Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES CANADA PROVINCE DE QUÉBEC

: 2021-02-01(A)

DATE : 29 novembre 2021

LE COMITÉ : Me Daniel M. Fabien, avocat Mme Mireille Gauthier, PAA, agent en assurance Membre de dommages Mme Mélanie Couture, agent en assurance de dommages

Vice-président

Membre

ME MARIE-JOSÉE BELHUMEUR, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages Partie plaignante c. CHRISTIAN DUPUIS, agent en assurance de dommages (3A) Partie intimée

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

ORDONNANCE DE NON-DIVULGATION, NON-PUBLICATION ET NON-DIFFUSION DES NOMS DES ASSURÉS VISÉS PAR LES PLAINTES ET DES RENSEIGNEMENTS PERMETTANT DE LES IDENTIFIER, EN VERTU DE L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS.

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I. L’audition disciplinaire

[1] dommages (le « Comité ») procède par visioconférence Zoom à l’instruction de la plainte portée contre l’intimé dans le présent dossier. [2] [3] [4] l’ensemble des chefs de la plainte et qu’il y aura une recommandation conjointe sur sanction. Le seul point sur lequel les parties ne s’entendent pas est la question relative à l’application du principe de la globalité. Bref, la partie plaignante recherche une amende globale plus élevée que la partie intimée. Le Comité devra donc trancher cette question. [5] confirme qu’il plaide coupable à chacun des chefs d’accusation de la plainte. [6] déclare coupable des infractions reprochées.

Le 22 septembre 2021, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de

L’intimé est présent lors de l’instruction et il est représenté par M e Patrick Garneau. M e Valérie Déziel représente le syndic M e Marie-Josée Belhumeur. D’entrée de jeu, M e Déziel informe le Comité que l’intimé plaide coupable à

Questionné par le président du Comité sur son plaidoyer de culpabilité, l’intimé

Séance tenante, le Comité prend acte du plaidoyer de culpabilité de l’intimé et le

II. La déclaration de culpabilité de l’intimé

[7] Le syndic reproche ce qui suit à l’intimé, soit :

« 1. Entre les ou vers les 29 janvier et 12 mars 2019, a tenu compte de l’intervention des tiers A.B. et M.-E.C. dans le cadre de gestes qu’il devait poser en lien avec la résiliation du contrat d’assurance agricole no F1102904301-60P émis par Promutuel Bois-Francs, société mutuelle d’assurance générale aux noms des assurés L.L. et C.R., concernant un immeuble situé au 300, chemin de l’Oiseau Bleu […], en contravention avec les articles 37(1) et 37(3) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages; 2. Entre les ou vers les 31 janvier et 12 mars 2019, n’a pas donné suite au mandat confié par les assurés L.L. et C.R., soit de procéder à la modification du contrat d’assurance propriétaire occupant no R1102904301-020P émis par Promutuel Bois-Francs, société mutuelle d’assurance générale, en contrat d’assurance locataire occupant, pour un immeuble situé au 300, chemin de l’Oiseau Bleu […], créant ainsi un découvert d’assurance technique, en contravention avec les articles 26 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages; 3. Entre les ou vers les 31 janvier et 11 février 2019, dans le cadre de la modification du contrat d’assurance propriétaire occupant no R1102904301 020P émis par Promutuel Bois-Francs, société mutuelle d’assurance générale,

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en contrat d’assurance locataire occupant no R1102904301-021P, pour un immeuble situé au 300, chemin de l’Oiseau Bleu […], a exercé ses activités de manière négligente et/ou a fourni à l’assurée L.L. des informations inexactes et/ou susceptibles de l’induire en erreur, en lui confirmant qu’elle était dûment assurée, en contravention avec les articles 15, 25, 37(1) et 37(7) du Code de déontologie des représentants en assurance dommages; 4. Entre les ou vers les 20 février et 5 avril 2019, a été négligent dans la tenue de dossier de ses clients A.B. et M.-E.C., notamment en omettant de noter adéquatement les conversations avec ces derniers au sujet de la règle proportionnelle et de l’avis de sinistre, leur teneur, les conseils et explications donnés, les instructions reçues des assurés et les décisions prises, en contravention avec les articles 85 à 88 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, 9 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages et 12 et 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome; 5. Le ou vers le 20 février 2019, a exercé ses activités de manière négligente et/ou a fait défaut d’agir en conseiller consciencieux, en omettant de conseiller aux assurés A.B. et M.-E.C. de faire appel à un évaluateur professionnel pour déterminer le montant d’assurance requis pour les bâtiments à assurer par le biais du contrat d’assurance agricole no 1100001278-81P émis par Promutuel Bois Francs, société mutuelle d’assurance générale, en contravention avec les articles 37(1) et 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages; 6. Entre les ou vers les 20 février et 1er mars 2019, a exercé ses activités de manière négligente et/ou a fait défaut d’agir en conseiller consciencieux, en omettant d’aviser les assurés A.B. et M.-E.C. de l’approche de l’échéance de la confirmation provisoire de l’assurance habitation et agricole pour l’immeuble situé au 300, chemin de l’Oiseau Bleu […], en contravention avec les articles 37(1) et 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages; 7. Entre les ou vers les 1er et 13 mars 2019, n’a pas donné suite au mandat confié par les assurés A.B. et M.-E.C., soit de souscrire le contrat d’assurance agricole no F1100001278-81P et le contrat d’assurance habitation no R11-00000975-02, auprès de Promutuel Bois-Francs, société mutuelle d’assurance générale pour un immeuble situé au 300, chemin de l’Oiseau Bleu […], créant ainsi un découvert d’assurance technique, en contravention avec les articles 26 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages; 8. Entre les ou vers les 20 février et 13 mars 2019, a exercé ses activités de manière négligente et/ou n’a pas donné suite au mandat confié, en souscrivant le contrat d’assurance agricole no F1100001278-81P auprès de Promutuel Bois-Francs, société mutuelle d’assurance générale, au nom de l’assuré A.B. seulement plutôt qu’aux noms des assurés A.B. et M.-E.C., et en omettant de

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mettre en place le paiement de la prime par douze prélèvements bancaires, en contravention avec les articles 26 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages; 9. Entre les ou vers les 20 janvier et 4 avril 2019, dans le cadre de la souscription du contrat d’assurance agricole no F1100001278-81P auprès de Promutuel Bois-Francs, société mutuelle d’assurance générale, a fait défaut de respecter le secret des renseignements personnels ou de nature confidentielle obtenus, en divulguant à L.L. des informations concernant la couverture d’assurance des assurés audit contrat A.B. et M.-E.C., sans avoir obtenu au préalable leur consentement, en contravention avec les articles 23 et 24 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages. »

[8] de déontologie des représentants en assurance de dommages, qui stipule :

Sur le chef 1, l’intimé est déclaré coupable d’avoir enfreint l’article 37(3 « Art. 37. Constitue un manquement à la déontologie, le fait pour le représentant en assurance de dommages d’agir à l’encontre de l’honneur et de la dignité de la profession, notamment: de tenir compte de toute intervention d’un tiers qui pourrait avoir une influence sur l’exécution de ses devoirs professionnels au préjudice de son client ou de l’assuré; »

[9] 37(1 o prévoit :

Quant aux chefs 2, 7 et 8, l’intimé est déclaré coupable d’avoir contrevenu à l’article ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages qui « Art. 37. Constitue un manquement à la déontologie, le fait pour le représentant en assurance de dommages d’agir à l’encontre de l’honneur et de la dignité de la profession, notamment: d’exercer ses activités de façon malhonnête ou négligente;

o ) du Code

o ) du Code

[10] Sur le chef 3, l’intimé est déclaré coupable d’avoir enfreint l’article 37(7 de déontologie des représentants en assurance de dommages, lequel stipule : « Art. 37. Constitue un manquement à la déontologie, le fait pour le représentant en assurance de dommages d’agir à l’encontre de l’honneur et de la dignité de la profession, notamment: de faire une déclaration fausse, trompeuse ou susceptible d’induire en erreur; »

[11] À l’égard du chef 4, l’intimé est déclaré coupable d’avoir enfreint l’article 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome, soit :

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« Art. 21. Les dossiers clients qu’un cabinet, un représentant autonome ou une société autonome inscrit dans la discipline de l’assurance de dommages doit tenir sur chacun de ses clients dans l’exercice de ses activités doivent contenir les mentions suivantes: son nom; le montant, l’objet et la nature de la couverture d’assurance; le numéro de police et les dates de l’émission du contrat et de la signature de la proposition, le cas échéant; le mode de paiement et la date de paiement du contrat d’assurance; la liste d’évaluation des biens de l’assuré transmise par celui-ci, le cas échéant. Tout autre renseignement ou document découlant des produits vendus ou des services rendus recueillis auprès du client doit également y être inscrit ou déposé. »

[12] Quant aux chefs 5 et 6, l’intimé est déclaré coupable d’avoir contrevenu à l’article 37(6 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, lequel prévoit :

« Art. 37. Constitue un manquement à la déontologie, le fait pour le représentant en assurance de dommages d’agir à l’encontre de l’honneur et de la dignité de la profession, notamment: de faire défaut d’agir en conseiller consciencieux en omettant d’éclairer les clients sur leurs droits et obligations et en ne leur donnant pas tous les renseignements nécessaires ou utiles; »

[13] Finalement, sur le chef 9, l’intimé est déclaré coupable d’avoir enfreint l’article 24 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, qui stipule : « Art. 24. Le représentant en assurance de dommages ne doit pas divulguer les renseignements personnels ou de nature confidentielle qu’il a obtenus autrement que conformément à la Loi, ni les utiliser au préjudice de son client ou en vue d’obtenir un avantage pour lui-même ou pour une autre personne. »

[14] Un arrêt des procédures est ordonné sur les autres dispositions réglementaires invoquées au soutien de ces chefs d’accusation.

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III. Le contexte [15] La partie plaignante dépose en preuve les pièces P-1 à P-9 avec le consentement de la partie intimée. [16] L’intimé est agent en assurance de dommages depuis 1987. Il est à l’emploi de Promutuel Bois-Francs, société mutuelle d’assurance, dont le siège est situé à Victoriaville, depuis 1995. [17] L.L. est propriétaire d’une ferme située à Val-des-Sources, autrefois la Ville d’Asbestos. À l’hiver 2019, il est convenu que la ferme sera cédée au couple B.et C. et que L.L. deviendra locataire d’une maison située sur la terre. [18] C’est dans le cadre de ce contexte, soit lors de la cession de la propriété de la ferme, que l’intimé a commis les fautes déontologiques décrites dans la plainte. [19] Évidemment, ce qui devait arriver est arrivé. Un sinistre non couvert s’est produit. Le 3 mars 2019, la toiture de l’écurie s’est effondrée. [20] À la demande de son avocat, l’intimé témoigne. [21] Il nous informe qu’après 37 ans dans le domaine de l’assurance de dommages, il entend prendre sa retraite au mois de mai 2022. [22] Évidemment, ses revenus vont diminuer de beaucoup à partir du moment il sera retraité. [23] D’où toute l’importance de l’application du principe de la globalité en l’espèce.

IV. Recommandation conjointe sur sanction [24] Quant aux facteurs atténuants, M e Déziel est d’avis que l’intimé a plaidé coupable à la première occasion, il n’a pas d’antécédent disciplinaire et les infractions ne visent qu’une seule trame factuelle. Il n’y a pas de malveillance et l’intimé n’a pas bénéficié des infractions. Le risque de récidive est faible puisque l’intimé ne travaille plus sur des risques agricoles et il prendra sa retraite dans quelques mois. [25] Relativement aux facteurs aggravants, l’avocate du syndic plaide : la gravité objective importante des fautes commises qui mettent en péril la protection du public; la police de la ferme a été résiliée; un sinistre n’a pas été couvert;

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il y a eu découvert d’assurance pour les anciens et nouveaux propriétaires de la ferme; la grande expérience de l’intimé au moment des faits.

[26] Sans tenir compte de la globalité, M e Déziel explique au Comité que les parties se sont entendues sur les sanctions suivantes : Chef n o 1 : une amende de 5 000 $; Chef n o 2 : une amende de 3 000 $; Chef n o 3 : une amende de 3000 $; Chef n o 4 : une amende de 2 500 $; Chef n o 5 : une amende de 2 500 $; Chef n o 6 : une amende de 2 500 $; Chef n o 7 : une amende de 3 000 $; Chef n o 8 : une amende de 3 000 $; Chef n o 9 : une amende de 2 500 $; Pour un total de 27 000 $, plus le paiement de tous les déboursés et frais de l’instance.

[27] En appliquant le principe de la globalité, M e Déziel nous demande de moduler les sanctions comme suit : Chef n o 1 : une amende de 3 000 $; Chef n o 2 : une amende de 2 000 $; Chef n o 3 : une amende de 2 000 $; Chef n o 4 : une amende de 2 000 $; Chef n o 5 : une amende de 2 000 $; Chef n o 6 : une réprimande; Chef n o 7 : une réprimande;

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Chef n o Chef n o Pour une amende globale de 13 000 $, plus le paiement de tous les déboursés et frais de l’instance.

8 : une réprimande; 9 : une amende de 2 000 $;

[28] Quant à M e Garneau, il nous demande d’appliquer le principe de la globalité de la sanction de la façon suivante : Chef n o 1 : une amende de 3 000 $; Chef n o 2 : une amende de 2 000 $; Chef n o 3 : une amende de 2 000 $; Chef n o 4 : une réprimande; Chef n o 5 : une réprimande; Chef n o 6 : une réprimande; Chef n o 7 : une réprimande; Chef n o 8 : une réprimande; Chef n o 9 : une réprimande; Pour une amende globale de 7 000 $, plus le paiement de tous les déboursés et frais de l’instance.

[29] M e Garneau rajoute que l’intimé voudrait pouvoir bénéficier d’un délai de 24 mois pour payer les amendes et déboursés, si l’amende globale imposée par le Comité est de 10 000 $ ou moins. Si l’amende devait être supérieure à 10 000 $, l’intimé voudrait bénéficier d’un délai de 36 mois pour payer, le tout avec déchéance du bénéfice du terme en cas de défaut. [30] Au soutien de la recommandation conjointe, M e Déziel nous invite à prendre en considération les précédents jurisprudentiels suivants du Comité, à savoir :

ChAD c. Filion, 2021 CanLII 15950 (QC CDCHAD) ChAD c. Guilbault, 2020 CanLII 76244 (QC CDCHAD)

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ChAD c. Charles, 2018 CanLII 120596 (QC CDCHAD) ChAD c. Thiffault, 2019 CanLII 112813 (QC CDCHAD) ChAD c. Rodriguez, 2019 CanLII 104541 (QC CDCHAD) ChAD c. Sultanian, 2020 CanLII 141359 (QC CDCHAD) ChAD c. Gingras, 2018 CanLII 110961 (QC CDCHAD) ChAD c. Girard, 2018 CanLII 2136 (QC CDCHAD) ChAD c. Chouiter, 2018 CanLII 55203 (QC CDCHAD) ChAD c. Usereau, 2018 CanLII 122744 (QC CDCHAD) ChAD c. Bernard, 2019 CanLII 22097 (QC CDCHAD) ChAD c. Filion, 2021 CanLII 15950 (QC CDCHAD) ChAD c. Chapleau, 2018 CanLII 103157 (QC CDCHAD)

[31] Quant à M e Garneau, il nous soumet les précédents suivants du Comité :

ChAD c. Marco D’Onofrio, 2018 CanLII 52114 (QC CDCHAD) ChAD c. Gagné, 2018 CanLII 38256 (QC CDCHAD) ChAD c. Lavoie, 2018 CanLII 6417 (QC CDCHAD)

V. Analyse et décision A) Le plaidoyer de culpabilité [32] Dans l’affaire Pivin c. Inhalothérapeutes disciplinaire est la reconnaissance par le professionnel des faits qui lui sont reprochés et du fait qu’il constitue une faute déontologique ».

1 Pivin c. Inhalothérapeutes, 2002 QCTP 32 (CanLII);

1 , il a été établi qu’« un plaidoyer en droit

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[33] Au surplus, la jurisprudence saisi d’un plaidoyer de culpabilité, aucune preuve relative à la culpabilité de l’intimé n’est nécessaire. [34] Quant aux facteurs atténuants et aggravants, nous partageons intégralement l’exposé de la partie plaignante à ce sujet. [35] De plus, il convient ici de citer le passage suivant de la Cour d'appel dans l'affaire Courchesne 3 : « [83] L'appelant reproche ensuite au juge de la Cour du Québec d'avoir fait une analyse erronée des précédents en matière de sanction. Le reproche est mal fondé. La détermination de la peine, que ce soit en matière disciplinaire ou en matière pénale, est un exercice délicat, le principe fondamental demeurant celui d'infliger une peine proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du contrevenant. L'analyse des précédents permet au décideur de s'assurer que la sanction qu'il apprête à infliger au délinquant est en harmonie avec celles infligées à d'autres contrevenants pour des infractions semblables commises dans des circonstances semblables. Mais l'analyse des précédents n'est pas sans embûche, chaque cas étant différent de l'autre. En l'espèce, à la lecture de la décision du comité de discipline et du jugement dont appel, il me semble que le reproche formulé par l'appelant est sans fondement. » B) La recommandation conjointe [36] En 2014, le Tribunal des professions rappelait l’importance et l’utilité des suggestions communes dans l’affaire Ungureanu

2 nous indique que lorsqu’un comité de discipline est

(notre emphase)

4 :

[21] Les ententes entre les parties constituent en effet un rouage utile et parfois nécessaire à une saine administration de la justice. Lors de toute négociation, chaque partie fait des concessions dans le but d'en arriver à un règlement qui convienne aux deux. Elles se justifient par la réalisation d'un objectif final. Lorsque deux parties formulent une suggestion commune, elles doivent avoir une expectative raisonnable que cette dernière sera respectée. Pour cette raison, une suggestion commune formulée par deux avocats d'expérience devrait être respectée à moins qu'elle ne soit déraisonnable, inadéquate ou contraire à l'intérêt public ou de nature à déconsidérer l'administration de la justice. (notre emphase)

2 OACIQ c. Patry, 2013 CanLII 47258 (QC OACIQ) et OACIQ c. Lizotte, 2014 CanLII 3118 (QC OACIQ); 3 Courchesne c. Castiglia, 2009 QCCA 2303 (CanLII), demande d'autorisation d'appel à la Cour suprême rejetée, 2010 CanLII 20533 (CSC); 4 Infirmières et infirmiers auxiliaires (Ordre professionnel de) c. Ungureanu, 2014 QCTP 20 (CanLII);

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[37] En fait, lorsque des sanctions sont suggérées conjointement par des procureurs d’expérience, le Comité n’a pas à s’interroger sur la sévérité ou la clémence de celles-ci. Il doit y donner suite, sauf s’il les considère contraires à l’intérêt public ou si elles sont de nature à déconsidérer l’administration de la justice, et ce, tel que la Cour suprême le décide dans l’arrêt Anthony-Cook 5 . [38] Considérant que les procureurs des parties sont d’avis qu’il y a lieu d’appliquer le principe de la globalité dans le présent dossier, la recommandation sur sanction des parties est entérinée par le Comité. Cela étant, il y a maintenant lieu de trancher la question de la globalité de la sanction puisque l’imposition d’une amende globale de 27 000 $ dans le présent dossier serait une sanction profondément punitive et excessive. C) Le principe de la globalité de la sanction [39] En vertu de ce principe jurisprudentiel, nous devons nous demander si la sanction, lorsque vue globalement, est appropriée, juste et adéquate et d’appliquer le principe de la globalité des sanctions afin que le résultat ou le total des sanctions ne soit pas excessif par rapport à la culpabilité générale de l’intimé 6 . [40] Dans l’affaire Pluviose 7 , le juge Patrick Choquette de la Cour du Québec prescrit l’approche suivante en matière de globalité : « [85] Lors de la pondération des amendes en raison du principe de globalité, le Comité doit débuter par l’imposition de l’amende sur le premier chef et le cas échéant, la réprimande sur les autres chefs de même nature. [86] Lorsque le législateur impose une amende minimale, le Comité ne peut aller sous ce seuil. Il ne revient pas au Comité de discipline de modeler des amendes monétaires qui vont à l’encontre de la volonté du législateur, d’autant qu’il a doublé l’amende minimale en juillet 2018 spécifiquement pour le courtage immobilier. (…) [89] Le Comité peut également, même dans les cas la gravité objective de l’infraction commande l’imposition d’une amende, ordonner la réprimande, mais il doit s’en expliquer. Autrement, il ne peut moduler une sanction sous le seuil de l’amende minimale alors que la volonté claire du législateur est de hausser ce premier palier. (…) [91] L’application du principe de la globalité est atteinte en modulant l’imposition d’amendes et de réprimandes et non descendant sous l’amende minimale.

5 R. c. Anthony-Cook [2016] 2 R.C.S. 204. 6 Kenny c. Baril, 1993 CanLII 9195 (QC TP); 7 Gingras c. Pluviose, 2020 QCCQ 8495 (CanLII);

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(…) [95] En transposant le principe de l’arrêt Tan de la Cour d’appel aux sanctions monétaires, le Comité aurait imposer une amende sur le chef 1a) afin de tenir compte de la gravité objective plus importante et du préjudice subi ou que le vendeur pourrait être appelé à subir des suites de cette faute et imposer des réprimandes sur les chefs 1b) et 1c). C’est d’ailleurs de cette façon que le Comité a imposé la sanction des chefs 2a) et 2b), soit une amende de 2 000 $ sur le premier et une réprimande sur le second. » (notre emphase) [41] Or, tout comme les procureurs des parties, nous sommes d’avis que l’imposition d’une amende totale de 27 000 $ relativement à l’ensemble des chefs pour lesquels l’intimé a été déclaré coupable serait excessive par rapport à la culpabilité générale de l’intimé 8 . [42] Cela étant dit, même si le Comité n’a pas à tenir compte de la capacité financière de l’intimé pour appliquer le principe de la globalité 9 , en l’espèce, la preuve est sans équivoque. Les revenus de l’intimé sont modestes et il sera retraité sous peu. Bref, l’imposition d’une amende totale de 27 000 $ serait manifestement accablante. [43] Soulignons, dans un premier temps, qu’à notre avis, la sanction globale de 13 000 $ suggérée par le syndic ne prend pas suffisamment en considération le fait que l’intimé a plaidé coupable à la première occasion à tous les chefs d’accusation portés contre lui. [44] Deuxièmement, cette somme globale ne tient pas compte du fait que l’intimé ne travaille plus dans le domaine de l’assurance agricole et qu’il sera à la retraite sous peu. Ainsi donc, le risque de récidive est peu probable. [45] Finalement, nous sommes d’opinion qu’une sanction globale de 13 000 $ ne prend pas suffisamment en considération le principe élaboré par la jurisprudence qui établit que le processus disciplinaire est en soi dissuasif 10 et qu’il comporte un rappel à l’ordre dont l’intimé saura tirer leçon 11 . [46] De l’autre côté, la somme globale de 7 000 $ suggérée par M e Garneau ne met pas assez l’accent sur la grande gravité objective des infractions commises. Faut-il le dire, des manquements qui sont au cœur de la profession et sont de nature à ternir l’image de celle-ci.

8 Pierre BERNARD, « Développements récents en déontologie, droit professionnel et disciplinaire-La sanction en droit disciplinaire : quelques réflexions », Éditions Y. Blais, 2004, vol. 206; 9 Jacques c. Joyal, 2021 QCCQ 326 (CanLII), au paragraphe 28 et Lebel c. Milevschi, 2020 QCCQ 8962 (CanLII), au paragraphe 77; 10 OACIQ c. Dépatie, 2017 CanLII 21054 (QC OACIQ), au paragraphe 32; 11 OACIQ c. Gingras, 2005 CanLII 63891 (QC CDCHAD), au paragraphe 21;

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[47] Pour assurer la protection du public, sur les chefs 1 à 9, l’intimé se verra donc imposer les sanctions suivantes : Chef n o 1 : une amende de 3 000 $; Chef n o 2 : une amende de 2 000 $; Chef n o 3 : une amende de 2 000 $; Chef n o 4 : une amende de 2 000 $; Chef n o 5 : une réprimande; Chef n o 6 : une réprimande; Chef n o 7 : une réprimande; Chef n o 8 : une réprimande; Chef n o 9 : une réprimande; Pour une amende globale de 9 000 $, plus le paiement de tous les déboursés et frais de l’instance.

[48] Tous les frais de l’instance seront à la charge de l’intimé qui pourra bénéficier d’un délai raisonnable pour payer l’amende de 9 000 $ plus les frais, soit un délai de 24 mois, le tout avec déchéance du bénéfice du terme en cas de défaut.

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE : PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé sur l’ensemble des chefs de la plainte 2021-02-01(A);

DÉCLARE l’intimé coupable des chefs n du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

o 1 pour avoir contrevenu à l’article 37(3

DÉCLARE l’intimé coupable des chefs n 37(1 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

os 2, 7 et 8 pour avoir contrevenu à l’article

o 3 pour avoir contrevenu à l’article 37(7 o ) du

DÉCLARE l’intimé coupable du chef n Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

o )

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DÉCLARE l’intimé coupable du chef n Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome;

o 4 pour avoir contrevenu à l’article 21 du

DÉCLARE l’intimé coupable des chefs n 37(6 o ) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

os 5 et 6 pour avoir contrevenu à l’article

o 9 pour avoir contrevenu à l’article 24 du

DÉCLARE l’intimé coupable du chef n Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

PRONONCE un arrêt conditionnel des procédures à l’égard de toutes les autres dispositions réglementaires alléguées au soutien des chefs susdits;

IMPOSE LES SANCTIONS SUIVANTES À L’INTIMÉ :

Chef n o 1 : le paiement d’une amende de 5 000 $;

Chef n o 2 : le paiement d’une amende de 3 000 $;

Chef n o 3 : le paiement d’une amende de 3 000 $;

Chef n o 4 : le paiement d’une amende de 2 500 $;

Chef n o 5 : le paiement d’une amende de 2 500 $;

Chef n o 6 : le paiement d’une amende de 2 500 $;

Chef n o 7 : le paiement d’une amende de 3 000 $;

Chef n o 8 : le paiement d’une amende de 3 000 $;

Chef n o 9 : le paiement d’une amende de 2 500 $;

CONSIDÉRANT le principe de la globalité de la sanction, substitue aux sanctions ci-haut mentionnées, la sanction globale suivante de 9 000 $ comme suit :

Chef n o 1 : le paiement d’une amende de 3 000 $;

Chef n o 2 : le paiement d’une amende de 2 000 $;

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Chef n o 3 : le paiement d’une amende de 2 000 $;

Chef n o 4 : le paiement d’une amende de 2 000 $;

Chef n o 5 : une réprimande;

Chef n o 6 : une réprimande;

Chef n o 7 : une réprimande;

Chef n o 8 : une réprimande;

Chef n o 9 : une réprimande;

CONDAMNE l’intimé au paiement de tous les déboursés; ACCORDE à l’intimé un délai de 24 mois pour acquitter l’amende globale imposée de 9 000 $ et les déboursés en 24 versements mensuels, égaux et consécutifs, délai qui sera calculé uniquement à compter du 31e jour suivant la signification de la présente décision; DÉCLARE que si l’intimé est en défaut de payer à échéance l’un ou l’autre des versements susdits, il perdra le bénéfice du terme et toute somme alors impayée deviendra immédiatement due et exigible.

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__________________________________ Me Daniel M. Fabien, avocat Vice-président du Comité de discipline

__________________________________ Mme Mireille Gauthier, PAA, agent en assurance de dommages Membre du Comité de discipline

__________________________________ Mme Mélanie Couture, agent en assurance de dommages Membre du Comité de discipline

M e Valérie Déziel Procureure de la partie plaignante M e Patrick Garneau Procureur de la partie intimée Date d’audience : Le 22 septembre 2021 par visioconférence

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