Chambre de l'assurance de dommages (Québec)

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COMITÉ DE DISCIPLINE

Chambre de l’assurance de dommages

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

No:

2015-10-01(C)

 

DATE :

29 mai 2017

 

 

LE COMITÉ :

Me Patrick de Niverville, avocat

Président

Mme Marie-Eve Racine, courtier en assurance de dommages

Membre

M. Serge Meloche, courtier en assurance de dommages

Membre

 

 

Me KARINE LIZOTTE, ès qualités de syndic adjoint de la Chambre de l’assurance de dommages

Partie plaignante

c.

LOUIS LULLI JR. CÉSAR-MATHIEU, inactif et sans mode d’exercice

Partie intimée

 

 

DÉCISION SUR SANCTION

 

 

[1]       Le 20 février 2017, le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages. se réunissait pour procéder à l’audition sur sanction de la plainte numéro 2015-10-01(C);

 

[2]       Le syndic adjoint était alors représenté par Me Julien Poirier-Falardeau et, de son côté, l’intimé était absent et non représenté ;

 

[3]       Le 17 juin 2016, l’intimé a été reconnu coupable[1] :

      De s’être approprié illégalement divers montants d’argent totalisant la somme de 1 426,96 $ (chefs 1, 2 et 3) ;

      D’avoir fait défaut de donner à l’assureur Intact les renseignements qu’il est d’usage de fournir (chefs 4, 5, 7 et 13) ;

      D’avoir exercé ses activités de façon négligente en faisant défaut d’obtenir le consentement de divers assurés avant que leur dossier de crédit ne soit consulté (chefs 6, 8 et 12) ;

      D’avoir manqué à son obligation de rendre compte en induisant en erreur une assurée quant à l’étendue de sa couverture d’assurance (chef 9) ;

      D’avoir fait défaut de donner suite aux instructions reçues de deux (2) clients différents (chefs 10 et 11) ;

[4]       Cela dit, vu l’absence de l’intimé et ce, malgré sa convocation pour l’audition sur sanction, la poursuite fut autorisée à procéder par défaut, le tout suivant l’article 144 du Code des professions ;

 

 

I.          Représentations sur sanction

 

[5]       Le procureur de la partie plaignante suggère d’imposer à l’intimé les sanctions suivantes :

Chefs 1, 2 et 3 :        - une radiation de 12 mois sur chacun des chefs

                                             - une amende de 2 000 $ par chef pour un total de 6 000 $

- une ordonnance de remboursement

Chefs 4, 5, 7 et 13 :   une amende de 3 000 $ sur chacun des chefs pour un total de 12 000 $

Chefs 6, 8 et 12 :        une amende de 2 000 $ sur chacun des chefs pour un total de 6 000 $

Chefs 9, 10 et 11 :     une amende de 3 000 $ par chef pour un total de 9 000 $      

[6]       De plus, conformément au principe de la globalité des sanctions, il suggère que les amendes soient réduites à une somme globale de 10 000 $ ;

[7]       D’autre part, Me Poirier-Falardeau a pris le soin d’identifier les facteurs objectifs et subjectifs propres au dossier de l’intimé, soit :

 

A)        Facteurs objectifs :

      Protection du public ;

      Gravité objective et infractions au cœur de la profession;

      Conséquence des actes commis ;

      Exemplarité et dissuasion ;

      Montant en cause pour l’appropriation (1 426,96 $) ;

 

B)       Facteurs subjectifs

      Sans antécédent, autrement aucune circonstance atténuante ;

      N’est plus certifié (non renouvelé) ;

      Répétition des infractions ;

      Abus de confiance ;

      M. César-Mathieu est un danger pour le public ;

      Pas de collaboration avec le syndic pendant l’enquête et absent lors de l’audition disciplinaire ;

      Aucun remboursement de sa part, perte assumée par le cabinet ;

[8]       À cela s’ajoute le fait que suivant la jurisprudence soumise, les sanctions suggérées s’inscrivent dans la fourchette des sanctions habituellement imposées pour ce type d’infractions ;

[9]       Enfin, puisque l’intimé n’a pas renouvelé son certificat, le procureur du syndic adjoint suggère que les périodes de radiation soient reportées à la date de remise en vigueur du certificat de l’intimé ;

 

II.       Analyse et décision

A)        Les infractions d’appropriation

[10]    Les infractions d’appropriation sont parmi les plus graves qu’un professionnel puisse commettre car elles portent directement atteinte à la protection du public ;

[11]    À cet égard, elles doivent être réprimées par le biais d’une sanction suffisamment exemplaire et dissuasive pour éviter la répétition de telles infractions tant par l’intimé que par d’autres membres de la profession qui pourraient être tentés de l’imiter ;

[12]    De plus, les circonstances aggravantes du présent dossier dépassent largement les circonstances atténuantes dont pourrait bénéficier l’intimé ;

[13]    À cela s’ajoute le fait que l’intimé, par son refus ou sa négligence de se présenter tant à l’audition sur culpabilité qu’à l’audition sur sanction, n’a fourni aucune preuve permettant au Comité d’alléger, un tant soit peu, les sanctions envisagées ;

[14]    Pour ces motifs, l’intimé se verra imposer sur les chefs 1, 2, et 3 les sanctions suivantes :

      Une amende de 2 000 $ par chef pour un total de 6 000 $

      Une période de radiation de 12 mois sur chacun des chefs, lesdites périodes devant être purgées de façon concurrente entre elles;

      Une ordonnance de remboursement sera également émise contre l’intimé pour le forcer à rembourser à son ex-employeur les sommes détournées ;

 

B)       Le défaut de donner les renseignements d’usage

[15]    Concernant les infractions visées par les chefs 4, 5, 7, et 13 de la plainte, l’intimé se verra imposer une amende de 2 000 $ par chef pour un total de 8 000 $

[16]    Le Comité est conscient que la partie plaignante a suggéré une amende de 3 000 $ par chef, cependant, compte tenu qu’il s’agit d’une première infraction en la matière, le Comité considère qu’une amende de 2 000 $ par chef est amplement suffisante pour assurer la protection du public ;

 

C)       Le défaut d’obtenir le consentement des assurés

[17]    Pour les chefs 6, 8 et 12 concernant le défaut de l’intimé d’obtenir le consentement des assurés avant que leur dossier de crédit ne soit consulté, le Comité considère qu’il s’agit d’une infraction particulièrement grave ;

[18]    En effet, ce type de comportement porte atteinte directement à la vie privée des clients et doit être, en conséquence, fortement réprimé ;

[19]    Pour ces motifs, l’intimé se verra imposer pour les chefs 6, 8 et 12 les sanctions suivantes :

      Une amende de 3 000 $ par chef pour un total de 9 000 $

[20]    Nonobstant le fait que le syndic adjoint ait suggéré une sanction moindre, le Comité estime qu’il y a lieu de souligner que le droit à la vie privée est un droit protégé par la Charte des droits et libertés de la personne[2] et, en conséquence, la sanction doit refléter le fait qu’il s’agit de la violation d’un droit fondamental ayant une valeur quasi-constitutionnelle[3], d’où l’amende de 3 000 $ par chef ;

 

D)       Le défaut de rendre compte et de suivre les instructions du client

[21]    Par sa négligence, l’intimé a manqué à son obligation de rendre compte à son client (chef 9) et a fait défaut de suivre les instructions reçues de deux (2) clients différents (chefs 10 et 11) ;

[22]    Vu la gravité objective de ces infractions, lesquelles sont au cœur même de l’exercice de la profession, le Comité est d’avis que les sanctions suggérées par le syndic adjoint sont justes et raisonnables ;

[23]    En conséquence, l’intimé sera condamné à une amende de 3 000 $ par chef sur chacun des chefs 9, 10 et 11 pour un total de 9 000 $ ;

 

E)        Principe de la globalité

[24]    Afin d’éviter d’imposer à l’intimé une sanction accablante suite à l’imposition de plusieurs amendes totalisant la somme de 32 000 $, celles-ci seront réduites à une somme globale de 10 000 $.

 

PAR CES MOTIFS, LE COMITÉ DE DISCIPLINE :

IMPOSE à l’intimé les sanctions suivantes:

 

Chefs 1, 2 et 3 :

-    une radiation de 12 mois sur chacun des chefs

                                              -    une amende de 2 000 $ par chef pour un total de 6 000 $

 

Chefs 4, 5, 7 et 13 :     

-     une amende de 2 000 $ par chef pour un total de 8 000 $

 

Chefs 6, 8 et 12 :         

-     une amende de 3 000 $ par chef pour un total de 9 000 $

 

Chefs 9, 10 et 11 :       

-     une amende de 3 000 $ par chef pour un total de 9 000 $

DÉCLARE que les périodes de radiation imposées sur les chefs 1, 2 et 3 seront purgées de façon concurrente pour un total de 12 mois, lesquelles seront exécutoires à compter de la remise en vigueur du certificat de l’intimé ;

ORDONNE à la secrétaire du Comité de discipline de faire publier, aux frais de l’intimé, un avis de radiation temporaire conformément à l’article 156 du Code des professions, à compter de la remise en vigueur du certificat de l’intimé ;

RÉDUIT le montant des amendes imposées à une somme globale de 10 000 $ ;

ORDONNE à l’intimé de payer la somme de 1 426,96$ au cabinet Groupe DPJL dans un délai de 30 jours, calculé à compter de la date de signification de la présente décision, le tout conformément à l’article 156(d) du Code des professions ;

CONDAMNE l’intimé au paiement de tous les déboursés, y compris les frais de publication de l’avis de radiation temporaire, le cas échéant ;

ACCORDE à l’intimé un délai de trois (3) mois pour acquitter le montant des amendes et déboursés, calculé à compter du 31e jour suivant la signification de la présente décision.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Me Patrick de Niverville, avocat

Président

 

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Mme Marie-Eve Racine, courtier en assurance de dommages

Membre

 

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M. Serge Meloche, courtier en assurance de dommages

Membre

Me Julien Poirier-Falardeau

Procureur de la partie plaignante

 

M. Louis Lulli Jr. César-Mathieu (absent et non représenté)

Partie intimée

 

Date d’audience : 20 février 2017

 



[1]   2016 CanLII 60414 (QC CDCHAD);

[2]   RLRQ, c. C-12, art. 5 et 24;

[3]   Frenette c. Métropolitaine (La), Cie d’assurance-vie, [1992] 1 RCS 647, 1992 CanLII 85 (CSC);

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