Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

COMITÉ DE DISCIPLINE CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES CANADA PROVINCE DE QUÉBEC

: 2021-12-05(E) DATE :

LE COMITÉ : M e Daniel M. Fabien M e Martine Carrier, FPAA, expert en sinistre M me Lise Martin, PAA, expert en sinistre

Vice-président Membre Membre

M E YANNICK CHARTRAND, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

c.

Partie plaignante

VÉRONIQUE DESBIENS, inactive et sans mode d’exercice comme expert en sinistre Partie intimée

DÉCISION SUR LA SANCTION ORDONNANCE DE NON-DIVULGATION, NON-PUBLICATION ET NON-DIFFUSION DES NOMS DES ASSURÉS, DES PIÈCES P-34 À P-46 INCLUSIVEMENT AINSI QUE DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS SE RETROUVANT À LA PIÈCE P-47, LE TOUT EN VERTU DE L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS.

I. Introduction [1] Le 28 novembre 2022, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages (le « Comité ») procède à l’audition sur la sanction dans le présent dossier.

[2]

[3]

M

e Yannick Chartrand, ès qualités de syndic est représenté par M

e Sylvie Poirier.

Quant à l’intimée, elle est présente et n’est pas représentée par avocat.

2021-12-05(E) PAGE : 2 [4] Le 28 novembre 2022, suite à l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité sur chacun des chefs d’une plainte modifiée, l’intimée est déclarée coupable comme suit :

1. À Chambly, le ou vers le 29 août 2019, dans le dossier de réclamation no xxxxxx8871 des assurés R.G. et G.M.G. dont elle assurait le traitement pour La compagnie d’assurance Belair inc., a procédé au paiement d’une somme de 1 127,04 $ à R.G. par virement Interac à l’adresse courriel de celui-ci, […] dont au moins 1 069,55 $ fut payé sans aucune justification, en contravention de l’article 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

2. À Chambly, le ou vers le 14 septembre 2019, dans le dossier de réclamation no xxxxxx8871 des assurés R.G. et G.M.G. dont elle assurait le traitement pour La compagnie d’assurance Belair inc., a procédé au paiement d’une somme de 6 116,67 $ par l’émission d’un chèque à l’ordre de R.G., […] dont au moins 5 743,00 $ fut payé sans aucune justification, en contravention de l’article 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

3. […] ; 4. À Chambly, le ou vers le 28 novembre 2019, dans le dossier de réclamation no xxxxxx8871 des assurés R.G. et G.M.G. dont elle assurait le traitement pour La compagnie d’assurance Belair inc., a procédé au paiement d’une somme de 4 956 $ par l’émission d’un chèque à l’ordre de R.G. et G.M.G., alors que ce paiement n’était pas requis et sans aucune justification, en contravention de l’article 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

5. […] ; 6. À Chambly, le ou vers le 28 novembre 2019, dans le dossier de réclamation no xxxxxx5894 des assurés R.G. et G.M.G. dont elle assurait le traitement pour La compagnie d’assurance Belair inc., a procédé au paiement d’une somme de 14 026,33 $ par l’émission d’un chèque à l’ordre de R.G. et G.M.G., […] dont au moins 6 236,74 $ fut payé sans aucune justification, en contravention de l’article 58(1) du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

7. […] ; 8. À Chambly, le ou vers le 6 février 2020, a détourné une somme de 9 500 $ dans le dossier de réclamation no xxxxxx5690 de l’assuré C.G. dont elle assurait le traitement pour Intact Compagnie d’assurance, en procédant au virement de cette somme par Interac à R.G., un tiers n’ayant aucun lien avec ce dossier, en contravention de l’article 48 du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

9. À Chambly, le ou vers le 6 février 2020, a modifié les renseignements apparaissant au dossier de réclamation no xxxxxx5690 d’Intact Compagnie d’assurance, en y remplaçant le nom de l’assuré C.G. par celui de R.G., le temps de procéder au virement d’une somme de 9 500 $, puis y a réinscrit le nom de l’assuré C.G. immédiatement après, en contravention de l’article 48 du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

2021-12-05(E)

PAGE : 3

10. À Chambly, le ou vers le 7 février 2020, a détourné une somme de 9 500 $ dans le dossier de réclamation no xxxxxx9674 de l’assuré P.W. dont elle assurait le traitement pour Intact Compagnie d’assurance, en procédant au virement de cette somme par Interac à R.G., un tiers n’ayant aucun lien avec ce dossier, en contravention avec l’article 48 du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

11. À Chambly, le ou vers le 7 février 2020, a modifié les renseignements apparaissant au dossier de réclamation no xxxxxx9674 d’Intact Compagnie d’assurance, en y remplaçant le nom de l’assuré P.W. par celui de R.G., le temps de procéder à un virement de 9 500 $, puis y a réinscrit le nom de l’assuré P.W. immédiatement après, en contravention avec l’article 48 du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

12. À Chambly, le ou vers le 10 février 2020, a détourné une somme de 6 473,67 $ dans le dossier de réclamation no xxxxxx1876 de l’assuré D.G. dont elle assurait le traitement pour Intact Compagnie d’assurance, en procédant au virement de cette somme par Interac à R.G., un tiers n’ayant aucun lien avec ce dossier, en contravention avec l’article 48 du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

13. À Chambly, le ou vers le 10 février 2020, a modifié les renseignements apparaissant au dossier de réclamation no xxxxxx1876 d’Intact Compagnie d’assurance, en y remplaçant le nom de l’assuré D.G. par celui de R.G. le temps de procéder à un virement de 6 473,67 $, puis y a réinscrit le nom de l’assuré Succession D.G. immédiatement après, en contravention avec l’article 48 du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

14. À Chambly, le ou vers le 12 février 2020, a détourné une somme de 5 589,05 $ dans le dossier de réclamation no xxxxxx7569 de l’assuré M.P. dont elle assurait le traitement pour La compagnie d’assurance Belair inc., en procédant au virement de cette somme par Interac à R.G., un tiers n’ayant aucun lien avec ce dossier, en contravention avec l’article 48 du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4);

15. À Chambly, le ou vers le 12 février 2020, a modifié les renseignements apparaissant au dossier de réclamation no xxxxxx7569 de La compagnie d’assurance Belair inc., en y remplaçant le nom de l’assuré M.P. par celui de R.G. le temps de procéder à un virement de 5 589,05 $, puis y a réinscrit le nom de l’assuré M.P. immédiatement après, en contravention avec l’article 48 du Code de déontologie des experts en sinistre (RLRQ, c. D-9.2, r. 4).

II. La preuve sur sanction [5] Les pièces documentaires P-1 à P-51 sont déposées en preuve avec le consentement de l’intimée et l’exposé des faits sous la cote P-52.

[6] [7]

L’intimée souhaite témoigner. Elle est donc assermentée par le Comité. Ci-après l’essentiel de sa déposition :

2021-12-05(E) PAGE : 4 à l’époque des faits relatés à la plainte, elle souffrait d’une dépression majeure;

III.

elle ne voulait que dormir; de plus, elle se bat depuis quatre ans contre un cancer; elle ne comprenait pas ce qui arrivait et ce qu’elle faisait à l’époque; elle avait beaucoup trop de dossiers en cours; elle voulait juste que cela se termine; elle a été autodestructrice (autosabotage).

Représentations sur la sanction

[8] En premier lieu, M e Poirier discute des chefs 1, 2, 4 et 6. [9] Elle est d’avis qu’objectivement, les gestes posés sur chacun de ces chefs ne peuvent être considérés comme intentionnels considérant l’état de dépression dans lequel se trouvait l’intimée. De plus, certaines sommes versées à des assurés étaient justifiées, d’autres non.

[10] Quant aux chefs 8 à 15, les infractions commises sont d’une grande gravité objective puisqu’il s’agissait d’un stratagème frauduleux pour cacher des paiements.

[11] [12]

Les gestes étaient non seulement délibérés, mais prémédités et répétitifs. À propos des facteurs subjectifs, M e Poirier souligne les éléments suivants : l’intimée n’a pas d’antécédent disciplinaire; elle a plaidé coupable à la première occasion; elle a reconnu avoir posé les gestes; elle était en dépression à l’époque; elle est toujours en dépression aujourd’hui; la dépression de l’intimée ne peut pas expliquer les gestes posés sur les chefs 8 à 15;`

de même, il est difficile de croire qu’elle ne connaissait pas R.G.; le risque de récidive est élevé, cependant, l’intimée ne veut plus revenir à la profession.

[13] M e Poirier souligne que les circonstances de la présente affaire sont touchantes sur le plan humain. Toutefois, le Comité a le devoir de protéger le public.

2021-12-05(E) PAGE : 5 [14] Ainsi donc, la partie plaignante nous suggère d’imposer les sanctions suivantes à l’intimée, soit :

Sur les chefs 1, 2, 4 et 6, la radiation temporaire du certificat de l’intimée pour une période de 3 ans;

Sur les chefs 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14 et 15, la radiation temporaire du certificat de l’intimée pour une période de 5 ans;

Que les périodes de radiation sur les chefs 1, 2, 4 et 6 ainsi que sur les chefs 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14 et 15 soient purgées de façon concurrente entre elles, pour une période de radiation totale de 5 ans;

Que les frais de l’instance soient à la charge de l’intimée; Un avis de radiation temporaire soit publié, aux frais de l’intimée, à compter de la remise en vigueur de son certificat.

[15] Questionnée par le vice-président du Comité, l’intimée est en accord avec la sanction suggérée par le syndic.

[16] L’intimée nous confirme par ailleurs qu’elle n’a pas l’intention de faire un retour à la profession.

IV.

Analyse et décision

[17] Le Comité considère qu’il est juste et approprié d’imposer à l’intimée les sanctions suggérées par la partie plaignante.

[18] En tenant compte des représentations du syndic, le Comité considère que la sanction susdite, dans sa globalité, constitue une sanction qui est appropriée dans les circonstances, et ce, après avoir tenu compte et fait l’évaluation de tous les facteurs tant aggravants qu’atténuants 1 .

[19] De plus, puisque l’intimée ne pratique pas actuellement, la radiation de 5 ans ne sera exécutoire qu’à compter de la remise en vigueur de son certificat

2 .

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE : IMPOSE à l’intimée les sanctions suivantes sur chacun des chefs d’accusation pour lesquels elle a été reconnue coupable, soit :

1

2

BERNARD, P. La sanction en droit disciplinaire : quelques réflexions, dans « Développement récent en déontologie, droit professionnel et disciplinaire », S.F.P.B.Q., 2004, 2006, pp. 71 et suivants; Lambert c. Agronomes, 2012 QCTP 39 (CanLII);

2021-12-05(E) PAGE : 6 Chefs 1, 2, 4 et 6 : une radiation temporaire de 3 ans sur chacun des chefs à être purgées de façon concurrente entre elles;

Chefs 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14 et 15: une radiation temporaire de 5 ans sur chacun des chefs à être purgées de façon concurrente entre elles;

DÉCLARE que les périodes de radiation temporaire deviendront exécutoires à la date de remise en vigueur du certificat de l’intimée, le cas échéant, pour une période de radiation temporaire totale de 5 ans;

ORDONNE la publication d’un avis de radiation temporaire, aux frais de l’intimée, à compter de la remise en vigueur de son certificat ;

CONDAMNE l’intimée au paiement de tous les déboursés, y compris les frais de publication de l’avis de radiation, le cas échéant.

M e Sylvie Poirier Procureure de la partie plaignante

__________________________________ M e Daniel M. Fabien Vice-président du comité de discipline

__________________________________ M e Martine Carrier, FPAA, expert en sinistre Membre du comité de discipline

__________________________________ M me Lise Martin, PAA, expert en sinistre Membre du comité de discipline

M me Véronique Desbiens, présente et non représentée Date d’audience : 28 novembre 2022 par visioconférence

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.