Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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Contenu de la décision

COMITÉ DE DISCIPLINE CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES CANADA PROVINCE DE QUÉBEC

No: 2022-03-01(E) DATE :

LE COMITÉ : Me Patrick de Niverville, avocat M. Yvan Roy, expert en sinistre Mme Lise Martin, expert en sinistre

Président Membre Membre

Me YANNICK CHARTRAND, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante c. DANIEL LEGAULT, expert en sinistre

Partie intimée

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

ORDONNANCE DE NON-PUBLICATION, DE NON-DIFFUSION ET DE NON-DIVULGATION DU NOM DES ASSURÉS ET DE TOUT RENSEIGNEMENT OU INFORMATION PERMETTANT DE LES IDENTIFIER ET MENTIONNÉE DANS LA PLAINTE ET LES PIÈCES DOCUMENTAIRES (PS-1 À PS-60), LE TOUT AFIN DE PROTÉGER LEUR VIE PRIVÉE EN CONFORMITÉ AVEC L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS (R.L.R.Q., c. C-46)

[1] Le 17 novembre 2022, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages se réunissait pour procéder à l’audition de la plainte modifiée numéro 2022-03-01(E), par visioconférence ;

[2] Le syndic était alors représenté par Me Marie-Hélène Sylvestre et, de son côté, l’intimé assurait seul sa défense ;

I. La plainte [3] L’intimé fait l’objet d’une plainte modifiée comportant plusieurs chefs d’accusation, soit :

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Dossiers de réclamation n assurés F.O. et N.M.

o

8*987514 (incendie) et n

o

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8*1001134 (dégât d’eau) des

1. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, au cours de la période de juillet 2019 à janvier 2021, dans le dossier de réclamation (incendie) no 8*987514 des assurés F.O. et N.M. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a versé au fournisseur Gestion d’urgence S.P. inc. des indemnités pour les frais de subsistance totalisant 86 925 $, soit un montant qui excédait de 80 485 $ la limite de garantie de 6 440 $ prévue au contrat d’assurance habitation no PC 8237432 des assurés, en contravention avec les articles 10, 27, 48 et 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

2. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, entre les ou vers les mois de septembre 2019 et janvier 2021, dans le dossier de réclamation (incendie) no 8*987514 des assurés F.O. et N.M. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, alors que la limite de garantie de 6 440 $ pour les frais de subsistance prévue au contrat d’assurance habitation no PC 8237432 des assurés était atteinte, a tenté de dissimuler les paiements excédentaires d’indemnités à ce titre en les imputant à la garantie «habitation» ou à la garantie «contenu» dudit contrat d’assurance, en contravention avec les articles 10, 27, 38, 48 et 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

3. Retiré 4. Retiré 5. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 8 mars 2021, dans le dossier de réclamation (dégât d’eau) n o 8*1001134 des assurés F.O. et N.M. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a payé une somme de 3 507,50 $ au fournisseur Gestion d’urgence S.P. inc., pour la relocalisation des assurés et leur famille pour la période du 9 au 31 mars 2021, alors que les assurés avaient déjà été relocalisés dans le cadre de la réclamation (incendie) n o 8*987514, et qu’il n’y avait aucune facture au soutien de ce paiement, en contravention avec les articles 10, 27, 48 et 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

6. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 11 mars 2021, dans le dossier de réclamation (dégât d’eau) no 8*1001134 des assurés F.O. et N.M. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a falsifié deux devis de travaux de réparation du fournisseur Les Évaluations Charland Ferlatte inc. provenant du dossier de réclamation d’un autre assuré, E.P., et concernant un immeuble n’ayant aucun lien avec la réclamation des assurés F.O. et N.M., l’un au montant de 40 955,59 $ et l’autre au montant de 10 207,14 $, et les a annexés au dossier de réclamation (dégât d’eau) des assurés F.O. et N.M., en contravention avec les articles 10, 27, 48, 58, 58(1), 58(6) et 58(8) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

7. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 11 mars 2021, dans le dossier de réclamation (incendie) no 8*987514 des assurés F.O. et N.M. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a procédé sans justification au paiement d’une somme de 13 000 $ par transfert électronique de fonds au compte

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bancaire de l’assurée F.O., alors qu’il n’y avait aucune preuve de perte, ni facture ou pièce justificative, et sans inscrire une note au dossier pour expliquer ou justifier ce paiement, en contravention avec les articles 10, 27, 48 et 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

8. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 11 mars 2021, dans le dossier de réclamation (dégât d’eau) no 8*1001134 des assurés F.O. et N.M. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a procédé sans justification au paiement d’une somme de 10 000 $ par transfert électronique de fonds au compte bancaire de l’assuré N.M., alors qu’il n’y avait aucune preuve de perte, ni facture ou pièce justificative, et sans inscrire une note au dossier pour expliquer ou justifier ce paiement, en contravention avec les articles 10, 27, 48 et 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

9. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 19 mars 2021, en lien avec le dossier de réclamation (incendie) no 8*987514 des assurés F.O. et N.M. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, lorsque questionné par N.J., courtier des assurés F.O. et N.M., sur l’importance des indemnités versées dans ce dossier pour les frais de subsistance, lui a faussement déclaré que le dossier avait été fermé prématurément par erreur et allait être rouvert car le recouvrement d’une partie des sommes excédentaires était tenté auprès de l’assureur du syndicat de copropriété parce qu’il était en grande partie responsable des délais, en contravention avec les articles 16, 38, 51, 58(1) et 58(5) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

10. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, vers la fin mars ou début avril 2021, en lien avec le dossier de réclamation (incendie) no 8*987514 des assurés F.O. et N.M. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a faussement déclaré à P.G., directeur du service de l’indemnisation de l’assureur, que c’est parce qu’il croyait que l’immeuble assuré était une maison unifamiliale en rangée et non une unité de condominium, qu’il avait versé des frais de subsistance excédant la garantie prévue au contrat d’assurance des assurés, en contravention avec les articles 16, 38, 48, 58(1) et 58(5) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

11. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 4 mai 2021, en lien avec le dossier de réclamation (incendie) no 8*987514 des assurés F.O. et N.M. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a faussement déclaré à C.G., enquêteur interne de l’assureur, qu’il s’était assuré que toutes les indemnités soient comptabilisées dans le logiciel Claim Center, mais sans égard aux garanties du contrat d’assurance auxquelles elles devaient être imputées, parce qu’il débutait chez cet assureur et n’était pas familier avec le logiciel utilisé, en contravention avec les article 16, 38, 48, 58(1) et 58(5) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

Dossier de réclamation no 8*979658 des assurés N.R.H. et E.H. 12. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 19 octobre 2019, dans le dossier de réclamation no 8*979658 des assurés N.R.H. et E.H. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a versé les sommes de 1 245,63 $ et 9 450,77 $, à l’ordre personnel de P.L., plutôt qu’au fournisseur Steamatic

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Canada, en paiement des factures nos 17312 et 17311 du 26 mars 2019 émises par ledit fournisseur, en contravention avec les articles, 10, 27, 48, 58(1) et 58(3) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

13. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 23 décembre 2019, dans le dossier de réclamation no 8*979658 des assurés N.R.H. et E.H. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a versé les sommes de 1 245,63 $ et 9 450,77 $ au fournisseur Steamatic Canada en paiement des factures nos 17312 et 17311 du 26 mars 2019, alors qu’il avait déjà payé ces sommes à l’ordre personnel de P.L. le 19 octobre 2019, en contravention avec les articles 10, 27, 48 et 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

14. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 23 novembre 2020, dans le dossier de réclamation no 8*979658 des assurés N.R.H. et E.H. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a effectué un paiement de 13 686,91 $ sous la garantie «contenu» prévue à leur contrat d’assurance, à l’ordre de Logement comme chez toi, en paiement de la facture no 1374, sans inscrire aucune note au dossier expliquant pourquoi ce paiement était fait, alors que ladite facture ne concernait pas des travaux effectués aux lieux du sinistre mais des dommages causés lors d’un incident survenu à l’endroit les assurés N.R.H. et E.H. avaient été relocalisés, en contravention avec les articles, 10, 27, 48, 58(1) et 58(3) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

15. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 15 janvier 2021, dans le dossier de réclamation no 8*979658 des assurés N.R.H. et E.H. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a effectué un paiement de 4 679,11 $ sous la garantie «contenu» prévue à leur contrat d’assurance, à l’ordre du fournisseur Paul Davis, en lien avec la facture no SOST 19089 du 29 juillet 2020 et un devis d’intervention d’urgence, sans inscrire aucune note au dossier expliquant pourquoi ce paiement était fait, alors que ladite facture ne concernait pas des travaux effectués aux lieux du sinistre mais des dommages causés lors d’un incident survenu à l’endroit les assurés N.R.H. et E.H. avaient été relocalisés, en contravention avec les articles, 10, 27, 48, 58(1) et 58(3) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

Dossier de réclamation no 8*980114 de l’assuré M.P.P. 16. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 21 juin 2019, dans le dossier de réclamation no 8*980114 de l’assuré M.P.P. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a payé en double le fournisseur Construction Tandem pour les travaux d’urgence, en effectuant un paiement de 4 702,90 $ pour la facture no 109988 du 27 février 2019, en référence au devis de Steamatic Canada du 22 février 2019, et un paiement de 7 254,44 $ pour la facture no 110112 du 7 mars 2019, en référence au devis modifié de Steamatic Canada du 5 mars 2019, en contravention avec les articles 10, 27, 48 et 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

17. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, les ou vers les 21 juin et 15 juillet 2019, dans le dossier de réclamation no 8*980114 de l’assuré M.P.P. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a annexé deux fois au dossier la facture no L003-S7367 du fournisseur Gestion d’urgence S.P. inc. au montant de

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1 196,04 $, pour des frais de relocalisation pour la période du 25 mai au 5 juin 2019, en la nommant de deux façons différentes, et a payé ces frais en double audit fournisseur, en contravention avec les articles, 10, 27, 48 et 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

Dossier de réclamation no 8*990436 des assurés F.A. et C.C. 18. À Terrebonne et/ou à Mont-Royal, le ou vers le 18 janvier 2021, dans le dossier de réclamation no 8*990436 des assurés F.A. et C.C. auprès de La compagnie mutuelle d’assurance Wawanesa, a effectué un paiement de 1 000 $ au fournisseur Construction Tandem, en remboursement de la franchise déduite sur sa facture no 113633 du 27 février 2020, alors que la franchise n’avait pas été déduite des indemnités versées directement aux assurés ni n’avait été autrement payée par ceux-ci, et que la limite de garantie de 30 000 $ prévue à leur contrat d’assurance avait déjà été atteinte, en contravention avec les articles 10, 27, 48 et 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre.

[4] D’entrée de jeu, l’intimé a enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’encontre des infractions reprochées à la plainte modifiée ;

[5] Les parties ont alors procédé aux représentations sur sanction ; II. Les faits [6] Essentiellement, la preuve a permis d’établir que l’intimé a fait preuve de négligence à plusieurs occasions, notamment :

a) en versant des indemnités pour des frais de subsistance qui excédaient de 80 000 $ la limite de garantie prévue à un contrat d’assurance-habitation (chef 1) ;

b) en payant des frais de relocalisation pour une famille alors qu’il n’y avait aucune facture au soutien de ce paiement (chef 5) ;

c) en transférant à deux reprises des sommes d’argent (13 000 $ et 10 000 $) à des assurés, sans preuve de perte, ni facture (chefs 7 et 8) ;

d) en payant à l’ordre personnel du gestionnaire d’un fournisseur, au lieu de payer le fournisseur, deux montants totalisant plus de 10 000 $ (chef 12) et en payant une 2 e fois les mêmes montants au fournisseur (chef 13) ;

e) en faisant des paiements sous la garantie « contenu » à l’ordre de deux fournisseurs prétendument pour des travaux effectués au lieu du sinistre alors qu’il s’agissait de dommages subis à l’endroit les assurés avaient été relocalisés et sans jamais inscrire de notes explicatives à son dossier (chefs 14 et 15) ;

f)

en payant en double un fournisseur pour des travaux d’urgence en effectuant

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un premier paiement de 4 702 $ et un autre paiement de 7 254 $ fondé sur un devis modifié (chef 16) ;

g) en annexant deux fois à son dossier la même facture d’un fournisseur en la désignant de deux façons différentes et en payant celle-ci en double (chef 17) ;

h) en remboursant une franchise de 1 000 $ prétendument déduite d’une facture alors que celle-ci n’avait jamais été déduite des indemnités versées aux assurés et que la limite de garantie prévue au contrat avait déjà été atteinte (chef 18) ;

[7]

La preuve a également démontré que l’intimé : a) avait tenté de dissimuler des paiements excédentaires d’indemnités pour frais de subsistance en les imputant à d’autres catégories de garanties prévues au contrat (chef 2) ;

b) avait falsifié des devis de travaux de réparation (chef 6) ; c) avait fait plusieurs fausses déclarations pour justifier ses agissements (chefs 9, 10 et 11) ;

[8] C’est à la lumière de ces faits que sera examinée la recommandation commune formulée par les parties ;

III. Recommandations communes [9] Me Sylvestre suggère, conjointement avec l’intimé, de lui imposer les sanctions suivantes :

Chef 1 : une radiation de 18 mois ; Chefs 2 et 6 : une radiation de 24 mois sur chacun des chefs ; Chefs 5 et 7 à 18: une radiation de 12 mois sur chacun des chefs ; [10] Les périodes de radiation seraient purgées de façon concurrente pour un total de 24 mois ;

[11] L’avis de radiation temporaire serait publié dans un journal l’intimé a son domicile professionnel ;

[12] À cela s’ajouteront les déboursés du dossier ainsi que les frais de publication de l’avis de radiation temporaire ;

[13] Suivant Me Sylvestre, les parties ont tenu compte des facteurs aggravants suivants :

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La gravité objective élevée des infractions ; Le fait que les infractions se situent au cœur même de l’exercice de la profession ; L’importance des montants ; L’image et la réputation de la profession ; La négligence grave de l’intimé ; Son manque d’intégrité et de probité (chefs 2 et 6) et ses fausses déclarations (chefs 9, 10 et 11) ;

L’avis formel à son dossier professionnel (PS-58) ; Le caractère répétitif des infractions ; La durée des infractions ; L’expérience de l’intimé (20 ans) ; Les conséquences pour les assureurs et les assurés ; La mise en péril de la protection du public ; [14] Les parties ont également considéré les circonstances atténuantes suivantes : Le plaidoyer de culpabilité de l’intimé ; L’absence de bénéfice personnel de nature monétaire pour l’intimé ; Sa collaboration à l’enquête et au processus disciplinaire ; Son absence d’antécédents disciplinaires ; [15] De plus, les sanctions suggérées sont conformes aux sanctions habituellement imposées pour des infractions semblables ;

[16] À cet égard, Me Sylvestre réfère le Comité aux décisions suivantes : CSF c. Giroux, 2019 QCCDCSF 37 (CanLII) ; CSF c. Philion, 2020 QCCDCSF (CanLII) ; Chad c. Pong, 2006 CanLII 53734 (QC CDCHAD) ;

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Chad c. Bernard, 2019 CanLII 22097 (QC CDCHAD) ; Chad c. Barrette, 2019 CanLII 40792 (QC CDCHAD) ; Chad c. Massy, 2020 CanLII 89908 (QC CDCHAD) ; Chad c. Gagnon, 2012 CanLII 33166 (QC CDCHAD) ; Chad c. Tremblay, 2017 CanLII 66283 (QC CDCHAD) ; Chad c. Tremblay, 2017 CanLII 84809 (QC CDCHAD) ; Chad c. Labrie, 2021 CanLII 48582 (QC CDCHAD) ; Chad c. Charron, 2019 CanLII 40791 (QC CDCHAD) ; Chad c. Harvey, 2013 CanLII 38539 (QC CDCHAD) ; Chad c. Harvey, 2013 CanLII 70421 (QC CDCHAD) ; [17] Cela étant dit, les parties demandent au Comité d’entériner leur recommandation commune ;

IV. Analyse et décision [18] Dans un arrêt récent, soit l’affaire Duval 1 , le Tribunal des professions rappelait le caractère pour le moins limité de la discrétion conférée aux divers conseils de discipline lorsqu’il s’agit de décider du bien-fondé d’une recommandation commune :

[8] Les deux parties sont d’avis que le Conseil a erré en refusant de suivre la recommandation commune et en s’appuyant sur des faits et des facteurs aggravants qui ne faisaient pas partie de la trame factuelle convenue entre elles.

[13] Suivant les enseignements de la Cour suprême du Canada dans Anthony Cook, le Conseil devait déterminer si la sanction suggérée conjointement était contraire à l’intérêt public ou déconsidérait l’administration de la justice. La question pour le Tribunal en l’espèce n'est donc pas de savoir si la sanction infligée par le Conseil est déraisonnable, mais bien si la recommandation commune l'était au point il fallait la rejeter.

[14] Ce motif d’appel soulève une question de droit, permettant au Tribunal d’intervenir en cas d’erreur. En matière de suggestion commune sur sanction, lorsqu’un Conseil de discipline s’attarde à examiner la justesse

1 Duval c. Comptables professionnels agréés, 2022 QCTP 36 (CanLII);

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de la sanction proposée conjointement, au lieu de se limiter à la question de son incidence sur l’intérêt public ou l’administration de la justice, il commet une erreur de droit qui justifie l’intervention du Tribunal.

[15] Il ne fait aucun doute que le Conseil est maître de l’appréciation de la preuve dans les dossiers qui procèdent devant lui. Cependant, en l’espèce, il se devait de considérer la trame factuelle de l’infraction, non pas en fonction d’une preuve partielle entendue à l’audience, mais seulement en fonction de celle présentée conjointement par les parties, laquelle fournissait le fondement de leur recommandation commune. Bien que le résumé des faits au début de la décision du Conseil cerne correctement cet exposé conjoint des faits, le Conseil réfère d’ailleurs à plusieurs facteurs aggravants ainsi qu’à des faits étrangers à cet exposé conjoint pour s’autoriser à s’écarter de la suggestion commune sur sanction.

[22] Le Tribunal est d’avis que si le Conseil avait respecté les limites circonscrites en matière de suggestions communes et s’était tenu seulement aux faits admis par les parties, il n’aurait pu conclure autrement que d’entériner la recommandation des parties. Cette recommandation reflète les faits particuliers du dossier tels que résumés dans l’exposé conjoint et elle se situe à l’intérieur de la fourchette des sanctions applicables, telle qu’illustrée dans le tableau de jurisprudence soumise au Conseil. Elle ne déconsidère pas l’administration de la justice et n’est pas contraire à l’intérêt public. (caractères gras ajoutés)

[19] Cela dit, de l’avis du Comité, les sanctions suggérées répondent aux quatre (4) critères de l’arrêt Pigeon c. Daigneault 2 , soit :

La protection du public ; La dissuasion du professionnel de récidiver ; L’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables ;

Le droit pour le professionnel visé d’exercer sa profession ; [20] Rappelons également que selon le Tribunal des professions, « la suggestion commune issue d’une négociation rigoureuse dispose d’une force persuasive certaine » 3 ;

[21] Enfin, les ententes communes constituent « un rouage utile et parfois nécessaire à une saine administration de la justice disciplinaire » 4 ;

2 2003 CanLII 32934 (QC CA), par. 37; 3 Chan c. Médecins, 2014 QCTP 5 (CanLII), par. 42 ; 4 Infirmières et infirmiers auxiliaires c. Ungureanu, 2014 QCTP 20 (CanLII), par. 21 ;

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[22] De plus, la Cour d’appel, dans l’arrêt Binet 5 , reprenant alors l’opinion émise par la Cour d’appel d’Alberta dans l’affaire Belakziz 6 , précisait qu’il n’appartient pas au juge de déterminer la sanction qui pourrait être imposée pour ensuite la comparer avec celle proposée par les parties ;

[23] Dans le même ordre d’idée, le Comité n’a pas à s’interroger sur la sévérité ou la clémence de la sanction, il ne s’agit pas d’un élément déterminant face à une recommandation commune formulée par les parties 7 ;

[24] Dans les circonstances, en considérant les enseignements des tribunaux supérieurs et en tenant compte des facteurs objectifs et subjectifs, à la fois aggravants et atténuants, et plus particulièrement des représentations des parties, le Comité n’a aucune hésitation à entériner la recommandation commune ;

[25] De l’avis du Comité, les sanctions suggérées sont justes et raisonnables et, surtout, appropriées au présent dossier ;

[26] Finalement, elles assurent la protection du public sans punir outre mesure l’intimé ; [27] En conséquence, et en conformité avec les enseignements du Tribunal des professions dans les arrêts Gougeon 8 et Duval 9 , le Comité entérinera la recommandation commune et imposera les sanctions suggérées.

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE : ACCEPTE le dépôt d’une plainte modifiée ; PREND acte du plaidoyer de culpabilité de l’intimé ; DÉCLARE l’intimé coupable de chacune des infractions reprochées et plus particulièrement comme suit :

Chefs 1, 5, 7, 8, 12, 13, 14, 15, 16, 17 et 18 :

Chef 2 :

pour avoir contrevenu à l’article 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (R.L.R.Q., c. D-9.2, r.4) ;

pour avoir contrevenu à l’article 48 du Code de déontologie des experts en sinistre (R.L.R.Q., c. D-9.2, r.4) ;

5 R. c. Binet, 2019 QCCA 669 (CanLII), par. 19 et 20 ; 6 R. c. Belakziz, 2018 ABCA 370 (CanLII), par. 17 et 18 ; 7 Notaires c. Génier, 2019 QCTP 79 (CanLII), par. 27 ; 8 Audioprothésistes c. Gougeon, 2021 QCTP 84 (CanLII); 9 Op. cit., note 1 ;

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Chef 6 :

Chefs 9, 10 et 11 :

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pour avoir contrevenu à l’article 58(8) du Code de déontologie des experts en sinistre (R.L.R.Q., c. D-9.2, r.4) ;

pour avoir contrevenu à l’article 58(5) du Code de déontologie des experts en sinistre (R.L.R.Q., c. D-9.2, r.4).

PRONONCE un arrêt conditionnel des procédures à l’égard des autres dispositions législatives et réglementaires alléguées au soutien desdits chefs d’accusation de la plainte modifiée ;

IMPOSE à l’intimé les sanctions suivantes : Chef 1 : une radiation de 18 mois ; Chef 2 : une radiation de 24 mois ; Chef 5 : une radiation de 12 mois ; Chef 6 : une radiation de 24 mois ; Chef 7 : une radiation de 12 mois ; Chef 8 : une radiation de 12 mois ; Chef 9 : une radiation de 12 mois ; Chef 10 : une radiation de 12 mois ; Chef 11 : une radiation de 12 mois ; Chef 12 : une radiation de 12 mois ; Chef 13 : une radiation de 12 mois ; Chef 14 : une radiation de 12 mois ; Chef 15 : une radiation de 12 mois ; Chef 16 : une radiation de 12 mois ; Chef 17 : une radiation de 12 mois ; Chef 18 : une radiation de 12 mois.

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DÉCLARE que les périodes de radiation temporaire imposées à l’intimé seront purgées de façon concurrente pour un total de 24 mois ;

ORDONNE la publication d’un avis de radiation temporaire dans le « Journal de Montréal » ;

CONDAMNE l’intimé au paiement de tous les déboursés incluant les frais de publication de l’avis de radiation temporaire.

Me Patrick de Niverville, avocat Président

M. Yvan Roy, expert en sinistre Membre

Mme Lise Martin, expert en sinistre Membre

Me Marie-Hélène Sylvestre Procureure de la partie plaignante

M. Daniel Legault (se représente seul) Date d’audience : 17 novembre 2022 (par visioconférence)

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