Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 
COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

No:

2019-09-01(C)

 

DATE :

Le 25 septembre 2020

 

 

LE COMITÉ :

Me Patrick de Niverville, avocat

Président

M. Serge Meloche, courtier en assurance de dommages

Membre

Mme Marie-Ève Racine, courtier en assurance de dommages

Membre

 

 

Me MARIE-JOSÉE BELHUMEUR, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante

c.

JEAN-YVES GUILBAULT (4A), courtier en assurance de dommages

Partie intimée

 

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

 

 

ORDONNANCE DE NON-PUBLICATION, DE NON-DIFFUSION ET DE NON-DIVULGATION DE TOUT RENSEIGNEMENT OU INFORMATION PERMETTANT D’IDENTIFER LES ASSURÉS MENTIONNÉS DANS LA PLAINTE, LE TOUT SUIVANT L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS

 

 

[1]       Le 21 juillet 2020, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages se réunissait par visioconférence pour procéder à l’audition de la plainte numéro 2019-09-01(C) ;

 

[2]       Le syndic était alors représenté par Me Claude G. Leduc et, de son côté, l’intimé était représenté par Me Sonia Paradis ;

 

 

I.          La plainte

 

[3]       L’intimé fait l’objet d’une plainte comportant trois (3) chefs d’accusation, soit :

 

1.   Vers octobre et novembre 2018, a omis de donner suite au mandat que lui avaient confié les assurés R.H. et C.G., à l’occasion de la souscription du contrat d’assurance multirisques des producteurs agricoles no 155519 F1 émis par Le Groupe Estrie‑Richelieu, Compagnie d’assurance, soit de leur procurer une protection étendue ou de type « tous risques », en contravention avec les articles 26 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages ;

 

2.   Le ou vers le 8 novembre 2018, avant la conclusion d’un contrat d’assurance multirisques des producteurs agricoles no 155519 F1 émis par Le Groupe Estrie-Richelieu, Compagnie d’assurance aux noms des assurés R.H. et C.G., a fait défaut de leur décrire le produit d’assurance proposé en relation avec les besoins identifiés, de leur préciser la nature de la garantie offerte et de leur indiquer clairement les exclusions de garantie particulières compte tenu des besoins identifiés, notamment quant aux dommages causés par le poids de la neige, en contravention avec l’article 28 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et les articles 37(1) et 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages ;

 

3.   Entre octobre 2018 et mars 2019, dans les cas des assurés R.H. et C.G, a négligé ses devoirs professionnels reliés à l’exercice de ses activités en n’ayant par une tenue de dossier à laquelle on est en droit de s’attendre de la part d’un représentant en assurance de dommages en ne notant pas au dossier des assurés notamment les rencontres, les communications téléphoniques, les conseils donnés, les décisions prises et les instructions reçues, en contravention avec les articles 16 et 85 à 88 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, les articles 12 à 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome et les articles 9 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

 

[4]       D’entrée de jeu, l’intimé a enregistré un plaidoyer de culpabilité à l’encontre des infractions reprochées ;

 

[5]       Vu le plaidoyer de culpabilité de l’intimé, les parties ont alors procédé aux représentations sur sanction ;

 

 

II.         Les faits

 

[6]       La preuve constituée, d’une part, du plaidoyer de culpabilité de l’intimé et, d’autre part, du dépôt du formulaire de plainte de l’Autorité des marchés financiers (pièce P-2.3) a permis d’établir les faits suivants :

 

      À la suite d’un sinistre, les assurés découvrent qu’ils n’ont pas obtenu la couverture d’assurance qu’ils avaient requise de l’intimé puisque leur réclamation est refusée par l’assureur ;

[7]       De cette série de faits découlent plusieurs infractions, soit :

 

      Le défaut de donner suite au mandat confié par les clients (chef 1) ;

      Le défaut de préciser la nature de la garantie offerte et surtout les exclusions (chef 2) ;

[8]       À ces deux (2) manquements déontologiques s’ajoute le fait que le dossier de l’intimé ne reflète pas adéquatement les démarches et les gestes posés par ce dernier (chef 3) ;

 

 


III.        Recommandations communes

 

[9]       Compte tenu du plaidoyer de culpabilité de l’intimé, les parties suggèrent conjointement d’imposer à l’intimé les sanctions suivantes :

 

          Chef 1 :                        une amende de 3 000 $

 

          Chef 2 :                        une amende de 3 500 $

 

          Chef 3 :                        une amende de 2 000 $

 

[10]    D’autre part, vu le principe de globalité des sanctions, les parties suggèrent de réduire le total des amendes à une somme globale de 6 000 $ ;

 

[11]    Cette suggestion commune est fondée sur un ensemble de jurisprudence, soit :

 

      ChAD c. Charles, 2019 CanLII 120596 (QC CDCHAD) ;

      ChAD c. Rigas, 2016 CanLII 53907 (QC CDCHAD) ;

      ChAD c. Légaré, 2011 CanLII 9776 (QC CDCHAD) ;

      ChAD c. Proulx, 2015 CanLII 62646 (QC CDCHAD) ;

      ChAD c. Trépanier, 2018 CanLII 38255 (QC CDCHAD) ;

      ChAD c. Laroche, 2018 CanLII 115298 (QC CDCHAD) ;

[12]    De plus, les parties ont tenu compte des facteurs suivants :

 

          Facteurs aggravants :

 

      La gravité objective des infractions ;

      Les inconvénients et préjudices subis par les assurés ;

      Le nombre d’années de pratique de l’intimé ;

      Le fait que les infractions se situent au cœur même de l’exercice de la profession ;

Facteurs atténuants :

      Le plaidoyer de culpabilité de l’intimé ;

      L’absence d’antécédents disciplinaires ;

      Le faible risque de récidive ;

[13]    De plus, l’avocate de l’intimé a insisté sur plusieurs autres circonstances atténuantes, soit :

 

      Le fait que l’intimé a modifié ses méthodes de travail de manière à éviter la répétition de telles erreurs, en s’assurant de noter ses interventions aux dossiers clients ;

      Le repentir et les remords de l’intimé ;

      Le fait que les assurés ont été dédommagés en partie.

[14]    Cela dit, les parties ont demandé au Comité de discipline d’entériner leurs recommandations communes ;

 

 

IV.       Analyse et décision

 

[15]    Compte tenu de la jurisprudence en matière de recommandations communes[1] et plus particulièrement de l’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire Anthony-Cook[2], le Comité entend entériner celles-ci ;

 

[16]    De plus, le Tribunal des professions rappelait l’importance et l’utilité de celles-ci dans l’affaire Ungureanu[3] :

[21]        Les ententes entre les parties constituent en effet un rouage utile et parfois nécessaire à une saine administration de la justice. Lors de toute négociation, chaque partie fait des concessions dans le but d'en arriver à un règlement qui convienne aux deux. Elles se justifient par la réalisation d'un objectif final. Lorsque deux parties formulent une suggestion commune, elles doivent avoir une expectative raisonnable que cette dernière sera respectée. Pour cette raison, une suggestion commune formulée par deux avocats d'expérience devrait être respectée à moins qu'elle ne soit déraisonnable, inadéquate ou contraire à l'intérêt public ou de nature à déconsidérer l'administration de la justice. (Nos soulignements)

 

[17]    Cela dit, le Comité considère que les sanctions suggérées sont justes et raisonnables et, surtout, appropriées au cas de l’intimé ;

 

[18]    D’une part, elles tiennent compte de la gravité objective des infractions et, d’autre part, elles assurent la protection du public sans punir outre mesure l’intimé ;

 


[19]    Pour ces motifs, les sanctions suggérées par les parties seront entérinées par le Comité de discipline.

 

 

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé ;

DÉCLARE l’intimé coupable des chefs 1, 2 et 3 et plus particulièrement comme suit :

Chef 1:               pour avoir contrevenu à l’article 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (R.L.R.Q., c. D-9.2, r.5) ;

Chef 2:               pour avoir contrevenu à l’article 28 de la Loi sur la distribution des produits et services financiers (R.L.R.Q., c. D-9.2) ;

Chef 3:               pour avoir contrevenu à l’article 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome (R.L.R.Q., c. D-9.2, r.2) ;

PRONONCE un arrêt conditionnel des procédures à l’encontre des autres dispositions législatives et réglementaires alléguées au soutien des chefs 1, 2 et 3 ;

            IMPOSE à l’intimé les sanctions suivantes :

Chef 1 :               une amende de 3 000 $

Chef 2 :               une amende de 3 500 $

Chef 3 :               une amende de 2 000 $

RÉDUIT, en application du principe de la globalité des sanctions, le total des amendes (8 500 $) à une somme globale de 6 000 $

PRONONCE une ordonnance de non-publication, de non-diffusion et de non-divulgation de tout renseignement ou information permettant d’identifier les assurés mentionnés à la plainte, le tout conformément à l’article 142 du Code des professions ;

CONDAMNE l’intimé au paiement de tous les déboursés.

 

 

 

 

___________________________________

Me Patrick de Niverville, avocat

Président

 

___________________________________

M. Serge Meloche, courtier en assurance de dommages

Membre        

 

___________________________________

Mme Marie-Ève Racine, courtier en assurance de dommages

Membre

 

Me Claude G. Leduc

Procureur de la partie plaignante

 

Me Sonia Paradis

Procureure de la partie intimée

 

Date d’audience : 21 juillet 2020 (par visioconférence)

 

 

 



[1]        Chan c. Médecins, 2014 QCTP 5 (CanLII) ;

     Gauthier c. Médecins, 2013 CanLII 82819 (QCTP) ;

[2]    R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43 (CanLII) ;

[3]    Infirmières et infirmiers auxiliaires (Ordre professionnel de) c. Ungureanu, 2014 QCTP 20 (CanLII) ;

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.