Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

Chambre de la sécurité financière c. Simard

2016 QCCDCSF 17

 

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-1135

 

DATE :

13 mai 2016

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Janine Kean

Présidente

 

M. Benoit Bergeron, A.V.A., Pl. Fin.

Membre

 

M. Stéphane Prévost, A.V.C.

Membre

 

______________________________________________________________________

 

CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

JOCELYN SIMARD, conseiller en sécurité financière (numéro de certificat 130957, BDNI 1765211)

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

 

CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ A PRONONCÉ L’ORDONNANCE SUIVANTE :

 

Non-divulgation, non-diffusion et non-publication du nom des consommateurs visés par la plainte, ainsi que de toute information de nature personnelle et financière permettant de les identifier.

 

[1]          Le 1er avril 2016, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le comité) s'est réuni au siège social de la Chambre, sis au 300, rue Léo-Pariseau,
26e étage, à Montréal, pour procéder à l'audition de la plainte disciplinaire suivante portée contre l'intimé le 19 juin 2015.

[2]          La plaignante était représentée par Me Julie Piché. L’intimé était présent à l’audience et se représentait seul.

LA PLAINTE

 

A.L. et L.R.L.

1.         À Senneterre, le ou vers le 15 décembre 2002, l’intimé n’a pas recueilli tous les renseignements ni procédé à une analyse complète et conforme des besoins financiers de A.L. et L.R.L., alors qu’il leur faisait souscrire la proposition [...] pour le contrat d’assurance vie temporaire [...] d’un capital assuré de 100 000 $, contrevenant ainsi aux articles 16, 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 6, 22(1) du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r.10);

2.         À Senneterre, le ou vers le 19 février 2005, l’intimé a fait souscrire à son client A.L. un prêt investissement de 50 000 $ qui ne correspondait pas à son profil d’investisseur et à sa situation financière, contrevenant ainsi aux articles 16, 51 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 12, 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D.9.2, r.3), 4 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (c. D-9.2, 1.1.2);

3.         À Senneterre, le ou vers le 20 novembre 2005, l’intimé n’a pas recueilli tous les renseignements ni procédé à une analyse complète et conforme des besoins financiers de A.L. et L.R.L., alors qu’il leur faisait souscrire la proposition [...] pour le contrat d’assurance vie temporaire [...] d’un capital assuré de 100 000 $, contrevenant ainsi aux articles 16, 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 6 et 22(1) du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r.10);

4.         À Senneterre, le ou vers le 11 décembre 2005, l’intimé a fait défaut de connaître la situation financière et personnelle ainsi que les objectifs de placement de A.L. lors de la souscription d’un prêt investissement de 100 000 $ et du placement de cette somme dans le Fonds IA Clarington – canadien de dividendes, contrevenant ainsi aux articles 16 et 51 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 3, 4 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (c. D-9.2, r.7.1), 12 et 15 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

5.         À Senneterre,  le ou vers le 11 décembre 2005, l’intimé n’a pas fourni à son client A.L. l’information pertinente, objective et complète à l’appréciation et à la compréhension d’un prêt investissement de 100 000 $ et d’un placement de 100 000 $ dans le Fonds IA Clarington – canadien de dividendes qu’il lui a conseillé de souscrire, contrevenant ainsi aux articles 16, 51 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 12, 13, 14, 16, 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3), 7, 10 et 19 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (c. D-9.2, 1.1.2);

6.         À Senneterre, le ou vers le 11 décembre 2005, l’intimé a fait souscrire à son client A.L. un prêt investissement de 100 000 $ qui ne correspondait pas à son profil d’investisseur et à sa situation financière, contrevenant ainsi aux articles 16, 51 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 12, 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D.9.2, r.3), 4 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (c. D-9.2, 1.1.2);

7.         À Senneterre, le ou vers le 11 décembre 2005, l’intimé a fait investir son client A.L. l’entièreté du 100 000 $ provenant d’un prêt investissement dans le Fonds IA Clarington – canadien de dividendes, ce qui ne correspondait pas à son profil d’investisseur, contrevenant ainsi aux articles 16, 51 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 12, 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière  (c. D-9.2, r.3), 4 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (c. D-9.2, 1.1.2);

8.         À Senneterre, le ou vers le 19 mai 2009, l’intimé n’a pas recueilli tous les renseignements ni procédé à une analyse complète et conforme des besoins financiers de A.L. et L.R.L., alors qu’il leur faisait souscrire la proposition [...] pour la transformation d’un contrat d’assurance vie universelle d’un capital assuré de 100 000 $, contrevenant ainsi aux articles 16, 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 6 et 22(1) du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r.10);

9.         À Senneterre, le ou vers le 19 mai 2009, l’intimé n’a pas subordonné son intérêt personnel à celui de A.L. et L.R.L. en leur faisant souscrire la proposition [...] pour un contrat d’assurance vie universelle d’un capital assuré de 100 000 $, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 11, 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3) ;

 

J.B. et J.-C.B.

10.      Dans la province de Québec, entre vers novembre 2013 et février 2014, l’intimé n’a pas fourni à J.-C.B. et J.B. les informations complètes, exactes et véridiques relatives à « l’Avis relatif à l’Option de transformation » du contrat d’assurance vie numéro [...], contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 11, 12, 13, 14, 16 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3) ;

11.      À Senneterre, le ou vers le 9 février 2014, l’intimé a donné à J.-C.B et J.B. des renseignements inexacts et incomplets au sujet de la nature, des caractéristiques et de la couverture d’assurance du contrat d’assurance proposé numéro [...], contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 11, 12, 13, 14, 16 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3) ;

12.      À Senneterre, le ou vers le 9 février 2014, l’intimé a indiqué de fausses informations sur le «Préavis de remplacement de police» numéro [...] notamment quant aux caractéristiques du contrat 669035 et celles du contrat proposé, contrevenant ainsi aux articles 22 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r.10), 11, 12, 13, 14, 16 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3);

13.      À Senneterre, le ou vers le 9 février 2014, l’intimé a indiqué de fausses informations sur le «Préavis de remplacement de police» numéro [...] notamment quant aux caractéristiques du contrat [...] et celles du contrat proposé, contrevenant ainsi aux articles 22 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r.10), 11, 12, 13, 14, 16 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3);

14.      À Senneterre, le ou vers le 9 février 2014, l’intimé n’a pas favorisé le maintien en vigueur du contrat d’assurance numéro 669035 de J.-C.B. et J.B., contrevenant ainsi à l’article 20 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r.10) ;

15.      À Senneterre, le ou vers le 9 février 2014, l’intimé n’a pas favorisé le maintien en vigueur du contrat d’assurance numéro [...] de J.-C.B. et J.B., contrevenant ainsi à l’article 20 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants (RLRQ, c. D-9.2, r.10) ;

16.      Dans la province de Québec, entre le ou vers le 9 février 2014 et mai 2014, l’intimé
n’a pas subordonné son intérêt personnel à celui de J.-C.B. et J.B. en leur conseillant de souscrire au contrat d’assurance numéro [...], contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 11, 18, 19 et 20 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3) ;

17.      Dans la province de Québec, entre vers le 31 mars et mai 2014, l’intimé n’a pas fourni à J.-C.B. et J.B. les renseignements complets, exacts et véridiques relatifs à la prime du contrat d’assurance numéro [...] qu’il leur a proposé de souscrire notamment en omettant de les informer qu’une surprime avait été imposée par l’assureur, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 11, 12, 13, 14, 16 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3) ;

18.      À Senneterre, le ou vers le 9 avril 2014, l’intimé a fait résilier les contrats d’assurance [...] et [...] de J.-C.B. et J.B. sans s’être assuré de la réception, de l’acceptation et de l’entrée en vigueur du contrat proposé numéro [...], créant ainsi un découvert d’assurance à J.-C.B. et J.B., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 12 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3) ;

19.      À Senneterre, le ou vers le 9 avril 2014, l’intimé a fait résilier les contrats d’assurance vie numéros [...] et [...] de J.-C.B. et J.B. contrairement au mandat confié par ces derniers, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 11, 24 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3) ;

20.      À Senneterre, le ou vers le 17 mai 2014, l’intimé a fait modifier le contrat proposé numéro [...] de J.-C.B. et J.B. sans l’autorisation de ces derniers, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 11 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, c. D-9.2, r.3).

PLAIDOYER DE CULPABILITÉ

[3]          Se référant à une volumineuse preuve documentaire, la procureure de la plaignante a résumé les circonstances entourant la commission des infractions.  

[4]          Pour sa part, l’intimé a réitéré vouloir enregistrer un plaidoyer de culpabilité sous chacun des vingt chefs d’accusation portés contre lui, conformément à celui qu’il a fait parvenir au secrétariat du comité le 14 mars 2016.

[5]          Après avoir procédé à l’étude de la preuve documentaire produite et s’être assuré que l’intimé comprenait que, par ce plaidoyer, il reconnaissait les gestes reprochés et que ceux-ci constituaient des infractions déontologiques, le comité l’a déclaré coupable sous chacun des vingt chefs de la plainte portée contre lui.

ET PROCÉDANT SUR SANCTION

LA PREUVE

[6]          La procureure de la plaignante a déposé une preuve additionnelle sur sanction constituée des trois pièces suivantes :

a)     Décision du comité de discipline de l’Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec[1];

b)     Engagement volontaire de l’intimé en date du 14 mai 2003;

c)      Décision rendue par le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière dans les dossiers CD00-0909 et CD00-0947[2].

[7]          Pour sa part, l’intimé a témoigné et il en ressort principalement ce qui suit.

[8]          Il est âgé de 58 ans et est sans emploi depuis environ dix mois. Son certificat n’a pas été renouvelé par l’AMF n’ayant pas réussi à trouver un rattachement à un cabinet. Ni son épouse ni sa fille, maintenant âgée de 30 ans, ne sont sur le marché du travail. Comme mentionné par la plaignante, il subit depuis le mois de mars 2016 une période de radiation qui prendra fin en octobre de la même année.

[9]          Il a non seulement reconnu les gestes reprochés, mais a collaboré à l’enquête ainsi qu’avec la procureure de la plaignante. Il n’a pas agi avec malveillance ou malhonnêteté et il y a absence de préjudice financier pour les consommateurs.

[10]       Il a dit regretter sincèrement avoir procédé à des prêts investissements, mais que ceux-ci ne comportaient toutefois pas de rappel de marge. De plus, A.L., par exemple, détenait toujours les placements souscrits.

[11]       Il a reconnu avoir manqué de jugement en se fiant à son directeur pour recommander un prêt investissement au couple de consommateurs impliqué dans les neuf premiers chefs. Il a déploré toutefois que le cabinet, auquel il était rattaché pour le courtage en épargne collective, ait profité de son inexpérience en épargne collective pour l’encourager à faire souscrire des prêts investissements. Tant la division de conformité dudit cabinet que celles de B2B Trust donnaient leur aval à ces produits. Néanmoins, il assume l’entière responsabilité de ses actes.

[12]       Il rembourse à raison d’environ 400 $ par mois les 13 470,35 $ représentant sa part des déboursés dans les dossiers CD00-0909 et CD00-0947.

[13]       Il a épuisé l’argent que son frère lui avait prêté et les compagnies d’assurance ont annulé ses commissions de renouvellement.

[14]       Il ignore ce qu’il va faire pour gagner sa vie après 32 ans à exercer cette profession.

[15]       Le processus disciplinaire, commencé avec les premières plaintes en 2009, a non seulement été éprouvant, mais a eu des conséquences graves sur sa vie personnelle et professionnelle. Cette expérience l’a rendu malade au point où il a dû consulter un psychiatre et un psychologue et prendre une médication.

[16]       Il a demandé au comité de donner suite aux recommandations de radiation se disant incapable de verser des amendes.

REPRÉSENTATIONS SUR SANCTION

[17]        Après avoir fait part des recommandations communes des parties, la procureure de la plaignante a déposé au soutien de celles-ci une série de décisions pour chaque recommandation ci-dessous, soulignant les similitudes et les distinctions qui s’imposaient avec le cas en l’espèce:

a)          Pour les chefs 1, 3, 4 et 8 (ne pas avoir procédé à une analyse complète et conforme des besoins financiers (ABF)) :

             La radiation temporaire de l’intimé pour une période d’un mois sous chacun de ces chefs[3];

b)          Pour les chefs 2, 6 et 7 (avoir fait souscrire un produit qui ne correspondait pas à son profil d’investisseur et à sa situation financière) :

             La radiation temporaire de l’intimé pour une période de cinq mois sous chacun de ces chefs[4];

c)          Pour les chefs 5, 10, 11 et 17 (ne pas avoir fourni à son client l’information pertinente, objective et complète) :

             La radiation temporaire de l’intimé pour une période d’un mois sous chacun de ces chefs[5];

d)          Pour les chefs 9 et 16 (ne pas avoir subordonné son intérêt personnel à celui de ses clients) :

             La radiation temporaire de l’intimé pour une période de dix-huit mois sous chacun de ces chefs[6];

e)          Pour les chefs 12 et 13 (avoir indiqué de fausses informations sur le «Préavis de remplacement de police») :

             La radiation temporaire de l’intimé pour une période d’un mois sous chacun de ces chefs[7];

f)           Pour les chefs 14 et 15 (ne pas avoir favorisé le maintien en vigueur du contrat d’assurance) :

             La radiation temporaire de l’intimé pour une période de six mois sous chacun de ces chefs[8];

g)          Pour le chef 18 (avoir créé un découvert d’assurance) :

             La radiation temporaire de l’intimé pour une période de six mois[9];

h)         Pour les chefs 19 et 20 (ne pas avoir respecté le mandat confié par ses
clients
) :

             La radiation temporaire de l’intimé pour une période de quatre mois sous chacun de ces chefs [10].

[18]       Les périodes de radiation temporaire ci-dessus énumérées étant à être purgées de façon concurrente, totalisant 18 mois dans le présent cas.

[19]       Les parties ont de plus recommandé la publication de la décision et la condamnation de l’intimé au paiement des déboursés, excluant toutefois les frais d’expertise.

[20]       Enfin, les parties ont recommandé d’imposer à l’intimé de suivre, en plus des  six formations recommandées par l’autre formation du comité dans les dossiers
CD00-0909 et CD00-0947, les deux formations supplémentaires décrites ci-après :

a)          Formations recommandées antérieurement :

         L’analyse des besoins financiers, cours numéro 24902;

         L’analyse des besoins d’assurance vie, cours numéro 27273;

         Les produits d’assurance vie, cours numéro 27644;

         L’analyse des besoins d’épargne, cours numéro 28036;

         Les produits d’épargne, cours numéro 28200;

         L’intégration des concepts, cours numéro 290094;

b)          Formations supplémentaires :

         Regard pratique sur la déontologie (profil mixte), cours numéro 29638CL1FR;

         Le préavis de remplacement démystifié, cours numéro 36006L1FR.

[21]       Au titre de premier facteur aggravant, la procureure de la plaignante a invoqué la gravité objective des infractions commises. Celles-ci découlent des actes les plus importants qu’un représentant doit accomplir, notamment l’ABF, le choix du produit convenant à la situation du client, les informations complètes à fournir aux clients et aux assureurs, l’obligation de favoriser le maintien en vigueur de l’assurance existante, celle d’agir avec l’autorisation du client et toujours subordonner son intérêt à celui de son client.

[22]       Le risque de récidive est un autre facteur aggravant important en l’espèce, étant donné que certaines des infractions commises, par exemple le défaut de maintenir en vigueur la police existante en opérant des transformations de contrat et en ne subordonnant pas son intérêt à celui du client, constituent une récidive puisque l’intimé a déjà été reconnu coupable et sanctionné pour des infractions similaires en 2001 dans le dossier CD00-0254. Aussi, quoique l’intimé ait dit avoir suivi une formation, il a répété le même type d’infraction en 2014, comme le démontre la présente plainte.

[23]       Quant aux autres facteurs aggravants, la procureure de la plaignante a mentionné l’expérience importante de l’intimé comme représentant en assurance, même si son certificat dans la discipline de courtage en épargne collective  a été obtenu plus tard. À celle-ci s’ajoute la vulnérabilité des consommateurs qui avaient peu d’instruction et de connaissances en assurances et avaient une entière confiance en l’intimé.

[24]       Bien que l’intimé ait prétendu que le couple impliqué dans les neuf premiers chefs, A.L. et L.R.L., n’avait pas subi de préjudice, ceux-ci ont quand même vécu une pression financière importante pour maintenir les assurances souscrites et respecter le paiement des intérêts du prêt investissement souscrit par son entremise.

[25]       Quant au deuxième couple impliqué aux chefs 11 à 20, J.B. et J.-C.B., il a perdu la protection des assurances précédentes qui l’avantageait.

[26]       De plus, l’intimé a tiré profit de ces actes, ayant perçu de généreuses commissions.

[27]       Enfin, l’engagement volontaire signé par l’intimé en 2003 concernant l’ABF et le défaut de fournir des informations, ainsi que la décision rendue en 2015 dans les dossiers CD00-0909 et CD00-0947, même si ne constituant pas des antécédents, démontrent que l’intimé a agi avec préméditation ou, à tout le moins, n’a pas encore compris ses obligations.

[28]       Même si l’intimé a expliqué avoir subi des pressions de son cabinet pour recommander des prêts investissements aux consommateurs, il ne semble pas reconnaître sa responsabilité à cet égard ni exprimer de regrets concernant les produits d’assurance qu’il a recommandés.

[29]       Quant aux facteurs atténuants, la procureure de la plaignante a mentionné :

a)     La collaboration de l’intimé à l’enquête;

b)     L’enregistrement de son plaidoyer de culpabilité qui a évité plusieurs jours de procès ainsi qu’aux consommateurs de témoigner;

c)      Le fait que l’intimé ne pratique plus.

[30]       Elle a contesté l’absence d’intention malhonnête ou malveillante alléguée par l’intimé étant plutôt d’avis qu’il a agi en toute connaissance de cause et pour servir son propre intérêt.

[31]       Elle a expliqué avoir recommandé des périodes de radiation, vu la situation financière actuelle de l’intimé à la suite de la décision rendue dans les dossiers
CD00- 0909 et CD00-0947 qui rend illusoire le paiement d’amendes. Comme il s’agit en l’espèce d’infractions similaires, elle s’est inspirée des périodes de radiation ordonnées dans cette dernière décision, sauf pour les chefs reprochant de ne pas avoir subordonné son intérêt, pour lesquels les parties ont recommandé dix-huit mois plutôt que neuf mois.

[32]       Enfin, elle a signalé que dans la décision Bruneau,[11] le comité avait accepté d’ordonner une radiation au lieu et place d’amende considérant la situation financière de l’intimé.

[33]        Quant à l’obtention par l’intimé d’un délai de quatre ans pour acquitter les déboursés, la procureure de la plaignante a suggéré de lui accorder plutôt un délai de six mois à partir de l’expiration du délai de 32 mois qui court depuis janvier 2016 pour le paiement des déboursés découlant des dossiers CD00-0909 et CD00-0947 lui ayant été octroyé par le comité dans la décision sur sanction rendue dans ces dossiers. Cependant, dans l’éventualité où l’intimé fait défaut d’acquitter une des mensualités de cette dernière dette, le délai de six mois octroyé pour le paiement des déboursés découlant du présent dossier commencera immédiatement.

ANALYSE ET MOTIFS

[34]       Le comité réitère la déclaration de culpabilité rendue séance tenante contre l’intimé sous chacun des vingt chefs de la plainte portée contre lui.

[35]        Comme indiqué par la procureure de la plaignante, les infractions commises par l’intimé comptent parmi les plus importantes obligations du représentant.

[36]        L’intimé a contrevenu à chacune des obligations suivantes :

a)    Procéder à la confection d’une analyse complète des besoins financiers des clients;

b)    Recommander un produit qui convient le mieux à leur situation;

c)    Fournir des informations complètes aux clients et aux assureurs;

d)    Favoriser le maintien en vigueur de l’assurance existante;

e)    Agir avec l’autorisation du client;

f)     Subordonner son intérêt à celui de son client.

[37]       Les consommateurs impliqués dans la présente plainte étaient vulnérables, ayant peu de connaissance en assurances et en placement. Ils ont fait confiance à l’intimé qui a fait fi de leurs intérêts.

[38]        En prétendant que le couple impliqué dans les neuf premiers chefs n’a pas subi de préjudice, l’intimé occulte la pression financière importante vécue pour maintenir les assurances et verser les intérêts liés au prêt investissement souscrit par son entremise.

[39]        Quant au deuxième couple, impliqué aux chefs 11 à 20, il a perdu la protection des assurances antérieures qui lui était plus avantageuse.

[40]       Le comité partage l’avis de la procureure de la plaignante voulant que l’intimé semble minimiser sa responsabilité en faisant porter à son cabinet la responsabilité des prêts investissements qu’il a recommandés en plus de ne pas exprimer de regrets à l’égard des produits d’assurance qu’il a fait souscrire à ses clients, privilégiant son propre intérêt plutôt que le leur. D’ailleurs, l’intimé a perçu de généreuses commissions.

[41]        Certaines des infractions en l’espèce constituent une récidive, l’intimé ayant déjà été sanctionné pour des infractions similaires en 2001 dans le dossier
CD00-0254.

[42]        En outre, le témoignage de l’intimé laisse croire qu’il a agi avec préméditation ou, à tout le moins, qu’il ne comprend pas encore ses obligations en dépit des engagements volontaires signés en 2003 et de la décision rendue plus récemment dans les dossiers CD00-0909 et CD00-0947.

[43]        Cependant, l’intimé a collaboré à l’enquête et a enregistré un plaidoyer de culpabilité, ce qui a réduit considérablement le temps d’audience et a évité aux consommateurs de témoigner.

[44]       Le comité aurait préféré une ventilation des périodes de radiation différente de celle suggérée. Néanmoins, considérant les faits propres au présent dossier, les facteurs aggravants et atténuants pertinents, il donnera suite aux recommandations des parties et ordonnera la radiation temporaire de l’intimé pour les périodes qu’elles ont suggérées sous chacun d’eux. Le comité estime que ces sanctions sont compatibles avec celles prononcées pour des infractions similaires et de nature à dissuader l’intimé et les autres représentants qui seraient enclins à l’imiter.

[45]       La publication de la décision sera ordonnée et l’intimé sera condamné au paiement des déboursés, à l’exclusion des frais d’expertise. Un délai de six mois lui sera accordé pour les acquitter. Toutefois, ce délai ne commencera à courir qu’en août 2018, à l’expiration de celui qui lui a été octroyé par le comité pour acquitter sa part des déboursés découlant des dossiers CD00-0909 et CD00-0947.

[46]        Enfin, le comité recommandera également que l’intimé suive, en plus des six formations déjà recommandées dans les dossiers CD00-0909 et CD00-0947, les deux formations supplémentaires suivantes :

         Regard pratique sur la déontologie (profil mixte), cours numéro 29638CL1FR;

         Le préavis de remplacement démystifié, cours numéro 36006L1FR.

 

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

RÉITÈRE ORDONNER la non-divulgation, non-diffusion et non-publication du nom des consommateurs visés par la plainte, ainsi que de toute information de nature personnelle et financière permettant de les identifier;

RÉITÈRE PRENDRE ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé sous chacun des vingt chefs d’accusation portés contre lui;

RÉITÈRE DÉCLARER l’intimé coupable sous chacun des vingt chefs d’accusation portés contre lui;

 

ET STATUANT SUR LA SANCTION :

ORDONNE la radiation temporaire de l’intimé à être purgée pour les périodes suivantes, et ce, de façon concurrente :

         sous les chefs 1, 3, 4 et 8, pour une période d’un (1) mois;

         sous les chefs 2, 6 et 7, pour une période de cinq (5) mois;

         sous les chefs 5, 10, 11 et 17, pour une période d’un (1) mois;

         sous les chefs 9 et 16, pour une période de dix-huit (18) mois;

         sous les chefs 12 et 13, pour une période d’un (1) mois;

         sous les chefs 14 et 15, pour une période de six (6) mois;

         sous le chef 18, pour une période de six (6) mois;

         sous les chefs 19 et 20, pour une période de quatre (4) mois.

RECOMMANDE au conseil d'administration de la Chambre de la sécurité financière d'imposer à l’intimé de suivre à ses frais en plus des six formations déjà recommandées dans la décision rendue dans les dossiers CD00-0909 et CD00-0947, celles indiquées ici-bas ou l’équivalent, offertes par la Chambre de la sécurité financière, l'intimé devant produire à la Chambre une attestation à l'effet que lesdites formations ont été suivies avec succès dans les douze (12) mois de la résolution du conseil d'administration, le défaut de s’y conformer entraînant la suspension de son droit d’exercice par l’autorité compétente jusqu’à la production d’une telle attestation :

         Regard pratique sur la déontologie (profil mixte), cours numéro 29638CL1FR;

         Le préavis de remplacement démystifié, cours numéro 36006L1FR.

ORDONNE au secrétaire du comité de discipline de faire publier, aux frais de l’intimé, un avis de la présente décision dans un journal circulant dans le lieu où ce dernier a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où il a exercé ou pourrait exercer sa profession conformément aux dispositions de l’alinéa 5 de l’article 156 du Code des professions, RLRQ, c. C-26;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés, excluant les frais d’expertise, conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, RLRQ, c. C-26;

ACCORDE à l’intimé un délai de six mois pour acquitter lesdits déboursés, ce délai ne commençant à courir qu’en août 2018, soit à l’expiration de celui qui lui a été octroyé par le comité pour payer sa part des déboursés découlant des dossiers CD00-0909 et CD00-0947. Cependant, dans l’éventualité où l’intimé fait défaut d’acquitter une des mensualités convenues pour cette dernière dette, le délai de six mois octroyé pour le paiement des déboursés du présent dossier commencera immédiatement.

 

 

 

 

 

(s) Janine Kean______________________

Me Janine Kean

Présidente du comité de discipline

 

(s) Benoit Bergeron___________________

M. Benoit Bergeron, A.V.A., Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

(s) Stéphane Prévost_________________

M. Stéphane Prévost, A.V.C.

Membre du comité de discipline

 

 

 

 

 

Me Julie Piché

 

THERRIEN COUTURE AVOCATS, s.e.n.c.r.l.

 

Procureurs de la partie plaignante

 

 

 

L’intimé se représente seul.

 

 

 

Date d’audience :

Le 1er avril 2016

 

 

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1] Comité de surveillance de l’Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec c. Simard, CD00-0254, décision sur culpabilité du 28 mars 2001 et décision sur sanction du 25 juillet 2001.

[2] Champagne c. Simard, CD00-0909 et CD00-0947, décision sur culpabilité du 8 avril 2015 et décision sur sanction rectifiée du 7 mars 2016.

[3] Champagne c. Boileau, CD00-0824, décision sur culpabilité et sanction du 26 mai 2011; Champagne c. Dumont, CD00-0915, décision sur culpabilité et sanction du 26 octobre 2012; Champagne c. Derome, CD00-0980, décision sur culpabilité et sanction du 3 octobre 2013.

[4] Champagne c. Simard, préc., note 2; Rioux c. Biduk, CD00-0565, décision sur culpabilité du 6 juin 2006 et décision sur sanction du 27 février 2007; Rioux c. Prévost, CD00-0589, décision sur culpabilité et sanction corrigée du 11 mai 2011; Champagne c. Exilus, CD00-0899, décision sur culpabilité du
9 mai 2012 et décision sur sanction du 3 janvier 2013; Champagne c. D’Aragon, CD00-1003, décision sur culpabilité et sanction du 27 février 2015.

[5] Thibault c. Morinville, CD00-0724, décision sur culpabilité et sanction du 31 décembre 2009; Lelièvre c. Belle, CD00-1039, décision sur culpabilité et sanction du 17 mars 2014; Champagne c. Cabana, CD00-0952, décision sur culpabilité du 28 juillet 2014 et décision sur sanction du 3 juin 2015.

[6] Champagne c. Simard, préc., note 2; Thibault c. Petit, CD00-0692, décision sur culpabilité et sanction du 30 juillet 2008; Lévesque c. Gervais, CD00-0766, décision sur culpabilité et sanction du
16 mars 2010; Champagne c. Cossette, CD00-0928, décision sur culpabilité et sanction du 7 janvier 2013; Champagne c. Exilus, préc., note 4 (chefs 3, 7 et 11).

[7] Lelièvre c. Belle, préc., note 5 (chef 2).

[8] Rioux c. Harton, CD00-0553, décision sur culpabilité du 4 novembre 2005 et décision sur sanction du 29 juin 2006; Rioux c. Noël, CD00-0666, décision sur culpabilité et sanction du 4 septembre 2007.

[9] Rioux c. Blais, CD00-0421, décision sur culpabilité et sanction du 24 juillet 2003; Rioux c. Desgens, CD00-0605, décision sur culpabilité et sanction du 29 septembre 2006; Rioux c. Noël, préc., note 8 (chef 31).

[10] Rioux c. Giroux, CD00-0585, décision sur culpabilité du 7 juin 2006 et décision sur sanction du
29 janvier 2007; Rioux c. Masse, CD00-0621, décision sur culpabilité du 10 septembre 2007 et décision sur sanction du 17 avril 2008; Champagne c. Ménard, CD00-0924, décision sur culpabilité et sanction du 10 avril 2013.

[11] Champagne c. Bruneau, CD00-1010, décision sur culpabilité et sanction du 31 octobre 2014.

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