Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N°:

CD00-0789

 

DATE :

Le 11 décembre 2009

___________________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Sylvain Généreux

          Président

M. Robert Archambault, A.V.A.

          Membre

M. Shirtaz Dhanji, A.V.A., Pl. Fin.

          Membre

___________________________________________________________________________

 

Me CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

 

M. ALAIN TREMPE, conseiller en sécurité financière

Partie intimée

___________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR LA REQUÊTE EN RADIATION PROVISOIRE

___________________________________________________________________

 

 

La plainte et la requête en radiation provisoire

 

[1] Le 28 octobre 2009, la plaignante a fait signifier à l’intimé une plainte et une requête en radiation provisoire.

 

[2]  Cette requête est libellée comme suit :

 

1.            Caroline Champagne, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière, a déposé une plainte disciplinaire à l’encontre de l’intimé, ALAIN TREMPE, laquelle plainte comporte six (6) accusations dont cinq (5) portent sur de l’appropriation de fonds à des fins personnelles et une sur son défaut de collaborer avec l’enquêteur de la Chambre de la sécurité financière, copie de cette plainte étant produite au soutien de la présente requête sous la cote R-1;

2.            Tel qu’il appert de cette plainte, pièce R-1, les gestes reprochés à l’intimé, ALAIN TREMPE, sont de nature grave, sérieuse et répétitive et mettent de façon très importante la protection du public en danger s’il continue à exercer sa profession;

3.            Le ou vers le 20 janvier 2009, la syndique de la Chambre de la sécurité financière, a été saisie d’une demande d’enquête concernant l’intimé ALAIN TREMPE;

4.            Les informations recueillies lors de l’enquête démontrent que l’intimé ALAIN TREMPE s’est approprié des sommes en argent comptant de plusieurs de ses clients entre les mois de mars 2004 et février 2005;

5.            L’intimé ALAIN TREMPE est présentement certifié en assurance de personnes en tant que représentant autonome, tel qu’il appert de l’attestation de sociétariat de la Chambre de la sécurité financière et de l’attestation de droit de pratique de l’Autorité des marchés financiers produites en liasse sous la cote R-2;

Guylaine Turgeon

6.            Guylaine Turgeon connaît l’intimé ALAIN TREMPE à titre de conseiller financier depuis les années 1990;

7.            Le ou vers le 4 mars 2004, l’intimé ALAIN TREMPE a proposé à Guylaine Turgeon de lui confier 10 000 $ en argent comptant pour fins de placement afin qu’elle puisse en retirer des intérêts de 390 $ par mois en argent comptant, ce que cette dernière a accepté, tel qu’il appert de la confirmation du dépôt du prêt et du relevé bancaire produits respectivement sous les cotes R-3 et R-4;

8.            De mars à décembre 2004, les intérêts mensuels de 390 $ ont été payés en argent comptant par l’intimé ALAIN TREMPE à Guylaine Turgeon;

9.            Par la suite, les intérêts ont été déposés dans un compte de « World Money Online », lequel Guylaine Turgeon a activé le ou vers le 11 février 2005, et rendus disponibles à l’aide d’une carte « Speedy Money Networks » remise à Guylaine Turgeon par l’intimé ALAIN TREMPE, tel qu’il appert du profil de membre et d’une photocopie de la carte produits respectivement sous les cotes R-5 et R-6;

10.          Le ou vers le 24 février 2005, l’intimé ALAIN TREMPE s’est présenté chez Guylaine Turgeon accompagné d’un dénommé René Drouin pour lui proposer de placer un montant additionnel de 10 000 $ lequel produirait des intérêts annuels de 100 % payables à chaque année. Guylaine Turgeon a accepté et a signé à cet effet une convention de prêt avec une entité désignée comme « C.F.M. », tel qu’il appert de la convention de prêt et de la fiche de renseignements personnels produits respectivement sous les cotes R-7 et R-8;

11.          Le ou vers le même jour, Guylaine Turgeon a retiré un montant de 10 000 $ qu’elle a remis en argent comptant à l’intimé ALAIN TREMPE, tel qu’il appert du relevé bancaire, R-4;

12.          L’intimé ALAIN TREMPE n’a jamais expliqué à Guylaine Turgeon ce que signifiait « C.F.M. »;

13.          Pendant quelques mois, Guylaine Turgeon a reçu les intérêts mensuels de son premier investissement de 10 000 $ dans son compte « World Money Online » mais les versements ont soudainement cessé et le compte a été fermé sans que Guylaine Turgeon n’en soit avisée;

14.          Le ou vers le 28 mars 2006, Guylaine Turgeon a reçu de l’intimé ALAIN TREMPE une lettre faisant référence à une réunion ayant eu lieu le 28 février et au cours de laquelle les participants lui auraient exprimé leur vive inquiétude concernant des investissements. Dans cette lettre, l’intimé ALAIN TREMPE tente de se faire rassurant et signe au nom de « Le groupe », tel qu’il appert de la lettre produite sous la cote R-9;

15.          Malgré les demandes répétées de Guylaine Turgeon auprès de l’intimé ALAIN TREMPE, celle-ci n’a pas été en mesure de récupérer son argent;

16.          À cet effet, l’intimé ALAIN TREMPE a indiqué à Guylaine Turgeon que son argent avait été confié à un certain Guy Desjardins;

17.          En 2007, l’intimé ALAIN TREMPE a indiqué à Guylaine Turgeon qu’elle pouvait accéder à son compte par un nouveau site Internet mais les démarches de cette dernière sont demeurées tout aussi infructueuses, tel qu’il appert des courriels produits en liasse sous la cote R-10;

18.          Le ou vers le 5 octobre 2009, Guylaine Turgeon a remis une déclaration assermentée à l’enquêteur du bureau de la syndique de la Chambre de la sécurité financière relatant les faits allégués ci-dessus, ladite déclaration étant produite sous la cote R-11;

19.          Le ou vers le 8 octobre 2009, Guylaine Turgeon, par l’entremise de ses procureurs, a transmis une lettre à l’intimé ALAIN TREMPE le mettant en demeure de lui rembourser la somme de 20 000 $ plus les intérêts, tel qu’il appert de ladite mise en demeure produite sous la cote R-12;

Josée Vachon et Germain Boulet

20.          Josée Vachon connaît l’intimé ALAIN TREMPE depuis environ 25 ans, époque à laquelle elle a souscrit par son intermédiaire une police d’assurance vie;

21.          Le ou vers le 22 juillet 2004, l’intimé ALAIN TREMPE s’est présenté chez Josée Vachon et lui a proposé un investissement de 10 000 $ en argent comptant produisant des intérêts de 390 $ par mois en argent comptant;

22.          Devant le scepticisme de Josée Vachon, l’intimé ALAIN TREMPE lui a montré des enveloppes d’argent comptant se trouvant dans sa valise qu’il se rendait remettre à d’autres investisseurs;

23.          Germain Boulet, conjoint de Josée Vachon présent lors de la rencontre, a accepté la proposition de l’intimé ALAIN TREMPE et a signé à cet effet une convention de prêt avec une entité désignée comme « C.F.M. », tel qu’il appert de la convention de prêt et de la fiche de renseignements personnels produits respectivement sous les cotes R-13 et R-14;

24.          L’intimé ALAIN TREMPE n’a jamais expliqué à Germain Boulet ni à Josée Vachon ce que signifiait « C.F.M. »;

25.          Germain Boulet a reçu ses intérêts en argent comptant à chaque mois jusqu’au début de 2005. À ce moment, l’intimé ALAIN TREMPE a informé Josée Vachon et Germain Boulet qu’il leur fournirait des cartes à puce et que les intérêts y seraient directement accessibles;

26.          La carte de Josée Vachon aurait été activée le 14 février 2005 et celle de Germain Boulet le 2 mars 2005, mais ceux-ci n’ont jamais été capables d’utiliser leurs cartes, tel qu’il appert d’une photocopie des cartes, du profil de membre de Josée Vachon, du profil de membre de Germain Boulet et d’un relevé de transaction refusée produits respectivement sous les cotes R-15, R-16, R-17 et R-18;

27.          Le ou vers le 25 février 2005, l’intimé ALAIN TREMPE s’est rendu chez Josée Vachon pour lui proposer un investissement de 4 500 $ en argent comptant au Panama, ce que cette dernière a accepté tel qu’il appert de la « confirmation du dépôt du prêt » produite sous la cote R-19;

28.          À cette fin, Josée Vachon a effectué un retrait de 4 500 $ en date du 28 février 2005, tel qu’il appert des relevés de transaction produits sous la cote R-20;

29.          L’intimé ALAIN TREMPE a indiqué qu’il investissait un montant de 4 000 $ conjointement avec Josée Vachon dans le même « dépôt » chez « C.F.M. » en vue d’en répartir éventuellement les bénéfices, tel qu’il appert du document manuscrit daté du 17 mars 2005 produit sous la cote R-21;

30.          Dans le courant de 2005 et 2006, Josée Vachon et Germain Boulet ont tenté d’obtenir des explications de l’intimé ALAIN TREMPE concernant les intérêts à recevoir sur leurs placements mais ce dernier est resté vague, référant ceux-ci à Guy Desjardins dont la signature apparaît sur la convention de prêt, R-13;

31.          L’intimé ALAIN TREMPE s’est même présenté chez Josée Vachon et Germain Boulet accompagné de Guy Desjardins pour rassurer ses clients sans toutefois leur remettre leur argent;

32.          Le ou vers le 8 avril 2008, Josée Vachon et Germain Boulet ont obtenu jugement par défaut de comparaître contre l’intimé ALAIN TREMPE et Guy Desjardins pour les montants de 4 500 $ et 9 220 $. Dans les motifs de son jugement, la greffière spéciale indique ce qui suit :

« À l’été 2004, les défendeurs ont fait de fausses représentations aux demandeurs afin de leur soutirer de l’argent. Ils se déclaraient courtiers en placement pour « Centre Financier Montérégie ». Il s’est avéré que cette entreprise n’existe pas. Les prêts ont été versés comptant à Alain Trempe pour l’entreprise et son associé Guy Desjardins; »

tel qu’il appert dudit jugement produit sous la cote R-22;

33.          En guise de règlement, Guy Desjardins a remis à Josée Vachon et Germain Boulet une liasse de chèques postdatés, lesquels ont été encaissés jusqu’à concurrence de 3 000 $. Le 21 octobre 2008, la banque CIBC a avisé Josée Vachon et Germain Boulet que le chèque daté du 12 octobre 2008 ne pouvait être honoré en raison d’une saisie sur les fonds de son auteur. Les chèques subséquents n’ont donc pu être encaissés, le tout tel qu’il appert de l’avis de débit, du chèque du 12 octobre 2008 et de la liasse de chèques postdatés non encaissés produits respectivement sous les cotes R-23, R-24 et R-25;

Pauline Fortier-Matar

34.          Pauline Fortier-Matar connaît l’intimé ALAIN TREMPE depuis les années 1980 à titre de représentant en assurance vie;

35.          En 2004, l’intimé ALAIN TREMPE a présenté à Pauline Fortier-Matar un projet d’investissement dans des compagnies étrangères en mauvaise situation financières devant être remises sur pied et revendues à profit par Guy Desjardins;

36.          À cet effet, l’intimé ALAIN TREMPE a conseillé à Pauline Fortier-Matar d’effectuer un retrait sur la valeur de rachat de sa police d’assurance‑vie numéro 493888 qu’elle détenait auprès de La Compagnie d’Assurance-Vie Manufacturers (Financière Manuvie);

37.          Le ou vers le 9 décembre 2004, Pauline Fortier-Matar a procédé au retrait d’un montant de 10 000 $ de sa police d’assurance‑vie numéro 493888 en vue de l’investir dans le projet présenté par l’intimé ALAIN TREMPE, tel qu’il appert d’une lettre de La Maritime et d’un relevé de Financière Manuvie produits respectivement sous les cotes R-26 et R-27;

38.          Le ou vers le 15 décembre 2004, l’intimé ALAIN TREMPE s’est présenté au domicile de Pauline Fortier-Matar et cette dernière lui a confié un montant de 10 000 $ en argent comptant pour fins de placement afin qu’elle puisse en retirer des intérêts de 390 $ par mois en argent comptant, tel qu’il appert de la convention de prêt, de la confirmation du dépôt du prêt et de la fiche de renseignements personnels produits respectivement sous les cotes R-28, R-29 et R-30;

39.          L’intimé ALAIN TREMPE n’a remis à Pauline Fortier-Matar qu’un seul versement d’intérêts en argent comptant et lui a ensuite remis une carte de guichet automatique pour lui permettre d’accéder à ses intérêts qui seraient désormais déposés dans un compte « World Money Online »;

40.          Le ou vers le 14 février 2005, le compte « World Money Online » de Pauline Fortier-Matar a été activé et cette dernière a effectué un certain nombre de retraits, tel qu’il appert du profil de membre et des relevés de transaction produits respectivement sous les cotes R-31 et R-32;

41.          Au courant de l’année 2005, l’intimé ALAIN TREMPE a rencontré Pauline Fortier-Matar à quelques reprises, dont une fois en compagnie de Guy Desjardins, afin de la rassurer et de la convaincre de ne pas retirer son argent;

42.          Le ou vers le 9 décembre 2005, Pauline Fortier-Matar a écrit à l’intimé ALAIN TREMPE pour réclamer le paiement du montant investi, tel qu’il appert de la lettre produite sous la cote R-33;

43.          Le ou vers le 28 mars 2006, Pauline Fortier-Matar a reçu de l’intimé ALAIN TREMPE une lettre faisant référence à une réunion ayant eu lieu le 28 février et au cours de laquelle les participants lui auraient exprimé leur vive inquiétude concernant des investissements. Dans cette lettre, l’intimé ALAIN TREMPE tente de se faire rassurant et signe au nom de « Le groupe », tel qu’il appert de la lettre produite sous la cote R-34;

44.          Depuis, Pauline Fortier-Matar a tenté à plusieurs reprises de contacter l’intimé ALAIN TREMPE, mais sans succès;

45.          Pauline Fortier-Matar a intenté un recours civil pour récupérer son argent lequel doit procéder le 11 novembre 2009;

46.          En octobre 2009, Pauline Fortier-Matar a reçu un avis de faillite de Guy Desjardins daté du 15 septembre 2009, tel qu’il appert de l’avis de faillite produit sous la cote R-35;

Enquête de la Chambre de la sécurité financière

47.          Le ou vers le 5 février 2009, Pierre Boivin, enquêteur du bureau de la syndique de la Chambre de la sécurité financière, a transmis par colis accéléré une lettre à l’intimé ALAIN TREMPE pour l’informer de l’ouverture d’une enquête à son endroit et pour lui demander certaines informations. La lettre a été reçue le ou vers le 9 février 2009 par Diane Poulin, tel qu’il appert de la lettre et du bordereau de livraison produits en liasse sous la cote R-36;

48.          Le ou vers le 14 avril 2009, Pierre Boivin a transmis par colis accéléré une lettre à l’intimé ALAIN TREMPE pour lui demander de donner suite à la demande du 5 février 2009. La lettre a été reçue le ou vers le 16 avril 2009 par Diane Poulin, tel qu’il appert de la lettre et du bordereau de livraison produits en liasse sous la cote R-37;

49.          Le ou vers le 14 mai 2009, Pierre Boivin a transmis par colis accéléré une lettre constituant un dernier rappel à l’intimé ALAIN TREMPE. La lettre a été reçue le ou vers le 19 mai 2009, tel qu’il appert de la lettre et du bordereau de livraison produits en liasse sous la cote R-38;

50.          Le ou vers le 3 juillet 2009, Pierre Boivin a laissé un message sur la boîte vocale de l’intimé ALAIN TREMPE l’avisant de le rappeler. Cet appel n’a pas été suivi d’un retour d’appel de l’intimé ALAIN TREMPE;

51.          Le ou vers le 31 juillet 2009, Pierre Boivin a contacté l’intimé ALAIN TREMPE par téléphone et ce dernier a reconnu avoir reçu les demandes d’informations. L’intimé ALAIN TREMPE s’est engagé à fournir sa version dans un délai de 10 jours ouvrables;

52.          À ce jour, l’intimé ALAIN TREMPE n’a pas fourni sa version des faits;

53.          Il existe une preuve prima facie que l’intimé ALAIN TREMPE a commis les gestes reprochés;

54.          La syndique a agi avec diligence afin de présenter la présente requête le plus rapidement possible;

55.          Compte tenu de la gravité des infractions reprochées, il est d’intérêt d’ordonner la radiation provisoire immédiate de l’intimé ALAIN TREMPE;

56.          La présente requête est bien fondée en faits et en droit.

PAR CES MOTIFS, PLAISE AU COMITÉ DE DISCIPLINE :

ACCUEILLIR la présente requête;

PRONONCER la radiation provisoire immédiate de l’intimé ALAIN TREMPE, et ce, jusqu’à ce que jugement final soit rendu sur la plainte disciplinaire, pièce R-1;

LE TOUT avec dépens.

 

[3]  Les chefs d’infraction contenus à la plainte se lisent comme suit :

 

1.            À Sainte-Catherine-de-Hatley, vers le 4 mars 2004, l’intimé ALAIN TREMPE s’est approprié pour ses fins personnelles un montant de 10 000 $ lui ayant été confié par sa cliente Guylaine Turgeon, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. C. D-9.2, r. 1.01);

2.            À Sainte-Catherine-de-Hatley, vers le 24 février 2005, l’intimé ALAIN TREMPE s’est approprié pour ses fins personnelles un montant de 10 000 $ lui ayant été confié par sa cliente Guylaine Turgeon, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. C. D-9.2, r. 1.01);

3.            À Thetford Mines, vers le 22 juillet 2004, l’intimé ALAIN TREMPE s’est approprié pour ses fins personnelles un montant de 10 000 $ lui ayant été confié par son client Germain Boulet, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. C. D-9.2, r. 1.01);

4.            À Thetford Mines, vers le 25 février 2005, l’intimé ALAIN TREMPE s’est approprié pour ses fins personnelles un montant de 4 500 $ lui ayant été confié par sa cliente Josée Vachon, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. C. D-9.2, r. 1.01);

5.            À Boucherville, vers le 15 décembre 2004, l’intimé ALAIN TREMPE s’est approprié pour ses fins personnelles un montant de 10 000 $ lui ayant été confié par sa cliente Pauline Fortier-Matar, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 11, 17 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. C. D-9.2, r. 1.01);

6.            Depuis le ou vers le 9 février 2009, l’intimé ALAIN TREMPE fait défaut de collaborer avec l’enquêteur du bureau de la syndique de la Chambre de la sécurité financière, de lui répondre et de lui fournir les informations qu’il requiert, contrevenant ainsi aux articles 16 et 342 de la Loi sur la distribution de produits financiers (L.R.Q., c. D-9.2) et 42 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (L.R.Q. C. D-9.2, r. 1.01).

PAR CES MOTIFS, PLAISE AU COMITÉ DE DISCIPLINE :

ACCUEILLIR la présente plainte;

DÉCLARER l’intimé ALAIN TREMPE coupable des infractions reprochées;

IMPOSER à l’intimé ALAIN TREMPE les sanctions jugées opportunes et équitables dans les circonstances.

 

 

 

 

 

 

 

 

Le déroulement de l’audience des 6 et 16 novembre 2009

 

[4]      Le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a procédé à l’instruction de la requête en radiation provisoire les 6 et 16 novembre 2009.

 

[5]      Le 6 novembre 2009, l’intimé a présenté, en début d’audience, une demande de remise au motif qu’il avait contacté un avocat mais que celui-ci ne pouvait être présent.

 

[6]      La plaignante s’est objectée à cette demande en invoquant le fait qu’une telle requête devait être entendue d’urgence et que trois des quatre témoins qu’elle souhaitait faire entendre étaient de l’extérieur de Montréal.

 

[7]      Le Comité a retenu les arguments proposés par la plaignante et a rejeté la demande de remise.

 

[8]      La partie plaignante a fait entendre quatre témoins.

 

[9]      Le Comité a ensuite décidé d’interrompre l’instruction de la requête et de poursuivre l’audience le 16 novembre 2009.

 

[10]    Le Comité a expliqué à l’intimé qu’il pourrait alors présenter ses motifs de contestation et lui a suggéré de retenir les services d’un avocat.

 

[11]    Le 16 novembre 2009 l’intimé s’est présenté seul à l’audience.

 

[12]    La plaignante a requis du Comité la permission de retirer les chefs d’infraction énoncés au paragraphe 1 de la plainte au motif que le 4 mars 2004 l’intimé ne détenait pas de certificat en matière d’assurance de personnes et, par conséquent, le Comité n’avait pas compétence en regard de ces infractions.

 

[13]    Le Comité a autorisé le retrait des chefs d’infraction énoncés au paragraphe 1 de la plainte.

 

[14]    L’intimé a ensuite offert de « démissionner ».

 

[15]    La plaignante s’est dite insatisfaite de cette offre.  Son procureur a soumis au Comité que c’est l’Autorité des marchés financiers (AMF) (et non la Chambre de la sécurité financière) qui a compétence en matière de délivrance et de renouvellement de certificat et que la mesure appropriée pour assurer la protection du public est la radiation provisoire.

 

[16]    L’instruction de la requête s’est poursuivie.

 

[17]    Au moment des plaidoiries, la plaignante a requis que la conclusion suivante soit ajoutée à sa requête :

 

« ORDONNER à la secrétaire du Comité de discipline de faire publier, aux frais de l’intimé, un avis de la présente décision dans un journal circulant dans le lieu où l’intimé a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession ».

 

[18]    L’intimé ne s’est pas objecté à cette demande d’amendement.

 

[19]    Le Comité a accordé la demande d’amendement.

 

 

La preuve

 

Il ressort ce qui suit des pièces produites et des témoignages des personnes qui ont été entendues.

 

[20]    Mme Guylaine Turgeon :

 

  elle connaît l’intimé depuis la fin des années 1980;

  avant 2004, elle avait fait des placements par l’entremise de l’intimé;

  elle le rencontrait environ 2 fois par année et avait confiance en lui;

  en février 2004, l’intimé lui a proposé de faire, par son entremise, un placement de 10 000$ en argent comptant, lequel lui rapporterait 390$ par mois en argent comptant;

  le 24 février 2004, elle a signé, à la suggestion de l’intimé, un document coiffé du titre « Convention de prêt (placement privé) » aux termes duquel elle prêtait 10 000$ à C.F.M.;

  pendant quelques mois, l’intimé lui a remis 390$ mensuellement en argent comptant;

  par la suite, elle a pu retirer, pendant quelques mois, d’un compte bancaire des montants d’argent à l’aide d’une carte de guichet que l’intimé lui avait remise;

  en février 2005, l’intimé et un certain M. Drouin lui ont proposé un placement pour un montant additionnel de 10 000$, lequel montant devait doubler et lui être payé au bout d’un an;

  elle s’attendait donc à recevoir 20 000$ en mars 2006;

  elle n’a rien reçu et a communiqué, à plusieurs reprises, avec l’intimé afin de lui réclamer l’argent;

  l’intimé lui a dit d’être patiente, que « l’argent allait remonter » et qu’il fallait attendre;

  le 28 mars 2006, l’intimé lui a écrit afin de lui indiquer que les « délais dans les versements » étaient dus aux « contraintes de la bourse », aux « échéances données par le bureau d’avocats » et aux « propositions d’investisseurs »;

  l’intimé l’a référée à un site internet et lui a expliqué comment obtenir un mot de passe afin de consulter l’état de ses placements;

  elle n’a jamais réussi à identifier sur le site ses propres placements;

  elle a continué à poser des questions à l’intimé mais les réponses qu’elle a obtenues sont devenues de plus en plus évasives;

  en décembre 2008, elle a requis l’aide de l’AMF; l’intimé lui a alors dit qu’il ne lui parlerait plus;

  le 8 octobre 2009, son avocat a fait parvenir une mise en demeure à l’intimé;

  elle n’a jamais récupéré son argent.

 

[21]    Mme Pauline Fortier-Matar :

 

  elle connaît l’intimé depuis 1985 à titre d’agent d’assurance-vie;

  son mari et elle ont souscrit des polices d’assurance-vie pour eux et leurs enfants par l’intermédiaire de l’intimé;

  elle rencontrait l’intimé à tous les 2 ans;

  en décembre 2004, l’intimé lui a suggéré de faire un placement qui pourrait lui rapporter 3% à 4% d’intérêt par mois; il lui a expliqué qu’un certain M. Desjardins avait développé un fonds d’investissement;

  elle lui a dit qu’elle n’avait pas d’argent;

  l’intimé l’a convaincue d’effectuer un retrait sur la valeur de rachat de sa police d’assurance-vie;

  elle a effectué cette opération en décembre 2004 et a remis 10 000$ d’argent comptant à l’intimé tel que celui-ci lui avait demandé;

  le 15 décembre 2004, elle a signé un document coiffé du titre « Convention de prêt (placement privé) » aux termes duquel elle prêtait 10 000$ à C.F.M.; une somme de 390$ par mois devait lui être versée pendant une période de 12 mois consécutifs;

  l’intimé lui a remis, une fois, une somme de 390$ en argent comptant et une autre fois un montant de 100$;

  l’intimé lui a ensuite indiqué qu’il était compliqué pour lui de faire le tour des gens avec des enveloppes d’argent comptant et lui a remis une carte avec laquelle elle pourrait faire des retraits au guichet;

  elle a effectué 3 retraits au guichet automatique de la BMO dont un dernier le 21 décembre 2005; il ne restait alors plus que 4,05$ dans le compte;

  le 9 décembre 2005, elle a écrit à l’intimé afin de réclamer le remboursement de l’investissement qu’elle avait fait un an plus tôt;

  elle a communiqué par la suite, à plusieurs reprises, avec l’intimé lequel lui disait de ne pas s’inquiéter;

  elle a également rencontré l’intimé et M. Desjardins au début de l’année 2006; il lui a de nouveau été dit de ne pas s’inquiéter;

  tout comme dans le cas de Mme Turgeon, elle a reçu de l’intimé la lettre du 28 mars 2006;

  elle a continué à communiquer avec l’intimé mais n’a jamais obtenu de réponse satisfaisante;

  elle a retenu les services d’un avocat en décembre 2008;

  elle a intenté une action en justice contre M. Desjardins et l’intimé; la date de procès est le 10 novembre 2009.

 

[22]    Mme Josée Vachon :

 

  son conjoint, Germain Boulet, et elle connaissent l’intimé depuis une vingtaine d’années;

  ils ont souscrit, par son intermédiaire, des polices d’assurance-vie au nom des divers membres de leur famille;

  en 2004, l’intimé leur a proposé, à son conjoint et à elle, un placement de 10 000$ en argent comptant pour un an; des intérêts devaient leur être payés sur cette somme en argent comptant;

  l’intimé leur a expliqué qu’un certain M. Desjardins était au centre de cet investissement auquel plusieurs personnes participaient;

  son conjoint, M. Germain Boulet, a investi 10 000$;

  M. Germain Boulet a signé le 22 juillet 2004, à la suggestion de l’intimé, un contrat coiffé du titre « Convention de prêt » aux termes duquel il prêtait 10 000$ à C.F.M.;

  l’intimé a payé, à 2 ou 3 reprises, des intérêts en argent comptant;

  à la suggestion de l’intimé, le 17 mars 2005, elle a investi auprès de C.F.M. 4 500$ alors que l’intimé complétait le placement en investissant 4 000$;

  l’intimé leur a alors remis à chacun une carte de débit afin qu’ils puissent retirer les sommes auxquelles ils avaient droit sur un compte bancaire;

  ces cartes n’ont jamais fonctionné;

  elle a communiqué avec l’intimé et celui-ci lui a demandé d’être patiente;

  elle s’est faite plus insistante et l’intimé a organisé une entrevue avec M. Desjardins lequel leur a dit que l’argent était au Panama, qu’il fallait être patient et qu’il ne fallait surtout pas s’inquiéter;

  elle a continué à communiquer avec l’intimé et celui-ci ne lui a jamais fourni de réponse satisfaisante;

  en 2008, elle a consulté avec son conjoint un avocat; des procédures judiciaires ont été intentées contre l’intimé et M. Desjardins; les défendeurs n’ont pas comparu et ils ont été condamnés à payer 9 220$ à son conjoint et 4 500$ à elle.  Ils ont obtenu des chèques postdatés de M. Desjardins; ces chèques n’ont pas été honorés.

 

[23]    M. Germain Boulet :

 

Pour l’essentiel, son témoignage est au même effet que celui de sa conjointe, Mme Josée Vachon.  De son témoignage, le Comité a également retenu ce qui suit :

 

  l’intimé ne leur a pas indiqué où le placement de 10 000$ serait fait;

  l’intimé a référé à « Montérégie » en parlant de C.F.M.;

  l’intimé leur a remis, à sa femme et à lui, des cartes de débit car l’intimé était d’avis qu’il était dangereux pour lui de se promener avec autant d’argent comptant;

  suite au jugement rendu contre l’intimé et M. Desjardins, ce dernier a payé une partie de la somme due.

 

[24]    M. Pierre Boivin :

 

  il est enquêteur pour la syndique de la Chambre de la sécurité financière;

  un dossier d’enquête a été ouvert au sujet de la conduite de l’intimé le 20 janvier 2009;

  il a écrit à l’intimé afin d’obtenir sa version des faits les 5 février, 14 avril et 14 mai 2009; l’intimé n’a jamais répondu;

  le 3 juillet 2009, il a laissé un message dans la boîte vocale de l’intimé mais ce dernier n’a pas retourné son appel;

  il a réussi à joindre l’intimé au téléphone le 31 juillet 2009; l’intimé a admis avoir reçu son message téléphonique du 3 juillet 2009 et s’est engagé à communiquer sa version des faits dans les 10 jours; il n’a cependant rien reçu de l’intimé;

  tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique produite par l’AMF le 5 octobre 2009, l’intimé n’a jamais été inscrit à titre de représentant de courtier, de représentant-conseil ou de représentant-conseil adjoint en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières;

  ses recherches l’amènent à conclure que C.F.M. (Centre financier Montérégie) n’est pas inscrit au registre des entreprises ni auprès de l’AMF;

  Guy Desjardins a fait faillite le 14 septembre 2009.

 

[25]    L’intimé :

 

  il a offert à ses clients, des gens proches de lui, d’investir; il souhaitait que ses clients fassent de l’argent;

  il n’administrait pas les fonds, il ne servait que d’intermédiaire entre M. Desjardins et ses clients;

  M. Desjardins lui a été présenté par M. Drouin;

  il croyait que ses clients ne perdraient pas d’argent;

  il ne connaît rien en matière d’actions;

  il ne croyait pas que la valeur des actions pouvait descendre à 0;

  il croyait que les actions pouvaient être rachetées en tout temps;

  il n’a jamais demandé à M. Desjardins ce qu’il faisait de l’argent de ses clients;

  M. Desjardins lui disait régulièrement que les remboursements seraient faits en fin d’année;

  il n’a jamais vérifié sur internet la valeur des placements;

  il a été berné; il croit, depuis 2006, que l’on s’est servi de lui;

  il a été inconscient et il regrette ce qui est arrivé à ses clients;

  c’est M. Desjardins qui a écrit la lettre du 28 mars 2006 mais c’est lui qui l’a imprimée sur son papier à lettre et qu’il l’a fait parvenir à ses clients afin de les informer;

  il n’a pas comparu dans le cadre de l’action civile intentée contre lui par Mme Vachon et M. Boulet car il croyait que M. Desjardins s’en occuperait;

  il n’a pas fourni sa version des faits à l’enquêteur car il croyait avoir besoin d’un avocat.

 

 

LES PRÉTENTIONS DES PARTIES

 

  La plaignante

 

[26]    Par l’entremise de son procureur, Me Mathieu Cardinal, la plaignante soumet ce qui suit.

 

[27]    L’intimé a orchestré une campagne bien élaborée pour soutirer de l’argent à de petits épargnants.  Dans tous les cas, il s’agissait de clients de longue date qui avaient confiance en lui.

 

[28]    L’intimé s’est présenté chez ces clients pour leur présenter le projet d’investissement.  Il a requis qu’on lui remette des sommes en argent comptant.

 

[29]    Il a incité Mme Fortier-Matar à liquider une partie de sa police d’assurance-vie pour investir.

 

[30]    Mme Vachon n’ayant pas suffisamment d’argent pour investir, il a complété la mise de fonds à même ses propres deniers.

 

[31]    C’est l’intimé qui a reçu l’argent, rédigé et fait signer les documents pertinents.

 

[32]    Les clients ont compris qu’ils procédaient à un investissement alors que l’intimé leur a fait signer un contrat aux termes duquel ils prêtaient à C.F.M. (Centre financier Montérégie), une entité dont le nom n’apparaît pas au registre des entreprises ni à celui de l’AMF.

 

[33]    Pendant quelques mois, il a effectué la livraison aux clients des « intérêts » payés en argent comptant.

 

[34]    Il a ensuite remis à ses clients des cartes de débit et les a référés à un site internet.

 

[35]    Les clients n’étant plus payés, l’intimé a tenté de les rassurer par des explications pour ensuite cesser de leur répondre.

 

[36]    L’intimé dit avoir perdu confiance en M. Desjardins dès 2006; il a cependant continué à tenter de rassurer ses clients par la suite.

 

[37]    Ses clients n’ont pas recouvré leur investissement et il a été poursuivi par certains d’entre eux.

 

[38]    L’intimé n’a pas collaboré à l’enquête de la syndique.

 

[39]    L’écoulement du temps entre la commission des infractions alléguées à la plainte et la requête en radiation provisoire n’est pas un facteur déterminant car l’intimé a amené ses clients à continuer à avoir confiance en lui.

 

[40]    La plaignante requiert donc du Comité qu’il ordonne la radiation provisoire de l’intimé et qu’il ordonne la publication dans un journal de l’avis prévue à l’article 133 du Code des professions.

 

[41]    Elle demande également à ce que l’intimé soit condamné au paiement des déboursés.

 

 

  L’intimé

 

[42]    Il a souligné que les infractions reprochées étaient survenues il y a 4 ans, qu’il travaille dans le domaine de l’assurance-vie et que ce qui lui est reproché ne surviendra pas de nouveau.

 

[43]    Il préférerait que la décision ne soit pas publiée.

 

 

 

 

 

L’ANALYSE 

 

[44]    La requête en radiation provisoire est une mesure d’exception; lorsque la protection du public l’exige, elle permet à un Comité de discipline de priver une personne de son droit de pratiquer avant même qu’une audience sur le mérite n’ait eu lieu et qu’un verdict de culpabilité n’ait été prononcé.

 

 

Les critères applicables à une demande de radiation provisoire

 

[45]    Suivant un jugement récent du Tribunal des professions[1], pour qu’une demande de radiation provisoire de la nature de celle qui est soumise dans le présent dossier soit accueillie, les critères suivants doivent être satisfaits :

 

1°        la plainte fait état de reproches graves et sérieux;

2°        ces reproches portent atteinte à la raison d’être de la profession;

3°        la preuve « à première vue » (« prima facie ») révèle que les gestes reprochés paraissent avoir été posés;

4°        la protection du public risque d’être compromise si l’intimé continue à exercer sa profession.

 

[46]    De l’avis du Comité, ce quatrième critère se fond avec celui prévu à l’article 133 du Code des professions : 

 

« Le Comité peut rendre une ordonnance de radiation provisoire contre l’intimé s’il juge que la protection du public l’exige. »

 

[47]    Ajoutons que les deux premiers critères sont de nature objective et qu’ils se rapportent à la description des griefs contenus à la plainte et des dispositions légales ou réglementaires invoquées.

 

 

L’application des critères au dossier

 

    La plainte fait-elle état de reproches graves et sérieux (critère 1°) et ces reproches portent-ils atteinte à la raison d’être de la profession (critère 2°)?

 

[48]    La plainte fait état de sommes d’argent confiées par des clients et d’appropriation à des fins personnelles; les dispositions légales et réglementaires invoquées imposent au représentant l’obligation d’agir avec honnêteté, loyauté et intégrité et prohibent l’exercice des activités de façon malhonnête ou négligente ainsi que l’appropriation, à des fins personnelles, des sommes d’argent confiées.

 

[49]    Le Comité est d’avis que la plainte fait clairement état de reproches graves et sérieux; ces reproches vont au cœur du travail du représentant et portent atteinte à la raison d’être de la profession.

 

    La preuve à « première vue » (« prima facie ») révèle-t-elle que les gestes reprochés paraissent avoir été posés (critère 3°)?

 

[50]    Les personnes dont les noms apparaissent à la plainte ont remis des sommes d’argent comptant à l’intimé à la suggestion de celui-ci.  Elles n’ont pas été informées de façon précise, par l’intimé, de l’utilisation qui a été faite de ces sommes d’argent.

 

[51]    Après quelques paiements en argent comptant, les « versements mensuels » promis par l’intimé se sont interrompus pour des motifs que l’intimé n’a pas clairement expliqués.

 

[52]    Ces personnes n’ont pas, pour l’essentiel, recouvré les sommes « investies » ou « prêtées » par l’entremise de l’intimé à C.F.M., une entité dont l’existence juridique semble douteuse.

 

[53]    De plus, l’intimé n’a pas donné suite aux demandes d’informations de l’enquêteur du bureau de la syndique.

 

[54]    Selon le Comité, la preuve « à première vue » révèle que les gestes reprochés paraissent avoir été posés.

 

    La protection du public exige-t-elle la radiation provisoire de l’intimé (critère 4°)?

 

[55]    Les infractions alléguées aux paragraphes 2, 3, 4 et 5 de la plainte auraient été commises en 2004 et en 2005, la protection du public exige-t-elle que le Comité ordonne aujourd’hui la radiation provisoire de l’intimé?

 

[56]    Le Comité est d’avis qu’une telle mesure s’impose.

 

[57]    En effet, pendant une longue période de temps, l’intimé a amené ses clients à croire que la situation serait rétablie et qu’ils seraient remboursés.

 

[58]    Devant le Comité, il a prétendu avoir réalisé en 2006 que M. Desjardins l’avait trompé; pourtant il n’en a rien dit à ses clients et a continué à les inciter à ne pas s’inquiéter et à faire preuve de patience.  Par la suite, il a cessé de répondre à leurs questions.

 

[59]    Il n’a pas comparu dans le cadre des procédures civiles intentées contre M. Desjardins et lui par Mme Vachon et M. Boulet; il croyait que M. Desjardins le ferait.  Jugement a été rendu le 2 avril 2008 et il n’a pas payé les demandeurs.

 

[60]    En dépit des nombreuses demandes qui lui ont été adressées par l’enquêteur du bureau de la syndique depuis janvier 2009, l’intimé n’a jamais fourni sa version des faits.

 

[61]    Devant le Comité, l’intimé n’a fourni que de vagues et peu convaincantes explications.

 

[62]    L’attitude et la conduite de l’intimé inquiètent le Comité.

 

[63]    Bref, en dépit du délai écoulé depuis la commission des infractions alléguées, la preuve présentée amène le Comité à conclure que l’intimé risque de mettre en danger la protection du public s’il continue d’exercer[2].

 

 

La publication

 

[64]    La plaignante demande au Comité d’ordonner la publication de l’avis dans un journal tel que cela est prévu à l’article 133 du Code des professions; l’intimé s’y oppose.

 

[65]    Cette mesure vise à informer le public de la décision prise par le Comité et ainsi à assurer sa protection.

 

[66]    Dans certains cas, les circonstances particulières d’un dossier peuvent amener le Comité à conclure qu’il n’est pas nécessaire, pour assurer la protection du public, d’ordonner une telle publication.  L’intimé n’a pas fait valoir de circonstances particulières.

 

[67]    Le Comité ordonnera la publication.

 

 

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ :

 

ACCUEILLE la requête en radiation provisoire présentée par la plaignante;

 

ORDONNE la radiation provisoire de l’intimé;

 

ORDONNE à la secrétaire du Comité de discipline de faire publier, aux frais de l’intimé, un avis de la présente décision dans un journal circulant dans le lieu où l’intimé a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession;

 

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés;

 

CONVOQUE les parties, avec l’assistance de la secrétaire du Comité, à un appel conférence dans le but de déterminer la date d’audience de la plainte.

 

 

 

 

 

 

 

(s) Sylvain Généreux

______________________________________

Me SYLVAIN GÉNÉREUX

Président du comité de discipline

 

 

 

(s) Robert Archambault ______________________________________

M. ROBERT ARCHAMBAULT, A.V.A.

Membre du comité de discipline

 

 

 

(s) Shirtaz Dhanji ______________________________________

M. SHIRTAZ DHANJI, A.V.A., PL. FIN.

Membre du comité de discipline

 

 

Me Mathieu Cardinal

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

L’intimé se représente seul

 

 

Dates d’audience :

6 et 16 novembre 2009

 

COPIE CONFORME À L'ORIGINAL SIGNÉ



[1] Mailloux c. Médecins, 2009 QCTP 80.

[2] Chimistes c. Bell, [2001] DDOP 323.

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