Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N°:

CD00-0824

 

DATE :

26 mai 2011

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Jean-Marc Clément

Président

M. Patrick Haussmann, A.V.C.

Membre

M. Louis L’Espérance, A.V.C.

Membre

______________________________________________________________________

 

CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

SERGE BOILEAU (certificat 103 654)

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

 

[1]           Le 11 novembre 2010, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière « CSF » s’est réuni au siège social de la Chambre sis au 300, rue Léo-Pariseau, 26e étage, Montréal, dans le but de procéder à l’audition de la plainte portée contre l'intimé qui se lit comme suit :

LA PLAINTE

À L’ÉGARD DES CLIENTS MN.L. ET K.R.

1.      À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 13 juillet 2005, l’intimé, sans avoir rencontré MN.L. et K.R. ni communiqué avec eux, a signé à titre de conseiller et soumis pour ces clients la proposition no F124,154-6 auprès de la Financière Sun Life, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 23 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

2.      À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 13 juillet 2005, l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à MN.L. et K.R. la proposition no F124,154-6 auprès de la Financière Sun Life, a fait défaut de recueillir tous les renseignements et de procéder à une analyse complète et conforme de leurs besoins financiers, contrevenant ainsi aux articles 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.3);

3.      À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 13 juillet 2005,  l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à MN.L. et K.R. la proposition no F124,154-6 auprès de la Financière Sun Life, a fait défaut de leur fournir les explications nécessaires à la compréhension et à l’appréciation de la police, contrevenant ainsi aux articles 28 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 12, 13 et 14 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

4.      À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 13 juillet 2005, l’intimé a faussement laissé croire à l’assureur avoir agi comme conseiller et rencontré les clients MN.L. et K.R. pour la souscription de la proposition d’assurance-vie no F124,154-6 auprès de la Financière Sun Life, en signant sur celle-ci à titre de conseiller, contrevenant ainsi aux articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

5.      À Salaberry-de-Valleyfield et/ou à Lanoraie, le ou vers le 21 septembre 2005, l’intimé a, par le biais d’un tiers, remboursé au client MN.L. l’intégralité de la première prime au montant de 7 189 $ de la police d’assurance no F124,154-6 de la Financière Sun Life, contrevenant ainsi aux articles 22, 35 et 36 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

À L’ÉGARD DES CLIENTS L.C. ET M.T.

6.      À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 4 août 2005, l’intimé, sans avoir rencontré L.C. et M.T. ni communiqué avec eux, a signé à titre de conseiller et soumis pour ces clients la proposition no F143,024-8 auprès de la Financière Sun Life, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2),11, 23 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

7.      À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 4 août 2005, l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à L.C. et M.T. la proposition no F143,024-8 auprès de la Financière Sun Life, a fait défaut de recueillir tous les renseignements et de procéder à une analyse complète et conforme de leurs besoins financiers, contrevenant ainsi aux articles 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.3);

8.      À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 4 août 2005,  l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à L.C. et M.T. la proposition no F143,024-8 auprès de la Financière Sun Life, a fait défaut de leur fournir les explications nécessaires à la compréhension et à l’appréciation de la police, contrevenant ainsi aux articles 28 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 12, 13 et 14 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

9.      À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 4 août 2005, l’intimé a faussement laissé croire à l’assureur avoir agi comme conseiller et rencontré les clients L.C. et M.T. pour la souscription de la proposition d’assurance-vie no F143,024-8 auprès de la Financière Sun Life, en signant sur celle-ci à titre de conseiller, contrevenant ainsi aux articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

10.   À Salaberry-de-Valleyfield et/ou à Montréal, le ou vers le 27 octobre 2005, l’intimé a, par le biais d’un tiers, remboursé aux clients L.C. et M.T. l’intégralité de la première prime au montant de 11 662 $ de la police d’assurance no F143,024-8 de la Financière Sun Life, contrevenant ainsi aux articles 22, 35 et 36 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

À L’ÉGARD DES CLIENTS R.B. ET L.B.

11.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 5 juillet 2005, l’intimé, sans avoir rencontré R.B. et L.B. ni communiqué avec eux, a signé à titre de conseiller et soumis pour ces clients la proposition no F115,664-6 auprès de la Financière Sun Life, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 23 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

12.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 5 juillet 2005, l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à R.B. et L.B. la proposition no F115,664-6 auprès de la Financière Sun Life, a fait défaut de recueillir tous les renseignements et de procéder à une analyse complète et conforme de leurs besoins financiers, contrevenant ainsi aux articles 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.3);

13.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 5 juillet 2005, l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à R.B. et L.B. la proposition no F115,664-6 auprès de la Financière Sun Life, a fait défaut de leur fournir les explications nécessaires à la compréhension et à l’appréciation de la police, contrevenant ainsi aux articles 28 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 12, 13 et 14 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

14.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 5 juillet 2005, l’intimé a faussement laissé croire à l’assureur avoir agi comme conseiller et rencontré les clients R.B. et L.B. pour la souscription de la proposition d’assurance-vie no F115,664-6 auprès de la Financière Sun Life, en signant sur celle-ci à titre de conseiller, contrevenant ainsi aux articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

15.   À Salaberry-de-Valleyfield et/ou à Montréal, le ou vers le 24 octobre 2005, l’intimé a, par le biais d’un tiers, remboursé aux clients R.B. et L.B. l’intégralité de la première prime au montant de 6 703 $ de la police d’assurance no F115,664-6 de la Financière Sun Life, contrevenant ainsi aux articles 22, 35 et 36 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

À L’ÉGARD DE LA CLIENTE C.G.

16.   À Salaberry-de-Valleyfield et/ou à Montréal, le ou vers le 18 novembre 2005, l’intimé a, par le biais d’un tiers, avancé à sa cliente C.G. l’intégralité de la prime au montant de 3 200 $ de la police d’assurance no F190,025-9 de la Financière Sun Life, contrevenant ainsi aux articles 22, 35 et 36 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

À L’ÉGARD DES CLIENTS J.L. ET M.R.

17.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 20 janvier 2005, l’intimé, sans avoir rencontré J.L. et M.R. ni communiqué avec eux, a signé à titre de conseiller et soumis pour ces clients la proposition no L11189100 auprès de Standard Life, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 23 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

18.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 20 janvier 2005, l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à J.L. et M.R. la proposition no L11189100 auprès de Standard Life, a fait défaut de recueillir tous les renseignements et de procéder à une analyse complète et conforme de leurs besoins financiers, contrevenant ainsi aux articles 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.3);

19.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 20 janvier 2005, l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à J.L. et M.R. la proposition no L11189100 auprès de Standard Life, a fait défaut de leur fournir les explications nécessaires à la compréhension et à l’appréciation de la police, contrevenant ainsi aux articles 28 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 12, 13 et 14 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2,  r. 1.01);

20.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 20 janvier 2005, l’intimé a faussement laissé croire à l’assureur avoir agi comme conseiller et rencontré les clients J.L. et M.R. pour la souscription de la proposition d’assurance-vie no L11189100 auprès de Standard Life, en signant sur celle-ci à titre de conseiller, contrevenant ainsi aux articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

21.   À Salaberry-de-Valleyfield et/ou à Lavaltrie, le ou vers le 19 avril 2005, l’intimé a, par le biais d’un tiers, remboursé aux clients J.L. et M.R. l’intégralité de la première prime au montant de  4 318 $ de la police d’assurance no L11189100 auprès de Standard Life, contrevenant ainsi aux articles 22, 35 et 36 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

À L’ÉGARD DES CLIENTS MO.L. ET B.L.

22.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 12 septembre 2005, l’intimé, sans avoir rencontré MO.L. et B.L. ni communiqué avec eux, a signé à titre de conseiller et soumis pour ces clients la proposition no F176,669-3 de la Financière Sun Life, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 23 et 35 du  Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

23.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 12 septembre 2005, l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à MO.L. et B.L. la proposition no F176,669-3 de la Financière Sun Life, a fait défaut de recueillir tous les renseignements et de procéder à une analyse complète et conforme de leurs besoins financiers, contrevenant ainsi aux articles 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (R.R.Q., c. D-9.2, r.1.3);

24.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 12 septembre 2005,  l’intimé, alors qu’il faisait souscrire à MO.L. et B.L. la proposition no F176,669-3 de la Financière Sun Life, a fait défaut de leur fournir les explications nécessaires à la compréhension et à l’appréciation de la police, contrevenant ainsi aux articles 28 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 12, 13 et 14 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

25.   À Salaberry-de-Valleyfield, le ou vers le 12 septembre 2005, l’intimé a faussement laissé croire à l’assureur avoir agi comme conseiller et rencontré les clients MO.L. et B.L. pour la souscription de la proposition d’assurance-vie no F176,669-3 de la Financière Sun Life, en signant sur celle-ci à titre de conseiller, contrevenant ainsi aux articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

26.   À Salaberry-de-Valleyfield et/ou à Lavaltrie, le ou vers le 18 novembre 2005, l’intimé a, par le biais d’un tiers, remboursé aux clients MO.L. et B.L. l’intégralité de la première prime au montant de 6342 $ de la police d’assurance no F176,669-3 auprès de la Financière Sun Life, contrevenant ainsi aux articles 22, 35 et 36 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

À L’ÉGARD DE LA PROFESSION

27.   À Salaberry-de-Valleyfield et/ou à Repentigny, au cours de la période du 17 février 2004 au 8 décembre 2006, l’intimé a rémunéré pour exercer l’activité de représentant une personne qui n’en avait pas le droit, Richard Laroche, ou a partagé avec lui autrement que dans les limites permises par la loi, les commissions reçues pour la souscription de plusieurs polices d’assurance-vie, en transférant des revenus de son cabinet pour des sommes totalisant 1 872 516$ vers des sociétés à numéros contrôlées par Richard Laroche, contrevenant ainsi aux articles 37 et 40 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01);

28.  Au cours de la période du 24 février au 31 juillet 2009, l’intimé a nui au travail du syndic ou de son personnel et a systématiquement refusé de répondre à la plupart des questions contenues à la lettre du 24 février 2009 d’un enquêteur et ce, malgré des rappels répétés les 17 mars 2009, 17 avril 2009 et 6 mai 2009, contrevenant ainsi aux articles 342 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 42 42 et 44 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (R.R.Q., c. D-9.2, r. 1.01).

 

[2]           Les parties, assistées par leurs procureurs respectifs, ont annoncé au comité qu’elles avaient des recommandations communes à formuler vu l’entente intervenue entre elles concernant l’enregistrement par l’intimé d’un plaidoyer de culpabilité et la suggestion de sanctions.

[3]           L’intimé a alors enregistré un plaidoyer de culpabilité sur tous les chefs d’infraction de la plainte disciplinaire.

[4]           Les parties ont ensuite soumis au comité leurs preuves et représentations sur sanction.

[5]           Les pièces P-1 à P-143 ont été produites par la plaignante avec le consentement de l’intimé.

[6]           La pièce P-1 établit que l’intimé a détenu des certificats dans les disciplines d’assurance de personnes, d’assurance collective de personnes et de courtage en épargne collective.  Tous ces certificats sont échus car ils n’ont pas été renouvelés par l’intimé.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[7]           La plaignante a d’abord procédé à faire un bref rappel des faits ayant mené à la plainte disciplinaire qui comporte 28 chefs d’infraction.

[8]           Les actes reprochés à l’intimé ont été commis au cours de l’année 2005 pour la plupart.

[9]           L’intimé s’était associé avec un représentant radié de la Chambre de la sécurité financière du nom de Richard Laroche.

[10]        Le stratagème mis en place par ce représentant et l’intimé était le suivant.

[11]        Ledit Laroche sollicitait des propositions d’assurance pour des montants élevés. L’intimé signait les propositions d’assurance comme représentant sans rencontrer ou communiquer avec les clients et encaissait les commissions par l’entremise de son cabinet.

[12]        Pour attirer les clients, Laroche leur représentait qu’il s’agissait d’une « promotion d’assurance gratuite » car la prime de première année leur était remboursée.

[13]        L’émission de ces polices générait en effet d’importantes commissions de première année, lesquelles étaient supérieures au montant des primes minimales requises.

[14]        Ainsi, une partie des commissions servait à rembourser les clients et l’autre partie était dirigée par l’intimé dans les comptes des compagnies de Laroche.

[15]        L’intimé aurait ainsi encaissé illégalement la somme de 1 872 516 $.

[16]        Les parties ont fait les recommandations sur sanction suivantes en regroupant les chefs de plainte par catégorie :

Catégorie 1 (chefs 1, 6, 11, 17 et 22) : pour avoir soumis une proposition pour des clients sans les avoir rencontrés ni avoir communiqué avec eux (10 clients), une radiation temporaire de 1 mois par chef d’infraction à être purgée consécutivement entre elles, pour un total de 5 mois.

Catégorie 2 (chefs 2, 7, 12, 18 et 23) : pour avoir fait défaut de recueillir les renseignements pertinents auprès des clients et d’effectuer une analyse des besoins financiers « ABF » (10 clients), une radiation temporaire de 2 mois par chef d’infraction à être purgée consécutivement entre elles, pour un total de 10 mois.

Catégorie 3 (chefs 3, 8, 13, 19 et 24) : pour avoir fait défaut de fournir aux clients les explications nécessaires à la compréhension de la police (10 clients), une radiation temporaire de 6 mois par chef d’infraction à être purgée concurremment.

Catégorie 4 (chefs 4, 9, 14, 20 et 25) : pour avoir faussement laissé croire à l’assureur avoir agi comme conseiller et avoir rencontré les clients (10 clients), une radiation temporaire de 1 mois par chef d’infraction à être purgée consécutivement entre elles, pour un total de 5 mois.

Catégorie 5 (chefs 5, 10, 15, 16, 21 et 26) : pour avoir, par le biais d’un tiers, remboursé / avancé l’intégralité de la première prime (11 clients), une radiation permanente.

Catégorie 6 (chef 27) : pour avoir rémunéré pour exercer l’activité de représentant, une personne qui n’en avait pas le droit ou partagé avec elle les commissions reçues, une radiation permanente.

Catégorie 7 (chef 28) : pour avoir refusé de répondre aux questions de l’enquêteur, une radiation de trois mois à être purgée d’une façon concurrente.

[17]        La plaignante a demandé au comité d’ordonner la publication de la décision et de condamner l’intimé au paiement des déboursés.

[18]        Elle a informé le comité que l’intimé n’avait pas demandé le renouvellement de sa certification en courtage en épargne collective échue depuis le 27 septembre 2009 qui était sa dernière certification en vigueur.

[19]        Elle a ensuite procédé à exposer les facteurs aggravants et atténuants liés à cette affaire et a soumis un cahier d’autorités.

FACTEURS AGGRAVANTS ET ATTÉNUANTS EXPOSÉS

  L’intimé a eu une conduite manifestement prohibée;

  Son rôle a été essentiel et déterminant dans le stratagème mis en place puisqu’il était le seul des deux complices qui pouvaient soumettre des propositions d’assurance;

  Les actes ont été prémédités et répétés avec plusieurs clients;

  Opérant à son compte, il avait l’entier contrôle sur les gestes qu’il posait;

  Il a commis des actes malhonnêtes avec une personne non autorisée dans le dessein évident de s’enrichir;

  Sa conduite discrédite la profession;

  L’intimé était un professionnel comptant 20 années d’expérience au moment des infractions;

  Le risque de récidive est élevé;

  Il n’a jamais eu d’expression de remords ou de volonté de s’amender;

  Il a nui à l’enquête en refusant de répondre;

  Par contre, il n’y a pas eu de préjudice financier pour les clients;

  L’intimé n’a pas d’antécédent disciplinaire;

  L’intimé a reconnu sa faute en plaidant coupable et évitant ainsi les frais d’une audition;

  L’intimé a fait cession de ses biens.

[20]        Elle a ensuite soumis plusieurs décisions du comité de discipline de la CSF concernant des chefs d’infractions s’apparentant à la présente affaire dont il sera question plus loin.

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

  Aucun client n’a été floué;

  Les décisions soumises par la plaignante exposent des actes dérogatoires beaucoup plus graves que ceux de la présente affaire;

  La prime en matière d’assurances générales peut être financée mais pas celle en matière d’assurance–vie;

  L’intimé a fait défaut de suivre à la lettre le Code de déontologie;

  L’intimé a choisi de ne pas renouveler son certificat lorsque l’enquête a débuté de sorte que l’intimé n’a pas persisté dans sa pratique;

  L’intimé n’a pas fait en sorte de retarder l’audition de la plainte;

  L’intimé a négocié un règlement global de la plainte disciplinaire et a fait éviter ainsi une longue enquête;

  L’intimé a répondu aux demandes de la syndique, même si pas complètement à la satisfaction de cette dernière;

  L’intimé a fait cession de ses biens;

  La radiation permanente rencontre l’objectif de protection du public.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[21]        Puisqu’il s’agit de recommandations communes, il y a lieu pour le comité de vérifier si les recommandations ne sont pas inappropriées, déraisonnables, contraires à l’intérêt public ou de nature à discréditer l’administration de la justice tel qu’il a été établi par la Cour d’appel dans l’arrêt R. c. Douglas[1] et repris par le Tribunal des professions dans Malouin c. Notaires[2].

[22]        Les recommandations communes des parties rencontrent, selon le comité, ces critères, tel qu’il sera démontré ci-après.

[23]        En effet, concernant les infractions de catégorie 1 (avoir soumis une proposition pour des clients sans les avoir rencontrés ni avoir communiqué avec eux : chefs 1, 6, 11, 17 et 22), la recommandation repose sur les décisions rendues par le comité de discipline de la CSF dans les affaires Hornez[3] et Duguay[4]. Dans chacun de ces cas, la radiation avait été d’un (1) mois pour chaque infraction de nature similaire. Puisque dans le présent cas, l’intimé est déclaré coupable de plus d’une infraction et que des périodes de radiation sont imposées pour chacune des infractions, les radiations devront alors être purgées consécutivement.

[24]        Concernant les infractions de catégorie 2 (ABF : chefs 2, 7, 12, 18 et 23), la recommandation repose sur les décisions rendues par le comité de discipline de la CSF dans les affaires Cusson[5], Burns[6], Trottier[7] et Amar[8]. Bien que ces décisions aient considéré que l’imposition d’une amende est la sanction appropriée pour ce genre d’infraction, le comité estime qu’en raison de la faillite de l’intimé, la recommandation d’une radiation temporaire de deux (2) mois par chef d’infraction à être purgée consécutivement pour les raisons énumérées dans le paragraphe précédent apparaît ici appropriée et plus adéquate que l’imposition d’une amende.

[25]        Concernant les infractions de catégorie 3 (avoir fait défaut de fournir aux clients les explications nécessaires à la compréhension de la police : chefs 3, 8, 13, 19 et 24), la recommandation repose sur les décisions rendues par le comité de discipline de la CSF dans les affaires Desrosiers[9], Fortas[10], Messier[11] et Di Stefano[12].  Les décisions soumises portent sur des cas qui ne sont pas tout à fait semblables à la présente affaire. Dans ces décisions, le défaut de fournir les explications était accompagné de fausses représentations ou d’informations trompeuses et avait causé des pertes substantielles au client et les radiations imposées ont été d’une année.  Comme il n’y a pas eu de perte pour les clients dans le présent cas, il semble qu’une radiation de moindre durée, soit de six (6) mois à être purgée concurremment, est raisonnable.

[26]        Concernant les infractions de catégorie 4 (avoir faussement laissé croire à l’assureur avoir agi comme conseiller et avoir rencontré les clients (10 clients) : chefs 4, 9, 14, 20 et 25), la recommandation des parties est une radiation temporaire de 1 mois par chef d’infraction à être purgée consécutivement. Cette recommandation repose et est conforme aux décisions du comité de discipline de la CSF dans les affaires Hornez[13] et Duguay[14].

[27]        Concernant les infractions de catégorie 5 (avoir, par le biais d’un tiers, remboursé / avancé l’intégralité de la première prime (11 clients) : chefs 5, 10, 15, 16, 21 et 26), la recommandation est une radiation permanente. Cette recommandation repose et est conforme aux décisions rendues par le comité de discipline de la CSF dans les affaires Giroux[15], Maguire[16] et Roche[17] soumises par la plaignante. En effet, ce sont des actes dont la gravité objective est établie car ils démontrent un manque flagrant d’intégrité et de probité de la part de l’intimé.

[28]        Concernant les infractions de catégorie 6 (avoir rémunéré pour exercer l’activité de représentant, une personne qui n’en avait pas le droit ou partagé avec elle les commissions reçues : chef 27), la recommandation est une radiation permanente. Au soutien de cette recommandation, la plaignante a soumis l’affaire Giroux[18]. Dans cette affaire, le comité, contrairement à la suggestion commune de deux ans de radiation, avait radié le représentant pour une période de cinq (5) ans. Cette affaire ne comprenait qu’un seul chef d’accusation mais touchait 45 clients avec plus de 200 000 $ de commissions générées de façon prohibée. Or comme nous avons vu, les commissions générées dans le présent dossier dépassent le million de dollars. De plus, le procureur de l’intimé a soutenu devant le comité que pour la protection du public et rencontrer l’objectif fixé par la loi, une radiation permanente s’avérait nécessaire.

[29]        Concernant les infractions de catégorie 7 (avoir refusé de répondre aux questions de l’enquêteur : chef 28), la recommandation est une radiation de trois (3) mois à être purgée d’une façon concurrente. Cette recommandation est conforme aux décisions du comité soumises par la plaignante dans les affaires Butler[19] et Hentschel[20] où des radiations temporaires de trois (3) mois ont effectivement été imposées.

[30]        Enfin la plaignante a soumis les décisions du comité de discipline dans l’affaire Wheeler[21] et dans l’affaire Morinville[22] qui établissent que les fautes d’un représentant se rattachent à sa personne et non à ses champs d’exercice de sorte que lorsque des radiations sont imposées, elles touchent la personne dans tous ses champs de certification. La plaignante a soulevé ce point car l’intimé aurait souhaité poursuivre ses activités dans certains domaines.

[31]        Par son plaidoyer de culpabilité, l’intimé a reconnu ses actions fautives.

[32]        Ces actions sont indignes d’un représentant en plus d’être clairement malhonnêtes. Le comité adhère aux affirmations de la plaignante sur les facteurs aggravants. Le risque de récidive est réel et le public doit donc être protégé par une radiation permanente, comme l’a affirmé d’ailleurs son propre procureur.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé sur tous et chacun des vingt- huit (28) chefs d’infraction contenus à la plainte;

DÉCLARE l’intimé coupable de chacun des vingt-huit (28) chefs d’infraction contenus à la plainte;

ET PROCÉDANT SUR LA SANCTION :

ORDONNE sur chacun des chefs d’infraction numéros 1, 6, 11, 17 et 22 contenus à la plainte, la radiation temporaire de l’intimé pour une période de 1 mois à être purgée de façon consécutive entre elles, pour un total de cinq (5) mois, et à être purgées de façon concurrente avec les autres périodes de radiation ordonnées;

ORDONNE sur chacun des chefs d’infraction numéros 2, 7, 12, 18 et 23 contenus à la plainte, la radiation temporaire de l’intimé pour une période de deux (2) mois à être purgée de façon consécutive entre elles, pour un total de dix (10) mois, et à être purgées de façon concurrente avec les autres périodes de radiation ordonnées;

ORDONNE sur chacun des chefs d’infraction numéros 3, 8, 13, 19 et 24 contenus à la plainte, la radiation temporaire de l’intimé pour une période de six (6) mois à être purgée de façon concurrente avec les autres périodes de radiation ordonnées;

ORDONNE sur chacun des chefs d’infraction numéros 4, 9, 14, 20 et 25 contenus à la plainte, la radiation temporaire de l’intimé pour une période de 1 mois à être purgée de façon consécutive entre elles, pour un total de cinq (5) mois, et à être purgées de façon concurrente avec les autres périodes de radiation ordonnées;

ORDONNE sur chacun des chefs d’infraction numéros 5, 10, 15, 16, 21 et 26 contenus à la plainte, la radiation permanente de l’intimé;

ORDONNE sur le chef d’infraction numéro 27 contenu à la plainte, la radiation permanente de l’intimé;

ORDONNE sur le chef d’infraction numéro 28 contenu à la plainte, la radiation temporaire de l’intimé pour une période de trois (3) mois, et à être purgées de façon concurrente avec les autres périodes de radiation ordonnées;

ORDONNE que les périodes de radiation temporaire susmentionnées ne prennent effet qu’au moment de la reprise par l’intimé de son droit de pratique et de l’émission en son nom d’un certificat par l’Autorité des marchés financiers;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier aux frais de l’intimé un avis de la présente décision dans un journal où l’intimé a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément à l’article 156 (5) du Code des professions, L.R.Q., chap. C-26;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés, y compris les frais d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, L.R.Q., chap. C-26.

 

 

 

 

 

(s) Jean-Marc Clément________________

Me JEAN-MARC CLÉMENT

Président du comité de discipline

 

 

(s) Patrick Haussmann ________________

M. PATRICK HAUSSMANN, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

 

(s) Louis L’Espérance_________________

M. LOUIS L’ESPÉRANCE, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

 

 

 

 

Me Sylvie Poirier

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Robert Laroche

Procureur de la partie intimée

 

Date d’audience :

11 novembre 2010

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1] R. c. Douglas, (2002) 162 C.c.c. (3rd) 37.

[2] Malouin c. Notaires, 2002 QCTP 15.

[3] Thibault c. Hornez, CD00-0744, 29 juin 2009.

[4] Thibault c. Duguay, CD00-0631, 27 Juin 2007.

[5] Levesque c. Cusson, CD00-0772, 3 mai 2010.

[6] Levesque c. Burns, CD00-0731, décision sur sanction le 1er mars 2010.

[7] Rioux c. Trottier, CD00-0678, décision sur sanction le 22 mars 2010.

[8] Rioux c. Amar, CD00-0653, décision sur sanction le 22 mai 2009.

[9] Rioux c. Desrosiers, CD00-0661, décision sur sanction le 12 mars 2009.

[10] Rioux c. Fortas, CD00-0647, décision sur sanction le 29 janvier 2008.

[11] Thibault c. Messier, CD00-0673, décision sur culpabilité et sanction le 27 mars 2008.

[12] Thibault c. Di Stefano, CD00-0689 et CD00-0711, décision sur culpabilité et sanction le 23 juin 2008.

[13] Thibault c. Hornez, précité, note 3.

[14] Thibault c. Duguay, précité, note 4.

[15] Rioux c. Giroux, CD00-0629, décision sur culpabilité et sanction le 23 mars 2007.

[16] Rioux c. Maguire, CD00-0518, décision sur culpabilité et sanction le 12 août 2003.

[17] Rioux c. Roche, CD00-0441, décision sur culpabilité et sanction le 12 août 2003.

[18] Rioux c. Giroux, CD00-0551, décision sur culpabilité et sanction le 26 avril 2005.

[19] Champagne c. Butler, CD00-0780, décision sur culpabilité et sanction le 8 février 2010.

[20] Thibault c. Hentschel, CD00-0770, décision sur culpabilité et sanction le 22 octobre 2009.

[21] Thibault c. Wheeler, CD00-0746, décision sur culpabilité et sanction le 15 septembre 2009.

[22] Thibault c. Morinville, CD00-0724, décision sur culpabilité et sanction le 31 décembre 2009.

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