Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N°:

CD00-0745

 

DATE :

 10 juillet 2009

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Janine Kean

Présidente

M. Robert Chamberland, A.V.A., Pl. fin.

Membre

M. Felice Torre, A.V.A., Pl. fin.

Membre

______________________________________________________________________

 

LÉNA THIBAULT, ès qualités de syndic de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

JEAN-CLAUDE THÉRIAULT, conseiller en assurance de personnes et représentant

en épargne collective

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

 

[1]          Le 19 février 2009, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s’est réuni à son siège social, sis au 300, rue Léo-Pariseau, 26e étage à Montréal et a procédé à l’audition d’une plainte disciplinaire portée contre l’intimé, laquelle contenait les neufs chefs d’accusation suivants : 

À L’ÉGARD DE SON CLIENT MARC BATES

 

1.     À Longueuil, le ou vers le 1er juin 2001, l’intimé JEAN-CLAUDE THÉRIAULT a conseillé et fait souscrire à son client, Marc Bates, un contrat de prêt avec Megapolis Services Financiers au montant de 18 000 $ CDN, alors qu’il n’était pas autorisé à offrir un tel placement en vertu de sa certification, contrevenant ainsi aux articles 9, 12, 13 et 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), aux articles 12 et 16 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.1.1.2) et à l’article 9 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.01);

 

2.     À Montréal, le ou vers le 16 octobre 2002, l’intimé JEAN-CLAUDE THÉRIAULT a conseillé et fait souscrire à son client, Marc Bates, un contrat de prêt avec Flamingo Capital Inc. au montant de 18 000 $ USD, alors qu’il n’était pas autorisé à offrir un tel placement en vertu de sa certification, contrevenant ainsi aux articles 9, 12, 13 et 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), aux articles 12 et 16 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.1.1.2) et à l’article 9 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.01);

 

3.     À Montréal, le ou vers le 6 juin 2003, l’intimé JEAN-CLAUDE THÉRIAULT a conseillé et fait souscrire à son client, Marc Bates, un certificat de placement auprès de Megapolis Services Financiers au montant de 18 000 $ CDN, alors qu’il n’était pas autorisé à offrir un tel placement en vertu de sa certification, contrevenant ainsi aux articles 9, 12, 13 et 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), aux articles 12 et 16 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.1.1.2) et à l’article 9 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.01);

 

4.     À Laval, le ou vers le 25 février 2003, l’intimé JEAN-CLAUDE THÉRIAULT a conseillé et fait souscrire à son client, Marc Bates, 7257 actions de catégorie A sans valeur nominale et 16 933 actions de catégorie B sans valeur nominale émises par Omniprobe inc. pour un montant de 24 999 $ CDN,, alors qu’il n’était pas autorisé à offrir un tel placement en vertu de sa certification, contrevenant ainsi aux articles 9, 12, 13 et 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), aux articles 12 et 16 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.1.1.2) et à l’article 9 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.01);

 

À L’ÉGARD DE SA CLIENTE SUZANNE GAGNON

 

5.     À Montréal, le ou vers le 7 août 2001, l’intimé JEAN-CLAUDE THÉRIAULT a conseillé et fait souscrire à sa cliente, Suzanne Gagnon, un contrat de prêt avec Megapolis au montant de 5 000 $ CDN, alors qu’il n’était pas autorisé à offrir un tel placement en vertu de sa certification, contrevenant ainsi aux articles 9, 12, 13 et 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), aux articles 12 et 16 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.1.1.2) et à l’article 9 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.01);

 

6.     À Montréal, le ou vers le 7 août 2001, l’intimé JEAN-CLAUDE THÉRIAULT a conseillé et fait souscrire à sa cliente, Suzanne Gagnon, un certificat de placement auprès de Golden Tech Corporation au montant de 5 000 $ CDN, alors qu’il n’était pas autorisé à offrir un tel placement en vertu de sa certification, contrevenant ainsi aux articles 9, 12, 13 et 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), aux articles 12 et 16 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.1.1.2) et à l’article 9 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.01);

 


À L’ÉGARD DE SES CLIENTS SUZANNE GAGNON ET MARC BATES

 

7.     À Montréal, entre le 1er juin 2001 et 6 juin 2003, l’intimé JEAN-CLAUDE THÉRIAULT a fourni des renseignements incomplets, faux ou trompeurs à ses clients Suzanne Gagnon et Marc Bates en leur laissant croire que les placements proposés étaient des placements canadiens comportant une garantie, contrevenant ainsi aux articles 7, 14 et 19 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.1.1.2);

 

8.     À Montréal, entre le 1er juin 2001 et 6 juin 2003, l’intimé JEAN-CLAUDE THÉRIAULT a conseillé et fait souscrire à ses clients Suzanne Gagnon et Marc Bates des certificats de placement et des contrats de prêt et ce, alors qu’il n’a pas fait les démarches raisonnables pour bien conseiller son client et qu’il n’a pas cherché à avoir une connaissance complète des faits entourant ces placements, contrevenant ainsi à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et à l’article 4 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.1.1.2);

 

À L’ÉGARD DE SON CLIENT ALAIN BOIS

 

9.     À Longueuil, le ou vers le 17 novembre 2003, l’intimé JEAN-CLAUDE THÉRIAULT a conseillé et fait souscrire à son client, Alain Bois, 24 650 actions sans valeur nominale de catégories A et B émises par Omniprobe inc. pour un montant de 25 000 $ CDN, alors qu’il n’était pas autorisé à offrir un tel placement en vertu de sa certification, contrevenant ainsi aux articles 9, 12, 13 et 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), aux articles 12 et 16 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.1.1.2) et à l’article 9 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. c. D-9.2, r. 1.01);

 

[2]          Tandis que la plaignante était représentée par procureur, l’intimé se représenta seul.  L’intimé avait préalablement signé, le 27 octobre 2008, un plaidoyer de culpabilité à tous les chefs d’accusation portés contre lui ainsi qu’une reconnaissance de culpabilité le 19 février 2009 (I-1).  À l’audition il réitéra ce plaidoyer de culpabilité.  La preuve documentaire (P-1 à P-28) fut produite de consentement.

[3]          Les infractions commises impliquent trois consommateurs.  Quant au couple Bates-Gagnon, leur relation d’affaires avec l’intimé datait du milieu des années 1990.  L’intimé s’était occupé de leurs placements REÉR, et autres fonds d’investissements.  L’intimé était le conseiller de M. Bois depuis 1989. 

[4]          Entre 2001 et 2003, l’intimé aurait proposé à ces trois clients différents produits procurant des rendements annuels entre 24 à 30 %[1].  Il s’agissait de contrats de prêt ou de certificats de placements auprès de Flamingo Capital Inc., de Megapolis Services Financiers et de Golden Tech Corporation.  Dans le cas d’Omniprobe inc., il s’agissait d’achat d’actions émises par cette compagnie.  Or, l’intimé n’était pas autorisé à offrir ces produits en vertu de sa certification.

[5]          En outre, eu égard au couple Bates-Gagnon, il lui était reproché aux chefs 7 et 8 de ne pas avoir fait les démarches raisonnables pour avoir une connaissance complète des placements de telle sorte que les informations auraient été incomplètes, fausses ou trompeuses.

[6]          Les pertes subies s’élèvent pour le couple Bates-Gagnon à environ 23 000 $ et pour M. Bois à 25 000 $ soit le montant retiré de son REÉR.  Il ressort de la preuve que les clients reprochent surtout à l’intimé de ne pas leur avoir dit combien ces placements étaient risqués[2].  En ce qui concerne M. Bois, bien qu’il ait reçu des brochures sur la compagnie et était au courant de risques de perte d’environ 30 % du montant investi, il dit avoir fait confiance à son conseiller.

[7]          La plaignante a proposé comme sanction une radiation temporaire de trois ans à être purgée de façon concurrente pour chacun des chefs 1 à 6 et 9 tandis qu’elle recommandait des amendes de 2 000 $ pour chacun des chefs 7 et 8, en plus de la condamnation aux déboursés et la publication de la décision. 

[8]          La plaignante rappela que le Fonds d’indemnisation des services financiers ne pouvait donner suite aux réclamations des consommateurs, ces produits n’étant pas couverts pas la certification du représentant.  Parmi les décisions soumises[3] à l’appui, elle souligna les affaires Balayer et Labarre où la syndique indiquait au comité que le nombre de plaintes à l’égard de ce type d’infractions, portant sur des produits non couverts par la certification du représentant et portant atteinte à l’image de la profession, était devenu un fléau d’où l’importance qu’un message clair soit envoyé par le comité de discipline aux conseillers afin d’assurer la protection du public.

[9]          D’entrée de jeu, l’intimé exprima son profond regret quant aux faits reprochés.  Confirmant qu’il était le conseiller de ces consommateurs au moment des faits reprochés, il expliqua que mû par le désir de faire faire de l’argent à ses clients et de leur obtenir de meilleurs rendements que ceux du marché régulier[4], il leur fit part de l’existence des produits en cause. 

[10]       L’intimé, étant membre du cabinet d’éducation Planitek International, les invita à assister aux assemblées tenues par cet organisme et, à cette occasion, les clients ont reçu les informations nécessaires pour prendre leurs décisions, mis à part les prospectus, sur les compagnies Megapolis Services Financiers, Omniprobe inc. et Flamingo Capital inc.  Les clients ont souscrit aux produits en cause non par son entremise mais par celle des représentants présents qui, avant de les faire souscrire aux produits, leur faisaient signer une déclaration de confidentialité et de non divulgation.  Toutefois, l’intimé reconnut que dans le cas de M. Bois celui-ci ne pouvant rester jusqu’à la fin des réunions, il s’est lui-même chargé de lui acheminer les documents pour signature. 

[11]       L’intimé a reconnu avoir dit à ses clients qu’il s’agissait de bons produits et qu’il avait lui-même investi dans ceux-ci.  Il avoua avoir peut-être été naïf mais jamais malhonnête.  Il s’est déclaré maintenant conscient qu’il n’aurait jamais dû leur proposer ces produits et toucher des commissions même minimes.  Il précisa que le couple Gagnon-Bates avait récupéré heureusement près des trois quarts de leur capital grâce au rendement de 24% touché pendant plusieurs années.  Ce serait lors du réinvestissement qu’ils auraient été moins chanceux et auraient perdu de l’argent.

[12]       L’intimé réitéra n’avoir jamais eu d’intention malhonnête et regretter ce qui s’était passé.  Suite aux difficultés éprouvées avec ces compagnies, deux avocats auraient été mandatés pour récupérer les sommes perdues mais les nombreuses démarches entreprises n’avaient eu, en date de l’audition, aucun résultat.  Omniprobe inc., compagnie canadienne, a déclaré faillite et la compagnie d’assurance Lloyds a refusé d’honorer l’assurance responsabilité professionnelle détenue par Planitek International  pour les pertes subies avec la compagnie Flamingo Capital inc., et conséquemment les pertes des investisseurs n’ont pas été remboursées.

[13]       Il assura que cette expérience lui avait fait voir et comprendre ses erreurs.  Il déclara, entre autres, doubler d’efforts depuis pour connaître sérieusement les produits financiers et leurs caractéristiques pour mieux informer et conseiller sa clientèle et ne pas leur conseiller de tels produits. 

[14]       Bien que se disant conscient de la gravité des infractions, l’intimé fit valoir que âgé de 62 ans, une radiation d’une durée de 3 ans signifierait la fin de sa carrière et l’empêcherait de gagner sa vie, ayant accumulé plus de 30 ans dans la profession.  De plus, sa conjointe étant aux études, il se trouve le seul à assumer les dépenses du couple.  Il ajouta ne pas avoir d’autres revenus d’emploi.

[15]       L’intimé demanda l’indulgence du comité précisant qu’il s’agissait d’une première plainte disciplinaire en 30 ans de pratique.  Il dit avoir bien compris qu’il ne peut pas conseiller ce type de produits non couverts par son certificat en épargne collective et souligna être heureux que ce soient les trois seuls clients à qui il a conseillé ces placements.  Il soumet que contrairement à une radiation, une suspension de ses activités professionnelles, seulement dans la discipline d’épargne collective, lui permettrait de continuer à gagner sa vie en continuant d’exercer dans la discipline des assurances et toucher les commissions de renouvellement durant la période de la suspension.

Analyse

[16]       En cours de délibéré le comité s’interrogea[5] sur la pertinence de donner suite au plaidoyer de culpabilité de l’intimé eu égard aux chefs 7 et 8 de la plainte en présence de la règle interdisant les condamnations multiples puisque l’intimé serait déclaré coupable des autres chefs lui reprochant d’avoir vendu des produits pour lesquels il n’avait pas de certification.  En réponse[6] à cette interrogation, la procureure de la syndique, reconnaissant que l’intimé ne pouvait être reconnu coupable à la fois sur les chefs relatifs au défaut de détenir la certification requise et sur ceux portant sur le défaut d’avoir donné à ses clients les conseils ou les informations appropriées, informa qu’elle demandait, en conséquence au comité, d’ordonner l’arrêt conditionnel des procédures quant aux chefs 7 et 8.

[17]       Dans les circonstances, le comité est d’avis qu’il y a lieu de prendre acte du plaidoyer de culpabilité de l’intimé et de le déclarer coupable sur chacun des chefs d’accusation 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 9 portés contre lui et d’ordonner l’arrêt conditionnel des procédures sur les chefs 7 et 8.

[18]       Quant aux critères d’imposition de la sanction disciplinaire, le comité croit utile de rappeler les paramètres établis par la Cour d’appel dans l’affaire Pigeon[7]:

« [37] La sanction imposée par le Comité de discipline doit coller aux faits du dossier.   Chaque cas est un cas d'espèce.

[38] La sanction disciplinaire doit permettre d'atteindre les objectifs suivants:  au premier chef la protection du public, puis la dissuasion du professionnel de récidiver, l'exemplarité à l'égard des autres membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables et enfin, le droit par le professionnel visé d'exercer sa profession (Latulippe c. Léveillé (Ordre professionnel des médecins), [1998] D.D.O.P. 311; Dr J. C. Paquette c. Comité de discipline de la Corporation professionnelle des médecins du Québec et al, [1995] R.D.J. 301 (C.A.); et R. c. Burns, [1994] 1 R.C.S. 656).

[39] Le Comité de discipline impose la sanction après avoir pris en compte tous les facteurs, objectifs et subjectifs, propres au dossier.   Parmi les facteurs objectifs, il faut voir si le public est affecté par les gestes posés par le professionnel, si l'infraction retenue contre le professionnel a un lien avec l'exercice de la profession, si le geste posé constitue un acte isolé ou un geste répétitif, …   Parmi les facteurs subjectifs, il faut tenir compte de l'expérience, du passé disciplinaire et de l'âge du professionnel, de même que sa volonté de corriger son comportement. La délicate tâche du Comité de discipline consiste donc à décider d'une sanction qui tienne compte à la fois des principes applicables en matière de droit disciplinaire et de toutes les circonstances, aggravantes et atténuantes, de l'affaire.»

[19]       Conformément à ces principes établis par la Cour d’appel, le comité doit faire les distinctions appropriées avec les causes citées.  Ainsi, le comité est d’avis qu’il doit s’écarter de la recommandation de la plaignante pour une radiation de trois ans laquelle s’appuyait sur les décisions Balayer et Labarre rendues pour les infractions liées à la vente de produits sans certification, estimant que les faits propres à ces cas diffèrent largement du cas en l’espèce. 

[20]       Sans diminuer la gravité des fautes commises par l’intimé, il n’en reste pas moins qu’il ressort de ces décisions, qu’en plus d’avoir entraîné des pertes financières d’une toute autre importance que celles en l’espèce, était en cause une pratique professionnelle déficiente, parfois teintée de supercherie ou de mensonge ou de fausses représentations. 

[21]       M. Thériault ne s’est pas enrichi de la commission des infractions.  Il a lui-même investi dans ces produits.  Son propre patrimoine a été mis en péril.  On peut conclure qu’il avait confiance dans les investissements qu’il a proposés.  La malhonnêteté ne caractérise pas le comportement de M. Thériault.  Le comité doit tenir compte de cet élément.  Par ailleurs, les victimes ne peuvent être indemnisées par le Fonds d’indemnisation des services financiers car M. Thériault agissait à l’extérieur des limites de son certificat.  Le montant du préjudice des clients est par conséquent égal aux argents investis.

[22]       Concernant les chefs 1 à 6 relatifs au couple Gagnon-Bates, bien que suffisant pour entraîner la culpabilité de l’intimé, seul l’élément «conseil» se retrouve ici, alors que dans les autres cas, les représentants étaient pour la plupart ceux qui ont fait souscrire ou vendu les produits.

[23]       Dans l’affaire Balayer[8], les pertes étaient, pour une des deux clientes visées par la plainte, de plus de 100 000 $ et ce montant représentait l’héritage entier que le père avait laissé à ses deux jeunes enfants sans oublier l’utilisation de fausses représentations et défaut de rendre compte par le représentant.  Dans Labarre[9], aucun fait atténuant n’a été présenté et il s’agissait de recommandations communes.

[24]       De l’avis du comité, ordonner une radiation pour la période suggérée en l’espèce serait abusif. Rappelons que la sanction disciplinaire n’a pas pour but de punir mais d’inciter le professionnel à exercer avec compétence conformément à la loi et à la réglementation auxquelles il est soumis. 

[25]       Il est vrai que c’est l’intimé qui a proposé en premier lieu ces produits aux consommateurs et, les invitant à assister aux assemblées organisées par Planitek International, leur a dit qu’il s’agissait de bons produits et qu’il en avait lui-même achetés.  Cependant, il est aussi vrai que les clients ont assisté aux assemblées et obtenu d’autres informations.  De plus, le couple Gagnon–Bates a souscrit aux produits par l’entremise de d’autres représentants qui leur faisaient au préalable signer une déclaration de confidentialité et de non divulgation. 

[26]       Le comité retient aussi aux fins de la sanction les démarches que l’intimé a entreprises pour recouvrer les pertes des clients lesquelles bien qu’infructueuses démontrent qu’il était, malgré ses erreurs, soucieux d’obtenir un remboursement pour ses clients.  Les pertes financières subies par ces derniers quoique non négligeables ne sont pas de l’ordre des affaires citées, les argents investis ne représentaient pas tous leurs avoirs.  Il est permis d’espérer que ces consommateurs pourront récupérer au cours de leur vie active ces pertes puisqu’ils n’étaient pas près de l’âge de la retraite.

[27]       Dans les cas cités, comme d’ailleurs dans des décisions[10] antérieures rendues par le comité de discipline concernant des infractions semblables, les consommateurs étaient déjà à la retraite ou les argents investis correspondaient à tous les avoirs ou économies d’une vie. 

[28]       Le comité est d’avis qu’il y a lieu, devant les faits démontrés, de tenir compte aussi que l’intimé est âgé de 62 ans, en fin de carrière et qu’une radiation de plus de six mois provoquerait pour ainsi dire la fin probable de sa carrière.  Il a exercé pendant plus de 30 ans et n’a pas d’antécédent disciplinaire.  Le comité est convaincu qu’il y a absence de mauvaise foi ou d’intention malveillante.  À cela s’ajoute le plaidoyer de culpabilité enregistré dès le début de l’enquête ce qui a évité un débat autrement plus coûteux aux parties en cause.  L’intimé a le droit de continuer à gagner sa vie et celle de sa conjointe.  Le comité est convaincu que l’intimé a saisi la leçon, que les risques de récidive sont excessivement faibles voir inexistants et que son repentir est sincère.

[29]       Le comité s’inspire de la récente affaire Côté[11] où une radiation pour une période de six mois a été ordonnée.  Il estime que le cas en l’espèce est aussi particulier.  Aussi, alors que M. Thériault croyait que le fait de conseiller de tels produits ne constituait pas une faute déontologique puisqu’il n’était pas celui qui les faisait souscrire, Madame Côté savait pertinemment qu’il s’agissait de produits non couverts par sa certification en épargne collective. 

[30]       De plus, Mme Côté en était au début de sa carrière de sorte que la radiation n’avait pas les mêmes conséquences, entre autres, puisqu’elle détenait déjà un autre emploi en tant qu’analyste auprès du groupe Desjardins. 

[31]       Le comité estime que cette sanction respecte les principes de la sanction disciplinaire. 

[32]       Par ailleurs, le comité condamnera l'intimé au paiement des déboursés et ordonnera la publication de la décision.

 

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé;

DÉCLARE l’intimé coupable sur chacun des chefs d’accusation 1 à 6 et 9 portés contre l’intimé;

ORDONNE l’arrêt conditionnel des procédures sur les chefs 7 et 8;

ET STATUANT SUR LA SANCTION 

ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé pour une période de six mois, pour chacun des chefs 1 à 6 et du chef 9, à être purgée de façon concurrente;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier aux frais de l'intimé un avis de la présente décision dans un journal où l’intimé a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément à l’article 156 (5) du Code des professions (L.R.Q., c. C-26);

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés y compris les frais d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions (L.R.Q., c. C-26).

 

 

(s) Janine Kean______________________

Me Janine Kean

Présidente du comité de discipline

 

(s) Robert Chamberland_______________

M. Robert Chamberland, A.V.A., Pl. fin.

Membre du comité de discipline

 

(s) Felice Torre______________________

M. Felice Torre, A.V.A., Pl. fin.

Membre du comité de discipline

 

 

Me Valérie Déziel

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

M. Jean-Claude Thériault

INTIMÉ

Non représenté

 

 

Date d’audience :

19 février 2009

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL



[1] P-17 et P-27.

[2] Supra, note 1.

[3] CSF c. Balayer, CD00-0674, rendue le 4 juin 2008; CSF c. Labarre, CD00-0691, rendue le 5 janvier 2009; CSF c. Messier, CD00-0673, rendue le 27 mars 2008.

[4] Les représentations de l’intimé incluent celles transmises dans sa lettre datée du 25 février 2009 dont le dépôt a été accepté par le comité qui a accordé en conséquence un délai jusqu’au 10 mars à la plaignante pour produire une réponse, s’il y avait lieu, ce qu’elle ne fit pas. 

[5] Lettre du comité de discipline aux parties en date du 3 juin 2009.

[6] Par lettre adressée au comité de discipline en date du 23 juin 2009.

[7] Pigeon c. Daigneault, 500-09-012513-024, Cour d’appel, 15 avril 2003.

[8] Voir note 2.

[9] Voir note 2.

[10]CSF c. Deslandes, CD00-0597; CSF c. Réjean Poulin, CD00-0600; CSF c. Alexandra Côté, CD00‑0703.

[11]CSF c. Alexandra Côté, CD00-0703, décision sur sanction rendue le 30 avril 2009.

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