Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

No:

2018-09-07(C)

 

DATE :

31 juillet 2019

 

 

LE COMITÉ :

Me Yves Clermont, avocat

Président-suppléant

Mme Sonia Jacques, courtier en assurance de dommages

Membre

M. Benoit St-Germain, C.d’A.Ass., PAA, CRM, courtier en assurance de dommages

Membre

 

 

Me MARIE-JOSÉE BELHUMEUR, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante

c.

JOËLLE LAFRANCE (4A), courtier en assurance de dommages (inactif et sans mode d’exercice)

Partie intimée

 

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ

 

 

ORDONNANCE DE NON PUBLICATION, DE NON DIFFUSION ET DE NON DIVULGATION DE TOUT RENSEIGNEMENT OU INFORMATION PERMETTANT D’IDENTIFIER LES ASSURÉS MENTIONNÉS À LA PLAINTE, LE TOUT SUIVANT L’ARTICLE 142 DU CODE DES PROFESSIONS

 

 

 

[1]       Le 6 juin 2019, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages se réunissait pour procéder à l’audition de la plainte numéro 2018-09-07(C) ;

[2]       Le syndic était alors représenté par Me Claude G. Leduc et, de son côté, l’intimée Lafrance était absente et non représentée ;

[3]       Me Leduc a également demandé au Comité de rendre une ordonnance de non divulgation, non publication et non diffusion des renseignements personnels permettant d’identifier les assurés dans les pièces déposées en preuve;

[4]       Le Comité a rendu, séance tenante, l’ordonnance demandée par la partie plaignante.

 

 

I.          La plainte

[5]       L’intimée fait l’objet d’une plainte comportant quatre (4) chefs d’accusation, soit :

 

Dans le cas de l’assurée D.D.

1.     Entre les ou vers les 11 septembre et 12 octobre 2017, a fait défaut d’exécuter le mandat que lui avait confié l’assurée D.D., soit d’obtenir une protection d’assurance pour une propriété vacante, en négligeant de mettre en vigueur le contrat d’assurance requis, créant ainsi un découvert d’assurance, en contravention avec les articles 26 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages ;

2.     Entre les ou vers les 12 et 15 septembre 2017 et par la suite, a exercé ses activités de façon négligente et/ou n’a pas agi en conseiller consciencieux, en omettant de donner suite aux demandes formulées par Intact compagnie d’assurance, soit de lui fournir une lettre d’expérience en lien avec la propriété vacante au nom de l’assurée D.D., en contravention avec les articles 37(1) et 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages ;

3.     Entre les ou vers les 12 et 15 septembre 2017, a été négligente dans la tenue du dossier de l’assurée D.D., en faisant défaut d’y noter, notamment, les communications téléphoniques intervenues avec Intact compagnie d’assurance en lien avec le « questionnaire pour maison vacante » et la lettre d’expérience requise, en contravention avec les articles 16 et 85 à 88 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, les articles 9 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages et les articles 12 et 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome.

Dans le cas de l’assurée B.L.

4.     Le ou vers le 17 août 2017, a fait défaut d’exécuter le mandat que lui avait confié l’assurée B.L., soit de résilier le contrat d’assurance automobile de remplacement F.P.Q. No 5 émis par CIME cabinet d’assurances inc. sous le no F5A-045249, en contravention avec les articles 26 et 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

 

[7]       L’intimée Lafrance, bien que dûment convoquée plusieurs fois par le service du greffe de la CHAD, était absente le jour de l’audience ;

[8]       Dans les circonstances, la partie plaignante a été autorisée à procéder par défaut, le tout conformément au 2e alinéa de l’article 144 du Code des professions ;

 

 

 

II.            La preuve

[9]       Conformément à la jurisprudence en semblable matière[1], vu l’absence de l’intimée Lafrance la poursuite a fait entendre deux témoins : Me Paquette-Dorion, enquêteur au bureau du syndic qui a mené l’enquête dans ce dossier et M. Serge Renaud un courtier en assurance de dommages qui était l’employeur de l’intimé Lafrance lors des manquements reprochés dans la plainte ;

[10]    De plus, les pièces documentaires P-1 à P-10 ont été déposées en preuve par le syndic ;

[11]    Ainsi, M. Renaud a expliqué brièvement tous les faits et toutes les circonstances reliés à chaque chef d’accusation ;

[12]    De plus, le témoin a raconté que suite à des plaintes formulées par des clients, il a mené une enquête qui l’a conduit à vouloir congédier l’intimée Lafrance, mais elle a démissionné de son emploi ;

[13]    Afin d’éclairer le Comité, pour chaque chef, Me Leduc a indiqué précisément sur les pièces documentaires suivantes :

       Chef 1 : Les pièces P-2, P-2A et P4 ;

       Chef 2 : La pièce P-3 ;

       Chef 3 : La pièce 2A ;

       Chef 4 : Les pièces P-8 et P-2;

 

[14]    Telle est la trame factuelle sur laquelle est fondée la plainte disciplinaire visant l’intimée Lafrance ;

[15]    Cette preuve n’a pas été contredite.

 

 

 

 

III.            Argumentation de la partie plaignante

 

[16]    Les témoignages entendus lors de l’audience et le dépôt de la preuve documentaire ont permis d’établir clairement les faits énoncés sous chaque chef de la plainte ;

[17]    Après avoir souligné que la partie plaignante avait établi tous les éléments essentiels des accusations énoncés dans la plainte, Me Leduc a demandé au Comité de rendre un verdict de culpabilité basé sur l’article 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ. c. D -9.2, r .5);

 

    IV.   Analyse et décision

 

[18]    Le fardeau de preuve requis en droit disciplinaire est celui de la prépondérance des probabilités, suivant les enseignements de la Cour d’appel dans l’arrêt Bisson c. Lapointe[2] :


[65]    Il est bien établi que le fardeau de la preuve en matière criminelle ne s’applique pas en matière civile. Il est tout aussi clair qu’il n’existe pas de fardeau intermédiaire entre la preuve prépondérante et la preuve hors de tout doute raisonnable, peu importe le « sérieux » de l’affaire. La Cour suprême du Canada dans l’arrêt F.H. c. McDougall, a explicitement rejeté les approches préconisant une norme de preuve variable selon la gravité des allégations ou de leurs conséquences.

[67]    Cependant, la preuve doit toujours être claire et convaincante pour satisfaire au critère de la prépondérance des probabilités. Comme démontré plus haut, le Conseil avait bien à l’esprit cette norme et la proposition des juges majoritaires qui soutient le contraire est, avec égards, injustifiée.

[68]    Comme le rappelle la Cour suprême, « aussi difficile que puisse être sa tâche, le juge doit trancher. Lorsqu’un juge consciencieux ajoute foi à la thèse du demandeur, il faut tenir pour acquis que la preuve était, à ses yeux, suffisamment claire et convaincante pour conclure au respect du critère de la prépondérance des probabilités ». (Nos soulignements)

[19]    Cela dit, le Comité est d’avis que la preuve documentaire déposée par le syndic et le témoignage de son ex-employeur démontrent, de façon claire et convaincante, la commission de toutes les infractions énoncées dans la plainte ;

[20]    En effet, il ressort sans ambiguïté de la preuve soumise que l’intimée Lafrance a exercé ses activités professionnelles d’une façon négligente et insouciante;

[21]    Pour ces motifs, l’intimée Lafrance est reconnue coupable des quatre (4) chefs d’accusation de la plainte.

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

 

DÉCLARE l’intimée Lafrance coupable des chefs 1 à 4 de la plainte et plus particulièrement comme suit :

Chefs 1 à 4 :   pour avoir contrevenu à l’article 37(1) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages (RLRQ. C. D -9.2, r .5) ;

PRONONCE un arrêt conditionnel des procédures à l’encontre des autres dispositions législatives et réglementaires alléguées au soutien desdits chefs d’accusation ;

PRONONCE une ordonnance de non publication, de non diffusion et de non divulgation de tout renseignement ou information permettant d’identifier les assurés mentionnés à la plainte, le tout suivant l’article 142 du Code des professions ;

DEMANDE à la secrétaire du Comité de discipline de convoquer les parties pour les représentations sur sanctions ;

LE TOUT, frais à suivre.

 

 

 

 

 

___________________________________

Me Yves Clermont, avocat

Président

 

___________________________________

Mme Sonia Jacques, courtier en assurance de dommages

Membre        

 

___________________________________

M. Benoit St-Germain, C.d’A.Ass., PAA, CRM, courtier en assurance de dommages

Membre

 

Me Claude G. Leduc

Procureur de la partie plaignante

 

Madame Joëlle Lafrance

Partie intimée (absente et non représentée)

 

Date d’audience : 6 juin 2019

 



[1] CHAD c. Jacob, 2017 CanLII 11674 (QC CHAD); CHAD c. Patenaude, 2016 CanLII 60411 (QC CHAD).

 

[2] 2016 QCCA 1078 (CanLII).

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.