Chambre de la sécurité financière (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

comité de discipline

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

canada

province de québec

 

 

 

N° :

CD00-1289

DATE :

16 juin 2020

le comité :

Me Claude Mageau

M. Alain Legault

M. Frédérick Scheidler

Président

Membre

Membre

 

 

MARC-AURÈLE RACICOT, ès qualités de syndic adjoint de la Chambre de la sécurité financière

 

Partie plaignante

c.

RANDY KABEYA (numéro de certificat 196825)

 

Partie intimée

décision sur SANCTION

conformément à l’article 142 du code des professions, le comité a RÉITÉRÉ l’ordonnance suivante :

Ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non‑diffusion du nom et du prénom des consommateurs impliqués et de toute information personnelle qui permettrait de les identifier.

[1]             L’intimé était accusé devant le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le « comité ») du chef unique d’infraction suivant :
 
 

la plainte

1.         Dans la région de Montréal, le ou vers le 28 mai 2014, l’intimé n’a pas fourni à l’assureur les renseignements qu’il est d’usage de lui fournir, alors qu’il a omis ou négligé de mentionner à la proposition d’assurance no […] que P.T.D.T. avait souffert de diabète de grossesse et avait été en arrêt de travail à l’automne 2013, contrevenant ainsi aux articles 16, 23 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3).

[2]             Le 17 mars 2020, le comité a déclaré l’intimé coupable pour avoir contrevenu aux articles 16 et 23 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers de même qu’à l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière, pour ne pas avoir fourni à l’assureur l’information reçue de la consommatrice à l’effet qu’elle avait souffert de diabète de grossesse et avait été en arrêt de travail à l’automne 2013 lors de la proposition conjointe d’assurance vie avec un avenant d’assurance invalidité soumise par elle et son conjoint.
[3]             En vertu du principe empêchant les condamnations doubles et multiples[1], le comité ordonna la suspension conditionnelle des procédures en ce qui concerne les articles 16 et 23 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers.
[4]             Toujours en vertu de la décision sur culpabilité, le comité a cependant acquitté l’intimé de l’infraction d’avoir fait défaut de fournir à l’assureur des renseignements qu’il était d’usage de lui fournir en vertu de l’article 34 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière.
[5]             Préalablement à l’audition sur sanction, une première conférence téléphonique eut lieu le 3 avril 2020 avec les procureurs des parties et l’intimé.
[6]             Me Diane Lafleur qui avait représenté l’intimé pour l’audition sur culpabilité informa alors le comité qu’elle n’avait plus le mandat de le représenter pour l’audition sur sanction, ce qui fut confirmé par l’intimé.
[7]             Dans les circonstances, le dossier fut remis au 28 avril 2020 pour permettre à l’intimé de déterminer s’il se représentera seul ou si, au contraire, il sera représenté par un nouveau procureur pour l’audition sur sanction.
[8]             Le comité ordonna aussi au procureur du plaignant d’informer l’intimé au plus tard le 17 avril 2020 de la teneur de sa recommandation sur sanction qu’il présentera au comité.
[9]             Par la suite, lors de la conférence téléphonique du 28 avril 2020, l’intimé confirma qu’il se représenterait seul pour les représentations sur sanction et que le procureur du plaignant lui avait bien transmis, tel qu’ordonné par le comité, sa recommandation sur sanction.
[10]          Le 13 mai 2020, l’audition sur sanction fut tenue par visioconférence grâce à la plateforme Webex, alors que le plaignant était représenté par Me Jean-Simon Britten et que l’intimé, qui était présent, se représentait seul, comme il l’avait déclaré précédemment.
[11]          Le procureur du plaignant indiqua au comité qu’il n’avait pas de témoin à faire entendre, alors que l’intimé indiqua qu’il avait l’intention de témoigner et de faire des représentations.
 
REPRÉSENTATIONS DU PROCUREUR DU PLAIGNANT
[12]          À la demande du procureur du plaignant, le comité réitéra l’ordonnance de non-divulgation, de non‑communication et de non-diffusion du nom et du prénom des consommateurs impliqués et de toute information personnelle qui permettrait de les identifier qui avait été ordonnée lors de l’audition sur culpabilité.
[13]          À titre de sanction, le procureur du plaignant recommanda qu’une radiation temporaire d’un ou deux mois soit ordonnée à l’intimé accompagnée de la publication d’un avis de la présente décision et du paiement des déboursés.
[14]          Il réclama que la radiation temporaire de l’intimé ne soit effective qu’au moment où l’intimé reprend son droit de pratique, le cas échéant, et qu’il détienne à nouveau son certificat des autorités réglementaires.
[15]          Il référa aussi le comité à la jurisprudence transmise au préalable pour appuyer sa recommandation[2].
[16]          Par la suite, il référa aux facteurs atténuants qu’il considère pertinents en l’espèce :

               Le peu d’expérience de l’intimé dans le domaine de l’assurance de personnes;

               L’absence d’antécédent disciplinaire;

               Il s’agit d’une infraction isolée;

               L’absence d’intention malicieuse ou malveillante de sa part, l’intimé ayant plutôt fait montre de négligence en filtrant l’information reçue de la consommatrice;

               L’intimé n’est plus représentant et ne demeure plus au Canada.

[17]          Par la suite, il proposa les facteurs aggravants suivants :

               L’intimé a volontairement choisi de filtrer l’information médicale reçue;

               L’infraction est au cœur de l’exercice de la profession;

               Le preneur d’une assurance ayant une obligation de bonne foi, son représentant joue un rôle capital vis-à-vis l’assureur;

               L’infraction a eu des conséquences très sérieuses pour la consommatrice en ce que sa demande d’indemnité a été refusée et son assurance annulée.

[18]          Compte tenu de ce qui précède, le procureur du plaignant considère que sa recommandation est tout à fait adéquate dans les circonstances compte tenu des principes de dissuasion et d’exemplarité afin que dans l’industrie, les représentants sachent bien que l’information médicale reçue d’un consommateur dans la préparation d’une proposition d’assurance doit être transmise dans son entièreté à l’assureur et non pas filtrée.
[19]          Par la suite, Me Britten commenta chacune des décisions transmises[3].
[20]          Plus particulièrement, il commenta premièrement les décisions rendues dans les affaires Daoust[4] et Larochelle[5].
[21]          Dans ces deux cas, le représentant avait soit des antécédents disciplinaires ou était tenu à des engagements de respecter de façon stricte certaines obligations déontologiques.
[22]          Le représentant fut condamné à deux mois de radiation temporaire et à une amende de 1 500 $ dans l’affaire Daoust et à deux mois de radiation temporaire dans l’affaire Larochelle pour le chef d’infraction d’avoir contrevenu à l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière, comme en l’espèce.
[23]          Le procureur du plaignant mentionna qu’une radiation d’un mois pourrait être acceptable en l’espèce, comme cela fut le cas dans l’affaire Haddaoui[6].
[24]          Enfin, suite aux commentaires du comité à l’effet qu’il existait des décisions en semblable matière où des amendes avaient été ordonnées par le comité, le procureur du plaignant prétendit que dans ces cas, l’information qui n’avait pas été transmise à l’assureur par le représentant n’était pas de nature médicale, mais uniquement technique, ce qui, selon lui, est moins grave que dans le cas où il s’agit d’une information médicale qui n’est pas transmise comme en l’espèce.
 
PREUVE DE L’INTIMÉ
[25]          L’intimé déclara qu’il voulait par son témoignage convaincre le comité de l’existence de circonstances atténuantes, militant en sa faveur.
[26]          Il expliqua qu’il est présentement actuaire de tarification à Paris pour une compagnie d’assurance.
[27]          Il a terminé avec succès ses études en actuariat et exerce présentement sa profession en France, depuis 2018, après avoir agi à ce titre au Canada pendant quelques années.
[28]          Il expliqua qu’il est arrivé au Canada à l’âge de dix ans et que très jeune, il a commencé à travailler pour lui permettre de payer ses études.
[29]          Il est citoyen canadien depuis 1996.
[30]          Il a toujours investi ses économies pour son éducation et actuellement, il est fier de déclarer qu’il n’a aucune dette contractée pour ses études.
[31]          Il expliqua comment une réputation est importante dans sa profession et qu’il est effectivement reconnu comme une personne intègre et un modèle par ses collègues.
[32]          Il témoigna à l’effet que, suite à la décision sur culpabilité du comité, il a bien compris qu’il avait été négligent au sens du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière et que l’expérience judiciaire devant le comité a été importante pour lui au niveau de son cheminement professionnel.
[33]          Il déposa, à la demande du président, son curriculum vitae comme pièce SI-1.
REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ
[34]          Il commenta les décisions soumises par le procureur du plaignant, et prétendit que les faits dans celles-ci sont tout à fait différents de son cas.
[35]          Il insista à l’effet qu’il n’a pas reçu de rémunération pour le présent dossier et qu’il n’y a eu aucune intention malicieuse ou malhonnête de sa part.
[36]          Il reconnut qu’il a été négligent, mais que la formation reçue de la part de son directeur de succursale a fait en sorte qu’il a rempli incorrectement la proposition de la consommatrice en filtrant l’information médicale reçue.
[37]          Il reconnut néanmoins qu’il y a eu négligence de sa part et il réitéra qu’il n’a jamais eu l’intention de tromper, ni l’assureur, ni la consommatrice.
[38]          Relativement à la décision rendue dans l’affaire Haddaoui[7], il prétendit que la situation dans ce dossier est tout à fait différente de la sienne en ce que l’intimé avait alors commis le geste reproché à des fins de rémunération et d’avancement de carrière, ce qui n’est aucunement son cas en l’espèce.
[39]          Il demanda au comité qu’une réprimande lui soit imposée étant donné qu’il comprend bien la faute commise et le tort causé aux consommateurs et qu’en plus, il n’est plus représentant en assurance de personnes et n’a pas l’intention de le redevenir que ce soit au Canada ou ailleurs dans le monde.
[40]          En effet, il réitéra le fait qu’il n’a pas du tout l’intention de revenir au Québec, exerçant depuis quelques années sa profession d’actuaire en France, et considérant que sa carrière est sur la bonne voie.
RÉPLIQUE DU PROCUREUR DU PLAIGNANT
[41]          Le procureur du plaignant répliqua en insistant à nouveau sur le fait que les décisions rendues dans les affaires Berry et Haché[8] où des amendes avaient été imposées ne devraient pas s’appliquer en l’espèce, car l’information qui n’avait pas été transmise à l’assureur ne concernait pas la santé du consommateur, mais était plutôt d’ordre technique.
[42]          Il réitéra aussi le fait que le préjudice subi par la consommatrice est important étant donné que dans l’avenir, il sera toujours inscrit à son dossier qu’un assureur a annulé son assurance à cause d’une déclaration médicale incomplète.

ANALYSE ET MOTIFS

[43]          Le 17 mars 2020, le comité a déclaré l’intimé coupable d’avoir contrevenu à l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière, en ayant omis ou négligé de mentionner à la proposition d’assurance conjointe soumise par la consommatrice et son conjoint que cette dernière avait antérieurement souffert de diabète de grossesse et avait été en arrêt de travail à l’automne 2013.
[44]          Tel que mentionné à la décision sur culpabilité, ce défaut par l’intimé a eu d’importantes conséquences pour la consommatrice en ce qu’elle s’est vue refuser une demande de prestation d’invalidité deux ans après que la police d’assurance eut été émise.
[45]          Par la suite, la compagnie d’assurance annula la police d’assurance au motif que si l’information médicale non dévoilée l’avait été au moment de la proposition présentée par la consommatrice, elle n’aurait jamais été émise.
[46]          Le comité est d’opinion qu’il s’agit d’une infraction ayant une gravité objective importante, car elle va au cœur même de l’exercice de la profession.
[47]          Le procureur du plaignant réclame du comité, en plus d’une condamnation au paiement des déboursés, qu’une radiation temporaire d’un ou deux mois accompagnée d’un avis de publication de la présente décision soient ordonnées compte tenu de la gravité de l’infraction et de la nécessité de passer le message dans l’industrie qu’une telle infraction amènera une sanction sévère de la part du comité.
[48]          L’intimé, quant à lui, suggère que le comité lui impose une réprimande au motif notamment qu’il n’a pas agi avec malveillance ou malhonnêteté, qu’il n’a pas posé le geste dans un but de lucre ou de profit et que, de toute façon, il n’est plus dans l’industrie et n’a pas l’intention de redevenir représentant en assurance de personnes au Québec, ni ailleurs dans le monde.
[49]          Le comité ne considère pas approprié ni l’une ni l’autre des deux recommandations faites par les parties.
[50]          Au contraire, le comité considère qu’une amende de 5 000 $ accompagnée du paiement des déboursés est plutôt appropriée en l’espèce, et ce, pour les raisons ci-après mentionnées.
[51]          Le comité est d’accord avec le procureur du plaignant à l’effet que l’infraction reprochée est d’une gravité objective très sérieuse.
[52]          Il considère aussi qu’il est important, non seulement pour l’intimé qu’il comprenne que l’infraction commise est grave, mais aussi et surtout pour les autres représentants de l’industrie que la commission d’une telle infraction amènera une sanction sérieuse au représentant fautif.
[53]          Cependant, le comité diverge d’opinion qu’une courte radiation temporaire de l’intimé soit nécessaire en l’espèce. 
[54]          Le procureur du plaignant a référé le comité, plus particulièrement, aux décisions rendues dans les affaires Daoust, Larochelle et Haddaoui[9].
[55]          Dans l’affaire Daoust, un dossier dont la sanction de deux mois de radiation temporaire et d’une amende de 1 500 $ a été confirmée par la Cour du Québec, l’intimé avait deux antécédents disciplinaires.
[56]          Dans l’affaire Larochelle, l’intimé n’avait pas d’antécédent disciplinaire, mais avait néanmoins signé avant la commission des infractions reprochées en octobre 2001 et en juillet 2003, deux engagements volontaires de respecter certaines obligations déontologiques suite à des enquêtes faites par le syndic pour des manquements relatifs aux informations fournies par le représentant au client.
[57]          En fait, un de ces engagements avait été signé par Larochelle, un mois avant la commission de l’infraction reprochée, d’avoir fait défaut de transmettre à l’assureur une information de nature médicale du consommateur.
[58]          Dans cette affaire de Larochelle, la Cour du Québec a maintenu la radiation temporaire de deux mois qui avait été ordonnée par le comité de discipline.
[59]          Enfin, l’autre décision sur laquelle le procureur du plaignant s’appuie est celle rendue par le comité dans l’affaire Haddaoui.
[60]          Le comité de discipline avait alors ordonné une radiation temporaire d’un mois, mais l’intimé faisait face à huit chefs d’infraction, dont deux qui étaient de ne pas avoir transmis l’information d’usage à l’assureur lors de la soumission d’une proposition d’assurance par deux consommateurs.
[61]          Le comité considère que ces trois décisions sont différentes du présent cas.
[62]          En effet, l’intimé en l’espèce était au moment de la commission de l’infraction un représentant sans beaucoup d’expérience, n’ayant aucun antécédent disciplinaire et ayant agi par négligence et non pas avec malhonnêteté, malveillance ou dans un but de lucre ou de profit.
[63]          De plus, l’intimé œuvrait dans une succursale dont la gestion et la supervision des représentants semblaient déficientes.
[64]          Le procureur du plaignant prétend que l’intimé ne devrait pas être condamné à une amende au motif que les décisions rendues par le comité dans les affaires de Berry et Haché[10], où les intimés l’ont été, ne peuvent pas s’appliquer en l’espèce.
[65]          En effet, il est d’opinion que le cas de l’intimé est différent en ce que l’information qu’il a fait défaut de transmettre à l’assureur était de nature médicale et non pas seulement une question technique comme dans les affaires de Berry et Haché.
[66]          Le comité diverge d’opinion avec le procureur du plaignant.
[67]          Après vérification, le comité a recensé quelques autres décisions où des amendes ont été rendues, même dans des cas où l’information qui n’avait pas été transmise à l’assureur était de nature médicale ou de très grande importance[11].
[68]          Plus particulièrement, dans l’affaire Duval[12], le comité de discipline avait condamné l’intimé à une radiation temporaire de trois mois, mais en appel, la Cour du Québec a renversé cette décision du comité et y a substitué une amende de 3 500 $.
[69]          Dans cette affaire, le représentant avait menti dans la proposition en disant faussement que le proposant n’avait pas d’antécédent criminel et n’avait pas fait l’usage de drogue.
[70]          De plus, il avait falsifié la signature du proposant.
[71]          En première instance, le comité avait considéré que les fautes étaient excessivement graves, mais la Cour du Québec a renversé cette décision en considérant, plus particulièrement, que la radiation était trop sévère compte tenu que le représentant n’avait pas d’antécédent disciplinaire.
[72]          Dans l’affaire Lachance[13], il s’agissait aussi d’une réponse transmise à l’assureur quant à la condition médicale du répondant.
[73]          Le représentant avait alors agi avec désinvolture en n’inscrivant pas la réponse qu’il avait reçue du proposant à l’effet qu’il avait été hospitalisé pendant quelques jours précédant la signature de la proposition.
[74]          Le syndic avait alors requis du comité une radiation temporaire de deux  mois ainsi qu’une amende de 1 500 $ pour ce chef d’infraction déposé en vertu des articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière.
[75]          Compte tenu que la probité de l’intimé n’était pas en jeu et qu’il n’avait aucun antécédent disciplinaire, le comité avait alors ordonné une amende 1 500 $ pour ledit chef d’infraction.
[76]          Enfin, il y a lieu de souligner que même dans l’affaire Larochelle citée par le procureur du plaignant, la Cour du Québec, faisant le commentaire suivant quant à la raisonnabilité de l’imposition d’une amende pour l’infraction reprochée :

« [135] Encore une fois, compte tenu de l’ensemble des faits mis en preuve, le Comité aurait pu tout aussi raisonnablement déterminer l’imposition d’une amende plutôt que la radiation temporaire. En décidant différemment que le préconisaient M. Larochelle et son avocat, le Comité a exercé la compétence que lui a conférée le législateur et ce, de façon raisonnable. » (nos soulignés)

[77]          Finalement, le comité est d’opinion qu’une radiation temporaire de courte durée n’est pas la sanction adéquate pour l’intimé, compte tenu des éléments subjectifs suivants :

               Le peu d’expérience de l’intimé qui en était à un début de carrière;

               La direction inadéquate et déficiente de la succursale où l’intimé agissait à titre de représentant;

               L’absence de malveillance ou de malhonnêteté de sa part;

               La reconnaissance par l’intimé de son erreur et le regret causé par celle-ci;

               Le respect du processus disciplinaire alors qu’il a continué à y participer même s’il avait quitté le Canada et demeurait en France;

               Le faible risque de récidive compte tenu qu’il n’a pas l’intention de revenir dans l’industrie;

               Le cheminement académique et professionnel remarquable de l’intimé.

[78]          Pour ce qui est de la suggestion faite par l’intimé qu’une réprimande devrait lui être imposée, le comité ne peut cependant y consentir.
[79]          En effet, même s’il reconnait l’existence de facteurs atténuants militant en sa faveur, à cause du caractère trop sérieux de l’infraction reprochée et aussi des conséquences trop importantes pour la consommatrice impliquée, le comité ne peut agréer à la demande de l’intimé.
[80]          Le comité se doit d’imposer une sanction qui possède un caractère dissuasif pour les autres représentants dans l’industrie et en l’espèce, une réprimande ne respecterait pas ce critère.
[81]          Pour toutes ces raisons, étant guidé par les principes bien connus en matière de sanction disciplinaire établie par la Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Pigeon c. Daigneault[14], le comité considère qu’une amende de 5 000 $ est la sanction adéquate et raisonnable à être ordonnée à l’intimé dans les circonstances.
[82]          Le comité condamnera aussi l’intimé au paiement de soixante-quinze pour cent (75 %) des déboursés conformément à l’article 151 du Code des professions.
[83]          En effet, ils seront ainsi limités, compte tenu que l’intimé a été acquitté de l’infraction commise en vertu de l’article 34 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière, laquelle était une des quatre dispositions légales alléguées par le plaignant au chef unique d’infraction porté contre l’intimé.
[84]          Comme l’a à plusieurs fois établi la jurisprudence en droit disciplinaire, chacune des dispositions légales alléguées à un chef d’infraction constitue en soi une infraction distincte et le comité doit déterminer si l’intimé est coupable à l’égard de chacun des facteurs de rattachement[15].
[85]          La condamnation aux déboursés se faisant habituellement en proportion du nombre de manquements pour lesquels un intimé est trouvé coupable[16].
[86]          En l’espèce, l’intimé, ayant été trouvé coupable à trois des quatre dispositions légales alléguées, il sera donc condamné au paiement de soixante‑quinze pour cent (75 %) et non à la totalité des déboursés.
[87]          Enfin, l’intimé résidant désormais à l’extérieur du Canada, la présente décision lui sera notifiée par un moyen technologique, à savoir par courrier électronique, tel qu’il avait été ordonné à la décision sur culpabilité.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

RÉITÈRE l’ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non‑diffusion du nom et du prénom des consommateurs impliqués et de toute information personnelle qui permettrait de les identifier;

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $ et lui accorde un délai de six mois pour payer ladite amende;

CONDAMNE l’intimé au paiement de soixante-quinze pour cent (75 %) des déboursés conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions (RLRQ c. C-26);

PERMET la notification de la présente décision à l’intimé par moyen technologique conformément à l’article 133 du Code de procédure civile (RLRQ, c. C-25.01), à savoir par courrier électronique.

 

 

 

 

                                                       (S) Me Claude Mageau

 

 

Me CLAUDE MAGEAU

Président du comité de discipline

 

 

(S) Alain Legault

 

M. ALAIN LEGAULT

Membre du comité de discipline

 

 

(S) Frédérick Scheidler

 

M. FRÉDÉRICK SCHEIDLER

Membre du comité de discipline

 

Me Jean-Simon Britten

THERRIEN COUTURE JOLI-CŒUR S.E.N.C.R.L.

Procureurs de la partie plaignante

 

L’intimé se représente lui-même.

 

Date d’audience : 13 mai 2020

 

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1]      Psychologues (Ordre professionnel des) c. Vallières, 2018 QCTP 121, par. 147; Notaires (Ordre professionnel des) c. Leclerc, 2010 QCTP 76, par. 46; Kienapple c. R., [1975] 1 RCS 729; R. c. Provo, [1989] 2 RCS 3; Sarazin c. R., 2018 QCCA 1065.

[2]      Chambre de la sécurité financière c. Daigle, 2005 CanLII 59609 (QC CDCSF); Chambre de la sécurité financière c. Daoust, 2006 CanLII 59880 (QC CDCSF); Daoust c. Rioux, 2009 QCCQ 1268; Chambre de la sécurité financière c. Haddaoui, 2007 CanLII 51820 (QC CDCSF); Chambre de la sécurité financière c. Larochelle, 2009 CanLII 62842 (QC CDCSF); Larochelle c. Lévesque, 2012 QCCQ 1402.

[3]      Préc., note 2.

[4]      Chambre de la Sécurité Financière c. Daoust; Daoust c. Rioux, préc., note 2.

[5]      Chambre de la sécurité financière c. Larochelle; Larochelle c. Lévesque, préc., note 2.

[6]      Chambre de la sécurité financière c. Haddaoui, préc., note 2.

[7]      Chambre de la sécurité financière c. Haddaoui, préc., note 2.

[8]      Chambre de la sécurité financière c. Berry, 2007 CanLII 50126 (QC CDCSF); Chambre de la sécurité financière c. Haché, 2010 CanLII 99862 (QC CDCSF).

[9]      Chambre de la sécurité financière c. Daoust; Daoust c. Rioux; Chambre de la sécurité financière c. Larochelle; Larochelle c. Lévesque, Chambre de la sécurité financière c. Haddaoui, préc., note 2.

[10]     Préc., note 8.

[11]     Duval c. Chambre de la sécurité financière, 2007 QCCQ 11710; Chambre de la sécurité financière c. Lachance, 2006 CanLII 59870 (QC CDCSF).

[12]     Duval c. Chambre de la sécurité financière, id.

[13]     Chambre de la sécurité financière c. Lachance, préc., note 11.

[14]     Pigeon c. Daigneault, 2003 CanLII 32934 (QC CA).

[15]     Psychologues (Ordre professionnel des) c. Vallières, préc., note 1.

[16]     Ingénieurs (Ordre professionnel des) c. Guillot, 2006 QCTP 112, par. 6 et 53 ; Murphy c. Chambre de la sécurité financière, 2010 QCCA 1079, par. 70 et suivants.

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