Chambre de la sécurité financière (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0685

 

DATE :

3 septembre 2008

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

Me Bernard Meloche, Pl. Fin.

Membre

M. Alain Côté, A.V.C.

Membre

______________________________________________________________________

 

Mme LÉNA THIBAULT, ès qualités de syndic de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

M. STÉPHANE CHAREST

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SUR SANCTION

______________________________________________________________________

 

[1]           Le 2 avril 2008, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni aux locaux de la Cour fédérale du Canada, au palais de justice de Québec, et a procédé à l'audition d'une plainte disciplinaire portée contre l'intimé ainsi libellée :

LA PLAINTE

« OLIVIER DESROCHES

1.             À Québec, le ou vers le 21 septembre 2006, l’intimé s’est approprié pour ses fins personnelles une somme de 10 000 $ que son client, Olivier Desroches, lui avait remise pour fins «d’investissement», le tout contrairement à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi qu’aux articles 11, 12, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

2.             À Québec, le ou vers le 3 octobre 2006, l’intimé s’est approprié pour ses fins personnelles une somme de 10 000 $ que son client, Olivier Desroches, lui avait remise pour fins «d’investissement», le tout contrairement à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi qu’aux articles 11, 12, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

3.             À Québec, le ou vers le 4 octobre 2006, l’intimé s’est approprié pour ses fins personnelles une somme de 20 000 $ que son client, Olivier Desroches, lui avait remise pour fins «d’investissement», le tout contrairement à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi qu’aux articles 11, 12, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

4.             À Québec, le ou vers le 13 octobre 2006, l’intimé s’est approprié pour ses fins personnelles une somme de 2 000 $ que son client, Olivier Desroches, lui avait remise pour fins «d’investissement», le tout contrairement à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi qu’aux articles 11, 12, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

WILLIAM CRÉPAULT ET SOPHIE POTVIN

5.             À Vallée-Jonction, le ou vers le 28 novembre 2006, l’intimé s’est approprié pour ses fins personnelles une somme de 10 000 $ que son client, William Crépault, lui avait remise pour fins «d’investissement», le tout contrairement à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi qu’aux articles 11, 12, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

6.             À Vallée-Jonction, le ou vers le 28 novembre 2006, l’intimé s’est approprié pour ses fins personnelles une somme de 10 500 $ que ses clients, William Crépault et Sophie Potvin, lui avaient remise pour fins «d’investissement», le tout contrairement à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi qu’aux articles 11, 12, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

DOSSIER CRIMINEL AYANT UN LIEN AVEC LA PROFESSION

7.             À Québec, le ou vers le 18 décembre 2006, dans le dossier 200-01-097815-058 de la Cour du Québec, chambre criminelle, l’intimé s’est reconnu coupable des infractions criminelles suivantes ayant un lien avec l’exercice de la profession :

i)      Entre le 10 octobre 2004 et le 16 novembre 2004, à Lévis, district de Québec, par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, a frustré Danny Hardy, d’une somme de 6600 $, d’une valeur dépassant 5000,00 $, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 380 (1) a) du Code criminel.

ii)     Entre le 10 octobre 2004 et le 16 novembre 2004, à Lévis, district de Québec, par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, a frustré Pier Côté, d’une somme de 5000 $, d’une valeur dépassant 5000,00 $, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 380 (1) b) i) du Code criminel.

iii)    Entre le 10 octobre 2004 et le 16 novembre 2004, à Lévis, district de Québec, par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, a frustré Jean-Pierre Desrochers, d’une somme de 7000 $, d’une valeur dépassant 5000,00 $, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 380 (1) a) du Code criminel.

iv)   Entre le 10 octobre 2004 et le 16 novembre 2004, à Lévis, district de Québec, par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, a frustré Annick Leclerc, d’une somme de 12 800 $, d’une valeur dépassant 5000,00 $, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 380 (1) a) du Code criminel.

Le tout contrairement à l’article 149.1 du Code des professions; »

[2]           D'entrée de jeu, l'intimé manifesta la volonté d'enregistrer un plaidoyer de culpabilité à l'égard de tous les chefs d'accusation contenus à la plainte portée contre lui.

[3]           Questionné plus à fond par le comité, il sembla par la suite émettre certaines réserves à reconnaître sa culpabilité sur le chef numéro 7.

[4]           Il mentionna s'interroger sur la juridiction du comité sur ce chef. En effet, bien qu'il indiqua admettre les déclarations de culpabilité en matière pénale mentionnées aux sous-paragraphes i), ii), iii) et iv) dudit chef, il déclara se questionner sur le lien entre les infractions criminelles y mentionnées et l'exercice de la profession. Il signala que la commission de celles-ci avait eu lieu avant même le moment où il était devenu titulaire d'un certificat de représentant. En fin de compte, il déclara laisser au comité le soin de déterminer si dans de telles circonstances ce chef d'accusation ne devrait pas être rejeté.

[5]           Devant cette situation, le comité accepta le plaidoyer de culpabilité de l'intimé sur les six (6) premiers chefs d'accusation.

[6]           Il prit ensuite acte de l'admission de l'intimé relative aux déclarations de culpabilité en matière pénale mentionnées au chef 7 et écouta les arguments des parties[1] relativement à celui-ci.

[7]           Par la suite, il entendit les recommandations des parties quant aux sanctions à imposer à l'intimé (sous réserve de sa décision à l'égard du chef 7).

MOTIFS ET DISPOSITIF

SUR LA CULPABILITÉ

Olivier Desroches

Chefs d'accusation 1 à 4

[8]           La preuve présentée au comité sur ces chefs a révélé que le consommateur en cause, M. Olivier Desroches, a d'abord fait affaire avec l’intimé à l'occasion de la souscription d'une police d'assurance-vie au nom de sa fille.

[9]           Par la suite, l'intimé lui a proposé d'investir dans un projet immobilier et lui a promis des rendements hors de l'habituel.

[10]        Sous ce fallacieux prétexte, l'intimé lui a soutiré, aux dates mentionnées aux quatre (4) chefs d'accusation, une somme totale de 42 000 $ qu'il a ensuite détournée à ses fins personnelles.

[11]        L'intimé a reconnu sa culpabilité sur chacun de ces chefs d'accusation et sera en conséquence déclaré coupable sur chacun d'eux.

William Crépault et Sophie Potvin

Chefs d'accusation 5 et 6

[12]        La preuve présentée au comité sur ces chefs a révélé que le couple Potvin-Crépault a d'abord souscrit, en octobre 2005, par l'entremise de l'intimé, une police d'assurance-vie.

[13]        Par la suite, ce dernier leur a proposé d'investir dans un projet immobilier et leur a promis à eux aussi des rendements hors de l'habituel.

[14]        Le ou vers le 28 novembre 2006, dans le but d'investir dans ledit projet M. Crépault et Mme Potvin lui ont remis au total une somme de 20 500 $ que l'intimé a ensuite détournée à ses fins personnelles.

[15]        L'intimé a reconnu sa culpabilité sur chacun de ces chefs d'accusation et sera en conséquence déclaré coupable sur chacun d'eux.

Dossier criminel ayant un lien avec la profession

Chef d'accusation 7

[16]        Ce chef d'accusation allègue que le ou vers le 18 décembre 2006 (dossier 200-01-097815-058 de la Cour du Québec, chambre criminelle), l'intimé s'est reconnu coupable des infractions criminelles suivantes :

i)       Entre le 10 octobre 2004 et le 16 novembre 2004, à Lévis, district de Québec, par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, a frustré Danny Hardy, d’une somme de 6600 $, d’une valeur dépassant 5000,00 $, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 380 (1) a) du Code criminel.

ii)      Entre le 10 octobre 2004 et le 16 novembre 2004, à Lévis, district de Québec, par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, a frustré Pier Côté, d’une somme de 5000 $, d’une valeur dépassant 5000,00 $, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 380 (1) b) i) du Code criminel.

iii)    Entre le 10 octobre 2004 et le 16 novembre 2004, à Lévis, district de Québec, par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, a frustré Jean-Pierre Desrochers, d’une somme de 7000 $, d’une valeur dépassant 5000,00 $, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 380 (1) a) du Code criminel.

iv)    Entre le 10 octobre 2004 et le 16 novembre 2004, à Lévis, district de Québec, par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, a frustré Annick Leclerc, d’une somme de 12 800 $, d’une valeur dépassant 5000,00 $, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 380 (1) a) du Code criminel.

[17]        Se prévalant des dispositions de l'article 149.1 du Code des professions, la plaignante a saisi le comité de la décision de la Cour du Québec, chambre criminelle.

[18]        Puisque l'intimé a admis les faits (les déclarations de culpabilité aux infractions criminelles en cause), le comité doit simplement décider si ledit article 149.1 du Code des professions peut trouver application en l'espèce.

[19]        Ledit article 149.1 se lit comme suit :

« 149.1. Le syndic ou un syndic adjoint peut saisir le comité de discipline, par voie de plainte, de toute décision d'un tribunal canadien déclarant un professionnel coupable d'une infraction criminelle qui, de son avis, a un lien avec l'exercice de la profession. Une copie dûment certifiée de la décision judiciaire fait preuve devant le comité de discipline de la commission de l'infraction et, le cas échéant, des faits qui y sont rapportés. Le comité de discipline prononce alors contre le professionnel, s'il le juge à propos, l'une ou l'autre des sanctions prévues à l'article 156. »

[20]        Alors que la plaignante soutient que les infractions criminelles en cause ont un lien avec l'exercice de la profession, l'intimé prétend qu'elles ne peuvent y être rattachées puisqu'au moment de la commission desdites infractions il ne détenait aucun permis ou certificat. Il allègue qu'elles n'ont pu être commises dans le contexte d'une relation professionnelle non plus que dans le cadre de l'exercice de la profession et ainsi le comité n'aurait aucune juridiction pour le sanctionner à l'égard de celles-ci.

[21]        Or, il faut d’abord remarquer que le libellé de l'article 149.1 réfère à « toute décision » d'un tribunal canadien.

[22]        L'expression « toute décision » est claire et ne souffre aucune équivoque. Le législateur ne fait aucune distinction relativement au moment de la perpétration de l'infraction. Il indique comme seule réserve que celle-ci doit avoir « un lien avec l'exercice de la profession ».

[23]        Il faut donc conclure que ce qui importe c'est le moment de la décision de culpabilité et que le comité de discipline a juridiction dès l'instant où un représentant est déclaré coupable d'un acte criminel dans la mesure où celui-ci comporte « un lien avec l'exercice de la profession ».

[24]        Par ailleurs, afin de connaître la portée exacte de cette disposition législative et plus particulièrement le sens à donner aux termes : « qui a un lien avec l’exercice de la profession », il faut rechercher le but visé par le législateur.

[25]        Il convient donc de considérer certains principes d'interprétation. Plus particulièrement, l'on retrouve à l'article 41 de la Loi d'interprétation (L.R.Q., c. I-16) l'objet présumé d'une loi.

[26]        Ledit article se lit comme suit :

« 41. Toute disposition d'une loi est réputée avoir pour objet de reconnaître des droits, d'imposer des obligations ou de favoriser l'exercice des droits, ou encore de remédier à quelque abus ou de procurer quelque avantage.

Une telle loi reçoit une interprétation large, libérale, qui assure l'accomplissement de son objet et l'exécution de ses prescriptions suivant leurs véritables sens, esprit et fin. »[2]

[27]        En conséquence de ce qui précède, la disposition législative en cause et notamment le passage qui fait état de l'application de celle-ci aux seules infractions criminelles qui ont « un lien avec l'exercice de la profession » doit recevoir une interprétation large, « assurant l'accomplissement de l’objet de la loi » qui n'est en l’espèce rien d'autre que la protection du public.[3]

[28]        Par ailleurs, ayant certes ce dernier objectif en tête, le législateur a reconnu que la « probité » est l'une des qualités indispensables à l’exercice des activités du représentant. Ainsi, en vertu de l'article 220 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers, l'Autorité peut refuser de délivrer un certificat si elle est d'avis que celui qui le demande ne possède pas « la probité nécessaire pour exercer » les activités de représentant.

[29]        Si une telle qualité a été jugée indispensable à l'exercice de la profession c’est sans doute parce qu’elle touche directement au lien de confiance qui doit exister entre le représentant et son client. De ce point de vue, il y a un lien indiscutable entre celle-ci et l'exercice de la profession.

[30]        Ainsi, que les infractions criminelles perpétrées par l'intimé aient été ou non commises dans le cadre de l'exercice de la profession ou d'une relation professionnelle n'est pas fondamental pour déterminer qu'il y a lieu à l'application de l'article 149.1. du Code des professions. Parce que la profession exige de ses membres la plus haute probité, lesdites infractions, au sens dudit article 149.1 ont un lien indiscutable avec l'exercice de la profession.

[31]        Les gestes criminels posés par l'intimé affectent en effet le lien de confiance entre celui-ci et les personnes avec lesquelles il pourrait être en relation sur le plan professionnel. Ils révèlent qu'une qualité essentielle à l'exercice de la profession lui fait défaut. Ils touchent à l'essence même de la profession, à la raison d'être de celle-ci. La crédibilité que le public accorde aux membres de la Chambre de la sécurité financière et l'utilisation de leurs services dépendent d’abord de leur intégrité, leur devoir, comme le titre qui leur est accordé le dit bien, étant de veiller à la « sécurité financière » de leurs clients.

[32]        Enfin, la jurisprudence a déjà reconnu qu'il n'y a pas que l'acte criminel commis dans le cadre des activités professionnelles qui ait un lien avec l'exercice de la profession.

[33]        Dans David c. Infirmiers, 1998 QCTP 1600, le tribunal des professions écrivait :

« …la jurisprudence reconnaît depuis longtemps qu'un acte criminel peut avoir des effets sur le plan professionnel même s'il a été commis en dehors de l'exercice de la profession.

… Ce qui s'explique par le fait que l'acte criminel crée un doute sur la moralité du professionnel.

Plus récemment, le présent tribunal a reconnu le caractère déontologique externe des actes criminels commis par les membres des corporations professionnelles. »

[35]      Le comité est donc d’avis que l’article 149.1 du Code des professions doit trouver application en l’espèce.

SUR LA SANCTION

LES REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[36]      Sur tous et chacun des sept (7) chefs d'accusation portés contre l’intimé, la plaignante réclame la radiation permanente. Elle demande de plus à ce que ce dernier soit condamné à rembourser aux consommateurs concernés les sommes qu'il a détournées.

[37]      Enfin, elle exige la publication de la décision et la condamnation de l'intimé au paiement des déboursés.

[38]      Au soutien de ses recommandations, elle invoque que l'exercice de la profession est un privilège réservé à ceux qui disposent de l'ensemble des qualités requises pour l'exercer. Elle soutient que si le législateur a choisi d'encadrer les membres de la profession par des règles de déontologie, c’est afin que le public puisse leur faire confiance.

[39]      Elle souligne la gravité objective des infractions répétées par l'intimé mentionnant qu'il s'agit d'infractions parmi les plus sérieuses que puisse commettre un représentant.  Elle invoque l'absence d’intégrité de ce dernier.

[40]      Elle signale que l'intimé a commis ses premières fautes alors qu'il avait à peine une année d'expérience dans l'exercice de la profession et mentionne que ses agissements ont terni l'image de la profession.  Enfin, elle soutient que la protection du public serait mise à risque s'il lui était permis un jour de réintégrer la profession.

LES REPRÉSENTATIONS DE L'INTIMÉ

[41]      L'intimé quant à lui invoque d'abord que ses déboires sont rattachés à une pathologie liée au jeu compulsif.

[42]      Il indique qu'il n'a agi que dans le but de satisfaire à des besoins obsessifs liés au jeu et non pas pour véritablement profiter de la situation.

[43]      Il mentionne qu'ayant été condamné en matière criminelle pour ses fautes, les médias se sont emparés de l'événement, qu'il a fait la manchette et que ses difficultés ont été fortement publicisées. Il soumet donc qu'il n'y a aucun intérêt à ce que la décision le concernant soit publiée.

[44]      Par ailleurs, il soutient avoir été puni sévèrement par la Cour criminelle qui lui a imposé, selon ses dires, des sentences exemplaires d'emprisonnement. Il souligne n'avoir quitté les établissements carcéraux qu'en janvier dernier.

[45]      Il invoque s'être alors repris en main et avoir réussi à se dénicher un emploi régulier. Il occuperait un poste de « vérificateur de commandes » chez Provigo et ses patrons seraient satisfaits de ses services. Ces derniers auraient été avisés de ses antécédents criminels avant de l'embaucher.

[46]      Par ailleurs, sa pathologie liée au jeu compulsif aurait été traitée. Il serait maintenant inscrit auprès d'un groupe de suivi pour des personnes ayant vécu le même genre de difficultés que lui, et il bénéficierait pour sa réhabilitation du soutien de son entourage, de ses amis et de sa famille.

[47]      Par ailleurs, il manifeste l'intention de repayer ses victimes. Il mentionne ne jamais avoir voulu leur causer de mal et vivement regretter les malheurs et difficultés qu'il leur a occasionnés.

[48]      Il reconnaît avoir abusé de la confiance de ces derniers. Il mentionne que dans le cas de M. Olivier Desroches, alors que les montants détournés totalisent la somme de 42 000 $, il ne devrait plus à celui-ci qu'une somme d’environ 31 000 $.

[49]      Quant à M. William Crépault et Mme Sophie Potvin alors que la somme détournée est de 20 500 $, le montant qu'il devrait leur rembourser se situerait de l'ordre de 11 000 $.

[50]      Il admet que des sanctions de radiation s'imposent dans son cas mais il exprime le souhait que le comité puisse, après un certain nombre d'années, vérifier son comportement afin de déterminer si les sanctions de radiation qui lui seront imposées seraient encore justifiées.

[51]      Il demande au comité de lui laisser « la chance » de pouvoir un jour retourner à l'exercice de la profession ou, à tout le moins, de ne pas fermer totalement la porte à une telle possibilité.

ANALYSE ET CONCLUSIONS

[52]      Sous réserve du chef numéro 7 pour lequel il a néanmoins admis les faits allégués, l'intimé a plaidé coupable à tous et chacun des chefs d'accusation portés contre lui.

[53]      Il a collaboré à l'enquête du syndic.

[54]      Il n'a aucun antécédent disciplinaire.

[55]      Il a manifesté devant le comité un repentir sincère, une forme de remord authentique ainsi que l’intention de repayer ses victimes.

[56]      À la suite des actes criminels pour lesquels il a été déclaré coupable par la Cour du Québec, il a purgé une peine d'emprisonnement.

[57]      Dans le rapport lui octroyant une libération conditionnelle le 28 janvier 2008, la Commission des libérations conditionnelles indique notamment qu'il a semblé montrer une volonté de se sortir de ses difficultés.

[58]      Néanmoins l'intimé a avoué la commission d'infractions objectivement parmi les plus sérieuses que puisse commettre un représentant.

[59]      Celles-ci ont été perpétrées à plus d'une reprise, de façon délibérée, préméditée, volontaire et voulue. Les clients en cause ont perdu des sommes importantes. L'intimé a profité des liens professionnels qu'il entretenait avec ces derniers pour les duper odieusement.

[60]      En s'appropriant par la supercherie et le mensonge les sommes appartenant à ses clients, l'intimé a agi avec une absence de probité évidente. Ses actes sont assimilables à du vol, purement et simplement.

[61]      De telles infractions sont éminemment reprochables de la part d'un conseiller en sécurité financière en qui le public met généralement sa confiance et ainsi les sanctions recommandées par le procureur de la plaignante sur les chefs 1 à 6 inclusivement apparaissent justifiées. La recommandation de la plaignante relative au remboursement des sommes détournées apparaît également appropriée.

 [62]     Par ailleurs, en regard du chef 7 lié aux condamnations criminelles prononcées par la Cour du Québec, compte tenu qu'elles démontrent une absence d'intégrité et considérant l'ensemble du dossier et notamment la similitude des actes reprochés avec ceux mentionnés aux autres chefs d’accusation, le comité croit qu'il est de son devoir d'user de la discrétion que lui a accordée le législateur et d’imposer à l’intimé sur ce chef la sanction réclamée par la plaignante.

[63]      Relativement à l'espoir qu'il entretient de réintégrer un jour la profession, le comité ne peut que souligner qu'il a l'obligation de sanctionner les infractions commises par l'intimé selon les éléments de preuve qui lui sont présentés et qui lui sont connus. Il n'a pas le pouvoir et ne peut s'engager selon la survenance ou non de certains événements à revoir sa décision. Il lui apparaît cependant utile de mentionner à ce dernier que l'article 161 du Code des professions peut permettre dans certains cas la réintégration d'un professionnel radié si des événements subséquents l'autorisent.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

Relativement aux chefs d’accusation 1 à 6 inclusivement :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l'intimé sur chacun des chefs d’accusation 1 à 6;

DÉCLARE l'intimé coupable de chacun des chefs d'accusation 1 à 6;

ORDONNE la radiation permanente de l'intimé sur chacun desdits chefs 1 à 6;

CONDAMNE l’intimé à rembourser à M. OLIVIER DESROCHES la somme de 32 000,00 $ (moins les remboursements effectués le cas échéant);

CONDAMNE l’intimé à rembourser à M. WILLIAM CRÉPAULT la somme de 10 000,00 $ (moins les remboursements effectués le cas échéant);

CONDAMNE l’intimé à rembourser conjointement à M. WILLIAM CRÉPEAULT et Mme SOPHIE POTVIN la somme de 10 500,00 $ (moins les remboursements effectués le cas échéant);

Relativement au chef d'accusation numéro 7;

CONSTATE ET PREND ACTE de la condamnation de l'intimé à l'égard des infractions criminelles y décrites;

ORDONNE la radiation permanente de l'intimé sur ce chef;

CONDAMNE l'intimé au paiement des déboursés, y compris les frais d'enregistrement conformément aux dispositions de l'article 151 du Code des professions (L.R.Q., c. C-26).

Et si nécessaire : ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier aux frais de l'intimé un avis de la présente décision dans un journal circulant dans la localité où l'intimé a ou avait son domicile professionnel;

 

 

 

 

 

(s) François Folot

Me FRANÇOIS FOLOT

Président du comité de discipline

 

(s) Bernard Meloche

Me BERNARD MELOCHE, Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

(s) Alain Côté

M. ALAIN CÔTÉ, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

 

Me Johanne Pinsonnault

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

Procureure de la partie plaignante

 

 

L'intimé se représente lui-même.

 

 

Date d’audience :

2 avril 2008

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1]     La plaignante compléta ceux-ci par l'envoi de notes et autorités. L'intimé, à qui elles avaient été acheminées, s'est dispensé d'y répondre.

[2]     Les soulignés sont de nous.

[3]     Le législateur a d'ailleurs permis à l'article 55.1 du Code des professions une intervention rapide pour protéger le public dans le cas d'un professionnel reconnu coupable d'une infraction criminelle qui a « un lien avec l'exercice de la profession. »

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.