Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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 COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

 

N° :

2011-08-03(A)

 

 

DATE :

28 février 2012

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Patrick de Niverville, avocat

Président

Mme Gracia Hamel, agent  en assurance de dommages

Membre

M. Raymond Savoie, agent en assurance de dommages

Membre

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CAROLE CHAUVIN, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante

c.

ALAIN BERNARD, agent en assurance de dommages

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

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[1]       Le 2 février 2012, le comité de discipline procédait à l’audition de la plainte dans le dossier no 2011-08-03(A);

[2]       Me Jean-Pierre Morin agissait pour la partie plaignante et Me Jean-Pierre Barrette assurait la défense de l’intimé;

[3]       La plainte amendée reproche à l’intimé d’avoir :

 

1-      Entre le 27 août 2003 et le 27 août 2007 soit lors des renouvellements successifs du contrat d’assurance habitation portant le numéro R-105431401 pour sa cliente Mme R.A., a fait défaut de prendre quelque moyen que ce soit pour que la garantie offerte par le contrat réponde aux besoins de sa cliente  le tout en contravention aux dispositions de l’article 39 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers.

 

L'intimé s'est ainsi rendu passible pour les infractions ci-haut mentionnées des sanctions prévues à l'article 156 du Code des professions.

[4]       D’entrée de jeu, l’intimé, par la voie de son procureur, enregistra un plaidoyer de culpabilité;

[5]       L’intimé fut donc déclaré coupable, séance tenante, de l’infraction reprochée;

[6]       Me Morin informa alors le comité des suggestions communes des parties quant à la sanction devant être imposée;

[7]       A cet égard, afin de permettre au comité d’analyser adéquatement la suggestion des parties, Me Morin déposa de consentement les pièces suivantes :

 

P-1 :   Attestation de certification et fiche signalétique d’Alain Bernard;

 

P-2 :   En liasse, plainte de Mme R.A. en date du 29 mars 2010 accompagnée (sic) des annexes à la plainte;

 

P-3 :   Résumé d’une conversation téléphonique entre Mme R.A. et Mme Luce Raymond en date du 1er juin 2010;

 

P-4 :   Lettre de Mme Luce Raymond à Mme R.A. du 8 juin 2010;

 

P-5 :   En liasse, lettre réponse de Mme R.A. reçue par la ChAD le 13 juillet 2010 avec documents requis;

 

P-6 :   En liasse, lettre de Mme Luce Raymond à Mme Diane Beauchamps en date du 8 juin 2010 et réponse de Mme Beauchamps reçue à la ChAD le 30 juin 2010 avec documents requis;

 

P-7 :   Lettre de Mme Carole Chauvin à Mme Diane Beauchamps en date du 1er juin 2011 et réponse de Mme Beauchamps reçue à la ChAD le 21 juin 2011;

 

P-8 :   Résumé d’une conversation téléphonique de Mme Luce Raymond et de M. Alain Bernard en date du 3 juin 2010;

 

P-9 :   En liasse, lettre de Mme Luce Raymond à M. Alain Bernard du 8 juin 2010 et réponse de M. Bernard reçue à la ChAD le 30 juin 2010 avec documents requis;

 

P-10 : Lettre de Mme Carole Chauvin à M. Alain Bernard du 1er juin 2011 et réponse de M. Bernard reçue à la ChAD le 21 juin 2011;

 

P-11 : En liasse, lettre de Mme Carole Chauvin à M. Alain Bernard du 6 juillet 2011 et réponse de M. Alain Bernard reçue à la ChAD le 27 juillet 2011 avec les documents requis.

 

[8]       En l’espèce, les parties recommandent d’imposer une amende 5 000 $                   et le paiement des déboursés;

II.       Preuve sur sanction

[9]       La preuve a essentiellement consisté au témoignage de l’intimé et de la syndic;

[10]    Brièvement résumée, la preuve démontre:

           que l’assurée, suite à son divorce, achète une nouvelle propriété;

           comme elle est déjà assurée avec la Promutuel, elle demande une nouvelle police d’assurance mais personne ne vérifie réellement ses besoins;

           arrive alors en juillet 2009 un dégât d’eau et elle constate alors qu’elle n’a pas la protection contre le refoulement d’égouts (pièce P-2);

 

[11]    De son côté, l’intimé produit deux (2) documents :

I-1 :      Lettre-type expédiée à tous les clients au moment de leur renouvellement d’assurance;

I-2 :      Un relevé du dossier du représentant démontrant que celui-c a suivi 60 heures de formation pour la période 2010-2011;

 

[12]    L’intimé précise également que :

           Il regrette les inconvénients causés à l’assurée;

           Il a pris les moyens nécessaires pour éviter la répétition des gestes reprochés;

           Au moment des faits, il cumulait déjà 10 ans d’expérience dans l’assurance;

           Il n’a pas d’antécédents disciplinaires;

           Il prend le temps, à chaque année, de perfectionner ses connaissances par divers cours, tel qu’il appert de la pièce I-2;

           Enfin, la protection contre le refoulement d’égouts avait été offerte en 2008 à l’assurée, mais celle-ci l’aurait refusée d’où l’amendement à la plainte pour retirer les années 2008 et 2009;

[13]    La syndic a également témoigné afin de préciser :

           Que l’avis de renouvellement (I-1) acheminé aux clients de l’intimé est insuffisant et ne répond pas aux exigences de l’article 39 de la LDPSF;

           Que l’intimé devrait se voir imposer l’un ou l’autre des cours suivants :

1)  Le courtier et l’agent d’assurance : compétences élémentaires;

2)  L’analyse de portefeuille en assurance de dommages;

 

III.      Argumentation

[14]    Les deux procureurs s’entendent pour suggérer l’imposition d’une amende de 5 000 $;

[15]    Par contre, il y a divergence d’opinion quant à la nécessité de recommander l’imposition d’un cours de perfectionnement;

 

IV.     Analyse et décision

A)   Renouvellement (article 39 de la LDPSF)

[16]    Le comité estime qu’il est nécessaire de rappeler le contenu de l’obligation imposée aux représentants par l’article 39 de la LDPSF;

[17]    À cet égard, il convient de se référer à une conférence donnée par                      Me Céline Gervais[1], laquelle écrivait :

« L’article 39 L.D.P.S.F. prévoit spécifiquement les obligations du courtier au moment du renouvellement de la police :

39.  À l’occasion du renouvellement d’une police d’assurance, l’agent ou le courtier en assurance de dommages doit prendre les moyens requis pour que la garantie offerte réponde aux besoins du client.

La Cour d’appel a rappelé que l’obligation édictée par l’article 39 L.D.P.S.F. en était une de moyen et non de résultat, mais qui exigeait cependant plus d’efforts que ceux qui avaient été déployés par le courtier dans l’affaire Lambert Jutras, plus particulièrement auprès d’un client peu sophistiqué en matière d’assurance. La Cour supérieure, dont le jugement a été confirmé, nous rappelait dans cette même affaire que l’article 39 L.D.P.S.F. a haussé la barre quant aux obligations du courtier lors des renouvellements d’assurance, et que celui-ci ne peut plus se contenter de n’être qu’une courroie de transmission des documents. L’obligation faite au courtier à cette occasion doit être particulièrement centrée sur le montant de l’assurance.

Par contre, le courtier n’est pas garant d’une garantie de taux fixe des primes promise (sic) par l’assureur. »[2]

          (Nos soulignements)

 

[18]    Il faut donc conclure de ces enseignements que l’obligation prévue à l’article 39 de la LDPSF est particulièrement importante pour la protection du public;

 

B)   La sanction

[19]    La sanction suggérée par les parties, soit 1 000 $ par année d’infraction pour un total de 5 000 $, est jugée raisonnable et appropriée aux faits particuliers du présent dossier et elle sera donc entérinée par le comité;

[20]    Par contre, le comité estime que la protection du public ne nécessite pas que l’intimé se voit imposer l’obligation de suivre un cours de perfectionnement, alors qu’il a déjà à son actif plus de 60 heures (pièce I-2) de formation continue, soit beaucoup plus que le minimum requis par les règlements de la Chambre;

 

PAR CES MOTIFS, LE COMITE DE DISCIPLINE :

 

PREND acte du plaidoyer de culpabilité de l’intimé;

DÉCLARE l’intimé coupable de l’infraction reprochée dans la plainte amendée     no 2011-08-03(A) en regard de l’article 39 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers;

IMPOSE à l’intimé une amende de 1 000 $ pour chaque année d’infraction pour un total de 5 000 $;

CONDAMNE l’intimé au paiement de tous les déboursés;

ACCORDE à l’intimé un délai de 90 jours pour acquitter le montant de l’amende et des déboursés, calculés à compter de la signification de la présente décision;

 

 

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Me Patrick de Niverville, avocat

Président du comité de discipline

 

 

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Mme Garcia Hamel, agent en

assurance de dommages

Membre du comité de discipline

 

 

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M. Raymond Savoie, agent en

assurance de dommages

Membre du comité de discipline

 

Me Jean-Pierre Morin

Procureur du syndic

 

Me Jean-Pierre Barrette

Procureur de l’intimé

 

Date de l’audience : 2 février 2012

 



[1]    C. Gervais. La responsabilité professionnelle du courtier d’assurance. Développements récents en droit des assurances, 2011, vol. 337, p. 43 à 68;

[2]    Op. cit., note 1, p. 52 e 53;

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