Contenu de la décision
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CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE MONTRÉAL |
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Nos : |
2010-09-01(C) |
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2010-09-02(C)
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DATE : |
1er mai 2012 |
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LE COMITÉ : |
Me Patrick de Niverville, avocat |
Président |
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M. Marc-Henri Germain, C. d’A.A., A.V.A., courtier en assurance de dommages |
Membre |
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M. Luc Bellefeuille, C.d’A.A., courtier en assurance de dommages
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Membre |
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CAROLE CHAUVIN, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages |
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Partie plaignante |
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c.
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PHILIPPE LAREAU, C.d’A.A., courtier en assurance de dommages et MARIE LAREAU, courtier en assurance de dommages des particuliers
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Parties intimées |
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et
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PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC |
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Mis-en-cause |
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DÉCISION INTERLOCUTOIRE |
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[1] Le 16 avril 2012, le comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages procédait à l’audition d’une requête présentée par le Procureur général du Québec intitulée:
« Requête préliminaire en irrecevabilité du Procureur général du Québec sur l’avis d’intention amendé daté du 16 janvier 2012 en vertu de l’article 95 C.p.c. »
[2] Brièvement résumée, cette requête reproche aux intimés d’avoir fait parvenir au Procureur général du Québec un avis d’intention de facture imprécise et de manière tardive;
[3] Avant d’examiner le bien-fondé de cette requête en irrecevabilité, il convient de rappeler les faits à l’origine du présent dossier;
I. La trame factuelle
[4] Chacun des intimés fait actuellement l’objet d’une plainte disciplinaire leur reprochant diverses infractions disciplinaires en vertu de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (L.R.Q., c. D-9.2) (ci-après « LDPSF ») et du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;
[5] Dès le début des dossiers, ceux-ci ont présenté une requête en rejet des plaintes pour divers motifs, notamment :
• En alléguant que la preuve divulguée ne permettait pas de soutenir les chefs d’accusation;
• En plaidant l’invalidité des chefs pour cause d’imprécision et de dédoublement;
[6] Le 22 février 2011, le comité de discipline rejetait les requêtes en rejet présentées par les deux intimés[1];
[7] Le 2 juin 2011, les intimés signifiaient au Procureur général du Québec (ci-après le « PGQ ») un premier avis suivant l’article 95 C.p.c. visant à faire déclarer invalides les articles 352, 353, 354, 355, 356, 359, 363, 365, 371, 372 et 377 de la LDPSF;
[8] Les intimés allèguent au soutien de cet avis, les motifs suivants :
• Que les membres du comité de discipline n’auraient pas été nommés dans des conditions garantissant le respect des droits fondamentaux des intimés à l’indépendance et à l’impartialité du tribunal prévus à l’article 23 de la Charte québécoise;
• Que la durée déterminée des mandats du président et des membres du comité est insuffisante pour garantir leur indépendance et leur impartialité;
• Que les membres du comité sont en conflit d’intérêts de par leurs activités de courtier en assurance de dommages;
[9] Finalement, des auditions sur culpabilté furent tenues les 12 et 13 octobre 2011 et les 16 et 17 janvier 2012;
[10] Le 16 janvier 2012, au cours de son témoignage, la syndic, Mme Carole Chauvin, affirma que les plaintes disciplinaires portées depuis 1999 avaient toutes été accueillies, ou presque, par le comité de discipline[2];
[11] C’est alors que l’avocat de la défense annonça son intention de modifier l’avis donné sous l’article 95 C.p.c.;
[12] Ainsi, la journée même de l’audition du 16 janvier 2012, il faisait signifier au PGQ un avis amendé alléguant un nouveau motif d’inconstitutionnalité;
[13] Le PGQ s’est immédiatement objecté à l’addition de ce moyen et tel que requis par le comité, il fit valoir ses moyens d’irrecevabilité par le biais d’une requête écrite dûment signifiée à toutes les parties le 14 mars 2012 et pour laquelle une audition fut tenue le 16 avril 2012;
II. L’argumentation
2.1 Par le Procureur général du Québec
[14] Essentiellement, l’avocate du PGQ plaide :
• L’imprécision de l’avis;
• La tardivité de l’avis;
[15] Concernant l’imprécision de l’avis amendé, le PGQ appuie ses prétentions sur les précédents jurisprudentiels mentionnés dans sa requête ainsi que sur certaines décisions qui ont été produites à l’audience, soit :
• Thibault c. Collège des médecins du Québec, [1998] CanLII (QCCA);
• Montréal c. Salois, 1993 CanLII 4029 (QCCA);
• Québec (P.G.) c. Gallant, 2002, J.Q. 10269 (C.Q.), p. 2-3;
• Adolescent (Dans la situation de l’), [2000] no AZ-50084813 (C.Q.), p. 5-6;
• R. c. 2866-3011 Québec inc., [1995] no AZ-96031027 (C.M.);
• Corp. prof. des médecins c. Labonté, 2005 CanLII 49424 (QCCA);
• Corp. prof. des médecins c. Drouin, [1990] J.Q. no 2639, p. 2-4;
• Béliveau c. Comité de discipline du Barreau du Québec, (1991) AZ-91021543 (C.S.), p. 5 et 6;
• Eaton c. Conseil scolaire du Comté de Brant, [1997] 1 R.C.S. 241, p. 264-265;
[16] Fort de cette jurisprudence, l’avocate du PGQ plaide :
• Que l’article 95 C.p.c. est d’ordre public et que ces dispositions sont impératives;
• Que l’avis doit énoncer de façon précise les prétentions des intimés et les moyens sur lesquels ils se fondent;
• Que l’intérêt public exige qu’un débat soulevant la constitutionnalité d’une loi soit clairement circonscrit;
[17] Suivant le PGQ, il y a présomption de validité de la loi d’où l’importance et la nécessité de préciser suffisamment les motifs d’inconstitutionnalité;
[18] En conséquence, Me Bouchard plaide que l’avis amendé du 16 janvier 2012 est vague, imprécis et insuffisant. De façon plus particulière, elle ajoute que :
• L’avis amendé n’expose pas précisément en quoi les faits sur lesquels a témoigné la syndic feraient en sorte de porter atteinte à l’indépendance et à l’impartialité du comité;
• L’avis amendé ne permet pas de tenir un débat circonscrit et intelligible sur les questions constitutionnelles;
• L’imprécision de l’avis amendé porte atteinte au droit du PGQ de défendre la validité de la loi au nom de l’intérêt public;
[19] Concernant la tardivité de l’avis amendé, le PGQ plaide que le délai de 30 jours prévu à l’article 95 C.p.c. constitue un délai de rigueur;
2.2 Par les intimés
[20] Les intimés, par la voix de leur procureur, plaident la suffisance et la précision de l’avis amendé;
[21] Quant à la question de la tardivité, Me Robillard rappelle au comité que le PGQ aura, en pratique, bénéficié d’un délai de quatre (4) mois puisque la suite des auditions est prévue pour les 22 et 25 mai 2012;
[22] D’autre part, en se fondant sur l’arrêt Thibault[3], il plaide qu’il fut lui-même pris par surprise, en plein milieu du procès, par la déclaration de la syndic et par conséquent, il a réagi en temps opportun compte tenu des circonstances particulières du présent dossier;
[23] Par ailleurs, sur la question de l’imprécision du deuxième avis selon l’article 95 C.p.c., il plaide que ses arguments sont suffisamment énoncés, notamment au paragraphe 12 dudit avis, soit :
• La durée du mandat du président et des membres du comité;
• Le conflit d’intérêts des membres du comité qui exercent dans le domaine de l’assurance;
[24] Enfin, il ajoute qu’il ne s’agit que d’un nouveau fait qui vient appuyer le même énoncé, soit le manque d’indépendance et d’impartialité du comité;
[25] Finalement, selon le procureur des intimés, l’absence de ce nouveau fait priverait les tribunaux supérieurs d’un élément important pour l’examen de la constitutionnalité des dispositions législatives contestées;
III. Analyse et décision
3.1 La tardivité de l’avis amendé
[26] Le comité de discipline considère que l’avis amendé du 16 janvier 2012 n’est pas tardif pour les motifs ci-après exposés;
[27] Le comité estime que le procureur des intimés a fait preuve de diligence et qu’il a réagi de façon rapide et ordonnée;
[28] En effet, la journée même où il a pris connaissance du témoignage de la syndic, il faisait signifier au PGQ un nouvel avis d’intention;
[29] Par contre, l’avis amendé fut reçu sous réserve des moyens d’irrecevabilité soulevés par le PGQ;
[30] Enfin, le PGQ a bénéficié, par le simple écoulement du temps, d’un délai bien supérieur à celui de 30 jours car la suite des auditions fut fixée pour mai 2012;
[31] En pratique, le PGQ aura donc bénéficié d’un délai de quatre (4) mois pour lui permettre de préparer et de présenter sa défense à l’encontre de ce nouvel avis amendé;
[32] Dans les circonstances, le comité estime que l’avis amendé n’est pas irrecevable pour cause de tardivité;
[33] À cet égard, il y a lieu de rappeler les sages paroles de l’honorable juge Baudouin dans l’une des innombrables affaires ayant opposé Antoine Thibault au Collège des médecins du Québec[4] :
« … il est tout à fait concevable qu'au cours d'un procès déjà engagé, un problème constitutionnel nouveau surgisse, problème qui n'avait pu être envisagé auparavant. Dans ces cas, les tribunaux ont le devoir d'assouplir la règle et de trouver, au cas par cas, le moyen d'accommoder cette règle aux circonstances particulières de l'espèce. »[5]
[34] Maintenant, qu’en est-il de l’argument fondé sur l’imprécision?
3.2 Le caractère imprécis de l’avis amendé
[35] De façon préliminaire, mentionnons que les intimés n’avaient pas à fournir mot à mot et dans le menu détail les tenants et aboutissants de leurs arguments constitutionnels;
[36] Cela étant dit, les intimés devaient, par contre, fournir suffisamment d’informations pour éclairer le comité sur les questions en litige et pour permettre au PGQ de défendre la validité de la loi;
[37] Le comité estime que l’avis original du 2 juin 2011 est déjà à la limite de l’acceptable puisqu’il ne fait qu’énoncer de façon générale les moyens et les arguments à l’appui de la demande d’inconstitutionnalité, par contre, celui du 16 janvier 2012 est nettement insuffisant;
[38] En effet, l’avis amendé du 16 janvier 2012 n’indique pas et ne précise pas en quoi les faits sur lesquels a témoigné la syndic pourraient porter atteinte d’une quelconque façon à l’indépendance et à l’impartialité du comité en vertu de l’article 23 de la Charte québécoise;
[39] Mais il y a plus, l’affirmation de la syndic ne constitue pas un «fait» mais une simple opinion qui n’est pas appuyée par aucune étude statistique, ni aucune preuve documentaire;
[40] À titre d’exemple, on ne fait aucune distinction entre, d’une part, les dossiers contestés et, d’autre part, ceux dans lesquels les intimés ont plaidé coupable et pour lesquels le comité s’est contenté de prendre acte du plaidoyer de culpabilité et d’entériner la sanction recommandée par les deux parties;
[41] Dans les circonstances, l’imprécision de l’avis amendé est telle qu’il constitue, ni plus ni moins, qu’une expédition de pêche à travers tous les dossiers entendus par le comité de discipline au cours des 13 dernières années, soit de 1999 à 2012;
[42] À cet égard, rappelons que tant l’avis original que l’avis amendé doit être conforme aux exigences impératives de l’article 95 C.p.c., sous peine d’entraîner le rejet des moyens constitutionnels;
[43] Pour ces motifs, vu le caractère vague et imprécis de l’amendement, le comité n’a d’autre choix que de rejeter l’avis amendé et de déclarer celui-ci nul et non-avenu;
PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :
ACCUEILLE la requête préliminaire en irrecevabilité du Procureur général du Québec;
REJETTE l’avis amendé du 16 janvier 2012;
RÉITÈRE aux parties que la suite des auditions sont prévues aux 22 et 25 mai et aux 11, 13, 14 et 15 juin 2012;
LE TOUT, frais à suivre.
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________________________________ Me Patrick de Niverville, avocat Président du comité de
discipline __________________________________ M. Marc-Henri Germain, C. d’A.A., A.V.A., courtier en assurance de dommages Membre du comité de discipline
__________________________________ M. Luc Bellefeuille, C.d’A.A., courtier en assurance de dommages Membre du comité de discipline |
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Me Claude G. Leduc (absent) |
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Procureur de la syndic |
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Me Yves Robillard |
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Procureur des intimés |
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Me Diane Bouchard |
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Procureur général du Québec |
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Mis-en-cause |
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Date d’audience : |
16 avril 2012 |
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