octobre 1999, l’intimé Marc Da Costa a procédé à des modifications au prêt-investissement de ses clients Winston et Desiree Figueira quant au type de prêt et du ratio de couverture et ce, sans avoir obtenu l’autorisation au préalable de ses clients et sans leur expliquer les conséquence de ce changement et, ce faisant, l’intimé a contrevenu aux articles 11, 12, 14, 19 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

[128]    Notons que la plaignante, à la demande du procureur de l’intimé, a fourni les détails nécessaires pour se défendre adéquatement à ce chef.  Ces informations furent annexées à l’original de la plainte.  Ainsi, il en découle que ce chef reproche à l’intimé d’avoir modifié en octobre 1999, sans l’autorisation de ses clients, un prêt à effet levier, « 2 pour 1 », portant le numéro MF 58250, en un prêt « 100 % Investment loan » portant le numéro MF72568.  Cette modification a eu pour effet de doubler les intérêts mensuels à payer.

[129]    La preuve a démontré que le couple Figueira a reçu différentes lettres de la banque concernant le prêt MF58250, dont la dernière en date du 29 septembre 1999, demandait un rappel du prêt.  À chaque fois, M. Figueira dit avoir appelé l’intimé qui disait régler la situation avec la banque.  Vers la fin de 1999 ou au début de l’an 2000, son épouse et lui constatèrent que les prélèvements effectués sur leur compte étaient plus importants. 

[130]    Le couple Figueira a dit ne pas se rappeler avoir eu des discussions avec l’intimé pour modifier ce prêt en un nouveau prêt « 100 % Investment loan » portant le numéro MF72568 en octobre 1999.  De plus, les Figueira ont dit ne pas reconnaître leurs signatures sur le formulaire d’application de ce dernier prêt. 

[131]    Aucune preuve d’expert en écriture n’a été offerte pour appuyer cette dénégation de signature.  Aussi, comment concilier cette version des Figueira avec le fait que M. Figueira ait, lorsqu’il a contracté le dernier prêt à effet levier MF73019 en novembre 2000, fait parvenir à B2B Trust un chèque de 29 336,70 $, daté du 7 novembre 2000, référé à ce prêt en inscrivant la mention « re : MF72568 » et qu’ils aient reconnu avoir reçus les relevés d’investissement de B2B Trust concernant ce prêt MF72568 pour la période de janvier à juin 2000 s’ils ne connaissaient pas son existence.  En aucun temps, le couple Figueira a questionné l’intimé à ce sujet.  Ces faits semblent contredire la version des faits du couple Figueira sur ce chef. 

[132]    En défense, l’intimé n’a pas été appelé à donner sa version sur les faits entourant la modification opérée par le prêt MF72568.

[133]    Dans les circonstances, en l’absence d’une preuve claire, concluante et non ambigüe, le chef 25 sera rejeté. 

CHEF 26

26.  À Brossard, le ou vers le 21 mars 2000, l’intimé Marc Da Costa a remis  à ses clients Winston et Desiree Figueira une somme de 25 658.89 $ en prétendant que ladite somme était versée par son cabinet (Toyoko) en compensation des pertes réalisées dans leurs placements alors que ladite somme originait de leur propre compte de Fonds CI détenu chez B2B Trust et, ce faisant, l’intimé a contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et aux articles 11, 16, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

[134]    Ce chef reproche à l’intimé d’avoir prétendu remettre à ses clients un chèque tiré de ses propres argents en compensation pour les pertes qu’ils avaient subies sur leurs investissements, alors que cette somme provenait de la vente d’un fonds détenu dans leur propre compte.

[135]    Selon les Figueira, l’intimé leur a remis un chèque de 25 658,89 $[26] émis par la Banque Laurentienne et daté du 21 mars 2000, prétendant l’avoir pris à même ses argents, afin de les compenser pour les pertes subies sur leurs investissements.

[136]    Au mois de juillet 2000, lors d’une rencontre avec l’intimé dans les bureaux de Toyoko, M. Figueira remarqua, à même le relevé des transactions effectuées du 1er janvier au 30 juin 2000 dans les Fonds mutuels CI « CI Mutual Funds »[27], qu’une somme identique à celle reçue de l’intimé, quelques mois auparavant, avait été retirée de leur compte suite à la vente de fonds le 13 mars 2000 pour un montant de 26 000 $ sans, pour autant, repérer un réinvestissement de ce montant.  Toutefois, l’intimé, alors questionné à ce sujet, aurait reconnu que le chèque qu’il leur avait remis, le 21 mars 2000, provenait de leurs propres fonds d’investissements. 

[137]    En guise de défense, l’intimé dit que le 25 658,89 $ a été retiré du prêt MF72568 à la demande des clients et fut transmis par chèque à son bureau.  Toutefois, il dit ne pas se souvenir comment ce chèque avait été remis aux Figueira.

[138]     Il dit que, pour aider les Figueira, il leur a versé, à même ses commissions, 26 000 $ sur une certaine période de temps mais ne se souvint pas à quel moment  ni comment ces versements ont été faits.  L’intimé ne put appuyer ses dires d’aucune preuve documentaire. 

[139]    Ce montant est identique au montant de la vente des Fonds mutuels CI  en date du 13 mars 2000.  Le comité estime que la coïncidence des montants corrobore la version des Figueira qui correspond davantage à ce qui s’est réellement passé que celle de l’intimé.

[140]    Le comité est d’avis que la preuve prépondérante permet de conclure à la culpabilité de l’intimé sur ce chef 26.


PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

DECLARE l’intimé coupable sur chacun des chefs d’accusation 1, 2, 3, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 26 et 27 portés contre lui;

ORDONNE l’arrêt conditionnel des procédures sur le chef 6;

DECLARE l’intimé non coupable sur chacun des chefs 23, 24 et 25 portés contre lui;

CONVOQUE les parties, avec l’assistance de la secrétaire du comité de discipline, à une audition sur sanction.

 

 

(s) Janine Kean __________________________________

Me Janine Kean

Présidente du comité de discipline

 

(s) Kaddis Sidaros __________________________________

M. Kaddis Sidaros, A.V.A., Pl. fin.

Membre du comité de discipline

 

(s) Felice Torre __________________________________

M. Felice Torre, A.V.A., Pl. fin.

Membre du comité de discipline

 

Me François Longpré

BORDEN LADNER GERVAIS

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Jean-Pierre Semeniuk

Procureur de la partie intimée jusqu’au 19 juin 2007

 

Dates d’audience :   

14, 15 et 16 mai, 5 et 6 juin, 6 septembre, 5, 6, 26, 27, 28, 29 et 30 novembre 2007, 19 juin, 2 juillet et 7 août 2008.

 

COPIE CONFORME À L'ORIGINAL SIGNÉ


 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N°:

CD00-0654

 

DATE :

2 décembre 2010

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Janine Kean

Présidente

M. Kaddis Sidaros, A.V.A., Pl. fin.

Membre

M. Felice Torre, A.V.A., Pl. fin.

Membre

______________________________________________________________________

 

LÉNA THIBAULT, ès qualités de syndic adjoint de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

MARC DA COSTA (certificat 108 664)

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR SANCTION

______________________________________________________________________

 

[1]   Suite à la décision sur culpabilité, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (CSF) s’est réuni le 28 septembre 2010, au siège social de la Chambre, 300 Léo-Pariseau, 26e étage, Montréal, pour procéder à l’audition sur sanction.

[2]          Les deux parties étaient représentées par procureur. L’intimé était absent.

[3]          Elles déclarèrent ne pas avoir de preuve à offrir mais seulement des représentations. 

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[4]          La procureure de la plaignante produisit l’attestation de droit de pratique de l’intimé à jour au 4 août 2010 (P-1), une décision sur culpabilité et sanction rendue contre lui le 14 juillet 2003, CD00-0332 (P-2), et une série de décisions[28] rendues antérieurement par le comité de discipline de la CSF au sujet d’infractions semblables.

[5]          Ainsi, le comité apprit que les demandes de renouvellement de certificats par l’intimé tant dans les disciplines de courtage en épargne collective que d’assurance de personnes lui ont été refusées par décisions de la Direction des pratiques de distribution de l’Autorité des marchés financiers (AMF) respectivement le 22 janvier 2008 et le 2 avril 2008 (P-1).

[6]          La procureure de la plaignante poursuivit en résumant brièvement les faits entourant les gestes reprochés et référa le comité à certains paragraphes de la décision sur culpabilité.  Pour les trois premiers chefs, elle rappela les paragraphes 27 à 33 de la décision, pour les chefs 4 et 5, les paragraphes 70 et 71, et pour les chefs 13 à 22, les paragraphes 100 et 101.

[7]          En plus de mentionner la gravité objective des infractions reprochées, elle souligna les facteurs aggravants suivants :

  L’expérience de l’intimé qui avait accumulé près de 8 ans de pratique au moment de la première infraction;

  Son implication totale dans les contrefaçons de signatures;

  La préméditation et intention malicieuse de l’intimé eu égard aux multiples transactions non opérées dans l’intérêt des clients et sachant qu’elles généraient des frais importants;

  L’avantage tiré par l’intimé de ces transactions (voir paragraphe 30 de la décision sur culpabilité);

  Le caractère répétitif des infractions qui se sont échelonnées sur une période de sept ans;

  Le nombre de huit clients impliqués dans la commission de ces infractions;

  Le préjudice financier subi par les clients et les conséquences sur la vie de Mme Jordan qui a dû, par exemple, reporter l’âge de sa retraite;

  L’absence de repentir ou le manque flagrant de remords;

  Le fait que l’intimé n’a pas suivi la formation recommandée par le comité de discipline dans sa décision de 2003;

  L’existence d’un antécédent disciplinaire portant sur des infractions de même nature qui laisse présager un risque important de récidive (P-2).

[8]          Elle concéda toutefois comme facteurs atténuants : la coopération de l’intimé à l’enquête et le temps écoulé depuis la dernière infraction commise en 2004.

[9]          Elle présenta ensuite ses recommandations pour chaque chef ou groupe de chefs en s’appuyant sur les décisions antérieures déposées.

[10]       Elle réclama pour chacun des chefs 1, 2, 3, 10, 11, 12 et 27 reprochant d’avoir procédé à de multiples transactions qui, en plus de générer des frais importants, n’étaient pas dans l’intérêt des clients et étaient faites sans leur autorisation :

  une amende de 4 200 $ pour un total de 29 400 $ et la radiation temporaire de l’intimé pour une période d’un an à être purgée de façon concurrente.

[11]       Elle souligna que ce type d’infraction avait, par le passé, été sanctionné par l’imposition d’une amende de 2 000 $ alors que l’amende maximale prévue au Code des professions à ce titre était de 6 000 $.  Depuis ce temps, le législateur a procédé par deux fois à une hausse des amendes.  Le dernier amendement, en vigueur depuis le mois de décembre 2009, a porté à 2 000 $ l’amende minimale imposable et à 50 000 l’amende maximale.  L’amende suggérée serait ainsi le résultat d’une règle de trois à partir de la nouvelle amende minimale fixée par la Loi.  Elle ajouta que l’application immédiate de ces nouvelles amendes avait été reconnue par le comité dans l’affaire Burns[29].  

[12]       Elle réclama pour chacun des chefs 4 et 5 reprochant d’avoir manqué de compétence et professionnalisme en ne s’assurant pas que les produits auxquels les clients souscrivaient correspondaient à leur situation financière alors qu’il a signé comme leur représentant sans jamais les avoir rencontrés:

  la radiation temporaire de l’intimé pour une période d’un mois sur chacun des chefs à purger de façon consécutive pour un total de deux mois.

[13]       Pour les chefs 7, 8, 9, et 13 à 22 reprochant la contrefaçon de signature, les décisions antérieures citées ont imposé une radiation permanente ou temporaire de 5 ans.  Elle réclama :

  la radiation permanente de l’intimé sur chacun des chefs.

[14]       Pour le chef 26 concernant le prétendu remboursement d’argent qui était en réalité l’argent des clients, bien que n’ayant trouvé aucun chef de même nature dans les décisions antérieures du comité, elle s’appuya sur celles portant sur de fausses représentations et transactions faites à l’insu du client et plus particulièrement sur la décision rendue le 10 octobre 2007 dans Thibault c. Michel L’Italien où une radiation d’un an fut ordonnée. Ainsi, elle suggéra:

  la radiation temporaire de l’intimé pour une période d’un an à purger de façon concurrente.

[15]       Elle réclama également la condamnation de l’intimé aux déboursés et la publication de la décision.

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

[16]       Pour les chefs 1, 2, 3, 10, 11, 12 et 27, le procureur de l’intimé proposa une amende de 3 000 $ pour chacun des chefs et concéda à la plaignante l’imposition d’une radiation d’une période d’un an.

[17]       Également pour les chefs 4 et 5, il proposa la même durée de radiation que celle d’un mois réclamée par la plaignante mais à purger de façon concurrente plutôt que consécutive.

[18]       Il a soutenu, quant aux chefs 7, 8, 9, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21 et 22 reprochant la contrefaçon de signature, qu’il s’agissait davantage d’infractions où l’intimé  agissait par négligence et qu’il ne pouvait être sanctionné de façon aussi sévère.  Il souligna de plus que, contrairement à certaines décisions citées par la plaignante, l’intimé ne s’était pas approprié l’argent de ses clients d’où sa prétention que la radiation permanente réclamée n’était pas raisonnable.  Il suggéra à la place une radiation pour une période de deux ans à être purgée de façon concurrente.

[19]       Pour le chef 26, il concéda une radiation d’un an tel que proposé par la plaignante.

[20]       Il demanda au comité de tenir compte du fait que l’intimé s’était vu refuser par l’AMF le renouvellement de ses certificats en assurance de personnes et de courtage en épargne collective depuis janvier et avril 2008 respectivement.

[21]       En conséquence du non renouvellement de ces certificats, l’intimé aurait perdu son crédit et sa santé aurait été affectée.  Il dit que l’intimé avait deux enfants à charge et que son épouse travaillait et contribuait aux dépenses.  Aussi, sans toutefois fournir de preuve à l’appui, il prétendit que l’intimé travaillait comme vendeur de produits de consommation et n’aurait que 30 000 $ de revenu annuel.  De plus, les résidences de l’intimé, sans que le nombre en ait été précisé, auraient subi un incendie.  Les assureurs auraient refusé de l’indemniser et il serait en litige avec eux. 

[22]       Il demanda d’accorder en conséquence un délai de six mois pour le paiement des amendes.

ANALYSE ET DISPOSITIF

[23]       L’intimé a commis des infractions dont la gravité objective ne fait pas de doute.  Elles portent atteinte directement à l’exercice de la profession allant au cœur de la relation de confiance qui doit exister entre le client et le représentant.

[24]       Elles ont été perpétrées à plusieurs reprises et de façon délibérée.

[25]       L’intimé a profité des liens personnels et de confiance qu’il entretenait avec ses clients.

[26]       Par ailleurs, peu ou pas d’éléments atténuants n’ont été présentés en faveur de l’intimé.

[27]       Le 14 juillet 2003, suite à l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité, l’intimé a été sanctionné sur les dix chefs de la plainte portée contre lui pour des gestes posés entre octobre 1997 et août 2000.  Ces chefs impliquaient une seule cliente.  Cette fois-ci, les gestes reprochés font l’objet de 27 chefs qui impliquent 8 clients. 

[28]       Les infractions reprochées aux chefs 1, 2, 3, 10, 11, 12 et 27 ont été commises entre 1997 et juillet 2002.  Cette période est sensiblement la même que celle où ont été commises les infractions de semblable nature pour lesquelles l’intimé a été sanctionné le 14 juillet 2003 (chefs 5, 6 et 7).  Il ne peut donc s’agir de récidive. 

[29]       Toutefois, le comité d’alors précisa, au sujet de ces chefs qui s’apparentent quelque peu au présent groupe de chefs, que l’à-propos des transactions effectuées n’était pas en cause (P-2, p.5).  Il en est tout autrement en l’espèce.  Le présent comité a conclu que de procéder à de multiples transactions comme l’intimé l’a fait, était inutile, onéreux et injustifiable (décision sur culpabilité, par. 27) et non dans l’intérêt des clients.  Ce comportement de l’intimé dénote non pas de la simple négligence comme il semblait être le cas pour la décision du 14 juillet 2003, mais il s’agit ici d’un manque de bonne foi, d’honnêteté et de loyauté envers ses clients.

[30]       En conséquence, le comité suivra la suggestion faite par la plaignante d’une amende de 4 200 $ sur chacun de ces chefs estimant immédiate l’application de la hausse des amendes établie par l’amendement adopté en décembre 2009 à l’article 376 Loi sur la distribution de produits et services financiers et imposera également une radiation d’un an.

[31]       Pour les chefs 4 et 5, l’intimé a démontré encore une fois être peu respectueux de ses obligations et devoirs de représentant (décision sur culpabilité, par. 70 et 71).  Comme rapportés à ces chefs, il a signé à titre de représentant sur un profil d’investisseur, document essentiel pour déterminer la tolérance au risque des clients ainsi que sur des documents intitulés «Quick loan disclosure» à l’égard de deux clients et ce, sans même les avoir rencontrés.

[32]       Suivant la preuve documentaire, ces derniers faits se seraient produits le 18 juillet 2003 alors que des sanctions lui avaient été imposées pour une pratique négligente à peine quatre jours plus tôt. 

[33]       Il semble bien que l’intimé ne saisit pas la nécessité d'agir en toutes circonstances en professionnel consciencieux et diligent.  Cette façon d’exercer sa profession ne répond certes pas au travail appliqué, minutieux et diligent que les clients étaient en droit de s’attendre de sa part.  Il est sans excuse pour ne pas avoir respecté ses obligations professionnelles. 

[34]       L’intimé, qui en est à sa deuxième comparution devant notre comité, doit être amené à comprendre que le travail d’un représentant doit correspondre à celui d’un conseiller consciencieux.  Dans les circonstances, le comité imposera à celui-ci une radiation d’un mois sur chacun de ces chefs à être purgée de façon consécutive totalisant deux mois.  

[35]       Pour les chefs 7, 8, 9, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21 et 22 de contrefaçon, le comité estime qu’il y a lieu de faire une distinction avec les décisions citées par la plaignante où une radiation permanente fut ordonnée pour des infractions de même nature mais avec appropriation de fonds, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. 

[36]       Bien que les faits reprochés pour la majorité de ces chefs se soient produits à une époque contemporaine à ceux de la décision du 14 juillet 2003, ces derniers n’impliquaient qu’une cliente.  De plus, ceux du chef 7 de la présente plainte se sont produits en 2004 et 2005 donc à peine un an après cette décision.  L’intimé a ainsi clairement démontré qu’il n’a pas appris la leçon reçue en 2003. 

[37]       Le principe de la gradation des sanctions doit s’appliquer.  Même si enclin à imposer une radiation de cinq ans sur ces chefs, le comité, considérant que l’intimé n’a pu renouveler ses certificats depuis plus de deux ans, lui imposera sur chacun de ces chefs une radiation temporaire de trois ans à être purgée de façon concurrente.

[38]       Pour le chef 26, bien que les parties suggèrent une radiation d’une année à purger de façon concurrente, le comité ne peut suivre cette recommandation. 

[39]       Les faits mis en preuve sont très troublants.  La conclusion du comité fut que la preuve prépondérante avait démontré que l’intimé a prétendu à ses clients leur remettre un chèque tiré de ses propres argents en compensation pour les pertes qu’ils avaient subies sur leurs investissements, alors que cette somme provenait de la vente d’un fonds détenu dans leur propre compte.

[40]       De l’avis du comité, cette fausse représentation jointe à une transaction faite à l’insu des clients dans leur compte, porte gravement atteinte à la protection du public.  Elle commande une sanction plus sévère que celle suggérée.

[41]       Par conséquent, le comité imposera une radiation temporaire d’une année mais à être purgée de façon consécutive. 

[42]       Quant au délai demandé pour le paiement des amendes, vu l’absence de preuve, il sera refusé. 

[43]       Enfin le comité condamnera l’intimé au paiement des déboursés et ordonnera la publication de la décision dans les journaux au Québec et en Ontario puisque l’intimé y réside dorénavant.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

Sous chacun des chefs 1, 2, 3, 10, 11, 12 et 27

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 4 200 $ totalisant 29 400 $ et ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé comme membre de la Chambre de la sécurité financière pour une période d’un an, à être purgée de façon concurrente;

Sous chacun des chefs 4 et 5

ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé comme membre de la Chambre de la sécurité financière pour une période d’un mois sur chacun des chefs à être purgée de façon consécutive, pour un total de deux mois;

Sous chacun des chefs 7, 8, 9, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21 et 22

ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé comme membre de la Chambre de la sécurité financière pour une période de trois ans, à être purgée de façon concurrente;

Sous le chef 26

ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé comme membre de la Chambre de la sécurité financière pour une période d’un an, à être purgée de façon consécutive.

ORDONNE que dans l’éventualité où les certificats de l’intimé ne seraient pas en vigueur à l’expiration des délais d’appel, l’exécution de la radiation temporaire soit suspendue jusqu’à la date de la demande de remise en vigueur desdits certificats présentée par celui-ci;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions (L.R.Q., c. C-26);

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier, aux frais de l’intimé, un avis de la décision rendue, dans un journal circulant dans le lieu où l'intimé a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession, conformément aux dispositions de l’article 156 (5) du Code des professions (L.R.Q., c. C-26).

 

 

 

 

 

 

(s) Janine Kean  ___________________________

Me Janine Kean

Présidente du comité de discipline

 

 

(s) Kaddis Sidaros__________________________

M. Kaddis Sidaros, A.V.A., Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

 

(s) Felice Torre ___________________________

M. Felice Torre, A.V.A., Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

Me Véronique Poirier

COUTURE THERRIEN

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Jean-Paul Gagnon

Procureur de la partie intimée

 

Date d’audience :   

28 septembre 2010

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1] N.S. du 14 mai 2007, page 143, lignes 18 à 23.

[2] N.S. du 14 mai 2007, page 149, lignes 1 à 13.

[3] P-3, pp. 243- 244 et 276-277.

[4] P‑56 et P-57.

[5] P-3, p. 0249 et suivantes.

[6] Admission produite au dossier.

[7] Pièce P-4, p. 0324.

[8] N.S. du 6 novembre 2007, témoignage de l’intimé.

[9] Par exemple : P-3, pp. 0251 à 0257.

[10] Plaidoirie écrite, p.12, dernier paragraphe.

[11] Plaidoirie écrite de la plaignante, p. 12.

[12] N.S.14 mai 2007, p. 185-186.

[13] P-3, pp. 0243 et 0277.

[14] P-3, pp. 0244 et 0276.

[15] P-54, P-33.

[16] P-43, pp. 01392-01398.

[17] P-43, pp. 01401-01404.

[18] P-21, p. 01589.

[19] P-21, pp. 01592 à 01600.

[20] P-21, p. 01588.

[21] N.S. du 15 mai 2007, p. 129, ligne 14.

 

[22] P-42, p. 01359, p. 01368 et p. 01376.

[23] N.S. du 27 novembre 2007.

[24] N.S. du 15 mai 2007, p. 189, lignes15 à 25 et p. 190 lignes 1-15, P-42 p. 1358-1391.

[25] N.S. du 15 mai 2007, p.190, lignes 1-10.

[26] P-31.

[27] P-38, p.01350.

[28] Micheline Rioux c. Réal Samson, CD00-0332, décisions rendues les 22 juin 2006 et 10 janvier 2007; Micheline Rioux c. Peter A. Vultaggio, CD00-0641, décision rendue le 7 août 2007; Léna Thibault c. Michel L’Italien, CD00-0679, décision rendue le 10 octobre 2007; Léna Thibault c. Pascal Baril, CD00-0681, décisions rendues les 5 janvier 2009 et 23 juin 2009; Venise Levesque c. Marcel Baillargeon, CD00-0777, décisions rendues les 25 mars 2010 et 20 septembre 2010; Léna Thibault c. Steven Tedeschi, CD00-0707, décisions rendues les 13 mai 2009 et 6 octobre 2009; Léna Thibault c. Pierre Duguay, CD00-0631, décision rendue le 27 juin 2007; Léna Thibault c. Irène Hornez, CD00-0744, décision rendue le 29 juin 2009; Léna Thibault c. Rocco Di Stefano, CD00-0689 et CD00-0711, décision rendue le 23 juin 2008; Micheline Rioux c. Michel Daigneault, CD00-0672, décision rendue le 8 septembre 2008; Léna Thibault c. Saverina Cottone, CD00-0757, décision rendue le 10 août 2009.

[29] Venise Levesque c. Norman Burns, CD00-0731, décision rendue le 1er mars 2010.

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