Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

 

N° :

2012-10-01(C)

 

DATE :

18 juin 2013

______________________________________________________________________

 

LE COMITÉ :

Me Patrick de Niverville, avocat

Président

Mme  Anne-Marie Bourgeois, courtier en assurance

de dommages

Membre

Mme France Laflèche, C.d’A.A., courtier en assurance

de dommages

Membre

______________________________________________________________________

 

CAROLE CHAUVIN, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

 

Partie plaignante

c.

 

JEAN BOISSONNEAULT, courtier en assurance de dommages

 

Partie intimée

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DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

______________________________________________________________________

 

[1]       Le 3 juin 2013, le Comité de discipline procédait à l’audition de la plainte dans le dossier no 2012-10-01(C);

[2]       Me Claude G. Leduc agissait pour la partie plaignante et l’intimé était représenté par Me Éric Lemay;

[3]       La plainte reproche à l’intimé d’avoir :

 

1.      Dans les mois précédant le mois de janvier 2012 et le ou vers le 5 janvier 2012, a ou a permis que soient faites des représentations trompeuses susceptibles d’induire le public en erreur en laissant croire que le site internet Courtierweb.com était celui d’un cabinet habilité à vendre des produits d’assurance de dommages, de personnes, hypothécaires et en services financiers, alors qu’il n’en est rien, le tout en contravention avec l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment les articles 2, 15 et 37(7) dudit code;

2.      Dans les mois précédant le mois de janvier 2012 et le ou vers le 5 janvier 2012, a ou a permis que soient faites des représentations trompeuses susceptibles d’induire le public en erreur en laissant croire que le site internet Accesdirect.com était celui d’un cabinet habilité à vendre des produits d’assurance de dommages et de personnes, alors qu’il n’en est rien, le tout en contravention avec l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment les articles 2, 15 et 37(7) dudit code;

3.      Depuis le ou vers le 14 mai 2012 et dans les mois précédents, a ou a permis que soient faites des représentations trompeuses susceptibles d’induire le public en erreur en laissant croire que les sites internet Consugo.ca et Consugo.com étaient ceux d’un cabinet habilité à vendre des produits d’assurance de dommages et de personnes, alors qu’il n’en est rien, le tout en contravention avec l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment les articles 2, 15 et 37(7) dudit code;

4.      Depuis le 30 avril 2012 et dans les mois précédents jusqu’au 4 octobre 2012, a ou a permis que soient faites des représentations trompeuses susceptibles d’induire le public en erreur en laissant croire sur la page Facebook de Courtierweb.com qu’Assurance123.com est une compagnie d’assurance alors qu’il n’en est rien, le tout en contravention avec l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment les articles 2, 15 et 37(7) dudit code;

5.      Depuis le 5 janvier 2012 et ce, jusqu’au 4 octobre 2012, a ou a permis que soient faites des représentations trompeuses susceptibles d’induire le public en erreur en laissant croire que les sites internet Courtierweb.com et AccesDirect.com étaient ceux de cabinets de courtage habilités à vendre ou à distribuer des produits d’assurance des assureurs Promutuel, Pafco, L’Unique assurances générales, Intact assurance, Groupe Ledor mutuelle d’assurance, Lloyds, Échelon general insurance company, Aviva Élite et Jevco, alors que ces dernières n’ont jamais consenti à l’utilisation de leur signature corporative et ne distribuaient aucun produit d’assurance par l’intermédiaire de ces sites internet, le tout en contravention avec l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et le Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, notamment les articles 2, 15, 16 et 37(7) dudit code;

L’intimé s'étant ainsi rendu passible pour les infractions ci-haut mentionnées des sanctions prévues à l'article 156 (c) du Code des professions.

 

[4]       Dès sa comparution, l'intimé enregistra un plaidoyer de culpabilité à l'encontre des cinq (5) chefs d'accusation mentionnés à la plainte;

[5]       L'intimé fut donc déclaré coupable, séance tenante, des infractions reprochées aux chefs nos 1 à 5 de la plainte;

[6]       Me Leduc informa alors le Comité que les parties s'étaient entendues sur une recommandation commune;

 

I.          Preuve sur sanction

[7]       Les pièces P-1 à P-6 furent déposées de consentement afin de tenir lieu de témoignage;

[8]       Brièvement résumé, l’intimé faisait de la publicité sur divers sites internet par le biais d’une société par actions;

[9]       Les représentations trompeuses alléguées aux différents chefs d’accusation proviennent du fait que les sites internet étaient opérés par la compagnie de l’intimé plutôt que par un cabinet d’assurance dûment accrédité;

[10]    Par contre, à la décharge de l’intimé, les clients, une fois recueillis, étaient alors référés au cabinet Essor;

[11]    Lors de son témoignage, l’intimé a souligné qu’il n’avait aucune intention malhonnête et qu’aucun des clients ne s’était plaint de la situation;

[12]    Enfin, celui-ci s’est engagé à corriger, sans plus tarder, les divers sites internet;

 

II.         Recommandations communes

[13]    Me Leduc, à titre de procureur de la syndic, recommande, de concert avec Me Lemay, l'imposition des sanctions suivantes:

      Chef nos 1 à 4:         une suspension de 30 jours

      Chef no 5:                une amende de 8 000 $

 

[14]    De  plus, tous les déboursés seront à la charge de l'intimé;

[15]    Me Leduc a également pris le soin d'indiquer au Comité les facteurs objectifs et subjectifs ayant justifié cette recommandation commune;

[16]    Parmi les facteurs objectifs, le procureur a surtout insisté sur les suivants:

      La protection du public;

      La gravité objective des infractions;

      Les revenus générés par les infractions;

 

[17]    Quant aux facteurs subjectifs, Me Leduc identifie les suivants:

      Le plaidoyer de culpabilité de l’intimé enregistré dès la première occasion;

      Son absence d'antécédents disciplinaires;

      Sa volonté de s’amender;

 

[18]    Pour sa part, Me Lemay a confirmé le caractère conjoint des recommandations;

 

II.       Analyse et décision

[19]    Vu les négociations intervenues entre les parties, il convient de citer certains extraits du jugement rendu par le Tribunal des professions dans l'affaire Langlois c. Dentistes[1]:

 

[44]  La détermination de la sanction disciplinaire elle-même résulte de l'exercice du pouvoir discrétionnaire qu'a le Conseil aux termes de l'article 156 alinéa 1 du Code d'imposer l'une ou l'autre des sanctions énumérées dans la disposition.

 

[45]  Certes, il s'agit d'un pouvoir discrétionnaire dont l'exercice se trouve fortement encadré par divers facteurs avec en toile de fond la protection du public. Il n'en demeure pas moins que la sanction constitue le fruit d'une réflexion laissant place à une marge d'appréciation.

[46]  La négociation du plaidoyer, il s'agit bien de l'expression maintes fois utilisée par la doctrine et la jurisprudence, qui s'accompagne inévitablement de discussions portant sur la sanction (ou peine en matière pénale) jouit depuis longtemps d'une reconnaissance quasi juridique[17]. Il n'est pas utile aux fins du pourvoi de se pencher sur toutes les considérations en faveur des plaidoyers et sanctions que les parties conviennent de présenter au tribunal compétent. Mais de manière générale, les tribunaux estiment que les suggestions communes présument d'une discussion préalable franche entre les parties à l'aune de leurs intérêts respectifs; de ce fait, elles comportent « un caractère persuasif »[18].

 

[47]  Conséquemment, les suggestions communes ne devraient pas être écartées afin de ne pas discréditer un important outil contribuant à l'efficacité du système de justice tant criminel que disciplinaire, à moins qu'elles soient déraisonnables, inadéquates, contraires à l'intérêt public et de nature à déconsidérer l'administration de la justice[19].

          (Nos soulignements)

 

[20]    Conformément aux enseignements du Tribunal des professions, la recommandation commune des parties  sera entérinée par le Comité de discipline;

[21]    De l'avis du Comité, les sanctions suggérées sont justes et raisonnables et reflètent la gravité objective des infractions et, de ce fait, elles comportent un caractère dissuasif[2];

[22]    D'autre part, elles tiennent compte du plaidoyer de culpabilité de l'intimé lequel justifie à lui seul une réduction de la sentence[3];

[23]    Mais il y a plus, ce genre d’infraction entraîne habituellement l’imposition d’une simple amende[4] sans période de suspension;

[24]    Par contre, les parties ont tenu compte du fait que l’intimé avait déjà été membre du Conseil d’administration de la Chambre;

[25]    Cet élément constitue un facteur particulièrement aggravant[5], d’où la recommandation d’imposer une période de suspension;

[26]    Pour ces motifs, les sanctions suggérées seront entérinées par le Comité;

 

PAR CES MOTIFS, LE COMITE DE DISCIPLINE :

 

DÉCLARE l’intimé coupable des chefs nos 1 à 5 pour avoir contrevenu à l’article 15 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

PRONONCE un arrêt conditionnel des procédures à l’égard de toutes les autres dispositions législatives et réglementaires alléguées au soutien des chefs nos 1 à 5;

 

IMPOSE à l'intimé les sanctions suivantes:

      Chefs nos 1 à 4:                   une suspension temporaire de 30 jours sur chacun des chefs nos 1 à 4. Lesdites suspensions seront purgées de façon concurrente

      Chef no 5:                une amende de 8 000 $

 

ORDONNE à la secrétaire du Comité de discipline de faire publier un avis de suspension temporaire, le tout en conformité avec la loi ;

CONDAMNE l'intimé au paiement de tous les déboursés, y compris les frais de publication de l’avis de suspension temporaire ;

ACCORDE à l'intimé un délai de 30 jours pour acquitter le montant de l’amende et les déboursés, calculé à compter du 31e jour suivant la signification de la présente décision;

 

 

 

 

 

 

_________________________________

Me Patrick de Niverville, avocat

Président du Comité de discipline

 

 

_______________________________

Mme  Anne-Marie Bourgeois, courtier en assurance de dommages

Membre du Comité de discipline

 

 

______________________________

Mme France Laflèche, C.d’A.A., courtier en assurance de dommages Membre du Comité de discipline

 

 

Me Claude G. Leduc

Procureur de la syndic

 

Me Eric Lemay

Procureur de l’intimé

 

Date de l’audience : 3 juin 2013

 



[1]     Langlois c. Dentistes, 2012 QCTP 52 (CanLII);

[2]     Op. cit., note 1;

[3]     Boudreau c. Avocats, 2013 QCTP 22;

[4]     CHAD c. Tardif, 2013 CanLII 6876;

[5]     CHAD c. Bernard, 2007 CanLII 26743, confirmé par 2008 QCCQ 9077;

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