Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

COMITÉ DE DISCIPLINE

CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N° :

2018-01-01 (C)

 

 

DATE :

10 août 2018

 

 

LE COMITÉ :

Me Daniel M. Fabien, avocat

Vice-président

Mme Maryse Pelletier, C. d’A.A., courtier en

assurance de dommages

Membre

M. Marc-Henri Germain, C. d’A.A., A.V.A,

courtier en assurance de dommages

Membre

 

 

 

Me MARIE-JOSÉE BELHUMEUR, ès qualités de syndic de la Chambre de l’assurance de dommages

 

Partie plaignante

 

c.

MICHEL CHANTAL, courtier en assurance de dommages (4A)

 

Partie intimée

 

 

 

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SANCTION

 

 

 

[1]       Le 23 mai 2018, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages (« le Comité ») est réuni pour instruire la plainte logée contre l’intimé Michel Chantal dans le présent dossier.

 

[2]       Me Marie-Josée Belhumeur, ès qualité de syndic, est représentée par Me Claude G. Leduc.  Quant à l’intimé, il n’est pas représenté par avocat et assiste à l’audition par voie téléphonique.

 

 

I.          Le plaidoyer de culpabilité de l’intimé

 

 

[3]       Le 1er mai 2018, l’intimé a déposé au dossier un plaidoyer de culpabilité écrit. Ce document stipule qu’il plaide coupable aux deux chefs de la plainte, lesquels se lisent comme suit :

 

1.     « Entre les ou vers les mois de mai et août 2016, a fait défaut d’exécuter le mandat que lui avait confié l’assurée G.M. inc., soit de renouveler son contrat d’assurance automobile émis par Promutuel Rive-Sud, Société mutuelle d’assurance générale, sous le numéro A1201612601, pour la période du 18 août 2015 au 18 août 2016, le tout en contravention avec l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et les articles 26, 37(1), 37(4), 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

 

2.     Entre les ou vers les 18 août et 19 décembre 2016, a fait défaut d’informer l’assurée G.M. inc. que son contrat d’assurance automobile émis par Promutuel Rive-Sud, Société mutuelle d’assurance générale, sous le numéro A1201612601, n’avait pas été renouvelé, le tout en contravention avec les articles 9, 37(1), 37(4) et 37(6) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages; »

 

 

[4]       Questionné par le vice-président du Comité, l’intimé a réitéré qu’il avait toujours l’intention de plaider coupable.

 

[5]       En conséquence, séance tenante, le Comité a pris acte du plaidoyer de culpabilité de l’intimé et a déclaré celui-ci coupable des infractions reprochées.

 

[6]       Sur le chef 1, l’intimé est déclaré coupable d’avoir enfreint l’article 26 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages.

 

[7]       Cet article stipule ce qui suit :

 

 

« Art. 26. Le représentant en assurance de dommages doit, dans les plus brefs délais, donner suite aux instructions qu’il reçoit de son client ou le prévenir qu’il lui est impossible de s’y conformer. Il doit également informer son client lorsqu’il constate un empêchement à la continuation de son mandat. »

 

[8]       Quant au chef 2, l’intimé est déclaré coupable d’avoir contrevenu à l’article 37 (4) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages. Cette disposition prévoit :

 

« Art. 37. Constitue un manquement à la déontologie, le fait pour le représentant en assurance de dommages d’agir à l’encontre de l’honneur et de la dignité de la profession, notamment :

 

              4o de faire défaut de rendre compte de l’exécution de tout mandat; »

 

[9]       Considérant ce qui précède, un arrêt conditionnel des procédures est ordonné sur les autres dispositions législatives et règlementaires alléguées au soutien des chefs d’accusation susdits.

 

II.         Preuve sur sanction

 

 

[10]    Les parties déposent de consentement les pièces documentaires P-1 à P-15.

 

[11]    Me Leduc nous explique les circonstances entourant la commission des infractions.

 

[12]    Le 6 avril 2016, l’intimé décide de mettre fin à son contrat avec le cabinet Les Assurances Jean Gamache inc.

 

[13]    Or, Les Assurances Jean Gamache inc. refuse et/ou néglige de transférer à l’intimé l’intégralité des dossiers relatifs à sa clientèle d’assurés.

 

[14]    L’intimé est donc forcé d’intenter une injonction en Cour supérieure du district de Québec afin de récupérer les dossiers physiques et autres documents relatifs à sa clientèle.

 

[15]    Le 10 mai 2016, le juge Alain Michaud, j.c.s., ordonne à Les Assurances Jean Gamache inc. de remettre à l’intimé ce qui lui appartient[1].

 

[16]     C’est dans un tel contexte, tout à fait particulier faut-il le dire, que l’intimé a fait défaut de renouveler le contrat d’assurance de l’assurée mentionnée à la plainte.

 

 

III.        Entente sur la sanction

 

 

[17]    Me Leduc nous dit que M. Chantal est en accord avec l’imposition de la sanction suivante, à savoir :

 

      Chef no 1 : une amende de 3 500 $;

 

      Chef no 2 : une amende de 2 000 $;

 

      Condamner l’intimé aux débours.

 

 

[18]    Donc, des amendes totalisant la somme de 5 500 $ plus les déboursés du dossier.

 

[19]    Les parties conviennent également que l’intimé aura un délai d’un (1) an pour payer les amendes et déboursés en douze versements mensuels, égaux et consécutifs. De plus, si l’intimé est en défaut, il perdra le bénéfice du terme.

 

[20]    Cela étant, Me Leduc reconnait que la sanction suggérée par les parties ne constitue pas une recommandation commune au sens de la jurisprudence puisque l’intimé n’est pas représenté par procureur[2] .

 

[21]    Me Leduc nous explique toutefois pour quelles raisons la sanction suggérée est juste et appropriée dans les circonstances.

 

[22]    Quant aux facteurs aggravants, l’avocat du syndic insiste sur les suivants :

 

      la gravité objective des infractions;

 

      les infractions se situent au cœur de la profession;

 

      elles mettent en péril la protection du public.

 

 

[23]    Relativement aux facteurs atténuants dont doit bénéficier l’intimé, Me Leduc souligne :

 

      l’absence d’antécédent disciplinaire de l’intimé ;

 

      son plaidoyer de culpabilité à la première occasion ;

 

      sa bonne collaboration au processus disciplinaire;

 

      que le risque de récidive est inexistant.

 

 

[24]    Afin d’appuyer la sanction, le procureur du syndic nous réfère aux précédents jurisprudentiels suivants :

 

        ChAD c. Boilard, 2006 CanLII 63937 (QC CDCHAD)

 

        ChAD c. Pham, 2010 CanLII 40394 (QC CDCHAD)

 

        ChAD c. Phaneuf, 2017 CanLII 48009 (QC CDCHAD)

 

        ChAD c. Bouffard, 2016 CanLII 33224 (QC CDCHAD)

 

        ChAD c. Clemente, 2018 CanLII 2056 (QC CDCHAD)

 

        ChAD c. Vaval, 2016 CanLII 66957 (QC CDCHAD)

 

        ChAD c. Plante, 2014 CanLII 24914 (QC CDCHAD)

 

 

 

 

[25]    Quant à M. Chantal, il nous confirme qu’il considère que la sanction est appropriée dans les circonstances.

 

[26]    En fait, nous comprenons que l’intimé considère que le paiement de l’amende totale sur une période de douze mois rend le tout raisonnable.

 

 

IV.       Analyse et décision

 

 

[27]    Tel qu’établi par la Cour d’appel dans l’arrêt Pigeon c. Daigneault[3], la sanction disciplinaire doit atteindre les objectifs suivants : 

 

        en premier lieu, la protection du public ;

 

        ensuite, la dissuasion du professionnel de récidiver;

 

        l'exemplarité à l'égard des membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables;

 

        et finalement, le droit du professionnel visé d'exercer sa profession.

 

 

[28]    Les infractions commises par l’intimé sont graves puisqu’elles sont au cœur de la profession de courtier en assurance de dommages.

 

[29]     Bien entendu, l’intimé vivait à l’époque une situation difficile avec son ancien cabinet.

 

[30]    En fait, nous sommes d’opinion que l’attitude intempestive du cabinet Les Assurances Jean Gamache inc. a fait en sorte que l’intimé a été privé, malgré lui, de ses dossiers pendant un certain temps.

 

[31]    À nos yeux, il s’agit d’un facteur nettement atténuant.

 

[32]    Cependant, cet état de fait regrettable ne saurait disculper l’intimé. En fait, lorsqu’il a mis fin à son contrat, l’intimé aurait dû s’assurer qu’il avait alors en mains toute l’information utile et nécessaire afin de pouvoir renouveler les contrats d’assurance de ses clients.

 

[33]    Quand un courtier en assurance de dommages décide de mettre un terme à son contrat avec un cabinet, il doit agir avec prudence et protéger les intérêts de ses assurés afin de faire face à toute éventualité. Bref, il ne peut pas se permettre d’être pris par surprise.   

 

[34]    Cela étant, nous sommes d’avis que la sanction des parties tient compte de la gravité objective des infractions et, d’autre part, qu’elle assure la protection du public sans punir l’intimé.

 

[35]    Quant aux frais, l’intimé devra assumer les frais et déboursés de l’instance.

 

[36]    L’intimé bénéficiera d’un délai d’un (1) an pour acquitter les amendes de 5 500 $ et les débours, délai qui sera calculé uniquement à compter du 31ième jour suivant la signification de la présente décision.

 

 

Par CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

PREND ACTE du plaidoyer de culpabilité de l’intimé Michel Chantal sur les chefs nos 1 et 2 de la plainte;

DÉCLARE l’intimé coupable du chef no 1 de la plainte pour avoir contrevenu à l’article 26 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages;

DÉCLARE l’intimée coupable du chef no 2 de la plainte pour avoir contrevenu à l’article 37(4o) du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages ;

PRONONCE un arrêt conditionnel des procédures à l’égard de toutes les autres dispositions législatives et réglementaires alléguées au soutien des chefs d’accusation susdits;

Sur le chef n1 :

IMPOSE à l’intimé une amende de 3 500 $;

Sur le chef n2 :

IMPOSE à l’intimé une amende de 2 000 $;

CONDAMNE l’intimé au paiement de tous les déboursés;

ACCORDE à l’intimé un délai d’un (1) an pour acquitter les amendes et déboursés, le tout en 12 versements mensuels, égaux et consécutifs, délai qui sera calculé uniquement à compter du 31ième jour suivant la signification de la présente décision;

DÉCLARE que si l’intimé est en défaut de payer à échéance l’un ou l’autre des versements susdits, il perdra le bénéfice du terme et toute somme alors impayée deviendra immédiatement due et exigible.

 

 

 

 

 

 

____________________________________

Me Daniel M. Fabien, avocat

Vice-président du Comité de discipline

 

 

 

____________________________________

Mme Maryse Pelletier, C. d’A.A., courtier en assurance de dommages 

Membre        

 

 

 

____________________________________

M. Marc-Henri Germain, C. d’A.A., A.V.A.,

courtier en assurance de dommages

Membre

 

Me Claude G. Leduc

Procureur de la partie plaignante

 

M. Michel Chantal

Partie intimée

 

 

Date d’audience : 23 mai 2018

 



[1] Voir la pièce P-15, soit le jugement rendu en faveur de l’intimé lequel est rapporté sous : Chantal c. Assurances Jean Gamache inc., 2016 QCCS 3460 (CanLII);

[2] Voir à ce sujet : ChAD c. Lavoie, 2017 CanLII 66279 (QC CDCHAD);

[3]  2003 CanLII 32934 (QC CA), aux paragraphes 38 et suivants;

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.