Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

 

CD00-1341

 

DATE :

22 juillet 2021

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ 

Me Marco Gaggino

Président

M. Marc Binette, Pl. Fin.

M. Pierre Décarie

 Membre

 Membre

 

 

JULIE PICHÉ, ès qualités de syndique ad hoc de la Chambre de la sécurité financière

 

Plaignante

c.

 

JEAN-FRANÇOIS SALVAIL, conseiller en sécurité financière et représentant de courtier en épargne collective (certificat numéro 130180, BDNI 1825271)

 

Intimé

 

 

DÉCISION SUR SANCTION

 

 

CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ PRONONCE L’ORDONNANCE SUIVANTE :

 

Ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non-diffusion des noms et prénoms des consommateurs visés par la plainte disciplinaire ainsi que de tout renseignement de nature personnelle et économique permettant de les identifier, étant entendu que la présente ordonnance ne s’applique pas à tout échange d’information prévu à la Loi sur l’encadrement du secteur financier (RLRQ, c. E-6.1) et à la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2).

 

[1]          À la suite de sa décision sur culpabilité rendue le 23 mars 2021 reconnaissant l’intimé, M. Salvail. coupable des quatre (4) chefs d’infraction contenus à la plainte disciplinaire portée contre lui, le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le « Comité ») a procédé à l’audition sur sanction.

[2]       Pour les chefs d’infraction 1 et 3, M. Salvail a été reconnu coupable de ne pas avoir procédé à une analyse des besoins financiers complète et conforme[1] de ses clients J.M. et A.L.

[3]       Pour le chef 2, M. Salvail a été reconnu coupable de ne pas s’être acquitté du mandat confié par son client J.M. de transmettre certaines informations demandées par une institution financière[2].

[4]       En ce qui concerne le chef 4, M. Salvail a été reconnu coupable d’avoir contrefait la signature de A.L. sur deux (2) documents[3].

LA RECOMMANDATION COMMUNE DES PARTIES

[5]       Outre le témoignage de M. Salvail, les parties n’ont pas présenté de preuve additionnelle sur sanction et elles ont formulé une recommandation commune sur sanction, qui se détaille comme suit :

    Chef 1 :  Réprimande;

    Chef 2 :  Amende de 2 000 $;

    Chef 3 : Amende de 4 000 $ et obligation de suivre une formation en matière d’analyse des besoins financiers;[4]

    Chef 4 : Période de radiation d’un mois.

[6]       Cette recommandation fait suite à des discussions, négociations et concessions entre les parties, et ce, à l’issue d’une analyse rigoureuse du dossier.

[7]       À cet égard, les parties ont tenu compte de l’ensemble des facteurs applicables en matière de sanction disciplinaire de même que du délai écoulé depuis la commission des infractions[5].

[8]       Au surplus, dans le cadre de leurs discussions et concessions mutuelles, les parties ont convenu de renoncer à leur droit d’appel respectif si leur recommandation devait être adoptée par le Comité.

ANALYSE

[9]       Le Comité considère que la recommandation commune des parties est juste et raisonnable dans les circonstances.

[10]    La sanction disciplinaire ne vise pas à punir le professionnel, mais plutôt à assurer la protection du public.  Ainsi, la sanction vise la dissuasion du professionnel de récidiver et l’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession, tout en tenant compte du droit du professionnel visé d’exercer sa profession. La sanction doit être proportionnelle à la gravité du manquement et être individualisée en ce qu’elle doit correspondre aux circonstances propres à la situation.

[11]    Lorsqu’il y a des recommandations communes et que les parties sont représentées par des avocats d’expérience, le rôle du Comité consiste à déterminer si ces recommandations déconsidèrent l’administration de la justice ou sont contraires à l’intérêt public; il n’a pas à se questionner sur la sévérité ou la clémence de la sanction recommandée[6].

[12]    Dans le présent cas, les sanctions recommandées n’ont pas pour effet de déconsidérer l’administration de la justice et ne vont pas à l’encontre de l’intérêt public; le Comité considère que ces sanctions sont raisonnables, et ce, dans la perspective première de la protection du public.

[13]    Par ailleurs, ces sanctions se situent à l’intérieur des paramètres dégagés par la jurisprudence et tiennent en compte l’ensemble des facteurs objectifs et subjectifs propres au dossier, soit :

               Les infractions commises ont une gravité objective certaine :

  L’obligation d’analyser adéquatement les besoins financiers du client constitue la pierre angulaire du travail du représentant : une mauvaise analyse ou une analyse incomplète peut avoir des répercussions négatives importantes auprès du client tel que lui offrir un produit inapproprié ou lui fournir des conseils financiers inadéquats;

   Le client doit pouvoir se fier sur son représentant pour accomplir entièrement et avec diligence le mandat qui lui est confié;

   La contrefaçon de signature peut porter atteinte à l’image de la profession;

               M. Salvail est un représentant d’expérience au dossier disciplinaire vierge;

               Deux consommateurs ont été touchés par les manquements de M. Salvail lequel n’en a retiré aucun bénéfice personnel;

               M. Salvail a plaidé coupable aux chefs 1 et 2. De plus, dans le cadre de son témoignage lors de l’audience sur sanction, il a exprimé, pour l’ensemble des gestes reprochés, des regrets et des remords sincères; il a déclaré accepter entièrement la décision sur culpabilité et avoir modifié sa méthode de travail en conséquence; il a présenté ses excuses à l’ensemble des personnes impliquées dans son dossier;

               Il a pris conscience de l’étendue de son obligation relative aux analyses de besoins financiers, notamment lorsqu’un consommateur est l’actionnaire unique d’une entreprise et que sa seule source de revenus provient de celle-ci;

               M. Salvail s’engage à suivre une formation en matière d’analyse des besoins financiers;

               La contrefaçon n’avait pas de but malhonnête et ne visait pas à camoufler une fraude, ce qui aurait constitué un facteur aggravant important[7]. De plus, les documents contrefaits n’étaient pas essentiels à l’émission de la police d’assurance;

               Les faits sont survenus entre 2008 et 2011 pour les chefs 1, 3 et 4.

[14]    Le comité est donc d’avis que la protection du public est préservée par l’imposition des sanctions recommandées par les parties lesquelles rejoignent les critères de dissuasion et d’exemplarité.

POUR CES MOTIFS, le comité de discipline, statuant sur la sanction :

IMPOSE à l’intimé une réprimande sous le chef 1 de la plainte disciplinaire;

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 2 000 $ sous le chef 2 de la plainte disciplinaire;

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 4 000 $ sous le chef 3 de la plainte disciplinaire;

PREND ACTE que l’intimé a suivi la formation accréditée par la Chambre intitulée « L’analyse des besoins d’assurance vie - 27273 L2FR » ;

IMPOSE à l’intimé une période de radiation d’un mois sous le chef 4 de la plainte disciplinaire;

 

ORDONNE à la secrétaire du comité de faire publier, aux frais de l’intimé, un avis de la présente décision dans un journal circulant dans les lieux où ce dernier a eu son domicile professionnel ou dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément aux dispositions de l’article 156 (7) du Code des professions (RLRQ, c. C-26);

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions (RLRQ, c. C-26).

 

 

(S) Me Marco Gaggino

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Me Marco Gaggino

Président du Comité de discipline

 

(S) M. Marc Binette

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M. Marc Binette, Pl. Fin.

Membre du Comité de discipline

 

(S) M. Pierre Décarie

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M. Pierre Décarie

Membre du Comité de discipline

 

 

 

Me Jean-Simon Britten

THERRIEN COUTURE JOLI-CŒUR, S.E.N.C.R.L.

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Sonia Paradis

DONATI MAISONNEUVE, S.E.N.C.R.L.

Procureurs de la partie intimée

 

 

Date d’audience :

16 juillet 2021

 

 COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ

 



[1] Article 6 du Règlement sur l’exercice des activités de représentant, RLRQ, c. D-9.2, r. 10.

[2] Article 12 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière, RLRQ, c. D-9.2, r. 3.

[3] Article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, RLRQ, c. D-9.2.

[4] Depuis l’audition sur sanction, l’intimé a suivi la formation accréditée par la Chambre intitulée « l’analyse     des besoins d’assurance vie27273 L2FR ».

[5] Cauchi c. Chambre de la sécurité financière, 2021 QCCQ 4741 (CanLII).

[6] R. c. AnthonyCook, 2016 CSC 43 (CanLII), [2016] 2 RCS 204.

[7] Brazeau c. Chambre de la sécurité financière, 2006 QCCQ 11715, par. 136.

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