Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-1014

 

DATE :

23 septembre 2014

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

M. Shirtaz Dhanji, A.V.A., Pl. Fin.

Membre

M. Yvon Fortin, A.V.A., Pl. Fin.

Membre

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CAROLINE CHAMPAGNE, ès qualités de syndique de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

STEVE THIBAULT (numéro de certificat 182269)

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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[1]           Le 26 juin 2014, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni aux locaux de la Commission des lésions professionnelles du Québec sis au 500, boulevard René-Lévesque, 18e étage, Montréal, et a procédé à l'audition d'une plainte disciplinaire portée contre l'intimé ainsi libellée :

LA PLAINTE

« 1.      Dans la province de Québec, le ou vers le 24 novembre 2012, l’intimé a donné à son client G.P. des informations fausses, incomplètes ou trompeuses au sujet de l’encaissement du chèque de ce dernier et sur lequel il avait falsifié la date, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ, chapitre D-9.2), 11, 12, 16 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (RLRQ, chapitre D-9.2, r.3). »

PLAIDOYER DE CULPABILITÉ

[2]           D’entrée de jeu, l’intimé qui se représentait lui-même enregistra un plaidoyer de culpabilité à l’égard de l’unique chef d’accusation contenu à la plainte.

[3]           Après l’enregistrement de son plaidoyer, les parties présentèrent au comité leurs preuve et représentations sur sanction.

PREUVE DES PARTIES

[4]           Alors que la plaignante versa au dossier une importante preuve documentaire composée d’éléments recueillis lors de son enquête (cotés P-1 à P-6), elle ne fit entendre aucun témoin.

[5]           Quant à l’intimé, il déclara n’avoir aucune preuve à offrir.

[6]           Les parties soumirent ensuite au comité leurs représentations sur sanction.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[7]           La plaignante débuta ses représentations en mentionnant au comité que les parties avaient convenu de lui soumettre des « recommandations communes » sur sanction.

[8]           Elle affirma que celles-ci s’étaient entendues pour lui proposer de condamner l’intimé, sous l’unique chef d’accusation contenu à la plainte, au paiement d’une amende de 5 000 $. Elle indiqua qu’elles s’étaient de plus accordées pour lui recommander la condamnation de ce dernier au paiement des déboursés.

[9]           Elle ajouta que là où elles divergeaient c’était sur le délai qui pourrait être accordé à l’intimé pour l’acquittement de l’amende. À son point de vue, celui-ci ne devrait pas excéder dix-huit (18) mois et seulement à la condition que le paiement en soit effectué au moyen de versements mensuels, égaux et consécutifs sous peine de déchéance du terme.

[10]        Ensuite, après une brève description du contexte factuel rattaché à l’infraction, elle souligna les facteurs atténuants et aggravants suivants :

Facteurs atténuants :

-           l’absence d’antécédents disciplinaires de l’intimé;

-           un acte isolé duquel l’intimé n’a tiré aucun bénéfice personnel;

-           l’absence de préjudice causé au consommateur en cause;

-           la présence chez l’intimé de remords et le peu de risque qu’il ne récidive;

Facteurs aggravants :

-           la gravité objective de l’infraction; une infraction de nature à mettre en péril la relation de confiance entre les représentants et le public;

-           malgré l’absence d’intention frauduleuse, un manque d’intégrité de la part de l’intimé;

-           la présence d’une « forme » de préméditation et l’utilisation d’un « moyen de camouflage » pour dissimuler une faute initiale.

[11]        Elle termina en déposant au soutien de ses suggestions un cahier d’autorités contenant quatre (4) décisions antérieures du comité qu’elle commenta[1].

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

[12]        Ce dernier débuta ses représentations en mentionnant qu’il était prêt à assumer sa faute et consentait à la sanction suggérée par la plaignante.

[13]        Il ajouta avoir cessé d’œuvrer dans le domaine de la distribution de produits d’assurances et/ou financiers, mentionnant qu’il avait pendant une année environ occupé un poste dans le domaine de la « distribution au détail » avant d’accéder à la fonction qu’il occupe actuellement, plus près de ses qualifications, à titre de représentant auprès d’une entreprise de courtage hypothécaire.

[14]        Il termina en décrivant au comité sa condition actuelle, les difficultés familiales qu’il vivait présentement ayant à affronter des procédures judiciaires et devant défrayer des frais d’avocats, et en réclamant, compte tenu de sa situation financière précaire, un minimum de deux (2) ans pour le paiement de l’amende suggérée.

LES FAITS

[15]        Selon la preuve présentée au comité, le 12 novembre 2012 l’intimé a fait souscrire à ses clients Gilbert Parent (M. Parent) et Guylaine Ouellet (Mme Ouellet) une police d’assurance-vie auprès de la compagnie d’assurance l’Excellence.

[16]        Pour le paiement de la prime initiale au montant de 173,07 $, M. Parent a préparé et signé un chèque postdaté au 9 décembre 2012 à l’ordre de ladite compagnie d’assurance.

[17]        Le ou vers le 15 novembre 2012, l’assureur a retourné ledit chèque à l’intimé en lui indiquant qu’il refusait d’accepter un chèque postdaté en paiement de la police souscrite.

[18]        Le ou vers le 20 novembre 2012, après y avoir modifié à l’insu de M. Parent la date du 9 décembre 2012 pour y substituer la date du 12 novembre 2012 et y avoir paraphé les changements avec les initiales de ce dernier, l’intimé a réexpédié le chèque à l’assureur.

[19]        Après que celui-ci eut été perçu, M. Parent communiqua avec l’assureur afin de savoir pourquoi il avait été encaissé en novembre 2012 alors qu’il l’avait fait payable en décembre 2012.

[20]        Il obtint alors une copie dudit chèque et se rendit rapidement compte que non seulement la date y avait été modifiée mais encore que les initiales confirmant le changement sur le chèque n’étaient pas les siennes.

[21]        Confronté à la situation par son client, l’intimé déclara alors faussement à ce dernier que s’il avait agi de la sorte, c’est-à-dire s’il avait modifié la date du chèque, c’était dû à « la condition actuelle » de ce dernier et « pour faire en sorte qu’il puisse être assuré ».

[22]        Avisé des événements, le 28 novembre 2012, le cabinet auquel était rattaché l’intimé, après enquête, mit fin au contrat de ce dernier.

[23]        Selon l’attestation de droit de pratique émanant de l’Autorité des marchés financiers en date du 14 mai 2014, il ne détient plus de certificat en vertu de la Loi sur la distribution de produits et services financiers.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[24]        L’intimé a débuté dans la distribution de produits d’assurance de personnes le ou vers le 24 mars 2009.

[25]        Il n’a aucun antécédent disciplinaire.

[26]        Comme conséquence de ses fautes, il a perdu son emploi auprès du cabinet auquel il était rattaché.

[27]        Il a admis celles-ci à l’enquêteur de la Chambre de la sécurité financière et a coopéré à l’enquête de ce dernier.

[28]        Il semble animé de regrets sincères et a clairement avoué avoir commis l’infraction qui lui est reprochée, enregistrant à la première occasion un plaidoyer de culpabilité à l’égard de l’unique chef d’accusation contenu à la plainte.

[29]        Bien que le 29 janvier 2013, l’Autorité des marchés financiers a convenu d’assortir son certificat dans la discipline de l’assurance de personnes de trois (3) conditions :

               le représentant doit pour une période d’au moins deux (2) ans, alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités à titre de représentant rattaché à un ou des cabinets dont il n’est pas dirigeant responsable ou administrateur;

               le représentant doit, pour une période d’au moins deux (2) ans, alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités sous la responsabilité d’une personne nommée par le dirigeant responsable et du cabinet auquel il sera rattaché;

               le représentant ne doit pas pour une période d’au moins deux (2) ans agir à titre de superviseur pour un postulant dans le domaine des services financiers.

ce qui ne le privait pas de son droit de pratique, l’intimé, tel que préalablement mentionné, a cessé d’exercer dans le domaine de la distribution de produits d’assurances ou financiers.

[30]        Au plan de la sanction qui doit lui être imposée, les parties ont conjointement suggéré au comité sa condamnation au paiement d’une amende de 5 000 $ ainsi qu’une ordonnance d’acquittement des déboursés.

[31]        Compte tenu du dossier, et des représentations qui lui ont été soumises, le comité croit devoir suivre « la recommandation commune des parties ». Il condamnera donc l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $ et à l’acquittement des déboursés.

[32]        Par ailleurs, les parties ont divergé sur le délai qui devrait lui être accordé pour le paiement de l’amende susdite. Or pour les motifs plus amplement exprimés par l’intimé lors de l’audition, le comité est d’avis d’accorder à ce dernier un délai de deux (2) ans pour ce faire, à la condition que celui-ci soit effectué au moyen de versements mensuels, égaux et consécutifs débutant trente (30) jours de la date de la présente décision sous peine de déchéance du terme accordé.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé sous l’unique chef d’accusation contenu à la plainte;

DÉCLARE l’intimé coupable de l’unique chef d’accusation contenu à la plainte;

ET PROCÉDANT SUR SANCTION :

Sous l’unique chef d’accusation contenu à la plainte :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $;

ACCORDE à l’intimé un délai de deux (2) ans pour le paiement de ladite amende à la condition que celui-ci soit effectué au moyen de versements mensuels, égaux et consécutifs débutant le trentième jour de la présente décision sous peine de déchéance du terme accordé;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés, y compris les frais d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, RLRQ, chapitre C-26.

 

 

(s) François Folot____________________

Me FRANÇOIS FOLOT, avocat

Président du comité de discipline

 

(s) Shirtaz Dhanji____________________

M. SHIRTAZ DHANJI, A.V.A., PL. FIN.

Membre du comité de discipline

 

(s) Yvon Fortin   _____________________

M. YVON FORTIN, A.V.A., PL. FIN.

Membre du comité de discipline

 

 

 

Me Jeanine Guindi

 

THERRIEN COUTURE

 

Procureurs de la partie plaignante

 

 

 

L’intimé se représente lui-même.

 

 

 

Date d’audience :

26 juin 2014

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1]     Me Micheline Rioux c. Robert Denis, CD00-0442, décision sur culpabilité en date du 19 juin 2003 et décision sur sanction en date du 15 février 2006; Me Micheline Rioux c. Laurent Giroux, CD00-0614, décision sur culpabilité en date du 14 mars 2007 et décision sur sanction en date du 25 mars 2008; Me Micheline Rioux c. Jacques-André Marcoux et Robert Bourdeau, CD00-0644 et CD00-0646, décision sur culpabilité en date du 13 juillet 2009 et décision sur sanction en date du 18 mars 2010; Caroline Champagne c. Sylvain Paquet, CD00-0919, décision sur culpabilité et sanction en date du 24 janvier 2013.

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