Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Chambre de la sécurité financière c. Bernier

2016 QCCDCSF 1

 

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-1075

 

DATE :

5 janvier 2016

_____________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

M. Robert Chamberland, A.V.A.

Membre

M. Éric Bolduc

Membre

_____________________________________________________________________

 

LYSANE TOUGAS, es qualités de syndique adjointe de la Chambre de la sécurité financière;

Partie plaignante

c.

 

ALEXANDRE BERNIER, conseiller en sécurité financière (numéro de certificat 145621);

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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[1]           Le 15 septembre 2015, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s’est réuni à l’Hôtel Palace Royal de Québec, situé au 775, avenue Honoré-Mercier, Québec (Québec), salle Fontainebleau, et a procédé à l'audition d'une plainte disciplinaire portée contre l'intimé ainsi libellée :

LA PLAINTE

« 1.      À Québec, le ou vers le 22 août 2008, l’intimé a fait défaut de procéder à une analyse complète et conforme des besoins financiers de C.C. alors qu’il lui faisait souscrire la police [...], contrevenant ainsi aux articles 16, 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2) et 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, chapitre D-9.2, r.10) ;

 

2.          À Québec, le ou vers le 15 avril 2009, l’intimé a fait défaut de procéder à une analyse complète et conforme des besoins financiers de C.C. alors qu’il lui faisait souscrire la police [...], contrevenant ainsi aux articles 16, 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2), 6 et 22 (1) du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, chapitre D-9.2, r.10). »

PLAIDOYER DE CULPABILITÉ

[2]           D’entrée de jeu l’intimé qui se représentait lui-même enregistra un plaidoyer de culpabilité à l’égard de chacun des deux (2) chefs d’accusation contenus à la plainte.

[3]           La plaignante par l’entremise de sa procureure versa ensuite au dossier une preuve documentaire qui fut cotée P-1 à P‑6.

[4]           Puis à l’aide de celle-ci, elle résuma les principaux éléments de faits ainsi que les circonstances entourant les infractions.

[5]           Quant à l’intimé il se contenta d’apporter quelques précisions aux propos tenus par la procureure de la plaignante.

[6]           Par la suite le comité, après avoir révisé la preuve qui venait de lui être présentée et considérant le plaidoyer de culpabilité enregistré par l’intimé, déclara ce dernier coupable de chacun des deux (2) chefs d’accusation contenus à la plainte.

[7]           Les parties soumirent ensuite au comité leurs preuve et représentations sur sanction.

PREUVE DES PARTIES

[8]           Tant la plaignante que l’intimé déclarèrent alors n’avoir aucune preuve additionnelle à offrir.

[9]           Elles exposèrent ensuite au comité leurs représentations respectives.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[10]        La plaignante, par l’entremise de sa procureure, débuta en mentionnant au comité qu’elle-même et l’intimé avaient convenu de lui présenter, sur sanction, « des recommandations communes ».

[11]        Ainsi elle indiqua que les parties s’étaient entendues pour lui proposer l’imposition des sanctions suivantes :

Sous le chef 1 : la condamnation de l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $;

Sous le chef 2 : l’imposition d’une réprimande.

[12]        Elle ajouta qu’elles avaient également convenu que ce dernier soit condamné au paiement des déboursés.

[13]        Elle souligna ensuite les facteurs atténuants et aggravants suivants :

Facteurs atténuants

-       l’absence d’antécédents disciplinaires de l’intimé;

-       l’enregistrement par ce dernier d’un plaidoyer de culpabilité à l’égard de chacun des deux (2) chefs d’accusation contenus à la plainte;

-       un cas isolé, les deux (2) fautes reprochées à la plainte faisant partie du « même continuum » et étant rattachées à la recherche d’une seule et même couverture d’assurance;

-       l’absence d’intérêt pécuniaire poursuivi par l’intimé;

-       l’absence de préméditation de la part de ce dernier;

-       un risque de récidive à son avis très faible, sinon absent;

Facteurs aggravants

-       la gravité objective des infractions commises, le comité ayant déclaré à plusieurs reprises que l’analyse des besoins du client (ABF) était un exercice préalable indispensable à l’émission de tout contrat d’assurance de personnes, la pierre d’assise fondamentale sur laquelle devaient s’appuyer les recommandations du représentant;

-       l’expérience de l’intimé qui aurait dû le mettre à l’abri de commettre les fautes qui lui sont reprochées.

[14]        Elle termina en déposant au soutien de ses recommandations un cahier d’autorités comportant quatre (4) décisions antérieures du comité[1].

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

[15]        Quant à l’intimé, il se contenta de rappeler que les suggestions mises de l’avant par la plaignante étaient des « suggestions communes » et confirma alors son accord auxdites suggestions.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[16]        L’intimé a enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’égard de chacun des deux (2) chefs d’accusation contenus à la plainte.

[17]        Il n’a fait l’objet d’aucune condamnation disciplinaire antérieure.

[18]        Les fautes qui lui sont reprochées constituent un cas isolé à l’égard d’un seul consommateur et sont relatives généralement à la même protection d’assurance.

[19]        Relativement au premier chef d’accusation, bien qu’il ait procédé à une analyse des besoins du client (ABF) avant la souscription de la police, celle-ci s’est avérée incomplète et non conforme. À titre d’exemple, alors que le client détenait une assurance-invalidité, ce renseignement n’y apparaît pas. Des informations relatives à certains actifs de l’entreprise de service détenue par le client n’y apparaissent pas non plus.

[20]        Relativement au second chef, l’intimé a agi dans ce qu’il croyait être l’intérêt du client.

[21]        Ce dernier avait présenté à l’assureur un chèque sans provision (NSF) dans le but d’acquitter les frais de la police qu’il détenait, et comme conséquence ladite police était tombée en déchéance.

[22]        Ledit client ne voulait cependant pas en acquitter les arrérages dus. De façon à ce qu’il ne se retrouve pas sans couverture et pour éviter qu’il ait à les payer, l’intimé a procédé à la souscription et l’émission d’une nouvelle police mais sans préalablement exécuter d’ABF ou une ABF complète et conforme.

[23]        Relativement aux sanctions qui doivent lui être imposées, les parties ont soumis au comité ce qu’il est convenu d’appeler des « recommandations communes ».

[24]        Or dans l’arrêt Douglas[2], la Cour d’appel du Québec a clairement indiqué la marche à suivre lorsque les parties en viennent à s’entendre pour présenter au tribunal de telles recommandations.

[25]        Elle y a clairement indiqué que celles-ci ne devraient être écartées que si le tribunal les juge inappropriées, déraisonnables, contraires à l’intérêt public ou est d’avis qu’elles sont de nature à discréditer l’administration de la justice.

[26]        En l’espèce, après étude et examen attentif du dossier, le comité est d’avis que les recommandations conjointes des parties sont plutôt justes et appropriées.

[27]        Elles lui apparaissent en effet conformes aux décisions rendues antérieurement par le comité dans des dossiers de même nature.

[28]        De l’avis du comité, les sanctions suggérées respectent les antécédents jurisprudentiels, tiennent adéquatement compte de la gravité objective des infractions commises, de l’ensemble des facteurs atténuants et aggravants ainsi que des impératifs de dissuasion et d’exemplarité dont il ne peut être fait abstraction.

[29]        Le comité donnera donc suite aux suggestions des parties.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé à l’égard de chacun des deux (2) chefs d’accusation mentionnés à la plainte;

RÉITÈRE la déclaration de culpabilité prononcée à l’endroit de l’intimé lors de l’audition, et ce, relativement aux deux (2) chefs d’accusation contenus à la plainte;

ET PROCÉDANT SUR SANCTION :

Sous le chef d’accusation numéro 1 :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $;

Sous le chef d’accusation numéro 2 :

ÉMET une réprimande à l’endroit de l’intimé;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, RLRQ, chapitre C-26.

 

 

 

(s) François Folot___________________

Me FRANÇOIS FOLOT

Président du comité de discipline

 

(s) Robert Chamberland_______________

M. ROBERT CHAMBERLAND, A.V.A.

Membre du comité de discipline

 

(s) Éric Bolduc_______________________

M. ÉRIC BOLDUC

Membre du comité de discipline

 

 

Me Jeanine Guindi

THERRIEN COUTURE

Procureurs de la partie plaignante

 

L’intimé se représente lui-même

 

Date d’audience :

15 septembre 2015

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ

A1010



[1]     Champagne c. Bélisle, CD00-0965, décision sur culpabilité et sanction en date du 28 juillet 2014; Champagne c. Rozenek, CD00-1031, décision sur culpabilité et sanction en date du
16 décembre 2014; Champagne c. Vézina, CD00-1046, décision sur culpabilité et sanction en date du 29 avril 2015; Champagne c. St-Onge, CD00-1053, décision sur culpabilité et sanction en date du 10 juin 2015.

[2]     R. c. Douglas, 2002, 162 CCC 3rd (37).

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