Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES CANADA PROVINCE DE QUÉBEC

No: 2023-09-02(E) DATE : 2 4 janvier 2024

LE COMITÉ : Me Patrick de Niverville, avocat Me Benoit Loyer, expert en sinistre en assurance de dommages des particuliers M. Daniel Balthazar, expert en sinistre

Président Membre

Membre

Me YANNICK CHARTRAND, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante c. JESSIE MONDÉSIR, expert en sinistre en assurance de dommages des particuliers

Partie intimée

DÉCISION SUR CULPABILITÉ

ORDONNANCE DE NON-PUBLICATION, DE NON-DIFFUSION ET DE NON-DIVULGATION DU NOM DES ASSURÉS ET / OU DES CONSOMMATEURS ET DE TOUTE INFORMATION OU RENSEIGNEMENT PERMETTANT DE LES IDENTIFIER ET MENTIONNÉS DANS LA PLAINTE ET LES DOCUMENTS PRODUITS À SON SOUTIEN, PLUS PARTICULIÈREMENT LES PIÈCES P-2 ET P-3, LE TOUT AFIN DE PROTÉGER LEUR VIE PRIVÉE CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS (R.L.R.Q., c. C-26)

[1] Le 8 décembre 2023, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages se réunissait pour procéder à l’audition de la plainte numéro 2023-09-02(E) ;

[2] Le syndic était alors représenté par Me Mathieu Cardinal et, de son côté, l’intimée assurait personnellement sa défense ;

I. [3]

La plainte L’intimée fait l’objet d’une plainte comportant un seul chef d’accusation, soit :

1. Entre le ou vers le 8 juillet 2022 et le ou vers le 22 novembre 2022, l’intimée a exercé ses activités

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de façon négligente dans le cadre de la réclamation de P.B. (n o de sinistre XXXXXXXXX) concernant le vol de certains de ses effets personnels, le tout en contravention de l’article 58 (1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ c. D-9.2, r.4).

[4] L’intimée ayant choisi de contester la plainte, les parties ont alors procédé à l’audition sur culpabilité ;

II. Preuve sur culpabilité A) Par le syndic [5] Dans le cadre de sa preuve, le syndic a fait entendre deux (2) témoins, soit l’un des assurés (P.B.) ainsi que Me Bazinet, syndique adjointe et avocate à la Chambre de l’assurance de dommages ;

[6] [7]

De plus, les pièces P-1 à P-37 furent déposées de consentement ; Essentiellement, le témoignage de l’assuré (P.B.) a permis d’établir que : Vers le 11 ou 12 juin 2022, il s’est notamment fait dérober ses vélos de course et son équipement de camping alors entreposés dans sa maison ;

À la demande de l’assureur, il a fait une plainte à la police ; Il aurait communiqué le numéro de rapport d’événement à l’assureur en laissant un message sur la boîte vocale de M. Labrecque, un collègue de l’intimée ;

Par la suite, au cours du mois de juillet, il a fait plusieurs appels téléphoniques, mais sans succès ;

Finalement, le 28 juillet 2022, il est informé par courriel que son dossier a été transféré à l’intimée, Mme Mondésir (P-8 et P-9) ;

À la même date, il envoie à l’intimée un courriel l’informant du numéro du rapport d’événement auquel il joint certains documents à l’appui de sa réclamation (P- 10) ;

Ce n’est que le 12 août 2022 qu’il reçoit un premier courriel (P-11) de l’intimée lui demandant de remplir certains formulaires et de fournir d’autres preuves ;

Il retourne le tout à l’intimée le 24 août 2022 (P-12) ; Finalement, malgré plusieurs appels téléphoniques et divers courriels, il est sans nouvelle de l’intimée durant plusieurs mois ;

Ce n’est que le 16 novembre 2022 que l’intimée communique par téléphone avec l’assuré (P-28) ;

Cela dit, sa réclamation est acceptée et payée vers la fin novembre 2022 (P-31 et P-33) ;

2023-09-02(E) PAGE: 3 [8] En conclusion, il considère que les délais qu’il a endurés sont anormaux et, d’ailleurs, il s’en est plaint ;

[9] D’autre part, le témoignage de Me Bazinet a surtout consisté à résumer les diverses pièces documentaires qui, par ailleurs, avaient déjà été produites de consentement ;

[10] Cela dit, elle a particulièrement insisté sur les réponses fournies par l’intimée au questionnaire qui lui avait été adressé par le syndic en chef (P-37) ;

B) Preuve de l’intimée [11] L’intimée a témoigné pour sa défense ; [12] Essentiellement, elle prétend avoir travaillé le dossier même si ses interventions n’ont pas été notées au dossier ;

[13] Elle insiste sur le fait qu’elle n’a jamais eu d’intention malveillante visant à retarder le traitement du dossier ;

[14] Elle ajoute qu’une des raisons du retard est le manque de personnel suite à la pandémie ;

[15] Selon elle, le principal retard provient du fait que le dossier lui fut confié par le service des enquêtes spéciales de l’assureur en raison de ce qu’elle qualifie la présence de divers « drapeaux rouges » tels que :

Le changement de date du vol survenu le 11 juin, mais rapporté le 20 juin ; De l’impossibilité d’obtenir le rapport de police ; Du fait que l’assuré est retourné au poste de police pour modifier sa déclaration ; [16] Mais il y a plus, en contre-interrogatoire, elle a reconnu toutes et chacune des réponses qu’elle avait fournies au syndic (P-37) ;

[17] Ce faisant, elle reconnaît qu’elle n’a commencé à traiter le dossier de l’assuré qu’à compter du 16 novembre 2022 (P-28) ;

[18] Finalement, elle n’a pas complété son dossier d’enquête, préférant accorder à l’assuré un « doute raisonnable » et de payer la réclamation (P-33) ;

[19] C’est à la lumière de cette preuve que le Comité devra décider du bien-fondé de la plainte ;

2023-09-02(E) PAGE: 4 III. Argumentation A) Par le syndic [20] Me Cardinal, après avoir résumé de façon minutieuse la preuve entendue, conclut que le syndic s’est déchargé de son fardeau de preuve en démontrant que l’intimée avait été négligente dans le cadre de la réclamation de l’assuré P.B. ;

[21] Il souligne qu’un délai de quatre (4) mois pour traiter une réclamation est anormal et excessif ;

[22] De plus, il souligne que les explications fournies par l’intimée sont grotesques ; [23] De surcroît, il souligne que l’article 4.3 du contrat d’assurance, ainsi que l’article 2473 du Code civil du Québec, prévoient que l’assureur est tenu de payer l’indemnité dans les 60 jours de la réception de la réclamation ;

[24] En conclusion, il souligne que l’intimée n’a jamais vraiment enquêté ce dossier et a plutôt choisi de s’en débarrasser en accordant le « bénéfice du doute » à l’assuré après un délai d’attente de plus de quatre (4) mois ;

[25] Enfin, il produit une série de décisions à l’appui de ses prétentions, soit : ChAD c. Goulet, 2012 CanLII 48662 (QC CDCHAD) ; ChAD c. Lévesque, 2013 CanLII 4787 (QC CDCHAD) ; ChAD c. Paquet, 2013 CanLII 33399 (QC CDCHAD) ; [26] Cela étant établi, il demande au Comité d’accueillir la plainte du syndic ; B) Par l’intimée [27] Essentiellement, l’intimée, après avoir résumé sa version des faits, a surtout insisté pour dire qu’elle était de bonne foi et qu’elle n’a jamais agi de façon malveillante envers l’assuré ;

[28] Elle conclut en répétant qu’elle n’est pas coupable de l’infraction reprochée ; IV. Analyse et décision [29] La preuve, tant testimoniale que documentaire, démontre sans l’ombre d’un doute que l’intimée a exercé ses activités de façon négligente dans le cadre de la réclamation de l’assuré P.B. ;

[30] D’autre part, le Comité n’accorde aucune crédibilité ni fiabilité au témoignage de l’intimée, lequel est truffé d’invraisemblances et de demi-vérités, ainsi, elle prétend être intervenue à plusieurs reprises dans le traitement du dossier de l’assuré P.B. tout en

2023-09-02(E) PAGE: 5 reconnaissant qu’aucune de ses démarches ne fut notée au dossier ; [31] À cet égard, le Comité rappelle les enseignements de la Cour d’appel dans l’arrêt Bérubé 1 suivant lesquels « ce qui n’a pas été noté, n’a pas en principe été fait » 2 ;

[32] La preuve démontre plutôt que l’intimée a commencé à réellement s’occuper du dossier qu’au moment le Bureau du syndic l’a interpellée par courriel (P-23) pour l’informer de la réception de la plainte de l’assuré (P-19) ;

[33] Considérant l’ensemble de la preuve et l’invraisemblance des explications fournies par l’intimée, le Comité n’a d’autre choix que de conclure que l’intimée, par ses faits, gestes et omissions, a été négligente dans l’exercice de ses activités dans le cadre de la réclamation de l’assuré P.B..

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

DÉCLARE l’intimée coupable du chef 1 de la plainte et plus particulièrement comme suit :

Chef 1:

pour avoir contrevenu à l’article 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistres (R.L.R.Q., c. D-9.2, r. 4)

DEMANDE à la secrétaire du Comité de convoquer les parties pour l’audition sur sanction ;

LE TOUT, frais à suivre.

___________________________________ Me Patrick de Niverville, avocat Président

___________________________________ Me Benoit Loyer, expert en sinistre en assurance de dommages des particuliers Membre

Me Mathieu Cardinal Avocat de la partie plaignante

___________________________________ M. Daniel Balthazar, expert en sinistre Membre

Mme Jessie Mondésir (personnellement) Partie intimée

Date d’audience : 8 décembre 2023 (par visioconférence)

1 Bérubé c. Hôpital Hôtel-Dieu de Lévis, 2003 CanLII 55071 (QC CA) ; 2 Ibid., par. 24;

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