Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE
CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-1278

 

DATE :

 28 mars 2018

 

 

LE COMITÉ :

Me George R. Hendy

Président

Mme Monique Puech

Membre

M. Louis-Georges Boily, Pl. Fin.

Membre

 

 

LYSANE TOUGAS, ès qualités de syndique adjointe de la Chambre de la sécurité financière

 

Partie plaignante

 

c.

 

ROCH RIVARD (certificat numéro 128949, BDNI 1713741)

 

Partie intimée

 

 

                                  DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

 

 

CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ A PRONONCÉ L'ORDONNANCE SUIVANTE :

Ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non-diffusion des noms et prénoms des clients dont les initiales sont mentionnées aux neuf Chefs d'accusation, concernés ainsi que des renseignements permettant de les identifier.

[1]          Le 19 février 2018, le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le « Comité ») s'est réuni aux bureaux de la Chambre de la sécurité financière, sis au 2000, avenue McGill College, 12e étage, à Montréal, et a procédé à l'audition d'une plainte disciplinaire contre l'intimé ainsi libellée :

 

LA PLAINTE  AMENDÉE

1.            Dans la province de Québec, le ou vers le 13 juin 2006, alors qu’il agissait comme coliquidateur de la succession d’A.R., l’intimé n’a pas agi en conseiller consciencieux en faisant souscrire à I.A., en sa qualité de tutrice à M.R., la rente certaine numéro […] pour une prime totale d’environ 56 644 $ provenant d’un legs à titre particulier d’A.R. à M.R., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2), 12, 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D-9.2, r.3);

2.            Dans la province de Québec, le ou vers le 10 juillet 2006, alors qu’il agissait comme coliquidateur de la succession d’A.R., l’intimé n’a pas agi en conseiller consciencieux en faisant souscrire à I.A., en sa qualité de tutrice à M.R., la rente certaine numéro […] pour une prime totale d’environ 212 200 $ provenant d’un legs à titre particulier d’A.R. à M.R., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 12, 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3);

3.            Dans la province de Québec, le ou vers le 3 juillet 2009, l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en empruntant une somme d’environ 40 000 $ de son client G.B., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3), 2, 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (RLRQ, c. D-9.2, r.7.1);

4.            Dans la province de Québec, en ou vers 2012, l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en empruntant une somme d’environ 15 000 $ de son client D.D., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3);

5.            Dans la province de Québec, le ou vers le 5 décembre 2012, l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en empruntant une somme d’environ 35 000 $ de son client F.F., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3);

6.            Dans la province de Québec, le ou vers le 30 janvier 2013, l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en empruntant une somme d’environ 40 000 $ de son client F.F., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3);

7.            Dans la province de Québec, le ou vers le 6 juin 2013, l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en empruntant une somme d’environ 15 000 $ de son client F.F., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3);

8.            Dans la province de Québec, le ou vers le 15 août 2013, l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en empruntant une somme d’environ 10 000 $ de son client F.F., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3);

9.            Dans la province de Québec, le ou vers le 4 mars 2015, l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en empruntant une somme d’environ 13 630 $ de son client F.F., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3).

 

PLAIDOYER DE CULPABILITÉ

[2]          L'intimé était représenté par avocat (Me Pascale Desrosiers), laquelle a déposé un plaidoyer de culpabilité signé devant elle par l'intimé à l'égard des neuf Chefs d'accusation contenus à la plainte.

[3]          L'intimé ne s'est pas présenté à l'audition à cause de raison médicale, selon son procureur, qui a déposé une lettre en date du 20 février 2018 du Centre Médical AMCM, à Cowansville qui affirme succinctement que « L’état de santé de M. Rivard ne permet pas de témoignage à la Cour. »

[4]          Le Comité a pris acte du plaidoyer de culpabilité et a déclaré l’intimé coupable des neuf Chefs d’accusation ci-haut énoncés.

[5]          Après l'enregistrement dudit plaidoyer, les parties présentèrent au Comité leur preuve et firent leurs représentations sur sanction.

 

PREUVE DE LA PLAIGNANTE

[6]          Me Mathieu Cardinal, le procureur de la plaignante, a révisé en détail la preuve documentaire concernant les neuf Chefs d'accusation, qui consiste en 24 pièces.

Chefs d'accusation numéros 1 et 2

[7]          L'attestation de droit de pratique de l'intimé (P-10) démontre qu'il œuvre comme représentant dans le domaine des assurances depuis au moins 1991 et dans le domaine du courtage en épargne collective depuis février 2000. À l'époque des faits pertinents, l'intimé agissait comme représentant pour Industrielle Alliance.

[8]          Un de ses clients (A.R.), qui est décédé le 16 avril 2006 (P-3, page 000942) a nommé sa sœur (M.R.) et l'intimé coliquidateurs de sa succession en vertu de l'article VII de son testament (P-3, pages 000872 et 000874).

[9]          L'intimé a accepté cette désignation et a agi comme coliquidateur malgré le fait qu'il a par la suite agi comme représentant pour la vente de produits d'assurances à la succession.

[10]       En vertu de l'article IV(E)  du testament (P-3, page 000873), A.R. a fait un legs particulier à sa fille mineure (M.R.), née le 31 octobre 1990,  de (i) son fonds de pension géré par la C.C.Q., (ii) tous ses dépôts à terme auprès d'institutions financières et (iii) tous ses régimes enregistrés d'épargne-retraite (REER) et, en vertu de l'article XVI du testament (P-3, page 000876), A.R. a confié aux coliquidateurs l'administration des biens légués à ses légataires mineurs, avec instructions de leur remettre le capital en trois versements égaux, à l'âge de 18, 21 et 25 ans.

[11]       Or, au lieu de gérer les actifs de la fille mineure (M.R.) suivant les dispositions ci-haut citées du testament, l'intimé a plutôt choisi d'effectivement céder le contrôle des sommes représentants les legs à M.R. en faisant souscrire, en juin et juillet 2006, à la mère-tutrice de M.R. (I.A.), deux contrats de rente avec Industrielle Alliance, dont les primes uniques étaient de 56 644,15 $ et 212 000 $, tel qu'il appert des pièces P-4 et
P-5.

[12]       Ensuite, les versements mensuels provenant de ces deux rentes (1 564,85 $/mois pour trois ans et 3 692,32 $/mois pour cinq ans) ont été utilisés pour investir dans une rente différée à primes flexibles auprès de Industrielle Alliance (fonds distinct), ouverte en date du 24 août 2006, dont l'intimé a agi comme représentant, tel qu'il appert de la pièce P-6. Le crédit rentier en vertu du contrat était M.R. (la fille mineure) et le contractant en vertu de ce contrat était I.A. (sa mère-tutrice). La pièce P-7 contient les détails du transfert des rentes mensuelles ci-haut décrites à ce fonds distinct. (P-8, page 000390).

[13]       À partir du 3 mars 2007, il y a eu des rachats graduels de ce fonds distinct, tel qu'il appert des formulaires produits sous la cote P-7, lesquels ont tous été signés par l'intimé comme témoin.

[14]       Tel qu'il appert de la pièce P-9, la plupart des retraits ont été déposés dans un compte de banque au nom de M.R., mais une somme totale d'environ 36 000 $ a été déposée au compte de la mère (I.A.).

[15]       Le résultat indéniable de ces trois contrats (P-4, P-5 et P-6) et transactions (P-7, P-8 et P-9) est que l'intimé a contrevenu à ses obligations comme coliquidateur en facilitant le transfert immédiat de fonds qu'il devait gérer jusqu'au 25e anniversaire de M.R. (en octobre 2015) à un fonds distinct ouvert par la mère (I.A.), qui a ensuite fait des retraits en sa faveur et celle de M.R.

Chef d'accusation numéro 3 

[16]       Ce chef d'accusation, comme ceux qui suivent, concerne un prêt personnel que l'intimé a fait d'un de ses clients (G.B.) pour la somme de 40 000 $ en date du 3 juillet 2009, tel que confirmé par le contrat de prêt (P-13) et l'état de compte bancaire de l'intimé (P-14).

[17]       Lorsque l'intimé a fait cession de ses biens en date du 13 juillet 2016 (P-12, pages 000017 et seq.), il a déclaré toujours devoir la somme de 11 000 $ à G.B. (P-12, page 000041). Son employeur, Industrielle Alliance Groupe financier, a mis fin à son emploi par lettre datée du 22 juillet 2016 (P-12, page 000017), alors qu'une enquête était en cours suite à une plainte d'un client non-impliqué dans la présente cause, en alléguant ce qui suit:

« Il nous apparaît donc que vous avez choisi de faire faillite dans le but notamment d'éluder vos obligations financières à l'égard d'Industrielle Alliance à la suite du règlement d'une partie du dossier de ce client pour lequel des sommes importantes ont d'ailleurs dû être versées. »

Chef d'accusation numéro 4

[18]       Il s'agit ici d'un prêt personnel que l'intimé a fait d'un autre client, D.D., pour la somme de 15 000 $, tel que confirmé par la reconnaissance de dette signée par l'intimé en date du 17 avril 2012 (P-15, page 00049) et du relevé de compte de banque de l'intimé (P-16).

[19]       Selon la déclaration de l'intimé au moment de sa cession de biens en faillite (P-12, page 00041), il devait la somme de 19 600 $ à D.D.

Chefs d'accusation numéros 5 à 9

[20]       Il s'agit ici d'une série de prêts personnels fait auprès d’un même client (F.F.) par l'intimé.

[21]       Le premier est un prêt de 35 000 $ fait en date du 5 décembre 2012 (Chef d'accusation numéro 5), lequel est corroboré par une copie du chèque payable à l'ordre de l'intimé et encaissé par lui dans son compte (P-17). Ce prêt a été financé par un retrait d'un compte non-enregistré de F.F. (P-17, page 000490), lequel comportait des frais de 2 105,26 $.

[22]       Le deuxième prêt (Chef d'accusation numéro 6), fait en date du 30 janvier 2013, était pour la somme de 40 000 $ et financé par un rachat total du même fonds non-enregistré, avec des frais de 2 478,97 $, le tout étant corroboré par le chèque et autres documents produits sous la cote P-18. 

[23]       Le troisième prêt (Chef d'accusation numéro 7), fait en date du 6 juin 2013, était pour la somme de 15 000 $, financé partiellement par un retrait du compte REÉR de F.F., qui a encouru des frais et impôts pour ce retrait (P-19).

[24]       Le quatrième prêt (Chef d'accusation numéro 8), fait en date du 15 août 2013, était pour la somme de 10 000 $, financé à nouveau par un retrait du compte REÉR de F.F., avec les frais et impôts afférents (P-20).

[25]       Le dernier prêt (Chef d'accusation numéro 9), fait en date du 4 mars 2015, était pour la somme de 13 630 $, également financé par un retrait du compte REÉR de F.F., avec les frais et impôts habituels (P-21).

[26]       Le Comité a permis à la plaignante d'amender le montant cité au Chef d'accusation numéro 9 de 13 360 $ à 13 630 $ pour corriger une faute de frappe évidente.

[27]       Le total de ces prêts de F.F. à l'intimé s'élève à 113 630 $, mais l'intimé a reconnu devoir la somme de 115 000 $ à F.F. en date du 30 mars 2015 (P-22). Au moment de sa cession de biens, l'intimé a reconnu devoir un solde de 109 045 $ à F.F. (P-12, page 00041).

[28]       Les pièces P-23 (journal des opérations de la Caisse Desjardins concernant le compte de F.F.) et P-24 (Sommaire des transactions pertinentes dans le compte bancaire de l'intimé) corroborent les transferts de fonds concernant les cinq prêts ci-haut décrits entre les parties.

 

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[29]       La plaignante, par l'entremise de son procureur, a fait les recommandations suivantes sur la sanction à imposer à l'intimé:

a)            pour les Chefs d'accusation numéros 1 et 2, radiation temporaire de six mois (à purger de façon concurrente), pour avoir contrevenu à l'article
12 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (le « Code »), avec arrêt conditionnel des procédures à l'égard de l'article
16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (« LDPSF ») et des articles 18, 19 et 20 du Code;

b)            pour les Chefs d'accusation numéros 3 à 9, radiation temporaire de cinq ans (à purger de façon concurrente), pour avoir contrevenu à l'article 18 du Code, avec arrêt conditionnel des procédures à l'égard de l’article
16 de la LDPSF et des articles 19 et 20 du Code.

c)            publication d'un avis de cette décision dans un journal circulant dans le lieu où l'intimé à son domicile, avec ordonnance que l'intimé soit tenu au paiement des frais de publication, le tout suivant l'article 156 du Code des professions.

[30]       Comme facteurs aggravants, Me Cardinal réfère à l'expérience de l'intimé, le fait qu'il aurait dû savoir que sa conduite était inacceptable, le préjudice subi par les prêteurs, la répétition des gestes, la faillite personnelle de l'intimé, le fait qu'un des clients (F.F.) s'est servi de son REÉR pour financer trois des prêts personnels, avec le paiement des frais et impôts que ce genre de retrait implique, et l'abus de confiance.

[31]       Comme facteur atténuant, il réfère au plaidoyer de culpabilité de l’intimé et à l'absence d'antécédents disciplinaires.

[32]       De plus, Me Cardinal a cité la jurisprudence suivante comme précédents similaires à cette cause :

 Chefs d'accusation numéros 1 et 2

a)            Chambre de la sécurité financière c. Gilbert (CD00-0875, 14 novembre 2013)

Après que l'intimé (qui n'avait pas d'antécédents disciplinaires) fut trouvé coupable de s'être placé dans une situation de conflit d'intérêts en agissant à titre de représentant en épargne collective d'une succession dont il était un coliquidateur, en témoignant qu'il était conscient des fautes qu'il a commises et en affirmant qu'il ne récidiverait pas, le comité a imposé une radiation temporaire d'un an.

Ledit comité a également imposé une radiation temporaire de cinq ans pour avoir emprunté un total d'environ 11 500 $ de ladite succession, qui a été remboursé intégralement par l'intimé (en partie avant que la syndique n'intervienne auprès de lui).

b)            Chambre de la sécurité financière c. Balayer (CD00-0674, 4 juin 2008)

L'intimé a plaidé coupable à des accusations d'avoir (i) fait défaut d'investir une somme de 659 999,99 FRF suivant les instructions de sa cliente (mère de deux enfants mineurs pour lesquels elle souhaitait créer une fiducie de placement) et (ii) fait défaut de s'acquitter de son mandat en inscrivant la mère comme propriétaire et ses enfants comme bénéficiaires d'un compte de placement aux Bahamas. Le comité a imposé une radiation temporaire d'un an pour chacun des deux chefs d'accusation, à purger de façon concurrente, après le dépôt d'un plaidoyer de culpabilité par l'intimé, qui a exprimé ses sincères regrets pour ses gestes.

Chefs d'accusation numéros 3 à 9

c)            Chambre de la sécurité financière c. Malenfant (CD00-1121, 10 juin 2015)

L'intimé a enregistré un plaidoyer de culpabilité d'avoir, entres autres, fait trois emprunts d'un client pour une somme totale de 40 000 $, qui n'était pas remboursée en capital au moment où l'intimé a fait cession de ses biens. Le comité a imposé une radiation temporaire de cinq ans pour chacun de ces prêts, à être purgée de façon concurrente. L'intimé a aussi écopé d’une radiation permanente pour s'être approprié une somme de 95 000 $ qui lui avait été confiée aux fins d'investissements.

d)            Chambre de la sécurité financière c. St-Jean (CD00-1020, 12 mai 2014)

L'intimé faisait face à six chefs d'accusation pour un nombre égal d'emprunts de la même cliente pour une somme cumulative de 18 500 $ et ne lui a remboursé qu'environ 5 925 $. Le comité l'a déclaré coupable sous chacun des chefs d’accusation en vertu de l'article 16 de la LDPSF. Le comité a imposé une radiation de cinq ans pour chaque chef d'accusation, à être purgée de façon concurrente.

e)            Chambre de la sécurité financière c. Marapin (CD00-0992, 17 juillet 2014)

L'intimé, qui avait 65 ans, a plaidé coupable d'avoir fait trois emprunts de ses clients totalisant 65 000 $, dont 63 000 $ demeuraient impayés au moment de l'audition. Malgré la conclusion du comité que l'intimé n'ait pas été animé d'intentions malicieuses, malveillantes ou malhonnêtes, le fait que l'intimé n'avait pas d'antécédents disciplinaires et le fait qu'il a exprimé ses regrets et un désir de rembourser ses clients, le comité l'a condamné à une radiation temporaire de dix ans sous chacun des trois chefs d'accusation, à être purgée de façon concurrente.

f)             Chambre de la sécurité financière c. Langlais (CD00-1193, 11 juillet 2017)

L'intimé, qui avait 56 ans et n'avait pas d'antécédents disciplinaires, a été accusé d'avoir fait quatre emprunts (soit personnellement ou par l'entremise de sa compagnie) de ses clients totalisant 390 000 $, lesquels n'étaient pas remboursés au moment de l'audition. Le comité, convaincu que l'intimé n'était pas animé d'intentions malveillantes et qu'il regrettait sincèrement ses gestes, l'a condamné à une radiation temporaire de cinq ans sous chaque chef, à être purgée de façon concurrente.

 

REPRÉSENTATIONS DE L'INTIMÉ

[33]       Me Pascale Desrosiers, la procureure de l'intimé, a informé le Comité que l'intimé a 70 ans, qu'il a des problèmes de santé, ne pratique plus sa profession, gagne des revenus annuels de 15 000 $ et n'a pas l'intention de reprendre la pratique de représentant. 

[34]       Elle prétend qu'il n'y a pas de risque de récidive à cause du fait que l'intimé aura 75 ans à l'expiration d'une radiation temporaire de cinq ans et parce qu'il n'a pas l'intention de redevenir représentant.

[35]       Elle prétend qu'il n'y a pas de preuve d'intention malveillante, car chacun des prêts a été conclu avec une entente écrite.

[36]       Au début de l'audition, Me Desrosiers a attiré l'attention du Comité au quatrième alinéa de l'article 151 du Code des professions, car elle ne voulait pas que son client soit obligé à payer les frais « d'expertise acceptée en preuve », car son plaidoyer de culpabilité avait pour effet d'éviter le dépôt d'une telle expertise.

[37]       Malheureusement, le Comité n'a pas entendu d'expression de remords de la part de l'intimé pour sa conduite ou le tort qu'il a infligé à ses clients, mais il est rassuré par son expression d'intention de ne pas redevenir représentant après l'expiration d'une radiation temporaire de cinq ans.

 

ANALYSE ET MOTIFS

[38]       Dans un premier temps, le Comité se demande pourquoi l'intimé n'a pas été accusé d'appropriation de sommes appartenant à ses clients, considérant le montant important de prêts non-remboursés suite à sa faillite. Les explications de la plaignante n'ont pas éclairé le Comité à ce sujet. 

[39]       Ceci étant dit, le Comité suivra les enseignements de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Anthony-Cook c. R., [2016] 2 R.C.S. 204, qui recommande une déférence aux recommandations conjointes des parties dans une cause comme celle-ci.

[40]       Considérant les représentations des parties, après révision des éléments, tant objectifs que subjectifs, atténuants qu'aggravants, qui lui ont été présentés, le Comité est d'avis de suivre les recommandations communes des parties, et il condamnera donc l'intimé aux sanctions qui sont énoncées au paragraphe 28 ci-haut.

[41]       Quant aux déboursés, aucun motif ne lui ayant été soumis qui lui permettrait de passer outre à la règle habituelle voulant que les déboursés nécessaires à la condamnation du représentant fautif lui soient généralement imputés, le Comité condamnera l'intimé au paiement des déboursés, en précisant qu'il n'y a pas eu d'expertise acceptée en preuve devant le Comité et donc aucuns frais à cet égard.

 

PAR CES MOTIFS, le Comité de discipline :

PREND ACTE à nouveau du plaidoyer de culpabilité enregistré par l'intimé sous les neuf Chefs d'accusation contenus à la plainte;

RÉITÈRE la déclaration de culpabilité de l’intimé prononcée à l’audience relativement aux Chefs d'accusation numéros 1 et 2 contenus à la plainte, pour avoir contrevenu à l’article 12 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

ORDONNE l'arrêt conditionnel des procédures concernant les Chefs d'accusation numéros 1 et 2, à l'égard de l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et des articles 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

RÉITÈRE la déclaration de culpabilité de l’intimé prononcée à l’audience relativement aux Chefs d'accusation numéros 3 à 9 contenus à la plainte, pour avoir contrevenu à l’article 18 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière;

ORDONNE l'arrêt conditionnel des procédures concernant les Chefs d'accusation 3 à 9 à l'égard de l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et des articles 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière.

 

ET, STATUANT SUR LA SANCTION :

ORDONNE pour chacun des Chefs d'accusation numéros 1 et 2 la radiation temporaire de l'intimé pour une période de six mois, à purger de façon concurrente;

ORDONNE pour chacun des Chefs d'accusation numéros 3 à 9 la radiation temporaire de l'intimé pour une période de cinq ans, à purger de façon concurrente;

ORDONNE à la secrétaire du Comité de discipline de faire publier aux frais de l'intimé un avis de la présente décision dans un journal circulant dans le lieu où l'intimé a ou avait son domicile professionnel ou dans tout autre lieu où il exerce ou a exercé sa profession, suivant l'article 156 du Code des professions;

CONDAMNE l'intimé au paiement des déboursés, y compris les frais d'enregistrement, mais à l'exclusion des frais d'expertise, conformément aux dispositions de l'article 151 du Code des professions.

 

(S)  George R. Hendy

_____________________________________
Me George R. Hendy
Président du comité de discipline

 

(S) Monique Puech

_____________________________________
Mme Monique Puech
Membre du comité de discipline

 

 

(S) Louis-Georges Boily

_____________________________________
M. Louis-Georges Boily, Pl. Fin.
Membre du comité de discipline

Me Mathieu Cardinal
CDNP AVOCATS INC.
Procureurs de la partie plaignante

Me Pascale Desrosiers
BOULET DESROSIERS LAGUË AVOCATS
Procureurs de la partie intimée 

Date d'audience: Le 19 février 2018

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ

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