Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES CANADA PROVINCE DE QUÉBEC

: 2021-09-02(C)

DATE : 23 mars 2022

LE COMITÉ : M e Daniel M. Fabien, avocat M. Antoine El-Hage, courtier en assurance de dommages M. Benoit Latour, courtier en assurance de dommages

Vice-Président Membre

Membre

M e MARIE-JOSÉE BELHUMEUR, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante c. KATY RICHARD, courtier en assurance de dommages des particuliers (4B) Partie intimée

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

[1] Le 18 février 2022, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages (« le Comité ») est réuni pour instruire la plainte logée contre l’intimée Katy Richard dans le présent dossier.

e Maryse

[2] M e Marie-Josée Belhumeur, ès qualités de syndic, est représentée par M Ali. Quant à l’intimée, elle est présente et représentée par M e Éric Lemay.

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[3] Dès le début de l’audition, nous sommes informés qu’une entente est intervenue entre les parties et que suite au plaidoyer de culpabilité de l’intimée, les parties déposeront un résumé conjoint des faits et elles nous soumettront une recommandation conjointe sur sanction. Cette plainte comporte 3 chefs d’infractions.

I.

Le plaidoyer de culpabilité de l’intimée

[4] L’intimée Katy Richard enregistre un plaidoyer de culpabilité sur chacun des chefs de la plainte du 28 septembre 2021, laquelle se lit comme suit :

1. À Québec, à compter du mois de janvier 2015, alors qu’elle était certifiée en assurance de dommages des particuliers, a conseillé l’assurée XXXX-6553 Québec inc. quant à des protections d’assurance pour une terre à bois lui appartenant, en contravention avec l’article 2 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages et l’article 7 du Règlement relatif à la délivrance et au renouvellement du certificat de représentant;

2. À Québec, à compter du 8 avril 2020, dans le cadre du renouvellement du contrat d’assurance habitation no MR9397031 émis par Royal & Sun Alliance du Canada, société d’assurances (RSA), a exercé ses activités de manière négligente et/ou n’a pas agi avec transparence envers les assurés A.T. et N.B., en omettant de leur décrire les nouvelles conditions audit contrat d’assurance et les protections proposées, en contravention avec les articles 27 et 39 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et les articles 25 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

3. À Québec, dans le cadre du renouvellement du contrat d’assurance habitation no MR9397031 émis par Royal & Sun Alliance du Canada, société d’assurances (RSA), a fait des déclarations aux assurés A.T. et N.B. fausses, trompeuses et/ou susceptibles de les induire en erreur :

a) Les 23 et 24 avril 2020, concernant l’émission rétroactive d’un contrat d’assurance;

b) Les 24 avril et 4 mai 2020, concernant la réception d’une confirmation des modifications au renouvellement du contrat d’assurance;

contrevenant ainsi, à chacune de ces occasions, à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et aux articles 15, 25, 37(1), 37(5) et 37(7) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

[5] Séance tenante, le Comité a pris acte du plaidoyer de culpabilité de l’intimée et a déclaré celle-ci coupable des infractions reprochées.

[6] Sur le chef 1, l’intimée est déclarée coupable d’avoir enfreint l’article 2 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

[7]

Cet article stipule ce qui suit :

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Art. 2. Le représentant en assurance de dommages doit s’assurer que lui-même, ses mandataires et ses employés respectent les dispositions de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (chapitre D-9.2) et celles de ses règlements d’application.

[8] Quant au chef 2, l’intimée est coupable d’avoir contrevenu à l’article 37 (1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, puisqu’elle a été négligente dans l’exercice de ses activités. Cette disposition prévoit :

Art. 37. Constitue un manquement à la déontologie, le fait pour le représentant en assurance de dommages d’agir à l’encontre de l’honneur et de la dignité de la profession, notamment :

1 o d’exercer ses activités de façon malhonnête ou négligente; [9] Relativement aux chefs 3a) et 3b), l’intimée est coupable d’avoir contrevenu à l’article 37(7 qui édicte :

o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages

Art. 37. Constitue un manquement à la déontologie, le fait pour le représentant en assurance de dommages d’agir à l’encontre de l’honneur et de la dignité de la profession, notamment :

de faire une déclaration fausse, trompeuse ou susceptible d’induire en erreur; [10] Considérant ce qui précède, un arrêt conditionnel des procédures est ordonné sur les autres dispositions législatives et réglementaires alléguées au soutien des chefs d’accusation susdits.

II.

Preuve sur sanction

[11] Les parties déposent de consentement les pièces documentaires PS-1 à PS-24. [12] Un résumé conjoint des faits est également introduit en preuve sous la cote PS-25. [13] Il nous fait voir la trame factuelle suivante :

1. Pendant la période visée par la plainte disciplinaire, l’Intimée était certifiée auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF) à titre de courtier en assurance de dommages et était, de ce fait, encadrée par la Chambre de l’assurance de dommages, tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique de l’AMF, pièce PS-1;

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2. Le 26 janvier 2015, A.T. communique avec l’Intimée afin d’ajouter une terre à bois, au nom de sa compagnie XXXX-6553 Québec inc., au contrat d’assurance habitation numéro MR9397031 émis par Royal & Sun Alliance du Canada, société d’assurances (« RSA ») au nom de A.T. et N.B., tel qu’il appert d’enregistrements de conversations téléphoniques à ce sujet, pièce PS-2 en liasse;

3. Le 28 janvier 2015, l’Intimée met une note au dossier du cabinet confirmant qu’elle a procédé à l’ajout de la terre à bois, comme suit : « Terre à bois à usage personnel située sur le lot 915-916-917 à St-Luc de Bellechasse, au nom de 9108-6553 Québec inc. La responsabilité est limitée aux lieux », tel qu’il appert de ladite note, pièce PS-3, et du contrat d’assurance modifié, pièce PS-4;

4. Le 29 juin 2015, une nouvelle modification a été apportée par l’Intimée au contrat d’assurance habitation numéro MR9397031 suite à l’ajout d’un conteneur sur la terre à bois, tel qu’il appert de l’enregistrement de la conversation téléphonique qui a eu lieu entre A.T. et l’Intimée à cet effet et des notes au dossier du cabinet de l’Intimée, pièce PS-5 en liasse et pièce PS-6;

5. Le 6 juillet 2015, l’Intimée répond aux questions de A.T. concernant la couverture visant le conteneur sur la terre à bois, tel qu’il appert de la note au dossier du cabinet de l’Intimée, pièce PS-7;

6. Le 11 janvier 2016, l’Intimée donne des conseils à A.T. concernant l’ajout d’une chargeuse hydraulique appartenant à XXXX-6553 Québec inc. - sur la terre à bois au contrat d’assurance habitation numéro MR9397031, tel qu’il appert d’enregistrements de conversations téléphoniques entre A.T. et l’Intimée à cet effet, pièce PS-8 en liasse;

7. Le lendemain, l’Intimée confirme à A.T. que la chargeuse hydraulique sera ajoutée au contrat d’assurance automobile à son nom, tel qu’il appert de l’enregistrement de conversation téléphonique entre A.T. et l’Intimée à cet effet, pièce PS-9;

8. La note concernant la terre à bois continue à apparaitre au contrat d’assurance habitation numéro MR9397031 en date du 9 septembre 2016, tel qu’il appert du relevé de facturation, pièce PS-10, et du 26 septembre 2016, tel qu’il appert du relevé de facture

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portant cette date, pièce PS-11;

9. Le 18 mars 2017, l’Intimée traite le renouvellement du contrat d’assurance habitation numéro MR9397031 en maintenant la couverture pour la terre à bois, tel qu’il appert de sa note au dossier du cabinet, pièce PS-12;

10. La note concernant la terre à bois figure au contrat d’assurance habitation numéro MR9397031 en date du 16 avril 2019, tel qu’il appert du relevé de facturation, pièce PS-13;

11. Le ou vers le 8 avril 2020, après avoir reçu l’avis de renouvellement du contrat d’assurance habitation numéro MR9397031, pièce PS-14, et trouvé une assurance moins chère, A.T. communique avec l’Intimée afin de résilier le contrat de RSA, tel qu’il appert de l’enregistrement d’une première conversation téléphonique à ce sujet, pièce PS-15;

12. Après des démarches auprès de l’assureur, l’Intimée négocie une prime inférieure, tel qu’il appert d’un relevé de facturation daté du 8 avril 2020, pièce PS-16;

13. L’Intimée communique avec A.T. la même journée afin de l’informer de la prime réduite qu’elle a réussi à négocier, tel qu’il appert de l’enregistrement de la seconde conversation téléphonique de la journée entre A.T et l’Intimée, pièce PS-17;

14. A.T. n’est cependant pas informé que cette prime réduite est liée à : a- Une franchise de 1 000$ pour les dommages aux biens, alors qu’une franchise de 500$ était prévue dans l’avis de renouvellement;

b- Une franchise de 1 000$ pour les dommages d’eau au-dessus du sol, alors qu’une franchise de 500$ était prévue dans l’avis de renouvellement;

c- Une franchise de 1 000$ pour les dommages d’eau du sol et du sous-sol incluant le refoulement d’égouts, alors qu’une franchise de 500$ était prévue dans l’avis de renouvellement;

d- Une franchise de 1 000$ pour l’entrée d’eau, alors qu’une franchise de 500$ était prévue dans l’avis de renouvellement;

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e- Une franchise de 1 000$ en cas d’incendie, explosion ou fumée suite à un tremblement de terre, alors qu’une franchise de 500$ était prévue dans l’avis de renouvellement;

Tel qu’il appert des pièces PS-14 et PS-16; 15. Le 23 avril 2020, n’ayant pas reçu les documents confirmant de la prime réduite annoncée par l’Intimée, A.T. lui transmet une demande de résiliation du contrat d’assurance habitation numéro MR9397031 ainsi qu’une preuve d’assurance en date du 16 avril 2020 auprès de La Capitale, tel qu’il appert du courriel de A.T. à cet effet, pièce PS-18 en liasse ;

16. La même journée, l’Intimée laisse un message à A.T., en lui mentionnant notamment ce qui suit :

« J’ai vu que vous m’avez envoyé un courriel dans ma boîte en fin de jour… en fin d’avant-midi vous mentionnez que vous désirez résilier. Par contre, pour la résiliation rétroactive, ça me prend une copie de police officielle pour le 16 avril. Donc l’assureur La Capitale ne peut pas émettre une police d’assurance le 23 mai, le 23 avril effectif du 16. Y a personne qui fait ça, aucun assureur sur le marché »

Tel qu’il appert de l’enregistrement du message, pièce PS-19; 17. Le lendemain, l’Intimée communique avec A.T. et lui dit notamment : « Ils peuvent pas retourner en arrière, personne peut faire ça selon l’AMF. Pas parce qu’il a fourni une preuve d’assurance datée du 23 avril. Il a produit ça le 23 mais c’est pas la copie de la police qui confirme tout. Je vous ai renvoyé un courriel vous disant, confirmant et je pense que vous êtes en mesure que la situation actuellement est difficile et on a pas les mêmes méthodes. On est plus long qu’à l’habitude. Je vous ai confirmé, j’ai eu la confirmation de l’assureur avec la correction. Je vous rappelle et ensuite j’ai reçu votre signature d’annulation.

[…]

J’ai eu la confirmation de l’assureur écrite. J’attendais ça pour vs envoyer la bonne

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nouvelle et j’ai reçu votre signature d’annulation. On est capable de se parler avant de s’envoyer des signatures d’annulation.

[…]

Parce que je l’ai gardée de mon côté la modification, je l’ai pas faite poster. Je suis honnête là, je l’ai ici. Je l’ai ici entre guillemets, elle est au bureau donc j’attends…

[…]

Elle est papier. Je vais l’avoir par internet probablement lundi matin » Tel qu’il appert des enregistrements de deux conversations téléphoniques entre l’Intimée et A.T., pièce PS-20 en liasse;

18. Le 4 mai 2020, n’ayant pas encore reçu les documents confirmant de la prime réduite annoncée par l’Intimée, A.T. communique avec elle, tel qu’il appert de l’enregistrement de la conversation téléphonique intervenue, pièce PS-21;

19. L’Intimée explique à A.T. que les documents sont « bloqués » chez l’assureur, tel qu’il appert de la pièce PS-21;

20. A.T. fait la même démarche le 27 mai 2020, alors qu’il n’a toujours pas reçu les documents de l’assureur, tel qu’il appert de l’enregistrement de la conversation téléphonique intervenue, pièce PS-22;

21. L’Intimée explique à A.T. avoir communiqué avec RSA peu après leur appel précédent et que l’assureur devrait « débloquer » les documents prochainement, tel qu’il appert de l’enregistrement, pièce PS-22;

22. Le 6 août 2020, après que A.T. ait obtenu une copie de son contrat d’assurance habitation directement auprès de RSA, il communique avec l’Intimée pour lui souligner les différences entre les couvertures prévues dans le contrat de RSA et celui de La Capitale, tel qu’il appert d’un courriel de A.T. à cet effet, pièce PS-23;

23. Il appert des notes de police qu’aucune démarche a été effectuée auprès de RSA

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entre le 8 avril 2020 et le 23 février 2021, tel qu’il appert de captures d’écran du dossier de l’assureur, pièce PS-24;

24. L’Intimée n’a pas d’antécédent disciplinaire; 25. L’Intimée a bien collaboré à l’enquête du syndic; [14] Il découle du résumé des faits que l’intimée a vraiment fait preuve de négligence dans l’exercice de ses activités.

[15] Il ressort aussi du témoignage et de la déclaration assermentée de l’intimée que le risque de récidive est faible puisqu’elle a beaucoup appris du processus disciplinaire.

[16] De plus, la situation de l’intimée fait en sorte qu’elle a définitivement besoin d’un délai pour payer. À ce sujet, elle demande au Comité de lui accorder 18 mois.

III.

Recommandation conjointe sur sanction

[17] M e Ali déclare au Comité que les parties se sont entendues sur les sanctions suivantes, à savoir :

Chef n o 1 : une amende de 3 000 $ ; Chef n o 2 : une amende de 2 500 $ ; Chef n o 3a) : une amende de 2 500 $ ; Chef n o 3b) : une amende de 2 500 $ ; Condamner l’intimée aux frais de l’instance.

[18] Bref, des amendes totalisant la somme de 10 500 $ plus les déboursés. [19] Toutefois, considérant le principe de la globalité et la méthode privilégiée par la Cour du Québec dans l’affaire Pluviose 1 , les parties souhaitent que l’amende imposée sur le chef 3b) soit modulée par l’imposition d’une réprimande, pour une amende totale et globale de 8 000 $.

[20] M e Ali nous explique pour quelles raisons les parties nous recommandent d’imposer les sanctions ci-haut décrites.

1 Gingras c. Pluviose, 2020 QCCQ 8495 (QC OACIQ);

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[21] Afin d’appuyer la recommandation commune, la procureure du syndic nous réfère notamment aux précédents jurisprudentiels suivants :

ChAD c. La Rivière, 2018 CanLII 122743 (QC CDCHAD) ChAD c. Trépanier, 2018 CanLII 38255 (QC CDCHAD) ChAD c. Thiffault, 2019 CanLII 112813 (QC CDCHAD) Gingras c. Pluviose, 2020 QCCQ 8495 (CanLII) [22] M e Lemay est d’avis que l’intimée a compris le message. Elle veut maintenant tourner la page et poursuivre sa carrière dans un environnement qui tient compte de ses limites. Également, M e Lemay exprime l’opinion que l’intimée « coche toutes les cases de la réhabilitation ».

[23] Quant à un délai pour payer les amendes et débours, le vice-président intervient afin d’expliquer aux parties la manière dont la ChAD fonctionne lorsque des délais sont accordés pour payer. Ainsi donc, l’intimée accepte qu’en cas de défaut, elle perde le bénéfice du terme.

IV.

Analyse et décision

A) La recommandation conjointe [24] La jurisprudence a établi à maintes reprises l’importance qu’un comité de discipline doit accorder aux recommandations conjointes 2 .

[25] Plus récemment, la Cour suprême confirmait que les recommandations conjointes sont essentielles au bon fonctionnement de la justice 3 .

[26] Dans cet arrêt, la Cour suprême précise que le Comité doit faire preuve de retenue lorsque les procureurs des parties présentent une recommandation conjointe sur sanction.

[27] Ci-après quelques extraits pertinents de cet arrêt important, à savoir : [40] En plus des nombreux avantages que les recommandations conjointes offrent aux participants dans le système de justice pénale, elles jouent un rôle vital en contribuant à l’administration de la justice en général. La perspective

2 Gauthier c. Médecins (Ordre professionnel des), 2013 CanLII 82189 (QC TP) et Chan c. Médecins (Ordre professionnel des), 2014 QCTP 5 (CanLII); 3 R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43 QCTP 5 (CanLII);

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d’une recommandation conjointe qui comporte un degré de certitude élevé encourage les personnes accusées à enregistrer un plaidoyer de culpabilité. Et les plaidoyers de culpabilité font économiser au système de justice des ressources et un temps précieux qui peuvent être alloués à d’autres affaires. Il ne s’agit pas d’un léger avantage. Dans la mesure elles font éviter des procès, les recommandations conjointes relatives à la peine permettent à notre système de justice de fonctionner plus efficacement. Je dirais en fait qu’elles lui permettent de fonctionner. Sans elles, notre système de justice serait mis à genoux, et s’effondrerait finalement sous son propre poids.

[41] Cependant, comme je l’ai mentionné, la présentation de recommandations conjointes ne reste possible que si les parties sont très confiantes qu’elles seront acceptées. Si elles doutent trop, les parties peuvent plutôt choisir d’accepter les risques d’un procès ou d’une audience de détermination de la peine contestée. Si les recommandations conjointes en viennent à être considérées comme des solutions de rechange insuffisamment sûres, l’accusé en particulier hésitera à renoncer à un procès et à ses garanties concomitantes, notamment la faculté cruciale de mettre à l’épreuve la solidité de la preuve du ministère public.

[42] D’où l’importance, pour les juges du procès, de faire montre de retenue et de ne rejeter les recommandations conjointes que lorsque des personnes renseignées et raisonnables estimeraient que la peine proposée fait échec au bon fonctionnement du système de justice. Un seuil moins élevé que celui-ci jetterait trop d’incertitude sur l’efficacité des ententes de règlement. Le critère de l’intérêt public garantit que ces ententes de règlement jouissent d’un degré de certitude élevé.

(nos soulignements)

[28] Dans l’affaire Ungureanu 4 , le Tribunal des professions décrit lui aussi qu’elle est la fonction des recommandations communes en matière disciplinaire :

[21] Les ententes entre les parties constituent en effet un rouage utile et parfois nécessaire à une saine administration de la justice. Lors de toute négociation, chaque partie fait des concessions dans le but d'en arriver à un règlement qui convienne aux deux. Elles se justifient par la réalisation d'un objectif final. Lorsque deux parties formulent une suggestion commune, elles doivent avoir une expectative raisonnable que cette dernière sera respectée. Pour cette raison, une suggestion commune formulée par deux avocats d'expérience devrait être respectée à moins qu'elle ne soit déraisonnable, inadéquate ou contraire à l'intérêt public ou de nature à déconsidérer l'administration de la justice.

4 Infirmières et Infirmiers auxiliaires (Ordre professionnel de) c. Ungureanu, 2014 QCTP 20 (CanLII);

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(nos soulignements) [29] En vérité, lorsqu’une suggestion commune est formulée par des avocats d’expérience, notre marge de manœuvre est excessivement limitée. Autrement dit, il est pratiquement impossible de l’écarter, à moins qu’elle soit contraire à l’intérêt public ou au bon fonctionnement de notre système de justice disciplinaire.

B)

Décision

[30] La recommandation conjointe formulée par les parties est entérinée séance tenante par le Comité.

[31] Comme établi par la Cour d’appel dans l’arrêt Pigeon c. Daigneault disciplinaire doit atteindre les objectifs suivants :

5 , la sanction

en premier lieu, la protection du public ; ensuite, la dissuasion du professionnel de récidiver ; et l'exemplarité à l'égard des membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables ;

et finalement, le droit du professionnel visé d'exercer sa profession. [32] Or, nous sommes d’avis que la suggestion commune des parties tient compte de la gravité objective des infractions et, d’autre part, qu’elle assure la protection du public sans punir outre mesure l’intimée.

[33] Quant aux frais, l’intimée devra assumer les frais et déboursés de l’instance. [34] L’intimée bénéficiera d’un délai de 18 mois pour acquitter les amendes de 8 000 $ et les débours, délai qui sera calculé uniquement à compter du 31 e jour suivant la signification de la présente décision.

5 2003 CanLII 32934 (QC CA), aux paragraphes 38 et suivants;

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PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimée Katy Richard sur chacun des chefs de la plainte ;

DÉCLARE l’intimée coupable du chef n o 1 de la plainte pour avoir contrevenu à l’article 2 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages ;

DÉCLARE l’intimée coupable du chef n o 2 de la plainte pour avoir contrevenu à l’article 37(1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages ;

DÉCLARE l’intimée coupable des chefs n os 3a) et 3b) de la plainte pour avoir contrevenu à l’article 37(7 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages ;

PRONONCE un arrêt conditionnel des procédures à l’égard de toutes les autres dispositions législatives et réglementaires alléguées au soutien des chefs d’accusation susdits ;

Sur le chef n o 1 : IMPOSE à l’intimée une amende de 3 000 $ ; Sur le chef n o 2 : IMPOSE à l’intimée une amende de 2 500 $ ; Sur le chef n o 3a) : IMPOSE à l’intimée une amende de 2 500 $ ; Sur le chef n o 3b) : IMPOSE à l’intimée une réprimande ; CONDAMNE l’intimée au paiement de tous les déboursés ; ACCORDE à l’intimée un délai de 18 mois pour acquitter les amendes et déboursés, le tout en 18 versements mensuels, égaux et consécutifs, délai qui sera calculé uniquement à compter du 31e jour suivant la signification de la présente décision ;

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DÉCLARE que si l’intimée est en défaut de payer à échéance l’un ou l’autre des versements susdits, elle perdra le bénéfice du terme et toute somme alors impayée deviendra immédiatement due et exigible.

____________________________________ M e Daniel M. Fabien, avocat Vice-président du Comité de discipline

____________________________________ M. Antoine El-Hage, courtier en assurance de dommages Membre

____________________________________ M. Benoit Latour, courtier en assurance de dommages Membre

M e Maryse Ali Procureure de la partie plaignante

M e Éric Lemay Procureur de la partie intimée

Date d’audience : 18 février 2022

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