Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0908

 

DATE :

3 juillet 2012

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LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

M. Armand Éthier, A.V.C.

Membre

Mme Monique Puech

Membre

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CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

SOUPHAVANH SAVANN (certificat 188 477)

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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[1]           Le 5 mars 2012, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni au siège social de la Chambre sis au 300, rue Léo-Pariseau, bureau 2600, Montréal, et a procédé à l'audition d’une plainte disciplinaire portée contre l’intimé ainsi libellée :

LA PLAINTE

« 1.       À Deux-Montagnes, le ou vers le 15 novembre 2010, l’intimé s’est approprié pour ses fins personnelles la somme de 210 $, que lui avait confiée D.G. pour fins de paiement de primes d’assurance dues à la Compagnie d’assurance Combined d’Amérique, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3). »

[2]           D’entrée de jeu, l’intimé qui se représentait lui-même enregistra un plaidoyer de culpabilité à l’égard de l’unique chef d’accusation contenu à la plainte.

[3]           Après l’enregistrement dudit plaidoyer, les parties soumirent au comité leurs preuve et représentations sur sanction.

PREUVE DES PARTIES

[4]           Alors que la plaignante versa au dossier, sous les cotes P-1 à P-6, une preuve documentaire en lien avec l’infraction reprochée à l’intimé, elle ne fit entendre aucun témoin.

[5]           Quant à l’intimé, il choisit de témoigner mais ne déposa aucun document.

[6]           Les parties soumirent ensuite au comité leurs représentations sur sanction.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

Sanction recommandée

[7]           La plaignante, par l’entremise de son procureur, débuta en indiquant qu’elle suggérait au comité d’imposer à l’intimé une radiation temporaire de cinq (5) ans.

[8]           Elle ajouta réclamer de plus la condamnation de ce dernier au paiement des déboursés ainsi que la publication de la décision

[9]           Elle indiqua que le contexte factuel lié à l’infraction reprochée à l’intimé était relativement simple et résuma celui-ci comme suit :

Les faits

[10]        Le consommateur en cause, D.G., et son épouse, détenaient des polices d’assurance-vie dont ils acquittaient les primes auprès du représentant de l’assureur qui avait pour tâche de les visiter périodiquement afin d’en faire la cueillette.

[11]        Affecté à cette fonction, le ou vers le 15 novembre 2010, l’intimé recueillit auprès de D.G. la somme de 210 $ mais, plutôt que de remettre ladite somme à l’assureur, s’appropria celle-ci à ses fins personnelles. Selon ses affirmations, il éprouvait à l’époque des « difficultés financières ».

[12]        Quelque temps après, les assurés reçurent un avis les informant du défaut de paiement de leurs primes.

[13]        Ils communiquèrent alors avec l’assureur et informèrent ce dernier qu’ils en avaient acquitté le paiement auprès de l’intimé et que ce dernier leur avait remis un reçu le confirmant.

[14]        L’assureur entrepris alors une enquête et son représentant rencontra, le ou vers le 26 janvier 2011, l’intimé.

[15]        Bien que ce dernier débuta en refusant d’admettre les faits, il passa par la suite rapidement aux aveux et admit s’être approprié la somme de 210 $ que lui avait confiée les clients.

[16]        Il signa alors une déclaration avouant sa faute et consentit à immédiatement rembourser l’assureur.

[17]        Il fut ensuite avisé que son contrat était terminé et remercié de ses services.

[18]        Après avoir ainsi résumé les faits, la plaignante entreprit de faire état tant des éléments objectifs que subjectifs propres au dossier.

Éléments tant objectifs que subjectifs

[19]        La plaignante mentionna d’abord la gravité objective de la faute commise par l’intimé.

[20]        Elle indiqua que le détournement de fonds était, tel que le comité l’avait déclaré à quelques reprises, l’une des infractions les plus sérieuses que puisse commettre un représentant.

[21]        Elle signala qu’une telle faute portait atteinte à l’image de la profession, l’honnêteté étant une qualité absolument requise de tous les membres, la relation de confiance avec le public reposant sur l’intégrité des représentants.

[22]        Elle déclara ensuite que dans le choix de la sanction recommandée, elle avait tenu compte des facteurs atténuants suivants :

-               la reconnaissance par l’intimé de sa faute, tant auprès de son employeur qu’auprès de l’enquêteur de la Chambre;

-               l’enregistrement par ce dernier d’un plaidoyer de culpabilité;

-               le « faible » montant détourné (210 $) et le remboursement de ladite somme à l’assureur;

-               le peu d’expérience de l’intimé au moment de l’infraction;

-               son absence d’antécédents disciplinaires;

-               la perte d’emploi qu’il a subi comme conséquence de sa faute.

[23]        Puis, faisant état des facteurs aggravants, elle indiqua que, puisqu’au moment des faits qui lui sont reprochés l’intimé était âgé de 30 ans, l’on ne pouvait pas parler dans son cas d’une « faute de jeunesse » et rappela que, bien que l’intimé ait admis sa faute au représentant de l’assureur, avant de passer aux aveux, il avait d’abord nié celle-ci.

[24]        Elle termina en indiquant qu’à son avis, la sanction qu’elle suggérait respectait les paramètres jurisprudentiels applicables. Au soutien de cette affirmation, elle cita deux (2) décisions du comité, soit la décision rendue dans l’affaire Poirier[1] et celle rendue dans l’affaire Raymond[2].

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

[25]        Invité à faire ses recommandations, l’intimé qui avait témoigné indiqua que si ce n’était pour mentionner qu’il était en accord avec les recommandations de la plaignante, il n’avait rien à dire ou ajouter.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[26]        Selon l’attestation du droit de pratique de l’Autorité des marchés financiers produite au dossier, l’intimé a détenu du 29 septembre 2010 au 7 février 2011, soit pour une courte période, un certificat dans la discipline de l’assurance contre la maladie ou les accidents pour le cabinet Compagnie d’assurance Combined d’Amérique.

[27]        Il est âgé de 30 ans et n’a aucun antécédent disciplinaire.

[28]        Il a collaboré aux enquêtes de son employeur et de la syndique et leur a avoué sa faute.

[29]        L’assureur en cause n’a subi aucune perte financière puisque l’intimé lui a remboursé la somme qu’il s’était appropriée.

[30]        L’intimé s’est présenté devant le comité et a enregistré à la première occasion un plaidoyer de culpabilité à l’égard de l’unique chef d’accusation porté contre lui.

[31]        Comme conséquence de sa faute, il a perdu son emploi.

[32]        Il a choisi d’entreprendre une nouvelle carrière dans un tout autre domaine et occupe maintenant un poste de dessinateur-technicien.

[33]        Lors de son témoignage devant le comité, il a déclaré qu’au moment où il a détourné la somme de 210 $ il vivait une période très difficile au plan financier et qu’il avait agi de la sorte « afin de payer l’épicerie ».

[34]        Il a rendu un témoignage crédible et après l’avoir entendu, le comité est d’avis qu’il assume sa faute même s’il n’a pas spécifiquement exprimé de regret à l’égard de celle-ci.

[35]        Soulignons enfin que la somme détournée, sans être insignifiante, est plus minime que ce à quoi le comité est généralement confronté.

[36]        Néanmoins, l’intimé a commis une faute dont la gravité objective est indéniable.

[37]        Indépendamment du montant, tel que le comité l’a déclaré à plusieurs reprises, l’appropriation de fonds est l’une des infractions les plus sérieuses que puisse commettre un représentant.

[38]        Ce type de faute porte directement atteinte à l’image de la profession.

[39]        Aussi, après avoir considéré tant les éléments objectifs que subjectifs qui lui ont été présentés, le comité est d’avis que la condamnation de l’intimé à une radiation temporaire de cinq (5) ans, telle que proposée par la plaignante et à laquelle l’intimé ne s’est pas objecté, serait en l’espèce, une sanction juste et appropriée, adaptée à l’infraction et respectueuse des principes d’exemplarité et de dissuasion dont il ne doit pas faire abstraction.

[40]        Le comité suivra donc la recommandation de la plaignante et condamnera l’intimé à une radiation temporaire de cinq (5) ans.

[41]        De plus, en l’absence de motifs qui pourraient le justifier d’agir différemment, le comité ordonnera la publication de la décision et condamnera l’intimé au paiement des déboursés.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé sous l’unique chef d’accusation contenu à la plainte;

DÉCLARE l’intimé coupable du chef d’accusation contenu à la plainte;

ET, PROCÉDANT SUR SANCTION :

ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé pour une période de cinq (5) ans;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés, y compris les frais d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, L.R.Q. chap. C-26;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier aux frais de l’intimé un avis de la présente décision dans un journal où l’intimé a ou avait son domicile professionnel ou dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément à l’article 156(5) du Code des professions, L.R.Q. chap. C-26.

 

 

 

 

 

 

(s) François Folot____________________

Me FRANÇOIS FOLOT

Président du comité de discipline

 

(s) Armand Ethier____________________

M. ARMAND ÉTHIER, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

(s) Monique Puech___________________

Mme MONIQUE PUECH

Membre du comité de discipline

 

 

Me Alain Galarneau

POULIOT CARON PREVOST BELISLE GALARNEAU

Procureurs de la partie plaignante

 

L’intimé se représente lui-même

 

Date d’audience :

5 mars 2012

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1] Venise Levesque c. Stéphane Poirier, CD00-0696, décision sur culpabilité en date du 3 septembre 2008 et sur sanction en date du 26 janvier 2009.

[2] Caroline Champagne c. Mélanie Raymond, CD00-0829, décision sur culpabilité et sanction en date du 22 juin 2011.

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