Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-1284

 

DATE :

4 mars 2019

_____________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Gilles Peltier

Président

M. Shirtaz Dhanji, A.V.A. Pl. Fin.

Membre

M. Kaddis Sidaros, A.V.A.

Membre

_____________________________________________________________________

 

LYSANE TOUGAS, ès qualités de syndique adjointe de la Chambre de la sécurité financière

 

Partie plaignante

c.

 

MARC ST-ONGE, conseiller en sécurité financière, conseiller en assurance et rentes collectives et représentant en épargne collective (certificat numéro 131582, BDNI 1837821)

 

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

 

CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ PRONONCE L’ORDONNANCE SUIVANTE :

Ordonnance de non-divulgation, de non-diffusion et de non-publication des noms et prénoms des personnes dont les initiales apparaissent aux chefs d’infraction contenus à plainte disciplinaire, ainsi que de tout renseignement permettant de les identifier.

 

 

[1]           Le 10 octobre 2018, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le « comité ») s’est réuni au siège social de la Chambre, sis au 2000, avenue McGill College, 12e étage, à Montréal, pour procéder à l'audition de la plainte disciplinaire portée contre l'intimé le 25 octobre 2017 ainsi libellée :

LA PLAINTE :

1.         Dans la région de Montréal, le ou vers le 14 septembre 2013, l’intimé n’a pas recueilli tous les renseignements ni procédé à une analyse complète et conforme des besoins financiers de S.F. alors qu’il lui faisait souscrire la proposition numéro […] contrevenant ainsi aux articles 16, 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2) et 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r-10);

 

2.         Dans la région de Montréal, le ou vers le 14 septembre 2013, l’intimé n’a pas recueilli tous les renseignements ni procédé à une analyse complète et conforme des besoins financiers de L.P. alors qu’il lui faisait souscrire la proposition numéro […] contrevenant ainsi aux articles 16, 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2) et 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r-10);

 

3.         Dans la région de Montréal, vers 2013 et 2014, l’intimé a permis à Yvan Prévost d’exercer dans la discipline de l’assurance de personne sans qu’il détienne le certificat requis, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 3 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c.  9-2, r.3);

 

4.         Dans la région de Montréal, en juillet 2014, l’intimé a fourni de faux renseignements à l’assureur en témoignant faussement de la signature d’A.D. sur un document intitulé «Policy LoanRequest», contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. 9-2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c.9-2, r.3).

 

[2]           La plaignante était représentée par Me Caroline Chrétien et l’intimé qui était présent, était représenté par Me Martin Courville.

 

 

 

PLAIDOYER DE CULPABILITÉ

[3]           En début d’audition, il fut indiqué au comité qu’il était de l’intention de l’intimé de reconnaître sa culpabilité aux infractions qui lui étaient reprochées aux quatre (4) chefs d’infraction contenus à la plainte.

[4]           Invités par le comité à préciser à quelles infractions l’intimé désirait effectivement plaider coupable, les procureurs indiquèrent qu’en regard des chefs numéro un (1) et deux (2), celui-ci plaidait coupable d’avoir contrevenu à l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c.9-2, r.10); en regard du chef numéro trois (3), un plaidoyer de culpabilité était enregistré à l’infraction prévue à l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c.9-2, r.3) et quant au chef numéro quatre (4), l’intimé reconnaissait sa culpabilité à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c.D-9.2).

[5]           Après s’être assuré que l’intimé, par son plaidoyer de culpabilité, reconnaissait les gestes reprochés et que ceux-ci constituaient des infractions déontologiques, il fut déclaré coupable, quant aux chefs d’infraction numéro un (1) et deux (2), de l’infraction prévue à l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r.10), quant au chef d’infraction numéro trois (3), de l’infraction prévue à l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. 9-2, r.3) et en regard au chef d’infraction numéro quatre (4), de l’infraction prévue à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2).

[6]           Un arrêt conditionnel des procédures fut ordonné en ce qui a trait aux autres dispositions mentionnées aux chefs d’infraction contenus à la plainte disciplinaire.

[7]           La procureure de la plaignante déposa de consentement un cahier de pièces identifiées P-1 à P-21, O-1 à O-5, dont l’attestation du droit de pratique de l’intimé démontrant qu’il détenait un certificat lui permettant d’exercer à titre de représentant dans les disciplines de l’assurance de personnes et de l’assurance collective de personnes, tel qu’il appert de l’attestation du droit de pratique déposé sous la pièce P-1.

LA PREUVE

[8]           En ce qui a trait aux premier et deuxième chefs d’infraction, les dossiers produits en cours d’enquête et qui présentent les propositions et les souscriptions à ces produits d’assurance démontrent que les informations financières de l’analyse de besoins financiers de chacun des clients s’avéraient incomplètes, incorrectes et non conformes à la réalité de chacun des cas.

[9]           Le dossier de l’intimé contenait certaines données d’analyse, mais celles-ci n’étaient pas datées du jour de la proposition d’assurance-vie, et ce, contrairement aux règles prescrites.

[10]        En ce qui concerne le troisième chef d’infraction, il a été démontré que l’intimé agissait comme dirigeant responsable du cabinet GROUPE FINANCIER INVICO INC.

[11]        À compter du mois d’octobre 2011, Yvan Prévost a fait partie du même cabinet.

[12]        Celui-ci a détenu une certification dans la discipline de l’assurance de personnes jusqu’au 30 septembre 2013, il est devenu inactif par la suite.

[13]        Il a cependant continué d’agir à titre de « solliciteur et d’entremetteur », selon les termes utilisés par l’intimé, lors d’une rencontre avec des enquêteurs de la Chambre de la sécurité financière.

[14]        De cette rencontre, enregistrée sur un CD déposé en preuve, dont les membres ont pu prendre connaissance durant leur délibéré, le comité retient essentiellement les éléments suivants :

        L’intimé savait qu’Yvan Prévost avait perdu son permis d’exercice;

        Monsieur Prévost était chargé d’établir un lien de confiance avec le client;

        Il effectuait la collecte de données auprès des clients et complétait différents documents relatifs à la souscription de nouveaux produits d’assurance;

        Selon les dires de l’intimé, Monsieur Prévost ne parlait jamais de produits, mais de « concepts »;

        Il effectuait un suivi des dossiers;

        Bien qu’il ne signât aucun document, il était présent à toutes les étapes menant à la délivrance du contrat.

[15]        Il appert clairement de la preuve qu’Yvan Prévost et l’intimé agissaient de concert pour présenter les produits d’assurance, en expliquer les termes et le fonctionnement et pour répondre aux questions soulevées par les clients, ceux-ci ne pouvant nullement soupçonner que Monsieur Prévost n’était pas un représentant certifié.

[16]        À l’égard du quatrième chef d’infraction, il a été démontré au comité que l’intimé n’a jamais rencontré la consommatrice A.D. et qu’il aurait témoigné faussement de la signature de celle-ci, afin de lui rendre service pour qu’elle obtienne rapidement le prêt sollicité.

 

 

REPRÉSENTATION DE LA PLAIGNANTE

[17]        La procureure de la plaignante débuta ses représentations en énonçant les termes des recommandations communes auxquelles en étaient venues les parties, relativement aux sanctions devant être imposées, lesquelles s’articulent ainsi :  

SOUS LE CHEF D’INFRACTION NUMÉRO UN (1)

-       Une amende de CINQ MILLE DOLLARS (5 000 $);

SOUS LE CHEF D’INFRACTION NUMÉRO DEUX (2)

-       Une réprimande;

SOUS LE CHEF D’INFRACTION NUMÉRO TROIS (3)

-       Une amende de DIX MILLE DOLLARS (10 000 $);

SOUS LE CHEF D’INFRACTION NUMÉRO QUATRE (4)

-       Une amende de SEPT MILLE CINQ CENTS DOLLARS (7 500 $);

[18]        Elle ajouta que les parties avaient convenu de la condamnation de l’intimé au paiement des déboursés.

[19]        Elle déposa, au soutien des recommandations communes formulées par les parties, un cahier d’autorités contenant onze (11) décisions antérieures du comité[1] qu’elle prit le soin de commenter, en insistant sur les faits et circonstances s’apparentant au présent dossier.

[20]        Elle exposa ensuite les facteurs tant atténuants qu’aggravants, justifiant le caractère raisonnable des recommandations communes, mentionnant que :

FACTEURS AGGRAVANTS :

-       La gravité objective des actes reprochés aux quatre (4) chefs d’accusation est indiscutable;

-       Ces gestes portent atteinte à l’image de la profession et se situent au cœur même de l’exercice de la profession;

-       Ils sont d’autant plus graves qu’ils ont été commis par un représentant d’expérience;

-       L’analyse complète et conforme des besoins financiers d’un consommateur constitue la pierre angulaire du travail de représentant;

-       Témoigner faussement de la signature d’un consommateur constitue un geste clairement prohibé qui peut avoir de sérieuses conséquences auprès de l’assureur qui est justifié de se fier aux informations qui lui sont communiquées par le représentant;

-       Permettre à un non-inscrit d’agir comme représentant risque de porter sérieusement atteinte à la confiance du public à l’égard de la fonction de représentant;

-       Il ne s’agit pas de gestes isolés;

-       Le laxisme dont a fait montre l’intimé qui a fait défaut de suivre les règles les plus élémentaires dans l’exercice de ses fonctions de représentant.

FACTEURS ATTÉNUANTS :

-       Il a enregistré un plaidoyer de culpabilité aux quatre (4) chefs d’accusation;

-       Il a collaboré à l’enquête de la syndique adjointe;

-       Il a reconnu les faits devant le Tribunal administratif des marchés financiers[2] où il s’est vu imposer des pénalités administratives importantes;

-       À l’exception d’un consommateur qui a choisi d’annuler son contrat et qui a dû défrayer des frais de sortie, les autres n’ont subi aucun préjudice financier.

[21]        Finalement, elle invita le comité à considérer les facteurs de protection du public, d’exemplarité et de dissuasion et souligna que, selon son opinion, les recommandations communes faites par les parties devraient être analysées en tenant compte du principe de la globalité des sanctions et du droit de l’intimé de continuer d’exercer la profession.

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

[22]        Le procureur de l’intimé, après avoir confirmé que les parties avaient convenu de soumettre au comité des recommandations communes, indiqua que celles-ci étaient le fruit de discussions sérieuses et de négociations intensives.

[23]        Il souligna ensuite que :

-       Relativement à la notion d’exercice illégale qui fait l’objet du chef numéro trois (3), l’intimé n’avait pas mis en place un stratagème, mais qu’il s’agissait plutôt d’un «mode opératoire» où Yvan Prévost agissait à titre de démarcheur, de solliciteur et d’entremetteur;

-       Cette façon de faire, quoique malheureuse, ne comportait pas d’intention malhonnête;

-       En regard des chefs d’infraction numéros un (1) et deux (2), bien qu’incomplet et comportant des inexactitudes, une analyse des besoins financiers (ABF) avait quand même été faite auprès des consommateurs;

-       Quant au chef d’infraction numéro quatre (4), ce n’est que pour accommoder la consommatrice, et afin d’accélérer le processus d’obtention d’un prêt qu’il a témoigné faussement de la signature de celle-ci. Il n’en a retiré aucun avantage;

-       Il a offert une excellente collaboration durant tout le processus d’enquête de la syndique adjointe;

-       Il a conclu une entente avec l’Autorité des marchés financiers et souscrit des engagements qu’il a respectés;

-       Il a déjà eu à assumer de fortes pénalités administratives de l’ordre de trente mille dollars (30 000 $) imposées, par le Tribunal administratif des marchés financiers, en lien avec les mêmes actes qui lui sont reprochés;

-       Il a agi sans intention malveillante;

-       Il a depuis apporté les correctifs nécessaires à sa pratique, réduisant d’autant les risques de récidive.

 

ANALYSE ET MOTIFS

[24]        L’attestation du droit de pratique de l’intimé (P-1) indique, qu’aux dates mentionnées à la plainte disciplinaire, celui-ci était inscrit en vertu de la Loi sur la distribution de produits et de services financiers (RLRQ, c. D-9.2), à titre de représentant en assurance de personnes et en assurances collectives de personnes.

[25]        L’intimé a fait l’objet en 2009, 2012 et 2013, de mises en garde de la part du bureau du syndic de la Chambre de la sécurité financière, relativement à des manquements qui ne sont pas de la nature de ceux qu’on lui reproche dans la présente plainte disciplinaire.

[26]        Il a été condamné le 10 juin 2015, par le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière[3], au paiement d’une amende de cinq mille dollars (5 000 $) pour avoir commis une infraction similaire à celles énoncées aux chefs d’infraction numéros un (1) et deux (2) de la plainte disciplinaire.

[27]        Il a, dès la première occasion, enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’égard de chacun des quatre (4) chefs d’infraction contenus à la plainte.

[28]        Les évènements qui lui sont reprochés se sont déroulés en 2013 et 2014.

[29]        Il a collaboré à l’enquête de la syndique adjointe et conclut une entente avec l’Autorité des marchés financiers suite à laquelle il s’est vu imposer de fortes pénalités administratives en regard, essentiellement, des mêmes faits qui nous occupent.

[30]        La preuve ne révèle pas qu’il puisse avoir été animé d’une quelconque intention malveillante.

[31]        À l’exception d’un consommateur qui a dû assumer des frais suite à sa décision de rompre le contrat qui le liait à l’assureur, les autres consommateurs n’ont subi aucun préjudice financier.

[32]        Le comité ne peut ignorer ces éléments dans son analyse, mais se doit néanmoins de souligner que les actes fautifs posés par l’intimé sont d’une gravité objective indéniable.

[33]        Ils sont au cœur même de l’exercice de la profession et sont de nature à déconsidérer celle-ci.

[34]        La préméditation en ce qui concerne le chef d’infraction numéro trois (3) ne fait aucun doute.

[35]        La longue expérience de l’intimé dans le domaine aurait dû le mettre à l’abri de la commission de tels gestes.

[36]        Il a trahi la confiance de ses clients, en laissant erronément croire à ceux-ci qu’Yvan Prévost était autorisé à agir à titre de représentant.

[37]        De même, en témoignant faussement de la signature de la consommatrice, il a volontairement trompé l’assureur, ce qui aurait pu entraîner de fâcheuses conséquences.

[38]        L’analyse complète et exhaustive des besoins financiers d’un consommateur est de toute première importance. L’intimé ne pouvait l’ignorer. Il a fait preuve de négligence et d’un manque de professionnalisme d’autant plus inacceptable pour un représentant expérimenté.

[39]        La sanction vise, non pas à punir le professionnel, mais à assurer la protection du public.

[40]        Dans l’arrêt Pigeon c. Daigneault[4], la Cour d’appel a établi les critères devant guider le comité lors de l’imposition d’une sanction :

-       La protection du public;

-       La dissuasion du professionnel de récidiver;

-       L’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession;

-       Le droit par le professionnel visé d’exercer sa profession.

[41]        La sanction doit être proportionnelle à la gravité du manquement qui est reproché et être individualisée en ce qu’elle doit correspondre aux circonstances propres à sa situation.

[42]        Tel que mentionné précédemment, les procureurs des parties ont convenu de soumettre au comité des recommandations communes relativement à la sanction qui doit être imposée à l’égard de chaque chef d’infraction énoncé à la plainte disciplinaire.

[43]        Le comité se doit d’appliquer les principes de droit qui régissent son pouvoir d’intervention en pareil cas.

[44]        Il a été souligné par la Cour d’appel du Québec dans Dumont c. R.[5], que la recommandation commune dispose d’une « force persuasive certaine » de nature à assurer qu’elle sera respectée en échange du plaidoyer de culpabilité.

[45]        De même dans Chan c. Médecins[6], le Tribunal des professions invite les Conseils de discipline « non pas à décider de la sévérité ou de la clémence de la sanction, mais à déterminer si elle s’avère déraisonnable au point d’être contraire à l’intérêt public et de nature à déconsidérer l’administration de la justice. »

[46]        De plus, des recommandations communes ne doivent pas être écartées « afin de ne pas discréditer un important outil contribuant à l’efficacité du système de justice, tant criminelle que disciplinaire[7]».

[47]        La Cour Suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Anthony-Cook[8] a statué que des recommandations communes ne devraient être écartées que si elles sont susceptibles de déconsidérer l’administration de la justice ou contraires à l’intérêt public, elle s’exprime ainsi :

« [32]  Selon le critère de l’intérêt public, un juge du procès ne devrait pas écarter une recommandation conjointe relative à la peine, à moins que la peine proposée soit susceptible de déconsidérer l’administration de la justice ou qu’elle soit par ailleurs contraire à l’intérêt public. Mais que signifie ce seuil? Deux arrêts de la Cour d’appel de Terre‑Neuve‑et‑Labrador sont utiles à cet égard.

[33] Dans Druken, au par. 29, la cour a jugé qu’une recommandation conjointe déconsidérera l’administration de la justice ou sera contraire à l’intérêt public si, malgré les considérations d’intérêt public qui appuient l’imposition de la peine recommandée, elle [traduction] « correspond si peu aux attentes des personnes raisonnables instruites des circonstances de l’affaire que ces dernières estimeraient qu’elle fait échec au bon fonctionnement du système de justice pénale ». Et, comme l’a déclaré la même cour dans R. v. B.O.2, 2010 NLCA 19 (CanLII), au par. 56, lorsqu’ils examinent une recommandation conjointe, les juges du procès devraient [traduction] « éviter de rendre une décision qui fait perdre au public renseigné et raisonnable sa confiance dans l’institution des tribunaux ».

[

[40] En plus des nombreux avantages que les recommandations conjointes offrent aux participants dans le système de justice pénale, elles jouent un rôle vital en contribuant à l’administration de la justice en général. La perspective d’une recommandation conjointe qui comporte un degré de certitude élevé encourage les personnes accusées à enregistrer un plaidoyer de culpabilité. Et les plaidoyers de culpabilité font économiser au système de justice des ressources et un temps précieux qui peuvent être alloués à d’autres affaires. Il ne s’agit pas là d’un léger avantage.

[

[42] D’où l’importance, pour les juges du procès, de faire montre de retenue et de ne rejeter les recommandations conjointes que lorsque des personnes renseignées et raisonnables estimeraient que la peine proposée fait échec au bon fonctionnement du système de justice. Un seuil moins élevé que celui‑ci jetterait trop d’incertitude sur l’efficacité des ententes de règlement. Le critère de l’intérêt public garantit que ces ententes de règlement jouissent d’un degré de certitude élevé.

[»

[48]        C’est dans cette perspective, en considérant les principes de la gradation et de la globalité des sanctions, ainsi que des facteurs atténuants et aggravants présents dans le dossier, que le comité s’est interrogé sur le bien-fondé des recommandations qui lui sont faites.

[49]        Après une révision attentive du dossier et bien que les recommandations communes puissent apparaître clémentes, compte tenu de l’antécédent disciplinaire de l’intimé en semblable matière, quant aux chefs d’infraction numéros un (1) et deux (2) de la plainte disciplinaire, le comité ne considère pas qu’il se retrouve dans une situation où il se doit d’intervenir et de se dissocier des recommandations faites par des procureurs d’expérience bien aux faits des circonstances propres à cette affaire.

[50]        Il est d’avis que la sanction suggérée conjointement ne fait pas perdre au public renseigné et raisonnable sa confiance dans le système de justice disciplinaire[9].

[51]        Le comité n’est donc pas en présence d’une recommandation déraisonnable, contraire à l’intérêt public, inadéquate ou de nature à déconsidérer l’administration de la justice[10].

[52]        Le comité retiendra donc les recommandations communes proposées par les parties.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé à l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r.10), sous les chefs d’infraction numéros un (1) et deux (2);

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé à l’article 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. 9-2, r.3), sous le chef d’infraction numéro trois (3);

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2) sous le chef d’infraction numéro quatre (4);

RÉITÈRE l’arrêt conditionnel des procédures en ce qui a trait aux autres dispositions mentionnées aux chefs d’infraction contenus à la plainte.


 

ET STATUANT SUR SANCTION :

SOUS LE CHEF D’INFRACTION NUMÉRO UN (1)

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de CINQ MILLE DOLLARS (5 000 $);

SOUS LE CHEF D’INFRACTION NUMÉRO DEUX (2)

IMPOSE une réprimande;

SOUS LE CHEF D’INFRACTION NUMÉRO TROIS (3)

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de DIX MILLE DOLLARS (10 000 $);

SOUS LE CHEF D’INFRACTION NUMÉRO QUATRE (4)

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de SEPT MILLE CINQ CENTS DOLLARS (7 500 $);

ACCORDE à l’intimé un délai de vingt-deux (22) mois pour le paiement desdites amendes totalisant la somme de VINGT-DEUX MILLE CINQ CENTS DOLLARS (22 500 $);

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés, y compris les frais d’enregistrement, conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions (RLRQ, c. C-26).

 

 

 

(s) Gilles Peltier  __________________

Me GILLES PELTIER

Président du comité de discipline

 

 

(s) Shirtaz Dhanji __________________

M. SHIRTAZ DHANJI, A.V.A., Pl. Fin

Membre du comité de discipline

 

 

(s) Kaddis Sidaros__________________

M.  KADDIS SIDAROS, A.V.A.

Membre du comité de discipline

 

 

Me Caroline Chrétien  

THERRIEN COUTURE s.e.n.c.r.l.

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Martin Courville

AD LITEM AVOCATS

Procureurs de la partie intimée

 

 

Date d’audience :

10 octobre 2018

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1] Chambre de la sécurité financière c. Lévesque, 2016 CanLII 39912 (QC CDCSF);

Chambre de la sécurité financière c. Taillon, 2018 QCCDCSF 3 (CanLII);

Chambre de la sécurité financière c. Gagné 2012 CanLII 97169 (QC CDCSF);

Chambre de la sécurité financière c. Derkson, 2015 QCCDCSF 32 (CanLII);

Chambre de la sécurité financière c. Ducharme, 2017 QCCDCSF 78 (CanLI);

Chambre de la sécurité financière c. Tremblay, 2012 CanLII 97166 (QC CDCSF).

Chambre de la sécurité financière c. Couture, 2014 CanLII 32504 (QC CDCSF);

Chambre de la sécurité financière c. Vecchiarino, 2017 QCCDCSF 71 (CanLII);

Chambre de la sécurité financière c. Watier, 2011 CanLII 99518 (QC CDCSF);

Chambre de la sécurité financière c. Amar, 2008 CanLII 53173 (QC CDCSF);

Chambre de la sécurité financière c. Sakovich, 2017 QCCDCSF 67 (CanLII).

 

[2] Autorité des marchés financiers c. Invico Investissements, 2016 QCTMF 49 (CanLII).

 

[3] Chambre de la sécurité financière c. St-Onge, 2015 QCCD CSF 26.

[4] Pigeon c. Daigneault, 2003 CanLII 32934 (QCCA).

[5] Dumont c. R., 2013 QCCA 576.

[6] Chan c. Médecins (Ordre professionnel des), 2014 QCTP 5.

[7] Langlois c. Dentiste (Ordre professionnel des), 2012 QCTP 52.

[8] R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43 (CanLII).

[9] R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43 (CanLII), supra note par. 8.

[10] Chan c. Médecins (Ordre professionnel des), 2014 QCTP 5, supra note par. 6.

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