Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Chambre de la sécurité financière c. Charlebois

2016 QCCDCSF 50

 

COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-1098

 

DATE :

6 décembre 2016

_____________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Claude Mageau

Président

M. John Ruggieri, A.V.A., Pl. Fin.

Membre

M. Marc Binette, Pl. Fin.

Membre

_____________________________________________________________________

 

CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

 

DANIEL CHARLEBOIS, conseiller en sécurité financière (certificat numéro 106807)

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ

______________________________________________________________________

 

 

CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS, LE COMITÉ A PRONONCÉ L’ORDONNANCE SUIVANTE :

                Ordonnance de non-divulgation, de non-publication et de non-diffusion du nom des consommateurs concernés ainsi que de toutes informations qui pourraient permettre de les identifier.

 

[1]            Le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière (le « comité ») s’est réuni les 14, 15, 16 et 17 septembre 2015,  au bureau de la Commission des lésions professionnelles, sis au 500, boulevard René-Lévesque Ouest, Montréal, pour procéder à l'audition de la plainte disciplinaire portée contre l'intimé le 11 décembre 2014, ainsi libellée :

LA PLAINTE

[1]       À Saint-Jean-sur-le-Richelieu, le ou vers le 3 février 2006, l’intimé n’a pas exposé à J.-G.D., de façon complète, exacte et objective, la nature, les avantages et les inconvénients du contrat d’assurance vie Innovision portant le numéro […] qu’il lui a conseillé de souscrire, contrevenant ainsi aux articles 16, 28 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2), 12, 13, 14 et 16 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D-9.2, r.3);

[2]       À Saint-Jean-sur-le-Richelieu, le ou vers le 3 février 2006, l’intimé a fait souscrire à son client J.-G.D. le contrat d’assurance vie Innovision portant le numéro […], pour un capital assuré de 3 millions $, ce qui ne convenaient pas à ses besoins financiers, sa situation financière et personnelle, ainsi que ses objectifs de placement, contrevenant ainsi aux articles 16 et 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2);

[3]       À Saint-Jean-sur-le-Richelieu, entre les mois de février 2006 et mars 2009, l’intimé a fait à J.-G.D. des représentations fausses, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur quant au contrat d’assurance vie Innovision portant le numéro […] qu’il lui a conseillé de souscrire, notamment en lui affirmant que l’assureur avait commis une erreur en le surprimant et qu’il réduirait rétroactivement le montant de la prime facturée, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2), 11, 12, 16 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D-9.2, r.3).

[4]           Aux termes de l’audition, le comité a demandé la transcription des notes sténographiques, laquelle lui fut transmise le 12 novembre 2015, date du début de la prise en délibéré de la présente instance.

[5]           La plaignante était représentée par Me Valérie Déziel alors que l’intimé était représenté par Me Maurice Charbonneau.

PREUVE DE LA PLAIGNANTE

[6]           Au soutien de sa preuve, la plaignante déposa de consentement les pièces P-1 à P-27.

[7]           La pièce P-28, soit le rapport d’expertise de M. Denis Preston daté du 12 septembre 2014, faisant l’objet d’une objection à sa production de la part du procureur de l’intimé a donc été produite uniquement pour identification comme pièce P-28, le débat quant à sa production devant avoir lieu lors du témoignage de M. Preston que la plaignante a l’intention de faire entendre comme expert.

TÉMOIGNAGE DE J.-G.D.

[8]           Pour débuter, la procureure de la plaignante fit entendre J.-G.D. qui est le consommateur concerné dans la présente instance.

[9]           Il est le président de E.D. Inc. et est âgé de 73 ans.

[10]        Il mentionne avoir rencontré l’intimé à un déjeuner avec ses comptables lors d’une présentation à Sainte-Julie à l’été 2005.

[11]        Le témoin indique que l’intimé l’a rencontré avec son fils et il a alors présenté son programme d’assurance qui serait selon lui avantageux pour J.-G.D.

[12]        Le témoin indique qu’il était alors dans un processus de transfert d’entreprise et la proposition lui semblait intéressante.

[13]        Il indique qu’en 2005, il avait alors 67 % du capital‑actions de E.D. Inc., alors que les autres actionnaires en avaient 33 %.

[14]        Le témoin ajoute qu’en septembre 2005, l’intimé lui a proposé d’investir dans une assurance-vie universelle.

[15]        C’est pour cette raison que le témoin a passé un examen médical en octobre 2005.

[16]        Le témoin indique qu’il s’agissait d’une police d’assurance-vie pour une valeur de 3 000 000 $.

[17]        J.-G.D. témoigne à l’effet que l’avantage de cette police d’assurance était qu’il pouvait retirer 75 % du montant investi.

[18]        Il indique que l’évaluation qui avait été faite du produit prévoyait qu’il paierait une prime pour une période d’environ douze (12) ans et que par la suite, le capital accumulé ferait en sorte qu’il n’aurait plus à faire des paiements mensuels[1].

[19]        Le témoin indique qu’à ce moment-là, il n’a jamais été question de l’existence d’une surprime.

[20]        Il indique qu’après son examen médical du mois d’octobre 2005, il est parti pour la Floride et qu’à son retour, le 3 février 2006, il a dû rencontrer l’intimé pour signer des documents relativement à la police d’assurance.

[21]        Il reconnaît les documents déposés comme pièce P-7.

[22]        On y retrouve, entre autres, le chèque daté du 3 février 2006 au montant de 14 092,89 $ qui correspond à la prime mensuelle et un sommaire du contrat d’assurance InnoVision.

[23]        Le témoin indique qu’il a signé à son bureau les documents faisant partie de la pièce P-7 alors qu’il était en présence de son frère Y.D.

[24]        Selon le témoin, à cette date, soit le 3 février 2006, la question de la surprime à cause de son état de santé n’a pas été discutée avec l’intimé.

[25]        Selon le témoin, il n’aurait compris qu’il était « surprimé » qu’en août 2006, soit lorsqu’il a reçu son premier état de compte concernant son assurance.

[26]        Il indique qu’à cette période, il a rencontré un représentant en assurances de son institution financière, la Banque Nationale, qui lui avait alors fait comprendre que le montant mensuel que J.-G.D. payait ne servait en fait qu’à payer la couverture d’assurance et qu’il n’y avait presque aucun montant déposé comme épargne.  Ce représentant lui a alors indiqué qu’il était en fait « surprimé » à 200 % à cause de sa condition physique[2].

[27]        Par la suite, le témoin mentionne qu’il a eu une rencontre avec l’intimé afin de lui indiquer qu’il était en complet désaccord avec la situation étant donné qu’il ne faisait que payer de l’assurance et qu’aucune somme n’était déposée comme capital dans son assurance-vie universelle.

[28]        Il indique qu’il voulait avoir de l’information concernant son dossier médical et que suite à des pressions, la surprime a baissé à 150 %.

[29]        Il indique que selon lui, ses primes mensuelles ne servaient qu’à couvrir l’assurance, qu’il n’accumulait pas de valeur de rachat pour son assurance et qu’il ne pouvait pas ainsi retirer 75 % de ce qu’il payait, comme le lui avait représenté l’intimé.

[30]        Le témoin indique que l’intimé lui disait toujours « on va l’avoir la prime standard, on va l’avoir la prime standard »[3].

[31]        Le témoin dit que son fils aussi se posait des questions et qu’il doutait de la pertinence d’un tel investissement.

[32]        Il indique qu’il n’a jamais pu bénéficier d’une prime standard pour l’assurance contractée par l’intermédiaire de l’intimé.

[33]        Le témoin témoigne à l’effet qu’il a par la suite baissé cette assurance-vie universelle InnoVision pour une couverture de 1 000 000 $, laquelle a été par la suite transférée à un autre courtier.

[34]        Le témoin mentionne que de 2006 à 2009, il a payé environ plus ou moins 500 000 $ en prime à Manuvie.

[35]        Le témoin indique qu’actuellement, comme produit d’assurance, il a toujours cette assurance-vie universelle contractée par l’entremise de l’intimé, mais qu’elle est maintenant pour une couverture de 335 000 $.  Il détient aussi une autre assurance-vie standard pour 1 000 000 $ avec Canada Vie qu’il a contractée par l’intermédiaire d’un autre représentant.

[36]        Le témoin reproche donc à l’intimé de l’avoir amené à souscrire un produit qui n’était pas adéquat pour lui et de ne pas lui avoir expliqué correctement les caractéristiques du produit en question.

[37]        Par la suite, J.-G.D. a été contre-interrogé par le procureur de l’intimé.

[38]        Il mentionne que sa rencontre initiale avec l’intimé a eu lieu en 2005 lors d’une présentation.

[39]        Il confirme que son comptable, Louis Blain, était un des présentateurs et qu’il y avait aussi un fiscaliste du nom de Jean-François Lehoux.

[40]        Il indique que M. Blain travaillait sur sa planification financière depuis environ un (1) an et demi.

[41]        Le témoin dit qu’il dirige E.D. Inc. depuis 1996, qu’il a une onzième année scolaire et qu’il avait suivi un cours en marketing à l’Université Laval dans les années 60.

[42]        E.D. Inc. a été fondée en 1996, suite à la faillite de F.S.-J. Inc., entreprise que son père avait fondée et que J.-G.D. dirigeait depuis 1973.

[43]        Il indique qu’en 2005, le chiffre d’affaires de E.D. Inc. était d’environ 8 000 000 $.

[44]        À cet effet, il réfère à la pièce P-4 qui est un questionnaire financier confidentiel qu’il a signé le 29 septembre 2005, où il est mentionné que la valeur marchande de son entreprise est de 8 000 000 $.

[45]        Il indique qu’il a eu un suivi médical et qu’à l’automne 2005, il se souvient d’avoir passé des tests médicaux.

[46]        Par la suite, le témoin reconnaît le document intitulé « Ajout à la proposition » daté du 3 février 2006, faisant partie de la pièce P-7[4].

[47]        Ce document indique au dernier paragraphe que « le contrat d’assurance est établi moyennant une surprime pour risque aggravé dans le cas de J.-G.D. ».

[48]        Il reconnaît avoir signé le document, mais mentionne qu’en ce qui le concerne, il n’a compris qu’en août 2006 ce que voulait dire la surprime, c’est-à-dire lorsqu’il a reçu son premier état de compte.

[49]        Au moment de la signature du document en question, il indique ne pas avoir posé de question à l’intimé.

[50]        Relativement à la question de la surprime, il mentionne que pour lui, la signature de ce document ne voulait absolument rien dire, étant donné qu’on n’indiquait pas spécifiquement qu’il aurait à payer plus pour la prime d’assurance[5].

[51]        Entre la signature des documents en février 2006 et la réception de son état de compte en août 2006, le témoin mentionne qu’il n’a pas parlé à l’intimé.

[52]        Il explique que lorsqu’il a reçu son état de compte en août 2006, il a parlé à l’intimé, à Louis Blain ainsi qu’à son avocat lors d’une rencontre à son bureau où il a été question de la pertinence de continuer avec l’assurance-vie universelle.

[53]        Le témoin indique que l’intimé lui mentionna alors de conserver l’assurance-vie étant donné qu’il était pour lui obtenir un taux standard.

[54]        Il reconnaît le bilan financier de son entreprise pour l’année 2005, lequel est déposé comme pièce I-1 et admet que le total de l’avoir des actionnaires qui y est mentionné est bien exact.

[55]        Il mentionne qu’en septembre 2005, il avait discuté avec l’intimé du produit appelé « Performax », mais qu’en février, ce fut le produit « InnoVision » qui fut choisi.

[56]        Il indique aussi qu’en matière d’assurance, c’était toujours avec l’intimé qu’il en discutait et non pas avec son comptable, M. Blain.

[57]        Le procureur de l’intimé lui présenta la pièce I-2 qui est un contrat d’assurance temporaire préparé à son intention prenant effet le 30 janvier 2006, mais le témoin ne reconnaît pas ledit document.

[58]        Relativement à la pièce cotée I-3, qui est un document daté du 29 septembre 2005, le témoin indique que ce document-là, d’après l’écriture, aurait été préparé par l’intimé.

[59]        Relativement à la couverture de 3 000 000 $ qui y est mentionnée, le témoin indique que c’est l’intimé qui a écrit ce montant et que ce dernier pouvait bien écrire ce qu’il voulait, étant donné qu’il s’agit d’un document interne préparé par lui.

[60]        En référant à la lettre du 2 novembre 2010 qu’il avait fait parvenir à l’intimé[6], il indique qu’elle avait été rédigée en Floride avec une consultante de Manuvie.

[61]        Il mentionne que la compagnie de gestion mentionnée à la lettre avait été nécessaire uniquement à cause du produit d’assurance suggéré par l’intimé.

[62]        Il informe le comité qu’en novembre 2010, il a fait un infarctus.

[63]        Il mentionne qu’il n’a pas d’autres actifs que son entreprise.

[64]        Il ne connaît pas les rendements de placement de l’assurance-vie universelle contractée.

[65]        Il mentionne qu’il ne sait pas dans quels investissements les dépôts mensuels étaient faits à Manuvie.

[66]        Il indique, qu’en ce qui le concerne, cela n’était pas important et qu’il laissait Manuvie le faire compte tenu que ce qui était important pour lui c’était qu’il puisse recevoir à la fin le 75 % qu’il avait investi dans le produit financier.

[67]        Ce que Manuvie faisait avec les primes qu’il payait lui importait peu : c’était le résultat final qui comptait.

[68]        En ré-interrogatoire, le témoin explique que E.D. Inc. était le titulaire de l’assurance contractée, qu’il en était l’assuré et que par la suite, c’est la compagnie de gestion, qui est devenue titulaire de l’assurance (pièce P‑16).

[69]        Il indique que selon sa compréhension, il aurait récupéré 75 % des primes payées à la fin, au moment du rachat[7].

TÉMOIGNAGE DE P.D.

[70]        Le prochain témoin entendu par la procureure de la plaignante fut P.D., fils de J.‑G.D.

[71]        Il est le vice-président à la production chez E.D. Inc. et possède 11 % des actions de la compagnie.

[72]        Il témoigne à l’effet qu’il a rencontré l’intimé à l’automne 2005 lors d’une présentation au bureau de la compagnie pour une police d’assurance suite à une rencontre que J.-G.D. avait eue avec le comptable de la compagnie et l’intimé.

[73]        Il indique qu’il s’agissait d’une police d’assurance-vie où on pouvait emprunter libre d’impôt jusqu’à 75 % du montant des versements.

[74]        Il indique que son père, J.-G.D., voulait se retirer et la famille cherchait un moyen pour la planification de sa retraite.

[75]        Il mentionne qu’il ne se souvient pas du nom du produit d’assurance discuté et se souvient que c’était le comptable, Louis Blain, qui avait suggéré une couverture d’assurance de 3 000 000 $.

[76]        Il dit qu’après cette rencontre, son père a quitté pour la Floride comme il le fait habituellement à tous les hivers.

[77]        Il mentionne que par la suite, il a eu de nombreux appels de la part de l’intimé lui disant qu’il avait des difficultés quant à l’assurabilité de J.-G.D.

[78]        L’intimé avait mentionné que l’assurance-vie était possible, mais qu’il fallait que son père signe des documents le plus rapidement possible sinon le produit financier ne serait plus disponible.

[79]        Il indique que J.-G.D. est revenu au Québec pour la période des impôts en février comme il le faisait à chaque année, et qu’il a alors signé les documents que l’intimé voulait qu’il signe.

[80]        Il mentionne qu’après la signature des documents par son père en février 2006, l’intimé lui avait dit que J.-G.D. était « surprimé ».

[81]        Le témoin indique qu’il n’était pas impliqué directement quant au fond du dossier, mais qu’il a quand même assisté par la suite à de nombreux lunchs entre l’intimé et J.‑G.D. au sujet de l’assurance.

[82]        Le témoin mentionne que l’intimé disait toujours qu’il allait arranger le tout pour que la surprime disparaisse.

[83]        Le témoin explique qu’il comprenait que la surprime à laquelle J.-G.D. était soumise faisait en sorte qu’il y avait une proportion beaucoup moindre des dépôts effectués qui étaient investis étant donné qu’il en coûtait plus pour assurer J.-G.D.

 

[84]        Le témoin mentionne qu’il y a eu une rencontre avec les représentants de Manuvie, l’intimé et J.-G.D. afin de remédier au problème, étant donné qu’il n’y avait pratiquement pas de valeur de rachat, ce qui rendait illusoire la possibilité d’emprunter jusqu’à 75 % de cette valeur de rachat.

[85]        Finalement, le témoin sait qu’aucun montant n’a été retiré de ce produit étant donné qu’il n’y avait pas d’argent de disponible.

[86]        Il mentionne que la prime d’assurance pour la couverture d’assurance était tellement élevée que si le témoin et J.-G.D. avaient connu cette situation, ils n’auraient jamais contracté un tel produit financier[8].

[87]        En contre-interrogatoire, le témoin mentionne que lors des rencontres préliminaires avec l’intimé, il était aussi question d’une assurance-vie pour lui, mais il ne se souvient pas du montant qui avait été alors déterminé.

TÉMOIGNAGE DE DENIS PRESTON

[88]        Par la suite, la procureure de la plaignante informa le comité qu’elle avait l’intention de faire entendre comme dernier témoin, M. Denis Preston, à titre d’expert en planification financière, assurance et placement, et de lui faire déposer son rapport, pièce P-28.

[89]        Le procureur de l’intimé informa le comité qu’il ne remettait pas en question la qualification du témoin, M. Preston, mais qu’il s’objectait à la production de son rapport (pièce P-28) au motif qu’il était de la nature d’une opinion juridique et par ce fait même, non-recevable par le comité.

[90]        Les procureurs des parties ont présenté leurs arguments et autorités et le comité a alors pris l’objection sous réserve quant au dépôt du rapport, pièce P-28.

DÉCISION SUR L’OBJECTION AU DÉPÔT DU RAPPORT PRÉPARÉ PAR DENIS PRESTON, PIÈCE P-28

[91]        Après avoir pris connaissance du rapport, pièce P-28, et après avoir écouté les arguments des parties, le comité rejette l’objection du procureur de l’intimé et permet la production du rapport, pièce P-28, pour les motifs ci-après énoncés.

[92]        Le comité constate que les trois (3) questions posées à Denis Preston par la syndique étaient les suivantes :

« 1.   Le représentant Daniel Charlebois a-t-il agi en conseiller consciencieux en faisant souscrire à son client le produit d’assurance-vie Innovision?

  2.    En 2006, quels étaient les avantages et les inconvénients des produits Innovision et Performax discutés et proposés?

 3.     Est-ce que la souscription d’une police d’assurance-vie Innovision avec un capital assuré de 3 000 000 $ convenait à la situation financière et aux objectifs d’investissement de J.-G.D.? »

[93]        Le rapport P-28 porte donc sur les normes et bonnes pratiques (question 1) et quant aux particularités des produits Performax et InnoVision (questions 2 et 3).

[94]        Le procureur de l’intimé s’oppose à la production du rapport de Denis Preston (pièce P-28) aux motifs que ce dernier a donné une opinion sur l’objet même de ce qui est couvert par les chefs d’accusation de la plainte, à savoir :

1.         À Saint-Jean-sur-le-Richelieu, le ou vers le 3 février 2006, l’intimé n’a pas exposé à J.-G.D., de façon complète, exacte et objective, la nature, les avantages et les inconvénients du contrat d’assurance vie Innovision portant le numéro […] qu’il lui a conseillé de souscrire, contrevenant ainsi aux articles 16, 28 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2), 12, 13, 14 et 16 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D-9.2, r.3);

2.         À Saint-Jean-sur-le-Richelieu, le ou vers le 3 février 2006, l’intimé a fait souscrire à son client J.-G.D. le contrat d’assurance vie Innovision portant le numéro […], pour un capital assuré de 3 millions $, ce qui ne convenaient pas à ses besoins financiers, sa situation financière et personnelle, ainsi que ses objectifs de placement, contrevenant ainsi aux articles 16 et 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2);

3.         À Saint-Jean-sur-le-Richelieu, entre les mois de février 2006 et mars 2009, l’intimé a fait à J.-G.D. des représentations fausses, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur quant au contrat d’assurance vie Innovision portant le numéro […]qu’il lui a conseillé de souscrire, notamment en lui affirmant que l’assureur avait commis une erreur en le surprimant et qu’il réduirait rétroactivement le montant de la prime facturée, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2), 11, 12, 16 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D-9.2, r.3).

[95]        Plus particulièrement, le procureur de l’intimé cite l’affaire Parizeau c. Lafrance[9], où on retrouve au paragraphe 20 le passage suivant :

« [20] (…) Le rapport d'expert du professeur Ouellette est une opinion juridique dans son sens le plus classique. Il y expose son opinion sur ce qu'était l'état du droit québécois et canadien et l'incertitude juridique qui, selon lui, régnait encore en octobre 1994, au moment où le Comité de discipline a rendu les décisions qu'on lui reproche et pour lesquelles ses membres sont maintenant poursuivis en dommages. »

[96]        Il cite de plus les jugements de la Cour supérieure du Québec rendus dans les affaires Claveau c. Couture[10] et Pormerleau c. Municipalité de Lambton[11].

[97]        Dans l’affaire Claveau, le tribunal était alors saisi d’une requête par les défendeurs lui demandant de déclarer irrecevable le rapport de l’arpenteur-géomètre produit par les demanderesses.

[98]        L’Honorable Martin Bureau, j.c.s., avait alors accueilli la requête et rejeté le rapport de l’arpenteur-géomètre pour les motifs suivants :

« [40]            Dans ce dossier, le rapport de l'arpenteur-géomètre Michel Perreault n'est pas un document technique. Il est beaucoup plus une "opinion juridique" fondée sur des faits qu'il considère avérés et une interprétation des contrats et à des gestes posés par les parties.

[41]            Ce que l'on constate à la lecture de cette expertise, c'est que l'arpenteur-géomètre "rend jugement" au lieu et place du juge qui sera appelé à entendre cette affaire. Son opinion pour l'essentiel n'est pas fondée sur des calculs, des levées techniques ou des opérations de mesurage, mais sur l'analyse de contrats, de faits et de circonstances.

[42]            De la même façon qu'une opinion juridique soumise à un juge pourrait le guider dans sa réflexion, ce rapport pourrait servir d'outil de référence. Toutefois, de la même façon qu'une opinion juridique ne peut être considérée comme une expertise et n'est pas recevable en preuve, le processus utilisé par l'arpenteur-géomètre Michel Perreault et le résultat de ses démarches ne peuvent être admis en preuve.

[43]            Son travail excède les aspects techniques pour lesquels il aurait pu aider le tribunal et constitue un empiétement non permis dans le rôle du juge. Peut-être s'agit-il aussi d'un empiètement dans le rôle des avocats mais ce n'est pas ce que le tribunal a à décider.

[44]            De la même façon que l'usage d'opinions juridiques n'est pas permis, l'opinion élaborée par l'arpenteur-géomètre ne peut l'être puisqu'elle constitue une "opinion juridique". »

[99]        Avec respect pour l’opinion contraire, le comité est d’opinion que le rapport P-28 est admissible en preuve, car il ne constitue pas une opinion juridique au sens des arrêts ci-haut mentionnés et est au contraire tout à fait susceptible d’éclairer le comité afin qu’il puisse rendre sa décision en l’espèce.

[100]     En effet, les trois (3) questions soumises à l’expert concernent les pratiques et les normes d’un représentant (question 1) et portent sur les particularités des produits d’assurance concernés en la présente instance (questions 2 et 3).

[101]     En ce qui concerne la première question posée, l’expert, à son rapport, élabore et discute de la concordance entre le produit concerné, le type de besoins du client et du devoir d’information d’un représentant en assurance-vie.

[102]     Pour ce qui est de la question numéro 2, l’expert élabore sur les avantages et les inconvénients sur les produits concernés en l’instance.  Il s’agit donc d’une question tout à fait technique.

[103]     Finalement, en ce qui concerne la question 3, l’expert répond à la question de savoir si la police d’assurance-vie InnoVision avec un capital assuré de 3 000 000 $ convenait à la situation financière et aux objectifs d’investissement de J.-G.D.

[104]     Dans Roberge c. Bolduc[12], la Cour suprême du Canada s’exprime ainsi :

« Le témoignage de l’expert est admissible pourvu que l’expert possède les qualités requises et que son témoignage soit nécessaire ou utile au tribunal aux fins de trancher les questions de caractère technique ou scientifique. »

[105]     Sous réserve que le témoin M. Preston soit déclaré expert, le comité rappelle que son rapport ne lie aucunement le comité, lequel demeure le seul maître de l’appréciation de l’ensemble de la preuve pour déterminer si l’intimé est coupable des trois (3) chefs d’accusation qui lui sont reprochés.

[106]     En tant qu’expert, le rôle de M. Preston se limitera à fournir une opinion sur des normes et pratiques généralement connues dans l’industrie de même que sur les produits d’assurance spécifiques afin d’aider le comité à rendre une décision éclairée sur les accusations portées par la plaignante contre l’intimé.

[107]     Au même titre qu’en matière de responsabilité médicale où des experts peuvent éclairer une cour de droit commun par la production de rapports sur les bonnes pratiques en matière médicale, il apparaît au comité tout à fait acceptable et de bon droit qu’une expertise sur la bonne pratique en matière d’assurance puisse être déposée pour aider le comité à rendre une décision sur le sujet.

[108]     Il ne faut pas confondre le concept de l’admissibilité d’une preuve et celui de sa valeur probante :

« [46]  Avec grands égards, M. Martel confond le concept d’admissibilité en preuve et celui de la pertinence. Il ne s’agit pas, en l’espèce, d’une question d’irrecevabilité du rapport de l’expert du Syndic mais plutôt de la valeur probante du témoignage de ce témoin qui a, rappelons-le, été dûment qualifié d’expert et de son rapport. Il revenait au Comité d’exercer sa propre compétence en accordant aux divers éléments en découlant la valeur probante qu’il a bien voulu y accorder. En ce faisant, le Comité n’a commis aucune faute ou erreur de droit qui puisse justifier l’intervention de la Cour du Québec. »[13]

[109]     En l’espèce, comme il le fera pour l’ensemble de toute la preuve, ce sera au comité d’apprécier la valeur probante du rapport P-28, si le témoin M. Preston est déclaré expert.

[110]     Pour ces motifs, le comité rejette l’objection du procureur de l’intimé et déclare recevable en preuve le rapport de M. Preston, pièce P-28, sous réserve évidemment qu’il soit déclaré expert.

[111]     À cet effet, suite à un court voir-dire où M. Preston a été interrogé et contre‑interrogé sur son expérience académique et professionnelle, le comité a déclaré M. Preston expert en planification financière, assurance et placement, et a permis qu’il soit interrogé à ce titre.

[112]     Par la suite, le témoin identifie et produit son rapport daté du 12 septembre 2014 identifié comme pièce P-28.

[113]     Le témoin a par la suite référé aux trois (3) questions ci-haut mentionnées qui lui avaient été posées par la syndique.

[114]     En ce qui concerne la première question qui était de savoir si l’intimé avait agi en conseiller consciencieux en faisant souscrire à son client le produit d’assurance InnoVision, il mentionne tout d’abord que l’intimé a bien fait de conseiller J.‑G.D. de prendre une assurance-vie universelle plutôt qu’une assurance-vie entière participante comme le produit Performax étant donné que ce dernier était soumis à une surprime.

[115]     M. Preston mentionne que l’obligation du conseiller est de fournir une information suffisante au client et, à cet effet, plus la stratégie est complexe, plus l’explication à être donnée au client doit être détaillée.

[116]     Il ne trouve pas de documentation au dossier illustrant comment et quand il pourrait y avoir un emprunt ou un retrait allant jusqu’à 75 %, tel que mentionné par J.-G.D. et son fils, P.D.[14]

[117]     Il a mentionné qu’il a pris connaissance de la version de l’intimé qu’on retrouve aux pièces P-24 et P-25.

[118]     Il mentionne qu’il n’a retrouvé aucune illustration préparée par l’intimé pour expliquer le produit à son client.

[119]     Le témoin explique que le produit Performax est un produit sophistiqué, pas simple à comprendre et qu’il s’agit d’une stratégie financière agressive.

[120]     Relativement aux illustrations données au client à l’effet qu’il pouvait y avoir un rendement à 3 % et à 6 %, le témoin mentionne qu’il était illogique de mettre une illustration de 6 %, en laissant l’argent dans le compte de banque.

[121]     En conclusion, le témoin mentionne qu’il ne retrouve au dossier aucun élément qui indique que l’intimé a bien expliqué les avantages et désavantages d’un investissement, tel que celui que J.-G.D. s’apprêtait à faire avec le produit Performax.

[122]     Relativement à la question numéro 2 qui lui a été posée, à savoir quels étaient les avantages et les inconvénients des produits InnoVision et Performax, le témoin débute par une description générale des deux (2) produits.

[123]     Pour ce qui est du produit Performax, il s’agit d’une assurance-vie entière participante, alors que le produit InnoVision est une assurance-vie universelle.

[124]     Le témoin mentionne qu’à cause de la surprime, il lui apparaît clairement que la planification discutée avec J.-G.D., compte tenu de cette surprime, faisait en sorte que la partie assurance devait être augmentée et celle de placement baissée de telle sorte que pour un dépôt annuel de 200 000 $, la portion placement ne vaudrait plus qu’environ 30 000 $, sans compter les frais de dépôt, alors qu’avant la surprime, on prévoyait avoir une portion placement de 115 000 $, sur un dépôt de 200 000 $.

[125]     Cette situation faisait en sorte que la stratégie proposée ne pouvait fonctionner à cause de la surprime.

[126]     En ce qui concerne la troisième question posée, qui était celle de savoir si la souscription d’une police d’assurance InnoVision avec un capital assuré de 3 000 000 $ convenait à la situation financière et aux objectifs d’investissement de J.-G.D., le témoin donne une réponse nuancée pour la simple et bonne raison qu’il n’a pas pu établir en détail les besoins de J.-G.D.

[127]     Il arrive à la conclusion que l’intimé a trop insisté sur la possibilité d’emprunter et a négligé de vérifier adéquatement les besoins d’assurance de son client.

[128]     Il est d’opinion qu’il n’y a pas eu d’analyse de besoin financiers (ABF) et qu’on peut très difficilement justifier un montant de 3 000 000 $ d’assurance.

[129]     Il mentionne qu’un représentant peut travailler avec un comptable, mais c’est le représentant qui doit lui-même évaluer le besoin d’assurance de son client et il ne peut se fier sur l’opinion du comptable.

[130]     Le témoin mentionne qu’il n’a retrouvé aucune cueillette d’information de la part de l’intimé et qu’il s’agit plus d’une vente de produits que d’une analyse de produits.

[131]     Le témoin comprend que les objectifs de J.-G.D. étaient d’avoir un contrat d’assurance pour une somme d’environ 1 600 000 $ et pour ce faire, il réfère à la pièce P-27, qui est une lettre du comptable de J.-G.D., M. Louis Blain, en date du 3 mai 2012.

[132]     En conclusion, la police d’assurance InnoVision avec un capital assuré de 3 000 000 $ et l’existence d’une surprime de 200 % pour J.-G.D. ne convenait pas à la situation financière et aux objectifs d’investissement de J.-G.D.

[133]     Par la suite, le procureur de l’intimé a contre-interrogé longuement le témoin.

[134]     Celui-ci a admis qu’un représentant n’a pas à avoir les compétences et les connaissances d’un fiscaliste ou d’un comptable.

[135]     À la question du procureur de l’intimé qui s’informait d’où le témoin avait acquis son expertise en déontologie, le témoin mentionne que c’est par la pratique, les cours de formation et dans le cadre de ses témoignages à la Chambre de la sécurité financière qu’il a acquis une telle expertise.

[136]     Au niveau de la conformité, son expérience provient de la pratique privée.

[137]     Il est d’opinion qu’en matière de produits d’assurance, la priorité doit aller à l’assurance et non à l’épargne.

[138]     En d’autres termes, il est d’opinion que la composante épargne d’un produit assurance est accessoire et non pas principale.

[139]     En regard de la problématique de la surprime existant dans le présent dossier, il mentionne qu’il était préférable de choisir le produit InnoVision plutôt que le produit Performax dans les circonstances.

[140]     Le choix de faire acheter un produit d’assurance permanente plutôt que temporaire était aussi une bonne décision.

[141]     Il mentionne par la suite que le représentant d’assurance n’est pas un « preneur de commande ».

[142]     Il indique qu’en 2006, la compagnie de gestion de J.-G.D. n’était pas en place et sa compréhension était que la police d’assurance avait été contractée pour les besoins de J.-G.D. et non pas pour ceux de la compagnie.

[143]     Il admet que le représentant doit toujours travailler avec les experts du client, comme les comptables et les fiscalistes.

[144]     Cependant, il insiste sur le fait que c’est au conseiller de prendre la décision finale quant à la pertinence du produit d’assurance à être choisi pour le client.

[145]     Sa compréhension du témoignage de J.-G.D. est à l’effet que celui-ci a choisi d’aller avec une couverture de 3 000 000 $ suite à la suggestion de l’intimé.

[146]     Il réitère le passage mentionné à la page 8 de son rapport P-28, où il est indiqué « il est important qu’un représentant explique bien la fiscalité de l’assurance-vie ».

[147]     Il indique aussi que dans la grande majorité des cas, les clients ne lisent pas les documents, se fiant entièrement au professionnel, ce qui oblige le représentant d’expliquer aux clients la teneur des documents transmis.

[148]     Il mentionne qu’un représentant ne doit pas relire toute la documentation avec le client, mais plutôt de bien s’assurer que le client a compris la nature et le contenu des documents.

[149]     Il témoigne à l’effet qu’il faut faire une différence entre un consommateur sans connaissance en affaires, et un consommateur qui est un homme d’affaires comme J.-G.D.

[150]     À la question de savoir si pour un représentant, la définition de client peut inclure aussi ses mandataires, le témoin mentionne que non, car le client est celui qui signe le contrat.

[151]     La compréhension de la situation en ce qui concerne la couverture d’assurance que J.-G.D. voulait prendre faisait en sorte que le bénéficiaire en serait la compagnie de gestion et non pas E.D. Inc.

[152]     Sa compréhension de la situation était que la prise du produit d’assurance-vie universelle InnoVision était faite pour les besoins de J.-G.D. et non pas pour les besoins de E.D. Inc.

 « Q. Donc, vous, ce que vous comprenez de la situation, monsieur Preston, c’est que la, l’assurance-vie, la seule qui avait été prévue à ce moment-là, elle n’avait aucun but pour s’assurer de la continuation de l’entreprise E.D. Inc.

R. Exactement.

Q. E.D. Inc. n’aurait rien à voir dans la planification financière de M. D.?

R. Rien à voir, c’est un grand mot.  Il est là quand même là.

Q. […] ce n’était pas de s’assurer par exemple, qu’advenant le décès de l’actionnaire principal, fondateur de la compagnie, que la compagnie, on ne fasse pas un autre x dessus?

R. Moi, ce n’est pas ce que j’ai compris du dossier, ni du témoignage là, o.k.  C’est un besoin plus personnel, puis c’est correct que le contrat soit souscrit dans une compagnie parce que ça coûte meilleur marché. » [15]

[153]     Donc, la compréhension du témoin est à l’effet que le but de l’assurance-vie universelle était qu’au décès, la prestation d’assurance serait payée à la compagnie de gestion au bénéfice évidemment de son seul actionnaire, à savoir J.-G.D. et sa succession.

[154]     En d’autres termes, pour le témoin, le but de l’assurance-vie universelle n’avait pas comme but premier de permettre la continuation de E.D. Inc..

[155]     Il mentionne aussi qu’il ne retrouve rien au dossier qui montre que le but de l’assurance-vie universelle InnoVision visait le rachat des actions de E.D. Inc. détenues par J.-G.D. et, à cet effet, il réfère à la proposition d’assurance-vie et maladie grave, où à la question de savoir pourquoi l’intimé souscrivait à l’assurance, il y est indiqué « Bon patrimonial de société » et qu’il n’y est pas indiqué que c’était pour permettre le rachat des actions de E.D. Inc.[16].

[156]     Le témoin constate donc que le but de l’assurance-vie était individuel pour J.-G.D. et non pas corporatif, c’est-à-dire pour couvrir le rachat des actions de E.D. Inc. détenues par J.-G.D., advenant son décès, par la compagnie ou les autres actionnaires de E.D. Inc.

[157]     Par « Bon patrimonial de société », le témoin explique que pour lui, cela signifie qu’on va se servir d’une société pour faire en sorte de maximiser la valeur successorale du client[17].

[158]     Cela termina le contre-interrogatoire du témoin M. Denis Preston et la procureure de la plaignante informa le comité que sa preuve était close sous réserve de pouvoir interroger son témoin-expert suite à la présentation des témoins de l’intimé en défense.

PREUVE DE L’INTIMÉ

[159]     L’intimé fit entendre quatre (4) témoins en défense.

TÉMOIGNAGE DE ME RENAUD LANTHIER

[160]     Le premier témoin présenté par l’intimé fut l’avocat de E.D. Inc. depuis 2006 Me Renaud Lanthier.

[161]     Suite à une question soulevée par le témoin, le comité informa le procureur de l’intimé qu’il devra limiter ses questions afin de préserver le secret professionnel auquel Me Lanthier est soumis vis-à-vis sa cliente.

[162]     Le témoin mentionne qu’il se souvient avoir rencontré l’intimé de même que le représentant de E.D. Inc.

[163]     Il ne se souvient pas du nom des compagnies qui ont été créées, mais se souvient que le bureau de comptables, Blain, Joyal, Charbonneau, avait préparé un mémo qui prévoyait une stratégie fiscale.

[164]     Il indique que la restructuration de la compagnie a eu lieu en juillet 2006 par la création d’une compagnie de gestion, soit la compagnie […] Québec Inc., tel qu’il appert du document corporatif produit en défense comme pièce I-7.

[165]     Il mentionne qu’il a eu par la suite des mandats ponctuels avec E.D. Inc.

[166]     La procureure de la plaignante n’a pas contre-interrogé le témoin.

TÉMOIGNAGE DE LOUIS BLAIN

[167]     Le deuxième témoin entendu à la demande de l’intimé fut le comptable Louis Blain.

[168]     Ce dernier mentionne qu’en 2005 et 2006, il pratiquait au sein de l’étude Blain, Joyal, Charbonneau, et ce, depuis 1985.

[169]     Il indique être le comptable de E.D. Inc. depuis 1996 et qu’il connaît J.-G.D. depuis environ une vingtaine d’années.

[170]     Il ajoute qu’il a eu à préparer un mémo en 2005 pour faire un gel successoral concernant la planification fiscale de J.-G.D. et de E.D. Inc.

[171]     Il témoigne à l’effet que cette structure prévoyait une fiducie et une compagnie de gestion.

[172]     Le rôle de la fiducie était de reporter la plus-value future de l’entreprise aux bénéficiaires de la fiducie qui étaient les enfants de J.-G.D. et son frère.

[173]     Il explique qu’un gel successoral avait aussi été prévu faisant en sorte que le capital‑actions de E.D. Inc. détenu par J.-G.D. était transformé en actions privilégiées, lesquelles seraient par la suite détenues par la compagnie de gestion, dont J.-G.D. était l’actionnaire unique.

[174]     Le témoin indique qu’il a une connaissance plus grande que la moyenne des produits d’assurance offerts par Manuvie.

[175]     Plus particulièrement, il indique qu’il a rencontré Mme Diane Hamel de Manuvie à plusieurs reprises pour discuter de son assurance-vie universelle qu’il avait personnellement contractée avec Manuvie.

[176]     Il doute cependant que J.-G.D. avait la même connaissance que lui des produits d’assurance-vie.

[177]     Il mentionne qu’il était présent lors d’une rencontre entre l’intimé et J.-G.D. pour discuter des produits d’assurance.

[178]     Il mentionne que J.-G.D. se fie grandement sur les gens en qui il a confiance et n’est pas quelqu’un qui pose beaucoup de questions.

[179]     Il indique aussi que J.-G.D. est une personne qui écoute ses conseillers mais qui est avant tout un entrepreneur qui est capable de prendre lui-même ses décisions.

[180]     J.-G.D. avait alors 70 % du capital-actions de E.D. Inc. alors que son frère, Y.D., et ses fils, F.D. et P.D., en détenaient 30 %.

[181]     Il se souvient d’avoir assisté à une présentation des produits d’assurance de Manuvie à l’Hôtel Mortagne et que l’associé de l’intimé, M. Richard Benoit, était alors présent.

[182]     Il indique que la rencontre a porté sur le produit Performax de Manuvie.

[183]     Il mentionne que M. Jean-François Leroux, actuaire de Manuvie, a déjà participé à ce genre de rencontre.

[184]     Il témoigne à l’effet qu’il connaît M. Richard Benoit depuis 1995 et qu’il collaborait alors avec lui pour les besoins d’assurance de ses clients.

[185]     Il ajoute qu’il n’est pas un expert en produits d’assurance mais plutôt un expert en fiscalité des produits d’assurance.

[186]     Il indique que c’est lui le premier qui a parlé du produit Performax de Manuvie à J.-G.D.

[187]     Il mentionne que J.-G.D. avait une bonne connaissance du domaine fiscal et qu’il s’entourait de conseillers dans le domaine.

[188]     Il se souvient d’une rencontre où J.-G.D. était présent avec son fils, P.D., et à laquelle rencontre étaient aussi présents l’avocat Me Renaud Lanthier et l’intimé.

[189]     Lors de cette rencontre, on avait demandé à l’intimé de les conseiller en matière d’assurance.

[190]     De mémoire, il croit que cette rencontre aurait eu lieu après la réorganisation corporative en automne 2006.

[191]     Il se souvient avoir eu une conversation téléphonique avec l’intimé concernant la surprime à laquelle J.-G.D. serait soumis, et que l’intimé lui avait dit que néanmoins le produit InnoVision pourrait toujours être bon pour le client, nonobstant l’existence d’une telle surprime.

[192]     Il se souvient aussi d’avoir mentionné à l’intimé d’aller lui-même en discuter avec J.-G.D. et que c’est ce dernier qui devait décider, car c’était J.-G.D. le client de l’intimé.

[193]     Il mentionne qu’à sa lettre du 3 mai 2012 à J.-G.D. (pièce P-27), il avait identifié le besoin d’assurance-vie à environ 1 500 000 $.

[194]     Cependant, avec le scénario Performax, il avait été déterminé que pour avoir un scénario intéressant permettant une valeur de rachat suffisante, il devait y avoir une couverture d’assurance de 3 000 000 $.

[195]     En référant à la pièce P-4, soit le questionnaire financier confidentiel signé par J.‑G.D. le 29 septembre 2005, il y est mentionné par J.-G.D. les raisons pour lesquelles, il prenait le produit d’assurance-vie, c’est-à-dire pour protéger sa succession, protéger les trois (3) autres actionnaires de E.D. Inc. et amasser des sommes d’argent à l’abri de l’impôt[18].

[196]     Il mentionne que selon lui, la raison pour laquelle l’assurance-vie universelle était contractée par J.-G.D. était pour permettre le rachat des actions de E.D. Inc. détenues par J.-G.D. à son décès sans que la compagnie opérante ne soit obligée d’emprunter pour ce faire.

[197]     En contre-interrogatoire, le témoin mentionne que son expérience dans le domaine d’assurance provient de son expérience personnelle et aussi de façon connexe par la mise en place de mandats pour certains clients.

[198]     Le témoin lui-même, au début des années 2000, avait contracté le produit Performax, par l’intermédiaire de sa corporation de gestion, dans le cadre d’une planification fiscale similaire à celle qu’il avait préparée pour J.-G.D.

[199]     Il avait recommandé à J.-G.D. le produit Performax parce qu’il avait constaté personnellement que le rendement de Performax était supérieur à un autre produit d’assurance intitulé Millenium.

[200]     Il indique que sa relation d’affaires avec l’intimé s’est créée par l’intermédiaire de M. Richard Benoit, collègue de travail de l’intimé.

[201]     Il mentionne qu’il avait référé l’intimé à J.-G.D., mais que suite à la plainte faite par ce dernier concernant l’intimé, il n’a plus référé d’autres clients à ce dernier.

TÉMOIGNAGE DE DIANE HAMEL

[202]     Le prochain témoin entendu à la demande de l’intimé fut Mme Diane Hamel, vice‑présidente adjointe en planification fiscale et successorale chez la Financière Manuvie.

[203]     Le témoin a une formation académique en fiscalité et en assurance.

[204]     Elle est dans le domaine de l’assurance depuis le 1er mai 1995 et a toujours été à Manuvie.

[205]     Elle connaît bien les produits d’assurance-vie universelle, de vie entière et temporaire.

[206]     Elle mentionne qu’elle agit comme conférencière à l’Association de planification fiscale et financière (APFF).

[207]     Elle est aussi chargée de cours au programme de maîtrise du HEC.

[208]     Elle se souvient avoir rencontré M. Blain lors d’une présentation où il était présent.

[209]     Elle mentionne qu’en 2005 et 2006, sa responsabilité chez Manuvie était d’agir comme support technique pour les conseillers en sécurité financière.

[210]     Elle donnait aussi des formations à des comptables œuvrant dans le domaine de l’assurance.

[211]     Elle mentionne qu’elle connaît l’intimé depuis le début des années 2000.

[212]     Elle indique qu’elle l’a connu lors de formations qu’elle avait données.

[213]     Elle mentionne qu’elle avait aussi des discussions avec ce dernier lorsqu’il avait des questions sur les différents produits d’assurance.

[214]     Elle témoigne à l’effet qu’elle se souvient que l’intimé avait des clients avec Manuvie à l’époque et qu’il était à ce moment-là un des conseillers élite à cause de son important volume d’affaires.

[215]     Elle ne se souvient pas des cas particuliers où elle a discuté avec l’intimé et aussi de cas où il y aurait été question d’une surprime.

[216]     Le témoin connaît bien le concept « Bon Patrimonial de Société » existant à Manuvie.

[217]     En fait, il s’agit d’une stratégie en vertu de laquelle on compare la valeur successorale nette du produit d’assurance-vie avec la valeur successorale nette que produirait un autre placement.

[218]     À la question par le procureur de l’intimé de la distinction entre les produits Performax et InnoVision, le témoin indique qu’elle n’est pas une experte, mais qu’elle sait à tout le moins que le produit InnoVision est une assurance-vie universelle.

[219]     Elle mentionne qu’il y a des règles pour les planificateurs financiers de Manuvie pour déterminer l’acceptabilité du montant d’assurance étant donné qu’on ne peut pas s’assurer pour n’importe quel montant.

[220]     Le témoin indique qu’il y a des paramètres relativement à la tarification et que les courtiers ont des guides d’analyse pour les aider à déterminer le montant de couverture.

[221]     Elle mentionne qu’une société de gestion peut être titulaire ou bénéficiaire d’une assurance-vie comme il est également possible que ça soit la compagnie opérante qui le soit.

[222]     Elle témoigne à l’effet qu’il est possible d’avoir une compagnie de gestion comme titulaire et une compagnie opérante comme bénéficiaire du produit de l’assurance-vie.

[223]     Selon elle, la connaissance du produit Performax par l’intimé était bonne.

TÉMOIGNAGE DE PIERRE OLIVIER GIRARD-SAROLEA

[224]     Le témoin est actuaire à Manuvie depuis janvier 2013.

[225]     Il connaît très bien les produits Performax et InnoVision qui existent depuis près de vingt (20) ans à Manuvie.

[226]     Le témoin explique qu’il s’agit de deux (2) produits d’assurance permanente, un étant de vie entière (Performax) et l’autre étant un produit d’assurance-vie universelle (InnoVision).

[227]     Le témoin mentionne que généralement, un produit d’assurance-vie entière participante est plus dispendieux au niveau de la prime qu’une assurance‑vie universelle et en conséquence, on s’attend à un certain retour sous forme de participation qui va générer des valeurs à long terme dans le produit.

[228]     Il mentionne que généralement, une assurance-vie universelle va être moins dispendieuse, mais il n’y a pas normalement un retour de prime sous forme de participation.

[229]     Aussi, il indique que le produit d’assurance-vie universelle est beaucoup plus flexible au niveau investissement que le produit d’assurance-vie entière.

[230]     Il témoigne à l’effet qu’avec un produit comme Performax participante, lorsqu’on fait des dépôts supplémentaires, on achète de l’assurance additionnelle à une valeur de rachat qui lui est associée.

[231]     Au contraire, en ce qui concerne les produits d’assurance-vie universelle, les dépôts additionnels qu’on fait dans le contrat sont alloués à des comptes d’investissement que le client choisit et, par conséquent, ce dépôt additionnel n’augmente pas le montant d’assurance, mais vient plutôt  accroître le montant du capital-décès au niveau de l’investissement[19].

[232]       Enfin, le témoin mentionne qu’en cas de surprime, le produit Performax au niveau du coût de l’assurance sera plus influencé que dans le cas d’un produit d’assurance-vie universelle comme InnoVision.

TÉMOIGNAGE DE CARMEN SIMARD

[233]     Le procureur de l’intimé fit entendre par la suite Mme Carmen Simard, qui est directrice des services administratifs chez Groupe CMA, cabinet de services financiers.

[234]     Elle indique qu’elle est à l’emploi de Groupe CMA depuis dix-neuf (19) ans.

[235]     Elle indique qu’elle a une équipe administrative qui s’occupe de recevoir tous les documents administratifs des conseillers financiers du réseau de Groupe CMA.

[236]     Elle mentionne qu’elle connaît l’intimé depuis plus de quinze (15) ans comme conseiller en sécurité financière chez Groupe CMA.

[237]     Elle se souvient du dossier de l’assurance-vie universelle de J.-G.D.

[238]     Elle indique que ce dossier était « surprimé » médicalement et se souvient que cette acceptation a eu lieu vers la fin novembre 2005 pour un produit Performax avec une police optionnelle InnoVision.

[239]     Elle se souvient aussi que la surprime était de l’ordre de 200 % et que la police d’assurance-vie a été finalement contractée en février 2006 avec InnoVision.

[240]     Elle indique que la surprime pouvait être révisée selon Mme Andrée Carrier de Manuvie, sous réserve de certains critères, dont par exemple, un test à l’effort et une perte de poids.

[241]     Elle mentionne qu’une demande de révision avait été faite en février 2006 et que finalement, la surprime avait été baissée de 200 % à 150 %.

[242]     Elle indique aussi que c’est Mme Carrier de Manuvie qui a pris la décision pour baisser la surprime à 150 %.

[243]     Elle indique qu’elle ne croit pas qu’il y ait eu de nouvelles demandes médicales après cette décision.

[244]     Elle mentionne que l’intimé suivait le dossier avec acharnement et qu’il voulait toujours savoir où on en était.

[245]     Elle dépose et identifie comme pièce I-8, le courriel du 31 juillet 2007 de Mme Josie Siggia de Groupe CMA à l’intimé où elle indique qu’on tentait toujours en juillet 2007 d’éliminer la surprime.

[246]     Le témoin dépose aussi par la suite comme pièce I-9 un courriel de Mme Andrée Carrier de Manulife à Mme Josie Siggia, indiquant que la surprime de 150 % est la meilleure offre disponible dans le cas de J.-G.D. et qu’il y avait une possibilité de reconsidérer la décision dans un (1) an, lequel courriel avait été envoyé par Mme Siggia à l’intimé à la même date, soit le 12 décembre 2006.

[247]     En contre-interrogatoire par la procureure de la plaignante, le témoin mentionne que les suivis et les rappels dans le dossier de J.-G.D. chez Groupe CMA se faisaient par envoi papier ou par téléphone par Mme Siggia et que le tout n’était pas informatisé à l’époque.

TÉMOIGNAGE DE L’INTIMÉ

[248]     Tout d’abord, l’intimé explique son cheminement professionnel en mentionnant qu’il a commencé sa carrière en 1979, à titre de représentant pour la London Life.

[249]     Il indique qu’en 1985, il a débuté dans le courtage de produits financiers, ce qu’il fait toujours aujourd’hui.

[250]     Par la suite, en 1991, il s’est concentré surtout dans le marché corporatif de l’assurance.

[251]     Il mentionne que M. Louis Blain lui a été présenté par M. Richard Benoit.

[252]     Richard Benoit était un représentant qu’il rencontrait fréquemment dans des présentations en matière de produits d’assurance.

[253]     M. Benoit n’avait pas beaucoup d’expérience dans le marché corporatif étant plutôt concentré dans le marché de personnes.

[254]     Lors d’une rencontre organisée par M. Blain et M. Benoit à l’Hôtel Mortagne durant l’été 2005, il a rencontré pour la première fois J.-G.D.

[255]     Il mentionne qu’à ce moment-là, Louis Blain et Jean-François Leroux, actuaire, avaient fait une présentation sur le « Bon Patrimonial de la Société ».

[256]     Il indique que suite à cette présentation, par l’intermédiaire de M. Benoit, il a rencontré J.-G.D. au bureau de E.D. Inc. avec M. Benoit.

[257]     Il témoigne à l’effet qu’à ce moment-là, J.-G.D. avait besoin d’assurance et il a été question avec lui des différents genres de produit d’assurance et de son assurabilité.

[258]     Il avait alors demandé à J.-G.D. quelle était selon lui la valeur de E.D. Inc., ce à quoi, J.-G.D. lui avait mentionné environ 8 000 000 $.

[259]     À la question de savoir d’où est venu le montant de la couverture d’assurance de 3 000 000 $, l’intimé mentionne que le comptable, M. Blain, avait mentionné une couverture d’environ 1 700 000 $, qu’il avait été discuté d’un montant de 2 000 000 $ et que finalement, on aurait déterminé la somme de 3 000 000 $ de façon assez aléatoire, en se disant que si J.-G.D. était assurable alors il en profiterait[20].

[260]     En ce qui concerne les objectifs de J.-G.D., il était question de protéger son patrimoine au décès et de protéger le patrimoine de E.D. Inc., car en vertu de  la planification fiscale mise en place, il n’y avait pas de roulement prévu en faveur de son épouse.

[261]     En référant à la pièce P-4, soit le questionnaire financier confidentiel, il mentionne que l’information qui s’y trouve lui avait été donnée par M. Blain et non pas par J.‑G.D., car il devait toujours entrer en contact avec M. Blain pour obtenir l’information pertinente concernant J.-G.D.

[262]     Par la suite, l’intimé reconnaît ses notes manuscrites prises lors de sa première rencontre avec J.-G.D., lesquelles sont produites comme pièce I-10.

[263]     Il mentionne que J.-G.D. aimait ses explications, mais qu’il était plus ou moins attentif, étant donné qu’il devait répéter la même explication à plus d’une reprise.

[264]     Il indique que comme document financier, il avait obtenu de M. Blain le bilan de E.D. Inc., pièce I-1.

[265]     Il mentionne qu’il n’avait pas obtenu d’information personnelle de J.-G.D.

[266]     Il souligne qu’à l’époque, il n’y avait pas de questionnaire d’analyse de besoins financiers pour le secteur corporatif.

[267]     Par la suite, il dépose un document coté comme pièce I-11 qui est une fiche de communication contenant différents calculs préparés par l’intimé.

[268]     En référant à la page 2 de la pièce I-11, l’intimé mentionne qu’il se remémore que J.-G.D. parlait toujours du 75 % et il croit qu’il s’agit probablement de la possibilité existant alors à la Banque Manuvie, d’emprunter sur la valeur de rachat de la police d’assurance jusqu’à 75 % de cette valeur de rachat.

[269]     Ce document pièce I-11 réfère à différents scénarios impliquant non seulement J.‑G.D., mais aussi ses fils et son frère, qui étaient aussi actionnaires de E.D. Inc.

[270]     L’intimé reconnaît et produit comme pièce I-12, un document daté du 31 août 2005, qui représente l’information reçue de Louis Blain concernant E.D. Inc.

[271]     Il mentionne que lorsque la décision de l’assureur concernant la surprime a été connue en décembre 2005, il savait que J.-G.D. était en Floride.

[272]     Il a alors parlé à P.D. et lui a dit que le dossier était « surprimé » à 200 %, mais que pour protéger J.-G.D., il était pour prendre une assurance temporaire en attendant son retour de Floride.

[273]     Il indique qu’il a appelé P.D. à plusieurs reprises pour qu’il règle la situation.

[274]     Il mentionne que J.-G.D. n’acceptait pas qu’il soit soumis à une surprime, compte tenu qu’il se disait être en bonne santé.

[275]     L’intimé ajoute qu’à son retour en février 2006, lors de la signature de la proposition d’assurance-vie universelle, J.‑G.D. savait qu’il était « surprimé », mais qu’entre décembre 2005 et février 2006, J.-G.D. ne le savait probablement pas.

[276]     L’intimé mentionne qu’il est impossible que J.-G.D. puisse dire qu’il ne savait pas en février 2006 qu’il était « surprimé », compte tenu de l’existence du document intitulé « Ajout à la proposition » signé par J.-G.D. le 3 février 2006[21], où il y est indiqué que le contrat est établi moyennant une surprime pour risque aggravé.

[277]     Le témoin réfère aussi par la suite au document suivant de la pièce P-7[22], lequel document constitue l’autorisation de J.-G.D. de faire parvenir au médecin indiqué audit document les renseignements de son état de santé en regard de la proposition d’assurance-vie contractée.

[278]     Par la suite, l’intimé indique que J.-G.D. n’était pas obligé de souscrire à une police pour une couverture de 3 000 000 $, qu’il avait la possibilité d’aller pour un montant inférieur, mais que c’était lui qui insistait pour une telle couverture et que ce n’est qu’en mars 2009 que J.-G.D. lui a demandé de baisser l’assurance-vie universelle à 1 000 000 $.

[279]     Finalement, il dépose comme dernière pièce I-13 un document intitulé « Scénario actuel / Dossier E.D. Inc. » daté du 13 décembre 2006.

[280]     Il mentionne que c’est lui qui a préparé ce document en prévision de la rencontre avec M. Blain et Me Lanthier.

[281]     Il souligne que la rencontre a duré plus de deux (2) heures.

[282]     À cette rencontre, il a été discuté de la pertinence d’avoir une assurance permanente versus une temporaire.

[283]     Par conséquent, il mentionne qu’il est faux de prétendre qu’il n’a jamais discuté du montant de la couverture d’assurance de 3 000 000 $ avant 2009.

[284]     Il indique aussi qu’il avait dit à J.-G.D. que la composante épargne de la police d’assurance-vie universelle InnoVision devait être gérée par J.-G.D. lui‑même et non pas par l’intimé ou par Manuvie.

[285]     Il témoigne à l’effet que la mention du 75 % faite par J.-G.D. vient peut-être du fait qu’à l’époque, le produit Performax en moyenne donnait une valeur de rachat correspondant à environ 75 % des dépôts effectués par l’assuré[23].

[286]     Relativement à la pièce P-24, qui est la lettre du comptable de J.-G.D., Louis Blain, il mentionne que ce qui est écrit par M. Blain n’est pas entièrement exact.

[287]     Par la suite, en référant à la pièce P-26 qui est la lettre de Manuvie adressée à J.‑G.D. expliquant la situation, il reconnaît que les chiffres qui y sont mentionnés sont exacts.

[288]     En ce qui concerne le chef numéro 3 de la plainte qui allègue que l’intimé aurait fait des représentations fausses et trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur J.‑G.D. quant au contrat d’assurance-vie InnoVision, en lui disant que l’assureur éliminerait la surprime rétroactivement, il mentionne que c’est inimaginable qu’il ait pu dire une telle chose étant donné qu’il est dans le domaine de l’assurance depuis trop longtemps pour lui avoir mentionné de tels propos.

[289]     Il témoigne à l’effet qu’il n’a pas commis les infractions décrites aux chefs 1 et 2 de la plainte.

[290]     Plus particulièrement quant au chef numéro 2, il indique qu’en ce qui concerne le montant de la couverture d’assurance, soit 3 000 000 $, il avait été établi un montant plus élevé que nécessaire en sachant que par la suite, on pouvait diminuer le montant de la couverture, et ce, sans préjudice pour J.-G.D.

[291]     Par la suite, en contre-interrogatoire, le témoin reconnaît le document identifié comme pièce P-30, qui constitue le tableau résumant sa rémunération totale pour le contrat d’assurance-vie universelle de J.-G.D.

[292]     Il constate au document que la rémunération totale pour le dossier de J.-G.D. revenant à l'intimé et/ou ses associés était de l’ordre de 207 000 $.

[293]     Par la suite, le témoin est interrogé par la procureure de la plaignante sur la question du 75 % mentionnée par J.-G.D.

[294]     Il admet avoir parlé du 75 % dans le contexte d’un prêt par la Banque Manuvie à un client qui peut donner son contrat en garantie et où la banque pouvait prêter au client jusqu’à 75 % de la valeur de rachat de l’assurance.

[295]     Il mentionne que c’est ce qu’il a dit à J.-G.D. relativement au 75 %[24].

[296]     Il mentionne donc que J.-G.D. aurait tout simplement mal compris l’explication que l’intimé lui avait donnée.

[297]     Une fois le témoignage de l’intimé terminé, le procureur de l’intimé déclara sa preuve close.

RÉ-INTERROGATOIRE DU TÉMOIN DENIS PRESTON

[298]     Par la suite, tel qu’il avait été prévu, l’expert Denis Preston compléta son témoignage.

[299]     Ce témoin mentionne qu’après avoir entendu la preuve présentée par l’intimé, la teneur de son témoignage déjà rendu ne changeait pas.

[300]     Il témoigne à l’effet que J.-G.D. était le seul actionnaire de la compagnie de gestion et à la lettre de M. Blain (pièce P-27), on constate que le besoin d’assurance est plus personnel que corporatif et qu’ultimement, le client est J.-G.D. et non E.D. Inc.

[301]     À partir du témoignage de l’intimé et de la documentation existant dans le présent dossier, il constate que le bénéficiaire de l’assurance-vie universelle était la compagnie de gestion qui a comme seul actionnaire J.‑G.D., et que par conséquent, il conclut que ladite assurance était avant tout au bénéfice de J.-G.D et non pas pour E.D. Inc.

[302]     En ce qui concerne la question du 75 % mentionné par J.-G.D., compte tenu de l’existence de la surprime, il est évident qu’il ne pouvait y avoir en épargne l’équivalent de 75 % des dépôts faits par J.-G.D. et que la valeur de rachat de la police étant minime, la possibilité d’emprunter sur celle-ci n’était pas intéressante.

[303]     En conclusion, le témoin termine son témoignage en disant que la preuve présentée par l’intimé ne change rien aux conclusions qu’il avait déjà présentées au comité.

[304]     La preuve fut déclarée close de part et d’autre par les procureurs des parties, une fois le témoignage de M. Preston terminé.

ANALYSE ET MOTIFS

[305]     L’intimé fait face à trois (3) chefs d’accusation qui concernent la même séquence de faits à savoir la conclusion d’un contrat d’assurance-vie universelle appelée InnoVision avec Manuvie par J.-G.D.

[306]     Après avoir analysé la preuve et entendu les arguments des parties, le comité est d’opinion, pour les motifs ci-après, que la plaignante s’est déchargée de son fardeau de démontrer par prépondérance de preuve que l’intimé est coupable des trois (3) chefs d’accusation.

LA QUESTION DE L’IDENTITÉ DU CLIENT

[307]     Avant d’aborder les motifs pour chacun des trois (3) chefs d’accusation, il y a lieu de disposer immédiatement de l’argument présenté par le procureur de l’intimé lors de sa plaidoirie relativement à l’identité du client mentionné à la plainte et lequel argument vaut pour les trois (3) chefs d’accusation.

[308]     En effet, le procureur de l’intimé a prétendu que les trois (3) chefs d’accusation devraient être rejetés au motif que le véritable client dans le présent dossier n’est pas J.‑G.D., tel que mentionné à la plainte, mais bien plutôt E.D. Inc..

[309]     Il prétend que la police d’assurance-vie universelle InnoVision a été contractée dans un contexte corporatif (E.D. Inc.) et non pas dans un contexte personnel (J.-G.D.) et que les chefs d’accusation devraient être rejetés, car ceux-ci allèguent que le client est J.‑G.D. alors  que dans les faits, E.D. Inc. est la cliente.

[310]     Cet argument est rejeté par le comité.

[311]     En effet, la grande partie de la preuve documentaire produite par la plaignante montre bien que la personne assurée est J.-G.D.

[312]     Ainsi, le questionnaire financier confidentiel (pièce P-4) est clairement à cet effet.

[313]     La police d’assurance concernée, soit celle portant le numéro […] (pièce P‑9), émise par Manuvie (produit InnoVision), indique bien que J.-G.D. en est l’assuré et que E.D. Inc. en est le titulaire et paie les primes mensuelles.

[314]     L’argument du procureur de l’intimé ne tient pas quand on constate l’objet de la nouvelle assurance décrit au questionnaire financier confidentiel signé par J.-G.D.

«

           Protégé (sic) sa succession

 

           Protégé (sic) les 3 autres actionnaires

 

           Amasser les sommes d’argent à l’abri de l’impôt » [25]

[315]     D’ailleurs, l’expert M. Preston est d’opinion que l’assurance contractée par J.-G.D. avait un objectif personnel pour J.-G.D. et qu’ultimement le client en l’espèce était J.-G.D. et non E.D. Inc.

[316]     Le comité est d’opinion que l’objectif de l’assurance était à la fois personnel et corporatif, mais que le client en l’espèce était bien J.-G.D. compte tenu de son intérêt sans équivoque à titre d’assuré de la police, d’actionnaire majoritaire de E.D. Inc., titulaire de ladite police d’assurance et enfin d’actionnaire unique de la compagnie de gestion qui en est le bénéficiaire.

[317]     Par conséquent, le comité rejette ce moyen de défense présenté pour les trois (3) chefs d’accusation de la plainte.

QUANT AU CHEF D’ACCUSATION NUMÉRO 1

[318]     Le premier chef d’accusation reproche à l’intimé de ne pas avoir exposé à J.-G.D. de façon complète, exacte et objective, la nature, les avantages et les inconvénients du contrat d’assurance-vie InnoVision.

[319]     Les articles 16 et 28 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers se lisent comme suit :

« 16.   Un représentant est tenu d’agir avec honnêteté et loyauté dans ses relations avec ses clients.

Il doit agir avec compétence et professionnalisme.

28.       Un représentant en assurance doit, avant la conclusion d’un contrat d’assurance, décrire le produit proposé au client en relation avec les besoins identifiés et lui préciser la nature de la garantie offerte.

Il doit, de plus, indiquer clairement au client les exclusions de garantie particulières compte tenu des besoins identifiés, s’il en est, et lui fournir les explications requises sur ces exclusions. »

[320]     Les articles 12, 13, 14 et 16 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière se lisent comme suit :

« 12. Le représentant doit agir envers son client ou tout client éventuel avec probité et en conseiller consciencieux, notamment en lui donnant tous les renseignements qui pourraient être nécessaires ou utiles. Il doit accomplir les démarches raisonnables afin de bien conseiller son client.

13.    Le représentant doit exposer à son client ou à tout client éventuel, de façon complète et objective, la nature, les avantages et les inconvénients du produit ou du service qu’il lui propose et s’abstenir de donner des renseignements qui seraient inexacts ou incomplets.

14.    Le représentant doit fournir à son client ou à tout client éventuel les explications nécessaires à la compréhension et à l’appréciation du produit ou des services qu’il lui propose ou lui rend.

16.    Nul représentant ne peut faire, par quelque moyen que ce soit, des déclarations ou des représentations incomplètes, fausses, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur. »

[321]     La démarche du conseiller doit guider son client vers une décision éclairée et son obligation va au‑delà de la stricte transmission de l’information à son client[26].

« [39]  L'obligation du représentant va au-delà de l'obligation de simplement transmettre des indications à son client.

 

[40]  La démarche du représentant doit servir à guider son client vers une décision conforme à sa volonté, ses besoins et ses intérêts. »

[322]     La preuve est claire à l’effet que le produit d’assurance envisagé en septembre 2005 pour J.-G.D. par l’intimé était le produit d’assurance-vie entière appelé Performax et décrit au sommaire des couvertures et des paiements[27].

[323]     Le produit Performax est un produit d’assurance-vie entière avec participation.

[324]     Il s’agissait alors d’une couverture totale pour 3 000 000 $ assortie d’une prime annuelle de 130 094,99 $.

[325]     Il était prévu que pour le premier paiement, la somme de 218 241,67 $ serait versée par J.-G.D., laquelle comprenait la première prime annuelle de 130 094,99 $ et un dépôt à titre optionnel de 88 146,68 $.

[326]     En décembre 2005, l’intimé apprend que l’assureur a déterminé que les résultats de santé de J.-G.D. font en sorte que celui-ci est « surprimé » à 200 %.

[327]     Compte tenu de ce changement extrêmement important, l’intimé détermine alors que J.-G.D. devrait plutôt opter pour une assurance-vie universelle appelée InnoVision.

[328]     Contrairement au produit Performax, le produit InnoVision est une assurance-vie universelle qui, en plus de la composante assurance, possède une importante composante épargne.

[329]     Au moment où l’intimé a appris que J.-G.D. était soumis à une surprime, J.-G.D. était en Floride pour l’hiver et ce n’est que le 3 février 2006, alors qu’il était en visite à Montréal, qu’il a rencontré l’intimé et signé ce contrat d’assurance InnoVision (pièce P‑9).

[330]     Selon J.-G.D., la raison première pour laquelle il avait décidé d’investir dans ce genre de produit d’assurance était le fait qu’il pourrait retirer 75 % des primes payées.

[331]     Ainsi, pour un dépôt initial de 169 000 $ au moment de la conclusion du contrat d’assurance, la somme de 125 000 $ devait aller à l’épargne[28].

[332]     L’intimé mentionne qu’il n’a pas fait de telles représentations à J.-G.D. relativement à la possibilité de récupérer 75 % des primes payées.

[333]     Il a expliqué au comité dans un premier temps que le 75 % évoqué par J.-G.D. est plutôt qu’il s’agissait probablement de la possibilité pour lui d’emprunter à la Banque Manuvie jusqu’à 75 % de la valeur de rachat de la police d’assurance, mais sans être catégorique à l’effet que c’était bien ce qu’il avait dit à J.-G.D.[29].

[334]     Par la suite, l’intimé évoque une autre possibilité, soit celle que la mention du 75 % par J.-G.D. provienne du fait qu’en 2005, le produit Performax permettait approximativement d’avoir une valeur de rachat d’environ 75 % du montant total déposé par le consommateur[30].

[335]     Quant aux témoins P.D.[31] et Louis Blain[32], le 75 % concerne la possibilité d’emprunter sur la valeur de rachat de la police d’assurance.

[336]     Il est à noter qu’aux notes manuscrites de rencontre, produites par l’intimé comme pièces I-10 et I-13, on retrouve à certains endroits la mention de 75 %, mais on ne peut en identifier la signification et l’intimé n’a pas, lors de son témoignage, donné d’éclaircissement sur ce point.

[337]     De plus, au sommaire du contrat InnoVision, on constate que l’assureur garantit une valeur de placement qui ne sera pas inférieure à 75 % des déboursés portés au compte de placement et de tout boni de fidélité porté au crédit du contrat moins les retraits effectués sur ces comptes[33].

[338]     Il ressort des témoignages entendus et de la documentation déposée en preuve qu’à tout le moins, il y a eu confusion chez le client J.-G.D. quant à la question du 75 % et le comité est d’opinion qu’il y a une preuve prépondérante à l’effet que l’intimé n’a pas exposé de façon complète, exacte et objective cet élément du produit qui était contracté par J.-G.D.

[339]     Le comité arrive à cette conclusion, plus particulièrement si on tient compte de la teneur équivoque et incertaine du témoignage de l’intimé quant à savoir ce qu’il a vraiment dit à J.-G.D. sur le sujet.

[340]     De plus, le comité considère qu’il y a aussi une autre dimension que l’intimé n’a pas exposée clairement et suffisamment à J.-G.D. quant au produit InnoVision.

[341]     Tel que mentionné plus haut, le produit InnoVision de Manuvie, contrairement au produit Performax, est une assurance-vie universelle laquelle contient une composante importante au niveau de l’épargne accumulée et qui est à l’abri de l’impôt.

[342]     Cette composante épargne du contrat InnoVision doit être gérée par l’assuré lui-même alors que dans le cas du produit Performax, celui‑ci étant de nature participative, c’est l’assureur qui gère la composante épargne du produit[34].

[343]     J.-G.D. s’exprime ainsi quant au placement à être fait avec la composante épargne des primes mensuelles qu’il devait payer :

« Q.  [384]  Les sommes que vous déposiez dans la police d’assurance devaient être dans quel type de placements?

R.  Ce n’est pas des placements.  Moi, je plaçais ça dans Manuvie, je prenais ma, je payais ma cotisation, puis c’était tout.  Oui, tu sais…

 

Q.  [385]  Mais est-ce que c’était dans un compte ordinaire ou si c’était dans des placements bruts?

R.  Je ne le sais pas où est-ce qu’ils le mettaient.

R.  [386]  Vous là, dans vos choix là, avez-vous demandé ou quel type de placements vous vouliez faire avec les sommes dans votre police?

R.  Non.  Le type de placements, non.

Q.  [387]  Est-ce que, à un moment donné, vous avez changé de type de placements ou de l’utilisation des sommes dans votre police?

R.  Non. » [35].

[344]     En ce qui concerne l’intimé, il ne ressort aucunement de son témoignage et de l’ensemble de la preuve qu’il ait expliqué clairement cette différence fondamentale en ce qui concerne la gestion de la composante placement pour Performax et InnoVision, lorsqu’il a été décidé de choisir le produit InnoVision plutôt que celui Performax à cause de l’existence de la surprime.

[345]     Tout au plus, l’intimé mentionne à son témoignage qu’il avait dit à J.-G.D. qu’il ne gérait pas son contrat[36].

[346]     De façon assez surprenante, l’intimé témoigne comme suit sur le sujet :

« … puis moi je l’ai averti que moi non plus je ne la gérais pas sa vie universelle.  Je ne sais pas si j’ai le droit de faire ça, mais je lui ai dit en tout cas. »[37]

(nos soulignés)

[347]     Le comité ne croit pas l’intimé quand il prétend avoir mentionné à J.-G.D. que c’est lui qui devait gérer l’épargne de son produit.

[348]     En effet, si l’intimé était un conseiller compétent et consciencieux comme il prétend l’être, il est inconcevable qu’il se soit demandé lors de son témoignage s’il « avait le droit » de dire à J.-G.D. qu’il devait gérer lui-même la composante épargne de son assurance‑vie universelle alors qu’il s’agit clairement de son obligation à titre de représentant.

[349]     Le comité est donc d’opinion que l’intimé n’a pas exposé clairement à J.-G.D. cette facette importante et même primordiale du produit InnoVision à l’effet que c’est J.-G.D. qui devait gérer la composante épargne de sa police d’assurance-vie.

[350]     Enfin, le comité est d’opinion que l’intimé est coupable du chef numéro 1 en ce qu’il n’a pas non plus expliqué clairement à J.-G.D. les conséquences de la surprime à laquelle ce dernier était soumis.

[351]     J.-G.D. a reconnu en contre-interrogatoire qu’il avait bien signé l’ajout à la proposition en date du 2 février 2006[38], sur lequel il est indiqué que le contrat est établi « moyennant une surprime pour risque aggravé »[39].

[352]     Il ressort cependant de son témoignage que bien qu’il ait signé ledit document, il ne savait pas quel était le pourcentage de sa surprime et quel effet pratique elle avait au niveau des paiements mensuels faits par J.-G.D. :

« R.  Moi là, je vais vous dire une chose, entre vous puis moi là, la surprime à ce moment-là, ça ne me dit rien là.  La surprime ne me dit rien.  Cent (100), cent cinquante (150) ou deux cents (200) là, ça ne me dit absolument rien.  Moi, je pose des questions qu’est-ce que c’est que j’ai comme assurance, puis qu’est-ce que c’est que… Moi, qu’il me dise ça là, qu’il y avait une surprime parce que mon médical n’est pas correct, il m’aurait dit : « Ton médical n’est pas… »  Ça veut dire que je ne suis pas assurable dans le standard, ça veut dire que la surprime, pour moi ça ne veut rien me dire.  Parce que, encore là, c’est tout le temps la prime que je paie puis, à un moment donné, avec le contrat, qu’est-ce que c’est qu’on a discuté initialement.  Moi, la surprime qui est marquée là, il aurait pu marquer n’importe quoi puis, à un moment donné, dire écoute…

Q.  [255]  Mais c’est marqué « pour risque aggravé ».

R.  Mais risque aggravé, ça ne me dit rien.  Parce que la prime, qu’il me dise à un moment donné là, tu paies juste de l’assurance, je n’aurais jamais pris cette assurance-là, jamais je n’aurais, je n’aurais pas payé quinze mille piastres (15 000$) d’assurance par mois, pour trois millions (3 M) d’assurance, que je n’ai pas besoin, que je n’ai pas besoin.

Q.  [256]  Et quand est-ce que vous avez compris c’était quoi une surprime?

R. Ça s’est fait quand on est arrivé au mois de, au mois d’août.  Au mois d’août, avec l’état de compte que j’ai eu.  Là, il dit : « Écoute, parce que tu es surprimé à deux cent pour cent (200%).  Bien, voyons donc. »  C’est là, quand il a commencé à dire : « Bien, inquiète-toi pas J.-G., ça va descendre ça, on va le mettre à standard, parce que moi, on va tomber dans les normes.  Bon, o.k. »[40]

(nos soulignés)

[353]     Le comité croit J.-G.D. sur ce point et il est conforme à la prétention de J.-G.D. alléguée à sa lettre du 8 novembre 2011 adressée, entre autres, à l’intimé où il indique ce qui suit :

«Il est très clair pour moi que si j’avais su que tout l’argent que j’injectais à ce contrat de la Financière Manuvie servait uniquement qu’à payer le coût d’assurance, jamais vous comprenez, jamais je n’aurai consenti à l’achat d’un tel produit.  Comme je le mentionne dès que j’ai reçu mon premier relevé j’ai immédiatement réagi.  Et encore une autre fois, Monsieur Charlebois m’a menti en me laissant miroiter que l’assureur réviserait la surprime et que tout entrerai (sic) dans l’ordre rétroactivement. » [41]

[354]     D’ailleurs, P.D. indique à son témoignage, que J.-G.D. disait qu’il ne savait pas trop ce que signifiait être « surprimé »[42].

[355]     L’intimé, à son témoignage, mentionne qu’il avait dit à son fils P.D. en décembre 2005 que J.-G.D. était « surprimé », mais il admet qu’il ne lui avait pas dit avant le 2 février 2006, précisant qu’entre décembre 2005 et février 2006, il est vrai que l’intimé ne le savait pas[43].

[356]     Le comité est d’opinion que J.-G.D. savait le 2 février 2006 qu’il était « surprimé », mais considère qu’il n’avait pas été suffisamment informé par l’intimé des détails, ni des conséquences d’une telle surprime, particulièrement sur la composante épargne, pour être en mesure de prendre une décision éclairée sur son choix de l’assurance-vie universelle InnoVision.

[357]     Par conséquent, pour les raisons ci-haut mentionnées, le comité est d’opinion que l’intimé est coupable du premier chef d’accusation.

QUANT AU CHEF D’ACCUSATION NUMÉRO 2

[358]     Le deuxième chef d’accusation reproche à l’intimé d’avoir fait souscrire à J.‑G.D. le contrat d’assurance-vie InnoVision alors que ce contrat ne convenait pas à ses besoins financiers, à sa situation financière et personnelle ainsi qu’à ses objectifs de placement.

[359]     Les articles 16 et 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers se lisent comme suit :

« 16.    Un représentant est tenu d’agir avec honnêteté et loyauté dans ses relations avec ses clients.

27. Un représentant en assurance doit recueillir personnellement les renseignements nécessaires lui permettant d’identifier les besoins d’un client afin de lui proposer le produit d’assurance qui lui convient le mieux. »

[360]     Le comité est d’opinion que la plaignante s’est aussi déchargée de son fardeau pour ce chef d’accusation et que l’intimé doit être trouvé coupable sur celui-ci.

[361]     En plus des motifs ci-haut mentionnés relativement au chef d’accusation numéro 1 quant au défaut de l’intimé d’avoir bien expliqué à J.-G.D. les conséquences de la surprime, le comité ajoute ce qui suit quant au deuxième chef d’accusation.

[362]     Tout d’abord, au questionnaire financier confidentiel, on retrouve la description de l’objet visé par J.-G.D. pour la nouvelle assurance recherchée :

«

           Protégé (sic) sa succession

 

           Protégé (sic) les 3 autres actionnaires

 

           Amasser les sommes d’argent à l’abri de l’impôt »[44]

[363]     Le comité considère que la décision de suggérer à J.-G.D. de contracter une assurance-vie universelle InnoVision plutôt que le produit Performax en soi n’était pas mauvaise, compte tenu de la dimension épargne de l’assurance-vie universelle, laquelle était très importante pour J.-G.D.

[364]     C’est d’ailleurs l’opinion de l’expert Denis Preston lors de son témoignage[45].

[365]     La situation changeait cependant à partir du moment où la surprime de 200 % avait été établie par l’assureur.

[366]     En effet, la surprime de 200 % faisait perdre à J.-G.D. une des principales raisons pour lesquelles il avait contracté ce produit financier, à savoir « amasser les sommes d’argent à l’abri de l’impôt »[46] grâce à la composante épargne de l’assurance-vie universelle.

[367]     Ainsi, à partir du premier état de compte reçu par J.-G.D. en août 2006, soit pour les six (6) premiers mois, on constate que pour une somme totale de 98 650,23 $ versée à Manuvie, la somme de 82 865,76 $ servait à payer la prime d’assurance, ce qui laissait donc seulement une somme de 13 837,10 $ pour la partie épargne[47].

[368]     De plus, après une année complète, de la somme versée de 183 207,57 $, 158 832,04 $ avait servi à payer la couverture d’assurance et seulement 20 787,82 $ était investie en épargne[48].

[369]     Le procureur de l’intimé fait grand état du fait que la planification faite par l’intimé en était une qui visait avant tout E.D. Inc. et non pas J.-G.D.

[370]     Plus particulièrement, cette dimension a été développée par le procureur de l’intimé lorsque l’expert de la plaignante Denis Preston a témoigné et lorsque le procureur de l’intimé a plaidé devant le comité.

[371]     Le procureur de l’intimé a plaidé en effet avec vigueur que le témoignage de l’expert devrait être mis de côté, car l’expert n’a pas tenu compte de la dimension corporative de l’exercice fait par l’intimé pour l’assurance recherchée, en ce qu’elle visait aussi à permettre la continuation corporative de E.D. Inc., advenant le décès de J.-G.D.

[372]     En d’autres termes, le procureur de l’intimé a plaidé que le but de l’assurance contractée était corporatif et non pas personnel.

[373]     M. Preston est d’opinion que l’assurance contractée par J.-G.D. avait un objectif personnel pour J.-G.D. et non pas corporatif pour E.D. Inc.

[374]     Sur ce point, tel que décidé plus haut quant à l’argument relatif à la question de l’identité du client, le comité est d’opinion que le but de l’assurance recherchée avait à la fois un objectif personnel pour J.-G.D. et un objectif corporatif pour E.D. Inc., mais que le client était bien J.-G.D. et non E.D. Inc.

[375]     Avec tout le respect pour l’opinion contraire, le comité considère que la véritable question à laquelle il doit répondre est de savoir si le produit d’assurance choisi par l’intimé convenait bien aux besoins financiers du client, à savoir J.-G.D., et ce quel que soit l’objectif de l’assurance, qu’il soit personnel, corporatif ou les deux à la fois.

[376]     Il est bien évident que lorsqu’on constate l’infime proportion de la prime totale déboursée allant à l’épargne, la conclusion incontournable à laquelle le comité arrive est que ce produit d’assurance ne convenait pas ni à J.-G.D. ni à E.D. Inc. compte tenu qu’il ne générait pas suffisamment de fonds au niveau de l’investissement et de la valeur de rachat.

[377]     Pour le comité, à cause de la surprime, il était évident que le produit InnoVision ne pouvait plus convenir à J.-G.D. compte tenu qu’il ne pouvait pas atteindre l’objectif important « d’amasser des sommes d’argent à l’abri de l’impôt »[49].

[378]     Par conséquent, le comité est d’opinion que la plaignante a aussi fait la preuve par prépondérance que l’intimé a commis les faits reprochés au chef d’accusation numéro 2.

QUANT AU CHEF D’ACCUSATION NUMÉRO 3

[379]     Le chef d’accusation numéro 3 reproche à l’intimé d’avoir fait des représentations fausses, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur J.-G.D. quant au contrat d’assurance‑vie InnoVision notamment en ce que l’assureur avait commis une erreur en le « surprimant » et qu’il réduirait rétroactivement le montant de la prime facturé.

[380]     L’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers se lit comme suit :

« 16.    Un représentant est tenu d’agir avec honnêteté et loyauté dans ses relations avec ses clients. »

[381]     Les articles 11, 12, 16 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière se lisent comme suit :

« 11.  Le représentant doit exercer ses activités avec intégrité.

12.     Le représentant doit agir envers son client ou tout client éventuel avec probité et en conseiller consciencieux, notamment en lui donnant tous les renseignements qui pourraient être nécessaires ou utiles. Il doit accomplir les démarches raisonnables afin de bien conseiller son client.

16.     Nul représentant ne peut faire, par quelque moyen que ce soit, des déclarations ou des représentations incomplètes, fausses, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur.

35.     Le représentant ne doit pas exercer ses activités de façon malhonnête ou négligente. »

[382]     J.-G.D. a témoigné à l’effet que l’intimé lui avait dit à de nombreuses reprises que la prime à un taux standard serait obtenue plus tard de la part de l’assureur et de ne pas s’en faire[50].

[383]     À sa plainte faite à l’Autorité des marchés financiers (AMF) contre l’intimé le 8 novembre 2011 (pièce P-2), J.‑G.D. indique :

« Et encore une autre fois, Monsieur Charlebois m’a menti en me laissant miroiter que l’assureur réviserait la surprime et que tout entrerai (sic) dans l’ordre rétroactivement. »[51]

(nos soulignés)

[384]     Le témoignage de J.-G.D. est confirmé par celui de son fils P.D., lequel a mentionné que l’intimé disait toujours qu’il arrangerait le tout pour que la surprime disparaisse[52].

[385]     En ce qui concerne l’intimé, il a témoigné à l’effet qu’il n’a jamais mentionné à J.‑G.D. qu’il obtiendrait une prime standard rétroactivement :

« R.  C’est inimaginable que monsieur D., et bien il le dit, mais c’est impossible.  Je n’ai jamais dit une chose de même.  Depuis mil neuf cent soixante-dix-neuf (1979) que je suis en assurance, je pense que si j’avais travaillé de même, vous l’auriez vu, vous me connaîtriez par mon petit nom. » [53]

[386]     Il est difficile de croire l’intimé sur ce point quand on constate qu’en novembre 2006, une fois que la surprime avait été abaissée à 150 %, il fit faire une demande écrite à l’assureur afin de savoir si ce changement pouvait être rétroactif :

« Bonjour Audrey :

Daniel Charlebois aimerait savoir si la réduction de surprime sera rétroactive à l’émission de la police.  Étant donné que le Dr. Becker a recommandé de baisser la surprime à 50 % après son entretien téléphonique avec le médecin traitant, le client ne devrait pas être pénalisé à payer une surprime de 100 % depuis l’émission du contrat.

Svp faire ton possible de nous approuver cette demande.

Merci.

Josie Siggia

Groupe CMA » [54]

[387]     Le Groupe CMA est le courtier où l’intimé œuvrait à titre de conseiller en sécurité financière durant la période pertinente.

[388]     Le comité considère que cette demande de l’intimé, faite par l’intermédiaire de Groupe CMA, s’informant de la possibilité d’avoir une rétroactivité quant à la surprime est en contradiction avec son témoignage.

[389]     De plus, l’intimé savait depuis le 12 décembre 2006 que la surprime à 150 % était « la meilleure offre disponible » et qu’il y avait seulement la « possibilité de reconsidérer dans un an » cette décision de l’assureur[55].

[390]     Un autre élément qui amène le comité à douter de la version de l’intimé sur ce point est l’existence d’un montant très important versé en commissions à l’intimé pour la police d’assurance-vie universelle contractée par J.-G.D.

[391]     En effet, on constate à partir du sommaire des commissions payées à l’intimé pour l’assurance de J.-G.D., pièce P-30, que l’intimé a bénéficié d’une rémunération totale de 207 340,51 $.

[392]     Dans les circonstances, le comité voit un intérêt certain pour l’intimé de tout faire pour conserver ladite police d’assurance-vie universelle et d’apaiser J.-G.D. en lui faisant de telles représentations fausses, trompeuses ou susceptibles de l’induire en erreur.

[393]     Le comité ne croit donc pas l’intimé sur ce sujet, mais accepte plutôt la version de J.-G.D. corroborée par le témoignage de son fils P.D. et considère que la plaignante s’est aussi déchargée de son fardeau quant au chef d’accusation numéro 3 en ce qu’elle a fait la preuve par prépondérance que l’intimé a fait des représentations fausses, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur J.-G.D.

[394]     Par conséquent, l’intimé sera donc trouvé coupable des trois (3) chefs d’accusation de la plainte.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

DÉCLARE l’intimé coupable d’avoir contrevenu à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2), sous chacun des trois (3) chefs d’accusation contenus à la plainte.

ORDONNE la suspension conditionnelle quant aux autres dispositions invoquées sous chacun des trois (3) chefs d’accusation contenus à la plainte;


 

CONVOQUE les parties, avec l’assistance du secrétaire du comité de discipline, à une audition sur sanction.

 

 

 

 

(S) Claude Mageau

                                                                          

Me CLAUDE MAGEAU

Président du comité de discipline

 

(S) John Ruggieri

                                                                         

M. JOHN RUGGIERI, A.V.A., Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

(S) Marc Binette

                                                                         

M. MARC BINETTE, Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

Me Valérie Déziel

CDNP Avocats Inc.

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Maurice Charbonneau

CHARBONNEAU AVOCATS CONSEILS

Procureurs de la partie intimée

 

Dates d’audience :

14, 15, 16 et 17 septembre 2015

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1]    Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, pp. 27-28.

[2]    Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 37.

[3]    Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 41.

[4]    Pièce P-7, p. 000336.

[5]    Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, pp. 71 à 73.

[6]    Pièce P-2, pp. 000200 à 000203.

[7]    Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 129.

[8]    Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 142.

[9]    [1999] R.J.Q. 2399.

[10]   [2009] QC CS 1747.

[11]   [2011] QC CS 5404.

[12]   [1991] 1 R.C.S. 374, p. 429.

[13] [2001] QCCQ 9517.

[14]   Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, pp. 220-221.

[15]   Notes sténographiques de l’audition du 15 septembre 2015, pp. 101-102.

[16]   Pièce P-3, p. 000301.

[17]   Notes sténographiques de l’audition du 15 septembre 2015, p. 121.

[18]   Pièce P-4, p. 001197, et notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, pp. 51-53.

[19]   Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, p. 93.

[20]   Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, p. 140.

[21]   Pièce P-7, p. 00336 et notes sténographies de l’audition du 16 septembre 2015, pp. 171-174.

[22]   Pièce P-7, p. 00337.

[23]   Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, p. 200.

[24]   Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, p. 245.

[25]   Pièce P-4, p. 001197.

[26]   Rioux c. Giroux, CD00-0614, 14 mars 2007 (C.D.C.S.F.), par. 39-40.

[27]   Pièce P-3, pp. 000322-000323.

[28]   Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, pp. 24 et 129.

[29]   Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, pp. 154-155 et 245.

[30]   Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, p. 200.

[31]   Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 136.

[32]   Pièce P-27.

[33]   Pièce P-9, p. 10.2.

[34]   Témoignage de Denis Preston, notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 263.

[35]   Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 115, ligne 14 à p. 116, ligne 6.

[36]   Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, p. 194, lignes 8-14.

[37]   Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, p. 196, lignes 12-15.

[38]   Pièce P-7, p. 000336.

[39]   Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 71, ligne 14.

[40]   Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 71, ligne 24 à p. 73, ligne 12.

[41]    Pièce P-2, p. 000038.

[42]    Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, p. 139.

[43]    Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, p. 172, lignes 5-15.

[44]   Pièce P-4, p. 001197.

[45]   Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, pp. 215-216.

[46]   Pièce P-4, p. 001197.

[47]   Pièce P-23, p. 000731.

[48]   Pièce P-23, p. 000735.

[49]   Pièce P-4, p. 00197.

[50]   Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, pp. 38-41 et 72-73.

[51]   Pièce P-2, p. 00037.

[52]   Notes sténographiques de l’audition du 14 septembre 2015, pp. 140-141.

[53]   Notes sténographiques de l’audition du 16 septembre 2015, p. 220, lignes 6-12.

[54]   Pièce P-13, p. 000821.

[55]   Pièce I-9.

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