Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0809

 

DATE :

 25 avril 2011

____________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Janine Kean

Présidente

M. Mario Brassard

Membre

M. Michel Gendron

Membre

____________________________________________________________________

 

CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

YVON CHAPERON, conseiller en sécurité financière et représentant de courtier en épargne collective (certificat 106640 et BDNI 1529011)

Partie intimée

____________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ

____________________________________________________________________

 

[1]           Le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le comité) s’est réuni le 1er décembre 2010 au Marriott Château Champlain, à Montréal, et le 25 mars 2011 au siège social de la Chambre sis au 300, rue Léo‑Pariseau, 26e étage, à Montréal, pour l’audition de la plainte portée contre l’intimé.

[2]           Lors de la première journée d’audience, les parties étaient représentées par procureurs, mais l’intimé lui-même était absent. D’entrée de jeu, le comité fut informé que la plaignante désirait procéder à un amendement de la plainte initiale auquel consentait l’intimé. Le comité autorisa en conséquence l’amendement.

[3]           Le procureur de l’intimé demanda cependant de reporter l’audience au motif qu’il devait prendre connaissance du rapport d’expertise amendé qui lui avait été remis le matin même par la plaignante qui désirait le produire. Il avisa le comité qu’il laisserait probablement la plaignante procéder par défaut à la prochaine date d’audience. En l’absence de contestation de la plaignante, l’audience fut reportée au 25 mars 2011, date proposée par les parties.

[4]           La plainte amendée se lit comme suit :

LA PLAINTE

1.            À Saint-Luc, les ou vers les 17 mars 2000 et 21 décembre 2000, l’intimé, YVON CHAPERON, alors qu’il faisait souscrire sa cliente Lise Gagné Lemieux au contrat de fonds distincts numéro M10162427 pour un montant de 140 000 $ auprès de Transamérica et lui conseillait un dépôt additionnel de 288 500 $ dans ce même contrat, n’a pas cherché à avoir une connaissance complète des faits notamment quant aux besoins financiers et au profil d’investisseur de sa cliente, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 15 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q., c. D-9.2, r.1.01);

 

2.            (…)

 

3.            (…)

 

4.            (…)

[5]           Le 25 mars 2011, la plaignante était représentée par procureur, mais l'intimé et son procureur étaient absents après lui avoir confirmé par écrit qu’il la laissait procéder par défaut (IP-13). Le comité a permis à la plaignante de procéder en conséquence.

[6]           La plaignante fit entendre Pierre Boivin, enquêteur pour le bureau de la syndique, la consommatrice, Mme Lise Gagné Lemieux (L. G. L.), ainsi que l’expert en services financiers retenu par la plaignante, M. Denis Tremblay.

[7]           Elle produisit également une preuve documentaire composée des pièces P-1 à P-12A.

LES FAITS

[8]           L’attestation du droit de pratique de l’intimé (P-1) indique qu’il fut admis à la profession le 1er avril 1986. Il détenait au moment des gestes reprochés, un certificat dans les disciplines suivantes :

         assurance de personnes pour le cabinet Agence d’assurance Yvon Chaperon inc.;

         assurance collective de personnes pour le cabinet Agence d’assurance Yvon Chaperon inc.; 

         Régime de rente collective pour le cabinet Agence d’assurance Yvon Chaperon inc.;

         courtage en épargne collective jusqu’au 27 septembre 2009 pour le cabinet Promutuel capital, cabinet de services financiers inc.;

[9]           L. G. L. était veuve et âgée de 49 ans au moment des événements. Son mari est décédé en 1985 aux États-Unis suite à un accident de travail, la laissant seule pour subvenir à ses besoins et à ceux de leurs deux enfants. L. G. L. a fait une dépression et a cessé de travailler en 1999. 

[10]        Elle a occupé durant toutes ces années des emplois comme aide-cuisinière, plongeuse et finalement comme couturière. En 1999, elle recevait une rente de veuve de la Régie des rentes du Québec de 440 $ par mois et gagnait 7,25 $ l’heure jusqu’en mai 1999 où elle a été mise en arrêt de travail pour des problèmes de santé engendrés par la longueur des poursuites judiciaires qu’elle a dû supporter depuis le décès de son mari.

[11]        En 2000, elle a finalement touché une compensation pécuniaire d’environ 579 000 $ pour le décès de son mari. Une partie a servi à acquitter quelques dettes, dont le solde de l’hypothèque qui grevait sa maison qui avait une valeur d’environ 120 000 $. 

[12]        L. G. L. n’avait aucune connaissance ou expérience en investissement. Sa belle-sœur lui a recommandé l’intimé qui l’a rencontrée à son domicile. 

[13]        Au cours de cette première rencontre, il lui a suggéré de placer cet argent dans des fonds distincts et il lui a laissé un dépliant à lire sur le sujet, mais sans lui expliquer davantage les produits. 

[14]        Ensuite, elle a communiqué avec lui pensant qu’il s’agissait d’un bon placement et lui a confié un premier 140 000 $ (P-2) à investir. Elle désirait un placement sécuritaire lui procurant une mensualité qui lui permettrait de vivre aisément, mais sans faire « de folies », et ce jusqu’à la fin de ses jours. Elle ne voulait pas de placement à risque. L’intimé lui aurait posé très peu de questions. Il n’aurait pas discuté de ses besoins ni de ses projets financiers ou de vie. 

[15]        Selon L.G-L, dès la première année, la valeur des fonds choisis avait diminué du tiers pour cet investissement de 140 000 $. 

[16]        L. G. L. a aussi connu l’épouse de l’intimé, car en raison de sa maladie elle éprouvait des problèmes de mémoire. Celle-ci venait à son domicile et lui écrivait tout ce qu’elle devait faire. Elle payait aussi ses médicaments et L. G. L. lui remboursait. Elle l’aurait également beaucoup aidé en lui enseignant comment faire un budget. 

[17]        Le 21 décembre 2000, L. G. L. a investi toujours par l’entremise de l’intimé 288 500 $ dans les mêmes fonds (P-4). Elle ne se souvient pas que l’intimé lui ait posé quelques questions que ce soit au sujet de sa tolérance au risque et elle n’a jamais vu les profils d’investisseurs préparés par l’intimé (P-10).

[18]        L. G. L. a nommé ses deux enfants bénéficiaires en parts égales de ce contrat. 

[19]        Au début, l’intimé aurait fixé les retraits mensuels à 1 208 $. En mars 2001, les retraits furent augmentés à 2 250 $ (P-5). L. G. L. ne se rappelle pas si cette augmentation fut faite à sa demande. 

[20]        En janvier 2002, elle a eu besoin de 12 000 $ (P-8) pour refaire la toiture de sa maison. L’intimé ne voulait pas qu’elle retire cet argent. L’épouse de ce dernier lui aurait dit qu’elle avait deux solutions : emprunter à la banque ou le prendre dans son compte d’investissement en le remboursant à raison de 300 $ par mois pendant trois ans, d’où la baisse en début d’année 2002 des retraits mensuels à 1 950 $ (P-7) et ce, jusqu’en mars 2005 (P-9).

[21]        Constatant la baisse continuelle de ses placements, L.G-L était inquiète. L’intimé se serait limité à lui dire de ne pas s’en faire puisque le placement était garanti et qu’il fallait réduire le montant de la rente mensuelle si elle voulait avoir de l’argent plus longtemps. Elle comprend maintenant que cette garantie valait pourvu qu’il n'y eût pas de décaissement d’argent, ce qu’elle n’avait pas saisi au moment des placements. En 2007, elle a changé de conseiller et a transféré ses placements vers Investia Services financiers inc

[22]        L’intimé a fourni sa version des faits à l’enquêteur du bureau de la syndique en répondant directement sur la lettre que ce dernier lui a adressée le 26 mai 2008 (P-10) et qui comportait 18 questions. Une rencontre avec l’intimé s’en est suivi en août de la même année afin d’obtenir davantage d’informations sur les faits entourant les transactions et ses échanges avec L. G. L. 

[23]        Suivant l’intimé, il aurait proposé à L. G. L. d’investir dans les fonds distincts Transécurité de la compagnie Transamérica (P-2). L'argent a été placé dans différents fonds d’action et le contrat comportait une garantie de dix ans. La rente fut fixée à 1 208,33 $. Cette somme correspond au 10 % de retrait admissible annuellement sans frais ou pénalité.

[24]        En guise de réponse aux questions de l’enquêteur relatives à la cueillette de renseignements et à l’analyse des besoins financiers de la cliente, l’intimé s’est limité à fournir deux profils d’investisseurs non signés par sa cliente (P-10 p. 115-116, 117-118).

[25]        Questionné par l’enquêteur au cours de la rencontre du mois d’août 2008, l’intimé aurait précisé qu’il avait demandé une soumission pour une rente viagère auprès de la compagnie Standard Life mais que la cliente aurait refusé au motif qu’elle voulait avoir accès à ses placements pour des besoins supplémentaires, s’il y avait lieu.

[26]        Or, après vérification par l’enquêteur auprès de la Standard Life, l’intimé ne leur aurait jamais demandé de soumission et il ne détenait pas non plus de compte auprès de cette compagnie.

[27]        L’intimé aurait également eu une « chaude » discussion avec L. G. L. lorsqu’elle a voulu retirer 2 000 $ de son contrat en avril 2001 et 12 000 $ en janvier 2002. Il lui aurait expliqué de nouveau les garanties et les frais de sortie liés à son contrat, mais elle lui aurait répondu que cet argent était le sien (P-10, p. 117).

[28]        Le 11 juillet 2007, un transfert de 141 964,36 $ fut effectué chez Investia Services financiers inc. donnant suite à la demande du nouveau représentant de L. G. L.

[29]        Suivant le témoignage de M. Tremblay, selon les normes de l’industrie, le représentant doit d’abord déterminer les besoins financiers du client et procéder à son profil d’investisseur à partir des informations complètes et pertinentes sur ses revenus, son budget, ses actifs, ses passifs et obligatoirement ses objectifs à court, moyen et long terme. 

[30]        Selon l’expert, « il est impératif de recueillir par écrit des informations complètes afin de bien évaluer les besoins et de conseiller adéquatement le client » (P-12, p. 11). Ceci permettrait au client de confirmer les données et il s’agit d’un moment « crucial » pour le représentant afin de valider ses recommandations. Sans ces renseignements, le représentant ne pourrait guider adéquatement et professionnellement le client.

[31]        Comme il le décrivit dans son rapport :

« Dans un deuxième temps, il s’agit de procéder à l’analyse et d’effectuer certains calculs afin de quantifier l’écart, s’il existe, entre ce que le client souhaite pour réaliser ses projets financiers et ce qu’il a. »

Et plus loin :

« La prochaine étape consiste à recommander des produits adaptés aux besoins de la cliente selon la nature du besoin, l’horizon de temps à considérer, l’état de santé de la cliente, l’évolution dans le temps du besoin et d’autres éléments tels que les régimes publics, la fiscalité, les connaissances de la cliente et sa tolérance au risque. »

[32]        M. Tremblay indique également :

« ... que le processus demeure toujours le même qu’il s’agisse d’une analyse spécifique du besoin financier pour la retraite ou d’une analyse globale, il s’agit d’abord de procéder à la cueillette des renseignements, deuxièmement à l’analyse et au calcul pour quantifier le besoin et finalement de faire la recommandation de produit adapté au besoin du client. »

[33]        Quant au profil d’investisseur, il indiqua qu’il s’agissait d’un questionnaire qui oriente le choix des investissements correspondant au profil du client. Cette série de questions, souvent à choix multiples, oriente le client et le conseiller dans l’établissement d’une stratégie d’investissement.

[34]        Son étude de la version des faits de l’intimé révèle que la cliente souhaitait vivre du revenu de ses placements et avoir accès à son capital.

[35]           Le jeune âge de la cliente, 49 ans au moment des évènements nécessitait, selon lui, une prudence dans l’élaboration de l’hypothèse recommandée due à la longue période de retraite. Ses sources de revenus étaient également importantes et constituaient une information capitale pour déterminer les revenus nécessaires.

[36]        La somme de 553 000 $ n’était pas aussi importante qu’elle pouvait le paraître à première vue puisqu’elle devait suffire à faire vivre la cliente pendant toutes ces années de retraite anticipée d’autant plus que, de ce montant, 20 % était constitué par l’actif de la maison qu’elle habitait. De plus, la compétence de la cliente à gérer ses finances semblait plutôt faible, d’après l’information avancée par l’intimé, de sorte qu’elle avait des difficultés à gérer son budget et ses finances.

[37]        Enfin, son état de santé, bien que non divulgué dans la documentation, devait être évalué afin de déterminer son espérance de vie. En l’espèce, son état de santé semblait relativement bon mis à part l’état de détresse mentionné en 1999.

[38]        L’expert conclut que la situation de cette cliente n’était pas complexe, mais qu’il importait de préserver et assurer la survie financière de cette cliente sur cet horizon de temps évalué à près de 40 ans. L’intimé devait démontrer une extrême prudence, car à l’âge de la cliente, la possibilité «de se refaire» était quasiment nulle. Il ne pouvait se limiter au simple calcul de budget, mais aurait dû utiliser un horizon d’au moins 30 à 35 ans et utiliser certaines hypothèses telles que le rendement et l’inflation. Le résultat du profil est un indicateur, mais si le résultat semble trop risqué, le représentant doit l’ajuster en conséquence et ne pas perdre de vue le «gros bon sens» en l’analysant.

[39]           L’expert compara la situation de cette cliente avec celle d’un enfant mineur pour qui le gestionnaire doit se limiter à investir dans des produits financiers sans risque. Ainsi, il en serait de même pour la cliente étant donné qu’elle a dit vouloir vivre de ses revenus et ne pas vouloir prendre de risque. Une cueillette adéquate d’informations et de ses projets financiers aurait permis de prévoir les dépenses de rénovation, le remplacement d’une voiture et autres. Cette étape a été omise ce qui n’a pas permis de planifier ces dépenses afin d’éviter des pertes sur les placements.

[40]        Le produit choisi et le montant investi jumelé au type de fonds retenus révèlent que l’analyse des faits n’a pas été complétée. Si elle l’avait été, des versements ou retraits d’un autre ordre auraient dû être fixés et il y aurait eu ventilation dans les différents fonds choisis.

[41]        L’expert dit ne pas avoir trouvé des renseignements à ce sujet ni des traces de calculs dans la documentation remise pour son étude.


ANALYSE ET DÉCISION

[42]        Le comité a pu apprécier la qualité du témoignage de L. G. L. Elle a rendu un témoignage fiable en lien avec la preuve documentaire produite.  

[43]        Au moment des événements, l’intimé exerçait depuis plus de quatorze ans.

[44]        En l’absence d’un document colligeant les informations sur les revenus, les besoins, les projets financiers et autres de la cliente, l’intimé n’avait pas les renseignements nécessaires à son analyse pour justifier sa recommandation à la cliente. Il est indéniable que l’intimé n’a pas cherché à avoir une connaissance complète des faits en ne procédant pas à une analyse de besoins financiers de sa cliente comme l’exige la réglementation. Il ne pouvait déléguer ce devoir à son épouse, il devait faire l’exercice lui-même avec sa cliente et vérifier les informations prises ou fournies.

[45]        Il ressort de la preuve que l’intimé a fixé le montant des retraits mensuels en se basant sur le pourcentage annuel admissible du placement pour effectuer des retraits sans frais. Or, rien ne démontrait que ce montant était approprié à la situation de sa cliente. 

[46]        Elle était à peine âgée de 49 ans avec une espérance de vie d’environ 40 ans. Elle avait de plus toujours occupé un travail peu rémunérateur qui lui procurait 7.25 $ l’heure comme couturière jusqu’en mai 1999 où elle a été mise en arrêt de travail pour des problèmes de santé. Ainsi, elle n’avait au moment des investissements aucun revenu sauf la rente mensuelle de veuve de 440 $ versée par la Régie des rentes du Québec. Elle n’avait pas de conjoint et était seule à subvenir à ses besoins. 

[47]        Comme l’expert l’a expliqué, la situation financière de la cliente n’était peut-être «pas complexe, mais importante». Ces faits commandaient une extrême prudence de la part du représentant appelé à la conseiller. Les résultats des profils d’investisseur préparés par l’intimé étaient insuffisants pour soutenir sa recommandation sans obtenir ces renseignements sur les besoins et objectifs financiers de sa cliente. Ils ne sont que des indicateurs, le représentant devant faire preuve de «gros bon sens» et procéder à l’analyse des résultats en fonction des objectifs et ressources du client.

[48]        Comment concilier la réponse inscrite à la troisième question qui indique que la cliente avait une certaine connaissance en placement ainsi qu’une tolérance aux risques élevée permettant de tolérer une baisse entre 10 et 20 % de la valeur de ses placements alors que la sécurité de ceux-ci constituait la priorité pour L.G-L.?

[49]        Pourquoi recommander ce placement assorti d'une garantie de 10 ans alors que L. G. L. désirait avoir recours à ces placements pour des besoins supplémentaires et commencer à retirer des fonds dans un délai de 2 ans ou de 3 à 5 ans suivant ses deux profils d’investisseur?

[50]        Le comité est d’avis que si l’intimé avait procédé aux étapes décrites et reconnues par l’industrie, sa recommandation aurait été différente. Il n’aurait pas fixé des retraits comme ceux en l'espèce, n’aurait pas investi tout le capital de sa cliente dans les mêmes fonds distincts et n’aurait pas choisi les mêmes fonds.

[51]        Le comité estime que la preuve a démontré de façon non équivoque que l’intimé a manqué à ses devoirs et obligations envers sa cliente, n’a pas agi de façon professionnelle et compétente et n’a pas cherché à avoir une connaissance complète des faits quant aux besoins financiers et au profil d’investisseur de sa cliente contrevenant ainsi à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers ainsi qu’à l’article 15 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière.

POUR CES MOTIFS, le comité de discipline :

DÉCLARE l'intimé coupable du chef 1 porté contre lui;

CONVOQUE les parties, avec l’assistance de la secrétaire du comité de discipline, à une audition sur sanction.

 

 

 

(s) Janine Kean

Me Janine Kean

Présidente du comité de discipline

 

 

(s) Mario Brassard

M. Mario Brassard

Membre du comité de discipline

 

 

(s) Michel Gendron

M. Michel Gendron

Membre du comité de discipline

 

Me Julie Piché

THERRIEN COUTURE

Procureurs de la plaignante

 

Me Richard Provost

FRATICELLI PROVOST

Procureurs de l’intimé

 

Date d’audience :   

 

1er décembre 2010 et 25 mars 2011

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ


COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0809

 

DATE :

 9 septembre 2011

____________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Janine Kean

Présidente

M. Mario Brassard

Membre

M. Michel Gendron

Membre

____________________________________________________________________

 

CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

YVON CHAPERON, conseiller en sécurité financière et représentant de courtier en épargne collective (certificat 106640 et BDNI 1529011)

Partie intimée

____________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR SANCTION

____________________________________________________________________

 

[1]           Le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le comité) s’est réuni le 16 août 2011 au siège social de la Chambre sis au 300, rue Léo‑Pariseau, 26e étage, à Montréal, pour l’audition sur sanction à la suite de la décision sur culpabilité rendue à l’égard de l’intimé le 25 avril 2011.

[2]           Dès le début de l’audience, les parties informèrent le comité qu’elles avaient convenu de recommandations communes sur sanction.

[3]           Ensuite, l’intimé témoigna alors que la plaignante produisit à titre de preuve supplémentaire une attestation de pratique émise en date du 8 juillet 2011 par l’Autorité des marchés financiers (SP-1).

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[4]           La procureure de la plaignante rappela que l’intimé avait été reconnu coupable de ne pas avoir cherché à avoir une connaissance complète des faits notamment quant aux besoins financiers et au profil d’investisseur de sa cliente alors qu’il lui a fait souscrire un contrat de fonds distincts pour un premier versement de 140 000 $ et un second de 288 500 $.

[5]           À titre de sanction, elle indiqua que les parties recommandaient l’imposition à l’intimé d’une amende de 5 000 $ sur l’unique chef de la plainte ainsi qu’une condamnation aux déboursés.

[6]           Pour sa part, elle réclama également les frais d’expertise.

[7]           Elle évoqua, en premier lieu, la gravité objective de l’infraction puisque la recommandation du représentant devait reposer sur une analyse des besoins financiers (ABF) adéquate, laquelle constitue la pierre angulaire de son travail. Elle souligna également la vulnérabilité de la consommatrice et la perte financière subie. Elle ajouta qu’il ne s’agissait pas d’une erreur de débutant, l’intimé ayant acquis plus de 25 ans d’expérience dans le domaine des produits et services financiers au moment des faits et qu’il n’avait pas « corrigé le tir » lors du deuxième versement, neuf mois plus tard, alors que les fonds avaient déjà perdu de la valeur.

[8]           Néanmoins, elle précisa que les événements remontaient à plus de dix ans, que l’intimé n’avait aucun antécédent disciplinaire et qu’il devait faire face à une poursuite civile intentée par sa cliente.

[9]           Au soutien de ses recommandations, elle soumit trois décisions rendues par le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière[1].

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

[10]        Bien que se disant d’accord avec la recommandation commune proposée, le procureur de l’intimé demanda au comité de ne pas imposer à l’intimé le paiement des frais de l’expertise. Il avança que la nature de l’infraction reprochée, le défaut d’avoir une connaissance complète des faits, n’exigeait pas une preuve par expert. 

[11]        Invitée à répliquer à cette question, la procureure de la plaignante laissa le tout à la discrétion du comité.

ANALYSE ET MOTIFS

[12]        Les affaires Bégin et Côté, deux des trois décisions soumises à l’appui de leur recommandation, ont été rendues suivant l’enregistrement de plaidoyer de culpabilité et de recommandations communes sur sanction. Ces décisions ne permettent malheureusement pas une comparaison adéquate des faits, et par conséquent, de leur attribuer le même poids qu’aux décisions rendues par le comité à la suite d’une preuve détaillée et d’un débat contradictoire. 

[13]        D’ailleurs, le comité, au cours de l’audience, a émis certaines réserves à l’égard de la recommandation estimant être plutôt enclin, même si les faits reprochés ont été regroupés dans un seul chef d’accusation par la plainte amendée, à conclure que l’intimé avait, à deux reprises, contrevenu à son obligation de chercher à connaître tous les faits relatifs aux besoins financiers et au profil d’investisseur de sa cliente.

[14]        Toutefois, la suggestion des parties est en l’espèce, non seulement le résultat de négociations entre procureurs d’expérience, mais chacune d’elle semble avoir trouvé son intérêt tant au niveau de l’amendement de la plainte visant à regrouper les quatre chefs initiaux en un seul qu’au niveau de la sanction suggérée.

[15]        La jurisprudence a bien établi que les recommandations communes des parties ne doivent être écartées que si le comité les juge inappropriées, déraisonnables, contraires à l’ordre public ou est d’avis qu’elles sont de nature à discréditer l’administration de la justice[2]. Le comité imposera donc l’amende proposée de 5 000 $ et, condamnera l’intimé aux déboursés. 

[16]        En ce qui concerne l’expertise, n’eût été la plainte amendée qui rappelons-le fut le résultat des négociations entre les parties, elle aurait été essentielle pour obtenir la condamnation de l’intimé à l’égard d’au moins deux des chefs contenus à la plainte initiale. Pour ces raisons, le comité partagera les frais encourus pour celle-ci à parts égales entre les parties.

POUR CES MOTIFS, le comité de discipline :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $ à l’égard du seul chef contenu à la plainte amendée;

CONDAMNE l’intimé au paiement des débours conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions (L.R.Q. c. C-26);

CONDAMNE chaque partie au paiement de la moitié des frais d’expertise.

 

 

 

 

(s) Janine Kean

Me Janine Kean

Présidente du comité de discipline

 

 

(s) Mario Brassard

M. Mario Brassard

Membre du comité de discipline

 

 

(s) Michel Gendron

M. Michel Gendron

Membre du comité de discipline

 

Me Julie Piché

THERRIEN COUTURE

Procureurs de la plaignante

 

Me Richard Provost

FRATICELLI PROVOST

Procureurs de l’intimé

 

Date d’audience :   

 

16 août 2011

COPIE CONFORME À L'ORIGINAL SIGNÉ



[1] Thibault c. Shaw, décision sur culpabilité rendue le 5 octobre 2009 et décision sur sanction rendue le 11 mai 2010; Champagne c. Bégin, décision sur culpabilité et sanction rendue le 31 mars 2011; Champagne c. Côté, décision sur culpabilité et sanction rendue le 5 avril 2011.

[2] Douglas c. Sa Majesté la Reine, [2002] Can LII 32492 (QC C.A.).

 

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