Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

 

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N°:

CD00-0781

 

DATE :

21 septembre 2010

 

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Janine Kean

           Présidente

M. Jacques Denis, A.V.A., Pl. Fin.

           Membre

M. Antonio Tiberio

           Membre

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Me CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

M. IMRAN SHAHID (certificat 154 199)

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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[1]           Le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (CSF) s’est réuni le 7 septembre 2010 à son siège social, 300 Léo-Pariseau, 26e étage à Montréal, pour procéder à l'audition d'une plainte disciplinaire portée contre l'intimé. 

[2]           Cette plainte comporte trois chefs d’accusation reprochant à l’intimé de s’être approprié une somme totale de 17 000 $ appartenant à ses clients et se lit comme suit :

LA PLAINTE

Je soussignée, Caroline Champagne, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière, affirme solennellement et déclare que j’ai des motifs raisonnables de croire que l’intimé IMRAN SHAHID, alors qu’il était certifié par l’Autorité des marchés financiers en assurance de personnes et en courtage en épargne collective, et de ce fait, encadré par la Chambre de la sécurité financière, a commis les infractions suivantes :

1.             À Montréal, le ou vers le 3 mai 2008, l’intimé IMRAN SHAHID s’est approprié pour ses fins personnelles la somme de 8 000 $ que lui avaient confiée ses clients Tehmina et Kamran Choudhry pour fins d’investissement, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q,.c. D-9.2, r. 1.01) et 6 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q., c. D-9.2, 1.1.2);

2.             À Montréal, le ou vers le 17 octobre 2008, l’intimé IMRAN SHAHID s’est approprié pour ses fins personnelles la somme de 3 000 $ que lui avaient confiée ses clients Tehmina et Kamran Choudhry pour fins d’investissement, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q,.c. D-9.2, r. 1.01) et 6 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q., c. D-9.2, 1.1.2);

3.             À Montréal, le ou vers le 18 octobre 2008, l’intimé IMRAN SHAHID s’est approprié pour ses fins personnelles la somme de 6 000 $ que lui avaient confiée ses clients Tehmina et Kamran Choudhry pour fins d’investissement, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q,.c. D-9.2, r. 1.01) et 6 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (L.R.Q., c. D-9.2, 1.1.2);

 

[3]           Cette plainte assortie d’une requête en radiation provisoire a été signifiée à l’intimé le 15 septembre 2009.  Suivant une demande de remise accordée le 22 septembre 2009, lors de laquelle l’intimé a déposé son certificat, le comité a procédé à l’instruction de la requête en radiation provisoire les 13, 15 et 16 octobre 2009.  Les parties ont alors choisi de soumettre leurs arguments par écrit, ce qui fut fait entre les 6 et 27 novembre 2009.

[4]           Par décision du 8 décembre 2009, le comité a prononcé la radiation provisoire de l’intimé; cette décision lui a été signifiée le 9 décembre 2009.

[5]           En début d’audience, l’intimé qui était présent, enregistra, par l’entremise de son procureur, un plaidoyer de culpabilité.

[6]           Les parties ont ensuite mentionné au comité qu’elles déposaient, de consentement, les pièces qui avaient été produites au cours de l’audience sur la requête en radiation provisoire (la nomenclature et l’ordre de ces pièces ayant été quelque peu modifiés) et les notes sténographiques, pour valoir témoignage des personnes alors entendues.

[7]           Les parties indiquèrent aussi ne pas avoir de preuve à offrir sur sanction mais désiraient soumettre au comité des « recommandations communes ».

[8]           Ainsi, pour chacun des trois chefs, une radiation permanente de l’intimé fut suggérée, la condamnation aux frais ainsi que la publication de la décision.

[9]   À l’appui de ces recommandations, le procureur de la plaignante fit parvenir dans les jours suivants une liste de décisions[1] rendues par le comité de discipline de la CSF sur des infractions de même nature. De façon générale, la radiation permanente du représentant fut ordonnée assortie parfois d’une ordonnance de remboursement des sommes appropriées.  En l’espèce, cette mesure ne fut pas suggérée puisque les clients avaient obtenu le remboursement des sommes appropriées par la compagnie d’assurance London Life.

[10]       Au moment des infractions, l’intimé était détenteur d’un certificat en assurance de personnes depuis à peine six ans. Ainsi, il a exercé :

a)    du 23 décembre 2002 au 4 août 2005 pour le cabinet Les services financiers Fancy Inc.;

b)    du 5 août 2005 au 17 septembre 2009 pour le cabinet London Life, Compagnie d’assurance-vie (Financière liberté 55);

c)    du 28 juillet 2009 au 31 octobre 2009 pour le cabinet IS Services financiers Inc.

et d’un certificat en épargne collective du 25 avril 2003 au 16 septembre 2009 pour le cabinet Services d’investissement Quadrus ltée (P-13).

[11]       Comme mentionné précédemment, dans le cadre de l’audition de sa demande de remise présentée le 22 septembre 2009,  l’intimé a déposé son certificat au greffe du comité de discipline et a pris l’engagement judiciaire de ne pas poser d’acte jusqu’à l’audition de la requête en radiation provisoire.

[12]        La preuve faite par les parties à l’occasion de la requête pour radiation provisoire fut exhaustive et le comité a déjà résumé les faits pertinents dans sa décision ordonnant la radiation provisoire de l’intimé.

ANALYSE ET DÉCISION

[13]       Le comité prend acte du plaidoyer de culpabilité de l’intimé et le déclarera coupable des infractions décrites à la plainte.

[14]       L'intimé s'est approprié sans droit des sommes d'argent appartenant à ses clients. Ces infractions sont parmi les plus sérieuses que puisse commettre un représentant. Il est exigé du représentant la plus haute intégrité, étant appelé quotidiennement à conseiller ses clients dans la gestion de leurs avoirs ou de leur patrimoine.

[15]       Au surplus, l'intimé ne semble pas avoir hésité à utiliser de faux documents pour camoufler ses appropriations de fonds et prétexter que l’argent remis était placé.

[16]        Aussi, les consommateurs, en l’espèce, n’avaient pas beaucoup de connaissance en matière de placements et l’intimé a abusé de leur confiance et ceci à trois reprises en l’espace de six mois. Comme le comité l’a soulevé au paragraphe 31 de la décision ordonnant la radiation provisoire : «... l’intimé a démontré qu’il était grandement apprécié par sa communauté.  Le comité estime que cet élément ne peut que renforcer la confiance de ces clients envers leur représentant et faciliter d’autant les appropriations de fonds

[17]       Comme indiqué par le procureur de la plaignante dans ses arguments produits au soutien de la requête en radiation provisoire :

«…la nature même des infractions reprochées à l’intimé implique un danger pour le public. Au surplus, la preuve administrée démontre que l’intimé n’hésite pas à adopter des comportements dénués de probité lorsque cela lui sied. Également, les versions invraisemblables, souvent contradictoires, voire même loufoques données par l’intimé à l’enquêteure du bureau de la syndique et au Comité de discipline procèdent de ce manque de probité qui met le public en danger.»

[18]       La totalité des sommes détournées s'élève, selon les chiffres mentionnés aux trois chefs d'accusation, à 17 000 $.

[19]       L’intimé, en détournant l'argent de ses clients et en les privant de sommes leur appartenant, a porté atteinte à l’image de sa profession car ces agissements ne peuvent que miner la confiance du public envers celle-ci.

[20]       Quant aux sanctions, le comité rappelle qu’en présence de recommandations communes, il doit se demander si les sanctions proposées sont conformes aux principes de détermination de la sanction disciplinaire et de nature à assurer adéquatement la protection du public.

[21]       Finalement, notons que mis à part le remboursement par la compagnie d’assurance des sommes appropriées par l’intimé, aucun élément ou facteur atténuant, objectif ou subjectif, n’a été soumis au comité par les parties.

[22]       Peu importe les montants en jeu, l’appropriation de fonds ne peut être tolérée.

[23]       Les décisions soumises à l’appui confirment que la radiation permanente constitue la norme lors d’appropriation de fonds. 

[24]       Le comité est d’avis que la suggestion commune des parties quant aux sanctions à être imposées, respecte les principes de dissuasion et de protection du public. 

[25]        Dans les circonstances du présent dossier, le comité conclut que la radiation permanente suggérée est une sanction juste et appropriée et qu’il n’a aucune raison de s’en écarter.

[26]       Par ailleurs, eu égard à une ordonnance de publication, considérant le jugement rendu par la Cour supérieure dans l’affaire Gauthier c. Roberge, [2003] R.J.Q. 1793 (C.S.), et les conclusions qui s’y retrouvent à l’égard de l’article 180 du Code des professions, le comité considère que la publication de la décision ordonnant une radiation permanente ne relève pas de sa discrétion, mais plutôt d’une obligation imposée à la secrétaire du comité de discipline de la CSF, par le renvoi à cette disposition en vertu de l’article 376 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et des adaptations nécessaires.

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ :

PREND acte du plaidoyer de culpabilité de l'intimé à l’égard des trois chefs d’accusation de la plainte portée contre lui;

DÉCLARE l'intimé coupable à l’égard des chefs d'accusation numéro 1, 2 et 3;

ET PROCÉDANT SUR SANCTION :

ORDONNE la radiation permanente de l’intimé à l’égard des chefs d’accusation numéro 1, 2 et 3;

CONDAMNE l'intimé au paiement des déboursés conformément aux dispositions de l'article 151 du Code des professions.

 

 

(s) Janine Kean

Me Janine Kean

Présidente du comité de discipline

 

 

(s) Jacques Denis

M. Jacques Denis, A.V.A., Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

(s) Antonio Tiberio

M. Antonio Tiberio

Membre du comité de discipline

 

 

 

Me Mathieu Cardinal

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Roger Vokey

SHAFFER & ASSOCIÉS

Procureurs de la partie intimée

 

Date d’audience : 7 septembre  2010

 

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1] Rioux c. Pelletier, CD00-0575, rendue le 22 novembre 2005; Rioux c. Bélanger, CD00-0599, rendue le 14 mars 2006; Thibault c. Boileau, CD00-0648, rendue le 30 mai 2007; Thibault c. Grignon, CD00-0625, rendues les 24 juillet 2007 et 13 février 2008; Thibault c. Charest, CD00-0685, rendue le 3 septembre 2008; Thibault c. Lacroix, CD00-0609, rendue le 16 juillet 2008; Thibault c. Wilson, CD00-0669, rendues les 25 janvier et 1er août 2008; Thibault c. Richard, CD00-0713, rendue le 7 janvier 2009; Thibault c. Arsenault, CD00-0735, rendue le 26 janvier 2009; Lévesque c. Burns, CD00-0731, rendues les 15 juin 2009 et 1er mars 2010.

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