Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-1271

 

DATE :

16 juin 2018

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LE COMITÉ :

Me Janine Kean

Présidente

 

M. Christian Fortin

Membre

 

Mme Carine Monge, Pl. Fin.

Membre

 

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MARC-AURÈLE RACICOT, ès qualités de syndic adjoint de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

BRUNO CACCIA (certificat numéro 200209)

Partie intimée

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DÉCISION SUR SANCTION

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CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ RÉITÉRE L’ORDONNANCE PRONONCÉE DANS LA DÉCISION SUR CULPABILITÉ :

        Non-divulgation, non-diffusion et non-publication des noms et prénoms des consommateurs visés par la plainte, ainsi que des autres consommateurs mentionnés au cours de la preuve. Il en est de même de tout renseignement de nature personnelle et économique permettant de les identifier.

[1]          Le 22 mai 2018, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le comité) s'est réuni au siège social de la Chambre, sis au 2000, avenue McGill College, 12e étage, à Montréal, pour procéder à l'audition sur sanction.

[2]          La plaignante était représentée par Me Caroline Isabelle.

[3]          Quant à l’intimé, il était absent et non représenté.

[4]          La procureure de la plaignante a rappelé que, lors de l’appel conférence tenu pour fixer l’audition sur sanction, l’intimé avait déclaré qu’il ne serait pas présent. Par ailleurs, nonobstant cet avis de l’intimé, elle a tenté de le rejoindre à quelques reprises et lui a laissé un message l’informant des sanctions suggérées par la plaignante. Elle a essayé de nouveau le matin même de l’audience, mais sans succès.

[5]          Dans les circonstances, le comité a accueilli sa demande de procéder ex parte.  

[6]          Par la décision sur culpabilité rendue le 1er mars 2018, l’intimé a été déclaré coupable d’avoir fait à ses clients des déclarations fausses, incomplètes, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur (chef 1) et de ne pas avoir assuré le suivi du dossier de ses clients, créant un découvert d’assurance à ces derniers (chef 2).

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[7]           Après avoir indiqué ne pas avoir de preuve additionnelle à présenter sur sanction, la procureure de la plaignante a invoqué les facteurs aggravants et atténuants suivants :

Aggravants

a)     La gravité objective des infractions;

b)     Une conduite clairement prohibée de nature à ternir l’image de la profession;

c)      La malhonnêteté de l’intimé ressortant des faits entourant la commission des infractions.

Éprouvant des difficultés à atteindre les objectifs qu’il s’était fixés, l’intimé favorisait les transactions permettant d’augmenter ses commissions, comme en l’espèce. Il a fait souscrire à une assurance moyennant un terme de
20 ans plutôt qu’un de 10 ans, comme demandé par ses clients et, par la suite, il leur a fait signer un avenant relatif à un crédit invalidité alors que les clients n’en avaient pas besoin, en leur faisant croire qu’il s’agissait de la modification du terme de l’assurance;

d)     L’intimé utilisait la même façon de procéder à l’égard de ses différents clients;

e)     L’avantage tiré par l’intimé;

f)       Un possible risque de récidive, l’intimé ayant été silencieux sur ses intentions quant à un éventuel retour dans le domaine, bien qu’il soit inactif depuis le 29 mai 2014;

g)     L’absence de reconnaissance de ses fautes ou expression de remords;

h)      L’absence de collaboration de l’intimé à l’enquête, celui-ci ayant échangé une seule fois et brièvement avec le bureau de la plaignante, ne donnant pas suite aux autres appels aux fins d’obtenir sa version complète des faits;

i)       L’existence de plaintes portées auprès de son employeur par d’autres consommateurs concernant des imitations de signatures par l’intimé.  

Atténuants

a)     Le peu d’expérience de l’intimé au moment des événements, celui-ci ayant accumulé, à la suite d'une période d’invalidité, moins de deux ans de pratique.

[8]           La procureure de la plaignante a recommandé au comité d’ordonner, sous chacun des deux chefs d’accusation, la radiation temporaire de l’intimé pour une période de trois mois, à être purgée de façon concurrente.

[9]          De plus, elle a demandé la publication de l’avis de la décision et la condamnation de l’intimé au paiement des déboursés.

[10]       À l’appui de ses recommandations, en dépit d’une jurisprudence très abondante, elle a ciblé trois décisions portant sur des fausses informations fournies aux consommateurs et deux relatives au défaut de suivi du dossier client créant un découvert d’assurance, lesquelles lui ont semblé être les plus pertinentes pour la décision à rendre en l’espèce[1].

ANALYSE ET MOTIFS

[11]        L’intimé est un jeune représentant qui a obtenu un certificat en assurance de personnes en mai 2013.

[12]        Il est vite devenu dépassé par les événements et a éprouvé de la difficulté à atteindre ses objectifs. Ainsi, dès avril 2014, il commettait les infractions en l’espèce.

[13]        Il ressort de la preuve que l’intimé a agi avec malhonnêteté, en profitant de la confiance de ses clients pour les induire en erreur et leur faire signer un avenant de crédit d’invalidité plutôt que la modification du terme de 20 ans pour celui de 10 ans conformément à leur demande initiale, ces produits lui procurant des commissions supplémentaires. 

[14]        Le comité convient que les représentants peuvent subir une énorme pression pour répondre à des objectifs, mais cela ne peut justifier un tel comportement.

[15]        La probité et l’honnêteté sont des qualités essentielles que doit posséder tout représentant. 

[16]        Les actes commis par l’intimé portent gravement atteinte à l’image de la profession, affectant de façon importante le lien de confiance du public envers la profession.

[17]        Parmi les décisions fournies par la plaignante à l’appui de sa recommandation d’une radiation de trois mois sous le premier chef concernant les fausses représentations, le comité retient surtout l’affaire Charlebois. Ce dernier avait, comme en l’espèce, menti à ses clients leur représentant faussement que le document qu’il leur faisait signer rétablissait le paiement des primes sur une période de 10 ans plutôt que 20 ans. Charlebois possédait toutefois 38 ans d’expérience et aucun antécédent disciplinaire. Le comité, à la suite d’un débat contradictoire, a ordonné sa radiation pour une période de trois mois.

[18]        En ce qui concerne le deuxième chef relatif au défaut de procéder au suivi du dossier de ses clients, dans l’affaire Morteau, une radiation d’un mois a été ordonnée conformément aux recommandations communes des parties. Toutefois, il y avait absence d’intention malhonnête, l’intimé avait collaboré à l’enquête et avait exprimé des remords.

[19]        Dans l’affaire Simard, une radiation de six mois a été ordonnée pour avoir créé un découvert d’assurance donnant aussi suite aux recommandations communes des parties. Comme en l’espèce, les consommateurs avaient perdu leur couverture d’assurance. Toutefois, l’intimé avait des antécédents disciplinaires, dont une récidive, et de longues années d’expérience.

[20]        Le comité est d’avis que les sanctions recommandées par la plaignante se situent dans la fourchette des sanctions retenues pour des infractions de même nature. Considérant l’ensemble des faits de la présente affaire ainsi que les facteurs aggravants et atténuants mentionnés par la procureure de la plaignante, il estime que ses recommandations sont justes et appropriées.

[21]        Par conséquent, le comité ordonne la radiation temporaire de l’intimé, sous chacun des deux chefs d’accusation, pour une période de trois mois, à être purgée de façon concurrente.

[22]       Il ordonne également la publication d’un avis de la décision et la condamnation de l’intimé au paiement des déboursés.

 

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

RÉITÈRE ORDONNER la non-divulgation, non-diffusion et non-publication des noms et prénoms des consommateurs visés par la plainte, ainsi que des autres consommateurs mentionnés au cours de la preuve. Il en est de même de tout renseignement de nature personnelle et économique permettant de les identifier;

ORDONNE, sous chacun des chefs d’accusation 1 et 2, la radiation temporaire de l’intimé, et ce, pour une période de trois mois, à être purgée de façon concurrente;

ORDONNE à la secrétaire du comité de discipline de faire publier, aux frais de l’intimé, un avis de la présente décision dans un journal circulant dans le lieu où ce dernier a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément aux dispositions de l’alinéa 5 de l’article 156 du Code des professions (RLRQ, c. C-26);

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions (RLRQ, c. C-26).

 

(S) Janine Kean

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Me Janine Kean

Présidente du comité de discipline

 

(S) Christian Fortin

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M. Christian Fortin

Membre du comité de discipline

 

(S) Carine Monge

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Mme Carine Monge, Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

 

Me Caroline Isabelle

BÉLANGER LONGTIN s.e.n.c.r.l.

Procureurs de la partie plaignante

 

L’intimé était absent et non représenté.

 

Date d’audience :

Le 22 mai 2018

 

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1] Chef 1 : CSF c. Poukpa, CD00-1025, 2015 QCCDCSF 58; CSF c. Charlebois, CD00-1098, 2016 QCCDCSF 50; CSF c. Beckers, CD00-0862, décision sur culpabilité et sanction du 17 août 2012;

Chef 2 : CSF c. Morteau, CD00-1141, 2016 QCCDCSF 13; CSF c. Simard, CD00-1135, 2016 QCCDCSF 17.

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