Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES CANADA PROVINCE DE QUÉBEC

: 2021-02-04(C) DATE : 5 d écembre 2023

LE COMITÉ : Me Daniel M. Fabien, avocat Mme Maryse Pelletier, courtier en assurance de dommages

Vice-président Membre

ME YANNICK CHARTRAND, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

c.

Partie plaignante

STANLEY RENÉ, courtier en assurance de dommages des particuliers Partie intimée

DÉCISION SUR LA SANCTION

I.

LE CONTEXTE

[1] Le 11 avril 2023, le Comité rend sa décision sur la culpabilité de l’intimé dans le présent dossier

1 .

[2] À la suite d’un procès de 14 jours, l’intimé est déclaré coupable sur 15 des 16 chefs d’accusation de la plainte logée contre lui par le syndic.

1 ChAD c. René, 2023 CanLII 78240 (QC CDCHAD);

2021-02-04(C) PAGE : 2 [3] Afin de mieux comprendre les comportements déontologiques dérogatoires de l’intimé, il est utile ici de reproduire chacun des chefs pour lesquels il a été reconnu coupable :

À l’égard de S.T. et de G.G. 1. Entre les ou vers les 10 août et 10 septembre 2018, dans le cadre de la souscription du contrat d’assurance habitation no 04054909 auprès d’Optimum société d’assurance inc. pour la période du 10 septembre 2018 au 10 septembre 2019, a exercé ses activités de façon négligente ou malhonnête et/ou a fait défaut de transmettre à l’assureur toutes les informations nécessaires à l’appréciation du risque, en omettant de déclarer à l’assureur que l’assurée S.T. exploitait un salon de beauté dans l’immeuble à assurer, en contravention avec l’article 37(7 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

2.

3.

Le ou vers le 10 janvier 2019, à la suite de l’annulation ab initio du contrat d’assurance habitation no 04054909 par Optimum société d’assurance inc. au 10 septembre 2018, a exercé ses activités de façon négligente ou malhonnête et/ou a fait une déclaration fausse, trompeuse ou susceptible d’induire en erreur, en déclarant à l’assureur qu’il croyait que les activités d’esthétique de l’assurée S.T. se déroulaient dans « une bâtisse adjacente complètement de la maison », en contravention avec l’article 37(7 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

Le ou vers le 10 janvier 2019, à la suite de l’annulation ab initio du contrat d’assurance habitation no 04054909 par Optimum société d’assurance inc. au 10 septembre 2018, alors qu’il tentait de trouver un nouvel assureur pour assurer l’immeuble des assurés, a exercé ses activités de façon négligente ou malhonnête et/ou a fait des déclarations fausses, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur, en déclarant à AssurExpert, Cabinet d’assurances et de services financiers :

a.

b.

c.

que l’immeuble des assurés était actuellement assuré par Optimum société d’assurance inc. alors que tel n’était pas le cas;

qu’Optimum société d’assurance inc. n’avait ni refusé de les renouveler, ni annulé leur contrat alors qu’Optimum société d’assurance inc. venait d’annuler leur contrat ab initio;

que la toiture de l’immeuble allait être refaite dans les deux ans alors que l’assurée S.T. lui avait déclaré qu’elle serait refaite dans trois ou quatre ans;

en contravention avec l’article 37(7 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

2021-02-04(C) PAGE : 3 4. Le ou vers le 10 janvier 2019, à la suite de l’annulation ab initio du contrat d’assurance habitation no 04054909 par Optimum société d’assurance inc. au 10 septembre 2018, alors qu’il tentait de trouver un nouvel assureur pour assurer l’immeuble des assurés, a exercé ses activités de façon négligente ou malhonnête et/ou a fait des déclarations fausses, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur, en déclarant à Elliott Morin & associés ltée que la toiture de l’immeuble serait refaite en février alors que l’assurée S.T. lui avait déclaré qu’elle serait refaite dans trois ou quatre ans, en contravention avec l’article 37(7 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

5.

Le ou vers le 10 janvier 2019, à la suite de l’annulation ab initio du contrat d’assurance habitation no 04054909 par Optimum société d’assurance inc. au 10 septembre 2018, a fait défaut d’exécuter son mandat avec transparence, en laissant croire à l’assurée S.T. qu’Optimum société d’assurance inc. avait été informée qu’elle exploitait un salon de beauté dans l’immeuble à assurer, en contravention avec l’article 20 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

À l’égard de L.C. 6. Acquittement de l’intimé À l’égard d’A.J. 7. Entre les ou vers les 9 et 24 septembre 2018, à la suite de la résiliation du contrat d’assurance habitation no 358575880 souscrit auprès de Pafco, compagnie d’assurance, pour cause d’aggravation de risque, a exercé ses activités de façon négligente et/ou a fait défaut d’agir en conseiller consciencieux, en omettant de procurer à l’assurée de nouvelles protections d’assurance pour son immeuble, laissant ainsi le risque à découvert, en contravention avec l’article 26 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

8.

Le ou vers le 12 septembre 2018, dans le cadre de la souscription du contrat d’assurance habitation no 04054937 pour l’assurée auprès d’Optimum société d’assurance inc., a exercé ses activités de façon négligente ou malhonnête et/ou a fait défaut de transmettre à l’assureur toutes les informations nécessaires à l’appréciation du risque, en omettant d’indiquer dans la proposition d’assurance que l’assureur antérieur de l’assurée avait résilié son contrat d’assurance habitation pour aggravation de risque, en contravention avec l’article 37(1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

À l’égard de R.L.G. 9. Le ou vers le 4 février 2019, dans le cadre de la souscription du contrat d’assurance automobile no 558692283 auprès de Pafco, compagnie

2021-02-04(C) PAGE : 4 d’assurance, pour l’assuré, a exercé ses activités de façon négligente ou malhonnête et/ou a fait défaut de transmettre ou de s’assurer que soient transmises à l’assureur toutes les informations nécessaires à l’appréciation du risque, en lui transmettant des renseignements faux, trompeurs ou susceptibles de l’induire en erreur, soit :

a.

b.

c.

d.

e.

en inscrivant ou en permettant que soit inscrit sur la proposition d’assurance que l’assuré détenait un permis de conduire depuis le 17 avril 2004, alors que le permis de conduire de l’assuré n’était valide que depuis le 18 décembre 2018;

en inscrivant ou en permettant que soit inscrit sur le compu-quote que la date du permis de conduire de l’assuré est le 17 avril 2004, alors que le permis de conduire de l’assuré n’était valide que depuis le 18 décembre 2018;

en inscrivant ou en permettant que soit inscrit sur la proposition d’assurance que l’assuré avait comme assurance automobile antérieure le contrat no F05-4454 émis par Intact Compagnie d’assurance, alors que tel contrat était émis seulement au nom de sa conjointe et qu’il n’y était pas un assuré désigné;

en inscrivant ou en permettant que soit inscrit sur le compu-quote que l’assuré était assuré auprès d’Intact Compagnie d’assurance depuis le 1 er février 2015, alors que tel n’était pas le cas;

en inscrivant ou en permettant que soit inscrit sur le compu-quote que l’assuré était propriétaire d’un véhicule depuis le 17 avril 2004, alors qu’il était propriétaire depuis le ou vers le 1 er février 2019;

en contravention avec l’article 37(1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

10.

Le ou vers le 4 février 2019, lors de la souscription du contrat d’assurance automobile no 558692283 auprès de Pafco, compagnie d’assurance, pour l’assuré, a exercé ses activités de façon négligente ou malhonnête, en transmettant à l’assuré une confirmation provisoire d’assurance automobile comportant des renseignements faux, trompeurs ou susceptibles de l’induire en erreur, soit :

a.

b.

c.

indiquant le nom et les coordonnées du cabinet Impact Assurances à titre de courtier, alors que ledit contrat a été souscrit par l’entremise du cabinet 1 ère Assurance;

indiquant une période d’assurance du 17 mars 2018 au 17 mars 2018, alors que la période d’assurance était du 4 février 2019 au 4 février 2020;

indiquant le 9 mars 2018 comme date de la confirmation provisoire, alors que telle confirmation provisoire fut émise le 4 février 2019;

2021-02-04(C) PAGE : 5 en contravention avec l’article 37(1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

11.

Entre les ou vers les 1 er février et 6 mars 2019, a été négligent dans sa tenue de dossier de l’assuré, notamment en omettant de noter adéquatement les conversations téléphoniques avec l’assuré, leur teneur, les conseils et explications donnés, les instructions reçues de l’assuré et les décisions prises, en contravention avec l’article 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome (RLRQ c. D-9.2, r.2);

À l’égard d’A.M. 12. Le ou vers le 25 janvier 2019, lors de la souscription du contrat d’assurance automobile no 558689289 auprès de Pafco, compagnie d’assurance, pour l’assuré, a exercé ses activités de façon négligente ou malhonnête, en transmettant à l’assuré une confirmation provisoire d’assurance automobile comportant des renseignements faux, trompeurs ou susceptibles de l’induire en erreur, soit :

a.

b.

c.

d.

e.

indiquant le nom et les coordonnées du cabinet Impact Assurances à titre de courtier, alors que ledit contrat a été souscrit par l’entremise du cabinet 1 ère Assurance;

indiquant une période d’assurance du 23 janvier 2018 au 23 janvier 2019, alors que la période d’assurance était du 25 janvier 2019 au 25 janvier 2020;

indiquant le 23 janvier 2019 comme date de la confirmation provisoire, alors que telle confirmation provisoire fut émise le 25 janvier 2019;

indiquant une franchise de 250 $ pour la protection B3 alors que cette franchise était de 500 $;

indiquant que le numéro de contrat était le 688081 alors qu’il était le 558689289;

en contravention avec l’article 37(1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

À l’égard de J.C. 13. Le ou vers le 29 janvier 2019, à la suite de la souscription du contrat d’assurance automobile no 558689207 auprès de Pafco, compagnie d’assurance, pour l’assurée, pour la période du 24 janvier 2019 au 24 janvier 2020, a exercé ses activités de façon négligente et/ou n’a pas agi en conseiller consciencieux, en demandant le non-renouvellement du contrat d’assurance automobile no A25760301 de l’assurée auprès d’Optimum société d’assurance inc. au 6 janvier 2019, créant ainsi un

2021-02-04(C) PAGE : 6 découvert d’assurance du 6 au 24 janvier 2019, en contravention avec l’article 37(1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

À l’égard de M.D. 14. Entre les ou vers les 19 décembre 2018 et 15 février 2019, à la suite de la résiliation pour non-paiement du contrat d’assurance habitation no 04053935 souscrit auprès d’Optimum société d’assurance inc., pour l’assurée, puis de sa remise en vigueur, a exercé ses activités de façon négligente et/ou a fait défaut d’agir en conseiller consciencieux, en omettant de mettre en place un nouveau contrat de financement de la prime d’assurance pour l’assurée, en contravention avec l’article 37(1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

À l’égard de G.K. 15. Entre les ou vers les 18 décembre 2018 et 8 janvier 2019, à la suite de la souscription du contrat d’assurance automobile no A26185801 auprès d’Optimum société d’assurance inc., pour l’assuré, a fait défaut de rendre compte de l’exécution de son mandat et/ou d’agir en conseiller consciencieux, en omettant d’informer l’assuré de la date et du montant du premier prélèvement préautorisé en paiement de la prime d’assurance, en contravention avec l’article 37(1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

16.

Le ou vers le 10 janvier 2019, à la suite de la souscription du contrat d’assurance automobile no A26185801 auprès d’Optimum société d’assurance inc., pour l’assuré, a exercé ses activités de façon négligente ou malhonnête et/ou a fait à l’assuré des déclarations fausses, trompeuses ou susceptibles de l’induire en erreur, soit :

a.

b.

qu’Optimum société d’assurance inc. lui avait envoyé le contrat d’assurance par la poste, alors que tel n’était pas le cas;

qu’il n’avait pas encore reçu le contrat d’assurance, alors que tel n’était pas le cas;

en contravention avec l’article 37(7 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5).

[4] L’intimé a été déclaré coupable d’avoir enfreint les dispositions suivantes du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages :

Art. 20. Le représentant en assurance de dommages ne doit pas, par fraude, supercherie ou autres moyens dolosifs, éluder ou tenter d’éluder sa responsabilité civile professionnelle ou celle du cabinet ou de la société autonome au sein duquel il exerce ses activités (chef 5).

2021-02-04(C)

PAGE : 7

Art. 26. Le représentant en assurance de dommages doit, dans les plus brefs délais, donner suite aux instructions qu'il reçoit de son client ou le prévenir qu'il lui est impossible de s'y conformer. Il doit également informer son client lorsqu'il constate un empêchement à la continuation de son mandat (chef 7).

Art. 37. Constitue un manquement à la déontologie, le fait pour le représentant en assurance de dommages d'agir à l'encontre de l'honneur et de la dignité de la profession, notamment :

d'exercer ses activités de façon malhonnête ou négligente; (chefs 8, 9, 10, 12, 13, 14 et 15)

de faire une déclaration fausse, trompeuse ou susceptible d’induire en erreur; (chefs 1, 2, 3, 4 et 16)

[5] Quant au chef 11, l’intimé a également enfreint l’article 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome qui stipule ce qui suit :

Art. 21. Les dossiers clients qu’un cabinet, un représentant autonome ou une société autonome inscrit dans la discipline de l’assurance de dommages doit tenir sur chacun de ses clients dans l’exercice de ses activités doivent contenir les mentions suivantes:

son nom; le montant, l’objet et la nature de la couverture d’assurance; le numéro de police et les dates de l’émission du contrat et de la signature de la proposition, le cas échéant;

le mode de paiement et la date de paiement du contrat d’assurance; la liste d’évaluation des biens de l’assuré transmise par celui-ci, le cas échéant.

Tout autre renseignement ou document découlant des produits vendus ou des services rendus recueillis auprès du client doit également y être inscrit ou déposé.

[6] Relativement aux chefs d’accusation 1, 2, 3, 4 et 5, il y a lieu de préciser que l’intimé a été déclaré coupable d’avoir fait des déclarations fausses, trompeuses ou susceptibles d’induire en erreur.

[7] Sur les chefs 8 et 9, il est tout aussi important de souligner que l’intimé a été reconnu coupable d’avoir exercé ses activités de façon malhonnête.

2021-02-04(C) PAGE : 8 [8] Cela étant dit, le 7 septembre 2023, les parties sont réunies par une vidéoconférence Zoom pour les représentations sur la sanction.

[9]

Me Mathieu Cardinal représente le syndic et Me Jean-Claude Dubé, l’intimé.

II.

LA PREUVE SUR SANCTION

[10] De consentement, la pièce SP-1 est déposée en preuve par le syndic. Il s’agit de l’attestation à jour du droit de pratique de l’intimé.

[11] Me Dubé avise le Comité qu’il désire faire entendre l’intimé. Dûment assermenté, l’intimé témoigne et discute essentiellement de son parcours professionnel, de sa situation familiale et financière.

[12] L’intimé est d’avis qu’il a la capacité financière de payer des amendes. Il requiert l’imposition d’une amende sur chacun des chefs.

III.

REPRÉSENTATIONS DE LA PARTIE PLAIGNANTE

[13] Me Cardinal informe le Comité qu’il sollicite l’imposition des sanctions suivantes à l’intimé :

o o o o o o o o o o o

Chef 1 : une radiation temporaire de 36 mois; Chef 2 : une radiation temporaire de 36 mois; Chefs 3a., b. et c. : une radiation temporaire de 36 mois; Chef 4 : une radiation temporaire de 36 mois; Chef 5 : une radiation temporaire de 36 mois; Chef 7 : une radiation temporaire de 2 mois; Chef 8 : une radiation temporaire de 36 mois; Chefs 9a., b., c., d. et e. : une radiation temporaire de 36 mois; Chef 10 : une radiation temporaire de 2 mois; Chef 11 : une radiation temporaire de 15 jours; Chefs 12a., b., c., d. et e. : une radiation temporaire de 2 mois;

2021-02-04(C) PAGE : 9 o Chef 13 : une radiation temporaire de 2 mois; o Chef 14 : une radiation temporaire de 2 mois; o Chef 15 : une radiation temporaire de 2 mois; o Chefs 16a. et b. : une radiation temporaire de 36 mois; o Que les périodes de radiation soient purgées de façon concurrente entre elles, pour une radiation temporaire totale de 36 mois.

[14] Me Cardinal nous fait part des facteurs atténuants et aggravants, tant objectifs que subjectifs, qui justifient l’imposition d’une telle sanction.

[15] Concernant les facteurs objectifs aggravants, le procureur du syndic souligne les éléments suivants :

o

o

o

o

le lien direct avec l’exercice de la profession;

que plusieurs infractions sont liées à la malhonnêteté de l’intimé;

le caractère répétitif de celles-ci;

le nombre d’assurés (7) et la durée des actes répréhensibles (7 mois).

[16] Quant aux facteurs subjectifs aggravants, le procureur met l’emphase sur les circonstances suivantes, soit :

o

o

o

o

o

l’absence de crédibilité du témoignage de l’intimé et sa version évolutive;

son absence totale de conscientisation;

le fait qu’il était l’un des dirigeants responsables d’Impact Assurances inc.;

le manque de probité et de rigueur de l’intimé;

un risque de récidive important.

2021-02-04(C) PAGE : 10 [17] Le procureur nous rappelle que l’objectif primordial de la sanction disciplinaire est la protection du public et cite notamment le passage du Comité de discipline de l’ACAIQ dans l’affaire Metayer2, l’on peut lire :

[25] L’intimé plaide qu’il s’agit d’une première infraction, mais le comité estime qu’il ne s’agit pas d’un facteur atténuant : la probité ne s’apprend pas sur les bancs de l’école.

(Caractères gras ajoutés) [18] Relativement aux facteurs atténuants, Me Cardinal soulève tout de même l’absence d’antécédent disciplinaire de l’intimé, sa situation familiale et le droit pour le professionnel de gagner sa vie.

[19] Au soutien de sa suggestion de sanction, le procureur du syndic nous renvoie notamment aux précédents jurisprudentiels suivants :

[20]

o o o o o o o o

Malus c. Tribunal des professions, 2020 QCCS 1681 (CanLII) Brochu c. Médecins, 2002 QCTP 2 (CanLII) ChAD c. Verret, 2019 CanLII 47053 (QC CDCHAD) ChAD c. Barrette, 2019 CanLII 40792 (QC CDCHAD) ChAD c. Ouellet, 2020 CanLII 71265 (QC CDCHAD) ChAD c. Boisvert, 2020 CanLII 28853 (QC CDCHAD) ChAD c. Rodriguez, 2019 CanLII 104541 (QC CDCHAD) ChAD c. Comtois, 2022 CanLII 113631 (QC CDCHAD)

Voilà l’essentiel des arguments de la partie plaignante.

IV.

REPRÉSENTATIONS DE LA PARTIE INTIMÉE

[21] D’emblée, Me Dubé convient que l’objectif primordial de la sanction disciplinaire est la protection du public, mais encore faut-il que la sanction soit proportionnelle à la gravité des infractions et qu’elle corresponde aux circonstances particulières du dossier.

2 ACAIQ c. Metayer, 2009 CanLII 92356 (QC OACIQ);

2021-02-04(C) PAGE : 11 [22] Le procureur de l’intimé plaide également que la sanction doit être individualisée au cas de l’intimé qui est devant nous. Pour ce faire, le Comité doit prendre en compte les facteurs subjectifs propres au dossier.

[23]

Cela étant, Me Dubé soulève les éléments suivants :

o l’absence d’antécédent disciplinaire de l’intimé;

o l’intimé est âgé de 47 ans (14 ans de pratique) et une radiation de 36 mois constitue, tout compte fait, une fin de carrière pour l’intimé;

o le conflit avec Halabi est l’élément déclencheur de toute cette affaire;

o l’absence de préjudice auprès des assurés ;

o l’intimé a été abasourdi par la décision sur culpabilité, laquelle comporte en soi un effet dissuasif important, tout comme le processus disciplinaire lui-même.

[24] Quant au risque de récidive, le procureur est d’avis que l’intimé va changer son comportement et que son passé ne laisse pas présager qu’il va recommencer. Me Dubé soutient que l’intimé ne doit pas être pénalisé parce qu’il a choisi de faire un procès et que l'absence de remords ne peut constituer, en soi, un facteur aggravant pouvant justifier une sanction plus sévère. De plus, l’absence de crédibilité, selon le procureur du syndic, n’est pas un facteur aggravant.

[25] Considérant qu’une radiation temporaire de 36 mois est une sanction punitive et démesurée, Me Dubé nous demande d’imposer l’amende minimale sur chacun des chefs ou une amende globale maximale de 60 000 $ et d’accorder un délai à l’intimé afin qu’il puisse acquitter le total des amendes par des versements mensuels, égaux et consécutifs.

[26] Au soutien de sa suggestion de sanction, le procureur de l’intimé nous soumet les sources jurisprudentielles suivantes :

o o o

ChAD c. Rodriguez, 2019 CanLII 104541(QC CDCHAD) ChAD c. Marchand, 2020 CanLII 41758 (QC CDCHAD) ChAD c. Champoux, 2023 CanLII 7637 (QC CDCHAD)

2021-02-04(C) o ChAD c. Martorana, 2020 CanLII 71263 (QC CDCHAD)

[27]

Voilà l’essentiel des arguments de la partie intimée.

V.

RÉPLIQUE ET DUPLIQUE

PAGE : 12

[28] À titre de réplique, Me Cardinal précise qu’à son avis un plaidoyer de culpabilité constitue un facteur atténuant, mais que le fait de ne pas plaider coupable ne peut être considéré comme un facteur aggravant. Quant aux frais, considérant son acquittement sur le chef 6, l’intimé doit être condamné aux frais dans une proportion de 15/16 e .

[29] Sur la question du risque de récidive, le procureur du syndic soutient que le Comité ne détient aucune preuve que l’intimé a la « volonté de corriger son comportement », le tout contrairement aux facteurs subjectifs identifiés par le juge Chamberland, au paragraphe 39 de l’arrêt Pigeon c. Daigneault.

[30] Me Cardinal termine en rajoutant que l’intimé, particulièrement dans le cas de S.T., a agi non seulement à l’encontre des intérêts de l’assurée, puisque sa police d’assurance a été annulée ab initio, mais aussi en violation des intérêts de l’assureur.

[31] Cela étant dit, au cours de cette réplique, le vice-président intervient auprès du procureur de l’intimé afin de savoir de quelle façon le Comité doit réagir face à l’absence d’une preuve établissant la volonté de l’intimé de corriger son comportement, comme le mentionne le juge Chamberland dans Pigeon c. Daigneault. Me Dubé rétorque que l’intimé veut préserver ses droits en appel et qu’en conséquence, il ne reconnait pas sa responsabilité.

[32]

Nous reviendrons sur cette séquence importante plus loin lors de notre analyse.

VI.

ANALYSE ET DÉCISION

A)

La sanction disciplinaire

[33] La sanction à imposer doit être analysée à la lumière des critères élaborés par la jurisprudence, lesquels doivent être pondérés par les facteurs subjectifs et objectifs propres à chaque dossier.

2021-02-04(C) [34] Dans l’arrêt Pigeon c. Daigneault sanction disciplinaire:

PAGE : 13 3 , la Cour d’appel écrit ce qui suit à propos de la

[37] La sanction imposée par le Comité de discipline doit coller aux faits du dossier. Chaque cas est un cas d'espèce.

[38] La sanction disciplinaire doit permettre d’atteindre les objectifs suivants : au premier chef la protection du public, puis la dissuasion du professionnel de récidiver, l’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables et enfin, le droit par le professionnel visé d’exercer sa profession (Latulippe c. Léveillé (Ordre professionnel des médecins), 1998 QCTP 1687 (CanLII), [1998] D.D.O.P. 311; Dr J. C. Paquette c. Comité de discipline de la Corporation professionnelle des médecins du Québec et al, 1995 CanLII 5215 (QC CA), [1995] R.D.J. 301 (C.A.); et R. c. Burns, 1994CanLII 127 (CSC), [1994] 1 R.C.S. 656).

[39] Le comité de discipline impose la sanction après avoir pris en compte tous les facteurs, objectifs et subjectifs, propres au dossier. Parmi les facteurs objectifs, il faut voir si le public est affecté par les gestes posés par le professionnel, si l’infraction retenue contre le professionnel a un lien avec l’exercice de la profession, si le geste posé constitue un acte isolé ou un geste répétitif, Parmi les facteurs subjectifs, il faut tenir compte de l’expérience, du passé disciplinaire et de l’âge du professionnel, de même que sa volonté de corriger son comportement. La délicate tâche du Comité de discipline consiste donc à décider d’une sanction qui tienne compte à la fois des principes applicables en matière de droit disciplinaire et de toutes les circonstances, aggravantes et atténuantes, de l’affaire.

[40] Ces principes étant posés tant au niveau du pouvoir d’intervention de la Cour du Québec qu’au niveau de l’imposition des sanctions disciplinaires, il s’agit d’en faire l’application aux faits de l’espèce. »

(Caractères gras ajoutés) [35] Rappelons que la sanction n'a pas pour objectif de punir le professionnel, mais plutôt de protéger le public 4 . Le Comité doit également s'assurer de particulariser la sanction en tenant compte des caractéristiques de chaque dossier et que chaque cas est un cas d’espèce. À ce sujet, il convient de citer le passage suivant de la Cour d'appel dans l'affaire Courchesne 5 :

3 2003 CanLII 32934 (QC CA); 4 Duplantie c. Notaires, 2003 QCTP 105; Lapointe c. Rioux, 2005 CanLII 24790 (QCCQ); Goldman c. Avocats, 2008 QCTP 164; Thibault c. Da Costa, 2014 QCCA 2347 (CanLII); 5 Courchesne c. Castiglia, 2009 QCCA 2303 (CanLII), demande d'autorisation d'appel à la Cour suprême rejetée, 2010 CanLII 20533 (CSC);

2021-02-04(C) PAGE : 14 [83] L'appelant reproche ensuite au juge de la Cour du Québec d'avoir fait une analyse erronée des précédents en matière de sanction. Le reproche est mal fondé. La détermination de la peine, que ce soit en matière disciplinaire ou en matière pénale, est un exercice délicat, le principe fondamental demeurant celui d'infliger une peine proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du contrevenant. L'analyse des précédents permet au décideur de s'assurer que la sanction qu'il apprête à infliger au délinquant est en harmonie avec celles infligées à d'autres contrevenants pour des infractions semblables commises dans des circonstances semblables. Mais l'analyse des précédents n'est pas sans embûche, chaque cas étant différent de l'autre. En l'espèce, à la lecture de la décision du comité de discipline et du jugement dont appel, il me semble que le reproche formulé par l'appelant est sans fondement.

(Caractères gras ajoutés)

[36] Quant au principe de la proportionnalité, il convient de citer les passages suivant un arrêt rendu récemment par la Cour suprême dans l’affaire Bissonnette

6 :

[50] Cependant, la détermination de la peine doit en toutes circonstances être guidée par le principe cardinal de la proportionnalité. La peine doit être suffisamment sévère pour dénoncer l’infraction, sans excéder « ce qui est juste et approprié compte tenu de la culpabilité morale du délinquant et de la gravité de l’infraction » (R. c. Nasogaluak, 2010 CSC 6, [2010] 1 R.C.S. 206, par. 42; voir aussi R. c. Ipeelee, 2012 CSC 13, [2012] 1 R.C.S. 433, par. 37). La proportionnalité des peines est considérée comme un facteur essentiel au maintien de la confiance du public dans l’équité et la rationalité du système de justice pénal et criminel. L’application de ce principe permet d’assurer au public que le contrevenant mérite la punition qui lui a été infligée (Renvoi relatif à la Motor Vehicle Act (C.-B.), 1985 CanLII 81 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 486, p. 533, la juge Wilson, motifs concordants).

[51] Ainsi, « on ne peut infliger à une personne une peine totalement disproportionnée à la seule fin de dissuader ses concitoyens de désobéir à la loi » (Nur, par. 45). De même, le juge Vauclair affirme avec justesse que « la recherche de l’exemplarité au détriment des éléments de preuve qui démontrent le mérite des objectifs de réhabilitation est incompatible avec le principe d’individualisation » (Lacelle Belec c. R., 2019 QCCA 711, par. 30 (CanLII), citant R. c. Paré, 2011 QCCA 2047, par. 48 (CanLII), le juge Doyon). La proportionnalité joue un rôle restrictif et, en ce sens, elle est garante d’une peine qui est individualisée, juste et appropriée.

[52] Le principe de la proportionnalité est si fondamental qu’il possède une dimension constitutionnelle consacrée à l’art. 12 de la Charte, lequel interdit l’infliction d’une peine exagérément disproportionnée au point de ne pas être

6 R. c. Bissonnette, 2022 CSC 23 (CanLII);

2021-02-04(C) PAGE : 15 compatible avec la dignité humaine (Nasogaluak, par. 41; Ipeelee, par. 36). En tant que principe de détermination de la peine, le principe de proportionnalité ne bénéficie toutefois d’aucune protection constitutionnelle en tant que telle, n’étant pas reconnu comme un principe de justice fondamentale visé à l’art. 7 de la Charte (R. c. Malmo-Levine, 2003 CSC 74, [2003] 3 R.C.S. 571, par. 160; R. c. Safarzadeh‑Markhali, 2016 CSC 14, [2016] 1 R.C.S. 180, par. 71).

(Caractères gras ajoutés) [37] Dans le jugement Serra c. Médecins (Ordre professionnel des)7, le Tribunal des professions, sous la plume du juge Érick Vanchestein, écrit ce qui suit sur la sanction en matière disciplinaire :

[111] En matière disciplinaire, le principe jurisprudentiel établissant que la sanction ne doit pas être punitive signifie que les mesures prises ne doivent pas uniquement sanctionner un comportement fautif, mais veiller à ce que ce comportement ne se reproduise plus, dans un esprit de maintien des normes professionnelles propres à chaque discipline et par le fait même participer à assurer la protection du public. Ainsi, il peut arriver qu’une sanction qui, par sa sévérité cible trop fortement l’exemplarité par une longue période de radiation, puisse ne pas satisfaire les objectifs recherchés par la sanction disciplinaire et devenir punitive.

[112] Contrairement aux objectifs et principes que l’on retrouve aux articles 718 et suivants du Code criminel pour guider les tribunaux dans l’imposition d’une peine, le Code des professions est plutôt muet relativement aux objectifs généraux de la sanction disciplinaire.

[113] Le seul véritable guide pour les objectifs de la sanction en matière disciplinaire se trouve à l’arrêt Pigeon c. Daigneault.

[114] Dans cet arrêt, avant même de traiter de la notion de la protection du public, la Cour d’appel place en premier lieu la règle fondamentale en matière d’imposition de sanction, soit l’individualisation :

[37] La sanction imposée par le Comité de discipline doit coller aux faits du dossier. Chaque cas est un cas d'espèce.

[115] Ainsi, ce qui doit guider une instance disciplinaire lors de l’imposition de la sanction est le principe de l’individualisation et de la proportionnalité. Un conseil de discipline ne sanctionne pas d’abord une faute déontologique, mais plutôt un professionnel ayant contrevenu à certaines règles en posant certains gestes précis. L’analyse doit donc porter sur les faits particuliers de l’affaire et sur le

7 2021 QCTP 1 (CanLII);

2021-02-04(C) PAGE : 16 professionnel à sanctionner, comme l’a précisé le Tribunal des professions dans Brochu :

[69] Il faut rappeler que le rôle du Comité ne consiste pas à sanctionner seulement un comportement, mais à imposer une sanction à un professionnel qui a eu un comportement fautif. L’attention se porte aussi sur l’individu en fonction du geste qu’il a posé (…)

[116] Les objectifs de la sanction disciplinaire sont énoncés au paragraphe 38 de l’arrêt Pigeon c. Daigneault, soit « au premier chef la protection du public, puis la dissuasion du professionnel de récidiver, l'exemplarité à l'égard des autres membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables et enfin, le droit par le professionnel visé d'exercer sa profession » et ils s’inscrivent dans l’esprit de cette règle fondamentale de l’individualisation et de la proportionnalité. Le but visé par la sanction disciplinaire est la protection du public et pour l’atteindre, les conseils de discipline doivent trouver un juste équilibre entre tous ces objectifs, en insistant à l’occasion sur l’un ou l’autre en relation avec le cas particulier, mais pas au détriment des autres objectifs.

[117] Par exemple, la protection du public doit s’évaluer en tenant compte de la situation particulière du professionnel et non in abstracto. Les conseils de discipline doivent s’interroger si ce professionnel en particulier représente un risque de préjudice pour le public et non le faire d’une façon abstraite, sans lien avec le dossier à l'étude.

[118] En ce qui concerne l’objectif de la dissuasion spécifique, le conseil de discipline doit notamment analyser la situation du professionnel au moment de la sanction et déterminer si le processus disciplinaire l’a suffisamment dissuadé de répéter son comportement, donc considérer l’effet dissuasif du processus disciplinaire lui‑même.

[119] Pour l’objectif de l’exemplarité, qu’il suffise de souligner le fait que la Cour d’appel du Québec a mentionné à plusieurs reprises la valeur toute relative de cette notion.

[120] Le dernier objectif relativement au droit d’exercer sa profession ne doit pas être négligé, même s’il semble être rarement considéré par les instances disciplinaires. Si le professionnel ne représente pas ou plus un danger pour le public, il n’y a peut‑être pas lieu d’imposer de longues périodes de radiation temporaire, ce qui a comme effet de priver le professionnel de revenus. En intégrant cet objectif, la Cour d’appel dans l’arrêt Pigeon c. Daigneault cible la réhabilitation, facteur inhérent à toute mesure punitive, et impose aux conseils de discipline de

2021-02-04(C) PAGE : 17 considérer l’éventuelle réintégration du professionnel dans son milieu.

[121] En définitive, un conseil de discipline qui ne considère pas à sa juste valeur les principes de l’individualisation et de la proportionnalité risque fort de commettre une erreur de principe et d’imposer une sanction manifestement non indiquée.

(Caractères gras ajoutés) [38] En somme, afin d’assurer la protection du public, l’ensemble des circonstances aggravantes et atténuantes doit être considéré pour décider de la sanction appropriée au cas de l’intimé.

[39] De même, le Comité doit décider si le processus disciplinaire a suffisamment dissuadé l’intimé de répéter son comportement. Il doit donc considérer l’effet dissuasif du processus disciplinaire lui-même.

[40] Cela étant dit, examinons maintenant les facteurs atténuants et aggravants du présent dossier.

B)

Les facteurs atténuants et aggravants

[41] Relativement aux circonstances atténuantes, il y a lieu de considérer l’absence d’antécédent de l’intimé et l’expulsion de l’intimé du cabinet Impact Assurances inc. qui peut venir expliquer, jusqu’à un certain point et uniquement en partie, le manque flagrant de rigueur de l’intimé. Tout comme le procureur du syndic, le Comité est d’avis que la situation familiale de l’intimé constitue un facteur atténuant.

[42]

À propos des facteurs aggravants, il y a lieu de souligner les facteurs suivants : o les infractions se situent au cœur de la profession; o la grande gravité objective de chacune des infractions; o le manque de probité et de rigueur de l’intimé; o la malhonnêteté de l’intimé; o le caractère récurrent et répétitif des actes dérogatoires.

[43] Maintenant, discutons de la question à savoir si le processus disciplinaire a suffisamment dissuadé l’intimé de répéter son comportement.

2021-02-04(C) PAGE : 18 [44] Or, au cours de l’échange entre le vice-président du Comité et le procureur de l’intimé sur l’absence de preuve de la « volonté de l’intimé de corriger son comportement 8 », l’intimé a hoché sa tête, en signe d’approbation, en direction des membres du Comité. Autrement dit, à ce moment, l’intimé tentait vraisemblablement de signifier au Comité qu’il souhaite modifier son comportement. Malgré ce qui précède, son procureur déclare que l’intimé ne reconnait pas sa responsabilité.

[45] Cela étant dit et quoi qu’il en soit, la jurisprudence reconnait que le processus disciplinaire lui-même est en soi un exercice dissuasif et qu’il comporte un rappel à l’ordre dont l’intimé saura tirer leçon 9 .

[46] Ainsi donc, le Comité partage l’avis du procureur de l’intimé qu’une radiation de 36 mois signifie, tout compte fait, la fin de la carrière de l‘intimé dans le domaine du courtage en assurance de dommages.

[47] Quant à la suggestion de sanction de l’intimé fondée uniquement sur l’imposition d’amendes totalisant la somme globale maximale de 60 000 $, à notre avis, il ne s’agit pas d’une issue acceptable, considérant les chefs d’accusation 8 et 9. qui visent la malhonnêteté de l’intimé en violation de l’article 37 (1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages ainsi que son manque de probité envers ses clients et les assureurs, contrairement à l’article 37 (7 o ) du même règlement.

[48] Le Comité est d’opinion que ce type de comportement doit entraîner une sanction dissuasive, soit une radiation temporaire du certificat de l’intimé. En effet, comme le dévoile notre décision sur culpabilité, le comportement de l’intimé démontre clairement un grave déficit de probité.

[49] En réalité, le Comité considère que la sanction dans la présente affaire ne doit pas être un simple « coût d’opération 10 » que le professionnel paie tous les mois pour conserver son droit d’exercer sa profession

11 .

[50] Considérant que l’intimé ne semble pas avoir complètement compris quels sont ses devoirs et responsabilités à titre de courtier en assurance de dommages, tant envers l’assureur que l’assuré, de l’avis du Comité, une période de radiation sera

8 Voir le paragraphe 34 des présentes et le paragraphe 39 de l’arrêt Pigeon c. Daigneault cité au paragraphe 30 des présentes; 9 ChAD c. Couture, 2011 CanLII 81636 (QC CDCHAD), par. 36;

10 Ou comme dans la langue de Shakespeare : « the cost of doing business »; 11 Voir à ce sujet Rowan v. Ontario Securities Commission, 2012 ONCA 208 (CanLII), par. 49, cité par la Cour d’appel dans Thibault c. Da Costa, 2014 QCCA 2347 (CanLII), par. 50;

2021-02-04(C) PAGE : 19 salutaire. Cette période d’attente permettra à l’intimé de comprendre l’importance de ses obligations déontologiques avant de recommencer à pratiquer la profession.

[51] Enfin, une prise de conscience éventuelle de l’intimé à cet égard lui sera bénéfique et servira également à protéger le public.

C)

La sanction appropriée au cas de l’intimé

[52] Considérant que la sanction imposée doit favoriser la réinsertion sociale de l’intimé plutôt que de chercher à le punir outre mesure 12 , après avoir délibéré, le Comité considère qu’il est juste et approprié d’imposer à l’intimé les sanctions suivantes

o o o o

o

o

o

o

o

o

o

13 :

Chefs 1, 2, 3a., b. et c., 4 et 5 : une radiation temporaire de 11 mois; Chef 7 : une radiation temporaire de 2 mois; Chef 8 : une radiation temporaire de 11 mois; Chefs 9a., b., c., d. et e. : une radiation temporaire de 11 mois;

Chefs 10a., b. et c. : une radiation temporaire de 2 mois;

Chef 11 : une amende de 2 000 $;

Chefs 12a., b., c., d. et e. : une amende de 2 000 $

Chef 13 : une radiation temporaire de 2 mois;

Chef 14 : une amende de 2 000 $;

Chef 15 : une amende de 2 000 $;

14 ;

Chefs 16a. et b. : une radiation temporaire de 2 mois;

12 R. c. Pham, 2013 CSC 15 (CanLII); 13 Relativement à la période de radiation temporaire de 11 mois, le Comité s’inspire essentiellement des affaires ChAD c. Barrette, 2019 CanLII 40792 et ChAD c. Boisvert, 2020 CanLII 28853 citées par la partie plaignante; 14 À propos de ce chef, il y a lieu de préciser que l’intimé a commis l’infraction d’avoir été négligent lors de la rédaction de l’ensemble de la confirmation provisoire d’assurance. Ainsi donc, l’amende de 2 000 $ vise l’ensemble du comportement dérogatoire de l’intimé sur ce chef d’accusation;

2021-02-04(C) PAGE : 20 o Que les périodes de radiation soient purgées de façon concurrente entre elles pour une radiation temporaire totale de 11 mois.

[53]

Cela dit, il y a lieu maintenant d’analyser la globalité de la sanction.

[54] Sur cette question, voici comment le Tribunal des professions s’exprime dans Kenny c. Baril

15 :

Quant à la globalité ou à la totalité des amendes imposées (…) elle doit être analysée par le comité de discipline. Ce dernier doit regarder si cette globalité ou totalité ne constitue pas une sanction accablante même si les sanctions imposées sur chacun des chefs peuvent par ailleurs apparaître justes, appropriées et proportionnées dans les circonstances. »

(Caractères gras ajoutés) [55] Le Comité considère donc que dans sa globalité, l’imposition d’une période de radiation temporaire de 11 mois jumelée avec le paiement d’une amende totale de 8 000 $ constitue une sanction qui pourrait être un fardeau accablant pour l’intimé, considérant la période de suspension de 11 mois qu’il devra purger.

[56] D’ailleurs, suivant le Tribunal des professions 16 , l’imposition d’une amende juxtaposée à une période de radiation peut, même en l’absence de toute information concernant la situation financière du professionnel, constituer une sanction purement punitive, ce qui est contraire à la finalité du droit disciplinaire 17 .

[57] Considérant ce qui précède, les amendes de 2 000 $ sur chacun des chefs 11 et 14 seront substituées par des réprimandes.

[58] Considérant la situation financière de l’intimé, le Comité lui accordera un délai d’un (1) an pour payer les amendes de 4 000 $ et les déboursés du présent dossier.

[59] Finalement, considérant le manque de rigueur de l’intimé et afin d’ajouter un volet éducatif à la sanction, l’intimé se verra imposer l’obligation de suivre les cours suivants :

o o

A/T Risques - Saison 1 - Épisode 1 Les travers de la route A/T Risques - Saison 2 - Épisode 2 Et que ça saute!

15 1993 CanLII 9195 (QC TP); 16 Pepin c. Avocats (Ordre professionnel des), 2008 QCTP 152 (CanLII); 17 Voir ChAD c. Gagné, 2018 CanLII 38256 (QC CDCHAD), par. 33;

2021-02-04(C) PAGE : 21 o A/T Risques - Saison 3 - Épisode 3 Au chalet à l’heure de l’apéro o A/T Risques - Saison 4 - Épisode 4 là, qui va là?

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

IMPOSE à l’intimé les sanctions suivantes sur chacun des chefs d’accusation pour lesquels il a été reconnu coupable, soit :

Chef n o

Chef n o

Chef n o

Chef n o

Chef n o

Chef n o

Chef n o

1 :

2 :

3 :

4 :

5 :

7 :

8 :

une radiation temporaire de 11 mois;

une radiation temporaire de 11 mois;

une radiation temporaire de 11 mois;

une radiation temporaire de 11 mois;

une radiation temporaire de 11 mois;

une radiation temporaire de 2 mois;

une radiation temporaire de 11 mois;

Chefs n os 9a. à 9e. : une radiation temporaire de 11 mois;

Chef n o

Chef n o

10 :

11 :

Chefs n os 12 :

Chef n o

Chef n o

Chef n o

13 :

14 :

15 :

une radiation temporaire de 2 mois;

une amende de 2000 $, substituée par une réprimande;

une amende de 2 000 $;

une radiation temporaire de 2 mois;

une amende de 2 000 $, substituée par une réprimande;

une amende de 2 000 $;

2021-02-04(C) Chefs n os 16a. et 16b. : une radiation temporaire de 2 mois;

PAGE : 22

ORDONNE que les périodes de radiation temporaire ci-haut mentionnées soient purgées de façon concurrente entre elles pour une radiation temporaire totale de 11 mois;

RÉDUIT le montant total des amendes susdites à la somme globale de 4 000 $ considérant le principe de la globalité de la sanction;

RECOMMANDE au Conseil d’administration de la ChAD d’imposer à l’intimé l’obligation de suivre et de réussir, dans un délai de 24 mois, les cours suivants :

A/T Risques - Saison 1 - Épisode 1 Les travers de la route A/T Risques - Saison 2 - Épisode 2 Et que ça saute! A/T Risques - Saison 3 - Épisode 3 Au chalet à l’heure de l’apéro A/T Risques - Saison 4 - Épisode 4 là, qui va là? DÉCLARE que lesdits cours ne donneront pas droit à des unités de formation continue (UFC), le tout conformément au deuxième alinéa de l’article 10 du Règlement sur la formation continue de la Chambre de l’assurance de dommages;

ORDONNE la publication d’un avis de radiation temporaire du certificat de l’intimé;

CONDAMNE l'intimé au paiement des 15/16 e de tous les déboursés incluant, les frais de publication de l’avis de radiation temporaire;

ACCORDE à l’intimé un délai d’un (1) an pour acquitter le montant des amendes fixé à 4 000 $, en plus des frais et des déboursés, en 12 versements mensuels, égaux et consécutifs, délai qui sera calculé uniquement à compter du 31 e jour suivant la signification de la présente décision;

DÉCLARE que si l’intimé est en défaut de payer à échéance l’un ou l’autre des versements susdits, il perdra le bénéfice du terme et toute somme alors impayée deviendra immédiatement due et exigible.

2021-02-04(C)

PAGE : 23

__________________________________ Me Daniel M. Fabien, avocat Vice-président

________________________________ Mme Maryse Pelletier, courtier en assurance de dommages Membre

Me Mathieu Cardinal Procureur de la partie plaignante

Me Jean-Claude Dubé Procureur de la partie intimée

Date d’audience : 7 septembre 2023

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