Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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 COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

N° :

2008-09-01 (C)

 

DATE :

19 janvier 2009

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Patrick de Niverville

Président

Mme Lyne Leseize, courtier en assurance de dommages des particuliers

Membre

M. Benoit Ménard, C.d’A.Ass.,

courtier en assurance de dommages

Membre

______________________________________________________________________

 

CAROLE CHAUVIN, ès qualités de syndic de la  Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante

c.

 

DANIEL DUCHAMPS, C.d’A.Ass., courtier en assurance de dommages

Partie intimée

_____________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ

______________________________________________________________________

 

ORDONNANCE DE NON-PUBLICATION, DE NON DIFFUSION ET DE NON ACCESSIBILITÉ DE TOUT RENSEIGNEMENT NOMINATIF ET PLUS PARTICULIÈREMENT DE TOUT DOCUMENT OU RENSEIGNEMENT DE NATURE FINANCIÈRE CONCERNANT L’ASSURÉE, Mme RICHÈRE FOURNELLE.

(Art. 142 du Code des professions)

______________________________________________________________________

[1]      Le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages s’est réuni le 11 décembre 2008 pour procéder à l’audition d’une plainte portée contre l’intimé portant le no 2008-09-01 (C);


LA PLAINTE

[2]      La plainte disciplinaire reproche à l’intimé, Daniel Duchamps, d’avoir utilisé les coordonnés bancaires de Mme Richère Fournelle sans avoir obtenu, au préalable, son autorisation;

[3]      Plus particulièrement, les faits reprochés à l’intimé sont les suivants :

 

            1.  Le ou vers le 6 septembre 2002, a fait défaut de respecter la confidentialité des renseignements personnels de l’assurée, Mme Richère Fournelle, en transmettant à la compagnie AXA Assurances ses coordonnées bancaires, pour le paiement de la prime de sa police d’assurance habitation n° 01-762-613 2,  par débits préautorisés, alors qu’elle n’avait pas consenti à payer selon cette méthode de paiement, utilisant ainsi ou permettant que soient utilisées les coordonnées bancaires de cette assurée à d’autres fins que celles pour lesquelles il les avait obtenues, le tout en contravention avec  la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment l’article 16 de la loi et les articles 23 et 24 dudit code;

 

 2.   Entre le 5 septembre 2002 et le 1er août 2006, a fait défaut de rendre compte de l’exécution   du mandat reçu de son assurée, Mme Richère Fournelle, et a agi avec négligence, en  conservant dans son dossier, sans l’en informer, les chèques qu’elle lui avait fait parvenir pour le paiement des primes de renouvellement de sa police d’assurance habitation AXA n° 01-762-613 2 à savoir :

 

     a)   une série de 3 chèques libellés à l’ordre d’AXA Assurances, datés du 5 septembre 2002  d’un montant de 76,69 $, du 4 octobre 2002 d’un montant de 76,65 $ et du 1er novembre 2002 d’un montant de 76,65 $;

 

     b)   une série de 3 chèques libellés à l’ordre d’Assurances J.C. Duchamps, datés du 2 août 2004 d’un montant de 77,39 $, du 1er septembre 2004 d’un montant de 77,39 $ et du 1er octobre 2004 d’un montant de 77,39 $;

 

     c)   une série de 3 chèques libellés à l’ordre d’Assurances J.C. Duchamps, datés du 1er août 2005 d’un montant de 78,15 $, du 1er septembre 2005 d’un montant de 78,10 $ et du 3 octobre 2005 d’un montant de 78,10 $;

 

     d)   un chèque libellé à l’ordre d’Assurances J.C. Duchamps, daté du 31 juillet 2006 d’un montant de 76,96 $

 

sans l’aviser que les primes étaient payées par débits préautorisés, le tout en contravention avec la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment l’article 16 de la loi et les articles 25, 26, 37°1 et 37°4 dudit code;

       3.  Entre le ou vers le 5 décembre 2006 et le ou vers le 22 mai 2007, a fait défaut d’agir en conseiller consciencieux et a agi avec négligence en ne faisant pas de démarches auprès d’AXA Assurances afin que la police d’assurance habitation n° 01-762-613 2, au nom de Mme Richère Fournelle, ne soit pas résiliée le 21 décembre 2006 ou, après cette date, qu’elle soit remise en vigueur, compte tenu de « l’imbroglio » relatif aux refus de paiements de l’assurée après que celle-ci eût constaté des débits non autorisés de son compte bancaire, le tout en contravention avec  la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment l’article 16 de la loi et les articles 9, 26, 37°1 et 37°6 dudit code;

         L’intimé s’est ainsi rendu passible, pour les infractions ci-haut mentionnées, des sanctions prévues à l’article 156 du Code des professions;

 

[4]      La plaignante était représentée par Me Nathalie Lelièvre, alors que l’intimé était dûment représenté par Me Lise Gagnon;

 

2.    LES FAITS

[5]       Le 8 février 2007, l’assurée  Mme. Fournelle dépose une plainte (pièce P-2) auprès du Bureau du syndic de la ChAD, dont les passages pertinents, se lisent comme suit ;

" Depuis maintenant quinze ans que je renouvelle mon assurance avec le même courtier, soit Assurance J.C. Duchamps, qui eux ont signé le contrat auprès d’Axa assurance. Mon mode de paiement a toujours été le même, soit l’envoi de trois chèques post-datés pour les trois premiers mois de l’année en cours. Il n’a jamais été question durant toutes ces années que le paiement leur soit fait par retrait autorisé dans mon compte bancaire.

Au moment de mon renouvellement pour la période du 1er août 2006 au 1er août 2007, moi et mon conjoint éprouvions des difficultés financières. Mon conjoint était en arrêt de travail pour cause de maladie du mois de novembre2006 et moi j’étais sur l’assurance-emploi car j’ai perdu mon emploi en juillet 2005. Nos finances étaient au plus bas et les problèmes de finances se sont accumulés.

Lorsque j’ai envoyé mon renouvellement pour ma police d’assurance je leur ai fait parvenir seulement un chèque au montant de 79,96 $ pour le début du mois d’août. Je suis consciente que j’aurais dû l’appeler pour l’en aviser mais je ne l’ai pas fait car j’étais trop déprimée. Je réalise que ce n’est pas une raison pour eux, mais c’était ce que vivais à ce moment. Mon assiette était pleine…

À un moment donné au mois d’octobre, j’étais en train de vérifier mes relevés bancaires et quelle ne fut pas ma surprise de constater que deux autres retraits avaient été fait par la compagnie d’assurance sans mon autorisation.

J’ai contacté ma banque pour savoir comment était-il possible qu’Axa assurance fasse des retraits sans mon autorisation. On m’a informé de vérifier auprès de mon assureur car c’était eux qui avaient établi cette assurance avec le prélèvement pré-autorisé. Ils m’ont aussi suggéré de passé à la banque de façon à faire remplir un formulaire pour faire renverser ces deux prélèvements. Ce que j’ai fait.

Environ deux semaines plus tard, j’ai reçu une lettre de la compagnie Axa assurance m’avisant qu’ils ont résilié ma police habitation en raison de non-paiement et on me réclamait les frais de retour que ma banque leur a chargés. Vous trouverez ci-joint une copie de cette lettre.

Lorsque j’ai reçu celle-ci, j’ai téléphoné mon courtier pour lui exposer la situation. Il m’a dit qu’il allait voir ce qu’il pouvait faire et me rappeler. Voyant qu’il ne me rappelait pas, j’ai tenté à plusieurs reprises de le rejoindre, je lui ai laissé plusieurs messages pendant plus d’un mois. Toujours pas de nouvelles. Finalement, un jour en revenant de mes cours j’ai fait une dernière tentative et il m’a répondu."

" Il m’a avisé que je devais oublier mon contrat actuel, qu’il était impossible de le rétablir, et que c’est moi qui leur avais donné à Assurance J.C. Duchamps mes informations bancaires. Je lui ai fais remarquer qu’il est effectivement normal qu’il a eu accès à mes références bancaires puisque cela fait presque 15 ans que je leur envoie des chèques tous les ans, mais que je ne l’ai jamais autorisé à faire des prélèvements automatiques.

Suite à cette information, il m’a dit qu’il allait me rappeler dans quelques minutes. Ce qu’il a fait, en me disant qu’il avait réglé le problème de crédit auprès d’Axa assurance, que je ne leur devais plus rien, mais que maintenant si je désire une nouvelle police il va m’en coûter plus cher étant donné que la mention de « résiliation pour non-paiement » figure à mon dossier et qu’il n’y pas beaucoup de courtier qui assure les gens qui ont cette mention à leurs dossiers.

Je trouve cette façon de faire injuste. Que le problème part du fait qu’ils se sont servis dans mon compte bancaire et qu’il n’était pas autorisé à le faire. Si j’avais reçu une lettre de rappel de leur part toute cette histoire se serait passée bien différemment."

(nos soulignements)

 

[6]     De son côté, l’intimé nie catégoriquement les faits allégués par Mme Fournelle;

[7]     Essentiellement l’intimé expose au comité, les faits suivants :

        En 2002, son cabinet est passé à la "facturation directe";

        L’assurée reçoit donc un avis de perception (P-10, p.26) directement de la compagnie d’assurance AXA;

        Il reçoit alors un appel de Mme Fournelle, vers le 6 septembre 2002, laquelle s’interroge sur la raison d’être de cet avis, puisqu’elle a déjà payé par chèque;

        L’intimé aurait alors expliqué à Mme Fournelle qu’il était préférable de procéder par prélèvements bancaires;

        Suivant sa version des faits, Mme Fournelle lui donne verbalement ses coordonnées bancaires et il les inscrit, à la main, sur l’avis de perception (p.26 de P-10);

        Par la suite, un nouvel "avis de perception" est émis  (p. 29 de la pièce P-10) indiquant les informations bancaires et le mode de paiement par prélèvement bancaires;

[8]    Quant au deuxième chef d’accusation, l’intimé reconnaît avoir conservé les chèques de l’assurée mais dans le seul et unique but d’en préserver la confidentialité et d’éviter que ceux-ci ne s’égarent dans le système postal canadien;   

              [9]   Pour le troisième d’accusation, l’intimé explique avoir fait des démarches auprès                                d’AXA Assurances, mais que celles-ci se sont avérées infructueuses en raison de      l’annulation de deux paiements consécutifs par Mme Fournelle;     

                

3.    MOTIFS ET DISPOSITIFS

A.   Chef no 1

[10]   Le chef no 1 de la plainte reproche à l’intimé d’avoir transmis à la compagnie  AXA  Assurances les coordonnés bancaires de l’assurée, sans son consentement, dans le but d’acquitter le paiement des primes d’assurances par prélèvements, alors que celle–ci n’avait pas consenti à ce mode de paiement;

[11]  Suivant l’intimé, Mme Fournelle aurait consenti verbalement à ce mode de paiement lors de sa conversation téléphonique du 6 septembre 2002;

[12]   Il précise de plus, qu’il n’avait pas encore reçu les chèques (page 31 de la pièce P‑10) et que, par conséquent, l’assurée lui a nécessairement transmis ses coordonnées bancaires lors de leur conversation téléphonique;

[13]  D’ailleurs, il insiste à plusieurs reprises au cours de son témoignage sur les  inscriptions manuscrites que l’on retrouve sur l’avis de perception du 4 juillet 2002 (page 26 de la pièce P-10) lesquelles démontrent, à son avis, que les coordonnées bancaires lui furent communiquées verbalement puisqu’il a pris la peine de les inscrire sur ce document alors qu’il discutait au téléphone avec l’assurée;

[14]   Ainsi, il prétend qu’il aurait été facile d’utiliser directement les informations  inscrites aux chèques sans les reproduire, de façon manuelle, sur l’avis de perception;

[15]  Cela démontre, à son avis, que ces informations lui furent véritablement transmises verbalement par Mme Fournelle;

[16]   A cela, s’ajoute le fait que le dossier ne contient aucun chèque pour l’année 2003, démontrant encore une fois que Mme Fournelle aurait consenti à ce mode de paiement;

[17]   De plus, l’intimé précise que cette situation fut expliquée à l’assurée à chaque renouvellement d’assurance et, qu’elle a donc consenti à cette procédure;

[18]   En contre-interrogatoire, l’intimé a reconnu qu’il n’a jamais obtenu de consentement écrit de la part de l’assurée, tel que l’exige l’avis de perception (page 26 de la pièce P-10) dans les termes suivants :

" Retournez-nous le formulaire d’autorisation bancaire (au  verso) dûment rempli et signé, accompagné d’un spécimen de chèque portant la mention "annulé" dans l’enveloppe ci-jointe, afin de nous permettre d’effectuer les prélèvements automatiques"

[19]   A défaut d’un tel formulaire, l’intimé reconnait également qu’il n’a jamais fait parvenir à sa cliente une lettre confirmant son consentement pour les prélèvements bancaires;

[20]    Pour l’intimé, le deuxième avis de perception (page 29 de la pièce P-10) qui fut acheminé par AXA Assurances, constitue une confirmation de l’entente de prélèvements intervenue entre les parties;

[21]     Enfin, l’intimé précise que ce processus fut expliqué à l’assurée à chaque année et qu’elle a toujours consenti à cette méthode de paiement;

[22]  Il y a lieu de souligner que le Comité a eu le bénéfice d’entendre deux représentants de la compagnie AXA Assurances;

[23]     Suivant cette preuve, il appert que :

        Le courtier a l’obligation d’avoir en main le formulaire "autorisation de prélèvements" dûment rempli avant de transmettre les informations bancaires (page 7 de la pièce P-7);

        Qu’il doit conserver à son dossier le formulaire de même que le spécimen de chèque (page 6 de la pièce P-7);

[24]     De l’ensemble de cette preuve, le Comité conclut qu’il y a lieu de déclarer l’intimé coupable du chef no 1, mais avec certaines nuances, tel que décrit dans les motifs        ci-après exprimés;

[25]    Au-delà des versions contradictoires de l’assurée et de l’intimé, concernant le  consentement verbal de l’assurée au mode de paiement par prélèvements bancaires, il demeure néanmoins que l’intimé a manqué de professionnalisme au sens de l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers;

 [26]    Ainsi, l’intimé sera acquitté des infractions relatives aux articles 23 et 24 du code de déontologie des représentants en assurance de dommages (R.Q. c.D-9.2, R.1.03), puisque ces deux dispositions n’excluent pas la possibilité d’obtenir un consentement verbal de la part du client avant d’utiliser ses renseignement personnels ou de nature confidentielle;

[27]     Tel que le rappelait le Tribunal des professions, dans l’affaire Osman1, il ne suffit pas au Comité de préférer la théorie de la plaignante par sympathie pour les problèmes qu’elle a pu endurer, encore faut-il que la preuve soit claire et convaincante :

   "  Il n’y a pas lieu de créer une nouvelle charge de preuve. Il importe toutefois de rappeler que la prépondérance, aussi appelée balance des probabilités, comporte des exigences indéniables. Pour que le syndic s’acquitte de son fardeau, il ne suffit pas que sa théorie soit probablement plus plausible que celle du professionnel. Il faut que la version des faits offerts par ses témoins comporte un tel degré de conviction que le Comité la retient et écarte celle de l’intimé parce que non digne de foi.

Si le Comité ne sait qui croire, il doit rejeter la plainte, le poursuivant n’ayant pas présenté une preuve plus persuasive que l’intimé. Il ne suffit pas que le Comité préfère la théorie du plaignant par sympathie pour ses témoins ou par dégoût envers les gestes reprochés au professionnel. Il est essentiel que la preuve à charge comporte un degré de persuasion suffisant pour entraîner l’adhésion du décideur et le rejet de la théorie de l’intimé.

La prépondérance de preuve n’est pas une sinécure pour les Comités de discipline. Elle n’est pas une affaire de préférence émotive, mais bien d’analyse rigoureuse de la preuve. Elle impose au syndic un fardeau exigeant et une preuve de qualité, faute de quoi il se verra débouté purement et simplement " (p.263);

[28]      Dans le même ordre d’idées, le tribunal déclarait dans l’affaire Parizeau2 :

 " Pour décider si la preuve était suffisante pour justifier un verdict de culpabilité, le Comité devait donc juger la preuve à charge de haute qualité, claire et convaincante, démontrant suivant la prépondérance des probabilités la commission de l’infraction. Une preuve claire ne saurait être ambiguë, douteuse ou équivoque. Elle ne tolère  pas la confusion ou l’incertitude. Prise dans son ensemble, elle convainc le décideur de la culpabilité, s’il y a lieu";

 [29]    En conséquence, l’intimé sera acquitté des infractions visées par les articles 23 et 24 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, vu le caractère équivoque de la preuve quant à l’absence de consentement verbal de la part de l’assurée;

 [30]    En effet, le Comité entretient de sérieux doutes quant à ces infractions en raison de la présence des inscriptions manuscrites sur l’avis de perception du 4 juillet 2002 (page 26 de P-10) de même qu’en raison de l’absence de chèques pour l’année 2003;

[31]    Les doutes du Comité sont également renforcés par le long délai écoulé entre le début des prélèvements bancaires en 2002 et la plainte de l’assurée en 2007;

____________________________

[1]     Osman c. Médecins [1994] D.D.C.P 257 (T.P);

2     Parizeau c. Avocats [2001] D.D.O.P 256 (T.P) voir paragraphe 81;

 

[32]   Cependant, le Comité n’a aucun doute que l’intimé a manqué de professionnalisme au sens de l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers pour les motifs ci-après exposés ;

[33]     Tel que le soulignait récemment la Cour d’appel dans l’affaire Beaucage3;

" [82]    La LDPSF peut être assimilée à une loi d’organisation des ordres professionnels. Elle contient des dispositions qui sont d’ordre public de direction. Toute interprétation doit faire primer les intérêts du public sur les intérêts privés.

[83]      Traitant du fondement de la responsabilité disciplinaire, le juge Dussault, au nom de  la cour, en relève les principales caractéristiques dans l’affaire Ordre des ingénieurs du Québec c. Dionne [21]. Ces propos peuvent s’appliquer à l’espèce avec les adaptations appropriées. Le juge Dussault dit ce qui suit :

              [43]        À mon avis, le fondement de la responsabilité disciplinaire du professionnel réside dans les actes posés à ce titre tels qu’ils peuvent être perçus par le public. Les obligations déontologiques d’un ingénieur doivent donc s’apprécier in concreto et ne sauraient se limiter à la sphère contractuelle; elles la précèdent et la transcendent. Sinon, ce serait anéantir sa responsabilité déontologique pour tous les actes qu’il pose en dehors de son mandat, mais dans l’exécution de ses activités professionnelles et, de ce fait, circonscrire de façon indue la portée d’une loi d’ordre public qui vise la protection du public."

[34]    Or, l’intimé a manqué à son devoir d’ordre public d’agir avec professionnalisme au sens de l’article 16 de la LDPSF, plus particulièrement :

         En faisant défaut d’obtenir de sa cliente un formulaire "d’autorisation de prélèvements bancaires" dûment rempli avant de transmettre à la compagnie AXA Assurances les coordonnées bancaires de sa cliente;

 [35]     De toute évidence, cette procédure existe afin de s’assurer que le client consent de façon expresse à la transmission d’informations confidentielles de même qu’aux prélèvements bancaires qui en découleront;

[36]    Cette procédure vise, d’une part, à assurer la protection du public et d’autre part, la sécurité des transactions bancaires;

[37]    Il est clair que l’assurée n’a jamais "consenti à payer selon cette méthode de paiement" tel qu’allégué au chef no 1 de la plainte;

______________________________

3     Chauvin c. Beaucage [2008] QCCA 922;

 

[38]   Or, la "méthode de paiement" mise en place par AXA Assurances exigeait certaines formalités que tout professionnel consciencieux et compétent se devait de respecter;

[39]   En conséquence, l’intimé sera reconnu coupable d’avoir enfreint l’article 16 de la LDPSF;

[40]    Cela étant dit, le Comité estime que le chef no 1 tel que libellé lui permet d’arriver à cette conclusion, puisque, tel que le soulignait la Cour d’appel dans l’affaire Dionne :

" [84]   D’une part, les éléments essentiels d’un chef de plainte disciplinaire ne sont pas constitués par son libellé, mais par les dispositions du code de déontologie ou du règlement qu’on lui reproche d’avoir violées (Fortin c. Tribunal des profession, [2003] R.J.Q. 1277, paragr. [136]. (C.S); Béliveau c. Comité de discipline du Barreau du Québec, précité, Béchard c. Roy, précité; Sylvie Poirier, précitée, à la p.25). De plus, le Code des professions exige simplement que le libellé de l’infraction indique sommairement la nature et les circonstances de temps et de lieu de l’infraction reprochée au professionnel (article129) et permette à l’intimé de présenter une défense pleine et entière (article144). J’estime ces exigences remplies en l’espèce. Enfin, en lisant les chefs 1 et 4 de la plainte, il me paraît clair, comme le souligne l’appelant, qu’on ne peut raisonnablement prétendre que leurs termes introductifs « dans le cadre d’un mandat relatif à la surveillance de la construction» ont pu induire l’intimé en erreur sur la portée réelle des infractions reprochées."

 [41]    Enfin, rappelons qu’il suffit au plaignant "d’établir de manière prépondérante l’un des éléments essentiels et déterminants du geste reproché pour que le professionnel soit trouvé coupable de cette "partie prouvée" de l’infraction;"5

[42]    Pour l’ensemble de ces motifs, l’intimé sera reconnu coupable d’une infraction à l’article 16 de la LDPSF, mais acquitté des infractions visées par les articles 23 et 24 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages; 

B.  Le chef no 2

[43]    Vu l’admission de l’intimé suivant laquelle il reconnait avoir conservé les chèques de l’assurée, celui-ci sera reconnu coupable du chef no 2 de la plainte;

[44]    De plus, la preuve démontre clairement qu’il a été négligeant en ne retournant pas les chèques à sa cliente;

[45]    L’intimé sera donc reconnu coupable de négligence au sens de l’article 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages et un arrêt des procédures sera prononcé sur toutes les autres dispositions législatives ou réglementaires alléguées au soutien du chef no 2; 

____________________________

4     Tremblay c. Dionne [2006] QCCA 1441;

 

 C.  Le chef no 3

[46]    Quand au chef no 3, l’intimé sera également reconnu coupable d’avoir agi avec négligence au sens de l’article 37 (1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages pour les motifs ci-après exprimés;

[47]  De l’aveu même de l’intimé, celui-ci s’est contenté de présenter un cas hypothétique au souscripteur  d’AXA Assurances, sans jamais lui dévoiler le nom de sa cliente et surtout sans faire référence à tout l’imbroglio ayant résulté de sa négligence et de son manque de suivi dans le dossier de Mme Fournelle;

[48]   D’ailleurs, ni son dossier, ni celui de la compagnie d’assurance ne contient aucune note de ces prétendues démarches6;

 [49]     Enfin, la preuve a révélé qu’un autre courtier, soit M. Bradette, avait lui réussi à obtenir pour Mme Fournelle une nouvelle police d’assurance auprès d’AXA (voir page 60 de la pièce P-10);

[50]  Pour ces motifs, l’intimé est reconnu coupable d’avoir enfreint l’article 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages et un arrêt des procédures sera prononcé sur les autres dispositions alléguées au chef no 3;

 

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

Pour le chef no 1:

DÉCLARE l’intimé coupable d’avoir contrevenu à l’article 16 de la LDPSF;

ACQUITTE l’intimé des infractions visées par les articles 23 et 24 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (R.Q.c.D-9.2, R.1.03);

_____________________________

5     Parizeau  c. Barreau du Québec [2001] QCTP 43, parg.99;

6     Bérubé  c. Hôpital Hôtel–Dieu de Lévis [2003] CANLII 55071 (QCCA) parg.24;

     "Ce qui n’a pas été noté, n’a pas en principe été fait".

 

 

Pour le chef no. 2:

DÉCLARE l’intimé coupable d’avoir contrevenu à l’article 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (R.Q.c.D-9.2, R.1.03);          

PRONONCE un arrêt des procédures sur les articles 25, 26 et 37(4) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (R.Q.c.D-9.2, R.1.03), de même que pour l’article 16 de la LDPSF;

Pour le chef no 3:

DÉCLARE l’intimé coupable d’avoir contrevenu à l’article 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (R.Q.c.D-9.2, R.1.03);

PRONONCE un arrêt des procédures sur les articles 9, 26 et 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (R.Q.c.D-9.2, R.1.03) de même que pour l’article 16 de la LDPSF;

Conclusions :

DEMANDE  à la secrétaire du Comité de discipline de convoquer les parties pour l’audition sur sanction;

Prononce une ordonnance de non publication, de non diffusion et de non accessibilité à tout renseignement nominatif et plus particulièrement de tout document ou renseignement de nature financière concernant l’assurée, Mme Richère Fournelle, le tout suivant l’article 142 du Code des professions;

 

LE TOUT, frais à suivre.

 

 

 

 

__________________________________

Me Patrick de Niverville

Président du comité de discipline

 

 

 

__________________________________

Mme Lyne Leseize, courtier en assurance de dommages des particuliers

Membre du comité de discipline

 

 

 

__________________________________

M. Benoit Ménard, C.d’A.Ass.,

courtier en assurance de dommages et

Membre du comité de discipline

 

 

Me Nathalie Lelièvre

Procureur de la partie plaignante

 

 

Me Lise Gagnon

Procureur de la partie intimée

 

Date d’audience :

11 décembre 2008

 


 COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

 

N° :

2008-09-01 (C)

 

DATE :

3 avril 2009

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Patrick de Niverville

Président

M. Benoît Ménard, C.d’A.Ass., courtier en assurance de dommages

Membre

Mme Lyne Leseize, courtier en assurance de dommages des particuliers

Membre

______________________________________________________________________

 

CAROLE CHAUVIN, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

 

Partie plaignante

c.

 

DANIEL DUCHAMPS, C.d’A.Ass., courtier en assurance de dommages

 

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR SANCTION

______________________________________________________________________

[1]        Le 24 mars 2009, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages s’est réuni afin de procéder à l’audition sur sanction dans le dossier portant le no 2008-09-01 (C);

[2]        Le 19 janvier 2009, l’intimé fut reconnu coupable des infractions suivantes :

 

1.   Le ou vers le 6 septembre 2002, a fait défaut de respecter la confidentialité des renseignements personnels de l’assurée, Mme Richère Fournelle, en transmettant à la compagnie AXA Assurances ses coordonnées bancaires, pour le paiement de la prime de sa police d’assurance habitation n° 01-762-613 2,  par débits préautorisés, alors qu’elle n’avait pas consenti à payer selon cette méthode de paiement, utilisant ainsi ou permettant que soient utilisées les coordonnées bancaires de cette assurée à d’autres fins que celles pour lesquelles il les avait obtenues, le tout en contravention avec  la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment l’article 16 de ladite loi (…).

 

 2.   Entre le 5 septembre 2002 et le 1er août 2006, a fait défaut de rendre compte de l’exécution   du mandat reçu de son assurée, Mme Richère Fournelle, et a agi avec négligence, en  conservant dans son dossier, sans l’en informer, les chèques qu’elle lui avait fait parvenir pour le paiement des primes de renouvellement de sa police d’assurance habitation AXA n° 01-762-613 2 à savoir :

 

     a) une série de 3 chèques libellés à l’ordre d’AXA Assurances, datés du 5 septembre 2002  d’un montant de 76,69 $, du 4 octobre 2002 d’un montant de 76,65 $ et du 1er novembre 2002 d’un montant de 76,65 $;

 

     b)             une série de 3 chèques libellés à l’ordre d’Assurances J.C. Duchamps, datés du 2 août 2004 d’un montant de 77,39 $, du 1er septembre 2004 d’un montant de 77,39 $ et du 1er octobre 2004 d’un montant de 77,39 $;

 

     c) une série de 3 chèques libellés à l’ordre d’Assurances J.C. Duchamps, datés du 1er août 2005 d’un montant de 78,15 $, du 1er septembre 2005 d’un montant de 78,10 $ et du 3 octobre 2005 d’un montant de 78,10 $;

 

     d)             un chèque libellé à l’ordre d’Assurances J.C. Duchamps, daté du 31 juillet 2006 d’un montant de 76,96 $

 

sans l’aviser que les primes étaient payées par débits préautorisés, le tout en contravention avec la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment (…) l’article 37 par.1 dudit code;

       3.  Entre le ou vers le 5 décembre 2006 et le ou vers le 22 mai 2007, a fait défaut d’agir en conseiller consciencieux et a agi avec négligence en ne faisant pas de démarches auprès d’AXA Assurances afin que la police d’assurance habitation n° 01-762-613 2, au nom de Mme Richère Fournelle, ne soit pas résiliée le 21 décembre 2006 ou, après cette date, qu’elle soit remise en vigueur, compte tenu de « l’imbroglio » relatif aux refus de paiements de l’assurée après que celle-ci eût constaté des débits non autorisés de son compte bancaire, le tout en contravention avec  la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment (…) l’article 37 par.1 dudit code;

[3]        Lors de l’audition sur sanction, la syndic était représentée par Me Nathalie Lelièvre, alors que l’intimé était représenté par Me Lise Gagnon;

 

 

I.            Preuve sur sanction

[4]        La syndic déposa, de consentement, un antécédent disciplinaire (S-1) remontant à 1995, dans lequel l’intimé avait été condamné à une réprimande[1].

[5]        Pour sa part, l’intimé témoigna et déclara :

▪ Qu’il est courtier depuis 1991;

▪ Que le dossier de 1995 concerne une infraction mineure ayant entraîné une simple réprimande;

▪ Qu’il a modifié ses méthodes de travail depuis la décision du 19 janvier 2009 et instauré un cahier de procédures (I-1)

▪ Qu’il obtient maintenant la signature de l’assuré pour les annulations et les prélèvements bancaires;

▪ Qu’il comprend dorénavant que l’assuré doit être informé de toutes ses démarches afin d’éviter toute forme de malentendus ou d’imbroglios;

II.         Argumentation des parties

A)  Pour la syndic

[6]        Me Lelièvre, au nom de la syndic, réclame l’imposition des amendes suivantes :

           Chef no 1 : 1 500 $

Chef no 2 : 1 000 $

Chef no 3 : 1 000 $

[7]        La syndic insiste également pour que l’intimé soit condamné au paiement de tous les déboursés;

[8]        Au soutien de ses prétentions, la syndic plaide :

▪ La gravité objective des infractions, plus particulièrement pour le chef no 1;

▪ La protection du public et la sécurité des transactions bancaires;

▪ La durée des infractions, soit de 2002 à 2006 pour le chef no 2 et sur quelques mois pour le chef no 3;

▪ Que la négligence de l’intimé va au cœur même de la profession;

▪ Le bris de confiance et le préjudice causés à l’assurée;

▪ L’absence de volonté de l’intimé de réellement rétablir la police d’assurance (chef no 3);

▪ L’antécédent disciplinaire de 1995, résultant lui aussi du manque d’information et l’imbroglio qui s’en suivit.

[9]  Quant au cahier de procédures (I-1) instauré depuis la décision sur culpabilité, la syndic souligne qu’il fallait, tout de même, une signature de l’assurée à l’époque des infractions reprochées;

[10]   Enfin, elle dépose deux décisions disciplinaires à l’appui de ses demandes, soit :

-     Chauvin c. Duval [2007] CanLII 33233 (QC C.D CHAD)

-     Chauvin c. Lucien [2007] CanLII 53738 (QC C.D CHAD)

 

B)  Pour l’intimé

[11]    La défense suggère d’imposer une réprimande sur chacun des chefs et de partager les frais entre les parties;

[12]   À l’appui de ses suggestions, Me Gagnon plaide :

   L’absence d’intention malhonnête;

   L’absence de danger pour le public;

   La collaboration de l’intimé à l’enquête du      syndic;

   Le délai de 14 ans écoulé depuis l’antécédent judiciaire de 1995;

   Le remboursement des frais de 73 $ exigés par AXA (P-10, p.46)

[13]   Me Gagnon ajoute que l’assurée a été l’artisane de ses propres malheurs en reversant les paiements, déclenchant ainsi l’annulation de la police d’assurance;

[14]        La défense plaide également le principe de globalité des sanctions et conclut au caractère exagéré des sanctions suggérées par la syndic;

[15]      De plus, Me Gagnon établit certaines distinctions avec les affaires Duval et Lucien en précisant que, dans le présent dossier, l’assurée avait donné, à tout le moins, un consentement verbal;

[16]        Enfin, la défense plaide que la sentence doit coller aux faits du dossier tel que le rappelait la Cour d’appel dans l’arrêt Pigeon c. Daigneault[2];      

 

III.        Analyse et décision

[17]        Tel que mentionné à plusieurs reprises par la jurisprudence, le Comité devra, pour se prononcer sur la sanction, examiner les circonstances aggravantes et atténuantes propres au présent dossier;

[18]          De façon plus précise, rappelons le cheminement suggéré par la Cour d’appel dans l’affaire Pigeon c. Daigneault[3], soit :

[37]           La sanction imposée par le Comité de discipline doit coller aux faits du dossier. Chaque cas est un cas d'espèce.

[38]           La sanction disciplinaire doit permettre d'atteindre les objectifs suivants:  au premier chef la protection du public, puis la dissuasion du professionnel de récidiver, l'exemplarité à l'égard des autres membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables et enfin, le droit par le professionnel visé d'exercer sa profession (Latulippe c. Léveillé (Ordre professionnel des médecins), [1998] D.D.O.P. 311; Dr J. C. Paquette c. Comité de discipline de la Corporation professionnelle des médecins du Québec et al, [1995] R.D.J. 301 (C.A.); et R. c. Burns, 1994 CanLII 127 (C.S.C.), [1994] 1 R.C.S. 656).

[39]           Le Comité de discipline impose la sanction après avoir pris en compte tous les facteurs, objectifs et subjectifs, propres au dossier.   Parmi les facteurs objectifs, il faut voir si le public est affecté par les gestes posés par le professionnel, si l'infraction retenue contre le professionnel a un lien avec l'exercice de la profession, si le geste posé constitue un acte isolé ou un geste répétitif, …   Parmi les facteurs subjectifs, il faut tenir compte de l'expérience, du passé disciplinaire et de l'âge du professionnel, de même que sa volonté de corriger son comportement.   La délicate tâche du Comité de discipline consiste donc à décider d'une sanction qui tienne compte à la fois des principes applicables en matière de droit disciplinaire et de toutes les circonstances, aggravantes et atténuantes, de l'affaire. (Nos soulignements)

[19]     Ainsi, parmi les circonstances aggravantes dont le Comité tiendra compte, soulignons les suivantes :

▪ La gravité objective des infractions, surtout dans le cas du premier chef d’accusation;

▪ Le chef no 1 étant une infraction particulièrement grave qui met en péril non seulement la protection du public, mais également la sécurité des transactions bancaires;

▪ Le chef no 2 est également grave en ce qu’il démontre une négligence et un manque de suivi du dossier de l’assurée échelonné sur plusieurs années;

▪ Le chef no 3 est également grave car il touche à l’essence même de la profession, laquelle consiste à obtenir et à maintenir en vigueur une police d’assurance pour son client;

[20]     À cette première série de circonstances aggravantes, il y a lieu d’ajouter les suivantes :

▪ La présence d’un antécédent disciplinaire même si celui-ci  remonte à 1995 puisqu’il résulte également d’un imbroglio causé par l’intimé vu son défaut d’informer adéquatement sa cliente de l’époque;    

▪ L’absence de repentir de l’intimé;

▪ Sa tentative de rejeter le blâme sur sa cliente, démontrant ainsi une méconnaissance de ses obligations déontologiques;

▪ La durée des infractions;

▪ Le lien direct des infractions avec l’exercice de la profession;

[21]       Le Comité estime qu’il doit également tenir compte des facteurs suivants :

▪ La dissuasion du professionnel  à récidiver;

▪ L’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables[4];

▪ La mise en péril de la protection du public;

[22]       L’ensemble de ces circonstances aggravantes amènera le Comité à s’écarter des suggestions formulées par l’une ou l’autre des parties et entraînera l’imposition de sanctions beaucoup plus sévères;

[23]      À prime abord, le Comité aurait été porté à imposer une période de radiation n’eut été de la présence de certaines circonstances atténuantes en faveur de l’intimé;

[24]      Parmi les circonstances atténuantes dont tiendra compte le Comité, soulignons les suivantes :

▪ La mise en place de nouvelles méthodes de travail (I-1);

▪ Le remboursement des frais imposés par AXA;

▪ L’absence d’intention malhonnête de l’intimé;

▪ La collaboration de l’intimé à l’enquête du syndic;

[25]      Sur la question de savoir s’il y a eu consentement verbal ou non de l’assurée, le Comité tient à rappeler que la preuve était contradictoire à ce sujet[5] d’où l’acquittement de l’intimé sur les articles 23 et 24 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

[26]        En conséquence, l’intimé ne peut pas plaider, avec certitude, que l’assuré avait consenti verbalement aux prélèvements bancaires;

[27]   Enfin, le comité s’écartera des décisions Duval et Lucien, lesquelles sont le résultat d’un plaidoyer de culpabilité;

[28]        Il est bien connu que le fait d’enregistrer un plaidoyer de culpabilité est un signe de repentir qui entraîne habituellement la clémence du Comité au moment de l’imposition de la sanction;

[29]       À l’inverse, l’absence de plaidoyer de culpabilité ne doit pas être surévalué et il n’entraîne pas automatiquement une sentence plus sévère;

[30]        Par contre, dans le présent dossier, le Comité, après avoir entendu l’intimé à deux reprises, soit lors de l’audition de la plainte et au moment des représentations sur sanction demeure encore aujourd’hui dans l’impossibilité de se convaincre du repentir de l’accusé;

[31]        Au contraire, le Comité est plutôt d’avis que l’intimé fait preuve d’un manque total de remords ou de compassion envers l’assurée et les inconvénients endurés par cette dernière;

[32]      De plus, le Comité estime que la durée des infractions démontre un laisser-faire et un manque de suivi de ses dossiers par l’intimé au détriment des intérêts de ses clients;

[33]    Pour l’ensemble de ces motifs, le Comité imposera de fortes amendes à l’intimé afin de le dissuader de récidiver et lui rappeler ses devoirs déontologiques envers ses clients, lesquels sont d’ordre public[6];             

         

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

 

IMPOSE à l’intimé les sanctions suivantes :

 

            Sur le chef no 1 : une amende de 2 000 $;

 

            Sur le chef no 2 : une amende de 2 000 $;

 

            Sur le chef no 3 : une amende de 1 000 $;

 

CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés;

 

 

ACCORDE à l’intimé un délai de 90 jours pour acquitter le montant des amendes et des déboursés, calculé à compter de la signification de la présente décision;

 

RÉITÈRE l’ordonnance de non diffusion et de non accessibilité à tout renseignement nominatif et, plus particulièrement, de tout document ou renseignement de nature financière concernant l’assurée, Mme Richère Fournelle, le tout suivant l’article 142 du Code des professions.

 

 

 

 

 

__________________________________

Me Patrick de Niverville, avocat

Président du comité de discipline

 

 

 

__________________________________

Mme Lyne Leseize, courtier en assurance de dommages des particuliers

Membre du comité de discipline

 

 

__________________________________

M. Benoît Ménard, C.d’A.Ass.,

courtier en assurance de dommages

Membre du comité de discipline

 

 

 

 

 

Me Nathalie Lelièvre

Procureur de la partie plaignante

 

Me Lise Gagnon

Procureur de la partie intimée

 

Date d’audience :

24 mars 2009

 



[1]     Plainte no 1995-06-03, décision du 18 septembre 1995.

[2]     Pigeon c. Daigneault, 2003, CanLii 32934 (Qc C.A.).

[3]     Ibid.

[4] Cartaway Resources corp. [2004] 1 R.C.S. 672.

[5]  Voir les paragraphes 25 et 26 de la décision sur culpabilité du 19 janvier 2009.

[6]   Chauvin c. Beaucage [2008] Q.C.C.A. 922

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