Chambre de la sécurité financière (Québec)

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Contenu de la décision

Chambre de la sécurité financière c. Constant

2015 QCCDCSF 33

 

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

 

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

 

 

N :

CD00-1129

 

 

 

DATE :

11 juin 2015

 

______________________________________________________________________

 

 

 

LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

 

M. Jean-Michel Bergot

Membre

 

M. BGilles Lacroix, A.V.C., Pl. Fin.

Membre

 

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CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

HIMLER CONSTANT, représentant de courtier en épargne collective (numéro de certificat 169195, BDNI 1774231)

Partie intimée

 

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DÉCISION SUR REQUÊTE EN RADIATION PROVISOIRE

 

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[1]           Le 11 juin 2015, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni au siège social de la Chambre de la sécurité financière, sis au 300, rue Léo-Pariseau, 26e étage, Montréal et a procédé à l’audition d’une requête en radiation provisoire de l’intimé, présentée par la plaignante.

[2]           Ladite requête était libellée comme suit :

REQUÊTE EN RADIATION PROVISOIRE

Articles 130 et 133 du Code des professions, RLRQ c. C-26

AU COMITÉ DE DISCIPLINE DE LA CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE, LA REQUÉRANTE EXPOSE CE QUI SUIT :

1.         Caroline Champagne, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière, a déposé une plainte disciplinaire contre l’intimé lui reprochant de s’être approprié des sommes d’argent que lui avait confiées son client, tel qu’il appert de ladite plainte disciplinaire produite sous la cote R-1;

2.         Au moment des faits relatés ci-dessous, l’intimé était détenteur d’un certificat de courtage en épargne collective portant le numéro 169195, tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique produite sous la cote R-2;

3.         Pour les motifs exposés ci-dessous, les faits reprochés à l’intimé sont graves et sérieux, portent atteinte à la raison d’être de la profession et sont de nature telle que la protection du public risque d’être compromise s’il continue d’exercer sa profession;

Enquête du bureau de la Syndique de la Chambre de la sécurité financière

4.         Le 13 mai 2015, la Direction de la conformité de l’Autorité des marchés financiers a transmis à la plaignante une demande de vérification suite au congédiement de l’intimé en date du 21 février 2015, tel qu’il appert de la lettre et des documents produits en liasse sous la cote R-3;

5.         La Base de données nationale d’inscription (BDNI) indique notamment que l’intimé a détourné des fonds d’un client et que la perte potentielle pour Desjardins Cabinet de Services Financiers inc. serait de 27 598 $, tel qu’il appert de la pièce R-3;

6.         Une enquête a été ouverte par le bureau de la Syndique de la Chambre de la sécurité financière sur la base de cette information;

7.         Dans le cadre de cette enquête, la Direction de la conformité du Réseau des caisses Desjardins a été contactée et copie du rapport d’enquête interne de Desjardins a été obtenu, tel qu’il appert d’un courriel daté du 20 mai 2015 et dudit rapport daté du 23 décembre 2014 produits en liasse sous la cote R-4;

8.         À ce jour, l’enquête a révélé les faits inquiétants énoncés ci-dessous;

Le client J.-C.G.

9.         J.-C.G. est âgé de 57 ans;

10.      J.-C.G. est membre de caisses Desjardins depuis 1988;

11.      J.-C.G. a rapidement développé une relation de confiance avec l’intimé;

12.      Or, l’intimé s’est approprié les sommes confiées par son client J.-C.G. pour fins d’investissement, tel qu’énoncé ci-dessous;

Appropriation du 22 septembre 2008

13.      Le ou vers le 22 septembre 2008, l’intimé a rencontré J.-C.G. pour discuter de placements, tel qu’il appert de l’extrait de l’agenda informatisé de l’intimé produit sous la cote R-5;

14.      Le ou vers le 22 septembre 2008, deux montants de 11 249,93 $ et 5 398,54 $ ont été retirés de placements à terme détenus par J.-C.G et déposés dans un compte Desjardins détenu par J.-C.G. portant le numéro […], tel qu’il appert du journal des opérations produit sous la cote R-6;

15.      Le même jour, une somme de 15 000 $ a été acheminée par virement à partir du compte de J.-C.G. portant le numéro […] vers le compte personnel de l’intimé portant le numéro […], tel qu’il appert de la pièce R-6 ainsi que du journal des opérations produit sous la cote R-7;

16.      La somme de 15 000 $ a notamment été utilisée par l’intimé pour le paiement de factures et le remboursement de sa marge de crédit, tel qu’il appert du journal des opérations produit sous la cote R-8;

Appropriation du 18 novembre 2009

17.      Le ou vers le 18 novembre 2009, un chèque tiré du compte américain de J.-C.G. portant le numéro […] au montant de 10 000 $US a été libellé au nom de l’intimé, tel qu’il appert du chèque produit sous la cote R-9;

18.      Ledit chèque a été signé par le client mais complété par une autre personne et endossé par l’intimé;

19.      L’argent débité du compte bancaire de J.-C.G. le 19 novembre 2009 a été déposé au compte personnel de l’intimé, numéro […], le 24 novembre 2009, tel qu’il appert des journaux des opérations produits en liasse sous la cote R-10;

20.      Ces fonds sont ensuite retirés du compte de l’intimé numéro […] pour des fins personnelles, tel qu’il appert de la pièce R-10 ainsi que du bordereau de virement du 3 décembre 2009 pour un montant de 7 000 $ du compte de l’intimé et du bordereau de retrait du 4 décembre 2009 pour un montant de 4 000 $ d’un compte appartenant à G[…] J[…], produits en liasse sous la cote R-11;

Appropriation des 3 et 10 octobre 2013

21.      Les ou vers les 2 et 3 octobre 2013, l’intimé a rencontré J.-C.G. pour discuter de placements, tel qu’il appert de l’extrait de l’agenda informatisé de l’intimé produit sous la cote R-12;

22.      Le ou vers le 3 octobre 2013, J.-C.G. a consenti à l’ouverture d’un financement Accord D au montant de 15 000 $ à partir de son compte Visa avec remboursement mensuel de 500,01 $, tel qu’il appert de la demande de transaction produite sous la cote R-13;

23.      L’ouverture du financement a été effectuée par l’intimé le même jour via le portail de la caisse, tel qu’il appert de l’ouverture du financement produite sous la cote R-14;

24.      Toujours le 3 octobre 2013, ladite somme de 15 000 $ a été déposée au compte numéro […] détenu par J.-C.G., tel qu’il appert du journal des opérations produit sous la cote R-15;

25.      Le même jour, l’intimé fait un virement de 5 000 $ du compte de J.-C.G. portant le numéro […] vers un compte détenu par E[…] F[…], personne inconnue du client, numéro […], tel qu’il appert de la pièce R-15 ainsi que du bordereau de virement et de la liste des bénéficiaires Accès D du compte bancaire de l’intimé produits en liasse sous la cote R-16;

26.      Quelques jours plus tard, le ou vers le 10 octobre 2013, un chèque de 10 000 $ est libellé au nom de l’intimé, tel qu’il appert du chèque produit sous la cote R-17;

27.      Ladite somme de 10 000 $ est ensuite déposée au compte de l’intimé portant le numéro […], tel qu’il appert du journal des opérations produit sous la cote R-18;

28.      Ledit chèque a été signé par le client mais complété par une autre personne et endossé par l’intimé;

Aveux de l’intimé

29.      Le ou vers le 8 décembre 2014, l’intimé a reconnu ce qui suit :

« Je reconnais avoir pris, sans son consentement, dans les placements des années 2008 à 2014 de J[…] C[…] G[…] les sommes suivantes :

$10,000.00 américain qui lui rapporterait $ 12,000.00 Us.

$15,000.00 canadien qui lui rapporterait $18,000.00 Can.

De plus, je reconnais lui avoir fait prendre dans son (Accès D) de la Caisse populaire Desjardins la somme de 15,000.00 canadien dont le versement mensuel est de $ 500.01 payé par moi (à la caisse populaire Desjardins) et qui rapporterait $500 de dividendes à la fin du dernier paiement. »

le tout tel qu’il appert de la reconnaissance de dette produite sous la cote R-19;

La radiation provisoire

30.      Les faits portés à la connaissance de la syndique de la Chambre de la sécurité financière sont extrêmement troublants et requièrent l’intervention immédiate du Comité de discipline;

31.      Il apparaît de façon prima facie que l’intimé s’est approprié les sommes d’argent confiées par son client pour fins d’investissement;

32.      Il y a urgence d’agir pour la protection du public ;

33.      Le présente requête est bien fondée en faits et en droit;

PAR CES MOTIFS, PLAISE AU COMITÉ DE DISCIPLINE :

ACCUEILLIR la présente requête;

PRONONCER la radiation provisoire immédiate de l’intimé, et ce, jusqu’à ce que jugement final soit rendu sur la plainte disciplinaire;

ORDONNER la publication d’un avis de cette décision dans un journal circulant dans le lieu où l’intimé a son domicile professionnel et dans tout autre lieu où l’intimé a exercé ou pourrait exercer sa profession;

LE TOUT avec les frais contre l’intimé, incluant les frais de publication de l’avis.

 

Montréal, ce 29 mai 2015

 

 

 

(s) Caroline Champagne

 

CAROLINE CHAMPAGNE

 

[3]          À ladite requête était jointe une plainte disciplinaire rédigée comme suit :

PLAINTE DISCIPLINAIRE

Je, soussignée, CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière, affirme solennellement et déclare que j’ai des motifs raisonnables de croire que l’intimé, alors qu’il détenait un certificat portant le numéro 169195 (BDNI 1774231) émis par l’Autorité des marchés financiers et qu’il était, de ce fait, encadré par la Chambre de la sécurité financière, a commis les infraction suivantes :

1.    À Montréal, le ou vers le 22 septembre 2008, l’intimé s’est approprié la somme de        15 000 $ que lui avait confiée pour fins d’investissement J.-C.G., contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, c. D-9.2), 2, 6, 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (RLRQ, c. D-9.2, r.7.1);

2.    À Montréal, le ou vers le 18 novembre 2009, l’intimé s’est approprié la somme de        10 000 $US que lui avait confiée pour fins d’investissement J.-C.G., contrevenant ainsi aux articles 160 de la Loi sur les valeurs mobilières (RLRQ, c. V-1.1), 2, 6, 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (RLRQ, c. D-9.2, r.7.1);

3.    À Montréal, le ou vers le 3 octobre 2013, l’intimé s’est approprié la somme de 5 000 $ que lui avait confiée pour fins d’investissement J.-C.G., contrevenant ainsi aux articles 160 de la Loi sur les valeurs mobilières (RLRQ, c. V-1.1), 2, 6, 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (RLRQ, c. D-9.2, r.7.1);

4.    À Montréal, le ou vers le 10 octobre 2013, l’intimé s’est approprié la somme de 10 000 $ que lui avait confiée pour fins d’investissement J.-C.G., contrevenant ainsi aux articles 160 de la Loi sur les valeurs mobilières (RLRQ, c. V-1.1), 2, 6, 10 et 14 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (RLRQ, c. D-9.2, r.7.1).

PAR CES MOTIFS, PLAISE AU COMITÉ DE DISCIPLINE :

 

         ACCUEILLIR la présente plainte;

         Déclarer l’intimé coupable de des infractions reprochées;

         Imposer à l’intimé les sanctions jugées opportunes et équitables dans les circonstances.

 

EN FOI DE QUOI, J’AI SIGNÉ :

MONTRÉAL, ce 29 mai 2015

 

                                                                            (s) Caroline Champagne                                        

                                                                            CAROLINE CHAMPAGNE

                                                                            Syndique

 

 

LA PREUVE

[4]          Au soutien de sa requête la plaignante a fait entendre M. Donald Poulin, enquêteur à la Chambre de la sécurité financière, et a déposé une preuve documentaire cotée R-1 à R-20. Quant à l’intimé, celui-ci bien que dûment convoqué et appelé était absent.

[5]          Alors que la plainte disciplinaire fait état de 4 chefs d’accusation, il ressort de la preuve présentée en relation avec celle-ci que l’intimé aurait au cours des années 2008 à 2013 fait défaut d’agir avec honnêteté et intégrité en s’appropriant des sommes mentionnées aux chefs 1 à 4, appartenant à son client.

[6]          Il appert de plus de ladite preuve que l’intimé aurait le 8 décembre 2014, signé une reconnaissance de dette à l’attention du client concerné par ladite plainte (pièce
R-19) où il reconnait « avoir pris sans son consentement » les sommes en cause « dans les placements des années 2008 à 2014 de son client. »

MOTIFS ET DISPOSITIF

CONSIDÉRANT qu’à la plainte portée contre l’intimé il lui est reproché de s’être approprié les montants y indiqués appartenant à son client;

CONSIDÉRANT que ladite plainte contient 4 chefs d’accusation de cette nature;

CONSIDÉRANT que les appropriations reprochées à l’intimé se seraient déroulées entre le ou vers le 22 septembre 2008 et le ou vers le 10 octobre 2013;

CONSIDÉRANT que lesdites appropriations totaliseraient plus de 40 000 $;

CONSIDÉRANT qu’il s’agit d’infractions graves et répétitives, démontrant des manquements sérieux au devoir d’agir avec intégrité et honnêteté;

CONSIDÉRANT que les fautes alléguées contre l’intimé vont au cœur de l’exercice de la profession;

CONSIDÉRANT que la preuve «prima facie» présentée au comité démontrerait de sérieuses lacunes chez l’intimé au plan de la probité ainsi qu’une absence de respect à l’endroit des règles déontologiques régissant la profession;

CONSIDÉRANT que ladite preuve laisserait entrevoir une absence d’hésitations chez l’intimé, à recourir lorsque nécessaire à ses fins, aux mensonges ou à la supercherie;

CONSIDÉRANT que les infractions reprochées à l’intimé sont de nature telles que la protection du public risquerait d’être compromise s’il lui était permis de continuer à exercer le profession;

CONSIDÉRANT que la preuve présentée au comité tendrait à démontrer «prima facie» que la plainte portée par la plaignante n’est pas frivole, mais qu’elle est bien au contraire sérieuse et qu’elle repose sur des faits peu équivoques;

CONSIDÉRANT que la syndique semble avoir agi avec une diligence raisonnable;

 

PAR CES MOTIFS, le comité :

ACCUEILLE la requête en radiation provisoire présentée par la plaignante;

ORDONNE la radiation provisoire de l’intimé Himler Constant et ce, jusqu’à ce qu’une décision ou un jugement final soit rendu sur la plainte disciplinaire (pièce R-1);

ORDONNE au secrétaire du comité de discipline de faire publier un avis de la présente décision dans un journal circulant dans le lieu où l’intimé a ou avait son domicile professionnel;

CONVOQUE les parties avec l’assistance du secrétaire du comité de discipline à une conférence téléphonique dans le but de déterminer une ou des dates pour l’audition de la plainte;

LE TOUT avec débours à suivre.

 

 

(s) François Folot

Me FRANÇOIS FOLOT

Président du comité de discipline

 

 

(s) Jean-Michel Bergot

M. JEAN-MICHEL BERGOT

Membre du comité de discipline

 

(s) BGilles Lacroix

M. BGILLES LACROIX, A.V.C., Pl. Fin.

Membre du comité de discipline

 

 

Me Valérie Déziel

BÉLANGER LONGTIN

Procureurs de la partie plaignante

 

L’intimé est absent

 

Date d’audience :

11 juin 2015

COPIE CAVIARDÉE

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