Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

No:

2020-07-01(C)

 

DATE :

Le 12 mars 2021

 

 

LE COMITÉ :

Me Patrick de Niverville, avocat

Président

Mme Anne-Marie Hurteau, courtier en assurance de dommages

 

Membre

Mme Maryse Pelletier, courtier en assurance de dommages

 

Membre

 

 

Me MARIE-JOSÉE BELHUMEUR, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante

c.

JULIE BOURASSA, courtier en assurance de dommages des particuliers (4B)

Partie intimée

 

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

 

 

ORDONNANCE DE NON-PUBLICATION, DE NON-DIFFUSION ET DE NON-DIVULGATION DE TOUT RENSEIGNEMENT OU INFORMATION PERMETTANT D’IDENTIFIER L’ASSURÉ CONCERNÉ PAR LE PRÉSENT DOSSIER, LE TOUT CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS

 

 

[1]       Le 22 janvier 2021, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages se réunissait par visioconférence pour procéder à l’audition de la plainte numéro 2020-07-01(C) ;

 

[2]       Le syndic était alors représenté par Me Mathieu Cardinal et, de son côté, l’intimée était représentée par Me Sonia Paradis ;

 

I.          La plainte

 

[3]       L’intimée fait l’objet d’une plainte amendée comportant quatre (4) chefs d’accusation, soit :

 

 

1.   Entre les ou vers les 18 avril et 23 avril 2019, dans le cadre de la souscription du contrat d’assurance automobile no [xxx] pour J.P. auprès d’Échelon Assurance, l’Intimée a fait défaut de rendre compte de l’exécution de son mandat en omettant d’informer J.P. que l’assureur avait augmenté la prime de 730 $ à 874 $, plus taxes et frais de financement, à la suite d’une consultation du Fichier central des sinistres automobiles, et que les mensualités prélevées de son compte bancaire en paiement de la prime s’élèveraient à 81,59 $, en contravention avec les articles 37(1), 37(4) et 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

 

2.   Entre les ou vers les 12 avril et 23 avril 2019, dans le cadre de la souscription du contrat d’assurance automobile no [xxx] pour J.P. auprès d’Échelon Assurance, l’Intimée a exercé ses activités de façon malhonnête ou négligente et/ou a fait défaut d’agir en conseiller consciencieux en omettant d’éclairer J.P. sur ses droits et obligations et en ne lui donnant pas tous les renseignements nécessaires ou utiles :

 

a.   (…) ;

b.   (…) ;

c.   Le ou vers le 19 avril 2019, en déclarant à J.P. que l’assureur effectuait 11 prélèvements plutôt que 12 pour expliquer le premier prélèvement du 16 avril 2019 au montant de 81,59 $, alors que tel n’était pas le cas;

d.   Le ou vers le 19 avril 2019, en déclarant à J.P. que le montant de la prime d’assurance ne changeait pas et restait à 796,79 $ taxes incluses, alors que tel n’était pas le cas;

e.   Le ou vers le 23 avril 2019, en déclarant à J.P. qu’elle venait juste de recevoir un courriel avec les informations concernant ses prélèvements alors qu’elle avait reçu ce courriel le 18 avril 2019;

     en contravention avec les articles 37(1) et 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

3.   Entre les ou vers les 25 juin et 19 août 2019, dans le cadre d’une demande de changement d’adresse présentée par J.P. pour le contrat d’assurance automobile no [xxx] auprès d’Échelon Assurance et pour le contrat d’assurance habitation no [xxx]  auprès de L’Unique assurances générales, l’Intimée a exercé ses activités de façon négligente :

a.      Entre les ou vers les 25 juin et 3 juillet 2019, en omettant pendant plus d’une semaine de déclarer le changement d’adresse aux assureurs;

b.      Le ou vers le 3 juillet 2019, en indiquant erronément aux assureurs une adresse sans lien avec J.P.;

c.      (…) ;

en contravention avec les articles 9 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5);

4.   Entre les ou vers les 27 mars et 12 août 2019, l’Intimée a été négligente dans sa tenue de dossier de l’assuré J.P., notamment en omettant de noter adéquatement les conversations téléphoniques avec J.P., leur teneur, les conseils et explications donnés, les instructions reçues de l’assuré et les décisions prises, en contravention avec les articles 85 à 88 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers (RLRQ c. D-9.2), 9 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ c. D-9.2, r.5) et 12 et 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome (RLRQ c. D-9.2, r.2).

[4]       D’entrée de jeu, l’intimée a enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’encontre de la plainte amendée ;

 

[5]       En conséquence, celle-ci fut déclarée coupable, séance tenante, et alors les parties ont procédé aux représentations sur sanction ;

 

II.         Preuve sur sanction

 

[6]       La partie plaignante a déposé, de consentement, les pièces P-1 à P-37 ainsi qu’un « Résumé conjoint des faits » (P-38) ;

 

[7]       De son côté, l’intimée a produit, également de consentement, une capture d’écran (I-1) démontrant que ce n’est que le 23 avril 2019 que les informations concernant les prélèvements (chef 2e)) ont été effectivement inscrites au dossier de l’assuré ;

 

[8]       Le Comité a également bénéficié du témoignage de l’intimée ;

 

[9]       Cela dit, l’intimée a déclaré au Comité :

 

      Qu’elle exerce la profession depuis 2012 et qu’elle n’a pas d’antécédent disciplinaire ;

      Qu’elle regrette ses faits et gestes ;

      Qu’elle a modifié ses méthodes de travail afin d’éviter qu’une telle situation puisse se reproduire ;

      Que le client a été dédommagé ;

[10]    De l’ensemble de cette preuve, il ressort que :

 

      L’intimée a fait défaut d’informer son client de l’augmentation de ses primes d’assurance-automobile résultant de deux (2) sinistres antérieurs non déclarés (chef 1) ;

      L’intimée aurait également fait défaut de renseigner adéquatement son client quant aux conditions et modalités de ses prélèvements bancaires (chef 2) ;

      Enfin, dans le cadre d’une demande de changement d’adresse, l’intimée a agi de façon négligente (chef 3) ;

      Finalement, son dossier ne reflétait pas l’ensemble des informations recueillies auprès de son client (chef 4) ;


[11]    C’est à la lumière de ces faits que le Comité devra déterminer les sanctions justes et appropriées au cas de l’intimée ;

 

III.       Recommandations communes

 

[12]    Les parties suggèrent conjointement au Comité d’imposer à l’intimée les sanctions suivantes :

 

          Chef 1 :         une amende de 2 000 $

 

          Chef 2c) :     une amende de 2 000 $

 

          Chef 2d) :     une réprimande

 

          Chef 2e) :     une réprimande

 

          Chef 3a) :     une amende de 2 000 $

 

          Chef 3b) :     une réprimande

 

          Chef 4 :         une amende de 2 000 $

 

[13]    Par contre, les parties demandent au Comité de réduire le montant des amendes (8 000 $), en vertu du principe de la globalité, à une somme de 5 000 $ ;

 

[14]    Par ailleurs, tout en reconnaissant que ces infractions se situent au cœur de l’exercice de la profession et que, par conséquent, elles sont d’une gravité certaine, les parties demandent au Comité de tenir compte des facteurs atténuants suivants :

 

      Le plaidoyer de culpabilité de l’intimée ;

      L’absence d’antécédent disciplinaire ;

      L’absence de préjudice ;

      Le fait qu’il s’agit d’un cas isolé concernant un seul client ;

      L’absence d’intention malhonnête ;

      Les remords et les regrets exprimés par l’intimée ;

      Les modifications apportées par l’intimée à ses méthodes de travail ;

[15]    Finalement, les parties ont déposé à l’appui de leurs suggestions communes une série de jurisprudence démontrant le bien-fondé de celles-ci ;

 


[16]    En conséquence, elles demandent au Comité d’entériner leurs suggestions et d’imposer à l’intimée les sanctions appropriées ;

 

IV.      Analyse et décision

 

[17]    Le Comité considère que les sanctions suggérées par les parties sont justes et appropriées au cas particulier de l’intimée et que celles-ci reflètent adéquatement tant les circonstances aggravantes de l’affaire que les circonstances atténuantes dont doit bénéficier l’intimée ;

[18]    De plus, compte tenu de la jurisprudence en matière de recommandations communes[1] et plus particulièrement de l’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire Anthony-Cook[2], le Comité est tenu d’accepter celles-ci, à moins qu’elles ne soient contraires à l’intérêt public ;

[19]    Enfin, le Tribunal des professions rappelait l’importance et l’utilité de celles-ci dans l’affaire Ungureanu[3] ;

[21]        Les ententes entre les parties constituent en effet un rouage utile et parfois nécessaire à une saine administration de la justice. Lors de toute négociation, chaque partie fait des concessions dans le but d'en arriver à un règlement qui convienne aux deux. Elles se justifient par la réalisation d'un objectif final. Lorsque deux parties formulent une suggestion commune, elles doivent avoir une expectative raisonnable que cette dernière sera respectéePour cette raison, une suggestion commune formulée par deux avocats d'expérience devrait être respectée à moins qu'elle ne soit déraisonnable, inadéquate ou contraire à l'intérêt public ou de nature à déconsidérer l'administration de la justice. (Nos soulignements)

 

[20]    Cela dit, le Comité considère que les sanctions suggérées sont justes et raisonnables et, surtout, appropriées au cas de l’intimée ;

[21]    D’une part, elles tiennent compte de la gravité objective des infractions et, d’autre part, elles assurent la protection du public sans punir outre mesure l’intimée ;

[22]    Enfin, elles s’inscrivent parfaitement dans la fourchette de sanctions habituellement imposées pour ce genre d’infractions, tel qu’il appert de la jurisprudence produite par le syndic ;

[23]    Pour ces motifs, les sanctions suggérées par les parties seront entérinées par le Comité de discipline.


PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

AUTORISE les amendements à la plainte et le retrait des chefs 2a), 2b) et 3c) ;

PREND acte du plaidoyer de l’intimée à l’encontre de la plainte amendée ;

DÉCLARE l’intimée coupable des chefs 1 à 4 de la plainte amendée et plus particulièrement comme suit :

Chef 1:                        pour avoir contrevenu à l’article 37(4) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ, c. D-9.2, r.5);

Chefs 2c), d) et e) :  pour avoir contrevenu à l’article 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ, c. D-9.2, r.5) ;

Chefs 3a) et b):         pour avoir contrevenu à l’article 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ, c. D-9.2, r.5) ;

Chef 4:                        pour avoir contrevenu à l’article 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome (RLRQ, c. D-9.2, r.2);

PRONONCE un arrêt conditionnel des procédures à l’encontre de toutes les autres dispositions législatives et réglementaires alléguées au soutien des chefs 1, 2c), 2d), 2e), 3a), 3b) et 4 de la plainte amendée ;

IMPOSE à l’intimée les sanctions suivantes :

Chef 1 :            une amende de 2 000 $

Chef 2c) :        une amende de 2 000 $

Chef 2d) :        une réprimande

Chef 2e) :        une réprimande

Chef 3a) :        une amende de 2 000 $

Chef 3b) :        une réprimande

Chef 4 :            une amende de 2 000 $

 

RÉDUIT, suivant le principe de la globalité, le montant des amendes (8 000 $) à la somme globale de 5 000 $ ;

 

PRONONCE une ordonnance de non-publication, de non-diffusion et de non-divulgation de tout renseignement ou information permettant d’identifier l’assuré concerné par le présent dossier, le tout conformément à l’article 142 du Code des professions ;

 

CONDAMNE l’intimée au paiement de tous les déboursés relatifs à la plainte.

 

 

 

 

 

___________________________________

Me Patrick de Niverville, avocat

Président

 

 

___________________________________

Mme Anne-Marie Hurteau, courtier en assurance de dommages

Membre        

 

 

___________________________________

Mme Maryse Pelletier, courtier en assurance de dommages

Membre

Me Mathieu Cardinal

Procureur de la partie plaignante

 

Me Sonia Paradis

Procureure de la partie intimée

 

Date d’audience : 22 janvier 2021 (par visioconférence)

 

 



[1]        Chan c. Médecins2014 QCTP 5 (CanLII);

     Gauthier c. Médecins, 2013 CanLII 82819 (QCTP);

[2]        R. c. Anthony-Cook2016 CSC 43 (CanLII);

[3]        Infirmières et infirmiers auxiliaires (Ordre professionnel de) c. Ungureanu2014 QCTP 20 (CanLII);

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.