Chambre de la sécurité financière (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE LA SÉCURITÉ FINANCIÈRE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

CD00-0985

 

DATE :

28 mai 2014

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me François Folot

Président

M. Robert Chamberland, A.V.A.

Membre

M. Claude Trudel, A.V.A.

Membre

______________________________________________________________________

 

NATHALIE LELIÈVRE, ès qualités de syndique adjointe de la Chambre de la sécurité financière

Partie plaignante

c.

GABRIEL COUTURE, conseiller en sécurité financière, conseiller en assurance et rentes collectives, représentant de courtier en épargne collective et planificateur financier, (numéro de certificat 108341 et numéro de BDNI 1451021)

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

 

[1]           Le 12 février 2014, au palais de justice de Québec, dans les locaux de la Cour fédérale du Canada, 300, boul. Jean-Lesage, 5e étage, salle 502B, Québec, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière s'est réuni et a procédé à l'audition d'une plainte disciplinaire portée contre l'intimé ainsi libellée :

LA PLAINTE

« 1.       Dans la région de Québec, le ou vers le 22 janvier 2009, l’intimé a signé à titre de représentant pour la proposition d’assurance de C.L. et R.T portant le numéro 903461 soumise à Industrielle Alliance alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

2.          Dans la région de Québec, le ou vers le 18 avril 2009, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de M.V. sur la proposition d’assurance portant le numéro 023018698L soumise à Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

3.          Dans la région de Québec, le ou vers le 21 avril 2009, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de M.L. et de K.C sur la proposition d’assurance portant le numéro 023005552L soumise à Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

4.          Dans la région de Québec, le ou vers le 5 mai 2009, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de A.D. et A.B. sur la proposition d’assurance portant le numéro 023018990L soumise à Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

5.          Dans la région de Québec, le ou vers le 1er juin 2009, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de B.T. sur la proposition d’assurance portant le numéro 023018681L soumise à Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

6.          Dans la région de Québec, le ou vers le 9 juin 2009, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de C.B. et de S.L. sur la proposition d’assurance portant le numéro 023018984L soumise à Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

7.          Dans la région de Québec, le ou vers le 16 février 2010, l’intimé a signé à titre de représentant pour la proposition d’assurance de S.B. portant le numéro 075858 soumise à Industrielle Alliance alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

8.          À Saint-Bruno, le ou vers le 18 mars 2010, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de N.M. et de M.B. sur la proposition d’assurance portant le numéro 023207238L soumise à Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

9.          Dans la région de Québec, le ou vers le 17 juin 2010, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de M.L. sur la proposition d’assurance portant le numéro 023219044L soumise à Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

10.        Dans la province de Québec, le ou vers le 28 octobre 2010, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de D.B. et de M.B. sur la proposition d’assurance portant le numéro 100375544 soumise à BMO Assurance alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

11.        Dans la région de Québec, le ou vers le 16 novembre 2010, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de D.B., de M.V et de O.B. sur la proposition d’assurance vie portant le numéro 023217832L soumise à Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

12.        Dans la région de Rimouski, le ou vers le 10 février 2011, l’intimé a signé à titre de représentant sur le formulaire « Demande de modification » de la police d’assurance portant le numéro 00-2723526-3 auprès d’Industrielle Alliance appartenant à G.H. alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

13.        Dans la province de Québec, le ou vers le 18 avril 2011, l’intimé a signé à titre de conseiller et témoin pour G.D. et C.D. sur la proposition d’assurance portant le numéro 023352290L soumise à Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

14.        Dans la province de Québec, le ou vers le 19 avril 2011, l’intimé a signé à titre de conseiller pour D.R et F.L. sur la proposition d’assurance portant le numéro 100383026 soumise à BMO Assurance alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

15.        Dans la région de Québec, le ou vers le 4 mai 2011, l’intimé a signé à titre de conseiller pour R.P. sur la proposition d’assurance portant le numéro 137146 soumise à Industrielle Alliance alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

16.        Dans la province de Québec, le ou vers le 3 juin 2011, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de S.P. et W.P.D. sur la proposition d’assurance portant le numéro 100456076 soumise à BMO Assurance alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

17.        Dans la région de Québec, le ou vers le 4 juillet 2011, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de A.B. et A.D. sur le formulaire de modification de la police d’assurance portant le numéro 02318990L auprès d’Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3);

18.        Dans la région de Québec, le ou vers le 28 juin 2012, l’intimé a signé à titre de conseiller et de témoin de la signature de M.L. et de M.E.R. sur le formulaire de modification de la police d’assurance portant le numéro 023219044L auprès d’Empire Vie alors qu’il n’a pas agi à ce titre, contrevenant ainsi aux articles 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2), 11, 34 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière (c. D-9.2, r.3). »

PLAIDOYER DE CULPABILITÉ DE L’INTIMÉ

[2]           D’entrée de jeu, après le dépôt par la plaignante des attestations de pratique le concernant (sous les cotes P-1 et P-2a), l’intimé, présent et accompagné de son procureur, enregistra un plaidoyer de culpabilité à l’endroit de tous et chacun des dix-huit (18) chefs d’accusation contenus à la plainte.

[3]           La plaignante réclama alors du comité qu’il reconnaisse l’intimé coupable sous chacun desdits chefs.

[4]           Avant de ce faire, le comité demanda que lui soit transmis l’essentiel des éléments de preuve recueillis par la plaignante et cette dernière déposa au dossier une imposante preuve documentaire qui fut cotée P-1 à P-20.

[5]           L’audition fut ensuite suspendue pour permettre au comité d’en prendre connaissance.

[6]           Après révision de celle-ci et compte tenu du plaidoyer de culpabilité, le comité déclara l’intimé coupable de tous et chacun des dix-huit (18) chefs d’accusation contenus à la plainte.

[7]           Le comité procéda ensuite à l’audition sur sanction.

PREUVE DES PARTIES SUR SANCTION

[8]           La plaignante, par l’entremise de sa procureure, débuta sa preuve en versant au dossier sous la cote SP-1 une décision datée du 22 septembre 2010, émanant du Directeur des OAR, de l’indemnisation et des pratiques en matière de distribution de l’AMF assortissant alors le certificat de l’intimé à trois (3) conditions.

[9]           Elle déposa également, sous la cote SP-2, une décision antérieure du comité, rendue le 20 septembre 2011, où l’intimé a été reconnu coupable de six (6) chefs d’accusation et condamné au paiement d’amendes totalisant 30 000 $.

[10]        Elle termina en produisant sous la cote SP-3 la copie d’une « mise en garde » que la syndique adressait à l’intimé le 10 février 2012.

[11]        Quant à l’intimé, par l’entremise de son procureur, il déclara n’avoir aucune preuve à offrir.

[12]        Les parties soumirent ensuite au comité leurs représentations respectives.

REPRÉSENTATIONS DE LA PLAIGNANTE

[13]        La plaignante résuma d’abord brièvement les faits. Elle déclara ensuite que les parties s’étaient entendues pour soumettre au comité des « représentations communes » sur sanction.

[14]        Elle indiqua qu’elles s’étaient accordées pour lui proposer d’imposer à l’intimé les sanctions suivantes :

Sous chacun des chefs d’accusation 1, 7 et 12 : le paiement d’une amende de 5 000 $ (total 15 000 $);

Sous chacun des chefs d’accusation 2, 8 et 13 : le paiement d’une amende de 5 000 $ (total 15 000 $);

Sous le chef d’accusation 18 : le paiement d’une amende de 10 000 $;

Sous chacun des chefs d’accusation 3, 4, 5, 6, 9, 10, 11, 14, 15, 16 et 17 : l’imposition d’une réprimande.

[15]        Elle ajouta qu’elles s’étaient également accordées pour suggérer la condamnation de l’intimé au paiement des déboursés.

[16]        Elle expliqua que les parties avaient convenu de suggérer l’imposition d’une amende de 5 000 $ (sauf relativement au chef 18, sur lequel nous reviendrons) pour chacune des années où le même type d’infraction avait été commis par l’intimé, et l’imposition de réprimandes lorsque l’infraction était répétée la même année.

[17]        Relativement à la suggestion d’une amende de 10 000 $ sous le chef 18, elle souligna que cette infraction avait été commise après la réception par l’intimé de la mise en garde SP-3 (le 10 février 2012), et que pour cette raison les parties avaient convenu de recommander au comité l’imposition d’une amende de 10 000 $ plutôt que de 5 000 $.

[18]        Elle évoqua ensuite les facteurs aggravants et atténuants suivants :

Facteurs aggravants :

-               la gravité objective des infractions commises, les assureurs devant pouvoir se fier aux renseignements transmis par les représentants;

-               la position d’autorité (à titre de dirigeant de son cabinet) occupée par l’intimé, au moment des événements reprochés;

-               de multiples infractions, répétées sur une période de plus de trois (3) ans, dont bon nombre ont été commises alors que, suite à la décision du Directeur des OAR de l’AMF, l’intimé était « sous supervision »;

-               la longue expérience de l’intimé qui aurait dû le mettre à l’abri de la commission d’infractions de la nature de celles qui lui sont reprochées (il a débuté dans la profession en 1994);

-               le passé disciplinaire de l’intimé, ce dernier ayant été reconnu coupable par notre comité le 20 septembre 2011 sous six (6) chefs d’accusation et condamné alors au paiement d’amendes totalisant 30 000 $;

-               la persistance de l’intimé dans le même comportement fautif (chef 18), et ce, après qu’une mise en garde lui eut été adressée par la syndique le 10 février 2012.

Facteurs atténuants :

-               l’admission par l’intimé de ses fautes et l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité à l’égard de tous et chacun des chefs d’accusation contenus à la plainte;

-               sa collaboration à l’enquête de la plaignante;

-               ses déclarations à l’effet que des mesures correctives ont été prises à son cabinet afin d’éviter que des comportements tels que ceux qui lui sont reprochés ne puissent se reproduire;

-               une situation où les clients ont néanmoins été rencontrés par des représentants certifiés et non pas par des gens ne détenant aucune autorité ou compétence.

[19]        Elle termina en invoquant au soutien de ses recommandations quatre (4) décisions antérieures du comité[1], prenant le soin d’analyser chacune d’elles et d’en comparer les faits avec ceux en l’espèce.

REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ

[20]        Le procureur de l’intimé débuta en soulignant que ce qui était reproché à son client était avant tout une « façon de faire » du cabinet. Il indiqua qu’il s’agissait d’une conduite que l’on y croyait alors, mais à tort, permise.

[21]        Il signala ensuite que ce dernier avait reconnu ses fautes et enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’égard de tous et chacun des dix-huit (18) chefs d’accusation contenus à la plainte.

[22]        Il insista qu’il n’avait d’aucune façon été animé d’une intention malveillante, rappelant que les personnes qui avaient rencontré les consommateurs étaient des représentants certifiés et non pas des gens sans compétence ou certification.

[23]        Il mentionna que lesdits consommateurs n’avaient en conséquence subi aucun préjudice.

[24]        Il affirma enfin que son client avait pris les mesures nécessaires à son cabinet pour éviter que les fautes qui lui sont reprochées ne se reproduisent et qu’il y avait donc peu de risques de récidive.

[25]        Relativement à la condamnation antérieure de ce dernier, il déclara qu’il s’agissait d’une « histoire bien différente » de la présente affaire, ajoutant que de toute façon la plupart des fautes qui lui étaient maintenant reprochées découlaient d’une conduite antérieure à la décision du comité.

[26]        Il termina en affirmant que son client regrettait ses fautes, que « le message avait été compris », « la leçon apprise » et qu’en consentant à l’imposition de sanctions sévères, soit des amendes totalisant 40 000 $, ce dernier démontrait qu’il les assumait.

[27]        En dernier lieu, il réclama du comité un délai de trente-six (36) mois pour l’acquittement des amendes, se déclarant par ailleurs d’accord pour que celui-ci doive s’effectuer au moyen de versements mensuels, égaux et consécutifs sous peine de déchéance du terme et de non-renouvellement des certificats émis par l’AMF en faveur de l’intimé.

REPRÉSENTATIONS ADDITIONNELLES DE LA PLAIGNANTE

[28]        La plaignante répliqua à cette dernière demande en mentionnant qu’il lui semblerait plus approprié que le délai accordé ne dépasse pas vingt-quatre (24) mois.

MOTIFS ET DISPOSITIF

[29]        Selon les documents déposés au dossier, l’intimé a débuté dans la distribution de produits d’assurance de personnes en 1994.

[30]        Il a collaboré à l’enquête de la plaignante et a reconnu ses fautes.

[31]        À la première occasion, il a enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’endroit de tous et chacun des dix-huit (18) chefs d’accusation contenus à la plainte.

[32]        Les fautes qui lui sont reprochées sont toutes sensiblement de même nature : chacun des chefs d’accusation lui reproche d’avoir erronément signé soit à titre de représentant, soit à titre de conseiller et de témoin de la signature des clients sur des documents destinés à l’assureur.

[33]        Ses manquements n’ont eu aucune conséquence pour les clients et aucun préjudice ne leur a été causé.

[34]        Si l’on se fie à ses affirmations, il aurait pris des mesures correctives à son cabinet pour éviter que les infractions qui lui sont reprochées ne se reproduisent.

[35]        Rien n’indique qu’il puisse avoir été animé d’une intention malicieuse ou malhonnête.

[36]        Néanmoins il a commis, sur une période de plus de quatre (4) ans, des fautes multiples et répétées, d’une gravité objective indéniable.

[37]        Les « fausses signatures » de l’intimé exposaient les clients et/ou l’assureur à de possibles conséquences préjudiciables. Son expérience aurait dû le mettre à l’abri de la commission de telles fautes.

[38]        De plus, le comité n’est pas en présence d’un représentant sans antécédents disciplinaires puisque ce dernier a, le 20 septembre 2011, été reconnu coupable par notre comité de six (6) infractions aux règles déontologiques de la profession.

[39]        Ajoutons qu’il a de plus fait l’objet, le 10 février 2012, d’une mise en garde de la syndique.

[40]        Enfin ses fautes vont au cœur de l’exercice de la profession et sont de nature à discréditer celle-ci.

[41]        Au plan des sanctions qui doivent lui être imposées, les parties ont soumis au comité ce qu’il est convenu d’appeler des « recommandations communes ».

[42]        Or dans l’arrêt Douglas[2], la Cour d’appel du Québec a clairement indiqué la marche à suivre lorsque les parties représentées par avocat sont parvenues à s’entendre pour présenter au tribunal de telles recommandations.

[43]        Elle y a clairement indiqué que celles-ci ne devraient être écartées que si le tribunal les juge inappropriées, déraisonnables, contraires à l’intérêt public ou est d’avis qu’elles sont de nature à discréditer l’administration de la justice.

[44]        L’applicabilité de ce principe au droit disciplinaire a à quelques reprises été confirmée par le Tribunal des professions[3].

[45]        En l’instance, après étude et examen attentif du dossier, le comité est d’avis que les recommandations conjointes des parties sont, notamment lorsque considérées dans leur globalité, justes et raisonnables et il y donnera suite.

[46]        De plus, conformément à la règle voulant que la partie qui succombe assume habituellement les frais, le comité condamnera l’intimé au paiement des déboursés.

[47]        Enfin, compte tenu du montant important des amendes qu’il aura à défrayer et considérant que ce dernier devra de plus acquitter les déboursés, le comité accordera à l’intimé un délai de trente-six (36) mois pour le paiement desdites amendes à la condition que celui-ci soit effectué au moyen de versements mensuels, égaux et consécutifs débutant le trentième jour de la présente décision sous peine de déchéance du terme et sous peine de non-renouvellement des certificats émis par l’AMF dans toutes les disciplines où il lui est permis d’agir.

PAR CES MOTIFS, le comité de discipline réitère qu’il :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé sous chacun des dix-huit (18) chefs d’accusation contenus à la plainte;

DÉCLARE l’intimé coupable de chacun des dix-huit (18) chefs d’accusation contenus à la plainte;

ET, PROCÉDANT SUR SANCTION :

Sous chacun des chefs 1, 7 et 12 :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $ (total 15 000 $);

Sous chacun des chefs 14 et 15 :

IMPOSE à l’intimé une réprimande;

Sous chacun des chefs 2, 8 et 13 :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 5 000 $ (total 15 000 $);

Sous le chef 18 :

CONDAMNE l’intimé au paiement d’une amende de 10 000 $;

Sous chacun des chefs 3, 4, 5, 6, 9, 10, 11, 16 et 17 :

IMPOSE à l’intimé une réprimande;

ACCORDE à l’intimé un délai de trente-six (36) mois pour le paiement des amendes lequel devra toutefois s’effectuer au moyen de versements mensuels, égaux et consécutifs débutant le trentième jour de la présente décision, sous peine de déchéance du terme et sous peine de non-renouvellement des certificats émis en son nom par l’Autorité des marchés financiers, dans toutes les disciplines où il lui est permis d’agir;

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés, y compris les frais d’enregistrement conformément aux dispositions de l’article 151 du Code des professions, RLRQ, c. C-26.

 

 

(s) François Folot____________________

Me FRANÇOIS FOLOT, avocat

Président du comité de discipline

 

(s) Robert Chamberland_______________

M. ROBERT CHAMBERLAND, A.V.A.

Membre du comité de discipline

 

(s) Claude Trudel____________________

M. CLAUDE TRUDEL, A.V.A.

Membre du comité de discipline

 

Me Julie Piché

THERRIEN COUTURE avocats

Procureurs de la partie plaignante

 

Me Daniel Dumais

NORTON ROSE FULBRIGHT, s.e.n.c.r.l., s.r.l.

Procureur de la partie intimée

 

Date d’audience :

12 février 2014

COPIE CONFORME À L’ORIGINAL SIGNÉ



[1]     Caroline Champagne c. Yvan Ardouin, CD00-0864, décision sur culpabilité et sanction en date du 14 février 2012; Nathalie Lelièvre c. Louise Demers, CD00-0929, décision sur culpabilité et sanction en date du 16 janvier 2013; Caroline Champagne c. Sylvain Paquet, CD00-0919, décision sur culpabilité et sanction en date du 24 janvier 2013 et Caroline Champagne c. Marie-Claude Dubois, CD00-0969, décision sur culpabilité et sanction en date du 9 octobre 2013.

[2]     R. c. Douglas, 2002, 162 C.C.C. 3rd (37).

[3]     Voir entre autres Maurice Malouin c. Maryse Laliberté, 2002 QCTP 15 CanLII.

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