COMITÉ DE DISCIPLINE
CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
No : CD00-1383
DATE : 18 novembre 2019
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LE COMITÉ : Me Madeleine Lemieux Présidente
Madame Dyan Chevrier, A.V.A., Pl. Fin. Membre
Monsieur Sylvain Jutras, A.V.C., Pl. Fin. Membre
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SYNDIC DE LA CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE
Partie plaignante
c.
DIANE CARRUTHERS (certificat numéro 106210, BDNI 1620001)
Partie intimée
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DÉCISION SUR CULPABILITÉ
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CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ A PRONONCÉ L’ORDONNANCE SUIVANTE :
• Ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non-diffusion du nom et du prénom du consommateur concerné, ainsi que de toute information pouvant l’identifier.
[1] Le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s’est réuni pour procéder à l’audition sur culpabilité de la plainte disciplinaire portée le 18 juin 2019 contre l’intimée.
LA PLAINTE
[2] La plainte se lit comme suit :
1. Dans la province de Québec, entre 2009 et 2016, l’intimée a confectionné et transmis à K.Z. environ 22 faux relevés de compte relativement à des investissements dans le fond « Amerigo Garanteed Fund Limited », contrevenant ainsi à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers.
[3] L’intimée est absente lors de l’audition et les vérifications d’usage ont été faites quant à la notification de la plainte et de l’avis d’audition de la plainte.
[4] La procureure du plaignant s’est par ailleurs entretenue avec l’intimée qui a confirmé sa connaissance de la plainte et de la tenue de l’audition et indiqué qu’elle ne serait pas présente lors de l’audition.
[5] Conformément à l’article 144 du Code des professions le plaignant a été autorisé à procéder en l’absence de l’intimée.
LES FAITS
[6] L’intimée a détenu des attestations en vertu de la Loi sur les intermédiaires de marché[1] (individuel de courtier en assurances de personnes et planificateurs financiers).
[7] Elle a détenu une inscription à titre de représentante de courtier en épargne collective en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières[2].
[8] Elle a détenu des certificats en vertu de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[3] (assurance de personnes, assurance collective de personnes, planification financière et courtage en épargne collective).
[9] Depuis 2016, l’intimée ne détient plus d’attestation ni de certification et elle n’est plus inscrite à titre de représentante.
[10] L’intimée a été admise à l’Association provinciale des assureurs-vie du Québec (APAVQ) et a été membre pendant quelques mois en 1989.
[11] Elle a été admise à l’Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec (AIAPQ) également en 1989. Elle en a été membre jusqu’en septembre 1999 hormis de courtes périodes. La Chambre a ensuite succédé à l’AIAPQ, où l’intimée a été dûment inscrite jusqu’au 1er mars 2016.
[12] L’intimée a pratiqué principalement dans le cabinet Carruthers Financial Services, cabinet fondé par son père.
[13] Le consommateur K.Z. connaissait les Carruthers père et fille depuis de nombreuses années.
[14] En 2006, Carruthers père est approché pour investir dans des fonds internationaux qui procurent des taux de rendement élevés. L’offre est restreinte à un petit groupe de proches de la famille Carruthers et de clients sélectionnés.
[15] Monsieur Carruthers offre cette opportunité d’investissement à K.Z. qui y place 40 682,00 $.
[16] À la fin de l’année 2009, Monsieur Carruthers apprend que le fonds où il a placé cet investissement de K.Z. est insolvable et qu’aucun investisseur ne pourra recouvrer son investissement.
[17] Monsieur Carruthers prend alors la décision de ne pas informer K.Z. et qu’éventuellement il couvrira les pertes de ce client avec ses propres fonds au moment de son décès.
[18] Il donne dès lors instruction à l’intimée de continuer à faire parvenir à K.Z. des relevés de compte falsifiés, ce qu’elle fait.
[19] Peu avant son décès en 2012, Monsieur Carruthers aurait demandé à l’intimée de prélever sur les biens de sa succession les sommes nécessaires pour rembourser K.Z.
[20] Le remboursement n’a pas eu lieu et l’intimée a continué de faire parvenir à K.Z. des relevés de compte falsifiés, d’où les 22 faux relevés de compte allégués dans la plainte lesquels s’échelonnent entre août 2008 et décembre 2015.
[21] Un examen attentif de ces relevés permet de voir qu’il s’agit bel et bien de relevés falsifiés ce que l’intimée ne nie pas.
[22] Le comité a fait l’écoute d’un entretien entre l’enquêteur de la Chambre, Monsieur Alexander Le Quesne, et l’intimée. Elle y décrit sa manière de procéder à la falsification des relevés, comment elle calculait les hausses ou les baisses de valeur du fonds selon le marché, et ce, en utilisant de véritables relevés qu’elle modifiait à partir de son ordinateur.
[23] Ces relevés étaient transmis périodiquement à K.Z. par courriel.
[24] K.Z. donne instruction à l’intimée de ne pas renouveler ce fonds quand il arrive à maturité en avril 2015, mais l’intimée continue de falsifier les relevés et de les lui envoyer.
[25] Ce n’est qu’en 2017 que l’intimée révèle à K.Z. ce qu’il est advenu de son investissement.
ANALYSE ET MOTIFS
[26] Les faits sont clairs et par surcroît sont admis par l’intimée. Elle a en effet admis avoir falsifié des relevés de compte qu’elle a envoyés à K.Z., et ce, à au moins 22 reprises sur une période de plusieurs années.
[27] L’article 16 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers[4] prévoit qu’un représentant est tenu d’agir avec honnêteté et loyauté avec ses clients ce que n’a pas fait l’intimée.
[28] Par conséquent, le Comité déclare l’intimée coupable du chef d’accusation de la plainte portée contre elle pour avoir contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers.
POUR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :
RÉITÈRE l’ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non-diffusion du nom et du prénom du consommateur concerné et de toute information permettant de l’identifier;
DÉCLARE l’intimée coupable de l’unique chef d’infraction contenu à la plainte pour avoir contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers;
CONVOQUE les parties avec l’assistance du secrétaire du comité de discipline à une audition sur sanction;
ORDONNE au secrétaire du comité de discipline de procéder à la notification par un moyen technologique de la présente décision et de l’avis de convocation à l’audition sur sanction.
_(s) Madeleine Lemieux__________________
Me Madeleine Lemieux
Présidente du Comité de discipline
_(s) Dyan Chevrier_______________________
Madame Dyan Chevrier, A.V.A., Pl. Fin.
Membre du Comité de discipline
_(s) Sylvain Jutras_______________________
Monsieur Sylvain Jutras, A.V.C., Pl. Fin.
Membre du Comité de discipline
Me Valérie Déziel
CDNP AVOCATS INC.
Procureurs de la partie plaignante
Partie intimée absente et non représentée.
Date d’audience : 18 octobre 2019
COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ