Autorité des marchés financiers (Québec)

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Contenu de la décision

Autorité des marchés financiers c. Assurances Crédit Virage inc.

 

BUREAU DE DÉCISION ET DE RÉVISION

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

MONTRÉAL

 

DOSSIER N° :

2014-008

 

DÉCISION N° :

2014-008-002

 

DATE :

6 août 2014

 

 

EN PRÉSENCE DE :

Me JEAN-PIERRE CRISTEL

 

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

Partie demanderesse

c.

ASSURANCES CRÉDIT VIRAGE INC.

et

CHANTAL THIBODEAU

et

ASSUREXPERTS INC.

et

BENOîT FRENETTE

Parties intimées

 

 

 

pénalité administrative et ordonnances de suspension d’inscription, de changement de dirigeant, d’assortiment d’un certificat d’exercice à certaines conditions et de mesures propres à assurer le respect de la loi

[art. 93 et 94, Loi sur l’Autorité des marchés financiers, RLRQ, c. A-33.2; art 115 et 115.9 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, RLRQ, c. D-9.2]

 

 

Me Marie-A. Pettigrew

(Contentieux de l’Autorité des marchés financiers)

Procureure de l’Autorité des marchés financiers

 

Me Mathieu Ayotte

(Beauvais Truchon, S.E.N.C.R.L.)

Procureur de Assurances Crédit Virage inc. et Chantal Thibodeau

 

Me Éric Lemay

(Siskinds, Desmeules Avocats s.e.n.c.r.l.)

Procureur de Assurexperts inc. et Benoît Frenette

 

Date d’audience :

28 juillet 2014

 


 

 

DÉCISION

 

 

[1]   Le 20 février 2014, l’Autorité des marchés financiers (ci-après l’« Autorité ») a saisi le Bureau de décision et de révision (ci-après le « Bureau ») d’une demande visant l’obtention des ordonnances suivantes :

                imposer des pénalités administratives à l’égard de tous les intimés;

                nommer un nouveau dirigeant au cabinet Assurances Crédit Virage Inc. (ci-après « Crédit Virage »);

                mettre en place des mesures de contrôle et de surveillance concernant les activités de Crédit Virage;

                interdire à Chantal Thibodeau d’agir à titre de dirigeant responsable de tout cabinet d’assurances pour une période de trois (3) ans;

                assortir d’une restriction le certificat numéro 189651 de Chantal Thibodeau.

[2]   Cette demande visait également l’obtention d’ordonnances intérimaires, dont notamment :

         suspendre de façon intérimaire l’inscription de Crédit Virage;

         remettre tous les dossiers clients, livres et registre de Crédit Virage à un autre cabinet approuvé par l’Autorité, ou à défaut, à cette dernière;

         assortir d’une restriction le certificat numéro 189651 de Chantal Thibodeau; et

         à défaut de se conformer aux ordonnances intérimaires, radier le cabinet Crédit Virage.

[3]    Le tout est en vertu des articles 115 et 115.9 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[1] et des articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers[2].

[4]   Suite à la réception de cette demande, un avis d’audience fut transmis au Bureau pour une audience pro forma devant se tenir le 18 mars 2014. Lors de cette audience, tenue en présence des procureurs de l’Autorité et des intimés, un consentement signé par les intimés Crédit Virage et Chantal Thibodeau fut d’abord déposé avec une demande de toutes les parties à l’effet que soient prononcées par le Bureau certaines des ordonnances intérimaires recherchées par l’Autorité. La date du 22 avril 2014 fut par la suite retenue pour une nouvelle audience pro forma dans ce dossier.

[5]   Le 25 mars 2014[3], le Bureau rendait une décision par laquelle il suspendait de façon intérimaire l’inscription de Crédit Virage jusqu’à ce que ce cabinet ait procédé au changement de son dirigeant responsable et ordonnait à Crédit Virage de remettre tous ses dossiers clients, livres et registres à un autre cabinet d’assurances devant être approuvé préalablement par l’Autorité ou, à défaut, à l’Autorité.

[6]   À la demande des parties, l’audience pro forma du 22 avril 2014 fut reportée à quelques reprises et s’est finalement tenue le 28 juillet 2014, à 14 h 00, au siège du Bureau.

[7]   Avant la tenue de l’audience pro forma du 28 juillet 2014, les parties ont informé le Bureau de leur intention d’y présenter une entente intervenue entre eux.

LA DEMANDE

[8]   Le Bureau reproduit ci-après les faits et les allégations de la demande amendée de l’Autorité :

« I.  LES PARTIES ET AUTRES PERSONNES IMPLIQUÉES :

 

1.        La demanderesse est l’organisme chargé notamment de l’administration de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, L.R.Q., c. D-9.2 (la « LDPSF »), et exerce les fonctions qui y sont prévues conformément à l’article 7 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers, L.R.Q., c. A-33.2 (la « LAMF »);

 

2.        Tel que le prévoit notamment  l’article 4 de la LAMF :

 

« 4. L’Autorité a pour mission de :

 

1° prêter assistance aux consommateurs de produits et utilisateurs de services financiers notamment en établissant des programmes éducationnels en matière de consommation de produits et services financiers, en assurant le traitement des plaintes reçues des consommateurs et en leur donnant accès à des services de règlement de différends;

 

2° veiller à ce que les institutions financières et autres intervenants du secteur financier respectent les normes de solvabilité qui leur sont applicables et se conforment aux obligations que la loi leur impose en vue de protéger les intérêts des consommateurs de produits et utilisateurs de services financiers et prendre toute mesure prévue à la loi à ces fins;

 

3° assurer l'encadrement des activités de distribution de produits et services financiers en administrant en outre les règles d'admissibilité et d'exercice de ces activités et en prenant toute mesure prévue à la loi à ces fins.  [...]»

 

 

3.        De même, l’article 8 de la LAMF prévoit :

 

« 8. L'Autorité exerce ses fonctions et pouvoirs de manière:

 

1° à favoriser la confiance des personnes et des entreprises à l'égard des institutions financières et autres intervenants du secteur financier quant à leur solvabilité et à l'égard de la compétence des agents, des conseillers, des courtiers, des représentants et des autres intervenants qui œuvrent dans le secteur financier;

 

2° à promouvoir une offre de produits et services financiers de haute qualité et à un prix concurrentiel pour l'ensemble des personnes et des entreprises dans toutes les régions du Québec;

 

3° à assurer la mise en place d'un cadre réglementaire efficace favorisant le développement du secteur financier et permettant l'évolution des pratiques de gestion et des pratiques commerciales dans ce secteur;

 

4° à donner aux personnes et aux entreprises un accès à une information fiable, exacte et complète sur les institutions financières et autres intervenants du secteur financier et sur les produits et services financiers offerts;

 

5° à assurer la protection du public contre les pratiques déloyales, abusives et frauduleuses et à donner accès aux personnes et aux entreprises lésées à divers modes de règlement de différends. »

 

4.        Assurances crédit Virage inc. (« Virage ») est une personne morale légalement constituée décrivant ses activités comme étant : « cabinet d’assurance de dommages », tel qu’il appert de l’état des renseignements d’une personne morale émis par le Registraire des entreprises (« REQ ») allégué comme pièce D-1 a ),  l’Autorité alléguant en liasse les REQ des autres personnes morales dont il est question aux présentes procédures sous les cotes D-1b) à D-1h) ;

 

5.        Virage est un cabinet détenant une inscription depuis le 15 novembre 2010 en vertu de la LDPSF auprès de l’Autorité, portant le numéro 515032, l’autorisant à agir dans la discipline de l’assurance de dommages, tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique alléguée comme pièce D-2;

 

6.        Chantal Thibodeau est une représentante détenant un certificat émis par l’Autorité en vertu de la LDPSF, portant le numéro 189651, autorisée à agir dans la discipline de l’assurance de dommages des particuliers, tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique alléguée comme pièce D-3;

 

7.        Chantal Thibodeau est la dirigeante responsable de Virage depuis le 11 août 2011, tel qu’il appert de la lettre de l’Autorité le confirmant alléguée comme pièce D-4;

 

8.        Chantal Thibodeau est également l’unique représentante rattachée au cabinet Virage, tel qu’il appert d’un extrait de la base de données MISA de l’Autorité allégué comme pièce D‑5;

 

9.        Assurexperts inc. (« Assurexperts) est une personne morale légalement constituée décrivant ses activités comme étant « agences d’assurances – intermédiaire de marché en assurance de dommages et de personnes, exploitation d’un réseau de cabinets affiliés (voir REQ D-1b));

 

10.     Assurexperts est un cabinet détenant une inscription en vertu de la LDPSF auprès de l’Autorité, portant le numéro 504587 l’autorisant notamment à agir dans la discipline de l’assurance de dommages, tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique allégué comme pièce D-6;

 

11.     Assurexperts a 36 représentants qui lui sont rattachés, tel qu’il appert de la liste des représentants alléguée comme pièce D-7;

 

12.     Benoît Frenette est un représentant détenant un certificat émis par l’Autorité en vertu de la LDPSF, portant le numéro 158204, autorisé à agir dans la discipline de l’assurance de dommages des particuliers, tel qu’il appert de l’attestation de droit de pratique alléguée comme pièce D-8;

 

13.     Benoît Frenette est le dirigeant responsable de Assurexperts depuis le 13 juillet 2011, tel qu’il appert de la pièce D-9;

 

14.     Aux fins de mieux comprendre le rôle et l’implication des divers intervenants gravitant autour du cabinet Virage, l’enquêteur de l’Autorité a préparé un organigramme permettant de visualiser le rôle de chacun de même que leur actionnariat et leurs administrateurs, organigramme allégué comme pièce D-10;

 

15.     Virage a ses bureaux dans les mêmes locaux que le concessionnaire automobile St‑Onge Ford inc. (« St-Onge Ford ») de Grand-Mère soit au 1870, 6ième avenue, Grand-Mère, (voir REQ de St-Onge Ford, pièce D-1c));

 

16.     St-Onge Ford exploite également deux (2) autres concessions soit un à Shawinigan Sud et un autre à La Tuque;

 

17.     Le groupe Autoxpert inc. (« Autoxpert »), dont il sera aussi question dans la présente procédure est une personne morale légalement constituée, décrivant ses activités comme étant « concessionnaires d’automobiles neuves, vente automobiles » (voir REQ D-1e));                               

18.     Entreprises Claude Mondou inc. (« Mondou ») est une compagnie offrant du financement automobile et dont les bureaux sont également dans les mêmes locaux que St-Onge Ford soit au 1870, 6ième avenue, Grand-Mère;

 

19.     Mondou fait également affaire sous le nom de « Crédit virage Canada » (« Mondou (Crédit Virage Canada »)) (voir pièce D-1d);

 

20.     Mondou (Crédit Virage Canada) finance exclusivement les clients référés par St-Onge Ford et Autoxpert et plus particulièrement les personnes ayant de la difficulté à se trouver du crédit;

 

21.     L’intimée Chantal Thibodeau, en plus d’agir pour Virage, est employée à temps plein pour Mondou (Crédit Virage Canada);

 

22.     Virage, quant à elle, n’accepte que les clients qui lui sont référés par Mondou (Crédit Virage Canada) et donc qui acquièrent leur véhicule auprès de Autoxpert ou St-Onge Ford et qui ont de la difficulté à se trouver du crédit;

 

23.     D’ailleurs, lorsqu’un client de Mondou (Crédit Virage Canada) cesse de faire affaire avec ce dernier, Virage annule l’assurance avec le client, copie d’une lettre type adressée au client dans ces cas étant alléguée comme pièce D-11;

 

24.     Virage n’est liée contractuellement avec aucun assureur et transige exclusivement via le cabinet Assurexperts qui offre aux clients de Virage une (1) seule option d’assurance automobile de l’assureur INTACT Compagnie d’assurances (« INTACT ») (anciennement La Compagnie d’assurances JEVCO (« JEVCO »)), dont les conditions sont prédéterminées;

 

 

INSPECTION PAR LA CHAMBRE DE L’ASSURANCE DE DOMMAGES (« ChAD ») ET ENQUÊTE DE L’AUTORITÉ

 

25.     En vertu des articles 107 et suivants de la LDPSF, l’Autorité a le pouvoir d’inspecter un cabinet pour s’assurer du respect de la Loi et de ses règlements;

 

26.     L’article 9 de la LAMF prévoit que l’Autorité peut déléguer son pouvoir d’inspection à un organisme d’autoréglementation telle la ChAD, ce qui fut fait dans le présent dossier;

 

27.     Le 20 mai 2011, par sa décision portant le numéro 2011-INSP-0173, le directeur adjoint aux services de l’inspection de l’Autorité (le « SI ») a décidé de procéder à l’inspection de Virage et a autorisé la ChAD, par le biais de l’inspecteur Jean-Sébastien Houle, à procéder à celle-ci, copie de la décision étant alléguée comme pièce D-12;

 

28.     Le 30 mai 2011, l’Autorité a attesté de la qualité d’inspecteur de Jean-Sébastien Houle et du fait qu’il pouvait procéder à l’inspection de Virage, copie de l’attestation 2011‑ATSE‑0288 de la qualité d’un inspecteur étant alléguée comme pièce D-13;

 

29.     Le 13 septembre 2011, l’inspecteur de la ChAD a transmis une lettre à Virage pour l’informer de l’inspection qui allait avoir lieu le 6 octobre suivant, copie de cette lettre étant alléguée comme pièce D-14;

 

30.     Le 14 septembre 2011, par sa décision portant le numéro 2011-INSP-0281, le SI a décidé d’ajouter un inspecteur à celui déjà nommé, copie de la décision étant alléguée comme pièce D-15;

 

31.     L’Autorité a attesté de la qualité d’inspecteur de Jean Rivard et du fait qu’il pouvait procéder à l’inspection de Virage, copie de l’attestation 2011-ATSE-0350 du 22 septembre 2011 étant alléguée comme pièce D-16;

 

32.     Le 21 septembre 2011, Chantal Thibodeau a rempli le questionnaire de préinspection, lequel est allégué comme pièce D-17;

 

33.     Le 6 octobre 2011, la ChAD a procédé à l’inspection de Virage relativement à ses activités en assurance de dommages, lors de laquelle diverses irrégularités ont été constatées, dont les suivantes :

 

a.    Absence de compte séparé;

b.    Déficience dans la tenue des dossiers clients;

c.    Déficience dans les renseignements fournis aux clients;

d.    Défaut d’offrir des produits de plusieurs assureurs;

e.    Registre des commissions incomplet;

f.     Absence de politique de traitement des plaintes;

g.    Affichage du cabinet / confusion;

h.    Formulaire double emploi non complété;

 

34.      Le nombre d’anomalies constatées lors de l’inspection, permet de conclure à une incompréhension de Chantal Thibodeau, dirigeante responsable, quant aux obligations légales et déontologiques qu’elle doit respecter, ce qui est d’autant plus inquiétant qu’elle est la seule représentante en plus d’être la dirigeante responsable du cabinet;

 

35.      D’ailleurs, le questionnaire « Questions-Réponses » complété par la ChAD fait état du fait que:

 

a.    « Important de signaler que madame Chantal Thibodeau elle-même se décrit comme un « courtier non autonome » qui se limite quasiment aveuglément à suivre les directives et les procédures instaurées par le cabinet Assurexperts pour l’émission des polices d’assurance sans jamais faire aucun suivi par la suite, chacun des clients après l’émission de la police d’assurance étant au surplus invité à communiquer directement avec Assurexperts.  Comme le dit madame Thibodeau, elle se limite à compléter la proposition d’assurance et ensuite à peser sur le « piton » sans aucun suivi ni vérification sauf pour le renouvellement. »,

 

tel qu’il appert du document intitulé « Questions-Réponses » complété par l’inspecteur allégué comme pièce D-18 (voir bas de la page 4);

 

36.     Le 9 janvier 2012, la ChAD transmettait à Virage, au soin de Chantal Thibodeau, les annexes confirmant les lacunes observées, copie de cette lettre et des documents joints étant allégués comme pièce D-19 et les réponses obtenues de Chantal Thibodeau étant alléguées comme pièce D-20;

 

37.     Par lettre du 9 janvier 2012, la ChAD transmettait également copie de ces documents au directeur adjoint de l’inspection de l’Autorité, copie de cette lettre étant alléguée comme pièce D-21;

 

38.     Par lettre du 3 février 2012, la ChAD transmettait à l’Autorité un « Avis de déficience majeure » relativement au cabinet Virage, copie de cette lettre et des documents qui y étaient joints étant allégués comme pièce D-22;

 

39.     Par cette lettre, la ChAD faisait référence à l’absence d’un compte séparé, au fait que le cabinet n’offrait pas les produits de plusieurs assureurs et du fait que l’inspection avait donné suite à un nombre élevé de recommandations, soit dix-huit (18);

 

40.     Considérant la nature et le nombre des manquements constatés par la ChAD lors de l’inspection, le dossier a été référé au service des préenquêtes de l’Autorité qui l’a ensuite transféré au service des enquêtes;

 

41.     L’inspection de la ChAD et, ensuite, l’enquête de l’Autorité auront permis de révéler plusieurs manquements notamment les suivants :

 

Compte séparé

 

42.     Tel qu’indiqué à l’article 10 du Règlement relatif à l’inscription d’un cabinet, d’un représentant autonome et d’une société autonome, R.R.Q., c. D-9.2, r.15  Règlement relatif à l’inscription d’un cabinet »), le compte séparé est un compte distinct, ouvert au sein d’une institution autorisée à recevoir des dépôts au Canada, et dans lequel un cabinet doit déposer toutes les sommes qu’il reçoit ou perçoit pour le compte d’autrui;

 

43.     Il s’agit d’une mesure mise en place par le législateur pour assurer la protection du public;

 

44.     Ce compte doit être maintenu par le cabinet afin qu’il puisse conserver son inscription et ce dernier doit s’assurer que les sommes, comme les primes d’assurances, perçues pour le compte d’autrui, y soient déposées sans délai;

 

45.     Les 20 octobre 2010, 8 novembre 2010, 26 juillet 2011 et 4 octobre 2011, Virage a transmis à l’Autorité le formulaire « Déclaration relative à l’absence de compte séparé », tel qu’il appert des déclarations d’absence de compte séparé alléguées comme pièce D‑23;

 

46.     Or, lors de l’inspection, il fut constaté que Virage percevait les primes sans qu’elles soient déposées dans un compte séparé, copie d’un exemple de « calendrier des prélèvements » étant allégué comme pièce D-24;

 

47.     Monsieur Justin Darchen, comptable de Mondou et procédant à la préparation des états financiers de Virage, a mentionné aux inspecteurs que, selon lui, un compte séparé ne s’avérait pas nécessaire considérant que les primes perçues des assurés mensuellement transitaient peu de temps à leur compte et étaient versées immédiatement à l’assureur;

 

48.     Or, la durée pendant laquelle l’argent demeure au compte n’est pas pertinente, l’obligation du compte séparé demeurant;

 

49.     Virage a, depuis, ouvert un compte séparé, tel qu’il appert de l’attestation communiquée en réponse à l’annexe 5 jours (voir pièce D-20 pages 3 à 5);

 

50.     Virage a donc été en défaut d’avoir un compte séparé à compter de son inscription, pendant 14 mois, soit du 15 novembre 2010 au 17 janvier 2012, en contravention avec les articles 2(17), et 10 du Règlement relatif à l’inscription d’un cabinet et 5, 6 et 7 du Règlement sur la tenue et la conservation des livres et registres, R.R.Q., c.D-9.2, r.19;

 

Tenue des dossiers clients

 

51.     La vérification de certains dossiers clients a permis de constater des irrégularités au niveau de la tenue des dossiers clients;

 

52.     Virage ne consigne que très peu de notes aux dossiers, ne faisant état d’aucun conseil prodigué, par exemple du fait que les garanties de valeur à neuf ou de remplacement auraient été offertes ou si elles ont été refusées par les clients;

 

53.      Bien qu’il s’agisse d’un programme d’assurance implanté pour satisfaire des clients en « deuxième chance » au financement avec un cadre très précis à respecter qui ne prévoirait pas de telles garanties, les clients doivent en être informés et être conseillés en conséquence, copie de cinq (5) dossiers clients étant allégués, en liasse, comme pièce D‑25 a) à e);

 

54.     Or, l’article 16 LDPSF exige d’un représentant qu’il agisse avec soin et compétence;

 

55.     L’article 27 LDPSF exige que le cabinet recueille personnellement les renseignements nécessaires lui permettant d’identifier les besoins de ses clients afin de leur offrir le produit d’assurance qui leur convient le mieux;

 

56.     À cet effet, l’article 21 du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome, R.R.Q., c.D-9.2, r.2 (« Règlement sur le cabinet ») décrit les renseignements nécessaires que doit tenir un représentant sur chacun de ses clients dans l’exercice de ses activités;

 

57.     L’article 39 LDPSF prévoit qu’un cabinet doit prendre les moyens nécessaires afin que les garanties offertes répondent aux besoins de ses clients lors du renouvellement de la police d’assurance;

 

58.     Or, l’article 12 du Règlement sur le cabinet indique que :

 

« 12. Le cabinet, le représentant autonome ou la société autonome tient des dossiers clients pour chacun de ses clients. »

 

59.      Virage a donc fait défaut de se conformer aux articles 16, 27 et 39 de la LDPSF et 12 et 21 du Règlement sur le cabinet ;

 

Renseignements à fournir aux consommateurs

60.      Il a été constaté que Virage offre un seul produit qui provient exclusivement d’un seul assureur, à savoir Union Canadienne, ayant été remplacée par JEVCO (maintenant INTACT);

 

61.      En effet, 100% du volume total des risques placés par Virage est en faveur du même assureur, via le cabinet Assurexperts, tel qu’indiqué à l’annexe 5 du questionnaire préinspection, déjà allégué comme pièce D‑17 (page 34);

 

62.      D’ailleurs, il est à noter que Virage ne détient aucun contrat d’agence avec quelqu’assureur que ce soit, ne transigeant qu’avec l’assureur INTACT, via le cabinet Assurexperts;

 

63.      Après avoir informé la ChAD ne pas détenir de contrat ni avec un assureur, ni avec Assurexperts, Virage a ensuite fourni le contrat intervenu avec Assurexperts, copie d’un courriel et du contrat avec Assurexperts étant allégués, en liasse, comme pièce D-26;

 

64.      Or, Virage ne divulgue pas ses liens d’affaires avec l’assureur INTACT (directement ou via Assurexperts) à ses clients lors de la vente de produits d’assurance de dommages des particuliers, le tout en contravention de l’article 26 LDPSF et des articles 4.8 et 4.10 al. 2 du Règlement sur les renseignements à fournir au consommateur, R.R.Q. c. D‑9.2, r. 18 ;

 

Offre de produits de plusieurs assureurs

65.      L’article 6 de la LDPSF prévoit :

 

«6. Le courtier en assurance de dommages est la personne physique qui offre directement au public un choix de différents produits d’assurance de dommages de plusieurs assureurs ou qui offre à un cabinet, à un représentant autonome ou à une société autonome des produits d’assurance de dommages d’un ou de plusieurs assureurs. Il agit également comme conseiller en assurance de dommages. »

[Nos soulignés]

 

66.      En offrant un seul produit, d’un seul assureur et encore, par l’intermédiaire d’un autre cabinet, Virage ne respecte pas l’article 6 de la LDPSF;

 

67.      Ainsi, il lui a été requis par la ChAD d’offrir des produits de plusieurs assureurs ou encore changer leur certificat de courtier en un certificat d’agent en assurance de dommages des particuliers (voir pièce D-19, page 4/8), ce que Virage ne fait toujours pas à ce jour;

 

68.      De fait, Chantal Thibodeau a répondu, en réponse avec l’annexe « délai 60 jours » (voir pièce D-20 page 16) :

 

« Présentement, je n’ai pas de solution à vous donner, car c’est Assurexperts qui me donne mon seul assureur.  Il n’y en a pas beaucoup qui accepte les 2ième et 3ième chances au crédit.  Étant donné que je suis rattachée à eux, je vais vérifier pour trouver une solution. »

 

[Nos soulignés]

 

69.      À noter que Chantal Thibodeau est rattachée au cabinet Virage et non Assurexperts ce qui démontre encore là une incompréhension de sa part des dispositions législatives applicables;

 

70.      Ultérieurement, lorsque rencontrée par l’enquêteur de l’Autorité, Chantal Thibodeau lui a déclaré :

 

« La question du statut du cabinet (agent vs courtier) s’est posée, mais il a été décidé, à la suggestion de AE (comprendre Assurexperts), que ACV (comprendre Assurances Crédit Virage) resterait courtier. »,

 

copie des notes prises par l’enquêteur consignant la version de Chantal Thibodeau étant alléguée comme pièce D-27 (voir p. 40);

 

71.      Virage, en offrant un (1) seul produit, d’un (1) seul assureur, contrevient à l’article 6 de la LDPSF;

 

Registre des commissions

 

72.      Les vérifications effectuées lors de l’inspection ont permis de constater que le registre des commissions de Virage était incomplet et dispersé notamment du fait qu’il fallait consulter plusieurs documents pour obtenir les informations requises par les articles 22 ss. du Règlement sur le cabinet, copie de ces documents (extraits) étant alléguée comme pièce D‑28 et le registre des commissions fourni ultérieurement étant allégué comme pièce D‑29;

 

Traitement des plaintes et règlement des différends

 

73.      Lors de l’inspection, Virage n’avait pas adopté de politique de traitement des plaintes et de règlement des différends conformément aux dispositions des articles 103 à 103.4 de la LDPSF;

 

74.      L’adoption d’une telle politique permet de s’assurer que les dispositions législatives relatives au traitement des plaintes et au règlement des différends sont respectées le tout dans l’intérêt des clients;

 

75.      Requise de procéder à l’adoption d’une telle politique, Chantal Thibodeau a transmis le 24 janvier 2012 des documents paraissant pour certains dater de 2005 et faisant référence à la « Loi 188 », ces documents démontrant le peu de sérieux accordé à la mise en place d’une telle politique pourtant obligatoire (voir pièce D-20 pages 8 à 14);

 

76.      Madame Thibodeau a par la suite, soit en date du 23 février 2012, corrigé la situation en transmettant une telle politique (voir pièce D-20 pages 19 à 22);

 

77.      Virage a donc été sans politique de traitement de plaintes du 15 novembre 2010 au 23 février 2012, soit pendant une période de 15 mois, en contravention avec les articles 103 à 103.4 de la LDPSF;

 

Identification du cabinet/confusion

 

78.      Il a été constaté que les bureaux de Virage ne comportent aucune affiche extérieure permettant de l’identifier;

 

79.      Chantal Thibodeau a affirmé qu’il n’y a pas de bannière extérieure qui laisse voir la présence du cabinet puisque Virage n’est pas un « vrai cabinet », considérant que ses seuls clients sont ceux de Mondou (Crédit Virage Canada) (voir pièce D-27, page 40);

 

80.      La seule identification visible du cabinet Virage était située sur une fenêtre intérieure au 2ième étage de la salle d’exposition du concessionnaire St-Onge Ford et consiste en un autocollant d’environ 8"X10" apposé à l’entrée des bureaux administratifs qui servent tant au concessionnaire qu’à l’entreprise de financement, Mondou (Crédit Virage Canada);

 

81.      Par ailleurs, il y a une confusion entre le cabinet Virage et l’entreprise de financement Crédit Virage Canada (Mondou) pour les motifs suivants :

 

a.    Les logos de Virage et de Mondou (Crédit Virage Canada) sont presque identiques (voir à titre d’exemple les documents allégués comme pièce D-30;

 

b.    Dans ses correspondances, Chantal Thibodeau utilise plusieurs signatures sans différencier elle-même les entreprises pour lesquelles elle agit, le cabinet Virage ou encore Mondou (Crédit Virage Canada), tel qu’il appert des correspondances alléguées comme pièce D-31;

 

c.    Le document « Proposition d’assurance » porte l’entête de « Crédit  Virage Canada » (voir pièce D-30 page 2) et même « Groupe Autoxpert » dans un cas ayant pu être répertorié, proposition alléguée comme pièce D-32;

 

d.    Le message téléphonique d’accueil associé au numéro de téléphone de Virage commence par : « Bienvenue chez St-Onge Ford et les Entreprises Claude Mondou » alors qu’aucune des options offertes par la suite ne réfère au cabinet d’assurances Virage;

 

e.    L’entente intervenue entre le cabinet Virage et Assurexperts inc. démontre également la confusion entre Virage et Mondou (Crédit Virage Canada) (voir pièce D‑26);

 

f.     En effet, l’entente, pourtant faite au nom de Virage, qualifie cette dernière d’entreprise de financement et de location à long terme de véhicules d’occasion, plutôt que de cabinet d’assurances;

 

g.    Les frais d’émission de police facturés aux clients par Virage sont aussi appelés « frais de financement » sur la facturation et sont aussi qualifiés de « frais d’inspection du véhicule », tel qu’il appert du document de « frais d’émission de contrat » en blanc allégué comme pièce D-33 et voir pièce D-25 a) pp. 3, 7 et 8);

 

h.    Or, les frais de financement devraient revenir à la compagnie de financement soit Mondou (Crédit Virage Canada), les frais d’inspection du véhicule reviendraient quant à eux au concessionnaire (St-Onge Ford) et les frais d’émission de police revenant à Virage, situation portant pour le moins à confusion pour le consommateur;

 

82.      Ces faits nous amènent à conclure à une contravention de l’article 1 du Règlement sur le cabinet qui prévoit :

 

« Le cabinet, le représentant autonome ou la société autonome doit, dans sa publicité, ses représentations ou ses sollicitations auprès de la clientèle, utiliser son nom ou, le cas échéant, les autres noms qu’il utilise au Québec dans l’exercice de ses activités et ne pas utiliser une marque de commerce, un slogan, une formule ou tout autre élément pouvant prêter à confusion.

 

Il doit aussi indiquer le titre sous lequel il exerce ses activités. »

 

Formulaire double emploi

83.      Dans le cadre de sa demande d’inscription déposée auprès de l’Autorité le 29 décembre 2010, Chantal Thibodeau a répondu « non » à la question :

 

« Exercez-vous d’autres activités (rémunérées ou non) dans un domaine différent de celui lié à votre pratique de représentant?  Si vous avez répondu oui, veuillez remplir et transmettre le formulaire en cas de double emploi »

 

et n’a pas complété l’annexe en cas de double emploi, tel qu’il appert du formulaire de demande de certificat de représentant en assurance de dommages allégué comme pièce D-34 (page 3, question 4-1a));

 

84.      Or, il est bien requis de compléter cette annexe dans le cas d’une réponse positive;

 

85.      Lors de l’inspection, ayant constaté que Chantal Thibodeau travaillait aussi pour Mondou (Crédit Virage Canada), il lui fut requis de compléter un tel formulaire, lequel a été transmis à la ChAD le ou vers le 24 janvier 2012, copie du formulaire double emploi et de l’attestation de l’employeur transmis par la ChAD étant alléguée en liasse comme pièce D‑35;

 

86.      Ce formulaire fait état que Chantal Thibodeau :

 

a.    travaille pour Mondou;

 

b.    dont les activités sont décrites comme étant une « Station Service Ultramar »;

 

c.    depuis avril 2010 (attestation employeur);

 

d.    à raison de 40 heures/semaine (attestation employeur);

 

e.    comme adjointe administrative soit : téléphone, classement, paye, assurance groupe des mécaniciens, tâches administratives, dépôts;

 

87.      Lorsque rencontrée par l’enquêteur de l’Autorité, Chantal Thibodeau a déclaré travailler environ 20 heures/semaine pour Virage et environ 20 heures/semaine pour Mondou, (voir pièce D-27 page 37);

 

88.      Lorsque Chantal Thibodeau a fait sa demande de certificat de représentant en assurance de dommages, l’attestation complétée par son superviseur, Steve Binet, confirmait qu’elle avait effectué au moins 28 heures / semaine de travail pendant toute la période probatoire, tel que le requiert d’ailleurs l’article 34 du Règlement relatif à la délivrance et au renouvellement du certificat du représentant, R.R.Q., c. D-92, r.7 (voir pièce D-31 page 6);

 

89.      Lorsque rencontrée par l’enquêteur de l’Autorité, Chantal Thibodeau a déclaré, quant à son stage, que :

 

a.    elle a fait son stage sous la supervision de Steve Binet d’Assurexperts;

 

b.    ça se faisait la plupart du temps par téléphone et quelques fois il venait au bureau;

 

c.    essentiellement, Steve Binet l’assistait dans l’entrée des informations dans le système;

 

d.    elle travaillait environ 20 heures/semaine (pièce D-27 page 38);

 

90.      Chantal Thibodeau a donc omis de déclarer sa situation réelle lors de son inscription ce qui est préoccupant pour une personne devenue dirigeante responsable peu de temps après ;

 

91.      Ces informations erronées dans la documentation fournie à l’Autorité constituent un manquement important, d’autant plus que le fait de fournir une information fausse à l’Autorité constitue une infraction pénale, l’article 469.1 de la LDPSF prévoyant :

 

« Quiconque fournit, de quelque manière que ce soit, des informations fausses ou trompeuses à l'Autorité, à un assuré, à un client ou à toute autre personne, à l'occasion d'activités régies par la présente loi ou par ses règlements, commet une infraction. »

 

Cueillette des renseignements personnels par des personnes non certifiées

 

92.      Outre les éléments constatés lors de l’inspection, l’enquête a permis de révéler que la cueillette des renseignements nécessaires à compléter la proposition d’assurance n’est pas toujours faite par un représentant dûment inscrit;

 

93.      L’enquêteur Jean-Pierre Aubé de l’Autorité a eu l’occasion d’entrer en communication avec certains assurés dont la version des faits permet de conclure qu’ils n’ont pas été en contact avec un représentant dûment autorisé avant de conclure leur contrat d’assurance, n’ayant traité qu’avec leur vendeur automobile, soit les assurés suivants :

 

1.    Annie Larche

 

Madame Larche a exposé ce qui suit :

 

a)    Elle a fait l’acquisition d’une automobile en mai 2012 auprès du concessionnaire Autoxpert de St-Georges;

b)    Lors de l’achat, elle n’a jamais rencontré ou parlé à un courtier d’assurance;

c)    Elle n’a parlé qu’avec le vendeur, qui s’est occupé des démarches pour obtenir le financement et l’assurance;

d)    Elle a obtenu le financement auprès de Crédit Virage;

e)    Elle était assurée avec JEVCO, via le cabinet Assurexperts disant même ne pas connaître Virage;

f)     Elle connait madame Chantal Thibodeau uniquement pour avoir eu à se rendre aux bureaux de St-Onge Ford, à deux (2) reprises, à Grand-Mère, pour la rencontrer, afin de régler des paiements en retard,

tel qu’il appert d’une copie des notes prises par l’enquêteur résumant l’entretien téléphonique avec madame Larche du 22 avril 2013 de même que des documents concernant madame Larche étant allégués en liasse comme pièce D-36;

Appel de monsieur Yves Barbeau, vendeur d’Autoexpert

g)    L’enquêteur de l’Autorité a reçu un appel de monsieur Yves Barbeau, vendeur chez Autoexpert (St-Georges), le 23 avril 2013, lui disant avoir reçu un appel de madame Larche et il voulait connaître la raison de l’appel de l’enquêteur de l’Autorité auprès de madame Larche;

h)    Monsieur Barbeau a alors affirmé, à l’enquêteur de l’Autorité, ce qui suit :

1.    C’est lui qui a vendu le Ford 2008 à madame Larche;

2.    Il explique que, lors d’une vente pour un client qui a un mauvais crédit, il fait une demande de financement à Crédit Virage Canada, via un formulaire en  ligne;

3.    Pour l’assurance, il envoie un formulaire par télécopieur à Chantal Thibodeau;

4.    S’il est accepté, il reçoit le contrat et les formulaires à faire signer au client;

5.    Chantal Thibodeau a suivi ses examens en assurances et Crédit Virage Canada a négocié un programme particulier pour les clients en « deuxième chance au crédit »;

6.    Le 5 septembre 2013, l’enquêteur de l’Autorité a recommuniqué avec monsieur Barbeau pour obtenir d’autres informations;

7.    Ce dernier était alors hésitant à répondre, ne voulant pas nuire à Crédit Virage Canada qui est pour lui une « vache à lait »;

8.    Il a alors dit à l’enquêteur de l’Autorité qu’il avait déjà dit tout ce qu’il avait à dire ajoutant ce qui suit :

                                                                  i.    Sur le formulaire d’assurance qu’il envoie à Chantal Thibodeau, il dit ne mettre que les informations de base (nom, adresse, date de naissance) ne posant pas de question relative aux assurances, car il ne vend pas d’assurances;

                                                                 ii.    Il affirme que c’est Chantal Thibodeau qui contacte le client par la suite pour avoir les informations;

                                                                iii.    Il reçoit une preuve d’assurance avant de libérer le véhicule;

                                                               iv.    Questionné par l’enquêteur sur l’entente de confidentialité qu’il aurait signée, il devient impatient et agressif et a refusé de continuer de parler à l’enquêteur, ayant alors raccroché la ligne,

tel qu’il appert d’une copie des notes prises par l’enquêteur lors de ses entretiens téléphoniques avec monsieur Barbeau étant alléguées comme pièce D-37 et copie des ententes de confidentialité signées par monsieur Barbeau et les autres vendeurs étant allégués comme pièce D-38;

 

2.    Francine-Annie Coocoo

 

a)    Madame Coocoo a fait l’acquisition d’un camion Dodge RAM 2007, en avril 2012, auprès du concessionnaire St-Onge Ford de La Tuque;

b)    Madame Coocoo affirme que son vendeur, Jean-François Sicotte, s’est occupé de tout : véhicule, financement, assurances;

c)    C’était la deuxième fois qu’elle achetait un véhicule auprès de ce concessionnaire et avec ce vendeur;

d)    La première fois, elle avait eu l’opportunité de choisir son assureur et elle a fait les démarches auprès de Bélair;

e)    Lors de l’acquisition en avril 2012, le vendeur lui a expliqué que cela avait été trop long avant d’obtenir une réponse de Bélair; il lui a alors proposé un produit d’assurance déjà approuvé et prêt à être signé par elle, offre qu’elle a acceptée;

f)     Elle sait que le cabinet est Assurexperts mais elle ignore qui est l’assureur, ignorant également qui sont Chantal Thibodeau et Virage,

tel qu’il appert d’une copie des notes de l’enquêteur consignant la version de madame Coocoo du 29 avril 2013 et des documents concernant madame Coocoo étant allégués comme pièce D-39 ;

3.    Johanne Leduc

 

a)    Madame Leduc a fait l’acquisition d’un véhicule Nissan Versa 2007 en mai 2012, auprès du concessionnaire Autoxpert situé à St-Georges de Champlain;

b)    Elle s’est rendue sur place et a fait affaire avec un vendeur qui était une connaissance de son conjoint;

c)    Elle n’a parlé à personne d’autre que le vendeur, qui s’est occupé de tout (véhicule, financement, assurances);

d)    Le vendeur a fait quelques téléphones et tout était réglé, madame Leduc qualifiant le tout de « package deal »;

e)    Le vendeur ne lui a pas dit qu’elle n’avait pas le choix de l’assurance, mais ça venait tout ensemble, celle-ci ayant un mauvais dossier de crédit;

f)     Son conjoint l’a informée que, la veille de l’appel avec l’enquêteur (soit le 22 avril 2013), une dame avait appelé concernant le renouvellement de son assurance et que l’afficheur du téléphone indiquait « garage St-Onge Ford Grand-Mère »;

g)    Elle sait que son assureur est JEVCO mais elle ignore qui est son courtier;

h)    La première fois qu’elle avait fait un achat d’un véhicule, elle avait eu l’opportunité de choisir son assureur,

tel qu’il appert d’une copie des notes de l’enquêteur consignant la version de madame Leduc du 23 avril 2013 et des documents fournis par cette dernière étant allégués, en liasse, comme pièce D-40;

4.    Alain Morin

 

a)    Il a fait l’acquisition d’un véhicule St-Onge Ford 2007, en mai 2011, auprès d’Autoxpert, St-Georges de Champlain;

b)    il a fait affaire uniquement avec le vendeur pour la vente, le financement et l’assurance;

c)    Son assureur est JEVCO mais il ignore qui est son courtier;

d)    Une dame l’a déjà appelé concernant le renouvellement de son assurance, mais il ignore de qui il s’agit;

e)    Il n’a pas eu le choix de l’assureur;

f)     Il a ensuite remis le combiné à sa conjointe, Mélanie Gagné, qui connaissait mieux le dossier, cette dernière ayant également confirmé les informations suivantes à l’enquêteur;

g)    Elle a fait affaire avec ce concessionnaire à deux (2) reprises;

h)    La première fois elle a pu choisir son assurance, mais la deuxième fois, le vendeur a exigé que ce soit le concessionnaire qui s’en occupe, affirmant que cela faisait « moins de problème »;

i)      Madame Gagné affirme qu’on lui a ainsi refusé qu’elle fasse affaire avec son propre courtier (Essor Assurances) ou avec son assureur INTACT;

j)      Elle n’a parlé à personne d’autre que le vendeur;

k)    Ce dernier l’a contactée ultérieurement au sujet du renouvellement,

tel qu’il appert d’une copie des notes prises par l’enquêteur consignant la version de Alain Morin lors de son entretien téléphonique du 29 avril 2013 et des documents concernant monsieur Morin étant allégués, en liasse, comme pièce D-41;

5.    Jason Beauregard

a)    Il a fait l’acquisition d’un véhicule, en mai 2013, auprès du concessionnaire Autoxpert de Saint-Georges de Champlain;

b)    Il a fait affaire uniquement avec le vendeur, pour la vente, le financement et l’assurance;

c)    Il n’a parlé à personne d’autre concernant son assurance de dommages;

d)    Il a accepté l’assurance qui lui a été proposée parce que c’était moins dispendieux que ce qu’il payait auparavant;

e)    À sa connaissance le cabinet d’assurance avec lequel il a fait affaire est le même que celui qui le finance, soit Mondou et Chantal Thibodeau,

tel qu’il appert d’une copie des notes prises par l’enquêteur consignant la version de monsieur Beauregard lors de l’entretien téléphonique du 20 juin 2013 et des documents concernant monsieur Beauregard étant allégués, en liasse, comme pièce D-42;

6.    Mélanie Gignac

a)    Elle a fait l’acquisition d’un véhicule, en mai 2013, auprès du concessionnaire Autoxpert de Saint-Georges de Champlain;

b)    Elle a fait affaire uniquement avec le vendeur, prénommé Yves, pour la vente du véhicule, le financement et les assurances du véhicule;

c)    Le vendeur lui a fait clairement fait savoir qu’elle était obligée de prendre le produit d’assurance qu’il lui offrait et qu’elle ne pouvait pas changer par la suite (ce qui est d’ailleurs contraire à l’article 22 de la LDPSF);

d)    Toutes ses informations personnelles relatives à la souscription d’assurance ont été recueillies par le vendeur;

e)    Ce dernier ne lui a rien expliqué concernant les modalités de l’assurance et ne lui a pas proposé d’options (couverture, franchise, etc);

f)     A sa connaissance, Autoxpert est rattaché à St-Onge Ford;

g)    Elle sait que le financement de son véhicule provient de Mondou (Crédit Virage Canada), ne connaissant par ailleurs ni Virage, ni Assurexperts,

tel qu’il appert d’une copie des notes prises par l’enquêteur consignant la version de madame Gignac du 20 juin 2013 et des documents concernant madame Gignac étant allégués, en liasse, comme pièce D-43;


INFRACTIONS (RE : CUEILLETTE DES INFORMATIONS)

94.      La demanderesse soumet qu’en agissant comme elle l’a fait, Chantal Thibodeau, à titre de représentante et les représentants de Assurexperts ayant pu agir aux termes des présentes, ont fait défaut de respecter les articles 6, 12, 16, 27, 28 et 39 de la LDPSF qui prévoient :

 

« 6. Le courtier en assurance de dommages est la personne physique qui offre directement au public un choix de différents produits d’assurance de dommages de plusieurs assureurs ou qui offre à un cabinet, à un représentant autonome ou à une société autonome des produits d’assurance de dommages d’un ou de plusieurs assureurs. Il agit également comme conseiller en assurance de dommages.

 

 

12. Sous réserve des dispositions du titre VIII, nul ne peut agir comme représentant, ni se présenter comme tel, à moins d'être titulaire d'un certificat délivré à cette fin par l'Autorité.

 

Toutefois, une institution financière peut, par la remise de brochures ou de dépliants, par le publipostage ou par l'utilisation de toute autre forme de publicité, inviter le public à acquérir un produit d'assurance.

 

 

Honnêteté.

 

16. Un représentant est tenu d’agir avec honnêteté et loyauté dans ses relations avec ses clients.

 

Compétence.

 

Il doit agir avec compétence et professionnalisme.

 

 

Identification des besoins.

 

27. Un représentant en assurance doit recueillir personnellement les renseignements nécessaires lui permettant d’identifier les besoins d’un client afin de lui proposer le produit d’assurance qui lui convient le mieux.

 

 

Description du produit.

 

28. Un représentant en assurance doit, avant la conclusion d'un contrat d'assurance, décrire le produit proposé au client en relation avec les besoins identifiés et lui préciser la nature de la garantie offerte.

 

Exclusions.

 

Il doit, de plus, indiquer clairement au client les exclusions de garantie particulières compte tenu des besoins identifiés, s'il en est, et lui fournir les explications requises sur ces exclusions.

 

 

Renouvellement d’une police d’assurance.

 

39. À l’occasion du renouvellement d’une police d’assurance, l’agent ou le courtier en assurance de dommages doit prendre les moyens requis pour que la garantie offerte réponde aux besoins du client. »

[Nos soulignés]

95.      Les cabinets Virage et Assurexperts ont, quant à eux, fait défaut de respecter les articles 84, 85 et 86 de la LDPSF qui prévoient :

 

« Honnêteté.

 

84. Un cabinet et ses dirigeants sont tenus d’agir avec honnêteté et loyauté dans leurs relations avec leurs clients.

 

Compétence.

 

Ils doivent agir avec soin et compétence.

 

 

Discipline.

 

85. Un cabinet et ses dirigeants veillent à la discipline de leurs représentants. Ils s’assurent que ceux-ci agissent conformément à la présente loi et à ses règlements.

 

 

Agissements.

 

86. Un cabinet veille à ce que ses dirigeants et employés agissent conformément à la présente loi et à ses règlements. »

[Nos soulignés]

96.      Virage et Assurexperts ont non seulement toléré cette structure, mais l’ont mise en place, ne pouvant ignorer qu’aucun de leurs représentants ne veillait personnellement au respect de ses obligations à l’égard des assurés en cause;

97.      Cette structure mise en place a pour effet de contourner les exigences de la loi;

98.      En effet, Assurexperts qui fait émettre le contrat par l’assureur ne voit pas lui-même, via un de ses représentants, à la cueillette des informations auprès des assurés;

99.      Il en est de même pour Virage qui transmet les informations à Assurexperts sans que la cueillette de ces informations soit faite par une personne certifiée;

100.    Les cabinets Virage et Assurexperts, tous deux (2) impliqués dans l’émission des polices, sont tous deux (2) responsables du fait que les assurés n’aient pas transigé via un représentant dûment certifié et n’aient pas bénéficié des conseils d’un tel représentant;

101.    En participant à cette structure, Assurexperts et Virage aident les concessionnaires en cause et leurs employés à agir à titre de cabinets ou de représentants auprès des assurés sans être inscrits à ce titre le tout en contravention des articles ci-haut mentionnés de la LDPSF;

102.    Le législateur a d’ailleurs décrété à l’article 3 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants, R.R.Q., c. D-9.2, r.10, que :

« sont incompatibles avec l’exercice des activités d’agent en assurance de dommages, de courtiers en assurance de dommages (...) :

L’exercice des activités de vendeur, de locateur ou de réparateur de véhicules routiers (...) »

103.    C’est donc dire qu’il a voulu dissocier les deux (2) fonctions;

Dirigeants responsables

104.    De même, l’Autorité soutient qu’en tant que dirigeants responsables des cabinets Virage et Assurexperts, il est essentiel que Chantal Thibodeau et Benoît Frenette assument toutes les responsabilités que requière ce titre, dont notamment veiller à ce que la LDPSF et ses règlements soient respectés, ce qui n’est pas le cas en l’espèce;

105.    L’Autorité souligne que les responsabilités assumées par le dirigeant responsable d’un cabinet requièrent un degré supérieur de professionnalisme et d’habileté, cette fonction étant garante de la conformité au sein du cabinet et, par conséquent, de la protection du public;

106.    Or, la structure mise en place fait en sorte qu’il est toléré par Virage et Assurexperts et leurs dirigeants responsables respectifs que certains des clients assurés de Virage et/ou Assurexperts n’aient pas de contacts directs avec un représentant, n’étant rencontrés et leurs besoins n’étant évalués que par des employés des concessionnaires, non certifiés auprès de l’Autorité;

107.    En décidant d’instaurer un cabinet dont les bureaux sont dans les mêmes locaux que ceux d’un concessionnaire, les précautions devaient être prises pour que les opérations soient conformes à la loi;

108.    Conformément à l’article 184 de la LDPSF, l’Autorité a pour mission de veiller à la protection du public relativement à l’exercice des activités régies par la LDPSF;

109.    La demanderesse considère que la protection du public requiert une intervention de sa part relativement à ce manquement;

 

AUTRES MANQUEMENTS CONCERNANT VIRAGE

110.    En raison de la gravité des manquements constatés lors de l’inspection effectuée en octobre 2011 auprès de Virage, l’Autorité considère également que la protection du public est compromise ou qu’elle risque de l’être et que son intervention en vertu de l’article 184 de la LDPSF est nécessaire;

111.    En vertu de l’article 85 de la LDPSF, un cabinet et son dirigeant doivent veiller à la discipline de ses représentants et s’assurer que ceux-ci agissent conformément à la LDPSF et à ses règlements;

112.    De plus, l’article 86 de la LDPSF impose au cabinet de veiller à la discipline de ses dirigeants et employés et de s’assurer que ceux-ci agissent conformément à la LDPSF et à ses règlements;

113.    Compte tenu de l’ensemble des manquements constatés et de leur gravité, l’Autorité soumet au Bureau que le cabinet Virage et sa dirigeante responsable, Chantal Thibodeau, n’ont pas agi avec soin et compétence;

114.    En tant que dirigeante responsable du cabinet, Chantal Thibodeau se devait pour sa part de faire preuve de diligence, d’agir avec soin et compétence et de veiller à ce que la LDPSF et ses règlements soient respectés par le cabinet et par elle-même à titre d’unique représentante;

115.    L’Autorité souligne que les responsabilités dévolues au dirigeant responsable d’un cabinet requièrent un degré supérieur de professionnalisme et d’habileté, puisque cette fonction est garante de la conformité au sein du cabinet et, par conséquent, de la protection du public;

 

CONCLUSIONS DEMANDÉES

116.    Conformément à l’article 184 de la LDPSF, la demanderesse a pour mission de veiller à la protection du public relativement à l’exercice des activités régies par la LDPSF;

117.    La demanderesse considère que la protection du public exige une intervention de sa part;

118.    Considérant le pouvoir de l’Autorité, en vertu de l’article 93 de la LAMF de demander au Bureau d’exercer, à la demande de l’Autorité, les fonctions et pouvoirs prévus par la loi;

119.    Considérant le pouvoir de l’Autorité, en vertu de l’article 94 de la LAMF de prendre toute mesure propre à assurer le respect des dispositions de la loi;

120.    Considérant les pouvoirs du Bureau conférés par l’article 115 de la LDPSF de radier ou révoquer, suspendre ou assortir de restrictions ou de conditions l’inscription d’un cabinet ou d’un représentant;

121.    Considérant les pouvoirs du Bureau conférés par l’article 115 de la LDPSF d’imposer une pénalité administrative jusqu’à concurrence de 2 000 000 $ à un cabinet ayant fait défaut de respecter une disposition de la LDPSF ou ses règlements;

122.    Considérant la possibilité pour la demanderesse, en vertu de l’article 93 de la LAMF, L.R.Q., c. A-33.2 et de l’article 115 de la LDPSF de demander au Bureau d’imposer de telles sanctions et de telles pénalités;

123.    Considérant également que l’article 115 LDPSF prévoit que le Bureau peut ainsi intervenir à l’égard d’un cabinet qui a, par son acte ou omission, aidé à l’accomplissement d’une contravention à une disposition de la présente loi;

 

SANCTIONS / PÉNALITÉS RECHERCHÉES

Virage / Thibodeau

124.    Considérant les nombreux manquements constatés lors de l’enquête et l’inspection de Virage et dont il est fait état à la présente procédure;

125.    Considérant les informations erronées fournies par Chantal Thibodeau à l’Autorité lors de sa demande de certification;

126.    Considérant que Chantal Thibodeau est la seule représentante et est la dirigeante responsable de Virage;

127.    L’Autorité considère qu’il y a lieu de demander la suspension immédiate du cabinet Virage, jusqu’à ce qu’un nouveau dirigeant responsable ait été nommé;

128.    La demanderesse estime par ailleurs qu’une amende de 60 000 $ constitue une pénalité juste et adéquate à l’égard de Virage pour l’ensemble des manquements constatés lors de l’inspection et pour avoir toléré la cueillette des renseignements et le conseil par des personnes non certifiées;

129.    L’Autorité considère qu’une pénalité de 10 000 $ à l’égard de Chantal Thibodeau, à titre de dirigeant responsable de Virage est juste et raisonnable pour l’ensemble des manquements constatés;

130.    De même, l’Autorité est d’avis qu’il y a lieu de demander le changement de dirigeant responsable de Virage et d’interdire à Chantal Thibodeau d’agir à titre de dirigeant responsable de tout cabinet d’assurance de dommages, dont Virage, pour une durée de trois (3) ans;

131.    L’Autorité est aussi d’avis qu’il y a lieu de demander que le certificat de Chantal Thibodeau soit assorti d’une condition, soit celle que Chantal Thibodeau soit rattachée à un cabinet dont il n’est ni le dirigeant responsable, ni l’administrateur, et ce, pour une période de trois (3) ans;

Assurexperts / Frenette

132.    L’Autorité considère qu’une pénalité de 20 000 $ est juste et adéquate à l’égard d’Assurexperts pour avoir toléré la cueillette des renseignements et le conseil par des personnes non certifiées;

133.    L’Autorité considère par ailleurs qu’une amende de 5 000 $ est juste et raisonnable à l’égard de Benoît Frenette, à titre de dirigeant responsable de Assurexperts pour avoir fait défaut de s’être acquitté adéquatement de ses obligations à titre de dirigeant responsable de Assurexperts; »

 L’AUDIENCE

[9]        L’audience du 28 juillet 2014 s’est déroulée tel que prévu. Durant cette audience, la procureure de l’Autorité a indiqué qu’une transaction était intervenue entre les parties et que les intimés ont pris un engagement écrit envers l’Autorité.

[10]        La procureure de l’Autorité a par la suite,  avec le consentement des procureurs des intimés, déposé cette transaction de même que toutes les pièces au dossier.

[11]        La procureure de l’Autorité a indiqué que cette transaction prend en considération la collaboration des intimés. Elle a informé le tribunal que l’intimé Crédit Virage avait cessé ses opérations rapidement après l’intervention de l’Autorité et que cette société avait également remis tous ses dossiers à l’intimé Assurexperts Inc. dans les jours suivant la réception de la demande de l’Autorité. Elle a informé le tribunal que tous les assurés de Crédit Virage ont été pris en charge par Assurexperts Inc. et qu’aucun incident à cet égard ne fut porté à la connaissance de l’Autorité.

[12]        Pour ce qui a trait aux pénalités à l’égard des intimés, la procureure de l’Autorité a indiqué au tribunal que la transaction intervenue a établi un quantum et un mode de paiement particulier pour chacun de ceux-ci sauf pour Benoît Fredette qui a par ailleurs pris, à titre de dirigeant responsable d’Assurexperts Inc., un engagement détaillé envers l’Autorité.  

[13]        Le procureur des intimés Assurexperts inc. et Benoît Frenette a indiqué au tribunal que ses clients prenaient la responsabilité des manquements reprochés. Il a toutefois plaidé que ses clients ont agi de bonne foi et qu’aucune fraude n’avait été commise. Il a de plus souligné au tribunal que les personnes à l’origine des actes reprochés ne sont plus à l’emploi d’Assurexperts Inc..

[14]        Par ailleurs, le procureur des intimés Crédit Virage et Chantal Thibodeau a admis que ses clients sont responsables de plusieurs manquements importants. Il a toutefois plaidé que ses clients ont fait preuve d’une grande collaboration dans la conclusion de la transaction présentée au début de l’audience au tribunal de même que dans le transfert harmonieux de tous les dossiers des clients concernés à l’intimé Assurexperts Inc..

[15]        La procureure de l’Autorité a indiqué que les intimés ont admis tous les faits allégués dans la demande de l’Autorité. Elle a conclu en plaidant respectueusement qu’il est dans l’intérêt public que le Bureau impose les pénalités convenues entre les parties et prenne acte de l’ensemble de la transaction intervenue entre les parties.

[16]        Le Bureau reproduit ci-après les termes de la transaction intervenue entre les parties:

« 

 

 

TRANSACTION

ET ENGAGEMENT DES INTIMÉS

 

 

 

ATTENDU QUE l’Autorité des marchés financiers (l’« Autorité ») est responsable de l’administration de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, L.R.Q., c. D‑9.2 (« LDPSF ») et exerce les fonctions qui y sont prévues conformément à l’article 7 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers, L.R.Q. c. A‑33.2 (« LAMF »);

 

ATTENDU QUE l’Autorité peut s’adresser au Bureau de décision et de révision (le « Bureau ») en vertu des articles 93 LAMF et 115 de la LDPSF afin d’obtenir l’imposition de pénalités administratives en cas de défaut de respecter des dispositions de la Loi;

 

ATTENDU QUE l’Autorité peut également s’adresser au Bureau, en vertu de l’article 94 LAMF, afin qu’il soit ordonné à un cabinet de prendre toute mesure propre à assurer le respect des dispositions de la Loi;

 

ATTENDU QUE l’Autorité a signifié aux intimés, le 28 février 2014, une demande auprès du Bureau en vertu des articles 93 et 94 LAMF et 115 et 115.9 LDPSF dans le cadre du dossier portant le numéro 2014-008;

 

ATTENDU QUE les parties désirent, suite à la signification de cette demande, conclure une transaction visant le règlement du présent dossier;

 

 

LES PARTIES CONVIENNENT DE CE QUI SUIT :

 

1.            Le préambule fait partie des présentes;

2.            Les intimés Assurances Crédit Virage inc. (« Crédit Virage »), Chantal Thibodeau et Assurexperts inc. admettent tous les faits allégués les concernant à la Demande de l’Autorité produite au présent dossier du Bureau;

3.            Les intimés consentent également au dépôt de toutes les pièces alléguées au soutien de cette demande sans autre formalité et en admettent le contenu;

4.            L’intimée Crédit Virage consent, en vertu de la présente transaction, à :

i.              Payer à l’Autorité une pénalité administrative de 52 000 $ pour avoir fait défaut de respecter les articles 84 à 86 LDPSF en commettant les divers manquements à la loi et dont il est fait état à la procédure, dont le fait d’avoir toléré que la cueillette d’informations et les conseils auprès des clients aient été prodigués par des personnes non inscrites auprès de l’Autorité et dont il est fait état à la demande de l’Autorité, payable à raison de 4 300 $ par mois pendant douze (12) mois, à l’exception du premier (1er) paiement qui sera de 4 700 $, payable le 15 juillet 2014;

ii.             Ce que les paiements mensuels soient faits à l’ordre de Beauvais Truchon en fiducie et, à compter de la décision à être rendue par le Bureau, les paiements soient ensuite payables directement auprès de l’Autorité, jusqu’à concurrence du montant octroyé par le Bureau, le cas échéant;

iii.            Ce que lors du prononcé du jugement du Bureau, Beauvais Truchon (Me Mathieu Ayotte) transmette à l’Autorité les sommes ainsi perçues, jusqu’à concurrence du montant octroyé par le Bureau, le cas échéant;

5.            L’intimée Chantal Thibodeau consent, en vertu de la présente transaction, à :

i.              Payer à l’Autorité une pénalité administrative de 5 000 $ pour avoir fait défaut de respecter ses obligations à titre de dirigeant responsable de Crédit Virage et pour avoir toléré que la cueillette d’informations et les conseils auprès des clients aient été prodigués par des personnes non inscrites auprès de l’Autorité, payable à raison de 410 $ par mois pendant douze (12) mois, à l’exception du premier (1er) paiement qui sera de 490 $, payable le 15 juillet 2014;

ii.             Ce que les paiements mensuels soient faits à l’ordre de Beauvais Truchon en fiducie et, à compter de la décision à être rendue par le Bureau, les paiements soient ensuite payables directement auprès de l’Autorité, jusqu’à concurrence du montant octroyé par le Bureau, le cas échéant;

iii.            Ce que lors du prononcé du jugement du Bureau, Beauvais Truchon (Me Mathieu Ayotte) transmette à l’Autorité les sommes ainsi perçues, jusqu’à concurrence du montant octroyé par le Bureau, le cas échéant;

iv.           Ce que le Bureau prononce les deux conclusions additionnelles suivantes :

i.             INTERDIT à Chantal Thibodeau d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable de tout cabinet d’assurance de personnes, ce qui inclut le cabinet Assurances Crédit Virage inc., et ce, pour une période de cinq (5) ans;

6.            L’intimée Assurexperts inc. consent, en vertu de la présente transaction, à :

i.              Payer à l’Autorité une pénalité administrative de 20 000 $ pour avoir fait défaut de respecter les articles 84 à 86 LDPSF en commettant les divers manquements à la loi, dont le fait d’avoir toléré que la structure en place ait permis que la cueillette d’informations et les conseils auprès des clients aient été prodigués par des personnes non inscrites auprès de l’Autorité, payable en un seul versement le 15 juillet 2014 à être versé à Siskinds Desmeules, en fiducie;

ii.             Ce que lors du prononcé du jugement du Bureau, Siskinds Desmeules (Me Éric Lemay) transmette à l’Autorité les sommes ainsi perçues, jusqu’à concurrence du montant octroyé par le Bureau, le cas échéant;

7.            L’intimé Benoît Frenette, à titre de dirigeant responsable d’Assurexperts inc. s’engage quant à lui à réviser l’ensemble des ententes contractuelles liant actuellement le cabinet Assurexperts inc. à tout autre cabinet afin de s’assurer que les pratiques en place et les façons de faire d’Assurexperts soient parfaitement en règle avec ses obligations et plus particulièrement celles découlant de la LDPSF et ses règlements;

8.            L’Autorité prend acte du fait qu’Assurexperts inc. l’a informée des éléments suivants :

i.              Les irrégularités soulevées ne se reproduiront plus à l’avenir, vu l’absence de toute relation d’affaires avec Assurances Crédit Virage;

ii.             Aucun assuré d’Assurances Crédit Virage inc. n’a fait de plainte auprès d’Assurexperts inc.;

iii.            Assurexperts inc. s’est occupée des dossiers d’assurance des assurés d’Assurances Crédit Virage inc., suite au dépôt de la demande de l’Autorité;

iv.           Assurexperts inc. n’a plus aucun contact ou relation d’affaires ni avec Mme Chantal Thibodeau, ni avec Assurances Crédit Virage inc.;

9.            L’Autorité prend acte du fait que le cabinet Crédit Virage a cessé ses opérations et déposera une demande de retrait d’agir à titre de cabinet, d’où il n’est plus nécessaire de demander qu’il soit procédé à la nomination d’un nouveau dirigeant responsable pour ce cabinet;

10.          Les intimés reconnaissent avoir lu toutes les clauses de la présente transaction et reconnaissent en avoir compris la portée en s’en déclarent satisfaits, d’autant plus qu’ils sont dûment représentés par avocat;

11.          Les intimés consentent donc à ce que le Bureau prononce les conclusions et leur impose, par une décision à être rendue dans le présent dossier, de payer à l’Autorité les pénalités administratives décrites aux présentes et à la Demande de l’Autorité et payables selon les paragraphes 4 à 6 des présentes;

12.          Les intimés reconnaissent que les conditions de la présente transaction constituent des engagements souscrits par ces derniers auprès de l’Autorité, engagements qui seront exécutoires et opposables à leur égard dès signature des présentes et acceptent que le Bureau prononce la conclusion additionnelle suivante :

« PREND ACTE et ENTÉRINE la transaction intervenue entre les parties et ORDONNE aux parties de s’y conformer. »

13.          Les parties reconnaissent que la présente transaction est conclue dans l’intérêt du public en général;

14.          Les parties conviennent de ne faire aucune déclaration publique incompatible avec les conditions de la présente transaction;

15.          Beauvais Truchon (Me Mathieu Ayotte) et Syskinds Desmeules (Me Éric Lemay) interviennent à la présente aux fins de se conformer aux paragraphes 4 iii), 5 iii) et 6 ii) et ils s’engagent également à aviser l’Autorité sans délai dans l’éventualité où un de leur client respectif faisait défaut de faire un (1) des paiements prévus aux présentes;

16.          La présente transaction ne saurait être interprétée à l’encontre de l’Autorité à titre de renonciation à ses droits et recours lui étant attribués en vertu de la LAMF, la LDPSF ou de toutes autres lois ou règlement pour toute autre violation passée, présente ou future de la part des intimés;

EN FOI DE QUOI, LES PARTIES ONT SIGNÉ :

 

À ...................., ce ____ juin 2014

 

(S) Original signé le 15 juillet 2014

 

À ...................., ce ____ juin 2014

 

(S) Original signé le 15 juillet 2014

ASSURANCES CRÉDIT VIRAGE INC.

Par : Justin Vachon

Dûment autorisé aux fins des présentes

 

CHANTAL THIBODEAU

 

À Québec, ce ___ juin 2014

 

(S) Original signé le 23 juillet 2014

 

 

BEAUVAIS TRUCHON

(Me Mathieu Ayotte)

Procureurs de Assurances Crédit Virage inc. et de Chantal Thibodeau

 

 

 

 

À Québec, ce  21 juillet 2014

 

(S) Original signé

 

À Québec, ce 21 juillet 2014

 

(S) Original signé

 

ASSUREXPERTS INC.

Par : Pierre Boivert

Dûment autorisé aux fins des présentes

 

BENOÎT FRENETTE

 

À Québec, ce ___ juin 2014

 

(S) Original signé le 22 juillet 2014

 

 

SISKINDS, DESMEULES

(Me Éric Lemay)

Procureurs de Assurexperts inc. et de Benoît Frenette

 

 

 

À Québec, ce ___ juin 2014

 

(S) Original signé le 28 juillet 2014

 

 

CONTENTIEUX DE L’AUTORITÉ DES

MARCHÉS FINANCIERS

(Me Marie A. Pettigrew)

Procureurs de l’Autorité des marchés financiers »

 

 

 

LA DÉCISION

[17]        Le Bureau a pris connaissance de la demande de l’Autorité et des pièces déposées en preuve du consentement des parties. Il a également entendu les représentations de tous les procureurs au dossier et a procédé à leur analyse.

[18]        Le Bureau a également pris connaissance du document signé par les parties qui est intitulé « Transaction et engagement des intimés ». Considérant l’admission des faits reprochés par les intimés de même leurs engagements respectifs, le Bureau est d’avis que la transaction conclue entre les parties est dans l’intérêt public et est prêt à prononcer les pénalités administratives convenues dans ce document.

[19]        PAR CES MOTIFS, le Bureau de décision et de révision, en vertu des articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers[4] et des articles 115 et 115.9 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[5]:

ACCUEILLE la demande de l’Autorité des marchés financiers, demanderesse en l’instance;

PREND ACTE DE la transaction intervenue entre les parties;

IMPOSE à l’intimé Assurances Crédit Virage Inc. une pénalité administrative au montant de cinquante-deux mille dollars (52 000 $) pour avoir fait défaut de respecter les articles 84 à 86 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[6] en commettant les divers manquements à la loi décrits spécifiquement dans la demande de l’Autorité. Cette pénalité administrative sera payable à l’Autorité de la manière suivante : un premier (1er) paiement de 4 700 $ payable à compter de la date de la présente décision et onze (11) paiements mensuels subséquents de 4 300 $ chacun payable le premier du mois;

IMPOSE à l’intimée Chantal Thibodeau une pénalité au montant de cinq mille dollars (5000 $) pour avoir fait défaut de respecter ses obligations à titre de dirigeant responsable de l’intimé Assurances Crédit Virage Inc. et pour avoir toléré que la cueillette d’informations et les conseils auprès des clients du cabinet Assurances Crédit Virage Inc. aient été prodigués par des personnes non inscrites auprès de l’Autorité. Cette pénalité administrative sera payable à l’Autorité de la manière suivante: un premier (1er) paiement de 490 $ payable à compter de la date de la présente décision et onze (11) paiements mensuels subséquents de 410 $ chacun payable le premier du mois;

INTERDIT à l’intimée Chantal Thibodeau d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable de tout cabinet d’assurance de personnes et ce, pour une période de cinq (5) ans;

IMPOSE à l’intimé Assurexperts Inc. une pénalité administrative de vingt mille dollars (20 000 $) pour avoir fait défaut de respecter les articles 84 à 86 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[7] en commettant les divers manquements à la loi, dont le fait d’avoir toléré que la structure en place ait permis que la cueillette d’informations et les conseils auprès des clients aient été prodigués par des personnes non inscrites auprès de l’Autorité. Cette pénalité administrative sera payable en un seul versement à compter de la date de la présente décision;

AUTORISE l’Autorité des marchés financiers à percevoir le paiement de ces pénalités administratives.

 

Fait à Montréal, le 6 août 2014.

 

(S) Jean-Pierre Cristel

 

Me Jean-Pierre Cristel, vice-président

 



[1]     RLRQ, c. D-9.2.

[2]     RLRQ, c. A-33.2.

[3]     Autorité des marchés financiers c. Assurances Crédit Virage inc., 2014 QCBDR 28.

[4]     Précitée, note 2.

[5]     Précitée, note 1.

[6]     Précitée, note 1.

[7]     Précitée, note 1.

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