Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

 COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

C A N A D A

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-1452

 

DATE :

28 juillet 2021

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Marco Gaggino

Président

Mme Mona Hanne, PI.Fin.

M. Serge Lafrenière, PI.Fin.

 Membre

 Membre

 

 

SYNDIC DE LA CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

 

Plaignant

c.

 

SYLVIE LAROUCHE (certificat numéro 156107, BDNI 1652211)

 

Intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ A PRONONCÉ, LORS DE L’AUDIENCE, L’ORDONNANCE SUIVANTE :

         Non-divulgation, non-diffusion et non-publication  des noms et prénoms des consommateurs impliqués dans la plainte, ainsi que de toute information permettant de les identifier. Toutefois, il est entendu que la présente ordonnance ne s’applique pas aux échanges d’information prévus à la Loi sur l’encadrement du secteur financier et à la Loi sur la distribution de produits et services financiers.

 

[1]           L’intimée, Mme Sylvie Larouche, a été citée devant le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le « Comité ») à la suite d’une plainte disciplinaire du 24 novembre 2020 dont l’unique chef d’infraction est libellé comme suit :

1.    Dans la province de Québec, entre mars 2003 et octobre 2019, l’intimée a manqué de professionnalisme en faisant signer des documents incomplets à de nombreux clients, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière et 10 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières.

CONTEXTE

[2]           Mme Larouche a obtenu un certificat d’exercice délivré par l’Autorité des Marchés Financiers valide dans les disciplines de l’assurance de personnes, du courtage en épargne collective et de la planification financière en 2003.

[3]           À partir de mars 2003, elle été à l’emploi de Distribution Financière Sun Life à titre de représentante en assurance de personnes et de planificatrice financière et de Placements Financiers Sun Life à titre de représentante de courtier en épargne collective.

[4]           Entre mars 2003 et octobre 2019, Mme Larouche a fait signer 97 documents incomplets et/ou partiellement en blanc, à 71 clients.

[5]           Ces irrégularités ont été détectées au terme de deux enquêtes internes portant sur la pratique professionnelle de Mme Larouche, à la suite desquelles celle-ci a admis ses erreurs. Il est à noter que suite à la première enquête interne, Mme Larouche s’est vu imposer une période de suivi de douze mois; les irrégularités découvertes lors de la seconde enquête interne ont été commises lors de cette période de suivi .

[6]           Sun Life a mis un terme aux contrats de Mme Larouche en date du 14 septembre 2020 et celle-ci n’a pas recommencé à travailler depuis. Le certificat d’exercice délivré au nom de Mme Larouche par l’Autorité des Marchés Financiers n’est plus actif dans aucune discipline depuis le 14 septembre 2020.

[7]           Mme Larouche a enregistré un plaidoyer de culpabilité lors de l’audition sur culpabilité à l’égard de l’unique chef d’infraction contenu à la plainte disciplinaire; le Comité a donc déclaré, séance tenante, l’intimée coupable de ce chef, et ce, sous l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière[1].

[8]           Quant à la sanction applicable, le plaignant suggère au Comité d’imposer à Mme Larouche une période de radiation temporaire qui devrait se situer entre quatre mois et un an à compter de sa réinscription, le cas échéant, et ce, en plus de la publication d’un avis de la décision et de sa condamnation au paiement des déboursés. Mme Larouche n’a pas de recommandation à formuler au Comité, s’en remettant ainsi à sa discrétion.

ANALYSE

[9]           La sanction disciplinaire ne vise pas à punir le professionnel, mais plutôt à assurer la protection du public.  À cet effet, la sanction doit être de nature à dissuader le professionnel de récidiver et avoir un certain degré d’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession, tout en tenant compte du droit du professionnel visé d’exercer sa profession. De même, la sanction doit être proportionnelle à la gravité du manquement et être individualisée en ce qu’elle doit correspondre aux circonstances propres à la situation. Tenant compte des circonstances de la présente affaire, le Comité est d’avis qu’une période de radiation temporaire d’une durée de neuf (9) mois constitue une sanction juste et appropriée.

[10]        À cet effet, bien que la malhonnêteté et la mauvaise foi ne caractérisent pas les agissements de Mme Larouche, il n’en demeure pas moins qu’objectivement, le fait de faire signer sur une longue période de temps plusieurs documents incomplets et/ou en blanc à de nombreux clients, dénote un comportement hautement déficient; les consommateurs doivent pouvoir s’attendre à un haut degré de professionnalisme de leur représentant d’autant plus que ce comportement est de nature à mettre à risque le public, et ce, bien que dans la présente affaire, les clients n’ont subi aucun préjudice.

[11]        Par ailleurs, bien que le Comité note que Mme Larouche a collaboré à l’enquête disciplinaire et qu’elle a enregistré un plaidoyer de culpabilité, celui-ci considère que les risques de récidives demeurent réels dans la perspective d’un retour de Mme Larouche dans la profession. Ainsi, Mme Larouche, qui était au moment des faits une représentante d’expérience, a tenté de minimiser ses fautes en les justifiant, à tout le moins en partie, par un encadrement déficient de son employeur. De plus, le Comité retient que Mme Larouche a  commis certains des gestes reprochés alors qu’elle était en période de suivi suite aux révélations d’une première enquête interne à son sujet. Les regrets exprimés à l’audience par Mme Larouche ne convainquent donc pas le Comité que celle-ci a pleinement compris la gravité de ses gestes.

[12]       Le Comité considère donc qu’une période de radiation temporaire d’une durée de neuf (9) mois est juste et raisonnable dans les circonstances. Cette période de radiation temporaire ne sera par ailleurs exécutoire qu’au moment où Mme Larouche, le cas échéant, reprendra son droit de pratique et que l’Autorité des marchés financiers ou toute autre autorité compétente émettra un certificat en son nom.

[13]        Finalement, le Comité ordonnera la publication de l’avis de la présente décision et condamnera Mme Larouche au paiement des déboursés.

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

PREND ACTE à nouveau du plaidoyer de culpabilité de l’intimée à l’égard de l’unique chef d’infraction contenu à la plainte disciplinaire ;

RÉITÈRE la déclaration de culpabilité de l’intimée à l’égard de l’unique chef d’infraction contenu à la plainte disciplinaire pour avoir contrevenu à l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r. 3);

ET STATUANT SUR SANCTION :

ORDONNE la radiation temporaire de l’intimée pour une période de neuf (9) mois quant à l’unique chef d’infraction contenu à la plainte disciplinaire;

ORDONNE que cette période de radiation temporaire de neuf (9) mois ne soit exécutoire qu’au moment où l’intimée reprendra, le cas échéant, son droit de pratique et que l’Autorité des marchés financiers ou toute autre autorité compétente émettra un certificat en son nom;

ORDONNE à la secrétaire du Comité de faire publier, conformément à l’article 156, al. 7 du Code des professions (RLRQ, c. C-26), aux frais de l’intimée, un avis de la présente décision dans un journal circulant dans le lieu où cette dernière a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où elle a ou pourrait exercer sa profession;

ORDONNE à la secrétaire du Comité de ne procéder à cette publication qu’au moment où l’intimée reprendra, le cas échéant, son droit de pratique et que l’Autorité des marchés financiers ou toute autre autorité compétente émettra un certificat en son nom;

CONDAMNE l’intimée au paiement des déboursés conformément à l’article 151 du Code des professions (RLRQ, c. C-26);

 

 

(S) Me Marco Gaggino

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Me Marco Gaggino

Président du Comité de discipline

 

(S) Mme Mona Hanne

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Mme Mona Hanne, PI.Fin.

Membre du Comité de discipline

 

(S) M. Serge Lafrenière

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M. Serge Lafrenière, PI.Fin.

Membre du Comité de discipline

 

 

 

 

 

 

Me Vivianne Pierre-Sigouin

CDNP AVOCATS INC.

Procureurs de la partie plaignante

 

L’intimée se représentait seule

 

Date d’audience : 5 mars 2021

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1] RLRQ c. D-9.2, r. 3.

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