Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE
CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

 

CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC

N: CD00-1251

DATE : 2 août 2018

 

LE COMITÉ :           Me George R. Hendy                       Président
                                    M. Robert Benson, Pl. Fin.              Membre
                                    M. Robert Chamberland, A.V.A.    Membre

 

LYSANE TOUGAS, ès qualités de syndique adjointe de la Chambre de la sécurité financière

            Partie plaignante

c.

FRANÇOIS DELAGE, conseiller en sécurité financière (certificat numéro 109240)

            Partie intimée



 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

 

 

CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ A PRONONCÉ L'ORDONNANCE SUIVANTE :

 

Ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non-diffusion du nom et du prénom de tout consommateur concerné par cette cause ainsi que de toute information permettant de les identifier.

[1]          Le 25 juillet 2018, le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le « Comité ») s'est réuni aux bureaux du Tribunal administratif du travail (CLP), situé au 900 Place d'Youville, 8e étage, à Québec, et a procédé à l'audition d'une plainte disciplinaire portée contre l'intimé ainsi libellée :

LA PLAINTE

1.            Dans la province de Québec, le ou vers le 6 mai 2009, l’intimé a permis que soient fournis de faux renseignements à l’assureur sur le formulaire de proposition XXXXXXX dans la section «Rapport du conseiller» et sur le formulaire «Page-produit InnvoVision» dans la section «Déclaration du conseiller en assurance», contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3).

PLAIDOYER DE CULPABILITÉ

[2]          L'intimé était représenté par Me Serge Létourneau et enregistra un plaidoyer de culpabilité à l'égard du seul chef d'accusation contenu à la plainte.

[3]          Le Comité a pris acte du plaidoyer de culpabilité et a déclaré l'intimé coupable sous l’unique chef d'accusation contenu à la plainte disciplinaire. Considérant le principe interdisant les condamnations multiples, le Comité déclarera l'intimé coupable en vertu de l'article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2) et ordonnera l'arrêt conditionnel des procédures en vertu des articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, D-9.2, r.3).

[4]          Après l'enregistrement dudit plaidoyer, les parties présentèrent au Comité leurs preuves et firent leurs représentations sur sanction.

 

PREUVE DE LA PLAIGNANTE

[5]          La plaignante, représentée par son procureur, Me Alain Galarneau, versa alors au dossier une preuve documentaire qui fut cotée P-1 à P‑14. Elle ne fit entendre aucun témoin. 

[6]          La preuve démontre qu'une série de formulaires reliés à une proposition d'assurance (pièces P-2, P-3 et P-4) ont été préparés par l'intimé pour la Manuvie. Puisque l'intimé n'avait pas encore de code de représentant auprès de Manuvie (une demande à cet effet était cependant en cours), le directeur régional de Manuvie (M. Bédard) a suggéré que lesdits formulaires d'assurance soient signés par un autre représentant (Mme Lise Bouchard) qui détenait un tel code de représentant auprès de Manuvie.

[7]          Donc, de concert avec l'intimé, Mme Bouchard a faussement déclaré qu'elle agissait comme représentante des assurés alors qu'elle n'était pas présente lorsque les formulaires, préparés par l'intimé, avaient été signés par les consommateurs.

[8]          L'intimé a collaboré à l'enquête et il a avoué sa conduite d'une façon transparente lors de l'enquête et en entrevue avec l'enquêteur de la Chambre (pièce P- 7).

REPRÉSENTATIONS DES PARTIES SUR SANCTION

[9]          Les procureurs des parties ont proposé au Comité l'imposition d'une amende de 7 500 $ comme sanction juste et équitable dans les circonstances, compte tenu, entre autres, de la sanction imposée à Mme Bouchard dans le dossier CD00-1204 (pièce
P-14), soit une amende de 5 000 $.

[10]       Relativement au chef d'accusation, la plaignante souligna comme facteurs aggravants la gravité objective de l'infraction ainsi que les antécédents disciplinaires de l'intimé (pièces P-8, P-9, P-10, P-11, P-12 et P-13).

[11]       Dans le premier dossier disciplinaire (pièces P-8 et P-9), l'intimé a été jugé coupable d'infractions commises en mai 1997 et a été condamné à une amende totale de 1 200 $. Dans le deuxième dossier (pièce P-10), l'intimé a plaidé coupable à trois infractions commises en octobre 1997 et a été condamné à payer des amendes totalisant 5 500 $. Enfin, dans le troisième dossier (pièces P-11, P-12 et P-13), l'intimé a été jugé coupable (après un procès de 22 jours) d'avoir commis sept infractions en 1993, 1994 et 2000 et a été condamné à une amende totale de 18 000 $ et à une radiation temporaire de trois mois.

[12]       Comme facteurs atténuants, la plaignante invoqua le fait que l'intimé a admis sa conduite, qu'il a collaboré à l'enquête et qu'il a plaidé coupable. Le procureur de l'intimé ajouta que les infractions précédentes ont été commises il y a longtemps, qu'il y avait peu de risque de récidive, que la présente infraction était un incident isolé, approuvé par un cadre supérieur alors que l'intimé était en attente de son code de référence de Manuvie, que  l'intimé n'a tiré aucun gain, que les clients n'ont subi aucun préjudice de l'infraction et, finalement, que la sanction devait être proportionnelle à celle  imposée à Mme Bouchard (P-14).

[13]       Les parties ont ensuite référé le Comité à la jurisprudence suivante en plaidant que, dans des cas similaires, la sanction suggérée pour l'intimé était jugée appropriée et que le Comité avait un devoir de déférence face à cette recommandation commune :

a)            Chambre de la sécurité financière c. St-Onge (CD00-1053, 10 juin 2015);

b)            Chambre de la sécurité financière c. Trouillot (CD00-1198, 13 décembre 2017);

c)            Chambre de la sécurité financière c. Bouchard (CD00-1204, 30 août 2017);

d)            Chambre de la sécurité financière c. Ardouin (CD00-0864, 14 février 2012);

e)            Chambre de la sécurité financière c. Demers (CD00-0929, 16 janvier 2013);

f)             Chambre de la sécurité financière c. Mongrain (CD00-1124, 9 mai 2016);

g)            Chambre de la sécurité financière c. Charbonneau-Desjardins (CD00-1186, 26 janvier 2017);

h)            Langlois c. Dentistes (Ordre professionnel des) (Tribunal des professions, #755-07-000010-110, 17 avril 2012);

i)             R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43;

j)              Comptables professionnels agréés (Ordre des) c. Lafontaine (47-16-00212, 5 mai 2017).

LA SANCTION

[14]        Le Comité adopte la recommandation commune pour les raisons suivantes :

a)            L'intimé a enregistré un plaidoyer de culpabilité et il a collaboré à l'enquête de la syndique;

b)            Il n'a pas agi de mauvaise foi, il n'a tiré aucun gain personnel et n'a pas causé de préjudice financier à ses clients;

c)            L'amende imposée à Mme Lise Bouchard pour la même infraction était de 5 000 $ et celle qui devrait être imposée à l'intimé devrait être proportionnelle, tout en tenant compte de ses antécédents disciplinaires;

d)            Néanmoins, il s'agit d'une infraction objectivement sérieuse qui va au cœur de l'exercice de la profession, qui est de nature à discréditer celle-ci;

e)            La suggestion des parties apparaît conforme aux précédents jurisprudentiels généralement applicables, y compris les causes ci-haut citées, ainsi que le principe de déférence que la jurisprudence nous enseigne.

[15]       Considérant ce qui précède, après révision des éléments tant objectifs que subjectifs, atténuants qu'aggravants qui lui ont été présentés, le Comité est d'avis que l'imposition d'une amende de 7 500 $ constituerait une sanction juste et appropriée, adaptée à la nature de l'infraction, conforme aux précédents jurisprudentiels applicables, ainsi que respectueuse des principes d'exemplarité et de dissuasion dont il ne peut faire abstraction.

[16]       Cependant, le Comité tient à rappeler à l'intimé que son historique d'antécédents disciplinaires pourra jouer un rôle plus important en cas d'une infraction future de sa part.

[17]       En conséquence, le Comité condamnera l'intimé à une amende de 7 500 $.

[18]       Quant aux débours, aucun motif ne lui ayant été soumis qui lui permettrait de passer outre à la règle habituelle voulant que les débours nécessaires à la condamnation du représentant fautif lui soient généralement imputés, le Comité condamnera l'intimé au paiement des débours en vertu de l'article 151 du Code des professions.

PAR CES MOTIFS, le Comité de discipline :

RÉITÈRE l'Ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non-diffusion du nom et du prénom de tout consommateur concerné par cette cause ainsi que de toute information permettant de les identifier;

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l'intimé sous l’unique chef d’accusation contenu à la plainte;

DÉCLARE l'intimé coupable sous l’unique chef d'accusation contenu à la plainte pour avoir contrevenu à l'article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et ordonne l'arrêt conditionnel des procédures à l'égard des articles 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

ET, PROCÉDANT SUR SANCTION, :

CONDAMNE l'intimé à une amende de 7 500 $;

CONDAMNE l'intimé au paiement des débours, y compris les frais d'enregistrement, conformément aux dispositions de l'article 151 du Code des professions.

 

 


 

 

(S) George R. Hendy

___________________________________________

Me George R. Hendy

Président du comité de discipline

 

 

 

(S) Robert Chamberland

___________________________________________

M. Robert Chamberland, A.V.A.

Membre du comité de discipline

 

 

 

(S) Robert Benson 

___________________________________________

M. Robert Benson, Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

Me Alain Galarneau

POULIOT, CARON, PRÉVOST, BÉLISLE, GALARNEAU

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Serge Létourneau 

LÉTOURNEAU GAGNÉ, AVOCATS S.E.N.C.R.L.

Procureurs de la partie intimée

 

 

Date d’audience :

25 juillet 2018

 

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ

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