Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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  COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

2002-06-01(C)

 

DATE :

28 octobre 2011

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Marco Gaggino

Vice-Président

Mme Francine Tousignant, C.d’A.Ass., courtier en assurance de dommages

 Membre

M. Richard Giroux, C.d’A.A., courtier en assurance de dommages

 Membre

______________________________________________________________________

 

CAROLE CHAUVIN, ès qualité de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante

c.

ANDRÉ LACELLE, C.d’A.Ass., courtier en assurance de dommages (radié provisoirement)

Partie intimée

______________________________________________________________________

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ

______________________________________________________________________

 

[1]           La plainte dont est saisie le Comité, après divers amendements et retraits de chefs, se lit comme suit :

 

1-         Entre le 12 février 1999 et le 27 mars 2000, a fait défaut d'éviter de se placer en situation de conflit d'intérêts alors qu'il était directeur général de Gisco, La Compagnie d'assurances, dans les cas suivants :

 

a)         En continuant directement et indirectement à opérer le cabinet de courtage Les Souscripteurs de Montréal, corporation dissoute depuis le 1er mai 1996, qui a signé un contrat de courtage avec Gisco, La Compagnie d'assurances;

 

b)         En acceptant que Les Souscripteurs de Montréal, corporation dissoute depuis le 1er mai 1996, perçoive de Elco des primes de réassurances pour des contrats de cautionnement émis par Gisco, La Compagnie d'assurances à titre de mandataire de Liberty Insurance Company A.V.V. du Panama et en retire des commissions;

 

c)         En faisant émettre par Gisco, La Compagnie d'assurances le 19 février 1999 un cautionnement de 50 000 $ portant le numéro 2 000 001-00 pour permettre à Souscripteurs de Montréal, compagnie dissoute qu'il contrôlait, de détenir un permis de courtier spécial et ainsi représenter au Québec des assureurs non licenciés dont, entres autres, Liberty Insurance Company A.V.V. du Panama;

 

d)         En instaurant un système par lequel Gisco, La Compagnie d'assurances, lors de l’étude de nouvelles demandes d'assurance/cautionnement, versait sans aucune considération la somme de 500 $ aux Souscripteurs de Montréal, corporation dont il avait le contrôle, dissoute depuis le 1er mai 1996;

 

e)         Le ou vers le 27 septembre 1999, est devenu administrateur de Les Gestionnaires d'assurance Gisco Ltée alors que ladite compagnie avait une dette importante envers Gisco, La Compagnie d'assurances;

 

f)          En omettant, à titre de mandataire de Liberty Insurance Company A.V.V., d'obtenir le ou vers le 10 janvier 2000, pour Gisco, La Compagnie d'assurances, la lettre de crédit irrévocable nécessaire pour garantir le paiement des primes cédées non acquises tel que requis par l'Inspecteur général des institutions financières;

 

g)         En faisant défaut de voir à ce que Les Souscripteurs de Montréal, corporation dissoute depuis le 1er mai 1996, verse à Gisco, La Compagnie d'assurances une somme de 21 955,25 $ à titre de prime nette;

 

          le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 54 section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec et 10 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

 

2-         Entre le 12 février 1999 et le 27 mars 2000, a exercé ses activités de façon malhonnête en tentant de faire croire qu'il n'avait plus aucun intérêt dans le cabinet Les Souscripteurs de Montréal alors qu'il continuait de vaquer aux opérations de ladite entreprise sur une base quasi quotidienne tout en étant directeur général de Gisco, La Compagnie d'assurances, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 60(3) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

3-         (…) [1]

 

4-         Le ou vers le 15 juin 2000, a fait défaut d'exécuter avec intégrité et transparence ses activités de courtier envers ses mandants Gamut Insurance, Manwin Insurance Brokers, Groupe Cyr Services financiers, Assur Conseil, Unicour Assurance, Assurances Concordia, Assurances Réal Pellerin et Félix Franciscaut en les informant que les polices en cours, souscrites auprès d'assureurs externes, ne serait pas renouvelés à échéance alors qu'il ne pouvait plus agir comme courtier spécial depuis le 15 mars 2000, le tout en contravention notamment aux dispositions des article 9, 25 et 26 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

5-         Le ou vers le 7 juin 2001, a fait défaut de placer les intérêts de ses clients avant les siens en permettant que soit accordé une requête pour ordonnance de séquestre contre le cabinet Les Souscripteurs de Montréal Inc. laissant les clients assurés énumérés au bilan statutaire de faillite sans indemnisation suite aux sinistres subis, le tout en contravention aux dispositions notamment à l'article 19 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

6-         Entre 1995 et le 7 juin 2001, personnellement et à titre de représentant du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut de conserver pendant cinq ans les livres et registres comptables prescrits, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 8 de la Loi sur les Intermédiaires de marché, 107 et suivants du Règlement du Conseil des assurances de dommages sur les intermédiaires de marché en assurance de dommages et 60 (1) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec, l’article 13 du Règlement 10 du Bureau des services financiers sur la tenue et la conservation des livres et registres ainsi que de l’article 2 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

7-         Entre 1995 et le 30 septembre 1999, a fait défaut de s'assurer de respecter la Loi sur les Intermédiaires de marché et les règlements pris sous son autorité en permettant que le cabinet d'assurance Les Souscripteurs de Montréal  agisse comme courtier spécial alors qu'il ne plaçait pas au moins 80% des risques qui lui étaient confiés auprès d'assureurs titulaires de permis au Canada, le dit cabinet agissant comme "grossiste" seulement, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 8 de la Loi sur les Intermédiaires de marché, 51(2) du Règlement du Conseil des assurances de dommages sur les intermédiaires de marché en assurance de dommages, et 60 (1) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

 

8-         Entre 1995 et le 30 septembre 1999, a fait défaut de s'assurer de respecter la Loi sur les Intermédiaires de marché et les règlements pris sous son autorité en permettant que le cabinet d'assurance Les Souscripteurs de Montréal élude son obligation de soumettre le risque à au moins trois assureurs titulaires de permis au Québec avant de se prévaloir de son certificat de courtier spécial, se retranchant derrière le fait qu'il agissait comme "grossiste" et que ce travail était exécuté par le courtier de première ligne, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 8 de la Loi sur les Intermédiaires de marché, 51(1) du Règlement du Conseil des assurances de dommages sur les intermédiaires de marché en assurance de dommages et 60(1) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

 

9-         (…) [2]

 

 

10-       A négligé ses devoirs professionnels et a fait défaut de placer les intérêts des assurés avant les siens dans les dossiers des assurés suivants:

 

-    Le ou vers le 17 mars 2000, assuré 2953-3502 Québec Inc. police MTL-476-00;

                   -     Le ou vers le 31 mars 2000, assuré Denis Poirier police MTL-4778-00;

          -     Le  ou vers le 30 mars 2000, assuré Sablage et Peinture Thetford Inc. police

               MTL-4766-00 ;

         

          en faisant défaut d'informer ces clients qu'au moins un des assureurs externes avec qui elle  avait souscrit leur police d'assurance a savoir la Liberty Insurance Company A.V.V. du Panama refusait d'honorer une importante réclamation faite à l'automne 1999 et n'avait en fait jamais payée quelque réclamation que ce soit et ce depuis le début de leurs relations d'affaires soit le 25 octobre 1997 ce qui pouvait sensiblement dénaturer la garantie fournie à ces clients, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 9,19, 25 et 26 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

CAS : OLEG DIZIAK

 

11-       Le ou vers le 5 juillet 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet d'assurance Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'agir en conseiller consciencieux en liant Liberty Insurance Company A.V.V. pour le client Oleg Diziak faisant affaire sous la raison sociale Recyk enr., en procédant à l'émission de la police MTL-3608-97 alors qu'il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

 

12-       Le ou vers le 5 juillet 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal a fait défaut de rendre compte à l'assuré Oleg Diziak ainsi qu'a son courtier M. Réal Pellerin qu'il avait assuré le commerce Recyk enr. en partie avec un assureur étranger Liberty Insurance Company A.V.V. pour lequel il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(11) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

 

 

13-       Entre le 31 mai 1999 et le 7 juin 2001, date de la faillite de Les Souscripteurs de Montréal personnellement et en sa qualité de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a par des moyens frauduleux et dolosifs éludé sa responsabilité civile professionnelle en faisant défaut de payer la réclamation de son assuré Oleg Diziak pour son commerce Recyk enr. en alléguant des motifs dilatoires et mal fondés pour ne pas payer alors que cela était dans ses pouvoirs de le faire et que son propre expert en sinistre lui avait recommandé de faire une offre de règlement, préférant laisser traîner les choses et forcer ultimement l'assuré a obtenir jugement par défaut alors que son compte de règlement de réclamations avait été vidé, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 60(3) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec et  20 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

CAS OZGUR IBRAHIM

 

14-       Le ou vers le 18 février 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'agir en conseiller consciencieux en liant Liberty Insurance Company A.V.V. pour le client Ozgur Ibrahim faisant affaire sous la raison sociale Marché Mevlana en procédant à l'émission de la police MTL-3406-97 alors qu'il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

 

15-       Le ou vers le 18 février 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet  Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut de rendre compte à l’assuré Ozgur Ibrahim ainsi qu’a son courtier M. Geroges Ruel, qu’il avait assuré le commerce Marché Mevlana en partie avec un assureur étranger Liberty Insurance Company A.V.V. pour lequel il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(11) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

 

16-       Le ou vers le 29 octobre 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'informer son assuré Ozgur Ibrahim ainsi que son courtier Georges Ruel que la compagnie d'assurance Trans International Insurance Co. Ltd. avait été remplacée sur le risque par la Excelsior Insurance Company, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

 

17-       Le ou vers le 25 avril 2000, a fait défaut d'informer son client Ozgur Ibrahim et son courtier Georges Ruel que la compagnie d'assurance Centennial Insurance Co. A.V.V. s’était retirée (sic) du risque pour la période en cours, laissant son client et le courtier dans l'ignorance, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 26 et 37(4) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

18-       Le ou vers le 22 février 2000, a fait défaut de verser à Liberty Insurance Company, la portion de prime qui lui était due (sic) suite à la souscription de la police MTL-4747-00 au nom de Marché Mevlana, faisant là preuve d'un manque d'intégrité et de transparence, préférant conserver cette partie de la prime dans un compte séparé pour payer des réclamations éventuelles adressées au même assureur tout en se payant sa propre commission et conservant ses honoraires alors qu'il savait ou aurait dû savoir que la dite compagnie n'honorait plus ses engagements, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 9, 25, 28 et 37 (1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

EXERCICE AU MANITOBA

 

19-       Entre le 16 mars 1994 et le 12 décembre 1998, a exercé directement ou par l'entremise de son cabinet Les Souscripteurs de Montréal des activités de courtier spécial dans la province du Manitoba alors qu'il ne détenait aucune licence pour ce faire, exerçant par-là une occupation incompatible avec l'honneur et la dignité de la profession de courtier dans les cas suivants :

 

- MTL – 1310 – 94    Roy Anderson

- MTL – 1933 – 95    Roy Anderson

- MTL – 1531 – 94    Marie Gheorghe

- MTL – 3060 – 96    Mike Fructus

- MTL – 1532 – 94    Mike Fructus

- MTL – 2231 – 95    Mike Fructus

- MTL – 1576  - 94    Josephine Sosnowski

- MTL – 1590 – 94    Lawrence and Melva Spicer

- MTL – 1602 – 94    Vasil Litov

- MTL – 2336 – 95    Vasil Litov

- MTL – 1716 – 94    Arturo Antonia Voluntad

- MTL -  1725 – 94    Mee Kwen Wong

- MTL – 3329 -  96    Mee Kwen Wong

- MTL – 3902 – 97    Mee Kwen Wong

- MTL – 4367 – 98    Mee Kwen Wong

- MTL – 2556 – 95    Mee Kwen Wong

- MTL – 1726 – 94    Henry Wong

- MTL – 2569 – 95    Henry Wong

- MTL – 3318 – 96    Henry Wong

- MTL – 3906 – 97    Henry Wong

- MTL – 4365 – 98    Henry Wong

- MTL – 1746 – 95    Lynda Kyle

- MTL – 1782 – 95    Ed & Judith Livesey      

- MTL – 2619 – 96    Ed & Judith Livesey

- MTL – 1850 – 95    Eric Noug

- MTL – 2008 – 95    Surrinder Singhand Indensit Singh

- MTL – 2508 – 95    Joseph Sitareyk

- MTL – 2694 – 96    Charlene & Tony Hogan

- MTL – 2882 – 96    Edin Mehanovic

- MTL  - 3347 – 97    Lynda Kyle,

 

          le tout en contravention notamment avec les articles 37, 53 et 58 section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

20-       Le ou vers le 11 décembre 1996, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'agir en conseiller consciencieux en liant Liberty Insurance Company A.V.V. pour le client Mee Kwen Wong en procédant à l'émission de la police MTL-3329-96  alors qu'il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60 (12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

 

21-       Le ou vers le 11 décembre 1996, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut de rendre compte a son client Mee Kwen Wong ainsi qu'a son courtier Parker & Ramsey qu'il avait assuré le commerce de son client en partie avec un assureur étranger Liberty Insurance Company A.V.V. pour laquelle il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60 (11) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

 

22-        Le ou vers le 12 décembre 1996, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'agir en conseiller consciencieux en liant Liberty Insurance Company A.V.V. pour le client Henry Wong en procédant à l'émission de la police MTL-3318-96 alors qu'il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60 (12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

 

23-       Le ou vers le 12 décembre 1996, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut de rendre compte a son client Henry Wong ainsi qu'à son courtier Parker & Ramsey qu'il avait assuré le commerce de son client en partie avec un assureur étranger Liberty Insurance Company A.V.V. pour laquelle il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60 (11) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

CAS : PIERRE PILON ET DAWNA LEE DUMONT

 

24-       Entre le 19 mai 2000 et le 7 juin 2001, a éludé sa responsabilité professionnelle en faisant défaut d'entreprendre les démarches nécessaires pour que les assurés Pierre Pilon et Dawna Lee Dumont soient remboursés du crédit de 922,50 $ auquel ils avaient droit suite à la résiliation de la police MTL-4637-99, se retranchant derrière le fait que le compte des assureurs étrangers était vide alors qu'il avait cessé lui-même, pour le compte du cabinet Les Souscripteurs de Montréal de faire remise aux assureurs étrangers, le tout en contravention notamment aux dispositions de l’articles 20 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

25-       Entre le 19 mai 2000 et le 7 juin 2001, date de la faillite de Les Souscripteurs de Montréal, s'est approprié pour ses fins personnelles ou celles de son cabinet la somme de 922,50 $ qu'il devait rembourser à ses clients Pierre Pilon et Dawna Lee Dumont suite à la résiliation de la police MTL-4637-99 le 10 mai 2000, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 37(8) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

REMISE AUX ASSUREURS

 

26-       Entre mars 1998 et juin 2001, alors qu’il agissait comme courtier spécial pour les assureurs externes Liberty Insurance Company, Excelsior Insurance Company et Gulf ressources Inc., a agi de façon négligente et imprudente et a tenue une gestion comptable malhabile en ce que :

 

a)         Il a fait défaut de réclamer desdits assureurs externes des sommes suffisantes pour faire face aux réclamations éventuelles;

b)         Il a conservé les primes perçues afin de faire face a d’éventuelles réclamations;

c)         Il a fait défaut de rapporter les pertes aux assureurs ;

d)         Il a été incapable de réconcilier la comptabilité des sommes transitant dans les comptes de Souscripteurs de Montréal et d’y départager la commission, les retraits nécessaires au paiement des réclamations et les remises dues aux assureurs externes;

e)         Il a continué à lier lesdits assureurs externes pour des nouvelles polices émises à des assurés alors qu’il savait ou aurait du savoir que ces assureurs externes étaient en conflit avec lui ;

f)          Il a été incapable d’expliquer avec précision comment, au moment de la faillite de Les Souscripteurs de Montréal, le compte des assureurs était vide ;

 

          le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 44, 60 (3), 60 (11) et 60(14) section IV déontologie de Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec et 28, 29, 37(1) et 37(4) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

 

II- HISTORIQUE DES PROCÉDURES

[2]           La plainte dont est saisi le présent Comité avait été entendue, à l’origine, par un banc présidé par Me Galal Doss (le Comité « Doss »).

[3]           À ce moment, le Comité Doss était également saisi d’une plainte contre la fille de l’intimé, Mme France Lacelle, dans le dossier 2002-06-02(C) et celui-ci a tenu des auditions communes dans les deux dossiers.

[4]           En date du 29 mars 2005, le Comité Doss a rendu une décision selon laquelle l’intimé était reconnu coupable de certains chefs d’accusation.

[5]           L’intimé a contesté cette décision par voie de requête en révision judiciaire le 3 avril 2005.

[6]           Cette requête a été rejetée le 20 mai 2005 au motif que la Cour supérieure n’était pas le forum approprié.

[7]           L’intimé a contesté cette décision devant la Cour d’appel, laquelle a rejeté sa demande le 20 juillet 2005.

[8]           L’intimé a alors adressé sa demande de contestation de la décision du Comité Doss à la Cour du Québec et, à cet égard, il a présenté devant celle-ci une requête en prorogation de délai, laquelle a été rejetée le 26 août 2005.

[9]           L’intimé en a appelé de cette décision à la Cour d’appel.

[10]        Cependant, en août 2006, soit avant qu’une sentence ne soit prononcée contre l’intimé, Me Doss s’est vu contraint, en raison de problèmes de santé, de démissionner à titre de membre du Comité.

[11]        Un nouveau Comité a alors été formé, lequel était présidé par Me Daniel M. Fabien (le Comité « Fabien »).

[12]        L’intimé présenta au Comité Fabien des moyens préliminaires.

[13]        Le Comité Fabien procéda à l’audition des moyens préliminaires de l’intimé le 20 décembre 2006 et rendit une décision le 7 février 2007 dans laquelle il rejeta ceux-ci. Dans sa décision, le Comité Fabien convoquait les parties pour le 12 mars 2007 pour que débute l’audition sur le mérite de la plainte contre l’intimé.

[14]         Le 28 mars 2007, la Cour d’appel rejetait l’appel soumis par l’intimé à l’égard du jugement de la Cour du Québec ayant rejeté sa demande de prorogation de délai pour contester la décision du Comité Doss.

[15]        L’intimé tenta de contester cette décision devant la Cour suprême du Canada, mais sa demande d’autorisation a été rejetée en date du 26 octobre 2007.

[16]        Par ailleurs, l’intimé a soumis un appel devant la Cour du Québec de la décision du Comité Fabien du 7 février 2007.

[17]        La plaignante a répondu à cet appel par la présentation d’une requête en rejet d’appel, laquelle a été rejetée par la Cour du Québec le 6 novembre 2007.

[18]        Quant à l’appel sur le fond, la Cour du Québec le rejeta par décision du 1er décembre 2008.

[19]        Par ailleurs, il faut noter que le 26 octobre 2007, le Comité Fabien statuait sur la culpabilité de Mme France Lacelle et sur la sanction à être imposée à celle-ci suite à un plaidoyer de culpabilité qu’elle avait transmis à la Chambre de l’assurance de dommages par lettre du 1er octobre 2007[3].

[20]        Tel qu’il appert de la décision rendue le 1er décembre 2008 par la Cour du Québec, l’intimé a argumenté devant celle-ci que le fait pour le Comité Fabien de rendre cette décision constituait alors un motif de récusation de ce Comité.

[21]        La Cour du Québec rejeta cet argument en tenant, toutefois, les propos suivants :

« [29] Le Tribunal n’a pas à se saisir de faits postérieurs à la décision du comité de discipline du 7 février 2007. Néanmoins, l’appelant soulève des questions sérieuses qui découlent d’une autre décision d’un comité de discipline, présidé par Me Fabien, rendue le 26 octobre 2007. Le Tribunal réfère à une décision du comité de discipline rendue par un comité composé de Me Daniel Fabien et de Marc Henri Germain. Ce comité rend une décision sur culpabilité et sur sanction relativement à la conduite de France Lacelle, la fille de l’appelant.

[30] L’appelant souligne une connexité de faits apparente qui lui fait croire qu’il ne pourra pas voir préservés ses droits à une audition juste et impartiale.

[31] Pour éviter d’autres débats stériles, peut-être vaudra-t-il mieux qu’un nouveau comité de discipline soit constitué, que ce comité se penche, le cas échéant, sur une nouvelle preuve que pourrait soumettre André Lacelle sur la durée de la radiation provisoire et qu’enfin ce comité dispose des plaintes disciplinaires dans les meilleurs délais. » (Notre soulignement)

[22]        Le 5 février 2009, l’intimé transmit au Comité Fabien, via la secrétaire du Comité de discipline, une requête en récusation.

[23]        Cette requête se fondait notamment sur les faits et représentations ayant entouré l’audience sur sentence qui avait eu lieu devant le Comité Fabien suite au plaidoyer de culpabilité de Mme France Lacelle et au cours de laquelle l’intimé était absent, car non convoqué.

[24]        En date du 20 février 2009, le Comité Fabien transmit une lettre à l’intimé, dans laquelle il y est écrit notamment :

« À la suite de la signification de votre requête en récusation du banc disciplinaire, nous, soussignés vous avisons que le comité de discipline entend, par la présente, se récuser volontairement sans aucune admission de quelque nature que ce soit et uniquement pour éviter des procédures additionnelles.

En conséquence, le président du comité de discipline, Me Patrick de Niverville, verra à assigner le dossier à un nouveau président et à deux nouveaux membres. »

[25]        C’est à la suite de cette lettre du Comité Fabien que le présent Comité a été saisi de la plainte logée contre l’intimé.

[26]        Par ailleurs, étant donné la présentation de différentes requêtes[4], le présent Comité entendit la preuve sur le fond à compter du 8 novembre 2010 laquelle se termina le 9 décembre 2010, après sept jours d’audience. Les plaidoiries orales des parties eurent lieu le 9 mars 2011 et des notes et autorités furent transmises par chacune des parties au Comité.

[27]        La plaignante fit entendre sept témoins, soit, Mme Carole Chauvin, M. Richard Giosi, Me Vincent Gallo, M. Ernest Girouard, Mme Lise Langlois, Mme France Lacelle et M. Joseph Lanzo. Par ailleurs, 109 pièces furent produites par la plaignante.

[28]        Pour sa part, l’intimé ne fit pas entendre de témoins autrement que lui-même. Il produisit 15 pièces, dont les témoignages rendus devant le Comité Doss de Me Barry Fridhandler[5] et M. Norbert Paquette[6], décédés au moment des audiences de ce Comité.

[29]        La dernière journée de délibéré du Comité eut lieu le 15 août 2011.

II- LE contexte FACTUEL

[30]        L’intimé a été admis à titre de courtier de l’Association des courtiers d’assurance de la province de Québec (« ACAPQ »), le ou vers le 1er novembre 1977 et a été un sociétaire en règle de celle-ci, jusqu’à sa dissolution, au 30 septembre 1999. Suite à la complétion des mesures transitoires prescrites, il s’est vu remettre un certificat de courtier en assurance de dommages, à compter du 1er octobre 1999[7].

Les Souscripteurs de Montréal Inc.

[31]        Le 26 février 1993, l’intimé fonde Les Souscripteurs de Montréal Inc. (« Souscripteurs »), dont il devient le président, administrateur et seul actionnaire[8].

[32]        Selon les déclarations annuelles 1999 et 2000 signées par l’intimé et transmises à l’Inspecteur général des institutions financières, Souscripteurs est décrite comme étant une entreprise d’intermédiaire de marchés en assurance[9].

[33]        Par ailleurs, aux époques pertinentes, Souscripteurs, ou ses représentants identifiés, agissaient comme courtier spécial, c’est-à-dire qu’ils plaçaient des risques auprès d’assureurs non licenciés au Québec, donc non régis par les règles de solvabilité applicables aux assureurs licenciés.

[34]        À cet égard, il faut noter que suite à une modification législative intervenue le 1er octobre 1999, le statut de courtier spécial est passé du cabinet aux individus identifiés et rattachés au cabinet.

[35]        Souscripteurs ne faisait affaire avec aucun assureur licencié au Québec. La totalité de ses opérations était en lien avec des assureurs étrangers.

[36]        Par ailleurs, il appert de la pièce P-4 que Souscripteurs a été dissoute le 1er mai 1996 et reconstituée le 14 juillet 2000.

[37]        Souscripteurs a fait faillite en date du 7 juin 2001[10].

La création de Gisco, La Compagnie d’Assurances

[38]        Gisco, La Compagnie d’assurances (« Gisco ») a obtenu ses lettres patentes de l’Inspecteur général des institutions financières (« IGIF ») le 11 février 1999. L’un des requérants de ces lettres patentes est l’intimé qui est également l’un des administrateurs provisoires[11]. Elle a été autorisée à pratiquer à titre de compagnie d’assurance à compter du 16 février 1999[12].

[39]        Le 12 février 1999, un contrat d’emploi intervient entre Gisco et l’intimé, selon lequel celui-ci est embauché pour agir à titre de directeur général de Gisco[13].

Le « transfert » de Souscripteurs à France Lacelle

[40]        Dans un document assermenté par M. Ernest Girouard intervenu entre l’intimé et France Lacelle et daté du 16 février 1999, l’intimé déclare transférer à France Lacelle tous ses droits, titres et intérêts dans Souscripteurs, et ce, pour la somme de $1.00 et autres considérations[14].

[41]        Selon l’intimé, à compter de cette date il n’est plus aux commandes de Souscripteurs.

La fin d’emploi de l’intimé chez Gisco

[42]        Lors d’une réunion spéciale du conseil d’administration de Gisco tenue le 27 mars 2000, la direction de l’intimé est remise en cause.

[43]        Ainsi, tel qu’il appert du procès-verbal de cette réunion[15], le représentant du comité consultatif de Gisco fait état de « certaines irrégularités dans la gestion de M. André Lacelle ».

[44]        À l’issue de cette réunion et d’une consultation légale, le conseil d’administration décide du congédiement pour « motif sérieux » de l’intimé.

[45]        À cet effet, ce congédiement est signifié à l’intimé par la remise d’une lettre de congédiement du 29 mars 2000[16], laquelle réfère « à de nombreuses transactions conclues à l’encontre des intérêts de Gisco ».

La fin des opérations de Gisco

[46]        Gisco n’a été en opération que pendant seize mois. Ainsi, suite à des difficultés financières et à la suspension par l’IGIF, le 4 mai 2000, de son droit de continuer ses opérations d’assureur de dommages au Québec, les administrateurs de la compagnie ont pris la décision de procéder à sa liquidation le 5 juin 2000[17].

[47]        La firme Pricewaterhouse Coopers a été nommée liquidateur[18].

Le retour de l’intimé chez Souscripteurs

[48]        Selon la pièce D-10 France Lacelle aurait rétrocédé ses intérêts dans Souscripteurs à l’intimé le ou vers le 14 avril 2000, et ce, pour 1.00$.

[49]        Selon le témoignage de l’intimé, celui-ci reprend le contrôle des opérations de Souscripteurs à compter de cette date.

Circonstances de l’enquête du syndic

[50]        En témoignage principal, Mme Carole Chauvin, syndic de la Chambre de l’assurance de dommages (« ChAD »), a expliqué que des plaintes avaient été soumises visant Souscripteurs et l’intimé. Ces plaintes référaient à des difficultés pour des assurés de voir leur réclamation honorée en tout ou en partie.

[51]        Mme Chauvin a alors enquêté, mais en vérifiant surtout si l’annexe que le courtier spécial doit faire signer par l’assuré déclarant qu’il est au courant que l’assureur est un assureur non licencié avait était dûment complétée et signée.

[52]        Puisque les annexes étaient signées, Mme Chauvin a alors fermé son enquête.

[53]        Mme Chauvin a alors été impliquée dans le cadre de la liquidation de Gisco, annoncée au printemps 2000. Elle apprendra plus tard que l’intimé était directeur général de Gisco.

[54]        Par la suite, le courtier Cloutier & Lafrance, qui plaçait ses risques par Gisco, fait faillite et, un an plus tard, Souscripteurs fait également faillite.

[55]        Mme Chauvin se questionne donc à nouveau sur les plaintes initiales à l’égard de Souscripteurs et de l’intimé et enclenche une enquête, laquelle a menée à la plainte dont est saisie le Comité.

III- LA PREUVE, L’ARGUMENTATION ET LA DÉCISION SUR CHACUN DES CHEFS DE LA PLAINTE

[56]        Les chefs de la plainte sont nombreux, variés et couvrent une grande période de temps.

[57]        Conséquemment et par souci de clarté, le Comité ne fera pas une revue générale de l’ensemble des témoignages rendus ni un résumé des pièces produites, exercice qui aurait d’ailleurs été presque impossible à faire de façon chronologique ou thématique.

[58]        Le Comité référera plutôt à la preuve qu’il considère pertinente à l’égard de chacun des chefs au fur et à mesure de la discussion de ceux-ci. L’argumentation des parties de même que la décision particularisée à chacun des chefs suivront ensuite.

Chef 1

[59]        Le chef 1 de la plainte se lit comme suit :

Entre le 12 février 1999 et le 27 mars 2000, a fait défaut d'éviter de se placer en situation de conflit d'intérêts alors qu'il était directeur général de Gisco, La Compagnie d'assurances, dans les cas suivants :

a)  En continuant directement et indirectement à opérer le cabinet de courtage Les Souscripteurs de Montréal, corporation dissoute depuis le 1er mai 1996, qui a signé un contrat de courtage avec Gisco, La Compagnie d'assurances;

b) En acceptant que Les Souscripteurs de Montréal, corporation dissoute depuis le 1er mai 1996, perçoive de Elco des primes de réassurances pour des contrats de cautionnement émis par Gisco, La Compagnie d'assurances à titre de mandataire de Liberty Insurance Company A.V.V. du Panama et en retire des commissions;

c)  En faisant émettre par Gisco, La Compagnie d'assurances le 19 février 1999 un cautionnement de 50 000 $ portant le numéro 2 000 001-00 pour permettre à Souscripteurs de Montréal, compagnie dissoute qu'il contrôlait, de détenir un permis de courtier spécial et ainsi représenter au Québec des assureurs non licenciés dont, entres autres, Liberty Insurance Company A.V.V. du Panama;

d) En instaurant un système par lequel Gisco, La Compagnie d'assurances, lors de l’étude de nouvelles demandes d'assurance/cautionnement, versait sans aucune considération la somme de 500 $ aux Souscripteurs de Montréal, corporation dont il avait le contrôle, dissoute depuis le 1er mai 1996;

e)  Le ou vers le 27 septembre 1999, est devenu administrateur de Les Gestionnaires d'assurance Gisco Ltée alors que ladite compagnie avait une dette importante envers Gisco, La Compagnie d'assurances;

f)  En omettant, à titre de mandataire de Liberty Insurance Company A.V.V., d'obtenir le ou vers le 10 janvier 2000, pour Gisco, La Compagnie d'assurances, la lettre de crédit irrévocable nécessaire pour garantir le paiement des primes cédées non acquises tel que requis par l'Inspecteur général des institutions financières;

g) En faisant défaut de voir à ce que Les Souscripteurs de Montréal, corporation dissoute depuis le 1er mai 1996, verse à Gisco, La Compagnie d'assurances une somme de 21 955,25 $ à titre de prime nette;

le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 54 section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec et 10 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

[60]        Comme le chef 1 de la plainte reproche à l’intimé diverses façons de s’être placé en situation de conflit d’intérêts alors qu’il était directeur général de Gisco, le Comité va procéder de manière distincte pour chacun des paragraphes composant celui-ci.

Chef 1 (a)

La preuve

[61]        L’intimé est devenu directeur général de Gisco le 12 février 1999, poste qu’il occupera jusqu’à sa fin d’emploi, le 29 mars 2000.

[62]        À compter de cette date, et en surface, l’intimé semble s’être retiré des opérations de Souscripteurs pour n’en reprendre le contrôle qu’après avoir été congédié de Gisco.

L’implication de l’intimé dans Souscripteurs : les apparences

[63]        Dans son témoignage, l’intimé mentionne que pour devenir actionnaire et dirigeant de Gisco, une des exigences était de ne pas être « propriétaire » d’un bureau de courtage. C’est pour cette raison que le 16 février 1999, l’intimé transfère à France Lacelle tous ses droits, titres et intérêts dans Souscripteurs et ce, pour la somme de $1.00 et autres considérations[19].

[64]        À la même date, France Lacelle signe, au nom de Souscripteurs, un contrat de courtage avec Gisco. Selon ce contrat, Souscripteurs doit recevoir de Gisco des commissions à titre de rémunération pour les affaires traitées pour le compte de celle-ci[20].

[65]        Il est à noter d’ailleurs que le contrat d’emploi de l’intimé contient des clauses de non concurrence et services exclusifs au bénéfice de Gisco[21].

[66]        Par lettre du 1er mars 1999, l’ACAPQ  écrit à Souscripteurs, aux soins de l’intimé, afin de lui transmettre un avis de renouvellement pour la période du 1er avril au 31 mars 2000[22].

[67]        Le 3 mars 1999, France Lacelle, répond à l’ACAPQ en l’avisant, notamment, du fait que « M. André Lacelle ne fait plus partie du cabinet décrit plus haut. Il agira plutôt à titre d’intermédiaire indépendant ».[23]

[68]        Dans le formulaire de renouvellement, il est indiqué que pour la période 1999-2000, Souscripteurs agira à titre de courtier en assurance de dommages dans les catégories de l’assurance de particuliers et des entreprises ainsi que du courtage spécial.[24]

[69]        À la page 2 de ce même formulaire, il est déclaré qu’en remplacement d’André Lacelle, France Lacelle est la seule actionnaire détenant directement ou indirectement plus de 10% des actions avec droits de vote et agit comme administratrice unique.

[70]        Le 26 mars 1999, l’ACAPQ écrit à Souscripteurs afin de demander copie du certificat de modification ainsi que copie des statuts de modification des actionnaires, administrateurs et dirigeants de Souscripteurs afin de pouvoir procéder à l’étude de la demande de renouvellement[25].

[71]        N’ayant pas eu de réponse à la demande du 26 mars, l’ACAPQ écrit à nouveau à Souscripteurs le 5 mai 1999 afin de demander qu’on lui fasse parvenir l’information requise[26].

[72]        La demande du 26 mars 1999 étant demeurée sans réponse, l’ACAPQ avise Souscripteurs par lettre du 17 mai 1999 du refus de renouvellement du cabinet à titre de sociétaire[27].

[73]        Le 27 mai 1999, France Lacelle transmet à l’ACAPQ par télécopieur copie d’un formulaire d’avis de changement des administrateurs de Souscripteurs à l’attention de Industrie Canada sur lequel il est indiqué que France Lacelle remplace André Lacelle à titre d’administratrice de Souscripteurs à compter du 21 février 1999. Par ailleurs, dans la page d’envoi de télécopieur, France Lacelle précise que ce formulaire est celui « envoyé au Gouvernement Fédéral pour le changement d’administrateur de la compagnie Les Souscripteurs de Montréal Inc. ». Mme Lacelle écrit également que « dès réception de la confirmation du changement d’administrateur, nous vous la ferons parvenir »[28].

[74]        Selon la preuve, cet avis n’a jamais été transmis à Industrie Canada.

[75]        Suite à l’envoi de ces informations, l’ACAPQ écrit à Mme Lacelle pour l’informer du renouvellement du sociétariat de Souscripteurs[29].

[76]        Dans sa déclaration assermentée aux fins des mesures transitoires au Bureau des services financiers (« BSF ») du 14 septembre 1999, France Lacelle se déclare comme étant la seule dirigeante et actionnaire de Souscripteurs[30].

[77]        Il est à noter que dans le cadre de ses opérations, Gisco réassurait une partie de ses risques de cautionnement. À cet effet, Gisco faisait affaire avec Elco, courtier en réassurance, laquelle réassurait les risques de Gisco notamment par Liberty. Elle reçoit alors des primes de Gisco qu’elle remet à Liberty, via son représentant, Souscripteurs[31].

[78]        L’intimé a été congédié par Gisco le 29 mars 2000[32].

[79]        Le ou vers le 20 juin 2000, l’intimé transmet à l’Inspecteur général des institutions financières la déclaration annuelle de Souscripteurs pour l’année 1999. Le ou vers le 24 août 2000, il transmet la déclaration annuelle 2000 et le ou vers le 12 juin 2000, il transmet une déclaration modificative pour changer l’adresse de Souscripteurs du 4480, [rue A] à Montréal au 4707, [rue B] à Laval[33].

[80]        Suite à des difficultés financières et à la suspension par l’IGIF, le 4 mai 2000, de son droit de continuer ses opérations d’assureur de dommages au Québec, les administrateurs de Gisco ont pris la décision de procéder à sa liquidation le 5 juin 2000[34].

[81]        La firme Pricewaterhouse Coopers a été nommée liquidateur[35].

[82]        Dans son témoignage, l’intimé déclare qu’il n’a jamais opéré Souscripteurs durant la période où il était directeur général de Gisco mais il admet avoir renseigné et aidé le personnel en place chez Souscripteurs, vu son expérience. Il explique d’ailleurs cette implication par le fait qu’il avait intérêt à ce que Souscripteurs ne « plante » pas car sa fille en était alors la propriétaire.

L’implication de l’intimé dans Souscripteurs : la réalité

[83]        Malgré que l’intimé ne fasse plus partie du cabinet Souscripteurs, il appert que celui-ci a continué à signer des chèques à être tirés du compte en fiducie de Souscripteurs[36].

[84]        L’implication de l’intimé dans la signature de ces chèques jette un sérieux doute sur l’affirmation de l’intimé à l’effet qu’il n’était plus impliqué dans les opérations courantes de Souscripteurs alors qu’il était directeur général de Gisco.

[85]        Ainsi, l’étude des chèques produits en liasse sous la cote P-38 révèle que l’intimé a signé les chèques suivants :

-               chèque du 9 juin 1999 à Gulf Ressources au montant de 10,560.26$;

-               chèque du 2 septembre 1999 à Groupe Atlantic au montant de 562.48$  pour le dossier Wagui Saba;

-               chèque du 3 septembre 1999 à Gulf Ressources au montant de 8,604.96$;

-               chèque du 5 juillet 1999 à Gold Fridhandler Goldberg au montant de 3,000$ dans le dossier Carole Durand;

-               chèque du 30 avril 1999 au montant de 6,442.55$ à Gulf Ressources;

-               chèque du 24 septembre 1999 à Barry Fridhandler au montant de 5,751.25$.

[86]        Il est à noter que ces chèques sont tous tirés du compte 8604614 de la Banque Canadienne Impériale de Commerce (« CIBC »). Or, dans sa déclaration aux fins des mesures transitoires au Bureau des services financiers du 14 septembre 1999, France Lacelle indique pourtant que les seules personnes autorisées à signer tout document relatif aux opérations courantes de ce compte sont France Lacelle et Lyse Langlois[37].

[87]        Cette déclaration assermentée est par la suite contredite par une déclaration de France Lacelle à la plaignante reçue par celle-ci le 15 mars 2002 où elle affirme  que  comme les changements n’ont jamais été faits à la banque, l’intimé a toujours eu le pouvoir de signer les chèques tirés du compte de Souscripteurs [38] .

[88]        D’ailleurs, l’intimé confirme ce renseignement puisqu’il admet qu’aucun changement n’a été fait à la banque pour faire état de la modification au niveau de la structure de Souscripteurs et de la fin de son implication dans celle-ci.

[89]        Non seulement l’intimé a-t-il signé des chèques au nom de Souscripteurs alors qu’il était directeur général de Gisco, mais il a également signé des réquisitions de paiement auprès de la CIBC en lien avec le compte bancaire de Souscripteurs. Ainsi, la pièce P-86 comporte trois transactions de cette nature signées par l’intimé :

-      page BL-82, 5 juillet 1999;

-      page BL-88, 26 avril 1999;

-      page BL-92, 25 mars 1999.

[90]        Dans son témoignage rendu devant le Comité Doss, Mme Langlois Lacelle, épouse de l’intimé, déclare que celui-ci avait une implication directe dans les affaires bancaires de Souscripteurs pendant que ce dernier était directeur général de Gisco[39] :

« Q.     À qui vous vous rapportiez pour faire ce travail-là ou est-ce que vous faisiez ça de vous-même ?

  R.      À monsieur Lacelle.

  Q.      Vous vous rapportiez à monsieur Lacelle pour faire ça ?

  R.      Oui.

  (…)

  Q.      Jusqu’à la dernière minute. Donc, même pendant le temps qu’il était chez Gisco, vous faisiez les chèques, vous demandiez à monsieur Lacelle ?

  R.      Oui, je faisais les deux, oui. Pour un puis pour l’autre.

  (…)

  Q.      Alors je comprends que les dépôts, vous les faisiez, les transferts, vous les faisiez suivant les instructions que vous receviez de monsieur Lacelle ?

  R.      C’est ça. Oui.

  Q.      Et ça, ç’a toujours été comme ça ?

  R.      Ç’a toujours été de même »

[91]        Par ailleurs, l’intimé a aussi eu une implication dans les opérations quotidiennes de Souscripteurs.

[92]        Ainsi, dans sa déclaration P-42, France Lacelle, qui est pourtant supposée être devenue la propriétaire de Souscripteurs depuis le 12 février 1999, déclare ce qui suit quant à son rôle de dirigeante :

« À titre de courtier d’assurance représentant sans toutefois être impliquée dans le quotidien.»[40]

[93]        Par ailleurs, quant à ses opérations quotidiennes, Mme Lacelle mentionne que l’intimé s’impliquait dans Souscripteurs de la façon suivante :

« M. Lacelle allait rencontrer M. Girouard pour tout ce qui concernait Les Souscripteurs de Montréal afin de lui communiquer l’expertise antérieure dans les réclamations. »

[94]        Dans son témoignage M. Girouard a confirmé l’implication et l’omniprésence de l’intimé dans les affaires de Souscripteurs pendant qu’il était en même temps directeur général de Gisco.

[95]        Ainsi, M. Girouard, dont le rôle et la spécialité se limitaient à faire de la souscription, a témoigné sur les nombreuses interventions de l’intimé dans les opérations quotidiennes, par exemple, au niveau des réclamations[41], de l’identité des assureurs étrangers dans les contrats d’assurance et la proportion de risques à être assumée par ceux-ci[42], des procédures judiciaires[43] et de la gestion des primes aux assureurs, rôle qu’il partageait avec son épouse Mme Langlois Lacelle.

[96]        M. Girouard a également mentionné qu’il signait et transmettait durant cette période des documents sur les ordres de l’intimé. M. Girouard donne comme exemples les pièces P-19 et P-55, pages 15, 23 et 24.

[97]        M. Girouard confirme par ailleurs que durant la période où l’intimé était chez Gisco, il n’a jamais reçu d’instructions de la part de France Lacelle, toutes ses instructions provenant de l’intimé.

[98]        M. Girouard a également témoigné sur l’implication de l’intimé relativement à l’échange de correspondances P-39.

[99]        Ainsi, il appert de cette pièce que Dianico International Ltd. écrit à l’intimé le 1er septembre 1999 à titre de représentant de Souscripteurs concernant l’assurance et le financement de prime d’un commerce appelé Fur Boutique Inc. Comme M. Girouard n’a aucune expertise dans ce domaine, c’est sur les instructions de l’intimé que le dossier est complété.

[100]     Par ailleurs, sans revenir sur l’ensemble du témoignage rendu par Mme France Lacelle devant le Comité ou lors de sa comparution devant le Comité Doss, force est de constater que pour quelqu’un qui prend le contrôle des opérations d’une entreprise, elle ne sait pas grand chose des opérations de Souscripteurs durant la période où elle est supposée en être l’unique dirigeante. En ce qui a trait aux opérations quotidiennes de Souscripteurs, si son témoignage devait être retenu, il semble alors que M. Girouard soit passé de simple souscripteur à responsable de toutes les opérations de Souscripteurs au départ de l’intimé pour Gisco. Le Comité n’accorde guère de crédibilité à ce témoignage.

[101]     À cet effet, en date du 4 octobre 2007, Mme Lacelle a plaidé coupable devant le Comité de discipline de la ChAD aux chefs suivants :

« 2. Entre le 3 mars 1999 et le 27 mars 2000, de concert avec M. André Lacelle, son père, a exercé ses activités de façon malhonnête en tentant de faire croire que ce dernier n’avait plus aucun intérêt dans le cabinet Les Souscripteurs de Montréal alors qu’il continuait de vaquer aux opérations de ladite entreprise sur une base quasi quotidienne tout en étant directeur général de GISCO, La Compagnie d’assurances, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles notamment aux dispositions des articles 60(3) section IV déontologie du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

3. Le ou vers le 27 mai 1999, alors que Les Souscripteurs de Montréal était dissout depuis le 1er mai 1996, a confectionné un document qu’elle savait faux en préparant un avis de changement d’administrateur de la corporation Les Souscripteurs de Montréal en indiquant qu’à compter du 21 février 1999 elle devenait administrateur de la corporation alors que M. André Lacelle avait cessé de l’être depuis la même date et alors que cet avis n’a jamais été inscrit par le Directeur des Corporations mais a servi à justifier un changement de statut à l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec, le tout en contravention notamment aux dispositions de l’article 60(13) section IV déontologie du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec;

4. Le ou vers le 15 mars 1999, a confectionné un document qu’elle savait faux en préparant un avis de renouvellement de sociétariat du cabinet unidisciplinaire Les Souscripteurs de Montréal en indiquant que M. André Lacelle ne détenait plus au moins 10% des actions de la corporation, le tout en contravention notamment avec les dispositions de l’article 60(13) section IV déontologie du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec; » (Nos soulignements)

[102]     Ce plaidoyer de culpabilité ébranle, pour ne pas dire anéantit, l’existence d’un réel transfert des intérêts de l’intimé dans Souscripteurs et milite plutôt vers la mise en place par l’intimé d’un subterfuge pour faire croire à ce transfert d’intérêts impliquant la fille de l’intimé et la confection de documents mensongers, telles que les déclarations   P-32 et P-34.

[103]     Il est à noter que lors de son témoignage du 6 décembre 2010 devant le présent Comité, Mme Lacelle a prétendu que ce plaidoyer de culpabilité avait été fait alors qu’elle souffrait d’un cancer et était très malade. Le Comité ne retient pas cette explication et n’a aucun élément juridique ou factuel disponible pour écarter ce plaidoyer de culpabilité plus de trois ans après qu’il ait été enregistré devant le Comité Fabien.

Argumentation de la plaignante

[104]     Pour la plaignante, à la lumière des témoignages de Ernest Girouard, Lyse Langlois Lacelle et France Lacelle et des pièces produites par la plaignante, la preuve est claire que l’intimé n’a jamais laissé les rênes de Souscripteurs.

[105]     Par ailleurs, la preuve démontre également qu’en même temps, l’intimé était dirigeant de Gisco en sa qualité de directeur général.

[106]     Comme il est en preuve que Gisco faisait affaire directement (contrat de courtage) et indirectement (réassurance et cautionnements) avec Souscripteurs, il y a donc une situation claire de conflit d’intérêts envers Gisco.

[107]     Par ailleurs, en ce qui concerne la vente de Souscripteurs par l’intimé à sa fille pour 1.00$ et autres considérations[44], la plaignante soutient qu’il s’agit là d’un artifice. Elle réfère notamment au jugement rendu dans Fonds d’indemnisation des services financiers c. Lacelle et al.[45] où le juge Gilles Hébert de la Cour supérieure tient les propos suivants :

« [159]      Le Tribunal n’est guère impressionné par l’absence temporaire de Lacelle, de février 1999 à mars 2000, à la tête de Les Souscripteurs de Montréal. L’achat de l’entreprise par sa fille pour une considération de 1 $ et la rétrocession aux mêmes conditions crée de sérieux doutes sur la réalité de la transaction. D’autant plus que France Lacelle n’a aucune connaissance du courtage spécial ni des affaires avec les compagnies d’assurance offshore ni de la façon de traiter avec elles; bref, un cas évident de prête-nom. »

[108]     Finalement, la plaignante attire l’attention du Comité sur le fait que, quant aux déclarations annuelles des entreprises pour les années 1998, 1999 et 2000[46], l’intimé n’a pas expliqué son retard de production de celles-ci et n’y a pas indiqué le transfert de ses actions à sa fille. Conséquemment, l’intimé a confirmé sa détention des actions de Souscripteurs pour les années 1999 et 2000. De plus, dans la déclaration annuelle 1999 soumise le 20 juin 2000, l’intimé se déclare actionnaire de Souscripteurs. La plaignante soumet à cet égard qu’il s’agit là d’un aveu de la part de l’intimé et il cite l’ouvrage des auteurs Maurice et Paul Martel, Les aspects juridiques de la compagnie au Québec où il est écrit :

« La plupart des informations relatives à la compagnie inscrite au registre font preuve de leur contenu en faveur des tiers de bonne foi, à compter de la date où elles sont inscrites à l’état des informations. Ce registre constitue « un acte authentique » au sens de l’article 2814(5) du CCQ. »[47]

Argumentation de l’intimé

[109]     L’intimé a tout d’abord expliqué ce qu’il en était de la dissolution de Souscripteurs et a référé le Comité à la pièce D-14 par laquelle Industries Canada a reconstitué celle-ci suite à ses démarches.

[110]     Par ailleurs, pour l’intimé il est faux de prétendre qu’il a signé un contrat de courtage avec Gisco, tel que mentionné au chef 1 (a) de la plainte. En effet, selon lui la plaignante n’a pas su prouver ce fait ni une quelconque intervention de sa part dans ce contrat.

[111]     De plus, l’intimé mentionne que dans le cadre de la plainte contre sa fille, France Lacelle, la plaignante a retiré le chef 1 (b) qui reprochait à celle-ci d’avoir agi comme prête-nom pour l’intimé lors de la signature du contrat d’agence entre Souscripteurs et Gisco[48].

[112]     Par ailleurs, l’intimé plaide qu’il n’y a aucune preuve à l’effet qu’il a continué à opérer directement ou indirectement Souscripteurs. À cet effet, selon l’intimé la preuve révèle le contraire et ce, par le témoignage d’Ernest Girouard qui a confirmé avoir été témoin lors du transfert des intérêts et actions de l’intimé dans Souscripteurs à France Lacelle et qui a signé comme commissaire à l’assermentation le document confirmant celui-ci[49].

[113]     L’intimé poursuit en mentionnant que même si les témoins France Lacelle, Ernest Girouard et Lyse Langlois Lacelle ont pu prétendre qu’il continuait à aller au bureau, cela ne veut pas nécessairement dire qu’il avait une autorité à diriger Souscripteurs ou qu’il agissait comme directeur de celle-ci. À cet égard, pour l’intimé, le seul fait d’agir en conseiller à des gens devenus propriétaires ou gestionnaires de Souscripteurs sans expérience ne justifie pas l’allégation qu’il continuait d’opérer indirectement Souscripteurs et ne fait pas de lui une personne impliquée dans la direction de celle-ci.

[114]     De plus, selon l’intimé, la plaignante n’a pu démontrer d’aucune façon qu’il a reçu un intérêt ou rémunération quelconque, et ce, même si la plaignante a pu visionner tous les chèques faits par Souscripteurs jusqu’à la fin de ses opérations.

[115]     Quant au contrat de réassurance de Gisco, il était normal pour celle-ci de se trouver un marché de réassurance par son courtier Elco et celui-ci avait le droit de se tourner vers le marché des assureurs non licenciés. Par ailleurs, quant au contrat avec Liberty, l’intimé soumet que M. Joseph Lanzo de Elco a fait affaire directement avec le président de Liberty, M. Ernesto Chong et avec son représentant au Québec, M. Ernest Girouard, de Souscripteurs.

[116]     De plus, l’intimé mentionne qu’il a cédé Souscripteurs à France Lacelle parce qu’à titre de directeur général de Gisco, il ne pouvait détenir un intérêt dans ce cabinet.

Décision sur le chef 1 (a)

[117]     Le chef 1 (a) de la plainte reproche à l’intimé d’avoir fait défaut d’éviter de se placer en situation de conflit d’intérêts en continuant, directement ou indirectement, à opérer Souscripteurs alors qu’il était directeur général de Gisco et que celle-ci était partie à un contrat de courtage avec Souscripteurs.

[118]     Dans un premier temps, pour le Comité, il ne fait aucun doute que l’intimé a effectivement continué à opérer, directement ou indirectement, Souscripteurs pendant toute la période de temps où il a été directeur général de Gisco, soit du 12 février 1999 au 27 mars 2000.

[119]     D’abord, au niveau de la documentation officielle, l’intimé a toujours été désigné comme l’actionnaire principal et dirigeant de Souscripteurs et ce, tel qu’il appert particulièrement des déclarations 1998, 1999 et 2000 à l’Inspecteur général des institutions financières[50]. Il est à noter d’ailleurs que lorsque l’intimé complète les déclarations pour les années 1999 et 2000, soit le ou vers les 20 juin 2000 et 24 août 2000, il ne mentionne aucunement que pour ces années il y a eu un changement quelconque au niveau de l’actionnariat ou de la direction de Souscripteurs.

[120]     Par ailleurs, la preuve tant documentaire que testimoniale est prépondérante à l’effet que l’intimé a continué à s’impliquer dans Souscripteurs pendant la période où il était directeur général de Gisco. Contrairement au témoignage de l’intimé et de France Lacelle, cette implication était plus qu’occasionnelle et limitée à un rôle de conseil. Au contraire, Souscripteurs avait besoin d’une âme dirigeante pour opérer et l’intimé était celle-ci. À cet égard, si le Comité devait suivre l’intimé et France Lacelle dans leurs explications, cela impliquerait que personne ne dirigeait Souscripteurs pendant cette période. En effet, France Lacelle a déclaré ne pas s’impliquer dans les opérations quotidiennes de Souscripteurs[51]alors que l’intimé, pour sa part, nie qu’il opérait Souscripteurs et limite son rôle à celui de guide ou de conseil.

[121]     À ce sujet, le Comité retient le témoignage d’Ernest Girouard soit que l’intimé a toujours continué à donner des directives et à opérer Souscripteurs alors que France Lacelle n’avait qu’une implication marginale dans celle-ci et compatible avec le fait qu’elle n’était qu’un prête-nom.

[122]     Le Comité fait siens les motifs suivants de la Cour supérieure dans l’affaire Le Fonds d’indemnisation des services financiers c. André Lacelle, pour lesquels la Cour a conclu que l’intimé devait être tenu personnellement responsable de pertes encourues par un assuré et ayant été indemnisées par le Fonds :

« [158] Qu’en est-il de la responsabilité personnelle de Lacelle ?

[159]    Le Tribunal n’est guère impressionné par l’absence temporaire de Lacelle, de février 1999 à mars 2000, à la tête de Les Souscripteurs de Montréal. L’achat de l’entreprise par sa fille pour une considération de 1 $ et la rétrocession aux mêmes conditions créent de sérieux doutes sur la réalité de la transaction. D’autant plus que France Lacelle n’a aucune connaissance du courtage spécial ni des affaires avec les compagnies d’assurance offshore ni de la façon de traiter avec elles; bref, un cas évident de prête-nom.

[160]    De 1995 à 2003, c’est toujours Lacelle qui apparaît comme dirigeant et actionnaire de Les Souscripteurs auprès du Registraire des entreprises (Cidreq) du Québec (P-22), et ce, jusqu’à la radiation d’office.

[161]    C’est Lacelle qui embauche l’expert en sinistre Quevillon après l’explosion du 30 août 1999 même s’il est censé être absent de la compagnie.

[162]    C’est lui qui prépare la demande d’indemnisation, c’est lui qui communique avec Gallo et Liberty, qui décide de régler le dossier de Sylvain Vanier et de lui faire un paiement à même les fonds accumulés aux moyens d’autres primes d’assurance. C’est lui qui négocie avec Ernesto Chong; cela toujours pendant son absence officielle de la compagnie.

[163]    Il s’occupe aussi des paiements à Liberty par voie de traites bancaires et signe même certaines traites (P-25A). Tout cela au nom de Les Souscripteurs et en utilisant, si nécessaire, le nom de sa compagnie d’assurance Gisco qui fera faillite, tout comme les Souscripteurs.

[164]    Qui plus est, le 15 août 2002, dans une requête en révision judiciaire dirigée contre Le Fonds d’indemnisation qu’il rédige lui-même, Lacelle affirme qu’en tout temps pertinent, donc au moins depuis septembre 1999, il est le président de la compagnie Les Souscripteurs de Montréal.

(…)

[169]    Entre 1993 et 2001, la situation n’a pas changé malgré l’absence officielle de Lacelle de la compagnie de février 1999 à mars 2000 : c’est toujours lui l’actionnaire et l’administrateur de la compagnie, c’est toujours lui la personne physique qui permet ou commet les divers manquements exposés dans le présent jugement.

[170]    Le Tribunal estime que la responsabilité personnelle est totalement engagée. » [52] (Nos soulignements)

[123]     La preuve présentée devant le Comité est amplement suffisante pour conclure de la même façon que la Cour supérieure, soit que le transfert des intérêts de l’intimé dans Souscripteurs à France Lacelle n’était qu’un artifice.

[124]     Cet artifice ne visait qu’un but, cacher la situation de conflit d’intérêts dans laquelle s’engageait, à sa connaissance, l’intimé.

[125]     Ainsi, l’intimé avait certes le droit de devenir directeur général de Gisco. Cependant à partir du moment où des liens d’affaires, telles que les ententes de courtage et de réassurance, étaient établies directement ou indirectement avec Souscripteurs, il se trouvait alors en situation de conflit d’intérêts. D’ailleurs, l’intimé a admis lui-même qu’il se devait de se départir de ses intérêts dans Souscripteurs afin de pouvoir agir comme dirigeant de Gisco. Il est évident que l’intimé savait alors qu’une situation de conflit d’intérêts serait créée s’il agissait comme directeur général de Gisco et dirigeant de Souscripteurs alors que des relations d’affaires existaient entre ces deux entités.

[126]     En agissant de la sorte, l’intimé s’est donc placé en situation de conflit d’intérêts, et ce, en contravention des dispositions de l’article 54 du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec et de l’article 10 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages. Le Comité déclare donc l’intimé coupable sous le chef 1 (a) de la plainte.

Chef 1 (b)

La preuve

[127]     Les intermédiaires Elco Inc. (« Elco ») est un courtier en réassurance ayant une entente avec Gisco qui l’autorise à négocier et conclure des traités de réassurance au nom de Gisco[53].

[128]     Au moment des faits, M. Joseph Lanzo en est le président.

[129]     Par le biais d’Elco, un traité de réassurance intervient entre Gisco et Liberty le ou vers le 2 décembre 1999, pour la période du 16 février 1999 au 31 décembre 1999[54]. Ledit traité est signé au nom de Liberty par M. Ernest Girouard, employé de Souscripteurs.

[130]     Il faut se souvenir par ailleurs que M. Girouard a témoigné à l’effet que c’est à la demande de l’intimé qu’il a signé ce document.

[131]     Dans son rôle de mandataire de Liberty, Souscripteurs perçoit de Elco les primes de réassurance pour les contrats de cautionnement émis par Gisco[55]. De plus, Souscripteurs reçoit des commissions pour ces contrats[56].

[132]     En ce qui concerne l’origine du traité de réassurance entre Liberty et Gisco, M. Lanzo a témoigné à l’effet qu’il était difficile de trouver un preneur. Il a donc parlé de ce problème aux représentants de Gisco, dont l’intimé. Celui-ci a alors dit qu’il connaissait des assureurs non licenciés qui pourraient être preneurs. L’intimé a alors présenté le président de Liberty, M. Chong, à M. Lanzo, qui l’a rencontré lors d’un souper. Liberty a pu couvrir la carence en réassurance que recherchait M. Lanzo pour Gisco.

[133]     Dans son témoignage, M. Richard Giosi, président de Gisco à l’époque, ajoute que M. Chong est venu aux bureaux de Gisco pour le rencontrer personnellement après avoir rencontré l’intimé.

[134]     Par ailleurs, M. Lanzo a mentionné qu’au moment de la formation de Gisco, il détenait indirectement des actions de celle-ci. Or, il a abandonné cette participation, car il ne pouvait agir comme intermédiaire et actionnaire de Gisco en même temps. Il aurait ainsi été convenu, lors de la formation de Gisco, que les dirigeants devaient se départir de leurs intérêts dans des compagnies avec qui Gisco ferait affaires afin d’éviter tout conflit d’intérêts.

[135]     L’intimé a témoigné concernant ce chef en mentionnant qu’il n’était pas chez Souscripteurs à cette époque et donc qu’il n’a pas pu accepter de recevoir des primes d’Elco.

Argumentation de la plaignante

[136]     Pour la plaignante, les faits parlent d’eux-mêmes. L’intimé est directeur général de Gisco qui paye, par l’entremise d’Elco des primes à Souscripteurs au nom de l’assureur étranger Liberty, représenté au Québec par Souscripteurs. Or, Souscripteurs appartient et est dirigée par l’intimé.

[137]     De plus, la plaignante réfère au témoignage de M. Lanzo à l’effet que les dirigeants avaient été avisés de se départir de leurs intérêts dans les compagnies avec qui Gisco ferait affaires. Or, l’intimé a fait en sorte que Souscripteurs agisse et reçoive des sommes d’argent et des commissions de Gisco tout en entretenant des bonnes relations avec Elco et Liberty.

Argumentation de l’intimé

[138]     Pour l’intimé il est non fondé de dire que l’intimé a accepté que Souscripteurs perçoive de Elco des primes de réassurance pour des contrats de cautionnement. À cette époque, l’intimé était directeur général de Gisco et n’avait pas le contrôle sur les décisions prises par Souscripteurs.

[139]     À cet effet, toute la correspondance relative au traité de réassurance entre Gisco et Liberty passait par Ernest Girouard. Souscripteurs était alors le fondé de pouvoir de Liberty.

[140]     Par ailleurs, bien que l’intimé admette lors de son argumentation orale qu’il est normal que Souscripteurs reçoive des commissions, il précise dans son argumentation écrite qu’il n’y a pas de preuve qu’il a lui-même reçu de telles commissions.

Décision sur le chef 1 (b)

[141]     Ce chef reproche à l’intimé de s’être placé en conflit d’intérêts en acceptant que Souscripteurs perçoive des primes de Elco et retire des commissions pour des contrats de cautionnement émis par Gisco.

[142]     Pour les motifs énoncés dans le cadre du chef 1(a), le Comité est d’avis que l’intimé était toujours l’actionnaire principal et dirigeant de Souscripteurs alors qu’il était en même temps directeur général de Gisco.

[143]     Conséquemment, pour le Comité il est clair que l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en permettant que Souscripteurs perçoive des primes et des commissions en raison de son rôle de mandataire de Liberty.

[144]      Au surplus, il faut noter que la preuve a révélé que l’intimé a été celui qui a suggéré qu’Elco, courtier en réassurance de Gisco, fasse affaires avec Liberty, assureur étranger que Souscripteurs représentait, allant même jusqu’à présenter M. Chong à M. Lanzo.

[145]     En agissant de la sorte, l’intimé devait savoir qu’il se plaçait en situation de conflit d’intérêts puisqu’il savait que cette relation d’affaires se traduirait en commissions pour sa compagnie, Souscripteurs.

[146]     À cet égard, que le nom de M. Girouard apparaisse au traité de réassurance n’a aucune importance dans la mesure où celui-ci a témoigné à l’effet que l’intimé lui a demandé de signer celui-ci. Cette demande est d’ailleurs conforme avec les efforts entrepris par l’intimé pour cacher ses intérêts dans Souscripteurs.

[147]     En conséquence, le Comité déclare l’intimé coupable sous le chef 1 (b) de la plainte.

Chef 1 (c)

La preuve

[148]     Le 11 février 1999, Gisco débute ses affaires. L’intimé en est le directeur général alors que le président est M. Richard Giosi.

[149]     L’intimé et M. Giosi se connaissent alors de longue date et ils ont continué leur relation d’affaires même après la cessation des activités de Gisco, alors qu’ils ont été partenaires dans une entreprise de 2002 jusqu’à la semi-retraite de M. Giosi, le 31 janvier 2009.

[150]     Selon le témoignage de M. Giosi, l’intimé ne pouvait plus être actionnaire et propriétaire de Souscripteurs à compter du moment où il était directeur général de Gisco.

[151]     Le 19 février 1999, Gisco s’engage comme caution de Souscripteurs envers le Conseil des assurances de dommages (« CAD ») pour la somme de 50 000$ et ce, pour la période du 15 mars 1999 au 15 mars 2000[57].

[152]     Ce contrat de cautionnement est signé par le président de Gisco, M. Richard Giosi. Dans son témoignage, M. Giosi dit qu’il a émis ce cautionnement, car Souscripteurs était mandataire de Liberty et Gisco avait besoin de celle-ci pour combler son besoin de réassurance. M. Giosi ajoute qu’il était conscient que si Liberty faisait défaut d’honorer ses engagements, Gisco devrait payer jusqu’à concurrence de 50,000$.

[153]     Ce cautionnement était requis par l’article 33 du Règlement du Conseil des assurances de dommages sur les intermédiaires de marché en assurance de dommages[58] pour permettre à Souscripteurs d’agir comme courtier spécial. Le texte de cet article se lisait alors comme suit :

« 33. Ce courtier en assurance de dommages doit également fournir un cautionnement de 50 000$, au moyen d’une police de garantie émise en faveur du Conseil, pour garantir l’exécution des obligations des assureurs non titulaires de permis au Québec auprès desquels il a placé un risque. »

[154]     Par ailleurs, les cautionnements de Gisco étaient réassurés en partie par Liberty, laquelle est représentée au Québec par Souscripteurs[59].

Argumentation de la plaignante

[155]     La plaignante soumet que des témoignages rendus par MM. Lanzo et Giosi, il est clair que Liberty était représentée au Québec par Souscripteurs. Souscripteurs, en tant que fondé de pouvoir d’une compagnie étrangère, devait détenir un cautionnement de 50,000.00$ en vertu des règlements du CAD. Gisco a donc émis ce cautionnement pour garantir que Souscripteurs pouvait agir pour Liberty. Les cautionnements étaient réassurés par Elco chez Souscripteurs auprès de Liberty.

[156]     Pour la plaignante, il s’agit donc là d’un cas manifeste de conflit d’intérêts.

Argumentation de l’intimé

[157]     Pour l’intimé aucun témoignage ni document ne prouve que c’est en raison de son influence que ce cautionnement a été émis. Ainsi, selon l’intimé, le témoignage de M. Giosi révèle que c’est lui qui a eu la demande de souscrire ce cautionnement, qui en a fait l’analyse et qui a décidé de l’émettre.

[158]     L’intimé réitère au surplus qu’à cette époque il ne contrôlait pas Souscripteurs.

[159]     De plus, l’intimé réfère aux notes sténographiques du témoignage de M. Norbert  Paquette, employé de Gisco à l’époque pertinente, devant le Comité Doss[60]. Dans son témoignage, M. Paquette mentionne que dans la souscription de certains risques, l’intimé n’avait pas essayé d’influencer certains courtiers d’assurance.

[160]     L’intimé termine en mentionnant qu’il était tout à fait approprié pour Mme France Lacelle de s’adresser à M. Giosi pour ce cautionnement puisque c’est ce dernier qui émettait antérieurement des cautionnements similaires à Souscripteurs, avant la création de Gisco.

Décision sur le chef 1(c)

[161]     Tel que décidé précédemment, l’intimé opérait Souscripteurs durant la période où il était directeur général de Gisco et en était ainsi l’âme dirigeante.

[162]     Alors qu’il est directeur général de Gisco, celle-ci émet à Souscripteurs une caution de 50,000$ afin de lui permettre d’agir comme courtier spécial.

[163]     À titre de courtier spécial et comme mandataire de Liberty, un traité de réassurance est conclu en faveur de Gisco.

[164]     Gisco se trouve donc à garantir, par son cautionnement, le défaut potentiel de Liberty dont le mandataire est Souscripteurs, propriété de l’intimé qui est en même temps le directeur général de Gisco.

[165]     Selon le Comité, il s’agit d’une situation claire de conflit d’intérêts de la part de l’intimé.

[166]     À cet effet, le Comité n’accorde pas de valeur prépondérante à la défense de l’intimé selon laquelle il n’a pas fait émettre le cautionnement, celui-ci ayant été émis par M. Giosi. En effet, tel que M. Giosi a témoigné, et tel que l’intimé l’a reconnu, celui-ci ne pouvait être à la fois directeur général de Gisco et propriétaire de Souscripteurs. M. Giosi ne pouvait savoir que, dans les faits, l’intimé continuait à opérer Souscripteurs et qu’en émettant un cautionnement à celle-ci, une situation de conflit d’intérêts se créait. Il revenait à l’intimé de mentionner la réalité à M. Giosi afin qu’il puisse agir en toute connaissance de cause. En cachant sa véritable implication dans Souscripteurs, l’intimé a effectivement fait émettre ou causé que soit émis par Gisco le cautionnement permettant à Souscripteurs de détenir un permis de courtier spécial et ainsi représenter au Québec des assureurs non licenciés dont, entre autres, Liberty.

[167]     L’intimé savait que Souscripteurs avait besoin d’un cautionnement pour pouvoir agir comme courtier spécial et ainsi représenter Liberty dans ses relations avec Gisco. Il est aussi impossible de croire que l’intimé ignorait que c’est Gisco qui allait émettre le cautionnement requis, et ce, en raison de son rôle continu chez Souscripteurs. En agissant de la sorte, l’intimé a placé ses intérêts avant ceux de tiers, dont Gisco.

[168]     En conséquence, le Comité déclare l’intimé coupable sous le chef 1 (c) de la plainte.

Chef 1 (d)

La preuve

[169]     Souscripteurs agissait comme intermédiaire entre Gisco et les courtiers et cabinets qui ne plaçaient pas au moins 100 000$ en cautionnement directement avec celle-ci.

[170]     Ainsi, les frais d’ouverture de dossier facturés par Souscripteurs pour chaque police étaient de 1,000$. Souscripteurs conservait alors 500$ comme frais d’administration et étude du cautionnement[61].

[171]     Selon le témoignage de M. Giosi, ce partage avait été convenu avec son directeur général, soit l’intimé, vers le mois de mars ou avril 1999.

Argumentation de la plaignante

[172]     La plaignante fait d’abord remarquer que ni France Lacelle, ni Ernest Girouard n’ont témoigné sur leur connaissance de ce système par lequel Souscripteurs recevait la somme de 500$ sur chaque frais de 1000$ pour ouverture et étude de dossier. Pour la plaignante, cela veut donc dire que ces personnes n’étaient pas au courant.

[173]     Par ailleurs, la plaignante soumet que la situation de conflit d’intérêts est manifeste et même admise par M. Giosi, président de Gisco à l’époque, lors de son témoignage alors qu’il a mentionné que ce partage de frais avait été discuté avec l’intimé.

Argumentation de l’intimé

[174]     Pour l’intimé, il est faux de prétendre que Gisco versait à Souscripteurs la somme de 500$ sans aucune considération.

[175]     Par ailleurs, selon l’intimé, M. Giosi a confirmé dans son témoignage que c’est lui qui a autorisé les frais d’honoraires que Souscripteurs pouvait facturer dans le cadre des cautionnements.

[176]     Par ailleurs, l’intimé soumet qu’il n’avait pas le contrôle de Souscripteurs à cette époque, mais plutôt sa fille, France Lacelle.

Décision sur le chef 1 (d)

[177]     Le Comité retient de la preuve que l’intimé a instauré avec M. Giosi un système par lequel Souscripteurs recevrait la somme de 500$ pour chaque ouverture de dossier de cautionnement avec Gisco, facturée à 1000$ aux courtiers.

[178]     Lorsque ce système a été mis en place, l’intimé était directeur général de Gisco et, en même temps, il était l’âme dirigeante de Souscripteurs.

[179]     En agissant de la sorte, l’intimé s’est placé dans une situation de conflit d’intérêts. À cet égard, il n’est pas essentiel de savoir si, effectivement, des travaux étaient effectués par Souscripteurs à hauteur ou non du 500$ versé. La situation de conflit ne naît pas de la valeur des services fournis, mais du fait que l’intimé se trouve alors dans une situation où il favorise ou peut favoriser ses intérêts personnels au détriment de ceux de Gisco.

[180]     En conséquence, le Comité déclare l’intimé coupable sous le chef 1(d) de la plainte.

Chef 1 (e)

La preuve

[181]     Le 12 février 1999 intervient une convention entre les actionnaires de Gisco. Dans cette convention, l’intimé est actionnaire à 17.5% d’une compagnie nommée Holdco qui, elle-même, est actionnaire à 28% de Gisco. Par ailleurs, cette même convention indique que les dirigeants de Gisco sont Richard Giosi et l’intimé[62].

[182]     Dans l’organigramme corporatif au 1er mars 2000[63], l’actionnaire Holdco est remplacé par les Gestionnaires d’assurances Gisco Ltée (« Gestionnaires Gisco ») et ce, selon la même proportion d’actions, soit 28%. Par ailleurs, cet organigramme révèle que l’intimé est actionnaire de Gestionnaires Gisco à 17.5%.

[183]     Gestionnaires Gisco a été constituée le 1er septembre 1996[64].

[184]     Le ou vers le 27 septembre 1999, un formulaire de correction de personne morale est complété afin d’ajouter, notamment, l’intimé comme administrateur de Gestionnaires Gisco[65].

[185]     Dans un rapport daté du 8 novembre 2000 adressé au liquidateur de Gisco, soit Pricewaterhouse Coopers, la firme Raymond Chabot Grant Thornton fait état de sommes d’argent avancées par Gisco à Gestionnaires Gisco à compter du mois de mars 1999. Selon ce rapport, Gestionnaires Gisco devait la somme de 56,000$ à Gisco en date du 30 avril 2000[66].

[186]     M. Giosi a confirmé l’existence de cette dette. Cependant, celui-ci a mentionné que la légalité de ce prêt avait été confirmée par une opinion juridique. Par ailleurs, il admet s’être fait reprocher par le comité de déontologie de Gisco de ne pas avoir divulgué celle-ci[67].

[187]     Lors du témoignage de M. Giosi, la plaignante a admis que la dette visée dans le chef 1 (e) de la plainte datait de février ou de mars 1999, soit avant que l’intimé ne devienne administrateur de Gestionnaires.

[188]     De plus, en contre-interrogatoire, Mme Chauvin déclare que ce n’est pas l’existence de la dette qui est reprochée à l’intimé, mais plutôt le fait de ne pas l’avoir divulguée. Ainsi, selon elle, le conflit d’intérêts est d’être administrateur d’un actionnaire endetté envers Gisco.

Argumentation de la plaignante

[189]     La plaignante soumet que le prêt entre Gisco et Gestionnaires Gisco n’a pas été divulgué selon les règles de déontologie de Gisco et elle réfère, à cet égard, au rapport de M. Jacques Dumont produit comme pièce P-29.

[190]     Par ailleurs, quant au fait que la dette existait avant l’accession de l’intimé au poste d’administrateur de Gestionnaires, la plaignante soumet qu’il devait quand même divulguer celle-ci.

[191]     La plaignante termine en référant aux articles 285.1, 285.2, 285.8, 285.9, 285.14, 285.17, 285.18, 285.24 et 285.27 de la Loi sur les assurances qui concernent l’éthique et les conflits d’intérêts.

Argumentation de l’intimé

[192]     L’intimé ne nie pas l’existence de cette dette. Cependant, il souligne que la plaignante a admis que celle-ci avait été contractée avant son arrivée comme administrateur de Gestionnaires Gisco.

[193]     Par ailleurs, selon l’intimé, l’existence de cette dette ne peut constituer une faute déontologique de sa part et ne devrait pas être étudiée par le présent Comité.

Décision sur le chef 1 (e)

[194]     Dans ce chef il est reproché à l’intimé de s’être placé dans une situation de conflit d’intérêts en devenant administrateur de Gestionnaires Gisco alors que cette dernière avait une dette importante à l’égard de Gisco.

[195]     Le Comité ne voit pas de faute déontologique ou de conflit d’intérêts dans le simple fait pour l’intimé de devenir administrateur d’une compagnie qui a une dette envers celle pour laquelle il agit comme directeur général dans le contexte factuel qui lui a été présenté.

[196]      Quant au contexte factuel, il faut noter que cette dette n’a pas été contractée alors que l’intimé était administrateur de Gestionnaires Gisco et qu’elle n’avait rien d’illégal, selon le témoignage de M. Giosi et le rapport du Comité de déontologie de Gisco[68]. D'ailleurs, le reproche qui, au départ, était d’être devenu administrateur d’une compagnie endettée envers Gisco s’est transformé en un reproche lié à la non-divulgation de ce fait au comité de déontologie de Gisco par l’intimé, reproche qui s’éloigne de la base du chef 1 qui concerne l’existence d’un conflit d’intérêts.

[197]     Par ailleurs, la preuve est fragmentaire sur le contexte factuel entourant ce prêt. Ainsi, on sait qu’il a été consenti à l’instigation du président de Gisco, M. Giosi. Cependant, le Comité ignore quand exactement il été consenti, la date à laquelle il a été divulgué au conseil d’administration de Gisco, quand il a été divulgué au comité de déontologie de Gisco, par qui et comment.

[198]     En raison du libellé du chef 1 (e) et de la preuve qui a été présentée au Comité, celui-ci ne peut que rejeter ce chef de la plainte.

Chef 1 (f)

La preuve

[199]     Tel que requis par l’IGIF, Elco demande à M. Girouard de Souscripteurs, à titre de mandataire de Liberty, d’obtenir une lettre de crédit de celle-ci pour garantir le paiement des primes de réassurances non acquises.

[200]     Ainsi, selon le témoignage de M. Lanzo, lorsqu’il s’agit d’un réassureur non licencié, celui-ci doit laisser en dépôt 115% de la prime non acquise. Dans ce cas-ci, cette prime s’élevait à 197 900$.

[201]     Liberty répond à Elco le 25 mars 2000 en mentionnant qu’elle fait les démarches nécessaires pour obtenir cette lettre de crédit et que des fonds peuvent être utilisés à même ceux détenus en fidéicommis par Souscripteurs pour Liberty[69].

[202]     Le 1er mars 2000, Elco écrit au conseiller juridique de Gisco et l’informe qu’à la demande de l’intimé, directeur général de Gisco, « la protection de réassurance applicable aux différentes acceptations de la société est en vigueur depuis le 1er janvier 2000 »[70].

[203]      La lettre de crédit de la part de Liberty n’a finalement jamais été reçue par Elco.

[204]     M. Girouard a témoigné concernant la pièce P-18. Celui-ci mentionne se souvenir vaguement des demandes de Elco et précise que le tout était remis à l’intimé.

Argumentation de la plaignante

[205]     La plaignante soumet que lorsque les demandes de Elco sont faites, afin de satisfaire aux exigences de l’IGIF, l’intimé est directeur général de Gisco. Or, il n’y a pas de suite à cette demande et, au contraire, l’intimé confirme à Elco qu’il y a des fonds suffisants chez Souscripteurs pour cette garantie.

[206]     Conséquemment, l’intimé joue double jeu et se met dans une situation de conflit d’intérêts inexpliquée.

Argumentation de l’intimé

[207]     L’intimé soumet que lors des demandes de Elco, il n’était pas le mandataire de Liberty puisqu’il était directeur général de Gisco. Il n’était pas dans son pouvoir d’obtenir une lettre de crédit de la part de Liberty.

Décision sur le chef 1 (f)

[208]     Le chef 1 (f) reproche à l’intimé de s’être placé dans une situation de conflit d’intérêts en omettant, à titre de mandataire de Liberty, d’obtenir pour Gisco une lettre de crédit irrévocable nécessaire pour garantir le paiement des primes de réassurances cédées non acquises tel que requis par l’IGIF.

[209]     Le Comité a déjà conclu et réitère que l’intimé était, pendant qu’il détenait un poste de directeur général de Gisco, l’âme dirigeante de Souscripteurs.

[210]     Cependant, aux yeux du Comité, la preuve ne permet pas de conclure en une faute quelconque de Souscripteurs ou de l’intimé quant à la demande de lettre de crédit à Liberty. À cet effet, il semble de la pièce P-18 que des démarches ont été effectuées, mais il n’y a rien qui permet au Comité de qualifier ces démarches d’insuffisantes ou de statuer que Souscripteurs ou l’intimé a agi de telle sorte que c’est en raison de leur comportement que cette demande n’a pas abouti.

[211]     En conclusion, eu égard à la preuve, le Comité ne voit pas en quoi l’intimé a pu se placer en situation de conflit d’intérêts eu égard à la demande de lettre de crédit exigée de Liberty. En conséquence, le Comité déclare l’intimé non coupable du chef 1(f) de la plainte.

Chef 1 (g)

La preuve

[212]     Le 5 juin 2000, les administrateurs de Gisco décident de procéder à la liquidation de celle-ci. Pricewaterhouse Coopers a été nommé liquidateur dans ce dossier.

[213]     Dans une lettre du 19 février 2001 adressée à Souscripteurs, le liquidateur écrit ce qui suit :

« L’état de compte ci-joint, préparé à partir des registres de Gisco, montre que vous êtes endetté envers Gisco d’un montant de 21,955.25$. En conséquence, nous comptons recevoir paiement de cette somme dans les quinze (15) jours suivant la réception de la présente sinon, nous nous verrons dans l’obligation de prendre des procédures légales contre votre société. »[71]

[214]     Selon l’état de compte joint à cette lettre, il semble que cette somme soit composée de primes nettes[72] dues à Gisco par Souscripteurs pour la période du 2 mars 1999 au 29 mars 2000.

[215]     Dans son témoignage, Mme Chauvin mentionne qu’elle ignore si ce montant a été payé par Souscripteurs et, en contre-interrogatoire, elle admet ne pas avoir vérifié auprès du liquidateur. Cependant, elle note que Souscripteurs a fait faillite quatre mois plus tard et que Gisco se retrouve à la liste des créanciers[73].

[216]     Selon l’intimé, le liquidateur a envoyé à tous les courtiers une lettre pour réclamer des sommes dues. Tous les courtiers pouvaient négocier leur dette avec le liquidateur. Souscripteurs n’a pas pu négocier cette dette, car il a fait faillite. Il a cependant remis le tout aux avocats et il ne sait pas quelle négociation a eu lieu à cet égard.

Argumentation de la plaignante

[217]     La plaignante plaide que cette dette existait encore au moment de la faillite de Souscripteurs, soit le 7 juin 2001 puisque Gisco apparaît à la liste des créanciers P-46 et ce, bien que l’intimé ait alors fait défaut d’indiquer le montant dû pour chacun de ceux-ci.

Selon la plaignante, l’intimé n’a présenté aucune défense sur cette question.

Argumentation de l’intimé

[218]     L’intimé soumet qu’il ne peut être tenu responsable de cette dette alors qu’il n’était pas aux commandes de Souscripteurs.

[219]     De plus, la somme réclamée par Gisco était contestée devant les tribunaux et, suite à la faillite de Souscripteurs, elle a été radiée.

Décision sur le chef 1 (g)

[220]     Ce chef reproche à l’intimé de s’être placé en situation de conflit d’intérêts en faisant défaut de voir à ce que Souscripteurs verse à Gisco la somme de 21 955,25$ à titre de prime nette.

[221]     Le simple fait pour Souscripteurs de devoir de l’argent à Gisco ne constitue pas, en soi et à défaut d’un contexte factuel approprié, un conflit d’intérêts. Quant au statut de l’intimé à titre de directeur général de Gisco, il s’est terminé par son congédiement le 29 mars 2000.

[222]     Or, la preuve ne révèle pas que la dette de 21 955,25$ est née alors que l’intimé était directeur général de Gisco. Ainsi, l’état de compte joint à la lettre du liquidateur P-20 ne précise aucunement à quel moment ces primes nettes étaient dues ni si des états de compte avaient préalablement été transmis[74]. L’état de compte joint à P-20 semble être du 31 juillet 2000, alors que l’intimé n’est plus chez Gisco. Les dates que l’on retrouve pour chacune des transactions semblent référer à la date effective de la police et non à celles où les primes sont dues ou à des états de compte impayés. De plus, certains montants semblent avoir été payés et d’autres pas.

[223]     Bref, le Comité ne peut conclure que des sommes étaient dues alors que l’intimé était directeur général chez Gisco ou même après puisque, comme l’a mentionné Mme Chauvin dans le cadre de son témoignage, elle ne sait pas si ces sommes ont été remboursées.

[224]     Il n’y a donc pas de preuve prépondérante permettant de conclure que l’intimé a fait défaut de voir à ce que Souscripteurs verse à Gisco la somme de 21 955,25$ et, si c’est le cas, il n’y a aucune preuve prépondérante permettant de conclure à un conflit d’intérêts constituant une faute déontologique.

[225]     Pour ces motifs, le Comité déclare l’intimé non coupable sous le chef 1 (g) de la plainte.

Chef 2

La preuve

[226]     Le chef 2 vise les gestes posés par l’intimé pour cacher son implication dans Souscripteurs alors qu’il était directeur général de Gisco. Le Comité a déjà décidé que la preuve était prépondérante quant à son implication dans Souscripteurs durant cette période de temps, créant diverses situations de conflit d’intérêts. Le Comité se limitera donc à relever certains éléments de la preuve relatifs aux gestes posés pour laisser croire que l’intimé n’avait plus d’intérêts dans Souscripteurs durant sa période de direction chez Gisco. Il faut, par ailleurs, considérer cette preuve avec la preuve retenue à l’égard du chef 1 (a) de la plainte.

[227]     L’intimé est devenu directeur général de Gisco le 12 février 1999, poste qu’il occupera jusqu’à sa fin d’emploi, le 29 mars 2000.

[228]     Dans son témoignage, l’intimé mentionne que pour devenir actionnaire et dirigeant de Gisco, une des exigences était de ne pas être « propriétaire » d’un bureau de courtage. C’est pour cette raison que le 16 février 1999, l’intimé transfère à France Lacelle tous ses droits, titres et intérêts dans Souscripteurs et ce, pour la somme de $1.00 et autres considérations[75].

[229]     À la même date, France Lacelle signe, au nom de Souscripteurs, un contrat de courtage avec Gisco. Selon ce contrat, Souscripteurs doit recevoir de Gisco des commissions à titre de rémunération pour les affaires traitées pour le compte de celle-ci[76].

[230]     Le contrat d’emploi de l’intimé contient d’ailleurs des clauses de non-concurrence et de services exclusifs à Gisco[77].

[231]     Par lettre du 1er mars 1999, l’ACAPQ écrit à Souscripteurs, aux soins de l’intimé, afin de lui transmettre un avis de renouvellement pour la période du 1er avril au 31 mars 2000[78].

[232]     Le 3 mars 1999, France Lacelle, répond à l’ACAPQ en l’avisant, notamment, du fait que « M. André Lacelle ne fait plus partie du cabinet décrit plus haut. Il agira plutôt à titre d’intermédiaire indépendant ».[79]

[233]     À la page 2 du formulaire de renouvellement,[80] il est déclaré qu’en remplacement d’André Lacelle, France Lacelle est la seule actionnaire détenant directement ou indirectement plus de 10% des actions avec droit de vote et elle agit comme administratrice unique.

[234]     Le 26 mars 1999, l’ACAPQ écrit à Souscripteurs afin de demander copie du certificat de modification ainsi que copie des statuts de modification des actionnaires, administrateurs et dirigeants de Souscripteurs afin de pouvoir procéder à l’étude de la demande de renouvellement[81].

[235]     N’ayant pas eu de réponse à la demande du 26 mars, l’ACAPQ écrit à nouveau à Souscripteurs le 5 mai 1999 afin de demander qu’on lui fasse parvenir l’information requise[82].

[236]     La demande du 26 mars 1999 étant demeurée sans réponse, l’ACPQ avise Souscripteurs par lettre du 17 mai 1999 du refus de renouvellement du cabinet à titre de sociétaire[83].

[237]     Le 27 mai 1999, France Lacelle transmet à l’ACAPQ par télécopieur copie d’un formulaire d’avis de changement des administrateurs de Souscripteurs à l’attention de Industrie Canada sur lequel il est indiqué que France Lacelle remplace André Lacelle à titre d’administratrice de Souscripteurs à compter du 21 février 1999. Par ailleurs, dans la page d’envoi de télécopieur, France Lacelle précise que ce formulaire est celui « envoyé au Gouvernement Fédéral pour le changement d’administrateur de la compagnie Les Souscripteurs de Montréal Inc. ». Par ailleurs, Mme Lacelle écrit également que « dès réception de la confirmation du changement d’administrateur, nous vous la ferons parvenir »[84].

[238]     Selon la preuve, cet avis n’a jamais été transmis à Industrie Canada.

[239]     Suite à l’envoi de ces informations, l’ACAPQ écrit à Mme Lacelle pour l’informer du renouvellement du sociétariat de Souscripteurs[85].

[240]     Dans sa déclaration assermentée aux fins des mesures transitoires au Bureau des services financiers du 14 septembre 1999, France Lacelle se déclare comme étant la seule dirigeante et actionnaire de Souscripteurs[86].

[241]     L’intimé a été congédié par Gisco le 29 mars 2000[87].

[242]     Le ou vers le 14 avril 2000, France Lacelle rétrocède Souscripteurs à l’intimé pour la somme de 1.00$[88]. Selon l’intimé, il reprend le contrôle des opérations de Souscripteurs à compter de cette date.

[243]     Le ou vers le 20 juin 2000, l’intimé transmet à l’Inspecteur général des institutions financières la déclaration annuelle de Souscripteurs pour l’année 1999. Le ou vers le 24 août 2000 il transmet la déclaration annuelle 2000 et le ou vers le 12 juin 2000 il transmet une déclaration modificative pour changer l’adresse de Souscripteurs du 4480 [rue A] à Montréal au 4707 [rue B] à Laval[89].

[244]     En parallèle avec l’intimé, France Lacelle a été accusée d’actes dérogatoires relatifs aux opérations de Souscripteurs. Lors de sa comparution devant le Comité Fabien, elle a plaidé coupable à différents chefs. Ainsi, le 1er octobre 2007 elle a transmis une lettre au comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages où elle écrit notamment :

« Pour les années précédentes, je me suis fiée à l’opinion de tiers sur mes devoirs professionnels et je reconnais que ces conseils étaient erronés. (…) Je reconnais par la présente mes torts et admets que je n’ai pas respecté mon code de déontologie et la loi lorsque j’ai opéré Souscripteurs de Montréal (…) »[90]

[245]     Selon le témoignage de Mme Lacelle, le tiers dont il est mention à cette lettre est l’intimé.

[246]     Subséquemment à cette lettre, Mme France Lacelle a plaidé coupable le 4 octobre 2007 à divers chefs de la plainte contre elle et, notamment, aux chefs 2, 3 et 4 qui se lisent ainsi :

« 2. Entre le 3 mars 1999 et le 27 mars 2000, de concert avec M. André Lacelle, son père, a exercé ses activités de façon malhonnête en tentant de faire croire que ce dernier n’avait plus aucun intérêt dans le cabinet Les Souscripteurs de Montréal alors qu’il continuait de vaquer aux opérations de ladite entreprise sur une base quasi quotidienne tout en étant directeur général de GISCO, La Compagnie d’assurances, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles notamment aux dispositions des articles 60(3) section IV déontologie du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

3. Le ou vers le 27 mai 1999, alors que Les Souscripteurs de Montréal était dissout depuis le 1er mai 1996, a confectionné un document qu’elle savait faux en préparant un avis de changement d’administrateur de la corporation Les Souscripteurs de Montréal en indiquant qu’à compter du 21 février 1999 elle devenait administrateur de la corporation alors que M. André Lacelle avait cessé de l’être depuis la même date et alors que cet avis n’a jamais été inscrit par le Directeur des Corporations mais a servi à justifier un changement de statut à l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec, le tout en contravention notamment aux dispositions de l’article 60(13) section IV déontologie du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec;

4. Le ou vers le 15 mars 1999, a confectionné un document qu’elle savait faux en préparant un avis de renouvellement de sociétariat du cabinet unidisciplinaire Les Souscripteurs de Montréal en indiquant que M. André Lacelle ne détenait plus au moins 10% des actions de la corporation, le tout en contravention notamment avec les dispositions de l’article 60(13) section IV déontologie du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec; »[91] (nos soulignements)

[247]     Dans son contre-interrogatoire à l’égard de ce chef, Mme Chauvin est revenue sur les différents éléments qui prouvent l’implication de l’intimé dans Souscripteurs alors qu’il est en poste chez Gisco. Par ailleurs, elle ajoute que le fait de dire faussement qu’il n’a plus d’intérêts dans Souscripteurs constitue de la malhonnêteté intellectuelle de la part de l’intimé.

[248]     Elle réitère de plus que toute la documentation officielle et publique démontre que l’intimé est toujours demeuré actionnaire et administrateur de Souscripteurs.

[249]     Quant à l’intimé, celui-ci a témoigné à l’égard de ce chef en revenant sur le transfert de Souscripteurs à sa fille pour 1.00$. Il admet avoir aidé et donné des renseignements après ce transfert, mais explique que le personnel en place n’était pas au courant des opérations. Ainsi, France Lacelle est devenue, du jour au lendemain, responsable des opérations, sans connaître celles-ci. Au moment de cette cession, Souscripteurs avait un chiffre d’affaires de 1 million de dollars.

Argumentation de la plaignante

[250]     Pour la plaignante, il faut distinguer le chef 2 du chef 1 (a) de la plainte. Au chef 1 (a) on reprochait un conflit d’intérêts à l’intimé. Dans le chef 2, on reproche son comportement malhonnête, pas simplement envers Gisco mais aussi envers tous les intervenants du milieu, que ce soit l’ACAPQ, la CAD, la CHAD, le BSF de même que les tiers avec qui Souscripteurs a traité durant cette période.

[251]     Selon la plaignante, ce chef vise le comportement malhonnête d’une personne qui cherche à tromper par des manœuvres qui font en sorte que la réalité n’est pas celle qui est représentée.

[252]     Le fait que l’intimé n’ait signé la déclaration annuelle pour l’année 1999 qu’en juillet 2000 ne change rien au fait qu’il déclare ainsi, publiquement, qu’il était l’administrateur et l’actionnaire principal de Souscripteurs de 1998 à 2000. Jamais une déclaration modificatrice n’a été déposée pour indiquer la présence de France Lacelle. Selon les registres publics ayant force d’acte authentique, l’intimé a toujours été chez Souscripteurs.

[253]     Par ailleurs, la plaignante réfère au plaidoyer de culpabilité de France Lacelle, P-97, et notamment quant au chef 2 de cette plainte où elle admet sa complicité avec l’intimé dans le cadre du comportement malhonnête reproché.

Argumentation de l’intimé

[254]     Pour sa défense, l’intimé allègue que les accusations de malhonnêteté de la plaignante sont mal fondées et non prouvées.

[255]     Ainsi, l’intimé insiste sur le transfert des intérêts de Souscripteurs à France Lacelle, dont le document qui le confirme a été assermenté devant M. Girouard.

[256]     L’intimé prétend également que la documentation au dossier établi qu’il n’était plus responsable de Souscripteurs et qu’il devait se départir de ses intérêts dans celle-ci « parce qu’il s’en allait pour une compagnie d’assurance et ne devait plus avoir d’intérêts dans des cabinets de courtage ». Finalement, l’intimé réitère qu’il n’a fait que conseiller les personnes à l’emploi de Souscripteurs, ce qui n’implique pas un contrôle de sa part.

Décision sur le chef 2

[257]     Le chef 2 de la plainte reproche à l’intimé d’avoir exercé ses activités de façon malhonnête en tentant de faire croire qu’il n’avait plus aucun intérêt dans Souscripteurs alors qu’il  continuait à vaquer aux opérations de cette entreprise tout en étant directeur général de Gisco.

[258]     Le Comité a déjà décidé, dans le cadre du chef 1 (a) de la plainte, que l’intimé a continué à opérer directement et indirectement Souscripteurs alors qu’il était directeur général de Gisco. En fait, le Comité a conclu, notamment, que l’intimé a été l’âme dirigeante de Souscripteurs durant le temps où il était, en même temps, directeur général de Gisco et que sa fille, France Lacelle, a été son prête-nom pour camoufler sa réelle implication dans Souscripteurs.

[259]     Pour le Comité, l’intimé a contrevenu à ses devoirs déontologiques en agissant de façon malhonnête et à l’encontre de l’honneur et la dignité de la profession en créant un subterfuge ayant pour but de laisser croire qu’il n’avait plus aucun intérêt dans Souscripteurs alors qu’il était directeur général de Gisco.

[260]     À cet effet, l’intimé savait et a admis que pour pouvoir accéder au poste de directeur général de Gisco, il devait se départir de ses intérêts Souscripteurs.

[261]     Afin de créer cette illusion, l’intimé a concocté un plan selon lequel c’est sa fille qui apparaîtrait, auprès des tiers de bonne foi, comme propriétaire et dirigeante de Souscripteurs.

[262]     Un document de « vente » pour 1.00$ est donc confectionné, premier jalon d’un ensemble de supercheries.

[263]     Par la suite, des déclarations sont faites aux organismes de régulation dans lesquelles Mme Lacelle se déclare propriétaire et dirigeante de Souscripteurs.

[264]     Cependant, comme le Comité l’a décidé, l’ensemble de la preuve révèle le rôle de prête-nom de Mme Lacelle et l’omniprésence de l’intimé dans les opérations de Souscripteurs.

[265]     Les gestes de l’intimé n’ont été posés que dans un but, soit celui d’induire en erreur et de laisser croire à son retrait total de Souscripteurs. Ces gestes prémédités et intéressés de l’intimé ne peuvent être qualifiés autrement que de malhonnêtes, indignes et contraires à l’honneur de la profession. En conséquence, le Comité déclare l’intimé coupable sous le chef 2 de la plainte.

Chef 4

[266]     Le chef 4 de la plainte reproche ce qui suit  l’intimé:

Le ou vers le 15 juin 2000, a fait défaut d'exécuter avec intégrité et transparence ses activités de courtier envers ses mandants Gamut Insurance, Manwin Insurance Brokers, Groupe Cyr Services financiers, Assur Conseil, Unicour Assurance, Assurances Concordia, Assurances Réal Pellerin et Félix Franciscaut en les informant que les polices en cours, souscrites auprès d'assureurs externes, ne serait pas renouvelés à échéance alors qu'il ne pouvait plus agir comme courtier spécial depuis le 15 mars 2000, le tout en contravention notamment aux dispositions des article 9, 25 et 26 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

La preuve

[267]     Par lettre du 28 mai 2000 adressée par France Lacelle au Bureau des services financiers (« BSF »), celui-ci est avisé que Souscripteurs n’a pas renouvelé le cautionnement requis pour agir à titre de courtier spécial. De plus, dans cette lettre France Lacelle avise le BSF que Souscripteurs a « cessé de faire des affaires d’assurance avec des marchés non licenciés, et ce, depuis le mois de mars 2000 »[92].

[268]     Selon la preuve et à compter du 15 mars 2000, il n’y a personne chez Souscripteurs qui possède l’autorisation d’agir comme courtier spécial.

[269]     Le ou vers les 14 et 15 juin 2000, l’intimé transmet des lettres aux courtiers de première ligne avec qui Souscripteurs fait affaires pour les aviser que :

« tous les contrats d’assurance souscrits pour le compte des assureurs étrangers par l’entremise de Les Souscripteurs de Montréal ne seront pas renouvelés à leurs échéances.

La raison pour laquelle nous avons cessé de souscrire est dûe au fait que nous éprouvons beaucoup de difficulté à obtenir le paiement des réclamations en cours de la part des assureurs étrangers depuis quelque temps.

Si vous décidez de faire annuler les contrats existants en cour de terme, sur réception d’une demande de votre client ou du retour du contrat d’assurance, nous ferons émettre un avis d’annulation et procèderons à la demande de crédit auprès des assureurs. Aussitôt ces crédits reçus (sic) des assureurs nous vous les ferons parvenir ».[93] (Notre soulignement)

[270]     Dans son témoignage, Mme Chauvin explique que les avis P-45 auraient dû être donnés dès le mois de mars 2000 et qu’ils auraient dû faire mention que les risques souscrits alors devaient être placés ailleurs étant donné la perte de qualité de Souscripteurs pour représenter des assureurs étrangers.

[271]     Par ailleurs, Mme Chauvin réfère également aux pièces P-49, P-50 et P-51 qui sont des polices et avenants qui ont été émis alors que personne, dont l’intimé, ne pouvait alors agir comme courtier spécial chez Souscripteurs.

[272]     En contre-interrogatoire, Mme Chauvin ajoute qu’aucun des courtiers de première ligne ne savait que l’intimé ne pouvait plus agir comme courtier spécial depuis le 15 mars 2000.

[273]     Par ailleurs, ne pouvant plus agir comme courtier spécial, l’intimé ne pouvait encaisser des primes, rembourser des primes, s’occuper de réclamations et faire ce que l’intimé a qualifié de « run off ».

[274]      Dans son témoignage, l’intimé explique que les avis P-45 ont été envoyés pour aviser les courtiers de première ligne du fait qu’il y avait des problèmes et des difficultés de paiement avec les assureurs étrangers. À cet effet, tant qu’il y avait des fonds, Souscripteurs payait les réclamations avec ces fonds. Lorsque les fonds se sont faits plus rares et malgré des promesses, le paiement des réclamations par les assureurs se faisait attendre ou ne se réalisait pas.

[275]     L’intimé témoigne qu’en transmettant ces avis, il se conformait au conseil que l’on retrouve dans le communiqué D-13 de la Chambre de l’assurance de dommages qui mentionne qu’une des obligations du courtier est d’informer les assurés sans délai de la situation de leur assureur.

[276]     L’intimé mentionne ensuite que malgré ce qu’il croyait, les courtiers de première ligne n’ont pas remplacé les contrats d’assurance existants.

[277]     En contre-interrogatoire, l’intimé dit qu’il n’est pas nécessaire d’aviser les courtiers de première ligne qu’il ne peut agir comme courtier spécial puisqu’il a avisé ceux-ci que les polices ne seraient pas renouvelées.

[278]     À cet effet, l’intimé mentionne qu’émettre des avenants, comme ceux qu’on retrouve aux pièces P-49, P-50 et P-51, ne constitue pas une activité de courtier spécial et, il n’a, de toute façon, fait aucune souscription après le 15 mars 2000. Après cette date, il n’a que liquidé les opérations de Souscripteurs en faisant son « run off ».

Argumentation de la plaignante

[279]     La plaignante rappelle qu’à compter de mars 2000, personne chez Souscripteurs ne peut agir comme courtier spécial. À compter de ce moment, Souscripteurs ne peut représenter des assureurs étrangers.

[280]     Pour ne pas perdre son achalandage, Souscripteurs informe les courtiers de première ligne, qui sont ses clients, que les polices ne seront pas renouvelées à l’échéance et ce, sans mentionner que le cabinet a perdu sa qualité de courtier spécial.

[281]     Cette façon de faire de l’intimé constitue un manque d’intégrité, de transparence et d’honnêteté intellectuelle.

[282]     Quant à l’explication de l’intimé à l’effet qu’il faisait alors le « run off » des polices en cours, la plaignante mentionne que celle-ci ne tient pas.

[283]     En effet, si les courtiers avaient su dès le mois de mars 2000 qu’il n’y avait plus de courtier spécial autorisé à agir pour les assureurs étrangers, ils auraient pu annuler leur police à court terme, ce que tout courtier moyennement prudent aurait fait. Cela aurait créé une cascade de demandes de remboursements ce que l’intimé voulait manifestement éviter.

Argumentation de l’intimé

[284]     L’intimé explique qu’il a avisé ses mandants des difficultés que Souscripteurs vivait avec les assureurs étrangers afin que ceux-ci puissent prendre une décision éclairée quant à laisser leurs clients avec ces assureurs peu sûrs ou agir en courtiers consciencieux et remplacer ces assureurs par d’autres assureurs.

[285]     L’avis P-45 a été transmis indépendamment de la décision de Souscripteurs de cesser de souscrire à compter du 15 mars 2000. Selon l’intimé, il n’avait pas besoin d’être courtier spécial pour écrire cette lettre.

[286]     De plus, selon l’intimé, à compter du 15 mars 2000, il ne se faisait plus de souscription chez Souscripteurs car celle-ci était en mode de liquidation. Le retour de l’intimé chez Souscripteurs le 14 avril 2000 n’avait pour but que de fermer les livres et non de continuer les opérations.

Décision sur le chef 4

[287]     Le chef 4 reproche à l’intimé d’avoir fait défaut d’exécuter avec intégrité et transparence ses activités de courtier envers ses mandants en les informant que les polices en cours, souscrites auprès d’assureurs externes, ne seraient pas renouvelées à échéance, alors qu’il ne pouvait plus agir comme courtier spécial depuis le 15 mars 2000.

[288]     Dans le cadre de la preuve et des représentations des parties, il n’a pas été remis en question que ni l’intimé, ni personne chez Souscripteurs ne pouvait agir comme courtier spécial à compter du 15 mars 2000.

[289]     En effet, la lettre de France Lacelle du 28 mai 2000 confirme que le cautionnement visant à garantir les obligations des assureurs étrangers avec qui Souscripteurs transigeait n’a pas été renouvelé à compter de cette date.

[290]     L’intimé prétend qu’après le 15 mars 2000, ni lui ni Souscripteurs n’a agi comme courtier spécial, les activités se limitant alors à la transmission de l’avis P-45 et à procéder au « run off » des polices en cours.

[291]     Le Comité ne partage pas le point de vue de l’intimé et conclut plutôt qu’il a agi, personnellement ou par le biais du cabinet dont il était l’âme dirigeante, comme courtier spécial, et ce, postérieurement au 15 mars 2000.

[292]     À cet effet, le Comité réfère aux polices MTL-4762-00 (P-49, page 3), MTL-4778-00 (P-50 pages 3 et 5) et MTL-4766-00 (P-51 page 2) lesquels ont toutes été émises après le 15 mars 2000 et ce, pour des périodes débutant également après cette date.

[293]     Tel que le Comité a déjà conclu et malgré les représentations de l’intimé à l’effet contraire, celui-ci était l’âme dirigeante de Souscripteurs aux époques visées par ces polices.

[294]     Par ailleurs, même après la date à laquelle l’intimé prétend avoir repris les rênes de Souscripteurs, soit le 14 avril 2000, Souscripteurs a émis des avenants à certaines polices en cours. Ainsi, tel qu’il appert des avenants P-49 page 2 (MTL-4762-00), P-50 page 1 (MTL-4778-00) et P-51 page 4 (MTL-4766-00), Souscripteurs a modifié la proportion de risque assumé par les assureurs externes Liberty, Centennial et Excelsior dans ces contrats.

[295]     Manifestement, émettre des nouvelles polices et des avenants devant lier des assureurs externes constitue des actes réservés au courtier spécial.

[296]     L’intimé n’a pas agi avec intégrité et transparence en transmettant, le ou vers le 15 juin 2000, des avis mentionnant que les polices en cours ne seraient pas renouvelées tout en cachant qu’il ne pouvait lui-même agir à titre de courtier spécial.

[297]     Au contraire, l’intimé se devait d’aviser clairement et sans délai ses mandants que ni lui, ni personne à son cabinet, ne pouvait désormais agir comme courtier spécial afin de permettre à ceux-ci de prendre les dispositions appropriées pour la protection de leurs clients, tel que changer d’assureur ou faire affaires avec un autre courtier spécial.

[298]     L’intimé a fait preuve d’un manque de transparence, d’intégrité et d’honnêteté évidents en omettant de mentionner cet élément fondamental, d’autant plus que les obligations des assureurs étrangers se retrouvaient alors non cautionnées.

[299]      Qui plus est, ce manque de transparence, d’intégrité et d’honnêteté et d’autant plus évident lorsqu’on sait que Souscripteurs continuait d’empocher les primes dues pour les polices en cours et que l’intimé avec donc un intérêt évident à ne pas dévoiler son absence de statut de courtier spécial.

[300]     Le Comité déclare donc l’intimé coupable sous le chef 4 de la plainte.

Chef 5

[301]     Le chef 5 de la plainte se lit ainsi :

Le ou vers le 7 juin 2001, a fait défaut de placer les intérêts de ses clients avant les siens en permettant que soit accordé une requête pour ordonnance de séquestre contre le cabinet Les Souscripteurs de Montréal Inc. laissant les clients assurés énumérés au bilan statutaire de faillite sans indemnisation suite aux sinistres subis, le tout en contravention aux dispositions notamment à l'article 19 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

La preuve

[302]     Le 7 juin 2001, une ordonnance de séquestre a été rendue à l’égard de Souscripteurs. Cette ordonnance faisait suite à une requête présentée par Les Miroirs St-Antoine. Raymond Chabot Inc. a été nommée syndic de l’actif de la faillite par le tribunal compétent.

[303]     Le bilan assermenté et joint à l’avis de faillite et de la première assemblée des créanciers est signé par l’intimé. Ce bilan ne comporte aucune information quant au passif et à l’actif de Souscripteurs[94].

[304]     En date du 26 juin 2001, le syndic prépare une liste des créanciers de Souscripteurs, tel que déclaré par son administrateur, l’intimé[95].

[305]     En contre-interrogatoire, Mme Chauvin identifie Les Miroirs St-Antoine et Entreprises Sylvain Vanier dans le bilan statutaire comme étant, minimalement, des clients assurés qui se seraient retrouvés sans indemnisation suite à la faillite de l’intimé.

[306]     Le rapport du syndic aux créanciers a été produit le 10 juillet 2001[96]. Il appert de celui-ci qu’il y a pour 132 643,61$ de réclamations et qu’étant donné l’absence d’actifs il est alors peu probable que la réalisation puisse permettre le versement de dividendes aux créanciers non garantis. Par ailleurs, dans ce même rapport il est mentionné que l’intimé a préféré ne chiffrer aucune créance de Souscripteurs au bilan statutaire.

[307]     Il est à noter par ailleurs que, tel qu’il appert de la pièce P-109, le compte en fiducie de Souscripteurs a un solde de 189 167,77$ en date du 30 avril 2000. L’intimé déclare en contre-interrogatoire que cet argent, bien qu’appartenant à Souscripteurs comme bénéfices non répartis, a servi à payer des réclamations jusqu’au moment où celui-ci s’est tari.

Argumentation de la plaignante

[308]     La plaignante soumet qu’entre mars 2000 et juin 2001, Souscripteurs était en mode liquidation, tel que l’intimé l’a déclaré, et n’avait somme toute plus d’activités.

[309]     L’intimé a donc laissé Souscripteurs devenir insolvable en attendant que quelqu’un mette celle-ci en faillite, et ce, après avoir empoché les sommes détenues en fiducie à titre de bénéfices non répartis.

Argumentation de l’intimé

[310]     L’intimé soumet qu’au 7 juin 2001, les primes des assureurs gardées en fiducie étaient totalement épuisées.

[311]     Par ailleurs, selon l’intimé il est faux de prétendre que tous les assurés ont perdu leurs droits d’indemnisation tel que le mentionne le chef 5. Ainsi, ces clients ont conservé leurs droits de recours contre les assureurs. À cet effet, Souscripteurs n’était pas leur assureur, mais seulement le mandataire de l’assureur.

[312]     De plus, comme le fonds des assureurs était insuffisant pour honorer les réclamations des assurés, Souscripteurs a dû puiser dans ses bénéfices non répartis pour payer le plus de réclamations possibles et cela explique qu’en juin 2001 il ne restait plus de fonds disponibles.

[313]     Finalement, l’intimé fait remarquer que malgré que la plaignante a pu faire des recherches dans les documents de Souscripteurs en possession du syndic, elle n’a pu prouver que l’intimé se serait approprié des sommes, la faillite s’expliquant par le fait que suite à l’arrêt des opérations, les comptes de Souscripteurs étaient vides.

Décision sous le chef 5

[314]     L’article 19 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages se lit ainsi :

« Le représentant en assurance de dommage doit en tout temps placer les intérêts des assurés et ceux de tout client éventuel avant les siens ou ceux de toute autre personne ou institution ».

[315]     Dans le cas qui nous occupe, la plaignante reproche à l’intimé d’avoir permis que soit accordé une ordonnance de séquestre contre Souscripteurs lésant ainsi certains assurés.

[316]     À cet effet, la plaignante plaide que l’intimé a volontairement causé la faillite de Souscripteurs en vidant le compte en fiducie des assureurs et en empochant les sommes qui s’y trouvaient.

[317]     Le Comité, qui n’a pas eu connaissance de la requête en séquestre et du contexte entourant celle-ci, est d’avis que la preuve ne permet pas de conclure que l’intimé a « permis » qu’une ordonnance de séquestre soit prononcée contre Souscripteurs. De même, la preuve n’est pas non plus suffisante pour conclure que l’intimé a volontairement vidé le compte en fiducie des assureurs pour en empocher l’argent qu’il contient, vouant ainsi inexorablement Souscripteurs à la faillite.

[318]     L’explication donnée par l’intimé au syndic[97] est à l’effet que se sont les nombreuses poursuites déposées par des assurés suite au refus des assureurs de régler les réclamations qui ont causé l’insolvabilité de Souscripteurs. Cette explication est possible et en lien avec la preuve entendue, notamment celle selon laquelle l’intimé payait directement des réclamations à même le compte étant donné le refus des assureurs. La preuve administrée n’est pas de qualité suffisante pour écarter cette explication.

[319]     Il est pas ailleurs évident que la piètre collaboration de l’intimé à l’égard du syndic, en ne fournissant pas un état détaillé des créances et en ne répondant pas à ses interrogations à l’égard de chèques questionnables[98], a pu jeter un doute sur ses véritables intentions entourant la survenance de l’ordonnance pour séquestre, mais ces doutes ne peuvent équivaloir à certitude ou même à probabilité de manigance de sa part en vue de se favoriser au détriment des assurés.

[320]     En conséquence, le Comité acquitte l’intimé de l’accusation contenue au chef 5 de la plainte.

Chef 6

[321]     Le chef 6 reproche ce qui suit à l’intimé :

Entre 1995 et le 7 juin 2001, personnellement et à titre de représentant du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut de conserver pendant cinq ans les livres et registres comptables prescrits, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 8 de la Loi sur les Intermédiaires de marché, 107 et suivants du Règlement du Conseil des assurances de dommages sur les intermédiaires de marché en assurance de dommages et 60 (1) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec, l’article 13 du Règlement 10 du Bureau des services financiers sur la tenue et la conservation des livres et registres ainsi que de l’article 2 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

La preuve

[322]     Le 7 juin 2001, une ordonnance de séquestre a été rendue à l’égard de Souscripteurs. Raymond Chabot Inc. a été nommée syndic de l’actif de la faillite.

[323]     En date du 10 juillet 2001 un Rapport du syndic aux créanciers sur son administration préliminaire[99] a été préparé par le syndic.

[324]     Tel qu’il appert de ce rapport, le syndic a fait une demande de documents à l’intimé, qui est décrite, de même que le résultat de cette demande, comme suit dans ce rapport:

« Livres et dossiers

Le syndic a pris possession des livres et registres comptables de la débitrice. Cependant, de nombreux documents comptables sont manquants tels que, livre de minutes, états financiers 1995 à 2000, rapports d’impôts, auxiliaires comptables.

Une demande écrite a été faite à monsieur André Lacelle afin que ces documents nous soient remis dans les meilleurs délais. À ce jour, le syndic ne les a pas obtenus. »

[325]     L’intimé a témoigné en disant que lorsqu’il a eu la demande du syndic, il a tout complété et fait envoyer les documents par Me Fridhandler, son avocat. Il n’y a pas eu de suivi après, étant donné que Me Fridhandler lui avait dit qu’il s’en occuperait.

[326]     Par ailleurs, en contre-interrogatoire, l’intimé admet avoir récupéré les boîtes de faillite de Souscripteurs lors de sa libération mais il aurait immédiatement jeté celles-ci.

Argumentation de la plaignante

[327]     La plaignante soumet que le syndic de faillite a noté que les états financiers de l’entreprise de 1995 à 2000 sont manquants ainsi que de nombreux documents comptables et le livre des minutes. Il les a demandés à l’intimé qui ne lui a pas fait parvenir ceux-ci.

[328]     Par ailleurs, selon la plaignante, la défense de l’intimé repose sur son témoignage à l’effet qu’il avait tout remis à son avocat sans vérifier si celui-ci a fait parvenir la documentation à qui de droit. Or, Me Fridhandler est décédé avant les audiences de la plainte dont est saisi le présent Comité, ce qui rend cette explication bien commode. Cependant, la plaignante fait remarquer que l’intimé a produit le témoignage rendu par Me Fridhandler lors de sa comparution devant le Comité Doss[100] et, lors de son témoignage, celui-ci n’a jamais témoigné sur cette question.

[329]     La plaignante termine en faisant remarquer qu’un professionnel ne peut se retrancher derrière son avocat pour éluder sa responsabilité déontologique. Il y a donc manquement au devoir de conservation ce qui est, pour la plaignante, admis par l’intimé.

Argumentation de l’intimé

[330]     L’intimé argumente que lors de la prise de possession par le syndic de tous les inventaires de Souscripteurs, il y avait à l’intérieur de ces inventaires une cassette informatique contenant tous les registres comptables. La cassette informatique semble ne pas avoir fait partie de l’inventaire pris par le syndic en l’absence de l’intimé. Or, l’intimé ne peut être responsable des registres pendant la période de séquestre.

Décision sur le chef 6

[331]     Le chef 6 repose sur diverses dispositions légales et règlementaires qu’il convient de reproduire.

[332]     À cet effet, l’article 8 de la Loi sur les intermédiaires de marché énonce ce qui suit :

«8.  L’intermédiaire de marché en assurance doit remplir les conditions établies par règlement du conseil qui régit l’activité qu’il entend exercer pour avoir droit au certificat l’autorisant à agir à ce titre.

L’intermédiaire de marché en assurance doit en outre se conformer aux dispositions de la présente loi et des règlements pris sous son autorité pour exercer ses activités ».

[333]     Par ailleurs, les articles 107, 108 et 116 du Règlement du Conseil des assurances de dommages sur les intermédiaires de marché en assurance de dommages se lisent comme suit :

«107.  Un intermédiaire de marché en assurance de dommages doit garder et tenir à jour à son établissement au Québec, dans le cas d’une personne physique, ou à son siège social ou à son principal établissement ou, dans le cas où celui-ci est situé à l’extérieur du Québec, à son principal établissement au Québec, dans le cas d’un cabinet, les livres et registres suivants :

1° des livres et registres comptables nécessaires pour l’inscription des transactions qu’il effectue dans le cadre de ses activités d’intermédiaire de marché en assurance de dommages;

2° un registre des commissions;

3 ° un registre de partage des commissions.

Un intermédiaire de marché en assurance de dommages peut, pour la tenue de ses livres et registres, utiliser l’informatique ou toute autre technique de traitement de données, pourvu qu’il prenne les mesures raisonnables pour en empêcher la perte ou la destruction ou pour empêcher la falsification des écritures.

Les livres et registres qui doivent être tenus en vertu du présent chapitre peuvent être regroupés dans un seul registre en autant que toutes les informations requises y soient consignées. 

108. Les livres et registres comptables doivent être intégrés dans un système de comptabilité établi selon les principes comptables généralement reconnus.

Les livres et registres comptables doivent contenir la comptabilité de toutes les sommes perçues ou reçues pour le compte d’autrui déposées dans un compte séparé. 

116. Un intermédiaire de marché en assurance de dommages doit conserver pour une période de 5 ans à compter de leur fermeture, les livres et registres ainsi que les pièces justificatives ayant servi à les constituer» (Nos soulignements).

[334]     Pour sa part, l’article 60(1) du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec se lit comme suit :

« Un sociétaire doit se soumettre à la loi et aux règlements adoptés en vertu de cette loi ».

[335]     L’article 13 du Règlement sur la tenue et la conservation des livres et registres (n° 10) énonce :

« 13. Tout cabinet, représentant autonome ou société autonome doit conserver les livres et registres prévus au règlement et ceux prévus au Règlement sur les obligations des cabinets, représentants autonomes et sociétés autonomes, pour une période de cinq ans à compter de leur fermeture, et dans le cas des informations relatives aux dossiers clients, de la fermeture du dossier du client ainsi que les pièces justificatives ayant servi à les constituer ».

[336]     Par ailleurs, l’article 1 de ce règlement stipule ce qui suit :

« 1. Tout cabinet garde et tient à jour à un établissement au Québec, et un représentant autonome ou une société autonome à un endroit qui lui tient lieu d’établissement au Québec, les livres et registres suivants :

1° des livres et d’autres registres comptables nécessaires pour l’inscription des transactions qu’il effectue dans le cadre de ses activités;

2° dans le cas où ceux-ci reçoivent et perçoivent des sommes pour le compte d’autrui, un registre relatif au compte séparé » (Notre soulignement).

[337]     Finalement, l’article 2 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages prévoit :

« 2. Le représentant en assurance de dommages doit s’assurer que lui-même, ses mandataires et ses employés respectent les dispositions de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (1998, c. 37) et celles de ses règlements d’application ».

[338]     Il appert de ces dispositions que certains livres et registres devaient être conservés au siège social ou principal établissement de Souscripteurs. Or qu’en est-il ?

[339]     De la preuve qui lui a été présentée, le Comité retient que dans le cadre de l’ordonnance de séquestre émise à l’endroit de Souscripteurs, le syndic s’est rendu au siège social de celle-ci et a pris possession notamment, de livres et registres comptables du cabinet. Cependant, ceux-ci étant incomplets, le syndic a demandé à l’intimé de lui faire parvenir certains documents comptables, dont les états financiers de 1995 à 2000 et les auxiliaires comptables[101].

[340]     Le syndic n’a pas reçu lesdits documents en date de son rapport, soit le 10 juillet 2001.

[341]     L’intimé ne nie pas que le syndic n’ait pas reçu les documents demandés malgré sa demande. Cependant, selon l’intimé, il aurait donné ceux-ci à son avocat, Me Fridhandler, pour qu’il les transmette au syndic.

[342]     D’un autre côté, l’intimé prétend également qu’il n’était pas présent lorsque le syndic a fait l’inventaire des biens dont il a pris possession et donc qu’il ne peut être responsable si le syndic n’a pas répertorié la disquette où, selon lui, toutes les informations comptables demandées étaient gardées.

[343]     Le Comité considère que la preuve de la plaignante doit être retenue et, à cet égard, il conclut que l’intimé a fait défaut de conserver pendant cinq ans les livres et registres comptables prescrits par la loi et la réglementation applicables.

[344]     Ainsi, le Comité ne prête aucune crédibilité aux explications de l’intimé.

[345]     À cet égard, celui-ci allègue avoir remis la documentation à son avocat pour qu’il la fasse suivre au syndic. Il laisse donc entendre qu’il avait en sa possession cette documentation au moment de la demande du syndic, qu’il l’a transmise, non pas au syndic directement, ce qui aurait réglé la question, mais à son avocat pour que celui-ci la fasse parvenir au syndic. Il laisse donc entendre que l’information demandée ne s’est pas rendue au syndic en raison de négligence de son avocat, et ce, même si lui-même n’a fait aucun suivi auprès de celui-ci.

[346]     Or, même si cette explication devait être retenue, cela ne change rien au fait qu’il se devait de conserver cette documentation au siège social ou à l’établissement de Souscripteurs. En faisant fi de cette obligation, l’intimé ne peut, par la suite, se retrancher derrière son avocat pour éluder sa responsabilité et ses devoirs professionnels.

[347]     Par ailleurs, il est à noter que lorsque Me Fridhandler a témoigné devant le Comité Doss, il n’a jamais mentionné avoir reçu ces documents de l’intimé et d’avoir omis, ou non, de les transmettre au syndic[102] faisant en sorte que cette explication est peu crédible.

[348]     En outre, en argumentation, l’intimé laisse entendre, de façon totalement contradictoire avec ce qui précède, que les informations demandées par le syndic étaient sur une disquette laquelle était demeurée au siège social de Souscripteurs. À cet égard, il suggère que le syndic aurait eu accès à celle-ci mais qu’il a fait défaut de le noter à l’inventaire.

[349]     Cette explication, suppose donc contrairement à la précédente, que les informations demandées étaient restées chez Souscripteurs. À cet effet, pourquoi alors ne pas en informer le syndic lorsque celui-ci lui demande de lui faire parvenir celles-ci ? De plus, que faire avec l’explication impliquant son avocat : que lui a-t-il donné pour transmettre au syndic si la disquette avec les informations requises se trouvait toujours chez Souscripteurs ?

[350]     Ces explications de l’intimé n’étant pas crédibles, la preuve prépondérante révèle, notamment par le biais du rapport P-47, que les livres et registres prescrits par la réglementation et la loi n’étaient pas conservés par l’intimé au siège social ou principal établissement de Souscripteurs. De même, la preuve révèle que l’intimé a fait défaut de remédier à cette situation en ne transmettant pas au syndic l’information comptable manquante.

[351]     En conséquence le Comité conclut que l’intimé doit être reconnu coupable sous le chef 6 de la plainte.

Chef 7

[352]     Le chef 7 de la plainte reproche ce qui suit à l’intimé :

Entre 1995 et le 30 septembre 1999, a fait défaut de s'assurer de respecter la Loi sur les Intermédiaires de marché et les règlements pris sous son autorité en permettant que le cabinet d'assurance Les Souscripteurs de Montréal agisse comme courtier spécial alors qu'il ne plaçait pas au moins 80% des risques qui lui étaient confiés auprès d'assureurs titulaires de permis au Canada, le dit cabinet agissant comme "grossiste" seulement, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 8 de la Loi sur les Intermédiaires de marché, 51(2) du Règlement du Conseil des assurances de dommages sur les intermédiaires de marché en assurance de dommages, et 60 (1) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec.

La preuve

[353]     L’article 51(2) du Règlement du Conseil des assurances de dommages sur les intermédiaires de marché en assurance de dommages[103](le « Règlement du CAD ») se lit ainsi :

« 51. Un courtier spécial doit :

2° placer, durant une même année civile, au moins 80% des risques qui lui sont confiés par une personne physique, une société ou une personne morale ayant son domicile, son principal établissement ou son siège social au Québec, tant en nombre de risques qu’en valeur de primes, auprès d’assureurs titulaires de permis au Canada. »

[354]     Souscripteurs a obtenu le certificat pour agir à titre de courtier spécial le 7 septembre 1994.

[355]     L’intimé a produit au Conseil des assurances de dommages l’affidavit requis annuellement par celui-ci pour les activités de courtier spécial de Souscripteurs, les affidavits des années 1995, 1996, 1997 et 1999 ayant été produits comme pièce P-48A.

[356]     Le texte de ces affidavits se lit comme suit :

« Je, André Lacelle affirme solennellement à titre de responsable des opérations au Québec représentant le cabinet Souscripteurs de Montréal inc. auprès du Conseil des assurances de dommages, que ledit cabinet, titulaire d’un certificat de courtier spécial, place, durant une même année civile, au moins 80% des risques qui lui sont confiés par une personne physique, une société ou une personne morale ayant son domicile, son principal établissement ou son siège social au Québec, tant en nombre de risques qu’en valeur de primes, auprès d’assureurs titulaires de permis au Québec. »

[357]     Souscripteurs faisait affaire uniquement avec des assureurs non licenciés au Canada et il n’est donc pas contesté qu’il ne plaçait pas au moins 80% des risques auprès d’assureurs titulaires de permis au Canada. Au contraire, 100% des risques étaient placés auprès d’assureurs non licenciés au Canada.

[358]     Cependant, à cette époque et, à tout le moins jusqu’au transfert à sa fille, le 16 février 1999 pour la somme de un dollar[104], l’intimé opérait également un cabinet du nom de D. Loyer, lequel plaçait tous ses risques auprès d’assureurs licenciés au Québec.

[359]     Selon le témoignage de Mme Chauvin, l’intimé aurait calculé le 80% en jumelant le volume de Souscripteurs à celui de D. Loyer.

[360]     En contre-interrogatoire, Mme Chauvin dit ne pas savoir si des vérifications ont été faites dans le passé par le Conseil des assurances de dommage concernant la conformité de Souscripteurs à la réglementation.

[361]     Dans son témoignage, l’intimé déclare que le certificat de courtier spécial a été émis par le Conseil des assurances de dommages. Lors de la demande, l’intimé aurait déclaré les activités de Souscripteurs et de D. Loyer, soit des activités d’assurances générales avec des assureurs licenciés et des activités avec des assureurs non licenciés.

[362]     Selon lui, Souscripteurs et D. Loyer formaient un tout. L’intimé connaissait la règle du 80% prévue à la réglementation. C’est ainsi que lorsqu’il a demandé le certificat pour agir comme courtier spécial, il a indiqué le volume des deux cabinets bien que seul Souscripteurs avait besoin du certificat. À cet effet, l’intimé a déclaré que les deux cabinets opéraient ensemble.

[363]     Cependant, l’intimé admet que les deux cabinets étaient deux corporations distinctes.

[364]     Finalement, en contre-interrogatoire l’intimé déclare que ce qui est mentionné aux affidavits produits comme pièce P-48A est vrai.

Argumentation de la plaignante

[365]     La plaignante note que l’intimé plaide confusion des patrimoines entre Souscripteurs et D. Loyer pour éviter l’obligation prévue par l’article 51(2) du Règlement du CAD de placer dans l’année civile au moins 80% des risques à du marché régulier. Or, selon la plaignante, le règlement ne permet pas d’additionner les volumes des deux cabinets.

[366]     Quant à la question de tolérance du Conseil des assurances de dommages, la plaignante soumet que celle-ci n’avait pas le pouvoir de déroger à sa propre réglementation ou de permettre à l’intimé d’y déroger.

[367]     Pour terminer, la plaignante note que les affidavits ne réfèrent pas à D. Loyer et dans ce cas, toute prétention de tolérance est fantaisiste.

Argumentation de l’intimé

[368]     Selon l’intimé, Souscripteurs possédait un permis de courtier spécial depuis 1993. Ce permis aurait été émis avec la compréhension que l’intimé opérait deux bureaux de courtage, un de détail, D. Loyer, et l’autre comme grossiste, soit Souscripteurs.

[369]     Lors de l’émission du premier permis de courtier spécial, les deux opérations sous un propriétaire unique rencontraient les exigences du placement de 80% des affaires par l’entremise d’assureurs licenciés.

[370]     C’est pour cette raison, selon l’intimé, que le Conseil des assurances de dommages a émis le permis de courtier spécial à l’origine, lequel aurait été renouvelé par la suite avec les mêmes informations.

Décision sur le chef 7

[371]     Le Règlement de la CAD prévoit que pour chaque année civile, un courtier spécial doit placer 80% des risques qui lui sont confiés auprès d’assureurs titulaires de permis au Canada.

[372]     La preuve ne contient aucune contradiction quant au fait que Souscripteurs seul, ne rencontre pas cette norme, celle-ci plaçant 100% de ses risques auprès d’assureurs non licenciés au Canada.

[373]     La défense de l’intimé est que le 80% doit se calculer en combinant les opérations de D. Loyer avec celle de Souscripteurs.

[374]     Selon lui, il aurait dénoncé dès l’émission du permis de courtier spécial de Souscripteurs cette prétention de sa part et, le permis ayant été renouvelé d’année en année, avec la même information, cela confirmerait que son interprétation du règlement est la bonne.

[375]     Le Comité ne retient pas les arguments de l’intimé à cet égard et conclu qu’il doit être reconnu coupable sous le chef 7 de la plainte.

[376]     En effet, le règlement ne souffre d’aucune ambiguïté.

[377]     Le courtier spécial doit, lui-même, placer 80% des risques qu’on lui confie auprès d’assureurs licenciés au Canada.

[378]     Dans notre affaire, le courtier spécial est Souscripteurs. D. Loyer n’agit pas comme courtier spécial et est une corporation distincte de Souscripteurs, peu importe les liens qui puissent exister entre ces deux entités légales.

[379]     En fait, l’intimé plaide une exception, soit lorsqu’il y a deux ou plusieurs entités liées, qui n’existe tout simplement pas dans la réglementation.

[380]     Par ailleurs, quant au fait que le Conseil des assurances de dommages aurait émis le permis de courtier spécial en considérant les opérations de Souscripteurs et de D. Loyer comme une seule entreprise, le Comité ne retient pas cette prétention de l’intimé.

[381]     D’une part, le Conseil des assurances de dommages ne pouvait déroger à sa propre réglementation ou permettre à l’intimé qu’il déroge à celle-ci.

[382]     D’autre part, les quatre (4) affidavits souscrits par l’intimé lui-même ne mentionnent aucunement l’existence de D. Loyer dans le calcul du 80%. Au contraire, dans ces affidavits, l’intimé déclare solennellement que Souscripteurs, « titulaire d’un certificat de courtier spécial, place, durant une même année civile, au moins 80% des risques qui lui sont confiés par une personne physique, une société ou une personne morale ayant son domicile, son principal établissement ou son siège social au Québec, tant en nombre de risques qu’en valeur de primes, auprès d’assureurs titulaires de permis au Québec ».

[383]     Manifestement, cette déclaration est fausse et l’intimé devait la savoir fausse. S’il avait agi avec transparence en déclarant que D. Loyer devait être compté dans le calcul de la norme du 80% pour obtenir le certificat initial de courtier spécial, pourquoi passer sous silence cet élément primordial dans quatre (4) affidavits postérieurs requis pour maintenir ce certificat ?

[384]     Dans les circonstances, l’argument de l’intimé lié à l’interprétation qu’aurait donné le Conseil des assurances de dommages à l’égard de sa situation ou celle de Souscripteurs est sans mérite.

Chef 8

[385]     Le chef 8 de la plainte se lit ainsi :

Entre 1995 et le 30 septembre 1999, a fait défaut de s'assurer de respecter la Loi sur les Intermédiaires de marché et les règlements pris sous son autorité en permettant que le cabinet d'assurance Les Souscripteurs de Montréal élude son obligation de soumettre le risque à au moins trois assureurs titulaires de permis au Québec avant de se prévaloir de son certificat de courtier spécial, se retranchant derrière le fait qu'il agissait comme "grossiste" et que ce travail était exécuté par le courtier de première ligne, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 8 de la Loi sur les Intermédiaires de marché, 51(1) du Règlement du Conseil des assurances de dommages sur les intermédiaires de marché en assurance de dommages et 60(1) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

La preuve

[386]     L’article 51(1) du Règlement du CAD énonce:

« 51. Un courtier spécial doit :

1° offrir un risque à au moins 3 assureurs titulaires de permis au Québec avant de se prévaloir de son certificat. »

[387]     Dans le cadre de cette obligation, le règlement prévoit à l’article 50 (1) que le courtier spécial doit transmettre au Conseil des assurances de dommages, à chaque mois, « une copie de toutes les déclarations signées par les assurés conformément à l’annexe I ».

[388]     Cette déclaration prévue à l’annexe I du règlement s’intitule « Déclaration faite par l’assuré au courtier spécial agissant auprès d’un assureur non titulaire de permis au Québec ».

[389]     Dans la déclaration, on retrouve des éléments à être complétés avant que celle-ci ne soit signée par l’assuré. Ainsi, il faut identifier trois (3) assureurs titulaires d’un permis au Québec qui ont été approchés et ont refusé d’accorder l’assurance demandée.

[390]     Selon la preuve, et notamment le témoignage de l’intimé, les courtiers de première ligne approchaient Souscripteurs pour placer le risque de leurs assurés auprès d’assureurs non licenciés au Québec.

[391]     Quant à l’annexe I, celle-ci était entièrement complétée par le courtier de première ligne[105].

[392]     Souscripteurs ne faisait aucune vérification sur les informations contenues à l’annexe et recueillies par le courtier de première ligne et n’avait aucun contact entre Souscripteurs et l’assuré.

Argumentation de la plaignante

[393]     Selon la plaignante, la preuve est claire que Souscripteurs agissait comme grossiste, qu’il n’œuvrait pas comme courtier de première ligne et qu’il ne soumettait pas à trois assureurs locaux le risque avant de le soumettre à un assureur étranger.

[394]     Pour la plaignante, en agissant de la sorte, l’intimé ne respectait pas les obligations liées à son certificat de courtier spécial. Notamment, alors que l’article 32 (2) du Règlement du CAD prévoit que le courtier spécial doit être autorisé à vendre les produits d’au moins 3 assureurs de dommages titulaires de permis au Québec, l’intimé n’était autorisé à vendre les produits d’aucun tel assureur.

Argumentation de l’intimé

[395]     Pour l’intimé, il est faux de prétendre que Souscripteurs a éludé son obligation de soumettre le risque à au moins trois assureurs titulaires de permis au Québec.

[396]     En effet, le courtier de première ligne a rempli cette obligation.

[397]     À cet effet, l’intimé réfère à l’affaire Laurent Giguère c. Comité de surveillance de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec et Comité de discipline de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec[106] qui, pour lui, supporte sa prétention.

Décision sur le chef 8

[398]     La preuve est claire à l’effet que Souscripteurs ne soumettait pas, elle-même, le risque à au moins trois assureurs titulaires de permis au Québec avant de se prévaloir de son certificat de courtier spécial.

[399]     Au contraire, ce travail était effectué par le courtier de première ligne, Souscripteurs ne faisant pas affaire avec des assureurs titulaires de permis au Québec.

[400]     Selon le Comité, en agissant ainsi, Souscripteurs n’a pas respecté le Règlement du CAD et doit donc être reconnu coupable sous le chef 8 de la plainte.

[401]     En effet, le Règlement du CAD prévoit en son article 51(1) que le courtier spécial doit « offrir un risque à au moins 3 assureurs titulaires de permis au Québec avant de se prévaloir de son certificat ».

[402]     Cette obligation s’adresse personnellement au courtier spécial et, pour le Comité, celui-ci ne peut se fier ou confier cette responsabilité à un tiers, sur lequel il n’a aucun contrôle.

[403]     D’ailleurs, cet article doit se lire avec l’article 32(2) du règlement qui énonce que le courtier spécial doit lui-même être autorisé à offrir et vendre les produits d’au moins trois assureurs de dommages titulaires de permis au Québec.

[404]     L’obligation pour le courtier spécial d’être autorisé à offrir et vendre les produits d’au moins trois assureurs détenant un permis au Québec jumelée avec celle d’offrir  un risque à au moins trois tels assureurs avant de se prévaloir de son certificat est facilement compréhensible dans la mesure où le recours à un assureur non licencié au Québec doit constituer une avenue d’ultime ressort pour l’assuré. Il en va de sa protection.

[405]     Le Comité ne croit donc pas que l’intimé a respecté les obligations que la réglementation lui impose à titre de courtier spécial. En se rabattant sur le courtier de première ligne pour satisfaire aux exigences crées par la réglementation, l’intimé a éludé son obligation de soumettre le risque à au mois trois assureurs détenant un permis au Québec.

[406]     À cet égard, la décision rendue dans l’affaire Giguère citée par l’intimé n’a pas de pertinence en l’espèce. En effet, la question découlant de cette affaire est différente de la nôtre. Ainsi, dans le cas Giguère, celui-ci avait été reconnu coupable d’avoir émis une police d’assurance pour son assuré auprès d’assureurs non titulaires d’un permis au Québec alors qu’il ne détenait pas de certificat de courtier spécial. La Cour du Québec a renversé le jugement de culpabilité du comité de discipline au motif que cette police avait été émise par un courtier spécial, en l’occurrence, Les Souscripteurs de Montréal.  Dans le cadre de la plainte dont le Comité est saisi, l’intimé n’est pas accusé d’avoir agi sans détenir de certificat de courtier spécial mais plutôt de ne pas avoir respecté ses obligations comme courtier spécial.

Chef 10

[407]     Le chef 10 de la plainte reproche à l’intimé :

A négligé ses devoirs professionnels et a fait défaut de placer les intérêts des assurés avant les siens dans les dossiers des assurés suivants:

 

-    Le ou vers le 17 mars 2000, assuré 2953-3502 Québec Inc. police MTL-476-00;

                   -     Le ou vers le 31 mars 2000, assuré Denis Poirier police MTL-4778-00;

          -     Le  ou vers le 30 mars 2000, assuré Sablage et Peinture Thetford Inc. police

               MTL-4766-00 ;

en faisant défaut d'informer ces clients qu'au moins un des assureurs externes avec qui elle  avait souscrit leur police d'assurance a savoir la Liberty Insurance Company A.V.V. du Panama refusait d'honorer une importante réclamation faite à l'automne 1999 et n'avait en fait jamais payée quelque réclamation que ce soit et ce depuis le début de leurs relations d'affaires soit le 25 octobre 1997 ce qui pouvait sensiblement dénaturer la garantie fournie à ces clients, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 9,19, 25 et 26 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

La preuve

[408]     La preuve a révélé que Mme France Lacelle avait été autorisée à agir comme courtier spécial pour Souscripteurs pour la période du 1er octobre 1999 au 15 mars 2000. Cette autorisation n’a pas été renouvelée[107]

[409]     À cet effet, il a reconnu en contre-interrogatoire qu’il savait que depuis le 1er octobre 1999, ce n’est plus le cabinet qui a le statut de courtier spécial mais bien l’individu.

[410]     Il a également reconnu que, lorsqu’il est « revenu » chez Souscripteurs, lui-même et personne d’autre chez Souscripteurs n’avaient l’autorisation d’agir à titre de courtier spécial.

[411]     Par ailleurs, le 17 mars 2000, une police, soit la police MTL-4762-00, est émise au courtier Felix Franciscaut Inc. pour l’assuré 2953-3502 Québec Inc., et ce, pour la période allant du 17 mars 2000 au 17 mars 2001[108]. Cette police prévoit que la participation des assureurs étrangers est de 33% pour Liberty, 33% pour Gulf et 34% pour Excelsior.

[412]     Le 27 avril 2000, Souscripteurs émet un avenant à ladite police par lequel la participation de chacun des assureurs étrangers visés par celle-ci est modifiée. Ainsi, la participation de Liberty et de Excelsior passe à 50% alors que celle de Centennial devient nulle[109].

[413]     Le même phénomène survient dans le cadre des assurés de Felix Franciscaut inc., soit Denis Poirier (police MTL-4778) et  Sablage et peinture Thetford Inc. (police MTL-4766-00).

[414]     Dans le cas Poirier, la police est émise le 31 mars 2000 et l’avenant le 25 avril 2000[110] alors que dans l’autre cas, la police est émise le 30 mars 2000 et l’avenant le 25 avril 2000[111]. Dans tous ces cas, des primes sont remises à Souscripteurs par Franciscaut.

[415]     En contre-interrogatoire, l’intimé a prétendu qu’il ne savait pas que des polices avaient été émises sans permis de courtier spécial.

[416]     Par ailleurs, selon l’intimé, faire des avenants ne constitue pas une activité de courtier spécial.

[417]     Par ailleurs, la preuve a révélé qu’à cette époque, Souscripteurs vivait des difficultés avec les assureurs étrangers, notamment Liberty, au point tel que l’intimé a écrit à chacun des courtiers avec qui il faisait affaire pour les informer que Souscripteurs n’émettrait plus de nouvelles polices auprès de ces assureurs. Cet avis a été transmis à la mi-juin 2000 et le texte se lit notamment comme suit :

« tous les contrats d’assurance souscrits pour le compte des assureurs étrangers par l’entremise de Les Souscripteurs de Montréal ne seront pas renouvelés à leurs échéances.

La raison pour laquelle nous avons cessé de souscrire est dûe au fait que nous éprouvons beaucoup de difficulté à obtenir le paiement des réclamations en cours de la part des assureurs étrangers depuis quelque temps.

Si vous décidez de faire annuler les contrats existants en court de terme, sur réception d’une demande de votre client ou du retour du contrat d’assurance, nous ferons émettre un avis d’annulation et procéderons (sic) à la demande de crédit auprès des assureurs. Aussitôt ces crédits reçus (sic) des assureurs nous vous les ferons parvenir ».[112]

[418]     Cependant, la preuve a révélé que depuis au moins la fin de 1999 ou le début de l’an 2000, Souscripteurs avait cessé de transmettre des primes aux assureurs étrangers, au motif que ces derniers ne payaient pas leurs réclamations.

[419]     À cet effet, dans le cadre d’une déclaration adressée à Mme Carole Chauvin du 26 janvier 2001, l’intimé tient les propos suivants[113] :

«8. Les Souscripteurs de Montréal Inc. ont cessé de produire des nouvelles affaires ainsi que de percevoir des primes pour ces assureurs en mars 2000.

(…)

12.  Lorsque nous nous sommes aperçus (sic) que les fonds détenus en fidéicommis pour le compte des assureurs étaient épuisés et que malgré des demandes répétées aux assureurs de nous faire parvenir des fonds additionnels pour rencontrer leurs obligations, même après plusieurs promesses de recevoir ces fonds, ceux-ci ne nous ont jamais expédiés. C’est pour cette raison que nous avons dû cesser de payer des réclamations pour le compte des assureurs. 

(…)

14. Ayant cessé depuis mars 2000 de souscrire n’ayant plus de personnel et aussi depuis août 2000 Les Souscripteurs de Montréal Inc. a reçu de la part de Liberty Insurance Company A.V.V. une lettre « cease and desist » nous intimant de ne plus les représenter nous n’avions d’autre choix que de cesser de donner le service sur les dossiers en cours. 

(…)

En novembre 1999 pour la première fois une demande a été faite à ces assureurs étrangers de payer directement une réclamation plus importante conformément à notre mandat de gestion afin de ne pas utiliser le fond en fidéicommis, lequel était utilisé pour payer les petites réclamations. »

[420]     Dans une lettre du 13 décembre 2001 au Fonds d’indemnisation des Services financiers l’intimé s’exprime notamment comme suit[114] :

« Après quelque temps, nous avons été obligés de retenir les fonds que nous faisions parvenir régulièrement, puis par la suite nous avons été obligés de cesser de souscrire et durant toute cette période nous avons continué d’honorer les réclamations régulières jusqu’à épuisement des fonds »

[421]     Dans une seconde lettre datée du 13 décembre 2001 au Fonds, l’intimé poursuit[115] :

« … en novembre 1999 nous avons commencé à faire des demandes à l’assureur de paiements de réclamations dans le cas de réclamations majeures, étant donné que les fonds que nous possédions nous permettaient de régler les réclamations courantes mais non de régler des réclamations majeures. Ce n’est qu’en avril 2000 que les promesses de convertir les lettres de garanties de l’assureur en argent liquide ne se sont pas matérialisées et que nous avons dû prendre la décision de ne plus souscrire de contrats d’assurance, tout en continuant de s’occuper des réclamations régulières jusqu’à l’extinction des fonds. En juin 2000, nous avons de plus avisé tous les courtiers de première ligne de la difficulté que nous éprouvions des assureurs à obtenir le paiement des réclamations et de s’occuper de leurs assurés existants afin de remplacer les contrats d’assurance en vigueur.» (Notre soulignement)

[422]     Par ailleurs, dans une lettre du 26 juin 2001 au Fonds d’indemnisation des services financiers, l’intimé déclare[116] :

« Suite à nos demandes de paiements dans un autre dossier de réclamation en fin d’année 1999 et début de l’an 2000, il était devenu plausible de ne pas être en mesure de recevoir les chèques de réclamations que nous avons demandés et avons à ce moment cessé d’écrire des contrats d’assurance (sic) en mars 2000, tout en gardant toutes les primes perçues pour le compte des assureurs dans le compte de banque des assureurs et en cessant de faire des remises aux assureurs tant et aussi longtemps que nous ne recevions pas les chèques de réclamations demandés. » (Notre soulignement)

[423]     Cette dernière affirmation est également faite par France Lacelle qui, dans une lettre du 28 mai 2000 au BSF, indique que: « Les Souscripteurs de Montréal ont cessé de faire des affaires d’assurance avec des marchés non licenciés et ce depuis le mois de mars 2000. »[117]

[424]     Quant au fait que les assureurs Gulf, Excelsior et Liberty cessent tous en même temps d’honorer les réclamations, l’intimé explique, en contre-interrogatoire, que dans le cas de Gulf, le correspondant est décédé sans relève. Dans le cas de Excelsior, il est disparu et dans le cas de Liberty, il n’honorait pas ses réclamations malgré ses promesses.

[425]     Questionné par le procureur de la plaignante, l’intimé déclare qu’au mois d’avril 2000, au moment de son « retour » chez Souscripteurs, celle-ci n’a plus d’argent dans le compte en fiducie. Cependant, il modifie son témoignage lorsque confronté à la pièce P-109 qui démontre qu’en date du 30 avril ce compte a un solde de 189 167.77$.

[426]     Finalement, le 28 août 2000, Liberty transmet à l’intimé une lettre lui enjoignant de cesser d’émettre des polices en son nom[118].

Argumentation de la plaignante

[427]     Selon la plaignante, Souscripteurs a émis des polices alors que personne ne détenait d’autorisation d’agir à titre de courtier spécial chez Souscripteurs. Or, l’intimé a permis que de telles polices soient émises sachant que Souscripteurs ne pouvait agir ainsi.

[428]     Par ailleurs, la plaignante souligne que ces polices ont été émises alors que l’intimé savait que les assureurs étrangers ne payaient pas les réclamations et n’avaient, de fait, jamais déboursé quoi que se soit à même leur argent propre.

Argumentation de l’intimé

[429]     Selon l’intimé, au moment de l’émission de ces trois polices, en mars 2000, Souscripteurs n’avait pas la certitude que Liberty n’honorerait pas ses réclamations. À cette époque, il n’y aurait pas eu de refus de payer mais plutôt des promesses qui n’ont pas été respectées. Par ailleurs, selon l’intimé il est faux de prétendre que Liberty n’avait jamais payé de réclamations. Celles-ci étaient payées, telle qu’en fait foi la pièce P-86, par Souscripteurs pour le compte de Liberty.

[430]     Par ailleurs, selon l’intimé, celui-ci n’était pas aux commandes de Souscripteurs avant le 14 avril 2000, date de transfert de l’entreprise par France Lacelle pour un dollar, selon la pièce D-10. Or, à l’arrivée de l’intimé, il ne se faisait plus de souscriptions de risques chez Souscripteurs.

[431]     Finalement, l’intimé réfère à la pièce P-67 pour une description des opérations de Souscripteurs.

Décision sur le chef 10

[432]     Pour le Comité, l’intimé doit être reconnu coupable de ce chef.

[433]     En effet, l’intimé ne s’est pas acquitté de ses devoirs de représentant en assurance de dommages avec intégrité, il n’a pas placé les intérêts de ses clients avant les siens et il n’a certes pas agi avec transparence.

[434]     Tout d’abord et pour les motifs déjà exprimés, le Comité croit que l’intimé a toujours été l’âme dirigeante de Souscripteurs et ce, malgré sa tentative de camoufler ce fait par des soi-disant transactions par lesquelles le contrôle passait de l’intimé à France Lacelle, et vice-versa, par le versement de la somme d’un dollar.

[435]     Conséquemment, l’intimé ne pouvait ignorer que lors de l’émission des trois polices, personne chez Souscripteurs ne détenait le statut de courtier spécial et donc que ces polices n’auraient pas dû être émises.

[436]     Par ailleurs, il en est de même pour les avenants. Le Comité ne  partage pas les vues de l’intimé à l’effet que des modifications de proportions d’assureurs étrangers dans le cadre d’une police d’assurance ne constituent que de la régie interne ne nécessitant pas d’avoir le statut de courtier spécial pour agir de la sorte.

[437]     De plus, l’intimé vivait des difficultés importantes avec les assureurs étrangers, au point tel qu’il a décidé de garder l’ensemble des primes perçues au lieu de transmettre leur part à ceux-ci et de cesser par la suite toute souscription. L’intimé n’a pas agi avec intégrité et transparence en cachant ces faits à son client Franciscaut. Celui-ci aurait pu vouloir faire affaire avec un autre courtier spécial ou avec d’autres assureurs étrangers s’il avait été mis au courant que toute future réclamation de ses assurés ne serait probablement pas payée. La seule personne qui a bénéficié de la situation est l’intimé qui a empoché les primes et ses commissions en émettant les polices.

[438]     Il est à noter en terminant que le Comité attache peu de crédibilité aux explications de l’intimé. Cette conclusion découle notamment des différentes versions données par celui-ci et qui sont reflétées de façon éloquentes dans les déclarations et lettres de celui-ci de même que lors de son contre-interrogatoire.

[439]     L’intimé est donc déclaré coupable sous le chef 10 de la plainte.

Chefs 11, 12, 14, 15, 20, 21, 22 et 23

[440]     Ces chefs sont tous basés sur les mêmes faits essentiels. Ils ont été argumentés de façon commune par les parties et donc, ils seront traités ensemble par le Comité.

[441]     Ces chefs se lisent ainsi:

11-        Le ou vers le 5 juillet 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet d'assurance Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'agir en conseiller consciencieux en liant Liberty Insurance Company A.V.V. pour le client Oleg Diziak faisant affaire sous la raison sociale Recyk enr., en procédant à l'émission de la police MTL-3608-97 alors qu'il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

12-        Le ou vers le 5 juillet 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal a fait défaut de rendre compte à l'assuré Oleg Diziak ainsi qu'à son courtier M. Réal Pellerin qu'il avait assuré le commerce Recyk enr. en partie avec un assureur étranger Liberty Insurance Company A.V.V. pour lequel il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(11) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

14-        Le ou vers le 18 février 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'agir en conseiller consciencieux en liant Liberty Insurance Company A.V.V. pour le client Ozgur Ibrahim faisant affaire sous la raison sociale Marché Mevlana en procédant à l'émission de la police MTL-3406-97 alors qu'il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

15-        Le ou vers le 18 février 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut de rendre compte à l’assuré Ozgur Ibrahim ainsi qu’à son courtier M. Geroges Ruel, qu’il avait assuré le commerce Marché Mevlana en partie avec un assureur étranger Liberty Insurance Company A.V.V. pour lequel il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(11) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec;

20-        Le ou vers le 11 décembre 1996, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'agir en conseiller consciencieux en liant Liberty Insurance Company A.V.V. pour le client Mee Kwen Wong en procédant à l'émission de la police MTL-3329-96 alors qu'il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60 (12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

21-        Le ou vers le 11 décembre 1996, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut de rendre compte à son client Mee Kwen Wong ainsi qu'à son courtier Parker & Ramsey qu'il avait assuré le commerce de son client en partie avec un assureur étranger Liberty Insurance Company A.V.V. pour laquelle il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60 (11) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

22-        Le ou vers le 12 décembre 1996, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'agir en conseiller consciencieux en liant Liberty Insurance Company A.V.V. pour le client Henry Wong en procédant à l'émission de la police MTL-3318-96 alors qu'il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60 (12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

23-        Le ou vers le 12 décembre 1996, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut de rendre compte à son client Henry Wong ainsi qu'à son courtier Parker & Ramsey qu'il avait assuré le commerce de son client en partie avec un assureur étranger Liberty Insurance Company A.V.V. pour laquelle il n'avait aucune autorité pour lier cet assureur avant le 25 octobre 1997, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60 (11) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurance de la province de Québec;

La preuve

[442]     La police MTL-3608-97[119], à laquelle référent les chefs 11 et 12 de la plainte, a été émise le 5 juillet 1997, et ce, pour l’assuré Oleg Diziak, faisant affaire sous la raison sociale Recyk enr.

[443]     L’une des compagnies d’assurance participante est Liberty, pour une proportion de 33 %.

[444]     La police MTL-3406-97[120], à laquelle référent les chefs 14 et 15 de la plainte, a été émise le 18 février 1997, et ce, pour l’assuré Ozgur Ibrahim, faisant affaire sous la raison sociale Marché Mevlana.

[445]     L’une des compagnies d’assurance participante est Liberty, pour une proportion de 33 %.

[446]     La police MTL-3329-96[121], à laquelle référent les chefs 20 et 21 de la plainte, a été émise le 11 décembre 1996, et ce, pour l’assuré Mee Kwen Wong.

[447]     L’une des compagnies d’assurance participante est Liberty, pour une proportion de 25 %.

[448]     La police MTL-3318-96[122], à laquelle référent les chefs 22 et 23 de la plainte, a été émise le 12 décembre 1996, et ce, pour l’assuré Henry Wong.

[449]     L’une des compagnies d’assurance participante est Liberty, pour une proportion de 25 %.

[450]     Quant au pouvoir de lier Liberty aux époques visées par les chefs, Mme Chauvin a témoigné à l’effet que, dans le cadre de ses recherches, elle n’a pas trouvé de document autorisant Souscripteurs ou l’intimé à lier Liberty (« Binding Authority ») pour une période antérieure au 25 octobre 1997.

[451]     Ainsi, Mme Chauvin a produit une lettre de Liberty du 3 décembre 1997 à l’intimé transmettant pour signature un Binding Authority en vigueur à compter du 25 octobre 1997 ainsi que le Binding Authority lui-même[123], lequel a été signé entre les parties le 31 décembre 1997. Il appert de ce Binding Authority, qu’à tout le moins à compter du 25 octobre 1997, Souscripteurs était autorisée à lier Liberty.

[452]     Selon Mme Chauvin, le Binding Authority produit ne constitue pas un renouvellement d’une autorisation antérieure mais elle admet qu’elle n’a pas été capable de communiquer avec Liberty pour confirmer ce fait. Elle admet également, en contre-interrogatoire, ne pas avoir demandé cette information aux dirigeants de Souscripteurs, croyant avoir suffisamment de faits en sa possession pour rédiger sa plainte.

[453]     Dans son témoignage, l’intimé déclare que les assurés étaient couverts par Liberty au moment de l’émission des polices.

[454]     À cet effet, l’intimé a produit une liasse de trois (3) documents faisant état de l’autorisation qu’avait Souscripteurs de lier Liberty[124].

[455]     Le premier document de la pièce D-11 est une lettre du 22 octobre 1996 de M. Donald Ulan de Risk Assessment Consultants of America Inc. (« RACA ») adressée à Souscripteurs, à l’attention de l’intimé.

[456]     Cette lettre se lit en partie comme suit :

« Enclosed please find Line Slip/Binding Authority for Liberty Insurance Company A.V.V. This Binding Authority and this Line Slip is extended to cover Montreal Underwriters, Inc.

Please sign and date original and copy and return one copy to our office for our file. 

P.S. We are in the process of receiving full Financial Statement for Liberty and will forward immediately upon receipt.»

[457]     Le troisième document de la pièce D-11 est un Binding Authority selon lequel Liberty aurait autorisé certains agents et courtiers à la lier, et ce, à compter du 25 octobre 1996. Ce document est signé par l’intimé et par M. Ulan, comme représentant de Agency Management Services Inc (« AMS »).

[458]     Le Binding Authority indique ce qui suit à l’égard de AMS et Souscripteurs:

« Agency Management Services, Inc. who shall act as Service Administrator and Agency Manager of various Brokers and Agents in Canada. This Bonding Authority and this Line Slip is extended to cover Montreal Underwriters, Inc. »

[459]     Dans le deuxième document de la pièce D-11, RACA, sous la plume de M. Ulan, avise par lettre du 7 novembre 1996, Souscripteurs de l’addendum suivant quant aux couvertures permises par Liberty (« Line Slip ») :

« Be it known, the coverage for Bonds is now included in the Line Slip issued by Liberty Insurance Company A.V.V. This addendum suprersedes ans is in addition to all présent coverage offered. »

[460]     Dans son contre-interrogatoire, l’intimé déclare que Souscripteurs était autorisé depuis le 25 octobre 1996 à lier Liberty et que M. Ulan agissait comme son représentant.

[461]     Par la suite, le président de Liberty aurait communiqué avec l’intimé pour en faire le représentant de Liberty en remplacement de M. Ulan car ce dernier faisait défaut de transmettre l’argent perçu à Liberty.

[462]     L’intimé mentionne par ailleurs qu’il n’a pas communiqué avec Liberty en 1996 pour s’assurer que le Binding Authority le liant était à la connaissance et autorisé par celle-ci.

Argumentation de la plaignante

[463]     La plaignante énonce tout d’abord que son argumentation pour les chefs 11, 12, 14, 15, 20, 21, 22 et 23 est la même puisque ces chefs reposent sur les mêmes éléments de preuve à savoir (1) le Binding Authority P-53 du 25 octobre 1997 qui autorise Souscripteurs à lier l’assureur à compter de cette date et (2) toutes les polices visées par ces chefs ont été émises avant cette date.

[464]     Selon la plaignante, l’intimé n’a pu établir de mandat antérieur au 25 octobre 1997 justifiant Souscripteurs d’agir comme courtier ou agent de Liberty.

[465]     Par ailleurs, quant à la pièce D-11, la plaignante souligne que cette documentation n’émane pas de Liberty mais de Donald Ulan de RACA et/ou de AMS. Or, il n’y a aucun document émanant de Liberty indiquant qu’elle est liée par RACA ou AMS.

[466]     Pour la plaignante, l’intimé a fait preuve de désinvolture et témérité en croyant pouvoir lier un assureur sans une preuve émanant de lui à cet effet. L’intimé n’ayant pas établi de preuve qu’il pouvait lier cet assureur à compter de 1996, il a donc outrepassé ses pouvoirs, s’il en avait.

[467]     Par ailleurs, pour la plaignante, l’intimé n’a pas agi en conseiller consciencieux en n’informant pas les clients et courtiers de première ligne à l’effet qu’il avait un pouvoir limité, sinon inexistant, de lier Liberty.

Argumentation de l’intimé

[468]     Selon l’intimé, il est faux de prétendre que Souscripteurs ne pouvait procéder à l’émission de contrats d’assurance pour le compte de Liberty avant le 25 octobre 1997.

[469]     En effet, selon l’intimé, Souscripteurs avait cette autorité depuis le 25 octobre 1996, et ce, tel qu’en fait foi le Binding Authority produit à la pièce D-11.

[470]     L’intimé poursuit en mentionnant qu’il était habituel de procéder par le biais d’un correspondant et il réfère à cet effet le Comité à la pièce P-60 qui est une copie du Binding Authority produit par First National of Fenwick pour le compte de Excelsior.

[471]     Finalement, l’intimé mentionne que la plaignante n’a jamais demandé à Souscripteurs s’il y avait d’autres Binding Authority pour couvrir la période visée par les chefs de la plainte alors qu’elle savait très bien que Souscripteurs opérait depuis 1993.

Décision sur les chefs 11, 12, 14, 15, 20, 21, 22 et 23

[472]     L’élément essentiel de ces chefs est le fait que Souscripteurs a émis des polices pour des assurés avant la date d’entrée en vigueur du Binding Authority P-53, soit le 25 octobre 1997.

[473]     Selon la plaignante, et c’est là la question centrale, Souscripteurs n’avait pas le pouvoir de lier Liberty avant cette date.

[474]     Pour le Comité, il revenait à la plaignante de prouver, par prépondérance, cette prétention essentielle pour déclarer l’intimé coupable de ces chefs, ce qui n’a pas été le cas.

[475]     En effet, la pièce D-11, comprend un Binding Authority qui désigne Souscripteurs comme l’agent de Liberty à compter du 25 octobre 1996.

[476]     Le fait que ce document ne soit pas signé par un dirigeant de Liberty, contrairement au Binding Authority du 25 octobre 1997, ne prouve pas en soi qu’il est invalide.

[477]     À cet égard, Mme Chauvin a témoigné à l’effet qu’elle n’a pu vérifier auprès de Liberty si le Binding Authority du 25 octobre 1997 (P-53) était le renouvellement d’un Binding Authority antérieur. Elle n’a donc pas été en mesure d’être informée sur la validité du Binding Authority produit dans le cadre de la pièce D-11. Au surplus, aucun représentant de Liberty n’est venu témoigner pour affirmer que ce document a été conclu sans son accord et elle n’a pas vérifié auprès des représentants de Souscripteurs.

[478]     Par ailleurs, le témoignage non contredit de l’intimé est à l’effet que le président de Liberty était au courant du Binding Authority du 25 octobre 1996 puisqu’il a eu une conversation à ce sujet avec l’intimé alors qu’il voulait remplacer RACA et/ou AMS par Souscripteurs à titre de seul représentant au Canada.

[479]     Il n’y a donc aucune preuve qui contredit l’affirmation de l’intimé que RACA et/ou AMS étaient des correspondants de Liberty qui avaient l’autorité pour conclure en son nom le Binding Authority produit comme pièce D-11.

[480]     La plaignante a peut-être raison lorsqu’elle mentionne qu’il était téméraire pour l’intimé de croire, sans vérification auprès de Liberty, que le Binding Authority du 25 octobre 1996 liait celle-ci. Cependant, les chefs ne reprochent pas à l’intimé sa témérité, son manque de vérification ou sa négligence mais plutôt son absence d’autorité pour émettre les polices visées par ceux-ci. Or, cet élément n’a pas été prouvé.

[481]     En conséquence, le Comité acquitte l’intimé sous les chefs 11, 12, 14, 15, 20, 21, 22 et 23.

Chef 13

[482]     Le chef 13 de la plainte reproche à l’intimé ce qui suit:

Entre le 31 mai 1999 et le 7 juin 2001, date de la faillite de Les Souscripteurs de Montréal personnellement et en sa qualité de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a par des moyens frauduleux et dolosifs éludé sa responsabilité civile professionnelle en faisant défaut de payer la réclamation de son assuré Oleg Diziak pour son commerce Recyk enr. en alléguant des motifs dilatoires et mal fondés pour ne pas payer alors que cela était dans ses pouvoirs de le faire et que son propre expert en sinistre lui avait recommandé de faire une offre de règlement, préférant laisser traîner les choses et forcer ultimement l'assuré a obtenir jugement par défaut alors que son compte de règlement de réclamations avait été vidé, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 60(3) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec et  20 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

La preuve

[483]     Le 5 juillet 1998 une police est émise par Souscripteurs au courtier Assurances Réal Pellerin Inc. pour son assuré, M. Oleg Diziak[125].

[484]      Par cette police, le commerce de vente et réparations de machines à coudre et appareils ménagers de M. Diziak, soit Recyk Enregistré est ainsi assuré, notamment contre le vol.

[485]     Le 31 mai 1999, un vol survient au commerce de M. Diziak. Celui-ci le rapporte immédiatement à son courtier, lequel avise Souscripteurs par télécopie le jour même.

[486]      À une date inconnue, M. Edmond Quévillon, expert en sinistre, est mandaté par l’intimé.

[487]     Dans un rapport du 9 octobre 1999[126], Quévillon fait part de ses recommandations. À cet effet, il déclare tout d’abord que le vol déclaré par l’assuré lui semble recevable pour ensuite proposer un règlement au montant de 6 973.24$ incluant la franchise applicable.

[488]     Le 9 novembre 1999, Quévillon transmet son rapport final à l’intimé[127]. Celui-ci fait état qu’il a été avisé par l’assuré que l’intimé avait refusé de régler pour la somme de 6 973.24$ et poursuit en indiquant que suite à des entretiens téléphoniques avec l’assuré et son courtier, peut-être que l’assuré accepterait un règlement à un montant moindre. L’expert en sinistre termine en mentionnant qu’il y a eu un cambriolage et que même si l’assuré ne maintenait pas un inventaire perpétuel, de la marchandise fut volée.

[489]     Le 2 décembre 1999, le procureur de M. Diziak envoi une mise en demeure à Souscripteurs dans laquelle celui-ci réclame la somme de 11 572.55$ suite au vol[128]. Un échange s’ensuit avec Souscripteurs, celle-ci ne voulant pas payer puisqu’elle prétend que M. Diziak n’a pas prouvé sa réclamation[129].

[490]     Toujours impayé, M. Diziak entreprend le ou vers le 9 mars 2000 une action en justice devant la Cour du Québec contre les assureurs étrangers au dossier, soit Liberty et Excelsior.

[491]     Dans un premier temps, les procureurs Gold, Fridhandler, Goldberg produisent une défense puis, par la suite, cessent d’occuper.

[492]     Un jugement ex-parte contre les assureurs étrangers est rendu le 31 janvier 2001 au montant de 11 472.55$[130].

[493]     Dans sa réponse à la ChAD transmise le ou vers le 11 juin 2001, l’intimé explique ainsi le refus de Souscripteurs de payer la réclamation de M. Diziak :

« Notre ajusteur n’a pas été en mesure d’obtenir un inventaire des marchandises lui appartenant ou comment ces biens ont été acquis par l’assuré. Il appartient à l’assuré d’en faire la preuve. Nous doutions fortement que ces biens étaient à lui mais plutôt des biens laissés en consignation.[131]»

[494]     Suite à une plainte soumise en novembre 2000 par M. Diziak auprès du Bureau des services financiers, le Fonds d’indemnisation des services financiers conclut le 26 mars 2002 que Souscripteurs de Montréal et l’intimé ont faussement laissé croire à M. Diziak qu’il était assuré par les assureurs étrangers alors qu’il ne l’était pas réellement[132].

[495]     Au surplus, le Fonds conclut que « le cabinet et le représentant André Lacelle ont agi de façon dolosive et frauduleuse en acceptant des primes pour et au nom d’assureurs étrangers sans leur transmettre la part qui leur revenait en vertu des ententes contractuelles les régissant et sans véritablement placer le risque auprès d’eux ».

[496]     Le Fonds décide alors d’indemniser M. Diziak pour la somme de 6 973.24$.

Argumentation de la plaignante

[497]     La plaignante argumente que Souscripteurs n’avait aucune raison de ne pas payer la réclamation de M. Diziak. Ainsi, le rapport de l’expert en sinistre est clair et les motifs invoqués auprès du procureur de l’assuré sont dilatoires. À cet effet, selon la plaignante, le jugement par défaut intervient alors que le compte des assureurs est vide.

[498]     Par ailleurs, la plaignante réfère le comité à la décision du Fonds, P-57. Pour la plaignante, l’intimé refusait de faire droit à la réclamation de l’assuré pour lui permettre de diminuer le compte en fiducie des assureurs étrangers pour pouvoir se verser des dividendes de Souscripteurs.

Argumentation de l’intimé

[499]     Pour l’intimé, les normes professionnelles n’exigent pas qu’une personne soit obligée de payer une réclamation si elle a des motifs valables pour ne pas payer, même si elle en a le pouvoir.

[500]      À cet effet, il n’existe aucune preuve qui démontrerait que l’intimé avait l’intention de frauder un assuré ou que l’intimé a perçu un revenu par le fait du non paiement de la réclamation de l’assuré.

[501]     L’intimé poursuit en notant que le rôle d’un expert en sinistre est d’enquêter, négocier, recommander. L’assureur est toujours libre d’accepter ou de refuser de payer.

Décision sur le chef 13

[502]     Le chef 13 reproche à l’intimé d’avoir usé de moyens frauduleux ou dolosifs pour éluder sa responsabilité civile professionnelle en faisant défaut de payer la réclamation de M. Oleg Diziak.

[503]      Bien que les motifs allégués par l’intimé puissent paraître discutables à la lumière du rapport de l’expert Quévillon et des faits entourant le dossier de l’assuré, le Comité ne peut conclure qu’il y a eu usage de fraude ou de dol pour éviter de payer sa réclamation.

[504]     À cet effet, il faut distinguer le chef 13 des motifs pour lesquels le Fonds d’indemnisation des services financiers a conclu à la fraude et le dol de la part de l’intimé. Ainsi, sans discuter de la question de l’autorité de cette décision sur le Comité, il faut noter que celle-ci repose sur la prémisse que l’intimé aurait fait faussement croire à M. Diziak qu’il était assuré par les assureurs étrangers alors qu’il ne l’était pas, et ce, tout en percevant les primes versées par lui. Dans notre cas, bien qu’on puisse penser qu’il puisse y avoir eu des motifs occultes pour ne pas payer la réclamation de M. Diziak, il n’y a pas de preuve prépondérante que l’intimé a utilisé des moyens « frauduleux ou dolosifs » pour ce faire.

[505]     En conséquence, le Comité acquitte l’intimé sous le chef 13.

Chef 16

[506]     Le chef 16 de la plainte se lit comme suit :

Le ou vers le 29 octobre 1997, personnellement et à titre de responsable du cabinet Les Souscripteurs de Montréal, a fait défaut d'informer son assuré Ozgur Ibrahim ainsi que son courtier Georges Ruel que la compagnie d'assurance Trans International Insurance Co. Ltd. avait été remplacée sur le risque par la Excelsior Insurance Company, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 60(12) section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec.

La preuve

[507]     Le ou vers le 19 février 1997, une police est émise par Souscripteurs au nom de l’assuré Ozgur Ibrahim pour son commerce, Marché Mevlana, et ce, pour la période du 18 février 1997 au 18 février 1998 (police MTL-3406-97)[133].

[508]     Le courtier de M. Ibrahim est alors Georges Ruel.

[509]     Tel qu’il appert de cette police, le risque était alors assumé par trois (3) compagnies d’assurance non licenciées au Québec, soit : Imperial Surety Co. (33%), Liberty Insurance Co. (33%) et Trans International Ins. Co. Ltd (« Trans International ») (34%).

[510]     Vers le mois d’octobre 1997, Souscripteurs entame des démarches pour remplacer Trans International à compter du 1er novembre 1997. Ainsi, des contacts ont lieu avec l’intermédiaire First National of Fenwick laquelle, en date du 3 octobre 1997, recommande à l’intimé, notamment, Excelsior General Insurance Co. Ltd. (« Excelsior »), établie à Chypre[134].

[511]     Le 29 octobre 1997, un «Cover Note » est émis par la First National of Fenwick au nom de Excelsior et permettant à Souscripteurs et/ou l’intimé d’émettre des polices au nom de cet assureur[135].

[512]     Quant à la mise en œuvre de ce changement, l’intimé a expliqué dans son témoignage qu’il n’avait pas à informer M. Ibrahim, ou son courtier Georges Ruel, de ce changement car il s’agissait d’une transaction à l’interne, laquelle découlait du fait que Excelsior avait pris le portefeuille de Trans International.

Argumentation de la plaignante

[513]     La plaignante réfère le Comité à l’article 60(12) du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec, qui oblige le courtier à donner tout renseignement utile et nécessaire.

[514]     Selon la plaignante, l’identité de l’assureur qui assume une partie du risque doit être divulguée et il tombe sous le sens qu’un assuré doit savoir qui le protège.

[515]     La plaignante fait noter au Comité qu’en témoignage pour sa défense, l’intimé a admis ne pas avoir informé le courtier ou l’assuré du remplacement d’assureur étranger au motif qu’il s’agissait là d’une modification interne qui n’avait pas à être divulguée.

[516]     Pour la plaignante, il s’agit là d’une interprétation très restrictive par l’intimé de son devoir d’information quant auquel il est en infraction évidente.

Argumentation de l’intimé

[517]     Pour l’intimé, il n’y a pas de preuve que Trans International a été remplacée par Excelsior dans le cadre de la police MTL-3406-97.

[518]     Selon l’intimé, la correspondance P-60 émanant de First National of Fenwick ne fait qu’établir que celle-ci fournissait une nouvelle facilité de souscription avec Excelsior et ne démontre pas que les contrats existants à ce moment subissaient alors un changement au niveau des assureurs.

[519]     Pour l’intimé, le portefeuille de Trans International a été absorbé par Excelsior, de façon interne, ce qui veut dire que tout ce qui était souscrit par Trans International était reconnu comme faisant partie du portefeuille de Excelsior.

Décision sur le chef 16

[520]     Par le chef 16 de la plainte, il est reproché à l’intimé d’avoir fait défaut d’informer l’assuré Ozgur Ibrahim de même que son courtier, Georges Ruel, que Trans International avait été remplacée par Excelsior sur le risque visé par la police MTL-3406-97, contrevenant ainsi à l’article 60(12) du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec.

[521]     Cet article stipule:

«60.           Un sociétaire :

12° doit agir envers les clients avec probité et en conseiller consciencieux en les éclairant sur leurs droits et obligations et en leur donnant tout renseignement nécessaire et utile; »

[522]     Dans la présente affaire, il a été prouvé, de l’avis du Comité, que l’intimé n’a pas respecté le devoir d’information et de transparence visé par cet article du règlement.

[523]     Ainsi, dans un premier temps, Trans International était l’un des trois assureurs souscrivant le risque visé par la police MTL-3406-97. Cette information se devait d’être transmise et a été transmise au courtier Georges Ruel pour son client Ozgur Ibrahim au moment de l’émission de la police.

[524]     Par la suite, Trans International a été remplacée par Excelsior.

[525]     Selon le Comité, le courtier Georges Ruel et l’assuré devaient alors être mis au courant de ce changement.

[526]     À cet effet, l’assuré a le droit de savoir qui l’assure. Cela est élémentaire. Dans cette mesure, si un changement intervient, l’assuré doit certes être avisé et ce, de façon prompte, de celui-ci.

[527]     On peut d’ailleurs penser à plusieurs situations où il est utile ou nécessaire pour l’assuré de connaître qui est son assureur, par exemple en cas de poursuite civile suite à une réclamation ou à l’occasion d’une demande d’information d’un prêteur.

[528]     En ce qui concerne la police MTL-3406-97, il n’y a aucun avenant indiquant que ce changement a été notifié au courtier ou à l’assuré. Par ailleurs, l’intimé admet lui-même ne pas avoir informé ceux-ci, car, pour lui, il s’agissait d’une transaction à l’interne, laquelle découlait du fait qu’Excelsior avait pris le portefeuille de Trans International.

[529]     L’intimé a donc omis de donner au courtier, ou à l’assuré, un renseignement nécessaire, ou à tout le moins utile pour eux.

[530]     Par ailleurs, le Comité ne souscrit pas à l’argument de l’intimé à l’effet qu’Excelsior n’était qu’une nouvelle « facilité de souscription » et qu’il n’y n’avait pas alors de remplacement de Trans International dans les contrats existants.

[531]     Ainsi, si ce remplacement n’a pas eu lieu, pourquoi témoigner à l’effet qu’il n’était pas utile de donner cette information puisqu’il ne s’agissait que d’un changement interne ?

[532]     D’autre part, comment prétendre qu’il n’y a pas eu de remplacement alors que dans le même souffle l’intimé déclare que par ce changement interne, Excelsior a pris le portefeuille de Trans International ?

[533]     Finalement, quant à cet argument, il vient également contredire la lettre de First National of Fenwick du 29 octobre 1997 (P-60) intitulée « Re : T.I. replacement » et qui dit bien :

« Further to our conversation of the 24th please find following our Cover Notes in respect of the replacement of Trans International effective 1st November 1997. » (Notre soulignement)

[534]     Le Comité est donc convaincu qu’à compter du 1er novembre 1997, Excelsior a remplacé Trans International et l’intimé n’a pas transmis cette information utile et nécessaire au courtier ou à l’assuré.

[535]     À cet égard, qu’il s’agisse d’un remplacement d’assureur suite à une acquisition, absorption de portefeuille ou autre transaction, il revenait à l’intimé d’agir en conseiller consciencieux en informant son client de ce changement. Ne l’ayant pas fait, le Comité déclare l’intimé coupable sous le chef 16 de la plainte.

Chef 17

[536]     Le chef 17 de la plainte se lit ainsi :

Le ou vers le 25 avril 2000, a fait défaut d'informer son client Ozgur Ibrahim et son courtier Georges Ruel que la compagnie d'assurance Centennial Insurance Co. A.V.V. s'était retirée (sic) du risque pour la période en cours, laissant son client et le courtier dans l'ignorance, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 26 et 37(4) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

La preuve

[537]     Le ou vers le 22 février 2000, une police est émise par Souscripteurs au nom de l’assuré Ozgur Ibrahim pour son commerce, Marché Mevlana, et ce, pour la période du 18 février 2000 au 18 février 2001 (police MTL-4747-00)[136].

[538]     Tel qu’il appert de cette police, les assureurs se partageant le risque sont Liberty pour 33%, Centennial pour 33% et Excelsior pour 34%.

[539]     Dans un avenant du 25 avril 2000 émis par Souscripteurs, il appert que la participation des trois assureurs est modifiée de la façon suivante : Liberty passe à 50%, Centennial passe à 0% et Excelsior passe à 50%[137].

[540]     Dans son témoignage, l’intimé dit avoir avisé, dès le début, l’ensemble des courtiers concernés par ce changement visant la participation de Centennial.

[541]     Par ailleurs, dans le cas du courtier de M. Ibrahim, soit M. Georges Ruel, celui-ci aurait mentionné à l’intimé ne pas avoir reçu d’avenant et donc, l’intimé lui aurait transmis un nouvel avenant.

[542]     Quant au courtier Ruel, celui-ci relate son absence de connaissance de ce changement dans une lettre du 28 août 2001 adressée à la Chambre de l’assurance de dommages dans le cadre d’une réclamation impayée à l’égard du Marché Mevlana[138].

[543]     Dans cette lettre, M. Ruel s’exprime comme suit :

« La compagnie Centennial s’est retiré des risques. Je n’avais pas été avisé de ce changement. J’ai demandé à M. Lacelle pourquoi je n’avais pas reçu d’avenant de ce changement, il m’a dit qu’il avait fait ce changement interne. Cependant il aurait pu nous mettre la puce à l’oreille et s’informer de ce qui se passait. Après lui avoir demandé il m’a fait parvenir ce document par télécopieur le 4 juin 2001 (voir avenant). » (Nos soulignements)

[544]     À cet effet, il faut noter que sur l’avenant du 25 avril 2000 apparaît un bordereau de télécopieur indiquant une transmission de Souscripteurs le 4 juin 2001 à 10:10 AM.

Argumentation de la plaignante

[545]     Pour la plaignante, l’intimé a fait défaut de rendre compte et d’informer le courtier du changement dans la participation au risque de Centennial.

[546]     À cet égard, selon la plaignante, la preuve révèle qu’au 25 avril 2000, il y a eu retrait de Centennial sans que le client ou son courtier en soient avisés, l’avenant ayant été transmis après l’expiration de la police, soit le 4 juin 2001.

[547]     Finalement, la plaignante fait remarquer que l’explication de l’intimé donné à M. Ruel à l’effet qu’il s’agissait d’une modification interne ne repose sur aucune pratique reconnue ou règlementation.

Argumentation de l’intimé

[548]     Pour l’intimé, il est faux de prétendre qu’il n’a pas avisé l’assuré ainsi que son courtier puisque, selon lui, un avenant de modification au contrat ainsi qu’à tous les autres contrats concernés a été envoyé aux courtiers, incluant M. Ruel. Seul M. Ruel ne l’aurait pas reçu.

[549]     À ce sujet, l’intimé réfère à un autre avenant de modification de la participation de Centennial du 25 avril 2000, celui-ci concernant le courtier Felix Franciscault Inc[139].

Décision sur le chef 17

[550]     Pour le Comité, il ne fait aucun doute que l’intimé avait l’obligation d’aviser dans les plus brefs délais le courtier et/ou l’assuré du fait qu’un des assureurs s’était entièrement retiré du risque.

[551]     Comme l’a mentionné le Comité dans le cadre du chef 16 de la plainte, l’assuré a le droit de savoir qui l’assure et, si un changement intervient, il doit en être avisé. Agir de façon contraire peut constituer une infraction aux articles 26 et 37(4°) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

[552]     Or, pour le Comité, l’intimé a fait défaut d’aviser le courtier ou l’assuré du fait que Centennial se retirait complètement du risque et il ne le croit pas lorsqu’il affirme le contraire.

[553]     Ainsi, par son témoignage, l’intimé tente de faire croire au Comité qu’il a avisé sans délai le courtier Ruel du retrait de Centennial. Cependant, son témoignage est non seulement contredit par la lettre transmise par M. Ruel à la Chambre de l’assurance de dommages, le dépôt de laquelle n’a fait l’objet d’aucune objection de sa part, mais, au surplus, il se contredit lui-même dans le cadre de ses explications.

[554]     Quant à la lettre de M. Ruel, le Comité ne voit aucune raison de croire que celle-ci relate erronément les faits. Au contraire, ces faits sont confirmés par la preuve que le Comité a entendue.

[555]     À cet égard, dans cette lettre, M. Ruel énonce que l’explication donnée par l’intimé pour ne pas l’avoir avisé de cette modification était qu’il s’agissait d’un « changement interne ». Or, il s’agit là de la même explication que l’intimé a donné au Comité dans le cadre du chef 16 de la plainte pour expliquer pourquoi il n’avait pas avisé ce même courtier du fait que Trans International Insurance avait été remplacée sur le risque par Excelsior Insurance Company. Cette similitude permet au Comité d’accorder foi à la déclaration écrite de M. Ruel.

[556]     De plus, la lettre de M. Ruel réfère à une télécopie transmise le 4 juin 2001. Or, le bordereau de transmission de l’avenant du 25 avril 2000 est de la même date et confirme donc aussi cette déclaration.

[557]     En ce qui concerne le témoignage de l’intimé, celui-ci se résume à dire qu’il a avisé tous les courtiers de ce changement mais que, apparemment, seul M. Ruel n’a pas reçu cet avenant en temps utile.

[558]     Comme déjà mentionné, cette explication contredit l’explication de l’intimé dans le cadre du chef 16 à l’effet qu’il est inutile d’aviser le courtier et/ou le client lorsqu’il y un tel «changement interne » selon lequel les proportions des assureurs sont modifiées.

[559]     De plus, l’intimé a été contre-interrogé à l’égard de la pièce P-49, avenant du 25 avril 2000 (police MTL-4762-00), dont il fait lui-même mention dans le cadre de son argumentation. Or, l’intimé a confirmé qu’il s’agit là d’un avenant qui vise à augmenter le risque de Liberty et éliminer celui de Centennial dans le cas de l’assuré du courtier Felix Franciscaut Inc. Il mentionne que dans ce cas, le client n’a pas à être avisé de ce changement qui constitue de la régie interne et que cela ne change rien par rapport au courtier car il s’agit de la même police. L’intimé a alors mentionné qu’il s’agissait là d’un « avenant interne ». Il est à noter que l’intimé a également qualifié les pièces P-50, page 1 (police MTL-4778-00) et P51, page 4 (police MTL-4766-00), qui sont aussi des avenants du 25 avril 2000 par lesquels Centennial est retirée du risque, « d’avenants internes » et il a admis que sa réponse concernant la pièce P-49 est la même que pour ces pièces en ce qui a trait à l’absence d’obligation d’aviser le courtier de ce changement.

[560]     Bref, le témoignage de l’intimé est contradictoire et n’est pas digne de foi. Le Comité retient plutôt qu’il a fait défaut d’informer en temps utile l’assuré et/ou le courtier que Centennial s’était retirée du risque pour la période en cours, laissant l’assuré et le courtier dans l’ignorance.

[561]     Le Comité déclare donc l’intimé coupable sous le chef 17 de la plainte.

Chef 18

[562]     Le chef 18 de la plainte se lit comme suit :

Le ou vers le 22 février 2000, a fait défaut de verser à Liberty Insurance Company, la portion de prime qui lui était due (sic) suite à la souscription de la police MTL-4747-00 au nom de Marché Mevlana, faisant là preuve d'un manque d'intégrité et de transparence, préférant conserver cette partie de la prime dans un compte séparé pour payer des réclamations éventuelles adressées au même assureur tout en se payant sa propre commission et conservant ses honoraires alors qu'il savait ou aurait dû savoir que la dite compagnie n'honorait plus ses engagements, le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 9, 25, 28 et 37 (1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

La preuve

[563]     Le 22 février 2000, une police est émise par Souscripteurs pour Marché Mevlana, et ce, pour la période du 18 février 2000 au 18 février 2001 (police MTL-4747-00)[140].

[564]     Tel qu’il appert de cette police, la part du risque assumée par Liberty est de 33%.

[565]     Par chèque de la même date, un paiement de prime de 1003,00$ est versé à Souscripteurs par le courtier de Marché Mevlana, M. Georges Ruel[141].

[566]     Suite à l’émission de cette police, un sinistre est survenu et une réclamation a été produite par Marché Mevlana.

[567]     Or, selon ce qui ressort de la preuve, cette réclamation aurait été refusée par Liberty, notamment au motif que Souscripteurs n’avait pas transmis à celle-ci la portion de prime qui lui était due suite à la souscription de la police MTL-4747-00.

[568]     Ainsi, dans une lettre du 18 décembre 2000[142], l’avocat de Liberty informe M. Ruel que :

« Je peux vous confirmer qu’à ce jour, ma cliente LIC Liberty Insurance Company A.V.V. n’a reçu aucune prime relativement à la police émise par les Souscripteurs de Montréal en faveur de votre client.

(…)

Nous regrettons la situation de votre client. Tel que mentionné précédemment, nous avons déposé une plainte contre Montreal Underwriters et André Lacelle auprès du Bureau des services financiers. Nous vous suggérons de faire de même afin que votre client soit en mesure de déposer une demande de compensation auprès du Fonds d’indemnisation ».

[569]     Effectivement, une demande de compensation a été soumise par Marché Mevlana au Fonds d’indemnisation des services financiers au motif que la réclamante se considérait avoir été victime de fraude ou de manœuvres dolosives de la part de Souscripteurs. Le Fonds a rendu sa décision le 5 juin 2002 et a décidé, d’une part, d’indemniser Marché Mevlana pour un montant de 85 306,81$ et, d’autre part, il a ordonné à l’intimé, solidairement avec Souscripteurs, de rembourser cette somme au Fonds[143].

[570]     Le Fonds s’est par la suite adressé à la Cour supérieure afin d’obtenir une condamnation contre l’intimé pour ce montant.

[571]     Un jugement à cet égard a été rendu par l’Honorable Gilles Hébert, le 7 février 2007 dans lequel la Cour condamne l’intimé à payer au Fonds la somme de 85 306,81$[144].

[572]     Il convient de reproduire certains passages de ce jugement :

« [65] Avec Liberty, la répartition d’une prime se fait comme suit : sur une prime de 1000$, 300$ demeurent à Les Souscripteurs, 20$ vont à l’avocat Fridhandler comme fondé de pouvoir pour recevoir des procédures, 400$ doivent être déposés en fidéicommis et 280$ sont versés à Liberty.

(…)

[67] Lacelle affirme qu’à compter du mois d’octobre 1999, il connaît des problèmes de paiement avec Liberty et Excelsior; il donne l’exemple de l’assuré Sylvain Lussier qui subit une perte importante, en octobre 1999, et pour lequel il ne parvient pas à obtenir d’indemnité.

(…)

[121] Lacelle cite l’article 28 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (D-1) qui prévoit ce qui suit :

« Le représentant en assurance de dommages ne doit pas, sans excuse légitime, faire défaut de payer à l’assureur, sur demande ou à l’expiration du délai imparti, les primes qu’il a perçues de lui. »

[122] Il invoque l’excuse légitime, car il manquait des sous pour payer.

(…)

[145] Le Fonds doit établir, par preuve prépondérante et conformément aux dispositions des articles 2803 et 2804 du Code civil du Québec, les éléments essentiels suivants :

- Mevlana a été victime d’une fraude, d’une manœuvre dolosive ou d’un détournement de fonds dont est responsable le courtier Les Souscripteurs de Montréal;

(…)

[146] Sur le premier point, voici ce que la preuve indique. Le courtier Ruel remet au nom de Mevlana un chèque de 1 003$ à Les Souscripteurs et Lacelle représente à Ruel qu’en contrepartie, il transmet un paiement à Liberty et obtient l’émission d’une police d’assurance. Mais contrairement à ses représentations, Lacelle garde l’argent, ne paie pas Liberty, ne transmet pas de bordereau tant et si bien que la police n’est pas émise et le paiement n’est pas effectué.

[147] Lacelle agit ainsi pour régler ses problèmes de liquidité et ses comptes avec Liberty qu’il tient responsable de ses déboires.

[148] À l’égard de Ruel et de son client Mevlana, il s’agit d’un acte malhonnête, car la manœuvre consiste simplement à encaisser la prime en faisant croire qu’une police d’assurance est émise alors qu’elle ne l’est pas et que le paiement à L’assureur n’est pas effectué. 

(…)

[150] Ozgur et son courtier Ruel n’auraient jamais souscrit un chèque de prime de 1003$ à la compagnie de Lacelle si ce dernier les avait informés qu’il ne transmettait ni prime ni bordereau à Liberty.

(…)

[152] Le Tribunal conclut que Mevlana a été victime d’une fraude.»

[573]     Par ailleurs, dans une lettre du 26 juin 2001 que l’intimé adresse au Fonds d’indemnisation des services financiers, celui-ci déclare :

«2.            Suite à nos demandes de paiements dans un autre dossier de réclamation en fin d’année 1999 et début de l’an 2000, il était devenu plausible de ne pas être en mesure de recevoir les chèques de réclamations que nous avons demandés et avons à ce moment cessé d’écrire des contrats d’assurances en Mars 2000, tout en gardant toutes les primes perçues pour le compte des assureurs dans le compte de banque des assureurs et en cessant de faire des remises aux assureurs tant et aussi longtemps que nous ne recevions pas les chèques de réclamations demandés

3. Oui nous avons cessé de faire des remises aux assureurs lorsque nous nous sommes rendu compte que les paiements des réclamations que nous attendions n’arrivaient pas sans toute fois arrêter de produire les bordereaux de primes souscrites dont vous trouverez copie pour le dossier Marché Mevlana ainsi que pour Les entreprises Sylvain Vanier et déposer dans le compte des compagnies d’assurances les primes perçues afin d’honorer leurs obligations jusqu’à épuisement des fonds.» (sic)[145] (Notre soulignement)

[574]     Dans une autre lettre au Fonds, celle-ci du 13 décembre 2001, l’intimé écrit ce qui suit :

« Après quelque temps, nous avons été obligés de retenir les fonds que nous faisions parvenir régulièrement, puis par la suite nous avons été obligés de cesser de souscrire et durant toute cette période nous avons continué d’honorer les réclamations régulières jusqu’à épuisement des fonds, nous ne croyons pas qu’il y a eu négligence grossière ou une faute lourde mais plutôt une volonté de Souscripteurs de continuer à honorer les obligations des assureurs sans avoir leur support jusqu’à extinction de la disponibilité des fonds»[146]. (Notre soulignement)

[575]     Dans son témoignage, l’intimé précise que le 22 février 2000, il était à l’emploi de Gisco et que des paiements réguliers ont été faits auprès de Liberty, jusqu’au moment où, en raison du besoin de liquidités pour payer les réclamations, les primes ont été conservées.

[576]     Me Vincent Gallo a témoigné concernant certains faits entourant ce chef. Lors de son contre-interrogatoire par l’intimé, celui-ci déclare que son mandant, M. Ernesto Chong de Liberty, a communiqué avec lui car il ne recevait plus de paiements de primes de la part de Souscripteurs. Cette cessation de paiement aurait débuté autour du mois de février 1999 et il y aurait eu pour 150 000$ de chèques non transmis à Liberty.

Argumentation de la plaignante

[577]     Pour la plaignante, la preuve est claire qu’il y a eu défaut de remise à Liberty en février 2000 de la prime reçue de Marché Mevlana pour assurer son commerce.

[578]     La plaignante note que l’intimé a admis lui-même conservé les primes perçues pour payer directement les réclamations.

[579]     Selon la plaignante, l’intimé se payait également ses commissions à même le compte en fidéicommis où devait être gardées les primes perçues pour les assureurs.

Argumentation de l’intimé

[580]     L’intimé débute son argumentation en mentionnant que le 22 février 2000, il n’était pas encore de retour aux commandes de Souscripteurs.

[581]     En ce qui concerne la prime d’assurance, l’encaissement de celle-ci s’est fait de la même façon que toutes les autres primes.

Décision sur le chef 18

[582]     Le chef 18 de la plainte reproche à l’intimé d’avoir fait défaut de verser à Liberty la portion de prime qui lui était due suite à la souscription de la police MTL-4747-00 au nom de Marché Mevlana.

[583]     Selon la preuve, Marché Mevlana a, par le biais de son courtier Georges Ruel, transmis une prime de 1003$ à Souscripteurs dans le cadre de la police MTL-4747-00 souscrite avec notamment, Liberty.

[584]     Cependant, alors qu’une réclamation a été présentée par Marché Mevlana, à Liberty, celle-ci annonce à Marché Mevlana qu’elle n’est pas assurée avec elle puisque notamment, aucune prime ne lui a été transmise.

[585]     Par ailleurs, il appert des pièces P-67, pages 1 et 2, ainsi que P-92, page 7,  que l’intimé, de son propre aveu, a pris la décision de cesser de transmettre les primes perçues à Liberty, en raison de difficultés à obtenir de celle-ci qu’elle paie certaines réclamations.

[586]     Il est clair pour le Comité que l’intimé n’a pas transmis la prime perçue à l’égard de la police MTL-4747-00 à Liberty.

[587]     À cet effet, le Comité ne peut que conclure, comme la conclusion du Fonds et  de la Cour supérieure, à savoir que Marché Mevlana a été victime de fraude de la part de l’intimé, celui-ci percevant une prime qu’il ne transmettait pas, à l’insu de l’assuré et de son courtier, à l’assureur.

[588]     En agissant comme il l’a fait, et ce, en tenant dans l’ignorance l’assuré et son courtier, l’intimé n’a certes pas agi avec intégrité et transparence et il a plutôt fait preuve de malhonnêteté.

[589]     L’intimé ne peut d’ailleurs se disculper de ne pas avoir fait de remise de prime à l’assureur en prétendant que Liberty n’honorait pas ses réclamations. En effet, se faire justice à soi-même ne constitue certainement pas une excuse légitime pour ne pas faire remise de la prime perçue à l’assureur. Au surplus, il est particulier, pour ne pas dire plus, que sachant que ce problème fondamental existait, Souscripteurs décide néanmoins d’assurer Marché Mevlana avec cet assureur.  

[590]     Finalement, et pour les motifs déjà exprimés, l’intimé était, au 22 février 2000, l’âme dirigeante de Souscripteurs et il ne peut donc éluder sa responsabilité professionnelle en affirmant qu’il n’avait alors rien à voir avec celle-ci à cette date.

[591]     Le Comité en arrive donc à la conclusion que l’intimé doit être déclaré coupable sous le chef 18 de la plainte.

Chef 19

[592]     Le chef 19 de la plainte reproche à l’intimé :

Entre le 16 mars 1994 et le 12 décembre 1998, a exercé directement ou par l'entremise de son cabinet Les Souscripteurs de Montréal des activités de courtier spécial dans la province du Manitoba alors qu'il ne détenait aucune licence pour ce faire, exerçant par-là une occupation incompatible avec l'honneur et la dignité de la profession de courtier dans les cas suivants :

 

- MTL – 1310 – 94    Roy Anderson

- MTL – 1933 – 95    Roy Anderson

- MTL – 1531 – 94    Marie Gheorghe

- MTL – 3060 – 96    Mike Fructus

- MTL – 1532 – 94    Mike Fructus

- MTL – 2231 – 95    Mike Fructus

- MTL – 1576 -  94    Josephine Sosnowski

- MTL – 1590 – 94    Lawrence and Melva Spicer

- MTL – 1602 – 94    Vasil Litov

- MTL – 2336 – 95    Vasil Litov

- MTL – 1716 – 94    Arturo Antonia Voluntad

- MTL -  1725 – 94    Mee Kwen Wong

- MTL – 3329 -  96    Mee Kwen Wong

- MTL – 3902 – 97    Mee Kwen Wong

- MTL – 4367 – 98    Mee Kwen Wong

- MTL – 2556 – 95    Mee Kwen Wong

- MTL – 1726 – 94    Henry Wong

- MTL – 2569 – 95    Henry Wong

- MTL – 3318 – 96    Henry Wong

- MTL – 3906 – 97    Henry Wong

- MTL – 4365 – 98    Henry Wong

- MTL – 1746 – 95    Lynda Kyle

- MTL – 1782 – 95    Ed & Judith Livesey      

- MTL – 2619 – 96    Ed & Judith Livesey

- MTL – 1850 – 95    Eric Noug

- MTL – 2008 – 95    Surrinder Singhand Indensit Singh

- MTL – 2508 – 95    Joseph Sitareyk

- MTL – 2694 – 96    Charlene & Tony Hogan

- MTL – 2882 – 96    Edin Mehanovic

- MTL  - 3347 – 97    Lynda Kyle,

 

le tout en contravention notamment avec les articles 37, 53 et 58 section IV déontologie du Règlement de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec.

La preuve

[593]     À l’époque pertinente, l’intimé était autorisé à agir comme courtier spécial au Québec et ainsi il pouvait offrir et vendre les produits d’un assureur non titulaire d’un permis au Québec.

[594]     La province du Manitoba requérait également une licence pour agir en qualité de courtier spécial d’assurance et ainsi négocier, proroger ou renouveler des contrats d’assurances de dommages dans la province auprès d’assureurs qui ne sont pas autorisés à effectuer ces activités au Manitoba[147].

[595]     Ni l’intimé, ni Souscripteurs ne possédaient, de licence leur permettant d’agir comme courtier spécial au Manitoba.

[596]     Par ailleurs, plusieurs contrats d’assurances ont été émis par Souscripteurs à l’égard d’assurés résidents du Manitoba. Ainsi, la pièce P-70, émanant de l’intimé, fait état de trente tels contrats, lesquels correspondent à la liste prévue au chef 19 de la plainte.

[597]     À la pièce P-70, l’intimé indique que ces contrats d’assurance ont été émis pour le bureau Parker & Ramsay à la demande de celui-ci, l’intimé ne connaissant pas ou n’ayant pas fait affaires directement avec les assurés qui y sont mentionnés.

[598]     La pièce P-77 constitue un exemple d’un tel contrat. On y remarque que le courtier est Parker & Ramsey, que l’assuré est un certain M. Wong, que le contrat a été émis par Montreal Underwriters Inc. et on y retrouve le nom de quatre (4) compagnies d’assurance souscrivant le risque chacune pour 25%.

[599]     Suite à une plainte[148], une enquête des autorités du Manitoba et du Québec a eu lieu quant au possible exercice par l’intimé d’activités de courtier spécial au Manitoba, sans détenir la licence requise.

[600]     Ainsi, par lettre du 20 septembre 2000, l’Insurance Council of Manitoba (« ICM ») avise l’intimé qu’une demande d’enquête a été soumise à l’égard des activités de Souscripteurs au Manitoba et demande à celui-ci de cesser celles-ci[149].

[601]     Par ailleurs, dans une seconde lettre de l’ICM du 3 octobre 2000[150], l’ICM réitère la demande que cessent les activités de Souscripteurs au Manitoba et avise de plus l’intimé que suite à une réclamation d’un assuré, M. Wong, il est en défaut de donner suite aux communications du courtier Parker & Ramsay ainsi que de son ajusteur.

[602]     L’intimé répond le 12 octobre 2000[151] et avise l’ICM qu’il ne représente plus d’assureurs étrangers depuis mars 2000 et que la réclamation de M. Wong a été transmise aux assureurs.

[603]     Par ailleurs, dans le cadre de l’enquête effectuée par la Chambre de l’assurance de dommages sur les activités de Souscripteurs au Manitoba, l’intimé a expliqué ainsi son rôle dans une lettre du 12 octobre 2001 :

« Nos opérations dans ce dossier se sont limitées à agir qu’à titre de mandataires des assureurs non licenciés (sic) au Canada et en aucun temps nous avons fait affaires avec des assurés directement, autant au Québec que dans les autres provinces ».[152]

[604]     Dans le cadre de cette même lettre, l’intimé a également fait référence à une situation qu’il avait lui même dénoncée en 1997 et qui concernait EastWest Underwriters Inc., lequel offrait, selon lui, « des produits d’assurances de dommages dans les autres provinces du Canada, principalement dans les provinces de l’ouest, et ce, par l’entremise d’assureurs de dommages ne détenant pas de permis d’assureurs au Canada. »

[605]     Dans une réponse du Conseil des assurances de dommages du 18 juin 1997, il est mentionné que EastWest Underwriters Inc. n’a pas l’obligation de détenir un certificat délivré par le Conseil pour représenter des assureurs qui ne sont pas autorisés à faire des affaires d’assurance au Canada et solliciter hors Québec des courtiers qui ne sont pas du Québec.

Argumentation de la plaignante

[606]     Pour la plaignante, l’intimé a, par le biais de Souscripteurs, exercé des activités de courtier spécial au Manitoba sans avoir obtenu de licence lui permettant d’agir de la sorte et ce, pour toute la période visée par la plainte, exerçant ainsi une activité incompatible avec l’honneur et la dignité de la profession.

[607]     Quant à la position de l’intimé contenue à sa lettre produite comme pièce P-76, la plaignante soumet que le questionnement et la réponse relatifs à la situation de EastWest Underwriters n’ont guère de pertinence en l’espèce, notamment compte-tenu de la nature générale de la réponse fournie par le Conseil des assurances de dommages.

[608]     Pour terminer, la plaignante soumet que le présent Comité a juridiction sur l’infraction visée par le chef 19 et cite, à cet égard, l’ouvrage La discipline professionnelle au Québec, à la page 110 :

« Le comité de discipline d’un ordre a compétence pour juger la conduite de ses membres sans égard au lieu où l’infraction a été commise et ce, même si les actes reprochés ont été posés dans une juridiction étrangère.

La faute disciplinaire est liée à la personne du professionnel sans assises territoriales. Par exemple, il fut jugé que le Comité de discipline était compétent pour décider au Québec d’une plainte relative à de la publicité faite aux Etats-Unis par un membre de l’Ordre.

Plus récemment, le Comité de discipline du Barreau qui avait à statuer sur une plainte portée en regard d’actes commis en Floride, dans l’affaire Ordre professionnel des avocats c. Manella, rappelait que la règle du forum non conveniens ne peut s’appliquer au droit disciplinaire alors que l’intérêt public est la cause première du processus judiciaire. »

Argumentation de l’intimé

[609]     L’intimé soumet qu’il n’a pas exercé de courtage spécial au Manitoba. En effet, il n’a sollicité personne au Manitoba. C’est uniquement à la demande de courtiers au Manitoba qu’il a agi en tant que mandataire des assureurs étrangers et qu’il procédait à l’émission de contrats d’assurances pour le compte de courtiers du Manitoba.

[610]     L’intimé n’a pas sollicité directement de clientèle au Manitoba et, comme pour le Québec, cette clientèle doit être assurée par un courtier spécial dans la province du Manitoba. Or, dans le présent cas, le courtier du Manitoba ne possédait pas de permis de courtier spécial.

[611]     Le principe d’extraterritorialité ne s’applique pas en l’instance. Le client faisait affaire avec son courtier au Manitoba et ce n’est que la faute de celui-ci d’avoir recherché des disponibilités de marché à l’extérieur de sa province sans détenir de permis de courtier spécial.

[612]     À cet effet, le client de Souscripteur était le courtier du Manitoba et Souscripteurs a agi comme assureur.

[613]     Finalement, l’intimé réfère à la réponse du Conseil des assurances de dommages, pièce P-76 qui prouve, selon lui, que le Conseil n’avait pas juridiction sur les affaires transigées hors Québec.

Décision sur le chef 19

[614]     Le chef 19 reproche à l’intimé d’avoir exercé, personnellement ou par le biais de Souscripteurs, des activités de courtier spécial au Manitoba et ce, sans détenir une licence pour ce faire.

[615]     Selon le Comité, la preuve est prépondérante à l’effet que l’intimé, par le biais de Souscripteurs, a agi comme courtier spécial au Manitoba.

[616]     Ainsi, l’intimé a clairement vendu à des courtiers du Manitoba des produits d’assurance d’assureurs non licenciés au Canada et a émis plusieurs polices d’assurance en conséquence.

[617]     Que l’intimé transige avec le courtier du Manitoba plutôt que directement avec l’assuré ne change rien à la situation. Il est clair que celui-ci se devait d’obtenir la licence requise pour agir tel qu’il l’a fait. D’ailleurs, dans ses opérations au Québec, Souscripteurs n’a pas non plus directement transigé avec les assurés, mais bien avec, ce qu’il qualifie être, des courtiers de première ligne. Donner raison à l’intimé sur ce point voudrait dire qu’il n’avait pas l’obligation de détenir d’autorisation d’agir comme courtier spécial au Québec pourvu qu’il n’ait pas de contact avec les assurées, ce qui est un non-sens.

[618]     Quant à la situation relative à EastWest, le Comité juge que celle-ci n’a aucun impact sur sa décision. En effet, le Comité n’est pas lié par la réponse qui a été donné sur ce questionnement. Par ailleurs, le Comité n’a que peu d’informations à ce sujet et note, si cela devait avoir une quelconque pertinence, qu’il n’est pas évident que EastWind  a agi exactement de la même façon que l’intimé. En effet, la lettre du 18 juin 1997 du Conseil des assurances de dommages[153] ne mentionne pas qu’il n’est pas requis d’avoir une licence du Manitoba pour agir comme courtier spécial au Manitoba. Elle mentionne plutôt qu’un certificat du Conseil n’est pas requis pour solliciter hors du Québec des courtiers qui ne sont pas du Québec.

[619]     Finalement, le Comité souscrit à l’argumentation de la plaignante à l’effet qu’il a juridiction sur les actes de l’intimé même si ceux-ci ont été posés à l’extérieur du Québec.

[620]     Pour le Comité, l’intimé a exercé directement ou par l’entremise de Souscripteurs des activités de courtier spécial dans la province du Manitoba alors qu’il ne détenait aucune licence pour ce faire. En agissant de la sorte, l’intimé a exercé une activité incompatible avec l’honneur et la dignité de la profession.

[621]     Le Comité déclare donc l’intimé coupable sous le chef 19 de la plainte.

Chefs 24 et 25

[622]     S’agissant de faits qui se recoupent, le Comité disposera de ces deux (2) chefs ensemble.

[623]     Le chef 24 reproche à l’intimé :

Entre le 19 mai 2000 et le 7 juin 2001, a éludé sa responsabilité professionnelle en faisant défaut d'entreprendre les démarches nécessaires pour que les assurés Pierre Pilon et Dawna Lee Dumont soient remboursés du crédit de 922,50 $ auquel ils avaient droit suite à la résiliation de la police MTL-4637-99, se retranchant derrière le fait que le compte des assureurs étrangers était vide alors qu'il avait cessé lui-même, pour le compte du cabinet Les Souscripteurs de Montréal de faire remise aux assureurs étrangers, le tout en contravention notamment aux dispositions de l’article 20 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

[624]     Quant au chef 25, celui-ci se lit ainsi :

Entre le 19 mai 2000 et le 7 juin 2001, date de la faillite de Les Souscripteurs de Montréal, s'est approprié pour ses fins personnelles ou celles de son cabinet la somme de 922,50 $ qu'il devait rembourser à ses clients Pierre Pilon et Dawna Lee Dumont suite à la résiliation de la police MTL-4637-99 le 10 mai 2000, le tout en contravention notamment aux dispositions de l'article 37(8) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

La preuve

[625]     Pierre Pilon et Dawna Lee Dumont étaient initialement des clients du courtier Cloutier & Lafrance (« Cloutier »).

[626]     Tel qu’il appert de la pièce P-81, Souscripteurs a émis à Cloutier la police MTL-4637-99 pour les assurés Pilon et Dumont, cette police étant en vigueur du 22 septembre 1999 au 22 septembre 2000.

[627]     Les assureurs identifiés à cette police sont : Liberty Insurance (33%), Gulf Ressources (33%) et Excelsior Insurance (34%).

[628]     La prime relative à ce contrat d’assurance a été dûment payée par chèque de Cloutier à Souscripteurs.

[629]     À une date que la preuve ne révèle pas, Cloutier a fait faillite et le courtier J.J. Cyr Assurances (« Cyr ») a pris le relais du dossier des assurés Pilon et Dumont.

[630]     Le ou vers le 8 août 2000, Cyr informe Souscripteurs de l’intention des assurés Pilon et Dumont de résilier la police MTL-4637-99 en date du 10 mai 2000 et lui transmet une télécopie signée par les assurés qui confirme le tout[154].

[631]     Le ou vers le 11 décembre 2000, Mme Carole Chauvin, syndic de la CHAD, envoie un questionnaire à Souscripteurs concernant les assurés Pilon et Dumont[155]. L’intimé transmet ses réponses à la CHAD le ou vers le 3 janvier 2001.

[632]     À la question 8 dudit questionnaire, l’intimé répond par l’affirmative à la question de savoir si le contrat d’assurance MTL-4637-99 a été résilié à la demande des assurés avec prise d’effet au 10 mai 2000.

[633]     Aux questions 10 et 11, il est demandé s’il y a eu émission d’un crédit suite à cette résiliation et si oui, à quelle date. L’intimé mentionne qu’il n’y a pas eu d’émission d’un tel crédit parce qu’il est toujours en attente de la « résiliation du créancier ».

[634]     Surprise de cette réponse, Mme Chauvin transmet un nouveau questionnaire à l’intimé le ou vers le 22 janvier 2001, qu’il complète et transmet à la CHAD le ou vers le 21 février 2001[156].

[635]     À la question 6 du questionnaire, l’intimé confirme qu’il n’a pas transmis de remboursement aux assurés suite à la résiliation du contrat d’assurance.

[636]     À la question 7, il est demandé pour quelle raison il n’y a pas encore eu de remboursement. L’intimé répond qu’il n’a rien reçu des assureurs.

[637]     À la question 8, il est demandé à l’intimé de préciser le montant du crédit au compte des assurés. L’intimé répond que « la documentation à cet effet n’a pas été processée nous attendons toujours la résiliation du créancier ».

[638]     Confrontée à ces réponses contradictoires, soit, d’une part que le remboursement n’a pas été effectué parce que le créancier n’a pas résilié le contrat et, d’autre part, parce que Souscripteurs n’a pas reçu d’argent des assureurs, Mme Chauvin écrit à nouveau à l’intimé le 27 juin 2001[157].

[639]     Dans cette lettre, Mme Chauvin avise l’intimé que ses explications ne suffisent pas et lui enjoint de lui transmettre un chèque de remboursement au montant du crédit auquel les assurés ont droit.

[640]     Par lettre du 16 juillet 2001, l’intimé avise Mme Chauvin qu’il a préparé un avenant de résiliation qu’il doit transmettre aux assureurs pour obtenir le remboursement.

[641]     À cet effet, une lettre datée du même jour est transmise aux assurés avec copie de l’avenant de résiliation de la police. L’intimé leur mentionne également que cet avenant a été transmis aux assureurs afin d’obtenir le remboursement de leur prime. Finalement, l’intimé mentionne qu’il n’est plus le mandataire de ces assureurs[158].

[642]     Il est à noter que l’avenant de résiliation transmis aux assurés fait état d’un crédit de 922.50$ et de l’annulation de la police en date du 10 mai 2000.

[643]     Toujours le 16 juillet 2001, l’intimé transmet par télécopie aux assureurs Liberty, Excelsior et Gulf Ressources l’avenant d’annulation et leur demande de transmettre leur part respective du remboursement puisque chacun de leur compte en fiducie est vide[159].

[644]     Cette correspondance a été transmise alors que Souscripteurs a fait faillite en date du 7 juin 2001[160].

Argumentation de la plaignante

[645]     La plaignante souligne que dans ses réponses aux questionnaires transmis, l’intimé reconnaît que la prime pour la police MTL-4637-99 a été payée au complet le 17 novembre 1999. Il reconnaît également qu’il y a eu résiliation avec prise d’effet au 10 mai 2000. Par ailleurs, dans le premier questionnaire il prétend ne pouvoir émettre de crédit, car il est en attente de résiliation du créancier alors que dans le second questionnaire, il mentionne ne pas avoir effectué de remboursement parce qu’il n’a pas reçu d’argent des assureurs et parce que le créancier n’a pas effectué de résiliation même s’il ne lui a transmis aucun avis.

[646]     La plaignante rappelle que de l’aveu même de l’intimé, les assureurs étrangers n’ont jamais payé de réclamations. Souscripteurs faisait les paiements à même le compte des assureurs. Lorsqu’il a requis des paiements, il n’a rien reçu. Ayant épuisé le compte, il a fait faillite en juin 2001.

[647]     Cependant, les assurés ont requis bien avant la faillite que leur contrat soit résilié. Les assurés avaient droit à un remboursement de 922.50$ mais ne l’ont jamais reçu. L’intimé n’a rien fait pour réclamer le remboursement avant le 16 juillet 2001 et a donc fait preuve de négligence.

[648]     D’autre part, il y aurait preuve d’appropriation, car les sommes ont été confondues dans le compte dans lequel l’intimé déposait l’argent pour tous les assureurs étrangers alors qu’il se payait des honoraires ou « agency fees » et payait les réclamations.

[649]     Selon la plaignante, l’intimé jouait à l’assureur sous le prétexte de représenter des assureurs étrangers qui n’ont jamais rien payé au niveau des pertes. Selon la plaignante, après mars 2000, l’intimé a vidé le compte des assureurs afin de verser des profits non distribués à Souscripteurs.

Argumentation de l’intimé

[650]     L’intimé soumet que même s’il a transmis l’avis de résiliation le 16 juillet 2001 avec demande de remboursement, il n’était plus le mandataire des assureurs. Leur compte était vide puisqu’il avait servi à payer des réclamations et il n’avait pas de contrôle sur les assureurs. Il ne lui revenait pas de payer de sa poche le remboursement des assurés qui savaient qu’ils faisaient affaire avec des assureurs non licenciés. Selon lui, tout ce qui devait être fait par Souscripteurs l’a été et il est faux de prétendre que celle-ci a commis une fraude. D’ailleurs, le courtier de première ligne aurait dû rembourser la prime au lieu que l’on s’acharne sur Souscripteurs.

[651]     Par ailleurs, selon l’intimé, il n’y a pas de preuve qu’il s’est approprié la somme de 922.50$ puisque les assureurs n’ont jamais remboursé cette somme et qu’il n’y a pas de preuve qu’il a reçu ce montant.

Décisions sur les chefs 24 et 25

[652]     Le Comité arrive à la conclusion que l’intimé doit être reconnu coupable des chefs 24 et 25.

[653]     L’intimé a émis la police MTL-4637-99. Il a reçu du courtier Cloutier l’ensemble de la prime due des assurés. Le contrat a été résilié en date du 10 mai 2000 et des primes non acquises étaient donc dues aux assurés, au montant de 922.50$.

[654]     Pour le Comité, il revenait à l’intimé de rembourser cette somme et demander par la suite un crédit des assureurs avec qui il fait affaire, ce qu’il n’a pas fait.

[655]     Au contraire, l’intimé a tenté d’éluder sa responsabilité par le biais de supercherie en alléguant qu’il attendait la résiliation du créancier. L’intimé savait ou devait savoir que ce motif n’était qu’une tromperie visant à éviter qu’il doive rembourser la prime non acquise qu’il avait perçue.

[656]     Qui plus est, en vertu de son mandat avec les assureurs étrangers l’intimé devait leur faire parvenir une partie des primes perçues, le reste étant conservé pour payer des réclamations selon les limites du mandat et pour se payer ses propres commissions et frais administratifs. Or, depuis le mois de mars 2000, l’intimé a arrêté de faire quelque remise qu’il soit aux assureurs et il conserve désormais l’ensemble des primes perçues. L’intimé n’avait certes pas ce mandat.

[657]     Dans ces circonstances, lorsque l’intimé est avisé, le ou vers le 8 août 2000, par Cyr que le contrat des assurés est résilié au 10 mai 2000, il ne peut se retrancher derrière le non-paiement des assureurs. Il conserve l’entièreté des primes perçues. Cette explication pour ne pas effectuer le remboursement aux assurés n’est qu’une autre tromperie.

[658]     Clairement, l’intimé ne voulait tout simplement pas rembourser cette somme et, de ce fait son intention était de se l’approprier.

[659]     À cet égard, rappelons que la demande de résiliation a été transmise le ou vers le 8 août 2000 et que la seule démarche utile faite par l’intimé date du 16 juillet 2001, alors que Souscripteurs est en faillite.

Chef 26

[660]     Le chef 26 reproche ce qui suit à l’intimé :

Entre mars 1998 et juin 2001, alors qu’il agissait comme courtier spécial pour les assureurs externes Liberty Insurance Company, Excelsior Insurance Company et Gulf ressources Inc., a agi de façon négligente et imprudente et a tenue une gestion comptable malhabile en ce que :

a)     Il a fait défaut de réclamer desdits assureurs externes des sommes suffisantes pour faire face aux réclamations éventuelles;

b)    Il a conservé les primes perçues afin de faire face a d’éventuelles réclamations;

c)     Il a fait défaut de rapporter les pertes aux assureurs ;

d)    Il a été incapable de réconcilier la comptabilité des sommes transitant dans les comptes de Souscripteurs de Montréal et d’y départager la commission, les retraits nécessaires au paiement des réclamations et les remises dues aux assureurs externes;

e)     Il a continué à lier lesdits assureurs externes pour des nouvelles polices émises à des assurés alors qu’il savait ou aurait du savoir que ces assureurs externes étaient en conflit avec lui ;

f)     Il a été incapable d’expliquer avec précision comment, au moment de la faillite de Les Souscripteurs de Montréal, le compte des assureurs était vide;

le tout en contravention notamment aux dispositions des articles 44, 60 (3), 60 (11) et 60(14) section IV déontologie de Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec et 28, 29, 37(1) et 37(4) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

La preuve

[661]     La preuve sous ce chef recoupe une portion de la preuve présentée sous divers autres chefs de la plainte. Au risque d’être redondant, le Comité croit utile de revenir sur certains aspects de celle-ci.

[662]     Le 28 mai 2000 France Lacelle a avisé le BSF que le cautionnement requis pour agir à titre de courtier spécial n’a pas été renouvelé et donc, à compter du 15 mars 2000, il n’y avait personne chez Souscripteurs d’habilité à agir comme courtier spécial[161].

[663]     Des polices et avenants ont été émis après cette date par Souscripteurs au nom des assureurs étrangers Liberty, Excelsior et Gulf [162].

[664]     Par ailleurs, la preuve a révélé qu’à cette époque, soit en 1999 et 2000, Souscripteurs était en conflit  avec les assureurs étrangers avec qui elle faisait affaire en ce qui concerne le paiement de certaines réclamations d’assurés. Devant ce problème, l’intimé a écrit à chacun des courtiers avec qui Souscripteurs faisait affaire pour les informer qu’elle ne souscrirait pas de nouvelles polices auprès de ces assureurs. Cet avis a été transmis à la mi-juin 2000 et son texte se lit notamment comme suit :

« tous les contrats d’assurance souscrits pour le compte des assureurs étrangers par l’entremise de Les Souscripteurs de Montréal ne seront pas renouvelés à leurs échéances.

La raison pour laquelle nous avons cessé de souscrire est due (sic) au fait que nous éprouvons beaucoup de difficulté à obtenir le paiement des réclamations en cours de la part des assureurs étrangers depuis quelque temps. » (sic)[163]

[665]     Il est à noter que depuis au moins la fin de 1999 ou le début de l’an 2000, Souscripteurs avait cessé de transmettre la portion des primes due aux assureurs étrangers étant donné le défaut de ceux-ci de payer les réclamations des assurés.

[666]     À cet effet, l’intimé tient les propos suivants dans la lettre P-92 du 26 janvier 2001 adressée à Mme Carole Chauvin :

«8. Les Souscripteurs de Montréal Inc. ont cessé de produire des nouvelles affaires ainsi que de percevoir des primes pour ces assureurs en mars 2000.

(…)

12.  Lorsque nous nous sommes aperçus (sic) que les fonds détenus en fidéicommis pour le compte des assureurs étaient épuisés et que malgré des demandes répétées aux assureurs de nous faire parvenir des fonds additionnels pour rencontrer leurs obligations, même après plusieurs promesses de recevoir ces fonds, ceux-ci ne nous ont jamais expédiés. C’est pour cette raison que nous avons dû cesser de payer des réclamations pour le compte des assureurs. 

(…)

14. Ayant cessé depuis mars 2000 de souscrire n’ayant plus de personnel et aussi depuis août 2000 Les Souscripteurs de Montréal Inc. a reçu de la part de Liberty Insurance Company A.V.V. une lettre « cease and desist » nous intimant de ne plus les représenter nous n’avions d’autre choix que de cesser de donner le service sur les dossiers en cours. 

(…)

En novembre 1999 pour la première fois une demande a été faite à ces assureurs étrangers de payer directement une réclamation plus importante conformément à notre mandat de gestion afin de ne pas utiliser le fonds en fidéicommis, lequel était utilisé pour payer les petites réclamations. » (Nos soulignements)

[667]     De plus, dans une lettre du 13 décembre 2001 au Fonds d’indemnisation des services financiers l’intimé s’exprime notamment comme suit[164] :

« Après quelque temps, nous avons été obligés de retenir les fonds que nous faisions parvenir régulièrement, puis par la suite nous avons été obligés de cesser de souscrire et durant toute cette période nous avons continué d’honorer les réclamations régulières jusqu’à épuisement des fonds » (notre soulignement)

[668]     Par ailleurs, dans une lettre du 26 juin 2001 au Fonds d’indemnisation des services financiers, l’intimé déclare[165] :

« Suite à nos demandes de paiements dans un autre dossier de réclamation en fin d’année 1999 et début de l’an 2000, il était devenu plausible de ne pas être en mesure de recevoir les chèques de réclamations que nous avons demandés et avons à ce moment cessé d’écrire des contrats d’assurances en mars 2000, tout en gardant toutes les primes perçues pour le compte des assureurs dans le compte de banque des assureurs et en cessant de faire des remises aux assureurs tant et aussi longtemps que nous ne recevions pas les chèques de réclamations demandés. » (Nos soulignements)

[669]     Avant de conserver les primes perçues et à être remises aux assureurs, Souscripteurs payait les petites réclamations et informait l’assureur uniquement au moment de ce paiement[166].

[670]     À cet égard, dans le cas de Liberty, le « Binding Authority » indique ce qui suit quant à la notification de pertes à l’assureur :

« Carrier will receive immediate notification of any claims »[167].

[671]     Toujours dans le cas de Liberty, Me Vincent Gallo a témoigné à l’effet que les réclamations n’apparaissaient pas dans les bordereaux qui devaient être transmis mensuellement[168].

[672]     Souscripteurs a fait faillite le 7 juin 2001, et ce, suite à l’épuisement de ses fonds.

[673]     Selon le témoignage de Mme Chauvin, la faillite de Souscripteurs a intrigué le BSF qui s’est penché sur celle-ci. Trois liasses de documents, comportant notamment des bordereaux, ont été examinées par M. Serge Gagnon du BSF, lequel a également confectionné des tableaux récapitulatifs afin de comprendre le fonctionnement de Souscripteurs[169].

[674]     Mme Chauvin a témoigné à l’égard de ces tableaux en mentionnant qu’elle recherchait des explications pour comprendre la raison de la faillite de Souscripteurs. À cet égard, le compte en fidéicommis de Souscripteurs avait un solde de 189,167.77$ au 30 avril 2000[170]. Cependant, Mme Chauvin  a admis qu’elle ne savait pas si les chiffres contenus aux tableaux balancent et, de plus, elle n’a pas questionné l’intimé pour obtenir ses explications sur ce sujet.

Argumentation de la plaignante

[675]     La plaignante soumet que la relation entre le courtier et l’assureur est règlementée tant par la Loi sur les intermédiaires de marché que par la Loi sur la distribution de produits et services financiers. À cet effet, le courtier représente l’assuré auprès de l’assureur et dans certaines circonstances, il a le pouvoir de lier l’assureur par l’acceptation du contrat d’assurance.

[676]     Dans son rôle d’intermédiaire, le courtier doit agir avec prudence, probité et professionnalisme, et ce, afin de conserver la confiance de ceux avec qui il transige. Cette confiance doit d’ailleurs être maintenue tant avec l’assureur qu’avec l’assuré.

[677]     Pour la plaignante, le chef 26 illustre divers éléments du comportement de l’intimé qui démontre qu’il ne s’est pas conformé aux dispositions règlementaires et qu’il a failli aux obligations élémentaires de prudence, diligence et habileté.

[678]     Ainsi, le chef 26 reproche, entre autres, la façon négligente et imprudente de Souscripteurs et de son âme dirigeante, l’intimé, de tenir une comptabilité précise et adéquate des encaissements et décaissements effectués pour trois assureurs externes, Liberty, Excelsior, et Gulf.

[679]     Afin d’établir sa preuve, la plaignante a référé aux éléments de comptabilité provenant de l’intimé et qui indiquent comment étaient effectués les rapports, soit par la production de bordereaux. Or, selon la plaignante, ces bordereaux sont inexacts et simplement erronés.

[680]     D’ailleurs, selon la plaignante, l’intimé a déclaré que les pièces qui ont servi à la préparation des tableaux récapitulatifs P-86, P-87 et P-88 ne peuvent être expliqués et que ces documents sont en soi incompréhensibles. Toutefois et du même souffle, l’intimé a témoigné à l’effet qu’il a fait remise aux assureurs des sommes dues de façon précise, transparente et minutieuse et a indiqué que les bordereaux sont éloquents sur cette question.

[681]     Or, lors de son contre-interrogatoire, l’intimé a été incapable d’expliquer comment ont été rapportées et comptabilisées certaines primes reçues par Souscripteurs pour Liberty.

[682]     À cet effet, la plaignante rappelle que, tel qu’il appert de la pièce P-90, Liberty se plaignait dès le 28 août 2000 d’un manque de reddition de la part de l’intimé.

[683]     Selon la plaignante, il y a donc une preuve permettant d’établir une présomption de fait, grave, précise et concordante selon laquelle, bien que devant rendre compte des sommes administrées, aucune reddition n’était possible et la seule conclusion est donc que des sommes ont été appropriées ou diverties par l’intimé et Souscripteurs.

[684]     De même, dans ce chef, il est allégué que l’intimé, alors qu’il opérait Souscripteurs, a fait défaut de réclamer aux assureurs étrangers des sommes suffisantes pour faire face aux réclamations éventuelles. Selon la plaignante, l’intimé a admis ce fait et a admis qu’il conservait des primes pour faire face à des réclamations. L’intimé a omis de se conformer au « binding authority » intervenu entre Souscripteurs et Liberty (P-53) ainsi que Excelsior (P-60).

[685]     Pour terminer, la plaignante rappelle qu’il revient à l’intimé de démontrer qu’il a administré les sommes perçues des assurés de façon correcte en faisant les remises appropriées aux assureurs. Or, cette démonstration n’a pas été faite.

Argumentation de l’intimé

[686]      Pour l’intimé, les pièces P-86, P-87 et P-88 qui ont été fournies au BSF par l’intimé ne constituent aucunement un résumé complet des opérations, des mouvements de fonds ou des coûts d’opération de Souscripteurs. Après avoir remis ces documents au BSF, jamais une question ou un commentaire n’a été apporté à l’intimé par le BSF ou par le syndic.

[687]     Quant au chef 26(a), l’intimé plaide qu’il opérait depuis 1993 et faisait des affaires d’assurance pour le compte de différents assureurs. Durant toute cette période et jusqu’à la fin de 1999, il n’a jamais eu besoin de réclamer des sommes additionnelles, le fonds de réserve constitué avec les années ayant toujours été suffisant pour rencontrer les obligations des assureurs à même ces fonds. Selon l’intimé, il est donc faux de prétendre qu’il a fait défaut de réclamer des assureurs des fonds suffisants puisque ce n’est qu’à la fin des opérations que Souscripteurs a demandé des fonds supplémentaires.

[688]     En ce qui concerne le chef 26(b), l’intimé souligne que ce n’est que vers la fin de ses opérations que Souscripteurs a commencé à retenir les primes d’assurance, et ce, voyant que suite aux demandes de fonds additionnels ceux-ci n’arrivaient pas malgré des promesses en ce sens. À cet effet, l’intimé soumet que les rapports aux assureurs étaient faits régulièrement et les redevances aux assureurs, payées tous les mois.

[689]     Pour le chef 26 (c), l’intimé soumet qu’il est faux de prétendre que les pertes n’étaient pas rapportées aux assureurs. Selon lui, les pièces P-86, P-87 et P-88 prouvent le contraire puisqu’à chacun des rapports, une section décrivait les réclamations payées, façon de faire établie depuis 1993 avec tous les assureurs. Seul lors d’une importante réclamation, un rapport était transmis à l’assureur avant paiement.

[690]     Dans le cas du chef 26 (d), l’intimé soumet qu’il est faux de prétendre qu’il a été incapable de réconcilier la comptabilité puisqu’il était possible de savoir exactement par le biais des rapports P-86, P87 et P-88 les primes qui étaient dues aux assureurs, les primes qui étaient conservées au fonds de réclamations de même que les commissions dues à Souscripteurs. L’ensemble des primes perçues était déposé dans un compte en fidéicommis et, de ce compte, les sommes nécessaires étaient réparties aux différents intervenants en fonction des pièces P-86, P87 et P-88.

[691]     En ce qui concerne le chef 26 (e), l’intimé soumet que durant la période visée par ce chef, il n’était pas responsable de Souscripteurs et, lors de son retour, en avril 2000, il ne faisait plus de souscription de risques chez Les Souscripteurs.

[692]     Pour ce qui est du chef 26 (f), l’intimé soumet que Souscripteurs a cessé de souscrire des assurances en mars 2000, mais a continué de payer les réclamations restantes. De plus, en mars 2000, Souscripteurs demandait des fonds afin de payer les plus grosses réclamations, fonds qui ne se sont jamais matérialisés. Pour l’intimé, il est donc facile de comprendre qu’en juillet 2001, le compte des assureurs était vide.

[693]     L’intimé soumet par ailleurs qu’entre février 1999 et juin 2001 il n’était pas courtier spécial et ne faisait pas de souscription de risques. De plus, entre février 1999 et avril 2000, il n’était pas aux commandes de Souscripteurs et il ne pouvait donc pas être négligent ou imprudent de choses auxquelles il n’avait ni le contrôle ni la responsabilité.

[694]     Finalement, en ce qui concerne les tableaux récapitulatifs confectionnés par M. Gagnon du BSF (P-86, P-87 et P-88), l’intimé soumet que ceux-ci sont incomplets, ont été préparés sans consultation avec les personnes ayant préparé les rapports et ne reflètent pas la réalité des opérations de Souscripteurs.

Décisions sur le chef 26

Chef 26 (a)

[695]     Selon ce chef, l’intimé aurait fait défaut de réclamer aux assureurs étrangers des sommes suffisantes pour faire face aux réclamations éventuelles.

[696]     À ce sujet, le Comité considère que la preuve n’est pas prépondérante pour lui permettre de conclure que l’intimé n’a pas réclamé les fonds nécessaires pour permettre le paiement des réclamations éventuelles.

[697]     Ainsi, selon la preuve, l’intimé payait les réclamations des assurés à même un fonds de réserve détenu en fidéicommis. Ce fonds a fini par s’épuiser, ce qui a conduit à la faillite de Souscripteurs.

[698]     Selon le témoignage et les déclarations de l’intimé, lesquelles n’ont pas été contredites de façon à permettre au Comité d’écarter celles-ci, l’intimé se serait adressé aux assureurs étrangers pour recevoir des sommes supplémentaires pour faire face aux réclamations, mais malgré des promesses, ces fonds ne sont jamais arrivés. C’est d’ailleurs de cette façon et pour ce motif que l’intimé justifie qu’il ait alors été décidé de conserver toutes les primes dues aux assureurs étrangers[171].

[699]     En conséquence, le Comité déclare l’intimé non coupable sous le chef 26 (a) de la plainte.

Chef 26 (b)

[700]     Sous ce chef, il est reproché à l’intimé d’avoir conservé des primes perçues pour les assureurs étrangers afin de faire face à d’éventuelles réclamations.

[701]     L’intimé n’a pas nié avoir conservé des primes qui devaient être remises aux assureurs étrangers. Il a plutôt expliqué ce geste par le fait que les assureurs étrangers refusaient ou négligeaient de lui transmettre des fonds additionnels dont il avait besoin pour payer des réclamations[172].

[702]     Or, le Comité est d’avis qu’en agissant de la sorte, l’intimé a contrevenu à ses obligations professionnelles.

[703]     Ainsi et notamment, l’article 28 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages énonce que :

« Le représentant en assurance de dommages ne doit pas, sans excuse légitime, faire défaut de payer à l’assureur, sur demande ou à l’expiration d’un délai imparti, les primes qu’il a perçues pour lui »[173].

[704]     Le fait qu’un assureur étranger ne transmette pas les fonds additionnels demandés par l’intimé ne constituait pas une excuse légitime lui permettant de s’exonérer de cette obligation de remise d’autant plus que l’intimé se faisait alors justice à lui-même en conservant des sommes qui ne lui appartenaient pas.

[705]     Le Comité conclut donc qu’en faisant défaut de faire remise des primes perçues pour les assureurs étrangers, l’intimé a eu une conduite négligente, si ce n’est malhonnête, et contraire aux règles déontologiques. Le Comité reconnaît donc l’intimé coupable sous le chef 26 (b) de la plainte.

Chef 26 (c)

[706]     Le chef 26 (c) reproche à l’intimé d’avoir fait défaut de rapporter les pertes aux assureurs.

[707]     Selon le « binding authority » de Liberty, les pertes devaient lui être rapportées immédiatement. Or, il appert de la preuve et notamment des déclarations de l’intimé lui-même que dans le cas de réclamations autres que majeures, l’intimé n’avisait pas immédiatement l’assureur, mais uniquement lorsque ces réclamations auraient été payées[174].

[708]       Cette façon de faire de l’intimé était donc contraire aux règles établies avec l’assureur, ce qui a amené Liberty à refuser certaines réclamations, et ce, tel qu’il appert de la pièce P-90 et du témoignage de Me Vincent Gallo.

[709]     L’intimé a donc agi de façon négligente et imprudente vis-à-vis l’assureur en faisant défaut de lui fournir des renseignements qu’il se devait de lui divulguer, contrevenant ainsi notamment aux articles 29, 37 (1) et 37 (4) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages[175].

[710]     Le Comité conclut donc à la culpabilité de l’intimé sous le chef 26 (c) de la plainte.

Chef 26 (d)

[711]     Selon ce chef, l’intimé aurait été incapable de réconcilier la comptabilité des sommes transitant dans les comptes de Souscripteurs et d’y départager la commission, les retraits nécessaires au paiement des réclamations et les remises dues aux assureurs externes.

[712]     Pour le Comité, la plaignante n’a pas réussi à prouver de façon prépondérante que l’intimé a commis un manquement déontologique tel que relaté par ce chef.

[713]     En effet, la preuve présentée à ce sujet se constitue notamment des pièces P-86, P-87 et P-88. Or, ces documents sont incomplets et ne reflètent pas l’ensemble des opérations de Souscripteurs au point où l’on ne peut se fier aux tableaux récapitulatifs confectionnés par M. Gagnon du BSF.

[714]     À défaut d’une preuve prépondérante et devant des données incomplètes, le Comité ne peut conclure que l’intimé a agi de façon négligente ou imprudente ou a tenu une gestion comptable malhabile.

[715]     Au surplus, le Comité ne peut non plus conclure à une incapacité de l’intimé de réconcilier sa comptabilité alors que, de l’aveu même de Mme Chauvin, celle-ci ne l’a aucunement questionné sur ce sujet dans le cadre de son enquête.

[716]     Le Comité décide donc que l’intimé est non coupable sous le chef 26 (d) de la plainte.

Chef 26 (e)

[717]     Sous ce chef, il est reproché à l’intimé d’avoir continué à lier des assureurs étrangers pour de nouvelles polices émises à des assurés alors qu’il savait ou aurait dû savoir que ces assureurs étaient en conflit avec lui.

[718]     La preuve a révélé qu’à la fin de l’année 1999 ou au début de l’année 2000, Souscripteurs était en conflit avec ces assureurs étrangers. Ainsi, Souscripteurs, voyant son fonds de réserve baisser, tentait d’obtenir des fonds supplémentaires, mais ceux-ci, malgré des promesses, n’envoyaient pas d’argent. De même, certaines réclamations demeuraient impayées[176].

[719]     Ce conflit a dégénéré au point où Souscripteurs a transmis au mois de juin 2000 une lettre à tous les courtiers avec qui elle faisait affaire pour les aviser qu’il n’y aurait pas de renouvellement ou de nouvelles polices avec les assureurs étrangers en raison de la difficulté « à obtenir le paiement des réclamations en cours »[177]. Cette lettre passe par ailleurs sous silence le fait que Souscripteurs ne transmettait plus, depuis quelque temps déjà, la partie des primes dues à ces assureurs et le fait que ceux-ci ne payaient aucune réclamation.

[720]     De plus, Souscripteurs a alors décidé de ne plus transmettre aux assureurs étrangers la portion de prime perçue en leur nom.

[721]     Malgré ce conflit, cette difficulté à voir honorer des réclamations et obtenir des sommes afin de pouvoir payer des réclamations éventuelles, Souscripteurs a continué, néanmoins à lier ces assureurs, par le biais de nouvelles polices et d’avenants.

[722]     Ainsi, les polices MTL-4762-00 (P-49, page 3), MTL-4778-00 (P-50 pages 3 et 5) et MTL-4766-00 (P-51 page 2) ont été émises pour des périodes débutant respectivement les 17 mars 2000, 31 mars 2000 et 30 mars 2000 et liant, notamment Liberty et Excelsior.

[723]     Par ailleurs, des avenants ont été émis à l’égard de ces polices. Ainsi, tel qu’il appert des pièces P-49 page 2 (MTL-4762-00), P-50 page 1 (MTL-4778-00) et P-51 page 4 (MTL-4766-00), Souscripteurs a modifié la proportion des risques assumés par les assureurs externes Liberty et Excelsior, et ce, en date du 25 avril 2000.

[724]     En agissant de la sorte, l’intimé a clairement agi à l’encontre de ses devoirs professionnels et a fait preuve d’une désinvolture, témérité et négligence hors du commun. En effet, comment croire un instant que les futures réclamations à l’encontre de ces assureurs auraient quelque chance d’être honorées, alors qu’aucune prime ne leur était versée. Clairement, l’intimé avait un intérêt personnel de continuer, malgré tout, de lier ces assureurs, et ce, au détriment des assurés et de leurs courtiers à qui il a fait défaut de rendre compte de façon complète et transparente de cette situation de conflit et des conséquences prévisibles de celle-ci.

[725]     Il ne fait aucun doute pour le Comité que par son comportement, l’intimé a effectivement agi de façon négligente et imprudente, si ce n’est carrément malhonnête, contrevenant ainsi aux articles 37 (1) et 37 (4) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages[178].

[726]     Par ailleurs, l’intimé plaide que durant cette période, il n’était plus aux commandes de Souscripteurs.

[727]     Or, tel que le Comité a déjà conclu, l’intimé était l’âme dirigeante de Souscripteurs en tout temps visé par la plainte.

[728]     Ceci étant dit, le Comité fait également remarquer que les avenants P-49, P-50 et P-51 ont été émis après la date à laquelle l’intimé prétend avoir repris le contrôle de Souscripteurs. De même, la lettre P-45, qui relate bien incomplètement la relation entre Souscripteurs avec les assureurs étrangers est également postérieure à cette date.

[729]     Pour les motifs qui précèdent, le Comité déclare l’intimé coupable sous le chef 26 (e) de la plainte.

Chef 26 (f)

[730]     Ce chef reproche à l’intimé d’avoir été incapable d’expliquer avec précision comment, au moment de la faillite de Souscripteurs, le compte des assureurs était vide.

[731]     Or, l’intimé a expliqué dans le cadre de son témoignage et de ses déclarations produites en preuve[179], que le compte des assureurs s’est vidé en raison du paiement de réclamations par Souscripteurs, ce qui l’a inévitablement conduit vers la faillite. Cette explication peut susciter des doutes, notamment en regard des constatations du syndic que l’on retrouve à la pièce P-47 mais, rien ne permet de conclure, de façon prépondérante, qu’elle doit être écartée ou qu’elle est à ce point imprécise qu’elle permette d’en inférer que l’intimé a contrevenu au chef 26 (d), tel qu’il est rédigé.

[732]     À cet effet, le Comité ne peut conclure que l’intimé a agi de façon négligente et  imprudente et a tenu une gestion comptable malhabile en étant incapable d’expliquer avec précision comment le compte de Souscripteurs s’est retrouvé vide au moment de la faillite.

[733]     En conséquence, le Comité déclare que l’intimé ne peut être reconnu coupable sous le chef 26 (f) de la plainte.

IV- CONCLUSION

[734]     Pour les motifs qui précèdent, le Comité acquitte l’intimé sous les chefs suivants : 1(e), 1(f), 1(g), 5, 11, 12, 13, 14, 15, 20, 21, 22, 23, 26(a), 26(d) et 26(f).

[735]     Par ailleurs, le Comité reconnaît l’intimé coupable sous les chefs suivants : 1(a), 1(b), 1(c), 1(d), 2, 4, 6, 7, 8, 10, 16, 17, 18, 19, 24, 25, 26 (b), 26(c) et 26(e).

[736]     Finalement, le Comité autorise le retrait des chefs 3 et 9.

 

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

 

AUTORISE le retrait des chefs 3 et 9.

 

DÉCLARE l’intimé coupable des infractions reprochées aux chefs 1(a), 1(b), 1(c), 1(d), 2, 4, 6, 7, 8, 10, 16, 17, 18, 19, 24, 25, 26 (b), 26(c) et 26(e).

 

ACQUITTE  l’intimé des infractions reprochées aux chefs 1(e), 1(f), 1(g), 5, 11, 12, 13, 14, 15, 20, 21, 22, 23, 26(a), 26(d) et 26(f).

 

DEMANDE à la secrétaire du Comité de discipline de convoquer les parties pour l’audition sur sanction;           

 

LE TOUT frais à suivre.

 

 

________________________________

Me Marco Gaggino

Vice-Président du Comité de discipline

 

________________________________

Mme Francine Tousignant, C.d’A.Ass, courtier en assurance de dommages

Membre du Comité de discipline

 

________________________________

M. Richard Giroux, C.d’A.A., courtier en assurance de dommages

Membre du Comité de discipline

 

 

Me Jean-Pierre Morin

Procureur de la partie plaignante

 

 

M. André Lacelle

Se représentant seul

 

 

Dates d’audiences :

8, 9 et 10 novembre 2010, 6, 7, 8 et 9 décembre 2010 et le 9 mars 2011

 



[1] Le Comité de discipline a autorisé le retrait du chef 3, lors de l’audience du 9 décembre 2010.

[2] Le Comité de discipline a accordé le retrait du chef 9, lors de l’audience du 9 mars 2011.

[3] Pièces P-96 et P-97

[4] Requête en arrêt des procédures de la part de l’intimé décidée le 15 octobre 2009 et appel de l’intimé à la Cour du Québec rejeté le 1er février 2010; requête de l’intimé en retrait de certains chefs et requête en mandamus décidée le 25 octobre 2010;  requête de la plaignante pour permettre le dépôt de déclarations écrites décidée le 25 octobre 2010. De plus une requête de l’intimé en levée de sa radiation provisoire du 5 juillet 2002 a aussi été présentée, en cours d’instance sur le fond, le 8 novembre 2010 et décidée le 6 décembre 2010.

[5] D-8

[6] D-9

[7] Pièce P-1

[8] Pièces P-3 à P-6

[9] Pièce P-5

[10] Pièce P-46

[11] Pièce P-21

[12] Pièce P-23

[13] Pièces P-25 et P-26

[14] Pièce D-2

[15] Pièce P-16

[16] Pièce P-16

[17] Pièce P-9

[18] Pièce P-20

[19] Pièce D-2

[20] Pièce P-7

[21] Pièce P-25, clauses 1.3, 1.4 et 5.1.1

[22] Pièce P-30

[23] Pièce P-31

[24] Pièce P-32

[25] Pièce P-33

[26] Pièce P-33

[27] Pièce P-33

[28] Pièce P-34

[29] Pièce P-35

[30] Pièce P-41

[31] Pièce P-19

[32] Pièce P-16

[33] Pièce P-5

[34] Pièce P-9

[35] Pièce P-20

[36] Pièce P-38 

[37] Pièce P-41

[38] Pièce P-42, questions 16 et 17

[39] Pièce P-95 pp. 215 et ss.

[40] Question 19

[41] Par exemple, P-55 page 10 et 12

[42] Par exemple, pièces P-50, P-51, P-61, P-77, P-78

[43] Par exemple, pièce P-37 et P-55, page 29

[44] Pièce D-2

[45] Pièce P-94

[46] Pièces P-5 et D-6

[47] Pages 10-13 et 1-14

[48] Pièce P-97

[49] Pièce D-2

[50] Pièce P-5 et D-6

[51] Pièce P-42 question 19

[52] Pièce P-94

[53] Pièce P-28

[54] Pièce P-19

[55] Pièce P-8, chèques totalisant 158,593.70$ pour la période du 27 juillet 1999 au 11 janvier 2000. Voir aussi P-92, réponses 1 et 2

[56] Pièce P-13

[57] Pièce P-14

[58] I-15.1, r. 0.4

[59] Pièces P-11, P-12 et P19

[60] Pièce D-9

[61] Pièce P-9, page 24 (selon le témoignage de Mme Chauvin, la compagnie « C » réfère à Souscripteurs) et témoignage de M. Giosi

[62] Pièce P-15

[63] Pièce P-27

[64] Pièce P-17

[65] Pièce P-17

[66] Pièce P-9, page 20 du rapport

[67] Pièce P-29, pages 4-5

[68] Pièce P-29, pages 4 et 5

[69] Pièce P-18, page 7

[70] Pièce P-18, page 6

[71] Pièce P-20

[72] Prime brute moins la commission de 25% revenant à Souscripteurs

[73] Pièces P-46 et P-47

[74] Voir d’ailleurs à cet effet la pièce P-7 au point 9 (a)

[75] Pièce D-2

[76] Pièce P-7

[77] Pièce P-25, clauses 1.3, 1.4 et 5.1.1

[78] Pièce P-30

[79] Pièce P-31

[80] Pièce P-32

[81] Pièce P-33

[82] Pièce P-33

[83] Pièce P-33

[84] Pièce P-34

[85] Pièce P-35

[86] Pièce P-41

[87] Pièce P-16

[88] Pièce D-10

[89] Pièce P-5

[90] Pièce P-96

[91] Pièce P-97

[92] Pièce P-44

[93] Pièce P-45

[94] Pièce P-46

[95] Pièce P-46, page 3

[96] Pièce P-47

[97] Pièce P-47, sous « HISTORIQUE »

[98] Pièce P-47 sous « TRANSACTIONS RÉVISABLES ET PAIEMENTS PRÉFÉRENTIELS »

[99] Pièce P-47

[100] Pièce D-8

[101] Pièce P-47

[102] Pièce D-8

[103] I-15.1, r. 0.4

[105] Voir, par exemple, P-50, page 7

[106] AZ-98031056, Cour du Québec (Chambre civile)

[107] Pièces P-43 et P-44

[108] Pièce P-49 page 3

[109] Pièce P-49

[110] Pièce P-50

[111] Pièce P-51

[112] Pièce P-45

[113] Pièce P-92

[114] Pièce P-92

[115] Pièce P-92

[116] Pièce P-67

[117] Pièce P-44

[118] Pièce D-1

[119] Pièce P-52

[120] Pièce P-58

[121] Pièce P-77

[122] Pièce P-78

[123] Pièce P-53

[124] Pièce D-11

[125] Pièce P-54

[126] Pièce P-55

[127] Pièce P-55

[128] Pièce P-55

[129] Pièce P-55 pages 10 à 28

[130] Pièce P-55 pages 28 à 33

[131] Pièce P-56, question 27

[132] Pièce P-57

[133] Pièce P-58

[134] Pièce P-59

[135] Pièce P-60

[136] Pièce P-61

[137] Pièce P-62, page 6

[138] Pièce P-62, page 2

[139] Pièce P-49, page 2

[140] Pièce P-61

[141] Pièce P-61, page 4

[142] Pièce P-69

[143] Pièce P-107

[144] Pièce P-94

[145] Pièce P-67 pages 1 et 2

[146] Pièce P-92, page 7

[147] Pièce P-72 et particulièrement l’article 381(1) de la Loi sur les assurances du Manitoba reproduit à cette pièce

[148] Pièce P-73

[149] Pièce P-73

[150] Pièce P-74

[151] Pièce P-74

[152] Pièce P-76

[153] Pièce P-76

[154] Pièce P-82

[155] Pièce P-83

[156] Pièce P-83

[157] Pièce P-83

[158] Pièce P-84

[159] Pièce P-85

[160] Pièce P-46

[161] Pièces P-43 et P-44

[162] Pièces P-49, P-50, P-51

[163] Pièce P-45

[164] Pièce P-92

[165] Pièce P-67

[166] Pièce P-56, questions 16 et 17

[167] Pièce P-53

[168] Voir aussi les pièces P-90 et P-53

[169] Pièces P-86, P-87 et P-88

[170] Pièce P-109

[171] Voir P-92, question 12

[172] Voir notamment P-67, questions 2 et 3

[173] Voir aussi l’article 44 du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec.

[174] Pièce P-56, questions 16 et 17

[175] Voir aussi les articles 60(3), 60(11) et 60(1) du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec.

[176] Voir P-67 et P-92

[177] Pièce P-45

[178] Voir aussi les articles 60 (3) et 60 (11) du Règlement de l’Association des courtiers d’assurances de la province de Québec.

[179] Voir notamment P-67 et P-92

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