Autorité des marchés financiers (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

BUREAU DE DÉCISION ET DE RÉVISION CANADA PROVINCE DE QUÉBEC MONTRÉAL

DOSSIER : 2010-036 DÉCISION : 2010-036-001 DATE : Le 20 décembre 2012 ______________________________________________________________________

EN PRÉSENCE DE : M e ALAIN GÉLINAS M e CLAUDE ST PIERRE ______________________________________________________________________

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS Partie demanderesse c. AVRO SERVICES DE GESTION DE RISQUES INC. Partie intimée

______________________________________________________________________ PÉNALITÉ ADMINISTRATIVE ET ORDONNANCE DE MISE EN PLACE DE MESURES DE CONTRÔLE ET DE SURVEILLANCE [art. 93 et 94, Loi sur l’Autorité des marchés financiers, L.R.Q., c. A-33.2, art. 115, Loi sur la distribution de produits et services financiers, L.R.Q., c. D-9.2] ______________________________________________________________________

M e Marie A. Pettigrew et Simon-Pierre Lavoie, stagiaire en droit (Girard et al.) Procureurs de l’Autorité des marchés financiers

M e Jean-Olivier Lessard (Clyde & Cie Canada s.e.n.c.r.l.) Procureur d’Avro services de gestion de risques inc.

2010-036-001 PAGE : 2 DÉCISION [1] Le Bureau de décision et de révision Bureau ») a été saisi, le 13 septembre 2010, d’une demande de l’Autorité des marchés financiers Autorité ») afin qu’il impose une pénalité administrative de 25 000 $ et ordonne la mise en place de mesures de contrôle et de surveillance à l’encontre de la société Avro services de gestion de risques inc. Avro »), le tout en vertu des articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers 1 et de l’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers 2 . [2] L’Autorité reproche au cabinet Avro de ne pas avoir veillé à la discipline de ses représentants et de ne pas s’être assuré que ceux-ci, ainsi que ses dirigeants et employés agissent conformément à la Loi sur la distribution de produits et services financiers ainsi qu’à ses règlements. Elle soutient également qu’Avro n’aurait pas agi avec soin et compétence, ainsi qu’avec honnêteté et loyauté dans ses relations avec ses clients.

[3] Les représentants n’auraient pas recueilli personnellement les renseignements nécessaires leur permettant d’identifier les besoins de leurs clients, afin de leur proposer le produit d’assurance qui leur convient le mieux. De plus, elle soutient que les représentants en assurance auraient dû, avant la conclusion des contrats d’assurance décrire le produit proposé au client en relation avec les besoins identifiés et leur préciser la nature de la garantie offerte.

[4] Les agents ou les courtiers auraient également dû, lors du renouvellement des polices d’assurance, prendre les moyens requis pour que la garantie offerte réponde aux besoins des clients. Une audience s’est tenue les 14 juillet et 14 septembre 2011 en présence des procureurs de l’Autorité, ainsi que du procureur d’Avro.

L’AUDIENCE [5] Lors de l’audience, les procureurs des parties ont fait entendre plusieurs témoins, qui ont déposé la preuve afférente; ils ont également fait leurs représentations.

LA PREUVE DE L’AUTORITÉ [6] Les procureurs de l’Autorité ont d’abord fait témoigner une enquêteuse qui œuvre au sein de cet organisme et qui était assignée au présent dossier. Elle a expliqué qu’une plainte a été reçue à l’Autorité le 30 septembre 2009, concernant certaines

1 L.R.Q., c. A-33.2. 2 L.R.Q., c. D-9.2.

2010-036-001 PAGE : 3 personnes qui avaient fait l’achat ou la location d’une voiture chez des concessionnaires. Ces personnes avaient de la difficulté à obtenir du crédit et en ont obtenu via Autonum Presto Location inc. Autonum »).

[7] Leur location de voiture à long terme avec option d’achat se faisait également avec Autonum chez ces concessionnaires. Une assurance était souscrite au même moment et les représentations relatives aux assurances se faisaient chez les concessionnaires. Les personnes que l’enquêteuse a contactées les conducteurs ») n’avaient pas eu de communication avec un cabinet en assurance de dommages au moment de la location et de la prise du contrat d’assurance.

[8] L’enquêteuse a mentionné qu’Avro est un cabinet inscrit auprès de l’Autorité des marchés financiers en assurance de dommages et que les courtiers impliqués étaient, lors des faits en litige, tous rattachés à ce cabinet dont la constitution remonte au 19 janvier 2005. Autonum a été constituée le 15 décembre 2004; elle exerce des activités de financement de voitures d’occasion et de location. Autonum n’est pas inscrite auprès de l’Autorité.

[9] L’enquêteuse a mentionné avoir obtenu par deux compagnies d’assurance une liste de personnes qui, selon leur police d’assurance, faisaient affaires avec la société Autonum à titre de créancier ou locateur. Elle a également obtenu échantillonnage de police d’assurance. Par la suite, elle a contacté certaines d’entre elles, afin de vérifier avec qui elles avaient souscrit une assurance, qui avait analysé leur besoin d’assurance et qui leur ont transmis les explications sur leur contrat d’assurance.

[10] Il ressort de ces discussions que les personnes allaient chez des concessionnaires afin de louer un véhicule à long terme, avec option d’achat et financement auprès d’Autonum. Une assurance était prise en même temps alors que les assurés n’avaient pas de communication avec Avro, le cabinet agissant dans le cadre de l’émission des polices d’assurance.

[11] Elle a découvert que les conducteurs discutaient de l’assurance avec le concessionnaire; ce dernier transmettait les documents relatifs aux assurances à Autonum, qui les remettait ensuite à Avro, qui à son tour, les acheminait à l’assureur, pour approbation du dossier. Suivant cette dernière étape, l’acheminement des documents se faisait dans le sens inverse jusqu’au conducteur du véhicule.

[12] L’enquêteuse a déposé les factures du cabinet Avro pour les polices qui ont été émises. On y retrouve le montant de la prime, les taxes et certains frais. Elle a également mentionné que les courtiers impliqués étaient inscrits à titre de représentants en assurance de dommage auprès de l’Autorité. Elle a obtenu la version des faits d’Avro par lettre du 3 mars 2010.

2010-036-001 PAGE : 4 [13] L’enquêteuse a mentionné que lors de la souscription de l’assurance, les conducteurs recevaient la plupart du temps une preuve d’assurance par fax. Elle a ajouté avoir contacté douze personnes; deux ou trois d’entre elles auraient discuté avec une personne travaillant pour Autonum. Mais toutes ont affirmé que le financement et les assurances se contractaient en même temps chez le concessionnaire. La très grande majorité des personnes ne se rappelle pas avoir eu des communications avec un représentant d’Avro.

[14] Les procureurs de l’Autorité ont fait entendre sept conducteurs de véhicule; la majorité d’entre eux a expliqué avoir contracté une location avec option d’achat d’un véhicule automobile, financée par Autonum. Certains ont mentionné qu’ils voulaient acheter un véhicule. Tous ont affirmé que tout ce qui concerne le financement et les assurances s’est déroulé en même temps chez le concessionnaire, sans discuter avec un représentant d’Avro.

[15] Le témoin S. H., assistant dans un service de garde familial, aurait fait une location-achat d’une voiture chez le concessionnaire Liquidation de l’Estrie. Il y aurait rencontré un représentant d’Autonum pour discuter de son financement et des assurances. Il n’a parlé avec personne d’autre pour cette dernière question. Il a reçu un certificat d’assurance par fax. Il n’aurait reçu ni original, ni contrat d’assurance ni facture d’Avro.

[16] Le témoin N. B., propriétaire d’une garderie, a fait la location-achat d’une voiture auprès du concessionnaire J. N. Auto Road Side, avec un financement d’Autonum. Toutes les procédures ont été faites la même journée avec la même personne qui travaillait pour le concessionnaire, y compris l’assurance. Cette personne était en contact avec la compagnie d’assurance et de financement.

[17] Ce témoin n’aurait jamais reçu de facture d’Avro. Elle a reçu le certificat d’assurance par télécopieur chez le concessionnaire et l’original par la poste. Elle ne se rappelait pas avoir discuté dans les jours suivants avec une personne de chez Avro concernant son métier et les noms de deux courtiers ne lui disaient absolument rien. Cependant, elle a affirmé avoir travaillé à titre de serveuse dans un centre aquatique en 2008, mais jamais dans une cabane à sucre.

[18] Le témoin A. B., concierge, a fait la location avec option d’achat d’un véhicule chez Fortier Automobiles avec financement d’Autonum. Le financement et les assurances ont été conclus chez le concessionnaire. Il n’a parlé qu’avec un employé de Fortier Automobiles relativement aux assurances. Il a indiqué ne pas avoir posé de question sur le prix des assurances. Il a indiqué avoir reçu le certificat d’assurance par télécopieur.

[19] Le témoin A. F., mère à la maison, a loué un véhicule chez le concessionnaire Sherbrooke Grossiste, en raison de la troisième chance au crédit offerte par Autonum.

2010-036-001 PAGE : 5 Elle a fait affaires avec deux personnes, dont un représentant d’Autonum qui était chez un autre concessionnaire. Le financement et les assurances lui ont été expliqués par le concessionnaire. Le certificat d’assurance et un document intitulé « nouvelle proposition » lui ont été remis par le concessionnaire.

[20] Elle n’a pas parlé avec quelqu’un d’autre relativement aux assurances. Elle ne se rappelle pas avoir eu une conversation avec un courtier, mais elle se souvient d’un appel relativement à ses antécédents d’assurances un mois environ après avoir pris possession du véhicule.

[21] Le témoin C. B., agent de correction, a loué un véhicule auprès d’Automobiles en direct. Elle a fait affaires avec un vendeur et une personne responsable du financement. Elle a discuté d’assurance avec cette dernière personne. Elle a été informée qu’en raison d’une troisième chance au crédit et parce qu’elle était à risque, elle ne pouvait pas faire affaires avec sa compagnie d’assurance. De plus, le prélèvement de la prime en même temps que le paiement de la voiture assuraient à Autonum que les assurances seraient payées.

[22] Elle devait donc prendre l’assurance qui lui était offerte chez le concessionnaire. Elle n‘a parlé à personne d’autre relativement à l’assurance. Elle a reçu des documents par la poste et une copie du certificat d’assurance lors de la prise de possession du véhicule. Elle n’a jamais reçu de facture de la part d’Avro.

[23] Elle a lu le contrat de location avec option d’achat après sa signature. Elle a pris connaissance de la clause concernant les assurances. Elle a contacté la personne responsable du financement pour lui dire qu’elle n’était pas une personne à risque et on lui a dit que cela était une certification que les assurances étaient toujours payées. Elle n’a cependant pas contacté le courtier d’assurance à cet effet.

[24] Le témoin A. O., entrepreneur en construction et rénovation, a fait l’achat avec financement à court terme d’un véhicule auprès de Beaucage et financé par Autonum. Il a indiqué n’avoir fait affaires qu’avec un représentant et une femme qui s’occupait du financement chez Beaucage. Il a voulu s’assurer avec son courtier, mais quand il a mentionné la compagnie qui finançait son véhicule, son courtier a refusé. Il a contacté le représentant du concessionnaire qui lui a parlé d’Avro.

[25] Il a discuté d’assurances avec ce représentant. Tout s’est fait chez le concessionnaire. Lorsqu’il a quitté le concessionnaire avec le véhicule, il avait le certificat d’assurance et la note de couverture. En contre-interrogatoire, il a affirmé que des accusations criminelles ont déjà été portées contre lui et qu’il a plaidé coupable à deux d’entre elles. Il a ajouté ne pas avoir reçu de proposition de renouvellement d’assurance.

2010-036-001 PAGE : 6 [26] Le témoin N. C., entrepreneur en rénovation, a, avec sa conjointe, loué avec une option d’achat un véhicule chez Autos Camions Fleurimont. Suite à un refus de crédit pour le camion, une personne du concessionnaire lui a proposé un financement avec Autonum. Il a discuté des assurances avec cette dernière société au téléphone, alors qu’il était chez le concessionnaire. Il avait reçu une copie du certificat d’assurance avant de partir avec le véhicule et a reçu l’original par la poste. Il n’a jamais reçu de facturation provenant d’Avro. Il ne fait qu’un paiement, à la fois pour la voiture et les assurances.

[27] La seconde enquêteuse a expliqué les discussions qu’elle a eues avec d’autres personnes; celles-ci auraient vécu une situation semblable à celle de ceux qui ont témoigné et celle dont la première enquêteuse a fait part au Bureau. Les informations qu’elle a reçues de ces personnes sont similaires aux témoignages des conducteurs qui ont été entendus à l’audience.

LA PREUVE D’AVRO [28] Le procureur d’Avro a fait témoigner le président de celle-ci. Il a expliqué qu’Autonum a approché Avro parce qu’elle avait de la difficulté à trouver des couvertures d’assurance pour les conducteurs des voitures qu’elle loue puisqu’il s’agit souvent de deuxième ou troisième chance de crédit, seuls les assureurs sous-standards acceptant d’assurer dans ces cas. Autonum voulait qu’il soit possible d’obtenir une couverture pour tous les conducteurs et assurer sa flotte de véhicules, ainsi que la responsabilité des conducteurs.

[29] Avro a donc mis un programme sur pied pour Autonum et a discuté avec elle de ses besoins et de ceux des conducteurs. Le président d’Avro a mentionné que l’entente intervenue entre Avro et Autonum était verbale. Si les conducteurs satisfont les critères de l’assureur Lloyds, ils font alors partie du programme. Sinon, Avro tente de trouver un autre assureur. Ce programme a été en vigueur de septembre 2007 à mars 2010.

[30] Le président d’Avro a mentionné qu’il n’y avait pas d’entente d’exclusivité; les conducteurs pouvaient faire affaires avec un autre courtier ou assureur. Mais Autonum préférait qu’il n’y ait qu’un seul courtier. Il a ajouté que les conducteurs ne recevaient pas de facture de la part d’Avro, puisqu’Autonum les recevait pour toute sa flotte de véhicules et qu’elle lui payait directement les montants, et ce, même si les conducteurs ne lui versaient pas le montant des primes, afin d’être certain que les véhicules soient assurés. Ceci s’expliquerait par son intérêt assurable dans les véhicules qu’elle loue.

[31] Le président d’Avro a soutenu qu’il considérait Autonum comme étant son client; il a reconnu que le conducteur détient un intérêt assurable dans le véhicule qu’il loue. Il a expliqué que le nom d’Autonum n’apparaît pas sur les certificats d’assurance puisqu’il s’agit d’une flotte synthétique et non d’une flotte « pure », comme ce serait le cas pour

2010-036-001 PAGE : 7 les entreprises qui détiennent une flotte de véhicules mis à la disposition de leurs employés.

[32] Le procureur d’Avro a également fait témoigner la directrice des lignes personnelles pendant la durée du programme conçu pour Autonum. Elle a expliqué qu’Autonum demandait à Avro une soumission pour les conducteurs et on lui faisait parvenir un document avec toutes les informations pour faire une bonne souscription. Après une analyse du dossier du conducteur et une vérification au fichier central, le courtier déterminait si le conducteur était admissible dans le programme.

[33] Par la suite, la soumission était remise à Autonum qui vérifiait avec les conducteurs si elle était requise. Dans un tel cas, Autonum demandait à Avro de mettre la police en vigueur à compter d’une certaine date, puis la note de couverture, la proposition et la formule de divulgation du dossier de conduite étaient remplies par le courtier. La proposition était d’abord transmise à Autonum qui la faisait signer et la retournait à Avro. Par la suite, elle était transmise à l’assureur qui préparait le contrat et l’envoyait à Avro. Le conducteur recevait par la suite tous les documents qui lui étaient nécessaires.

[34] La directrice des lignes personnelles a soutenu que le client d’Avro était Autonum. Elle a expliqué qu’une note de couverture était également envoyée à Autonum pour leur démontrer que le véhicule était assuré. De plus, la facturation était faite lors de l’émission des contrats et, à la fin du mois, un rapport mensuel ainsi que chacune des factures étaient transmis à Autonum, qui payait le montant de la prime à Avro. Le conducteur ne recevait pas cette facture, mais connaissait le montant de la prime.

[35] Elle a également expliqué comment les renouvellements de polices s’effectuaient et la procédure en cas d’annulation, à la demande d’Autonum. Lors du renouvellement, elle fournissait à Autonum une liste des conducteurs dont les polices venaient à échéance. Chaque dossier était vérifié et analysé, pour savoir notamment s’il y avait eu des réclamations dans l’année, déterminer si tel assureur avec telle prime était conservé et afin de mettre le plus grand nombre de conducteurs dans le programme chez Lloyds, tel que requis par Autonum. Un suivi mensuel des dossiers était donc fait.

[36] Pour ce qui est des renouvellements, elle a fait l’examen d’avis de renouvellement qui étaient transmis aux conducteurs après la fin du programme mis sur pied par Avro pour Autonum. La directrice des lignes personnelles a affirmé qu’Avro était en contact avec Autonum plusieurs fois par jour, et ce, tous les jours.

[37] Elle a également soutenu que les courtiers chez Avro contactaient les conducteurs des véhicules dans certaines situations, de manière contemporaine à la souscription, comme lorsqu’il manquait des informations (numéro de police, assurance antérieure, date d’obtention du permis de conduire, etc.) ou que des précisions étaient nécessaires, par exemple, sur le type d’emploi exercé ou l’usage du véhicule, pour émettre la police.

2010-036-001 PAGE : 8 [38] La directrice des lignes personnelles a expliqué que les protections et le montant des franchises étaient discutés avec Autonum et non avec le conducteur. C’est Autonum qui abordait la question de la prime d’assurance avec le conducteur. En contre-interrogatoire, elle a notamment expliqué que le conducteur ne recevait pas la facture remise par Avro à Autonum et les éléments détaillés de celle-ci.

[39] Il est donc possible qu’il n’ait pas eu connaissance de tous les frais qui lui étaient chargés, dont des frais pour Autonum. Certains de ces frais découleraient de l’entente conclue entre Autonum et Avro. De plus, dans plusieurs documents d’Avro relatifs aux conducteurs et transmis à l’assureur, on réfère au conducteur en utilisant le terme « client ».

LES REPRÉSENTATIONS DES PROCUREURS DE L’AUTORITÉ [40] Les procureurs de l’Autorité reprochent notamment à Avro de ne pas s’être assurée que ses représentants agissent conformément à la loi. Ceux-ci n’auraient pas recueilli les informations personnellement auprès de leurs clients et ils ne les auraient pas conseillés. Dans le cas présent, le client serait le conducteur, soit le consommateur.

[41] Les procureurs de l’Autorité ont affirmé que le terme « consommateur » utilisé à plusieurs reprises dans la législation devrait guider le Bureau dans l’interprétation du mot « client » utilisé dans la Loi sur la distribution de produits et services financiers. Ils ont ajouté que la protection du public est l’assise de cette loi, qui est d’ordre public.

[42] Ils ont suggéré qu’il n’existe pas d’ambigüité autour du terme « client » dans cette loi, mais que si le Bureau jugeait qu’il y en avait une, il devrait l’interpréter en faveur du consommateur. Ils ont ajouté qu’il y aurait alors ambigüité aux nombreuses autres dispositions de la loi qui utilisent ce terme. Ils ont affirmé qu’on ne peut conclure que le client est le créancier; il doit s’agir du consommateur, soit, dans la présente affaire, le conducteur.

[43] Les procureurs ont assimilé Autonum à une entreprise qui finance l’achat d’un bien ou d’un service, expression qui se retrouve à l’article 22 de la Loi sur la distribution de produits et de services financiers; elle est distincte du terme « client » qui se retrouve au même article. Ils ont maintenu que plusieurs éléments constitutifs de l’obligation se retrouvant à l’article 27 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers n’étaient pas satisfaits par les représentants d’Avro.

[44] Le courtier n’a pas recueilli personnellement les renseignements nécessaires auprès des conducteurs, une obligation qui est incessible. Il ne les a contactés que lorsque des informations étaient manquantes ou que des précisions étaient requises. Avec ces seules informations, le courtier n’aurait jamais pu évaluer les besoins des conducteurs et émettre les polices d’assurance.

2010-036-001 PAGE : 9 [45] Les procureurs de l’Autorité ont soulevé le fait qu’un témoin a indiqué n’avoir jamais été contacté par un représentant d’Avro et n’avoir jamais déclaré avoir travaillé à titre de serveuse dans une cabane à sucre. Cependant, les notes à son dossier chez Avro indiquent qu’elle aurait déclaré ce fait et qu’un représentant l’aurait contactée pour avoir des précisions.

[46] Les procureurs ont également soutenu que les conducteurs n’ont pas reçu d’informations suffisantes de la part du courtier sur les risques couverts par la police d’assurance et sur l’établissement de la prime. Ils n’ont donc pas reçu de conseils, ce qui est du devoir du courtier. Bref, les procureurs ont maintenu qu’Avro n’a agi qu’à titre de courroie de transmission entre Autonum et l’assureur; cela n’est pas tolérable.

[47] Ils ont rappelé qu’Autonum figure aux polices d’assurance en sa qualité de créancier/locateur. Ils ont ajouté qu’il a été démontré que la prime était déterminée en fonction du risque associé au conducteur et non en fonction d’Autonum.

[48] Ils ont mentionné que les polices en l’espèce sont des polices individuelles, en faveur de particuliers et non des polices commerciales. Les polices d’assurance sont distinctes et émises en faveur de chacun des conducteurs nommément. Il ne s’agit pas d’une police émise en faveur d’Autonum.

[49] Les procureurs ont maintenu que si le Bureau en vient à déterminer que le client est Avro, ce serait induire une illégalité. Par ailleurs, selon les attestations de droit de pratique, tous les courtiers d’Avro qui ont émis les polices d’assurance, sauf un, sont autorisés à agir en assurance de dommages des particuliers. Si le client est Autonum, il y aurait eu une pratique illégale, car il ne s’agit pas de polices commerciales.

[50] Les procureurs de l’Autorité ont affirmé qu’Autonum pourrait être un client d’affaires d’Avro mais, sous la Loi sur la distribution de produits et services financiers, le client est la personne qui prend une assurance (celle dont le nom figure à la proposition et au certificat). Il ne peut s’agir, selon eux, d’une police d’assurance collective de dommages; ce concept n’existe pas en droit québécois, soit le fait pour Autonum d’assurer ses véhicules et de désigner des conducteurs. La police d’assurance est faite au nom des conducteurs.

[51] De plus, ils ont soutenu que l’entente intervenue entre Avro et Autonum ne peut soustraire le cabinet d’assurance de l’application de la Loi et ainsi lui éviter de communiquer avec les clients pour recueillir les informations qui lui sont nécessaires.

[52] Les procureurs de l’Autorité ont indiqué que dans plusieurs de ses communications et dans les notes aux dossiers, Avro considérait les conducteurs comme ses clients. Ils ont ajouté que bien qu’Autonum payait les primes mensuellement à Avro, la personne qui payait finalement les primes était le conducteur, au moyen d’un versement distinct de la location du véhicule auprès d’Autonum.

2010-036-001 PAGE : 10 Cependant, le conducteur n’avait pas connaissance des détails des frais présents dans la facture émise par Avro et remise à Autonum.

[53] Les procureurs de l’Autorité ont maintenu que le cabinet d’assurance est imputable des actes posés par ses représentants; ceux-ci n’auraient pas recueilli personnellement les renseignements auprès des conducteurs et n’auraient pas évalué leurs besoins, et, de ce fait, ils n’auraient pas agi avec loyauté et professionnalisme.

[54] Les procureurs ont évoqué que le montant de la pénalité demandée, soit 25 000 $, était peu élevé. Le plafond applicable se situe à 2 millions de dollars. L’Autorité a considéré la pratique généralisée d’Avro lorsqu’il s’agissait de clients d’Autonum, les cas mis en preuve n’étant qu’un échantillonnage.

[55] L’enquêteuse a reçu de l’information à l’effet qu’environ 1500 conducteurs seraient assurés chez Lloyds, qu’Autonum serait leur créancier locateur et Avro, leur cabinet en assurance. Il y avait environ 240 dossiers chez Echelon, Autonum figure à titre de créancier locateur. Pour la période de juin 2008 à novembre 2009, 55 personnes faisaient affaires avec Avro comme cabinet en assurance. L’Autorité a également considéré l’importance d’envoyer un message clair dans l’industrie, puisqu’il s’agit d’une pratique inacceptable.

LES REPRÉSENTATIONS DU PROCUREUR D’AVRO [56] Le procureur d’Avro a expliqué qu’Autonum achète des voitures qu’elle loue à des conducteurs. Autonum demeure donc propriétaire des véhicules. Dans le contrat entre elle et les conducteurs, une clause prévoit qu’une police qui répond à ses critères doit être souscrite par le locataire ou par celui-ci et Autonum.

[57] Ayant une clientèle avec des difficultés financières et pour qui la recherche d’un assureur qui accepte de les assurer est ardue, Autonum a conclu une entente verbale avec Avro afin de développer un programme d’assurance. Elle aurait exposé à Avro ses besoins ainsi que ceux des conducteurs éventuellement assurés. Le procureur a soutenu qu’il s’agissait alors d’une relation tripartite entre le conducteur, Autonum et Avro.

[58] Selon l’entente, Autonum paie les primes d’assurance à Avro. Dans le cas le conducteur, qui reçoit une facture hebdomadaire globale émise par Autonum, ne paie pas les primes à cette dernière, elle assume tout de même le paiement auprès d’Avro. En agissant ainsi, Autonum se prémunit contre les défauts de paiements. Lorsqu’elle a conclu cette entente, Autonum aurait recherché deux objectifs : assurer sa flotte de véhicules et être certaine que tous ses clients détiennent une assurance.

[59] Avro, pour évaluer le risque, a besoin d’informations, tel que le profil de la personne qui conduit le véhicule. Le procureur a indiqué que le risque varie également selon le type de véhicule assuré (dont Autonum est propriétaire), le créancier qui

2010-036-001 PAGE : 11 finance le prêt, etc. Autonum, à titre de client, fournissait à Avro tous ces renseignements. En aucun cas, les informations n’étaient transmises à Avro par le vendeur d’automobiles.

[60] Le procureur d’Avro a affirmé que dans la présente situation, l’obligation du courtier est envers Autonum, son client principal qui lui donne ses instructions. Il y aurait donc plus d’un assuré sur la police, soit le conducteur et Autonum, mais cette dernière serait le client à qui les conseils sont donnés par le courtier. D’ailleurs, lorsque le risque était placé hors du programme élaboré et lors de l’émission d’une police temporaire, le consentement d’Autonum était nécessaire.

[61] Selon le procureur, Autonum avait un intérêt à prendre en charge la gestion des assurances. Tout d'abord, elle est la propriétaire des véhicules, ce qui intervient par la cession des droits du vendeur d’automobiles prévue dans le contrat de location avec option d’achat auquel il intervient. Puis, la majorité de sa clientèle éprouve des difficultés financières et en est à sa deuxième ou troisième chance au crédit. Autonum avait donc intérêt à ce que les primes d’assurance sur les véhicules soient payées en temps opportun.

[62] Le procureur a précisé que le contrat intervenu entre le conducteur et Autonum est un contrat hybride, à la fois de location et de crédit, qui ressemble, en certains points à un contrat de crédit-bail (qui ne s’applique pas en droit de la consommation). Il a mentionné que la Loi sur la protection du consommateur 3 interdit à un créancier d’obliger son débiteur à faire affaires avec son assureur. Mais elle n’interdit pas à un créancier de prendre une assurance.

[63] Le procureur d’Avro a demandé au Bureau de considérer la situation suivante : le conducteur locataire du véhicule aurait confié à Autonum, son coassuré, locateur et créancier, le mandat de trouver une police d’assurance. Tous les deux avaient les mêmes intérêts et ils ont s’entendre pour éviter qu’il y ait deux assurances sur le véhicule. Cela serait possible, puisque le contrat intervenu entre le conducteur et Autonum prévoit qu’« au besoin, Autonum et le client pourront souscrire auprès d’une société d’assurance reconnue par Autonum une police d’assurance automobile pour la durée du bail ».

[64] Il a souligné le fait qu’aucune entente d’exclusivité n’était intervenue entre Avro et Autonum. Donc cette dernière pouvait faire affaires avec d’autres courtiers. De plus, le conducteur conservait la liberté de choisir leur propre police, même si certains ont indiqué ne pas avoir été informés de cela, ou de prendre celle suggérée par Autonum. Il a précisé que les cas présentés par l’Autorité dans le présent dossier ne sont qu’un échantillonnage et que plusieurs conducteurs ayant fait affaires avec Autonum n’avaient pas Avro comme courtier.

3 L.R.Q., c. P-40.1.

2010-036-001 PAGE : 12 [65] Le procureur d’Avro a plaidé que l’Autorité voudrait qu’on remplace le terme « client » dans la Loi sur la distribution de produits et services financiers par le mot « consommateur ». Ainsi, cette loi ne serait pas applicable dans le cas une personne morale voudrait s’assurer. Selon lui, la mission de l’Autorité ne vise pas que la protection du consommateur, mais également l’ordre public, et de s’assurer que les marchés financiers soient sains. Sa mission vise donc les personnes physiques et morales, sans discrimination.

[66] Puisque le terme client n’est pas défini dans cette loi, il a proposé de s’en remettre au sens commun. Par ailleurs, le procureur a indiqué que le propriétaire d’un véhicule a l’obligation de souscrire une assurance responsabilité 4 . Une exception est prévue et dégage le propriétaire de cette obligation, soit lorsqu’une autre personne contracte une assurance et que l’identité du propriétaire du véhicule est mentionnée à l’assureur et indiquée au contrat 5 . [67] Il a ajouté que lors du renouvellement, Avro contactait Autonum afin notamment de s’assurer que les polices d’assurance étaient toujours nécessaires. Par la suite, un avis était transmis au conducteur. Le procureur a également soutenu qu’Autonum avait tout intérêt à prendre les mesures afin d’obtenir des renseignements exacts sur les conducteurs, qui étaient par la suite transmis à Avro.

[68] Il a expliqué que lorsque le conducteur devenait propriétaire du véhicule, tout le processus de discussion reprenait avec Avro, car il n’avait alors plus de créancier locateur et il devait lui-même détenir une police d’assurance.

[69] Finalement, le procureur a soutenu qu’Avro a obtenu les informations personnellement auprès de son client, Autonum. Cependant, si le Bureau n’en arrivait pas à cette conclusion, il a indiqué que le montant de 25 000 $ de pénalité demandé par l’Autorité est arbitraire, puisqu’il n’y a pas de précédent à cet effet. Il a suggéré de couper cette pénalité en deux.

[70] Il a ajouté que l’infraction invoquée par l’Autorité à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers fait double emploi avec les articles 27 et suivants, ainsi que 84 et suivants de cette loi et donc, qu’elle devrait être examinée seulement subsidiairement à ceux-ci. Si tel était le cas, il a précisé que la preuve présentée par l’Autorité n’était pas suffisante, aucun expert n’ayant été entendu sur ce que constitue le professionnalisme dans cette situation. Subsidiairement, le procureur a soutenu qu’Avro a pris des informations auprès de certains conducteurs. Donc elle aurait évalué les besoins ceux-ci.

4 Loi sur l’assurance automobile, L.R.Q., c. A-25, art. 84. 5 Id., art. 94.

2010-036-001 PAGE : 13 L’ANALYSE LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES [71] En premier lieu, il convient de préciser que le Bureau exerce les pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers à l’égard d’une personne inscrite conformément à cette loi depuis le 1 er avril 2010, et ce, même si cette personne a contrevenu à cette loi ou à l’un de ses règlements avant cette date 6 . [72] L’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers prévoit notamment que :

L'Autorité peut, lorsqu'elle estime qu'un cabinet ne respecte pas les dispositions de la présente loi ou de ses règlements, ou que la protection du public l'exige, demander au Bureau de décision et de révision de radier son inscription, de la suspendre ou de l'assortir de restrictions ou de conditions. Elle peut, en plus, demander au Bureau d'imposer au cabinet une pénalité pour un montant qui ne peut excéder 2 000 000 $.

[73] Les articles suivants de la Loi sur la distribution de produits et services financiers sont pertinents pour l’analyse que doit effectuer le Bureau. Tout d'abord, les représentants en assurance sont soumis aux obligations suivantes :

« 16. Un représentant est tenu d’agir avec honnêteté et loyauté dans ses relations avec ses clients.

Il doit agir avec compétence et professionnalisme. 27. Un représentant en assurance doit recueillir personnellement les renseignements nécessaires lui permettant d’identifier les besoins d’un client afin de lui proposer le produit d’assurance qui lui convient le mieux.

28. Un représentant en assurance doit, avant la conclusion d'un contrat d'assurance, décrire le produit proposé au client en relation avec les besoins identifiés et lui préciser la nature de la garantie offerte.

Il doit, de plus, indiquer clairement au client les exclusions de garantie particulières compte tenu des besoins identifiés, s'il en est, et lui fournir les explications requises sur ces exclusions.

39. À l’occasion du renouvellement d’une police d’assurance, l’agent ou le courtier en assurance de dommages doit prendre les moyens requis pour que la garantie offerte réponde aux besoins du client. »

6 Loi modifiant diverses dispositions législatives afin principalement de resserrer l’encadrement du secteur financier, L. Q., 2009, c. 58, art. 182.

2010-036-001 PAGE : 14 [74] Par conséquent, l’Autorité soumet qu’Avro a, quant à elle, fait défaut de respecter les articles 84, 85 et 86 de cette même loi; ceux-ci prévoient que :

84. Un cabinet et ses dirigeants sont tenus d’agir avec honnêteté et loyauté dans leurs relations avec leurs clients.

Ils doivent agir avec soin et compétence. 85. Un cabinet et ses dirigeants veillent à la discipline de leurs représentants. Ils s’assurent que ceux-ci agissent conformément à la présente loi et à ses règlements.

86. Un cabinet veille à ce que ses dirigeants et employés agissent conformément à la présente loi et à ses règlements.

LE CLIENT [75] Il ressort des propos des procureurs des parties qu’ils proposent chacun leur définition de ce qu’est un client au sens de la Loi sur la distribution de produits et services financiers dans le présent dossier. Il revient au Bureau de déterminer ce qu’il en est. Examinons d’abord les définitions de certains intervenants au contrat d’assurance.

[76] Dans un ouvrage, on retrouve les définitions suivantes du proposant, de l’assuré et du preneur :

« Proposant -- Chaque police est précédée d'une proposition d'assurance qu'analyse l'assureur avant de décider s'il émet la police. Au stade de la signature de la proposition, le proposant n'est pas encore assuré et ne peut donc être décrit comme tel. Ce n'est que si la police est subséquemment émise que le proposant deviendra un assuré.

Assuré -- L'assuré est la personne qui fait l'objet du contrat d'assurance, qu'il s'agisse d'assurance de personnes ou d'assurance de dommages. C'est le titulaire de la police, celui au nom duquel la police est émise.

Preneur -- Le preneur est la personne qui contracte l'assurance. » 7 [77] L’article 2398 C.c.Q. stipule que « [l]e contrat d'assurance est formé dès que l'assureur accepte la proposition du preneur ».

[78] De plus, un auteur mentionne qu’ « Il est clair que le courtier, en tant que professionnel, a un devoir d’information à l’égard de son client, le preneur » 8 . Plus loin, 7 Jean-François LAMOUREUX, « Dispositions générales applicables en droit des assurances », dans JurisClasseur Québec, coll. « Droit civil », Contrats nommés 2, fasc. 14, Montréal, LexisNexis Canada, feuilles mobiles, par. 10, 11 et 14. 8 Jean-François LAMOUREUX, « Le contrat d’assurance », dans Collection de droit 2011-2012, École du Barreau, vol. 6, Contrats, sûretés, publicité des droits et droit international privé, Cowansville, Éditions Yvon Blais, p. 86.

2010-036-001 PAGE : 15 l’auteur définit ainsi la proposition : « [l]a proposition est l’offre que fait le preneur de contracter et le contrat sera formé lorsque l’assureur l’aura accepté » 9 . [79] Tout d’abord, les contrats signés par les conducteurs avec Autonum sont tous intitulés « contrats de location avec option d’achat »; leur durée est de 130, 156 ou 208 semaines. Tous les contrats ont les mêmes exigences quant à l’assurance qui doit être souscrite par les conducteurs, à savoir notamment :

o l’assurance responsabilité civile envers les tiers doit être d’au moins 1 000 000 $;

o la franchise de l’assurance tous risques pour perte ou dommage matériel ne doit pas dépasser 500 $; et

o la police doit prévoir qu’aucun changement ayant pour effet de réduire la couverture ou annuler la police ne peut être effectué sans qu’Autonum ait reçu un préavis de 30 jours.

[80] Selon la preuve, les polices d’assurance seraient des polices individuelles émises au nom des conducteurs. On y retrouve également leur adresse et le nom d’Autonum, qui y figure comme créancier locateur.

[81] Toutefois, deux certificats d’assurance émis par Echelon indiquent le conducteur et Autonum comme personnes assurées. D’autres dossiers qui ont été mis en preuve et dont l’assureur était Echelon ne contenaient pas les certificats d’assurance.

[82] Sur les propositions d’assurance automobile au dossier, le proposant inscrit est toujours le conducteur.

[83] De plus, l’article 2408 C.c.Q. prévoit que : « Le preneur, de même que l'assuré si l'assureur le demande, est tenu de déclarer toutes les circonstances connues de lui qui sont de nature à influencer de façon importante un assureur dans l'établissement de la prime, l'appréciation du risque ou la décision de l'accepter, mais il n'est pas tenu de déclarer les circonstances que l'assureur connaît ou est présumé connaître en raison de leur notoriété, sauf en réponse aux questions posées. »

[84] En l’espèce, les conducteurs de véhicules fournissaient au représentant du concessionnaire les informations utiles au courtier pour émettre la police d’assurance. La prime était établie notamment en fonction du risque associé au conducteur, du type de créancier qui finance le véhicule et de l’automobile.

9 Ibid.

2010-036-001 PAGE : 16 [85] Le contrat de location prévoit qu’Automun et le conducteur peuvent au besoin « souscrire auprès d’une société d’assurance reconnue par Autonum à une police d’assurance-automobile pour la durée du bail » et que dans un tel cas, la police sera tarifée selon le dossier du client (entendons ici conducteur) et qu’Autonum pourrait révoquer ou modifier sans préavis l’assurance si les conditions d’« assurabilité » ne sont plus respectées.

[86] Cependant, mis à part l’affirmation du procureur d’Avro que cela devrait être le cas, rien dans la preuve n’indique qu’Autonum et les conducteurs ont fait ce choix. Les représentants d’Autonum n’ont pas été entendus, les témoins n’ont pas mentionné avoir consenti à cette option prévue au contrat ou avoir confié le mandat à Autonum de souscrire ou trouver une police d’assurance pour eux. Ce contrat lui-même stipule plusieurs possibilités relatives à la police d’assurance, tel que prévu par la Loi sur la protection du consommateur 10 . Ainsi : « Avant de conclure le présent contrat, le commerçant exige que le consommateur détienne une police d’assurance tous risques.

Le consommateur peut remplir cette exigence : a) soit en souscrivant une police d'assurance auprès de l'assureur que peut lui suggérer le commerçant;

b) soit en souscrivant une police d'assurance équivalente à celle exigée par le commerçant auprès d'un assureur choisi par le consommateur;

c) soit au moyen d'une police d'assurance qu'il détient déjà. » [87] Un témoin a dit qu’on lui a expliqué chez le vendeur d’automobiles qu’elle ne pouvait pas prendre une autre assurance que celle suggérée par Autonum, en raison du risque qu’elle représente. Après l’achat et après lecture du contrat de location, elle a contacté la personne avec qui elle a conclu le financement, mais cette dernière lui a expliqué que le fait d’être assuré avec cette compagnie d’assurance certifiait qu’il effectuait en tout temps le paiement des assurances sur le véhicule.

[88] De plus, le contrat de location avec option d’achat prévoit en premier lieu que le conducteur est responsable de souscrire à une police d’assurance automobile comportant certaines clauses précisées dans le contrat. Ce n’est qu’au besoin que la situation proposée par le procureur d’Avro intervient. Comme il est mentionné plus haut, la preuve n’est pas suffisante à cet effet. Ce même contrat prévoit qu’Autonum se réserve le droit de souscrire à une couverture d’assurance si le conducteur ne maintient pas l’assurance requise en vigueur, et ce, aux frais de ce dernier. Mais tel n’est pas le cas en l’espèce.

10 Précitée, note 3.

2010-036-001 PAGE : 17 [89] Donc, le conducteur, et non Autonum, souscrivait à une assurance selon le contrat. D’ailleurs, l’article 84 de la Loi sur l’assurance automobile 11 prévoit que le propriétaire de toute automobile circulant au Québec doit détenir un contrat d'assurance de responsabilité garantissant l'indemnisation du préjudice matériel causé par cette automobile.

[90] L’article 1 de cette loi définit le propriétaire comme étant notamment la personne qui prend en location une automobile pour une période d'au moins un an. Donc, en l’espèce, les conducteurs ont fait la location avec option d’achat d’un véhicule pour une période supérieure à un an. Ils devaient donc détenir une assurance responsabilité et pour ce faire, il devait faire affaires avec un assureur ou un courtier d’assurance comme Avro. C’est d’ailleurs ce qu’ils ont fait alors qu’ils étaient chez le concessionnaire.

[91] C’est également le conducteur dans la réalité qui payait les primes d’assurances. Ce n’est que dans le cas le conducteur ne lui versait pas le montant des primes qu’Autonum décidait de les payer personnellement à Avro, afin de maintenir la police d’assurance en vigueur sur les véhicules, dont elle est propriétaire. Bien entendu, Autonum percevait elle-même les primes de ses locataires et les remettait à Avro une fois par mois. Cela découlerait de l’entente verbale intervenue entre elles.

[92] C’est également le conducteur qui signait la proposition d’assurance et non Autonum. Le Bureau ne croit pas que le fait qu’Autonum remettait la documentation au courtier en assurance fait d’elle le client au sens de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, bien qu’elle aurait pu être une cliente d’Avro au sens commercial.

[93] Ajoutons que le terme client est ainsi défini dans le langage courant : « Personne qui requiert les services d’une autre personne, qui lui confie ses intérêts » 12 « Personne qui requiert des services moyennant rétribution » 13 . [94] Dans le présent dossier, les conducteurs devaient quitter le concessionnaire avec un véhicule et leur responsabilité assurés. Ils fournissaient les informations nécessaires afin d’obtenir une assurance à un représentant du concessionnaire. Comme cela a été souvent mentionné lors de l’audience, tout se passait en même temps chez ce dernier. Bien que la grande majorité des conducteurs ne semble pas avoir fait d’autres démarches pour se trouver un courtier ou un assureur, ils ont tout de même confié à ce moment leurs intérêts à Avro. Ils ont acquis une assurance par l’entremise d’Avro et ses courtiers en échange du paiement de primes.

11 L.R.Q., c. A-25. 12 Hubert REID, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 4 e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2012, p. 103. 13 Josette REY-DEBOVE et Alain REY (dir.), Nouveau Petit Robert : dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, nouv. éd., Paris, Le Robert, 1993, p. 390.

2010-036-001 PAGE : 18 [95] De plus, les documents au dossier démontrent que lors de la période de renouvellement d’assurance, les lettres ainsi que les notes de couverture étaient adressées aux conducteurs et non à Autonum. Cependant, les avis de renouvellement sont datés d’après la fin du programme mis en place par Avro pour Autonum. Dans certaines de ces lettres, il était indiqué : « Si vous décidez de renouveler votre contrat d’assurance avec nous, votre courtier d’assurance, veuillez communiquer avec notre bureau […] ». Dans d’autres lettres, on retrouvait la mention : « En vue du renouvellement de votre contrat d’assurance automobile […] ».

[96] Certains des conducteurs avaient toujours à ce moment Autonum comme locateur. Si on adopte la position de l’intimée, dès que le programme était terminé, le client d’Avro changeait soudainement, sans autres formalités. Un avis de renouvellement de police était transmis au conducteur, comme si ce dernier avait toujours été le client d’Avro.

[97] Bref, les conducteurs, tant en vertu de la Loi sur l’assurance automobile que du contrat de location avec option d’achat conclu avec Autonum, devaient détenir une assurance. Selon la preuve entendue lors de l’audience, ils remplissaient la documentation relative aux assurances chez le concessionnaire automobile au même moment qu’ils contractaient leur financement, et ce, sans contact avec un représentant en assurance. L’employé du concessionnaire transmettait les informations à Autonum, qui l’envoyait à Avro, qui à son tour la faisait parvenir à l’assureur.

[98] Dès que la proposition d’assurance était acceptée par l’assureur, le contrat d’assurance se formait. Le proposant et preneur dans ce dossier étant le conducteur du véhicule, le Bureau est d’avis que le client du cabinet Avro au sens de la Loi sur la distribution de produits et services financiers est la personne qui souscrit l’assurance, soit le conducteur.

[99] Le Bureau rappelle que la Loi sur la distribution de produits et services financiers est une loi qui vise la protection du public 14 . Dans l’affaire Autorité des marchés financiers c. Assomption, compagnie mutuelle d'assurance-vie, la Cour d’appel mentionne :

« Il n'est pas contesté que l'objectif premier de la Loi sur la distribution est la protection du public, notamment la protection du consommateur qui acquiert un produit d'assurance. » 15 [100] Dans une affaire récente, la Cour d’appel indique qu’il s’agit d’une loi d’ordre public :

14 Voir notamment, Marston c. Autorité des marchés financiers, 2009 QCCA 2178, par. 46. 15 Autorité des marchés financiers c. Assomption, compagnie mutuelle d'assurance-vie, 2007 QCCA 1062, par. 47.

2010-036-001 PAGE : 19 « La Loi sur la distribution de produits et services financiers, telle qu'en vigueur à l'époque pertinente, est une loi d'ordre public, qui vise la protection des investisseurs-consommateurs. » 16 [101] Les procureurs de l’Autorité ont suggéré au Bureau de s’inspirer du terme « consommateur », qui réfère à la notion prévue à la Loi sur la protection du consommateur, comme guide dans l’interprétation du mot « client » dans la Loi sur la distribution de produits et services financiers.

[102] Le Bureau reconnaît que cette loi, dont l’objectif est la protection du public, permet d’assurer une protection au consommateur qui peut se retrouver dans un rapport inégal de force. Tant les personnes physiques que les sociétés sont des consommateurs de produits et services financiers.

[103] Dans la Loi sur la distribution de produits et services financiers, le législateur a choisi d’utiliser une notion large, soit le client. Dans notre cas, le client était le conducteur qui faisait la location du véhicule avec option d’achat, financée par Autonum et qui devait détenir une police d’assurance, ce qu’il a fait par l’entremise d’Avro et ses courtiers. Le tribunal complétera plus loin sa pensée à ce sujet.

LES MANQUEMENTS [104] Retenons tout d’abord qu’ « un cabinet et ses dirigeants sont tenus d’agir avec honnêteté et loyauté dans leurs relations avec leurs clients » 17 , ainsi qu’avec « soin et compétence » 18 . Ils doivent également veiller à la discipline de leurs représentants et s’assurer qu’ils agissent conformément à la Loi et ses règlements 19 . Puis, le cabinet doit veiller à ce que ses dirigeants et employés agissent en conformité avec la Loi et ses règlements 20 . [105] Il n’est pas contesté qu’Avro, intimée en l’instance, est un cabinet d’assurance. Selon l’article 27 de la Loi sur la distribution de produits et de services financiers, « un représentant en assurance doit recueillir personnellement les renseignements nécessaires lui permettant d’identifier les besoins d’un client afin de lui proposer le produit d’assurance qui lui convient le mieux ».

[106] Le représentant en assurance « doit, avant la conclusion d'un contrat d'assurance, décrire le produit proposé au client en relation avec les besoins identifiés

16 Souscripteurs du Lloyd's c. Alimentation Denis & Mario Guillemette inc., 2012 QCCA 1376, par. 77 ; voir également, Brazeau c. Chambre de la sécurité financière, 2006 QCCQ 11715 et Formule Pontiac Buick inc. c. Québec (Bureau des services financiers), 2004 CanLII 7239 (Qc CS), par. 31 et 47. 17 Précitée, note 2, art. 84. 18 Ibid. 19 Id., art. 85. 20 Id., art. 86.

2010-036-001 et lui préciser la nature de la garantie offerte » indiquer au client « les exclusions de garantie particulières compte tenu des besoins identifiés, s'il en est, et lui fournir les explications requises sur ces exclusions ».

[107] L’article 39 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers stipule que lors d’un renouvellement d’une police d’assurance, le courtier ou l’agent doit prendre les moyens pour que la garantie offerte réponde aux besoins du client.

[108] La Cour suprême s’est prononcée ainsi sur le rôle du représentant dans l’arrêt Fletcher 22 : « À mon avis, l'arrêt Fine's Flowers permet d'affirmer que les agents d'assurances privés ont envers leurs clients l'obligation de fournir non seulement des renseignements sur la couverture disponible, mais encore des conseils sur les formes de protection dont ils ont besoin. Je remarque que, dans "Liability of Insurance Agents for Failure to Obtain Effective Coverage: Fine's Flowers Ltd. v. General Accident Assurance Co." (1979), 9 Man. L.J. 165, le professeur Snow résume ainsi l'incidence de l'arrêt Fine's Flowers, à la p. 169:

[TRADUCTION] L'incidence de cet arrêt et de bien d'autres décisions semblables rendues au cours des dernières années semble claire. Les consommateurs qui font confiance aux agents d'assurances soi-disant compétents, et qui voient leur confiance trahie, pourront souvent se pourvoir contre leur agent... [L]'obligation de l'agent d'assurances, telle qu'énoncée en l'espèce, pour ce qui est de négocier une assurance et d'indiquer à l'assuré les risques couverts et ceux qui ne le sont pas est assez stricte. De surcroît, étant donné qu'en général le commettant se fie énormément à la compétence de l'agent, il ne semble pas déraisonnable d'imposer cette obligation à un agent d'assurances. [Je souligne.]

Dans l'affaire G.K.N. Keller Canada Ltd. v. Hartford Fire Insurance Co. (1983), 1 C.C.L.I. 34 (H.C. Ont.) (conf. en appel (1984), 4 C.C.L.I. xxxvii (C.A. Ont.)), la cour a explicité davantage la nature de l'obligation de diligence de l'agent d'assurances. Elle y a décidé que, si le client décrit adéquatement à l'agent la nature de ses activités, ce dernier a alors l'obligation d'étudier les besoins en assurances du client et de lui fournir la protection complète demandée. Si un sinistre non assuré survient, l'agent est responsable à moins qu'il n'ait signalé à son client les lacunes dans la couverture et qu'il ne l'ait conseillé sur la façon de combler ces lacunes.

Il est évident, tant dans le milieu des assurances que devant les tribunaux, que l'on considère que les agents et courtiers d'assurances sont plus que de simples vendeurs. Les actes du colloque de 1985 sur le droit des

21 Id., art. 28. 22 Fletcher c. Société d'assurance publique du Manitoba, [1990] 3 R.C.S. 191.

PAGE : 20 21 . Le représentant doit également

2010-036-001 PAGE : 21 assurances tenu par la Continuing Legal Education Society de la Colombie-Britannique mettent l'accent sur les services qu'ils fournissent la p. 6.1.03):

[TRADUCTION] Les services d'un agent ou d'un courtier compétent incluent, outre les conseils sur les assurances et le courtage ou la négociation de polices pour le compte du client, un intérêt et une participation concrets dans la prévention des sinistres, ainsi qu'un contrôle des demandes de règlement destiné à aider le client à obtenir un règlement satisfaisant.

Il est tout à fait légitime, à mon sens, d'imposer aux agents et aux courtiers d'assurances privés une obligation stricte de fournir à leurs clients des renseignements et des conseils. Ils sont, après tout, des professionnels agréés qui se sont spécialisés dans l'évaluation des risques au profit des clients et dans la négociation de polices personnalisées. Ils offrent un service très personnalisé, axé sur les besoins de chaque client. La personne ordinaire a souvent de la difficulté à comprendre les différences subtiles entre les diverses protections offertes. Les agents et les courtiers ont reçu une formation qui les rend aptes à saisir ces différences et à fournir des conseils adaptés à la situation de chaque individu. Il est à la fois raisonnable et opportun de leur imposer l'obligation non seulement de fournir des renseignements mais encore de conseiller les clients. »

[109] Selon la preuve présentée lors de l’audience, les conducteurs n’ont jamais discuté de leur besoin avec un courtier d’assurance lorsqu’ils ont contracté leur assurance pour le véhicule dont ils faisaient la location avec option d’achat. Tout se déroulait chez le concessionnaire, avec un employé de ce dernier, qui n’avait pas la compétence requise pour ce faire. Seules deux ou trois personnes ont indiqué avoir discuté avec un représentant d’Autonum, leur créancier locateur.

[110] Il est donc évident que ce ne sont pas des représentants en assurance qui ont recueilli personnellement les renseignements nécessaires leur permettant d’identifier les besoins de leur client, afin de leur proposer le produit d’assurance qui leur convenait le mieux et qui soit mieux à leur mesure. Il y avait, intercalé entre les représentants d’Avro et le conducteur, un intermédiaire, soit l’employé du concessionnaire ou celui d’Autonum.

[111] Ce n’est que lorsque des précisions étaient manquantes ou qu’elles étaient nécessaires, que les courtiers d’Avro contactaient les conducteurs. Avec ces seules informations, ils ne pouvaient certainement pas identifier les besoins de ce dernier. Et un témoin d’Avro a indiqué que les conducteurs n’étaient pas contactés de manière systématique.

[112] Les procureurs de l’Autorité ont laissé sous-entendre que les contacts faits par les représentants d’Avro n’auraient peut-être pas tous été faits, car des dossiers des

2010-036-001 PAGE : 22 représentants d’Avro ne seraient pas exacts. Par exemple, un témoin a mentionné au Bureau qu’elle a travaillé comme serveuse dans un centre aquatique mais jamais dans une cabane à sucre.

[113] Cependant, le dossier du courtier indique que celle-ci aurait mentionné lors d’un appel téléphonique pour obtenir des informations sur son lieu de travail qu’elle travaillait dans une cabane à sucre. Enfin, le témoin a souligné qu’il était impossible que quelqu’un lui ait téléphoné pour lui demander des précisions sur son métier de serveuse.

[114] De plus, l’Autorité a remis un document provenant du dossier du courtier concernant cette personne; il contient moins d’informations que celui déposé par Avro. Le procureur de l’intimée a cependant affirmé qu’il avait transmis ce document à l’Autorité et qu’il l’avait en sa possession depuis longtemps.

[115] Le Bureau retient que les protections nécessaires et le montant des franchises étaient discutés avec Autonum et non avec les conducteurs. Ceux-ci n’étaient pas consultés sur ces questions qui les concernent pourtant directement et qui ont un impact sur le montant de la prime qu’ils étaient tenus de payer. Un témoin d’Avro a indiqué qu’Autonum désirait des franchises peu élevées mais cela a un effet sur le montant de la prime à être payée.

[116] De plus, les conducteurs ne recevaient pas la facture émise par Avro car elle était plutôt acheminée à Autonum. Cette facture, en plus du montant de la prime et des taxes, comportait d’autres frais. Cependant, Avro soutient qu’elle transmettait la facture à Autonum; c’est celle-ci qui lui payait les primes. Ce qu’Autonum faisait avec les factures ne la concerne pas.

[117] Puisque le conducteur ne discutait jamais avec un courtier d’Avro, le produit d’assurance proposé ne lui était pas décrit par un représentant en assurance, tout comme la nature de la garantie offerte. Aucun conseil ne lui était fourni.

[118] D’ailleurs, le Bureau se demande si le produit offert au conducteur est celui qui lui convenait le mieux. Avro avait mis sur pied un programme d’assurance à l’intention d’Autonum au moyen duquel la majorité des conducteurs se retrouvaient assurés chez un assureur, suivant l’analyse des besoins d’Autonum, avec une franchise et des protections qu’ils n’avaient pas choisies ou demandées.

[119] Bref, le Bureau est d’avis que le cabinet Avro n’a pas veillé à ce que ses représentants, dirigeants ou employés agissent conformément à la Loi sur la distribution de produits et services financiers. Ses représentants n’ont pas recueilli personnellement les renseignements nécessaires leur permettant d’identifier les besoins des clients, afin de leur proposer le produit qui leur convient le mieux.

2010-036-001 PAGE : 23 [120] Les représentants d’Avro n’ont pas non plus décrit le produit proposé au client et précisé la nature de la garantie offerte, avant la conclusion du contrat d’assurance, tel que l’exige l’article 28 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers.

[121] Par ailleurs, lors des renouvellements de polices d’assurance, il a été expliqué que pendant la durée du programme mis sur pied pour Autonum, Avro contactait cette dernière pour vérifier quelles couvertures étaient nécessaires. Une analyse des dossiers ainsi qu’un suivi mensuel étaient effectués et des remarques étaient transmises à Autonum. De plus, certains avis de renouvellement, transmis aux conducteurs postérieurement à la fin du programme ont été déposés en preuve.

[122] Le Bureau en vient à la conclusion que pendant le programme, les conducteurs ne recevaient pas l’avis de renouvellement. Les discussions avaient lieu entre les courtiers d’Avro et Autonum. Ce n’est que lorsque le programme était terminé que les conducteurs recevaient un avis et que les contacts entre Avro et les conducteurs prenaient forme.

[123] Considérant que le client dans les circonstances était le conducteur, on ne peut soutenir que lors du renouvellement de police d’assurance pendant le programme, le courtier a pris les moyens pour que la garantie offerte réponde aux besoins du client. D’ailleurs, pendant cette période, jamais le courtier ne s’informait des besoins du client car Avro discutait notamment de la protection, de la police et des franchises avec Autonum.

[124] La décision de la Cour suprême qui a été citée plus haut dans le présent texte 23 résume clairement quels sont les devoirs d’un agent d’assurance envers ses clients, y compris l’acheteur d’une police d’assurance automobile. Ce représentant de la compagnie d’assurance a l’obligation de fournir à ses clients des renseignements sur la couverture disponible mais également sur la protection dont ils ont besoin.

[125] Il lui appartient de répondre à la confiance que ses clients ont en lui parce que ces derniers croient qu’il est compétent dans le métier qu’il a choisi d’exercer. L’agent doit signaler à ses clients ce dont ils ont besoin, ce qui est suffisant pour répondre à leurs besoins mais également ce dont il est préférable de se tenir loin parce ce n’est pas dans leur intérêt, même si le prix semble à prime abord attrayant.

[126] Le devoir de diligence du représentant en assurance envers ses clients signifie qu’il doit obtenir du client des renseignements précis, notamment sur sa situation et ses activités. Il saura ainsi connaître quels sont les besoins de ce dernier en matière d’assurance et lui offrir une couverture d’assurance qui corresponde exactement à ses besoins.

23 Ibid.

2010-036-001 PAGE : 24 [127] S’il n’accomplit pas cela, il risque de ne pas déceler les lacunes de la couverture de ce dernier et l’entraîner vers des ennuis financiers en cas de sinistre. Comme l’a dit la Cour suprême, l’agent d’assurance n’est pas un simple vendeur de police. Il donne des conseils, aide à prévenir les sinistres et aide également ses clients à satisfaire leur demande de règlement. C’est un professionnel des marchés; il doit être inscrit pour exercer ses fonctions.

[128] Il est spécialisé dans l’évaluation des risques, ce qui lui permet de négocier des polices spécialisées avec et pour ses clients. C’est lui qui a la formation requise pour expliquer à une clientèle plus ou moins sophistiquée ce dans quoi il l’invite à s’engager. C’est un conseiller et non un simple vendeur. Mais dans le présent dossier, Avro a évacué ces aspects vitaux.

[129] Il est du sentiment du Bureau que dans le présent dossier, cet aspect n’a pas été pris en compte. Selon toutes les apparences, Avro a laissé les intérêts des concessionnaires et d’Autonum s’intercaler entre lui et les intérêts des assurés. Les assurances qui ont été vendues à ses clients ont été taillées sur mesure pour accommoder les besoins des entités mais sûrement pas des clients qui étaient des personnes physiques.

[130] Ces derniers ont été tellement peu tenu en compte dans cette affaire qu’ils ignoraient parfois que c’est Avro qui leur fournissait leur assurance automobile. Ils ne l’ont appris qu’au bout de l’année, quand venait le temps de renouveler leur police. Il ne pouvait en être autrement puisque ce sont plutôt les employés du concessionnaire qui s’occupaient des contrats d’assurance des clients. Ces derniers ne rencontraient pas de représentants d’Avro; ils ne pouvaient donc bénéficier des conseils d’un représentant compétent, formé pour les guider et les assister.

[131] Ce faisant, Avro a sérieusement manqué à ses devoirs envers ses clients. Tel que la preuve a permis d’apprendre, ces derniers étaient des économiquement faibles. Leur crédit était chambranlant. Ces gens avaient besoin, plus que d’autres, des services de représentants d’assurance compétents, mieux à même de prendre connaissance de leurs situations respectives et de les conseiller adéquatement quant à leurs besoins mais également aux véritables moyens susceptibles d’y répondre.

[132] Ce faisant, Avro a fait défaut de respecter la disposition de la Loi sur la distribution de produits et services financiers qui lui enjoint d’agir avec soin, compétence et loyauté dans ses relations avec ses clients 24 . Comme le demande l’article 27 de cette loi, un représentant d’Avro aurait personnellement recueillir les renseignements des clients pour leur proposer un produit d’assurance lui convenant le mieux, et ce non, seulement au moment de la vente initiale de l’assurance mais

24 Précitée, note 2, art. 84.

2010-036-001 PAGE : 25 également au moment de son renouvellement. Ce n’était ni un employé de concessionnaire ni celui d’Autonum qui pouvait faire cela.

[133] À sa défense, Avro a plaidé une entente tripartite entre le conducteur, le locateur et elle-même. Ainsi, a continué son procureur, le locateur Autonum protégeait les voitures qu’il louait, les clients obtenaient une assurance qui leur serait autrement difficile à trouver et Avro était assurée d’obtenir ses paiements. Avro a également allégué que son obligation était envers Autonum qui lui donnait ses instructions. C’était ce dernier qui avait un intérêt de gérer les assurances puisque c’était ses véhicules qui était loués aux clients.

[134] Il devenait donc normal à ses yeux que comme propriétaire des véhicules, il fasse en sorte qu’ils soient correctement assurés, surtout en présence de clients qui pouvaient avoir de la difficulté à se trouver un assureur. Puis sa présence assurait que les primes d’assurance étaient payées. Mais le Bureau a un sérieux problème avec le raisonnement d’Avro. Comme cela a été mentionné, dans le présent dossier, Autonum est venue s’intercaler entre Avro et ses clients.

[135] Cela a fait que, selon la preuve qui a été entendue, ce sont soit des représentants d’Autonum ou, le plus souvent, les employés des concessionnaires avec lesquels les clients ont fait affaires, qui se sont occupés de conclure les contrats d’assurance automobile que contractaient les clients qui louaient des véhicules. Pour le Bureau, c’est que le bât blesse. Avro a peut-être trouvé son profit en utilisant ces méthodes mais les clients y ont perdu le leur.

[136] En situation normale, Avro aurait s’assurer que ce soit ses représentants, dûment inscrits pour son compte, qui rencontrent ces clients, se penchent sur leurs besoins et s’assurent de leur trouver le produit qui leur convenait, comme l’a dit la Cour suprême. Ni Autonum, et encore moins les concessionnaires automobiles, ne sont inscrits à titre d’assureurs. Leurs employés ne sont pas non plus des personnes inscrites et ils ne sont pas qualifiés pour vendre de l’assurance.

[137] Ils ne pouvaient donc donner le genre de services auxquels les clients avaient droit en matière d’assurance automobile et dont ils avaient pourtant un grand besoin. mais c’est de cela dont ils ont été privés, grâce à Avro qui n’a pas su dans le présent dossier respecter les devoirs que lui imposait la loi. Ajoutons ici que la Loi sur la distribution de produits et services financiers réfère généralement à la notion de client qui n’est pas définie dans cette loi.

[138] Mais que ces personnes soient des clients, des consommateurs ou qu’elles soient désignées autrement, le Bureau ne veut retenir que l’interprétation qui reflète la réalité économique des choses et soit la plus favorable aux véritables acheteurs, en défendant leurs meilleurs intérêts lorsqu’ils souscrivent des polices d’assurance

2010-036-001 PAGE : 26 automobile. Le Bureau retient ici que ce sont ces personnes qui achètent la couverture d’assurance automobile.

[139] C’est eux qui la paient et c’est leur nom qui apparaît sur les polices individuelles. Malgré les propos d’Avro, il n’y a pas ici de police d’assurance collective qui aurait normalement été acquise par Autonum, mais un ensemble de polices d’assurances individuelles qui ont peut-être pu être traitées collectivement par Autonum mais qui n’en sont pas moins individuelles.

[140] C’est pourquoi le Bureau considère qu’Avro a manqué à ses devoirs prévus à la loi, tel que cela a été démontré tout au long de la présente décision. Des représentants inscrits pour son compte auraient recueillir personnellement les renseignements nécessaires lui permettant d’identifier les besoins des clients afin de proposer le produit d’assurance convenant le mieux à ces derniers 25 . Ils auraient dû, avant de conclure le contrat d’assurance, décrire le produit proposé au client en relation avec ses besoins et lui préciser la nature de la garantie offerte 26 . [141] Au moment du renouvellement des polices d’assurance des clients, il aurait fallu que soient pris les moyens requis pour que la garantie offerte réponde aux besoins des clients 27 . À titre de cabinet, Avro aurait veiller à la discipline de ses représentants et s’assurer qu’ils agissent conformément à la Loi sur la distribution de produits et services financiers et à ses règlements 28 . Ayant échoué à convaincre le Bureau qu’il avait agi en conformité avec ces dispositions dans le présent dossier, le tribunal détermine que les faits reprochés au cabinet intimé sont avérés et que par conséquent, il succombe devant lui.

LA SANCTION [142] L’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers prévoit que le Bureau peut imposer à un cabinet qui a contrevenu à une disposition de cette dernière loi une pénalité administrative. Dans l’analyse de l’opportunité d’imposer une sanction telle que celle qui est demandée par l’Autorité, le tribunal a tenu compte des facteurs suivants :

o La gravité des gestes posés par le contrevenant; o La conduite antérieure du contrevenant; o La vulnérabilité des clients sollicités; 25 Id., art. 27. 26 Id,, art. 28. 27 Id., art. 39. 28 Id., art. 85 et 86.

2010-036-001 PAGE : 27 o Les pertes subies par les clients; o Les profits réalisés par le contrevenant; o L’expérience du contrevenant; o La position et le statut du contrevenant lors de la perpétration des faits reprochés;

o Le caractère intentionnel des gestes posés; o Les dommages causés à l’intégrité des marchés par la conduite du contrevenant;

o Le fait que la sanction peut, selon la gravité du geste posé, constituer un facteur dissuasif pour le contrevenant mais également à l’égard de ceux qui seraient tentés de l’imiter;

o Le degré de repentir du contrevenant; o Les facteurs atténuants; et o Les sanctions imposées dans des circonstances semblables. 29 [143] Le Bureau rappelle qu’on ne peut élaborer une liste exhaustive de facteurs qui pourraient être applicables à l’ensemble des situations. Chacun des facteurs, pris individuellement, pourra avoir une importance propre et relative en fonction des faits pertinents du dossier. En l’espèce, le tribunal a analysé les facteurs pertinents et pondéré ceux-ci en fonction des faits au dossier.

[144] Révisons maintenant ces facteurs à la lumière des faits du présent dossier. La gravité des gestes posés par le contrevenant [145] L’Autorité a fait la preuve de 15 cas qui constituent un échantillonnage parmi les longues listes que leur ont fait parvenir deux assureurs. Bien qu’il ne semble pas s’agir de la majorité de la clientèle d’Avro, on ne peut pas dire que nous sommes en présence de cas isolés.

[146] Le programme qu’Avro avait mis en place pour Autonum a été en vigueur de septembre 2007 à mars 2010. Pendant cette période, de nombreux locataires avec

29 Ces facteurs s’inspirent de décisions prononcées en matière de valeurs mobilières. Voir Autorité des marchés financiers c. Demers, 2006 QCBDRVM 17. Voir également Autorité des marchés financiers c. 9135-2799 Québec inc. (Assurances Céline Émond), 2011 QCBDR 124.

2010-036-001 PAGE : 28 option d’achat de véhicules ont pu conclure des contrats d’assurance sans jamais discuter avec un représentant du cabinet Avro. Le problème subsistait le même au moment du renouvellement des polices d’assurance.

[147] Les conducteurs ont donc été privés de leur droit à recevoir l’information sur le produit d’assurance qu’ils se procuraient ainsi que d’avoir le produit qui leur convient le mieux. De plus, pendant la durée du programme, le courtier n’a pas pris les moyens pour que la garantie offerte réponde aux besoins du client, le sujet étant discuté avec Autonum.

[148] Tel que l’indiquait le Comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommage : « […] la protection du public exige que le représentant et le courtier ne limitent pas leur rôle à celui de « simple vendeur » d’assurance » 30 . D’ailleurs, la Cour suprême a reconnu qu’« [il] est évident, tant dans le milieu des assurances que devant les tribunaux, que l'on considère que les agents et courtiers d'assurances sont plus que de simples vendeurs » 31 . [149] Avro, à titre de cabinet, n’a donc pas veillé à ce que ses représentants agissent conformément à la Loi sur la distribution de produits et services financiers, loi qui vise la protection du public et qui est d’ordre public. Il est même du sentiment du Bureau qu’Avro a passé à côté de devoirs fondamentaux que cette loi lui impose, ce qui amplifie la gravité objective des manquements reprochés.

La vulnérabilité des clients [150] Plusieurs des personnes qui ont souscrit aux polices d’assurance en étaient à leur 2 e ou 3 e chance au crédit. Certains témoins ont expliqué que dans cette situation, il est plus difficile de trouver un assureur qui accepte de leur vendre une couverture. Des assureurs sous-standards le font. Lors de la location du véhicule chez le concessionnaire, les conducteurs réglaient le financement et les assurances au même moment.

[151] De plus, les conducteurs payaient, en plus de la prime, des frais dont ils ne connaissaient pas la nature ou même l’existence, puisqu’Avro transmettait les factures à Autonum qui en faisait ce qu’elle voulait. Aucun des conducteurs entendus n’avait reçu ce document.

[152] Jamais ils n’ont discuté avec un représentant d’Avro lorsque venait le moment de prendre une assurance. La prime qu’ils payaient, le choix de la protection et la franchise applicable étaient convenus entre Autonum et Avro. Les personnes entendues à l’audience sont des gens ordinaires qui ont besoin de la protection offerte par la Loi sur

30 Chauvin c. Légaré, 2010 CanLII 64055. 31 Précitée, note 22.

2010-036-001 PAGE : 29 la distribution de produits et services financiers et qui n’ont pas de connaissances particulières dans le domaine de l’assurance.

[153] Dans leur relation avec le courtier d’assurance qui s’occupait de leur dossier ainsi qu’avec le cabinet, ils étaient dans une situation de vulnérabilité. Ils devaient se fier complètement à ce qui leur était dit chez le concessionnaire.

Les pertes subies par les clients [154] Les pertes que les clients ont subies sont les frais additionnels présents sur la facture d’Avro qu’ils ne recevaient pas, mais qu’ils acquittaient. S’ils avaient reçus les informations ou conseils d’un courtier, ils auraient eu connaissance de ces frais, dont certains étaient demandés par Autonum. De plus, lorsqu’ils ne faisaient plus partie du programme élaboré à l’attention d’Autonum, ils voyaient les montants à acquitter diminuer.

[155] On peut également raisonnablement penser que les conducteurs avaient une protection potentiellement inadéquate, puisque les représentants en assurance ne recueillaient pas personnellement les informations nécessaires pour identifier les besoins des clients et leur proposer le produit qui leur convient le mieux.

[156] Le Bureau retient aussi que les primes étaient établies selon des franchises peu élevées, tel que requis par Autonum, ce qui influe sur le montant à acquitter.

Les profits réalisés par le contrevenant [157] Sur certaines factures émises par Avro, à l’attention d’Autonum mais au nom du conducteur, on retrouve des frais payables à Avro.

L’expérience du contrevenant et sa conduite antérieure [158] Avro a été constituée en janvier 2005. Il s’agit d’un cabinet ayant une certaine expérience. Aucun antécédent la concernant n’a, par ailleurs, été porté à l’attention du Bureau lors de l’audience.

La position et le statut du contrevenant lors de la perpétration des faits reprochés [159] Les conducteurs ont contracté leur assurance chez le concessionnaire, sans contact avec un représentant d’Avro. Ce n’est que pour valider certaines informations ou en obtenir lorsqu’il y en manquait que les conducteurs recevaient un appel. Ainsi, les renseignements nécessaires pour identifier les besoins et proposer un produit d’assurance étaient recueillis par un intermédiaire.

2010-036-001 PAGE : 30 Le caractère intentionnel des gestes posés [160] Bien qu’Avro semblait penser qu’Autonum était son client au sens de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, l’absence d’intention de contrevenir à la loi dans une industrie aussi règlementée que celle de l’assurance ne constitue pas un moyen de défense valide. Puis, Avro aurait connaître ses devoirs et ceux de ses représentants mais il a court-circuité ses clients pour traiter plutôt avec Autonum; mais il ne peut invoquer que ce dernier était son client plutôt que les conducteurs.

Les dommages causés à l’intégrité des marchés par la conduite du contrevenant [161] Avro a agi d’une manière qui ne peut être tolérée dans les marchés financiers. Le non-respect de dispositions importantes d'une législation d'ordre public porte définitivement atteinte à l'intégrité des marchés.

Le facteur de dissuasion spécifique et général [162] Dans l’objectif de pourvoir à la protection des clients et au maintien de l’intégrité dans l’industrie de l’assurance, des mesures ayant un effet dissuasif propre au contrevenant et général aux participants de cette industrie sont nécessaires pour démontrer qu’une conduite, telle que celle adoptée par l’intimée, n’est pas tolérée ni acceptée.

[163] Les clients sont en droit de s’attendre à ce que les cabinets d’assurance agissent d’une manière conforme à la loi, qu’ils veillent à la discipline de leurs représentants et qu’ils s’assurent que ceux-ci, ainsi que leurs dirigeants et employés agissent conformément à la Loi sur la distribution de produits et services financiers ainsi qu’à ses règlements. La protection et l’équilibre des marchés sont à ce prix.

Le degré de repentir du contrevenant [164] Aucun regret n’a été démontré et il n’y a pas de reconnaissance d’une contravention à la loi.

Les facteurs atténuants [165] Le programme mis en place par Avro pour Autonum est terminé depuis 2010. Les sanctions imposées dans des circonstances semblables [166] Il n’existe aucun précédent pour cette situation précise.

2010-036-001 PAGE : 31 LA CONCLUSION SUR LES SANCTIONS [167] L’Autorité demande l’imposition d’une pénalité administrative de 25 000 $ à l’encontre d’Avro, ainsi que la mise en place de mesures de contrôle et de surveillance. Avro ne s’est pas assurée que ses représentants ainsi que ses dirigeants et employés agissent conformément à la Loi sur la distribution de produits et services financiers ainsi qu’à ses règlements.

[168] Ses représentants auraient recueillir personnellement les renseignements nécessaires leur permettant de déterminer les besoins des clients afin de leur proposer le produit d’assurance qui leur convient le mieux.

[169] De plus, ses représentants auraient dû, avant la conclusion des contrats d’assurance décrire le produit proposé au client en relation avec les besoins identifiés et leur préciser la nature de la garantie offerte. Les agents ou les courtiers auraient également lors du renouvellement des polices d’assurance prendre les moyens requis pour que la garantie offerte réponde aux besoins des clients.

[170] La pénalité de 25 000 $ demandée ainsi que la mise en place de mesures de contrôle et de surveillance sont justifiées dans les circonstances, considérant les facteurs analysés dans les paragraphes précédents. Les sanctions demandées permettraient d’atteindre un objectif de dissuasion et de véhiculer l’importance du respect des obligations prévues à la Loi sur la distribution de produits et services financiers.

[171] Finalement, en réponse à un argument du procureur d’Avro, le Bureau tient à préciser qu’à titre de tribunal spécialisé, il peut se prononcer sur ce que constitue le professionnalisme dans les circonstances sans qu’une preuve d’expert lui ait été présentée à cet effet.

[172] Le Bureau a pris connaissance de la demande de l’Autorité, ainsi que des pièces déposées, a entendu les témoignages lors de l’audience et les représentations des procureurs de chacune des parties. Pour tous les motifs évoqués plus haut dans la présente décision, il en vient à prononcer la décision suivante en vertu des articles 93 et 94 de la Loi sur l’Autorité des marchés financiers et l’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers :

PAR CONSÉQUENT, LE BUREAU DE DÉCISION ET DE RÉVISION : ACCUEILLE la demande de l’Autorité; IMPOSE à la société Avro services de gestion de risques inc. une pénalité administrative au montant de 25 000 $, payable dans les trente (30) jours de la signification de la présente décision; et

2010-036-001 PAGE : 32 ORDONNE à Avro services de gestion de risques inc. la mise en place de mesures de contrôle et de surveillance, lesquelles devront être à l’entière satisfaction de l’Autorité, afin de s’assurer que le cabinet, ses dirigeants, ses représentants et ses employés respectent la Loi sur la distribution de produits et services financiers et ses règlements, plus particulièrement en ce qui a trait aux obligations des représentants découlant des articles 16, 27, 28 et 39 de cette loi, et ce, dans un délai raisonnable.

Fait à Montréal, le 20 décembre 2012. _________(S) Alain Gélinas_____________ M e Alain Gélinas, président _________(S) Claude St Pierre___________ M e Claude St Pierre, vice-président

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.