Chambre de la sécurité financière c. Verreault COMITÉ DE DISCIPLINE CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE
2025 QCCDCSF 7
CANADA PROVINCE DE QUÉBEC
N°: CD00-1555 DATE : 12 juin 2025
LE COMITÉ : Me Marie-Josée Bélainsky Présidente Mme Mélissa St-Germain Membre M. Jeannot Plamondon Membre ________________________________________________________________
SYNDIQUE ADJOINTE DE LA CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE Plaignante c. SARAH VERREAULT, conseillère en sécurité financière, conseillère en assurance et rentes collectives, représentante de courtier en épargne collective, planificatrice financière (numéro de certificat 210220, BDNI 3303231)
Intimée
DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION
CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ A PRONONCÉ L’ORDONNANCE SUIVANTE :
Ordonnance de non-divulgation, non-diffusion, et non-publication de tout renseignement ou information qui pourrait permettre d’identifier les consommateurs concernés par la plainte disciplinaire ainsi que tout renseignement ou information contenus dans la preuve qui permettrait de les identifier, étant entendu que la présente ordonnance ne s’applique pas aux échanges d’information prévus à la Loi sur
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l’encadrement du secteur financier et à la Loi sur la distribution de produits et service financiers.
APERÇU
[1] L’intimée fait l’objet d’une plainte disciplinaire qui contient deux (2) chefs d’infraction :
1. À Québec, entre l’année 2018 et le ou vers le 7 août 2023, l’intimée n’a pas agi avec professionnalisme, intégrité et compétence en faisant signer des documents en blanc par des clients, contrevenant ainsi aux articles 160 de la Loi sur les valeurs mobilières, 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières.
2. À Québec, entre les ou vers les 1 er septembre 2022 et 1 er août 2023, l’intimée n’a pas agi avec professionnalisme, intégrité et compétence en modifiant des documents transactionnels préalablement signés par des clients et en les transmettant afin de procéder à une transaction, contrevenant ainsi aux articles 160, 160.1 de la Loi sur les valeurs mobilières, 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières.
[2] Essentiellement, la plaignante reproche à l’intimée d’avoir fait signer en blanc des documents et d’avoir, après signature du client, modifié des documents.
[3] L’intimée, représentée par avocat, a plaidé coupable à ces deux (2) chefs d’infraction et le comité de discipline (« comité ») en a pris acte après s’être assuré qu’elle en comprenait bien le sens et les conséquences.
[4] Après un bref exposé des faits et production des pièces par le procureur de la plaignante, le comité a déclaré l’intimée coupable d’avoir contrevenu aux articles 160 et 160.1 de la Loi sur les valeurs mobilières (RLRQ, chapitre V-1.1) et les articles 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (RLRQ, chapitre D-9.2, r.7.1) (« Règlement »).
[5] Afin de respecter la règle empêchant les condamnations multiples, le comité ordonne la suspension conditionnelle des procédures concernant les articles 160
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et 160.1 de la Loi sur les valeurs mobilières ainsi que l’article 10 du Règlement. La sanction sera ordonnée en vertu de l’article 14 du Règlement.
[6] Le comité doit déterminer la sanction appropriée qui doit être imposée à l’intimée pour ces infractions.
[7] Le procureur de la plaignante recommande des périodes de radiation temporaire de deux mois sous chacun des chefs d’infraction à être purgées de façon concurrente.
[8] De son côté, l’intimée recommande l’imposition d’amendes de 5 000$ sous chacun des chefs d’infraction.
CONTEXTE
[9] En mai 2023, à la suite d’une vérification par l’employeur des documents transactionnels soumis entre le 1 er janvier 2023 et mai 2023 par l’intimée, on lui reproche d’avoir obtenu et utilisé des documents signés en blanc et d’avoir modifié, après signature du client, des documents.
[10] Le 4 juin 2023, l’employeur convient avec l’intimée d’un plan de mesures particulières 1 étant d’avis que l’enquête menée ne démontre pas de dommages causés aux clients.
[11] Le 7 août 2023, l’employeur reproche à l’intimée d’avoir contrevenu audit plan en ce qu’elle aurait altéré un document d’une cliente après signature et on aurait retrouvé, lors d’une visite surprise, une pochette contenant d’autres formulaires signés en blanc ou incomplets.
1 Pièce P-2.
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[12] Le 15 septembre 2023, l’employeur met fin au contrat de services l’intimée.
2 avec
[13] Le 7 janvier 2024, après analyse des causes et circonstances entourant la fin d’emploi de l’intimée, l’Autorité des marchés financiers (« AMF ») transmet une mise en garde à l’intimée 3 et l’avise que le dossier sera transmis au syndic de la Chambre de la sécurité financière (« CSF »).
[14]
Après enquête du syndic de la CSF, la présente plainte est déposée.
[15] Le procureur de la plaignante produit les pièces P-5 à P-19 en regard du premier chef d’infraction (signature de documents en blanc) et les pièces P-20 à P-33 en regard du deuxième chef d’infraction (modification de documents après signature).
[16] Ces documents sont ceux qui ont été analysés par l’employeur et qui ont mené au plan de mesures particulières 4 . Aucune preuve documentaire additionnelle n’a été soumise au comité relativement aux reproches adressés à l’intimée le 7 août 2023.
[17]
L’intimée a témoigné lors de l’audition.
[18] Elle informe le comité qu’elle a débuté sa pratique en 2015 au sein de l’entreprise Mérici comme représentante en épargne collective, représentante en assurance de personnes (depuis 2016), représentante en rentes collectives (depuis 2017) et planificatrice financière (depuis 2019) et elle y est demeurée jusqu’au 15 septembre 2023.
2 Pièce P-3 3 Pièce P-4 4 Pièce P-2
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[19] Lors de son témoignage, l’intimée indique au comité qu’avant le plan de mesures particulières 5 , elle n’avait jamais fait l’objet de quelque commentaire que ce soit ou forme de suivi de la part du département de conformité.
[20] Elle a aussi ajouté qu’au moment de la signature du plan 6 , elle ignorait, de bonne foi, que ses pratiques antérieures n’étaient pas conformes et celles-ci avaient été effectuées dans le but de mieux servir les clients.
[21] La preuve non-contredite est à l’effet que les documents signés à l’avance par les clients ou modifiés suivant leur signature ont toujours été utilisés à la demande et avec le consentement express des clients concernés et ces derniers n’ont subi aucun préjudice.
[22]
Elle n’a d’ailleurs jamais fait l’objet d’une plainte de la part d’un client.
[23] Quelques mois suivant la fin de son emploi, l’intimée a trouvé un autre emploi au sein d’une autre entreprise de services financiers où elle exerce depuis ce temps.
ANALYSE ET MOTIFS
[24] Le procureur de la plaignante recommande une période de radiation de deux mois sous chacun des chefs d’infraction à être purgée de façon concurrente.
[25] Cette recommandation est basée sur la jurisprudence 7 où en matière de telles infractions, soit d’avoir fait signer au client des documents en blanc ou d’avoir
5 Pièce P-2 6 Id. 7 Chambre de la sécurité financière c. Lefebvre, 2021 QCCDCSF 63; Chambre de la sécurité financière c. Murphy-Filiatrault, 2021 QCCDCSF 27; Chambre de la sécurité financière c. Morin, 2021 QCCDCSF 21;Chambre de la sécurité financière c. Tremblay, 2017 QCCDCSF 80;Chambre de la sécurité financière c. Gauthier, 2015 QCCDCSF 6; Chambre de la sécurité financière c Perron, 2013 CanLII 59570 (QC CDCSF);Chambre de la sécurité financière c. Boucher, 2008 CanLII 22567 (QC CDCSF);Chambre de la sécurité financière c. Ngo, 2020 QCCDCSF 18; Chambre de la sécurité financière c. Couture, 2019 QCCDCSF 3
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modifié des documents après signature du client, une courte radiation temporaire pouvant aller jusqu’à deux mois serait habituellement ordonnée par le Comité.
[26] L’intimée, quant à elle, conteste la demande de condamnation à une radiation temporaire et soumet au comité qu’une amende de 5 000$ par chef d’infraction devrait plutôt être prononcée contre elle. À l’appui de cette recommandation, elle soumet la jurisprudence 8 où des amendes ont été ordonnées.
[27] La finalité du droit disciplinaire n’est pas en soi de punir le professionnel fautif mais de trouver une sanction juste afin d’assurer la protection du public, en ayant un effet de dissuasion sur le professionnel et d’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession qui pourraient être tentés d’agir de la sorte et ce, sans empêcher le professionnel d’exercer sa profession 9 .
[28] La sanction doit être individualisée et se fonder autant sur la nature, la gravité et les conséquences de l’infraction que sur la personne du professionnel sanctionné 10 .
[29] Ainsi, afin d’arriver à une sanction appropriée, le comité doit regarder les facteurs objectifs et subjectifs applicables, tels qu’énoncés dans de nombreuses décisions ainsi que par les auteurs 11 .
[30]
Des facteurs énoncés par les parties, le comité retient les facteurs suivants :
8 Chambre de la sécurité financière c. Olejnik Benedetti, 2018 QCCDCSF 70; Chambre de la sécurité financière c. Cauchi, 2023 QCCDCSF 21; Chambre De La Sécurité Financière c. Casaubon, 2004 CanLII 59864 (QC CDCSF);Chambre de la sécurité financière c. Trudeau, 2017 QCCDCSF 65; Chambre de la sécurité financière c. Bouayad, 2017 QCCDCSF 13; Chambre de la sécurité financière c. Laviolette, 2022 QCCDCSF 58; Chambre de la sécurité financière c Chen, 2013 CanLII 50553 (QC CDCSF) 9 Pigeon c. Daigneault 2003 CanLII 32934 (QCCA). 10 Jean-Guy Villeneuve, Nathalie Dubé et Tina Hobday « Précis de droit professionnel », Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2007, p.244 11 Voir note 8.
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a) Facteurs (objectifs) liés aux infractions: i. La gravité objective des infractions; ii. La pratique malsaine et dangereuse de faire signer des documents en blanc et de modifier, après signature, des documents;
b) Facteurs (subjectifs) liés à l’intimée : i. Au moment de la commission des infractions, l’intimée était une jeune représentante en début de carrière et elle est toujours dans l’industrie; ii. Au moment des infractions, elle était à l’emploi du même employeur depuis 8 ans; iii. Aucun consommateur n’a été préjudicié et elle n’a retiré aucun bénéfice personnel des manquements commis; iv. Il n’y a aucune intention malveillante ou intentionnelle; v. L’intimée a complété, avec succès, une formation sur les règles en matière de conformité; vi. L’intimée a plaidé coupable; vii. Elle n’a aucun antécédent disciplinaire.
[31] Par ailleurs, la détermination de la sanction doit également prendre en compte le principe de la parité des sanctions. Toutefois, le Tribunal des Professions dans l’affaire Chbeir 12 rappelle les enseignements récents de la Cour suprême dans l’affaire Lacasse13 selon lesquels le comité doit voir les fourchettes de peines comme des outils visant à favoriser l’harmonisation des sanctions et non pas comme des carcans, puisqu’elles n’ont pas un caractère coercitif. Le tribunal ajoute que le fait d’y déroger ne constitue pas une erreur de principe.
12 Médecins (Ordre Professionnel) c. Chbeir 2017 QCTP 3 13 R. c. Lacasse (2015) 3 RCS 1089
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[32] La gravité objective des infractions nécessite une sanction importante mais exige-t-elle la radiation temporaire de deux (2) mois sous chacun des chefs d’infraction réclamée par la plaignante ?
[33] Analysons la jurisprudence eu égard aux circonstances et faits de la présente affaire.
[34] Tout d’abord, il ressort de l’ensemble de la jurisprudence citée par le procureur de la plaignante 14 que les périodes de radiation ont toutes été imposées à la suite de recommandations communes des parties sauf dans deux (2) dossiers, soit les affaires Morin et Gauthier 15 où il y avait, par ailleurs, dans le dossier Gauthier, plusieurs chefs d’infractions additionnels de contrefaçon de signature alors que dans le dossier Morin, l’intimé continuait de nier sa responsabilité dans le cadre des représentations sur sanction.
[35] Or, en matière de recommandation commune, la décision Chan c. Médecins (Ordre professionnel des), 2014 QCTP 5 rappelle le principe suivant au paragraphe 65 :
[65] Dans cette perspective, au sein d'un débat contradictoire, les précédents qui reposent sur des suggestions communes peuvent ne pas avoir le même poids parce qu'ils résultent précisément d'un compromis issu d'une négociation, absente lorsque les parties divergent sur la peine ou la sanction devant être imposée.
Ce principe est repris, entre autres, dans les décisions suivantes : CSF c. Trudeau 2017 QCCDSF 65 16 et CSF c. Cauchi, 2023 QCCDCSF 21 17 .
14 Voir note 6. 15 Id. 16 Paragr. 31 17 Paragr. 30
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[36] De plus, dans les affaires Lefebvre, Murphy-Filiatrault, Morin, Gauthier et Perron citées par le procureur de la plaignante 18 , il y avait non seulement des chefs d’infraction relatifs à la signature de documents en blanc mais l’intégrité des intimés était également en cause puisqu’on leur reprochait également un chef de contrefaçon de signature 19 .
[37] Dans la présente affaire, non seulement il y a débat sur la sanction mais il n’y a aucune infraction de contrefaçon de signature de document.
[38] Une analyse plus approfondie de la jurisprudence soumise par le procureur de la plaignante nous amène également à y constater d’autres distinctions avec la présente trame factuelle.
[39] Ainsi, parmi les autres éléments particuliers qui retiennent l’attention du comité, il y a la distinction entre un document signé en blanc et un document incomplet.
[40] À cet égard, dans l’affaire Olejnik Benedetti 20 , le plaignant, eu égard à un chef d’infraction de signature de document en blanc, demandait une radiation d’un (1) mois et, une radiation de deux (2) mois à l’égard d’un chef d’infraction relatif à une modification de la tolérance au risque. Quant à l’intimé, il demandait l’imposition d’amendes à l’égard des deux chefs d’infraction. Le comité, après débat sur la sanction, imposa une amende relativement aux deux (2) chefs d’infraction étant d’avis que la trame factuelle se distinguait de la jurisprudence où des périodes de radiation avaient été imposées puisqu’en l’espèce, il s’agissait plutôt de documents incomplets.
[41] Ensuite, dans l’affaire Mainville c. Lelièvre 21 , sur cette question de signature de document en blanc, le tribunal a considéré qu’il y avait également
18 Voir note 6. 19 Voir note 6. 20 Chambre de la sécurité financière c. Olejnik Benedetti, 2018 QCCDCSF 36.
21 2018 QCCQ 6115.
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une distinction à faire entre un document signé en blanc et un document incomplet en y concluant que le degré de gravité était moindre pour un document incomplet. Le tribunal y a substitué une réprimande à une radiation d’un mois.
[42] En l’espèce, à la lumière des représentations du procureur de la plaignante, les documents signés en blanc par l’intimée seront, par la suite, complétés pour conclure les transactions.
[43] Quant aux documents modifiés, le procureur de la plaignante indique au comité que les modifications auraient été apportées, soit pour corriger des erreurs cléricales ou pour reproduire des demandes subséquentes du client.
[44] La preuve a révélé également que les documents signés en blanc avaient toujours été utilisés à la suite d’une demande et avec le consentement express des clients concernés.
[45] En aucun cas, la preuve n’a démontré que les documents signés en blanc ou les documents modifiés auraient été utilisés au préjudice du client, ce qui n’est pas le cas dans l’affaire Tremblay22 .
[46] À la lumière de ce qui précède, le Comité est d’avis que la jurisprudence soumise par le procureur de la plaignante doit être évaluée en regard des spécificités du présent dossier qui ne contient aucun chef d’infraction de la nature d’un manque d’intégrité de la part de l’intimée et, qui, au surplus, traite plutôt de documents incomplets.
[47] Le comité est d’avis que le degré de gravité moindre qu’on retrouve dans les décisions Benedetti et Mainville eu égard aux documents incomplets, doit également être pris en considération dans l’évaluation de la nature de la sanction à être imposée.
22 Voir note 6.
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[48] Ces distinctions étant apportées, la preuve a également révélé qu’avant le plan de mesures particulières 23 , l’intimée n’avait jamais fait l’objet de quelque commentaire que ce soit ou forme de suivi de la part de son employeur.
[49] Et, au moment de la signature du plan 24 , elle ignorait, de bonne foi, que ses pratiques antérieures n’étaient pas conformes.
[50] Bien que cette ignorance ne puisse constituer une défense et, ce n’est pas ce que l’intimée a présenté comme preuve, ces éléments démontrent un laxisme certain au niveau de la conformité exercée à cette époque par l’employeur.
[51] Ainsi, le comité estime devoir tenir compte du fait que l’intimée était encore en début de carrière au moment des évènements reprochés et l’employeur a fait défaut d’exercer ses devoirs de supervision afin de mettre fin à cette pratique.
[52] Ces éléments se distinguent également des affaires Ngo et Couture 25 où les intimés étaient des professionnels qui avaient plusieurs années d’expérience et leurs agissements s’étaient échelonnés sur une période de plus de dix (10) ans. Quant au dossier Boucher 26 l’intimé avait commis l’infraction deux (2) ans après avoir convenu d’un engagement volontaire et on réfère dans cette affaire à des décisions où les documents avaient été « trafiqués ».
[53] Selon l’intimée, une période de radiation forcerait à nouveau le transfert de la clientèle qu’elle a dû subir, pendant quelques mois, au moment de son congédiement, ce qui risquerait de compromettre la suite de sa carrière qu’elle désire ardemment continuer à exercer.
23 Pièce P-2 24 Id. 25 Voir note 6. 26 Id.
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[54] Pour toutes ces raisons, l’intimée soumet donc au comité que la sanction devant être imposée devrait plutôt être une amende et à l’appui de sa recommandation, elle soumet plusieurs décisions 27 .
[55] Dans les décisions Olejnik Benedetti, Cauchi et Trudeau 28 , les comités de discipline ont imposé des amendes, après débat sur la sanction, et alors que le syndic demandait une période de radiation.
[56] Dans les dossiers Casaubon, Bouayad, et Chen 29 amende après recommandation commune des parties.
, il y a eu imposition d’une
[57] La règle fondamentale est donc l’individualisation de la sanction qui doit atteindre les objectifs de protection du public, dissuasion du professionnel à récidiver, exemplarité à l’égard des autres membres de la profession et enfin, en dernier lieu, le droit du professionnel d’exercer sa profession 30 .
[58] À la lumière de ce principe, le comité est d’avis qu’il s’agit ici d’un cas particulier où l’intimée a certainement manqué de professionnalisme en faisant signer en blanc des documents et en modifiant, après signature, des documents. Toutefois, l’intimée est une jeune professionnelle, les documents en blanc et documents modifiés se qualifient comme documents incomplets et, contrairement à la majorité des décisions présentés par le procureur de la plaignante où on retrouve des sanctions de radiation, il n’y avait aucun élément de contrefaçon.
[59] Au surplus, il ressort clairement de son témoignage que l’intimée a été fortement ébranlée par la découverte du caractère non-conforme de sa pratique antérieure, qu’elle en a assumé la pleine responsabilité, qu’elle a compris la gravité des infractions et qu’elle est déterminée à avoir une pratique exemplaire.
27 Voir note 7. 28 Id., 2018 QCCDCSF 70; 2023 QCCDCSF 21; 2017 QCCDCSF 65. 29 Id., 2004 CanLII 59864 (QC CDCSF); 2017 QCCDCSF 13; 2013 CanLII 50553 (QC CDCSF). 30 Pigeon c. Daigneault, 2003 CanLII 32934 (QC CA).
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[60] D’ailleurs, suivant la fin de son emploi avec Mérici, l’intimée a, de son propre chef et sans obligation légale, complété, avec succès, une formation sur les règles 31 en matière de conformité.
[61] L’intimée a exprimé ses remords et elle a apporté subséquemment des correctifs à sa pratique.
[62] Le comité considère aussi que l’intimée a tiré une grande leçon de tout ce processus et puisque cette pratique contraire à la déontologie a complètement cessé, il n’est pas nécessaire en vertu du principe de l’exemplarité de lui ordonner une radiation.
[63] Compte tenu des décisions rendues en semblable matière et de l’ensemble des éléments de preuve conjugués à la tolérance de cette pratique par l’employeur, le comité est d’avis qu’en l’espèce, l’imposition d’une amende est plus appropriée.
[64] Par conséquent, tenant compte des faits propres au dossier et sans banaliser la gravité de l’infraction, le comité considère que l’imposition d’une amende de 10 000$ sur chacun des chefs d’infraction est appropriée et raisonnable pour assurer la protection du public et éviter toute forme de récidive.
[65]
L’intimée sera aussi condamnée au paiement des déboursés.
POUR CES MOTIFS, le comité de discipline :
PREND ACTE à nouveau du plaidoyer de culpabilité de l’intimée sur les chefs d’accusation contenu à la plainte;
RÉITÈRE la déclaration de culpabilité de l’intimée prononcée sous les deux chefs de la plainte pour avoir contrevenu à l’article 14 du Règlement sur la
31 Pièce I-3.
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déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (RLRQ, chapitre D-9.2, r.7.1);
RÉITÈRE la suspension conditionnelle des procédures en ce qui concerne articles 160 et 160.1 de la Loi sur les valeurs mobilières (RLRQ, chapitre V-1.1) ainsi que l’article 10 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (RLRQ, chapitre D-9.2, r.7.1);
ET, STATUANT SUR SANCTION :
CONDAMNE l’intimée au paiement d’une amende de 10 000$ quant aux chefs 1 et 2 de la plainte, pour un total de 20 000$;
CONDAMNE l’intimée au paiement des déboursés conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions (RLRQ c C-26);
PERMET la notification de la présente décision aux parties par moyen technologique conformément à l’article 133 du Code de procédure civile (RLRQ, c. C-25.01), à savoir par courrier électronique.
M e Alain Galarneau Pouliot, Prévost, Galarneau, S.E.N.C.
(S) Marie-Josée Bélainsky M e MARIE-JOSÉE BÉLAINSKY Présidente du comité de discipline
(S) Mélissa St-Germain M me MELISSA ST-GERMAIN Membre du comité de discipline
(S) Jeannot Plamondon M. JEANNOT PLAMONDON Membre du comité de discipline
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Procureur de la partie plaignante M e Aurélie Gauthier Langlois Avocats S.E.N.C.R.L. Procureure de la partie intimée
Date d’audience : 24 février 2024 COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ A0252