Autorité des marchés financiers (Québec)

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Autorité des marchés financiers c. Infinitum Succession et Patrimoine inc.

2023 QCTMF 2

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DES MARCHÉS FINANCIERS

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

MONTRÉAL

 

DOSSIER N° :

2021-019

 

DÉCISION N° :

2021-019-003

 

DATE :

Le 10 janvier 2023

______________________________________________________________________

 

DEVANT LES JUGES ADMINISTRATIVES :

CHANTAL DENOMMÉE

ANTONIETTA MELCHIORRE

 

______________________________________________________________________

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

Partie demanderesse

c.

INFINITUM SUCCESSION ET PATRIMOINE INC.

et

VLADISLAV ADONIEV

et

ANDREI CRIVOI

Parties intimées

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

 


 

Table des matières

APERCU           4

CONTEXTE       6

Inspection initiale en février 2018          7

Inspection de suivi effectuée en octobre 2019           7

Inspections de suivis de la Décision du Tribunal de décembre 2020          10

ANALYSE         13

Question no 1 : Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de respecter son obligation de bien identifier les besoins de ses clients et de s’assurer, avant de faire une recommandation, que le placement et la stratégie de financement convenaient aux besoins des clients?  13

Conclusion   13

Le droit applicable            13

Application du droit aux faits   16

A)         Vladislav Adoniev a-t-il omis de préparer, de compléter adéquatement et de procéder à une analyse de besoins financiers préalablement à la vente de fonds distincts à ses clients?    16

B)         Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de conseiller et de recommander à ses clients des produits financiers qui respectent leur profil d’investisseur ou leur profil de risque?          19

Fonds distincts       19

Analyse en comparant le résultat du profil d’investisseur avec le niveau de risque d’un fonds distinct         20

Impossibilité d’analyse vu l’absence d’aperçu de fonds et de note explicative         22

Analyse du respect du profil d’investisseur au moyen de la répartition d’actif      22

Épargne collective           23

C)         Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de respecter les ratios de prêt et d’endettement de ses clients lorsqu’il leur a conseillé de contracter un prêt à effet de levier pour l’achat de fonds distincts?                                                                                                                                                                              25

Question no 2 : Infinitum, Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev ont-t-il fait défaut de s’assurer de tenir les dossiers clients conformément à la LDPSF et à ses règlements?   29

Conclusion   29

Droit applicable     29

Application du droit aux faits   31

Question no 3 : Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev ont-ils effectué des représentations non conformes relativement à leur mode d’exercice, leur rattachement à un cabinet d’assurance ainsi qu’à leur adresse professionnelle?    33

Conclusion   33

Droit applicable     33

Application du droit aux faits   34

Question no 4 : Infinitum et Andrei Crivoi ont-ils fait défaut d’assurer (a) une supervision générale et (b) une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev?  36

Conclusion   36

a)         Infinitum et Andrei Crivoi ont-ils fait défaut d’assurer une supervision générale des activités de Vladislav Adoniev? 36

Droit applicable     36

Supervision générale par le cabinet et le dirigeant responsable        36

Application du droit aux faits   38

Les politiques et procédures d’Infinitum        38

L’existence de politiques et procédures spécifiques à l’utilisation des prêts à effet de levier 40

b)         Infinitum et Andrei Crivoi ont-ils fait défaut d’assurer une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev ?            43

Droit applicable     43

Supervision stricte par Infinitum et Andrei Crivoi selon l’Engagement de supervision       43

Application du droit aux faits   45

Transmission des Déclarations de supervision stricte incomplètes et hors délai   49

Question no 5 : Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de s’assurer que ses activités de représentant de courtier en épargne collective et sur le marché dispensé étaient, en tout temps, supervisées conformément aux conditions de supervision stricte imposées par le Tribunal?     49

Conclusion   50

Le droit applicable            50

Application du droit aux faits   50

Transactions effectuées sans approbation préalable par le superviseur   50

Transactions effectuées sans supervision stricte            52

Question no 7 : S’il y a lieu, quelles sont les mesures administratives que le Tribunal doit imposer à Infinitum, Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev?    54

Droit applicable     54

Application du droit aux faits   59

A)         Le type, le nombre, la gravité des gestes posés par les contrevenants et l’importance des activités exercées par les contrevenants       59

B)         La conduite antérieure des contrevenants et la récurrence des manquements      64

C)         Le fait que la mesure administrative peut, selon la gravité du geste posé, constituer un facteur dissuasif pour le contrevenant, mais également à l’égard de ceux qui seraient tentés de l’imiter   67

D)         L’expérience des intimés   68

E)         Le caractère intentionnel des gestes posés et le degré de repentir  68

F)         Les pertes subies par les investisseurs et le risque que les contrevenants font courir aux investisseurs et aux marchés financiers si on leur permet de continuer leurs activités       69

G)         Les mesures administratives imposées dans des circonstances semblables  69

CONCLUSION   75


 

APERCU

[1]  L’Autorité des marchés financiers (« l’Autorité ») est l’organisme qui assure, notamment, l’encadrement des activités de distribution de produits et services financiers et des activités des marchés en valeurs mobilières en administrant en outre, les règles d’admissibilité et d’exercice de ces activités[1]. C’est elle qui est chargée d’appliquer la Loi sur la distribution de produits et services financiers (« LDPSF »)[2] et la Loi sur les valeurs mobilières (« LVM »)[3], des lois d’ordre public[4].

[2]   Plus particulièrement, l’Autorité encadre les professionnels et les cabinets qui œuvrent dans le secteur financier, tels que les intimés, Infinitum Succession et Patrimoine inc. (« Infinitum »), Vladislav Adoniev et Andrei Crivoi, afin de s’assurer qu’ils se conforment aux obligations prévues à la législation et à la réglementation applicables.

[3]   Les activités de l’Autorité s’inscrivent dans sa mission de protéger le public et d’assurer l’efficience des marchés financiers[5].

[4]   Dans le but de lui permettre d’accomplir sa mission, l’Autorité possède plusieurs pouvoirs, dont notamment celui de procéder à l’inspection des professionnels et des cabinets inscrits qui sont sous sa juridiction[6].

[5]  À la suite d’une inspection des activités du cabinet en assurance de personnes Infinitum, de celles de son représentant Vladislav Adoniev et de son dirigeant responsable Andrei Crivoi, qui exerce également une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev, l’Autorité conclut qu’ils ont commis plusieurs manquements importants à la LDPSF et à la LVM.

[6]   En ce qui concerne Vladislav Adoniev, l’Autorité soutient qu’il a commis des manquements répétés et graves qui sont au cœur même de la pratique. Ces manquements soulèveraient, d’après elle, un questionnement au niveau de la qualité des services et des produits financiers qu’il aurait recommandés à ses clients.

[7]   L’Autorité reproche à Infinitum et à Andrei Crivoi de ne pas avoir supervisé les activités de Vladislav Adoniev de façon à l’empêcher de commettre les manquements allégués.

[8]   D’après l’Autorité, les intimés auraient omis de corriger leur pratique malgré les nombreuses occasions où ils auraient pu le faire, ce qui laisse présager l’existence d’un laxisme, d’une insouciance ou d’un simple refus de se conformer à la législation applicable. Si le passé est garant de l’avenir, l’Autorité parie que le risque de récidive est élevé.

[9]   Pour ces raisons, l’Autorité demande au Tribunal de rendre plusieurs mesures administratives, incluant des pénalités et une ordonnance de suspension temporaire d’un an de tous les droits de pratique de Vladislav Adoniev, ce que ses procureurs qualifient de « mort professionnelle ».

[10]         Les intimés nient avoir commis d’importants manquements à la législation et la réglementation applicables, qualifiant de « peccadilles » les quelques écarts de conduite qui auraient pu survenir. Ils allèguent que l’Autorité cherche inutilement à les punir, allant jusqu’à prétendre que l’Autorité aurait commis un abus de procédure à leur égard.

[11]        Afin de solutionner le litige entre les parties, le Tribunal devra répondre aux questions en litige suivantes :

1)    Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de respecter son obligation de bien identifier les besoins de ses clients et de s’assurer, avant de faire une recommandation, que le placement et la stratégie de financement convenaient aux clients?

a)    Vladislav Adoniev a-t-il omis de préparer, de compléter adéquatement et de procéder à une analyse de besoins financiers préalablement à la vente de fonds distincts à ses clients?

b)    Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de conseiller et de recommander à ses clients des produits financiers qui respectent leur profil d’investisseur ou leur profil de risque?

c)    Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de respecter les ratios de prêt et d’endettement de ses clients lorsqu’il leur a conseillé de contracter un prêt à effet de levier pour l’achat de fonds distincts?

2)    Infinitum, Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev ont-t-il fait défaut de tenir les dossiers clients conformément à la LDPSF et à ses règlements?

3)    Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev ont-ils effectué des représentations non conformes relativement à leur mode d’exercice, à leur rattachement à un cabinet d’assurance ainsi qu’à leur adresse professionnelle?

4)    Infinitum et Andrei Crivoi ont-ils fait défaut d’assurer :

a)    une supervision générale; et

b)    une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev?

5)    Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de s’assurer que ses activités de représentant de courtier en épargne collective et de courtier sur le marché dispensé étaient, en tout temps, supervisées conformément aux conditions de supervision stricte imposées par le Tribunal?

6)    Vladislav Adoniev a-t-il effectué de la publicité susceptible d’induire le public en erreur et de prêter à confusion?

7)    S’il y a lieu, quelles sont les mesures administratives que le Tribunal doit imposer à Infinitum, Andrei Crivoi et à Vladislav Adoniev?

CONTEXTE

[12]       Vladislav Adoniev détient auprès de l’Autorité (i) un certificat émis en vertu de la LDPSF l’autorisant à agir à titre de représentant dans la discipline de l’assurance de personnes, et ce, depuis février 2011, (ii) une inscription en vertu de la LVM l’autorisant à agir à titre de représentant de courtier en épargne collective, et ce, depuis juillet 2012 et (iii) une inscription en vertu de la LVM l’autorisant à agir à titre de représentant de courtier sur le marché dispensé depuis juin 2017[7].

[13]       Entre août 2014 et février 2016, Vladislav Adoniev exerce ses activités à titre de représentant en assurance de personnes et en épargne collective auprès du cabinet La Capitale services conseils inc. (« la Capitale »)[8].

[14]      Le 29 janvier 2016, il est congédié pour cause par la Capitale. À ce moment, il cesse d’exercer toute activité à titre de représentant[9].

[15]       En février 2016, Infinitum obtient de la part de l’Autorité son inscription à titre de cabinet en assurance de personnes[10].

[16]      À la suite d’une demande de Vladislav Adoniev de réactiver son inscription de représentant en épargne collective, l’Autorité, après considération des faits au dossier, rend une décision le 20 avril 2017 dans laquelle elle considère que les agissements de Vladislav Adoniev affectent sa probité et la protection du public. Elle considère donc qu’un encadrement de toutes ses activités est nécessaire pour la protection du public et celle des intervenants du domaine financier[11].

[17]      Par cette décision, l’Autorité assortit le certificat en assurance de personnes, l’inscription de représentant en épargne collective et celle de représentant sur le marché dispensé de Vladislav Adoniev de plusieurs conditions, dont notamment une condition de supervision rapprochée[12] pour une période de trois (3) ans[13].

[18]      La décision de l’Autorité permet à Vladislav Adoniev d’exercer ses activités de représentant en assurance de personnes, en épargne collective et sur le marché dispensé, uniquement dans la mesure où ses activités sont supervisées selon les conditions et modalités imposées par l’Autorité.

[19]      Le 25 mai 2017, Vladislav Adoniev commence à exercer ses activités de représentant dans la discipline de l’assurance de personnes pour le compte du cabinet Infinitum[14] dont il est également actionnaire et administrateur[15].

[20]       Par ailleurs, il est le seul représentant rattaché au cabinet Infinitum[16].

[21]       Le 27 juin 2017, Vladislav Adoniev commence à exercer ses activités en épargne collective et sur le marché dispensé pour le compte de Valeurs Mobilières Whitehaven inc. (« Whitehaven »)[17].

Inspection initiale en février 2018

[22]       Le 27 février 2018, l’Autorité procède à une première inspection du cabinet Infinitum.

[23]      L’inspection révèle plusieurs manquements, notamment dans les dossiers clients de Vladislav Adoniev et plus particulièrement en ce qui concerne l’analyse de besoins financiers des clients, la procédure de remplacement de contrat d’assurance, la tenue des dossiers clients et au sujet d’informations non conformes apparaissant sur des cartes d’affaires[18].

[24]      Plus important encore, Infinitum n’a pas de structure formelle de vérification du travail des représentants et il appert que les activités de Vladislav Adoniev n’ont fait l’objet d’aucune supervision particulière, malgré la condition de supervision rapprochée de ses activités imposée par l’Autorité[19].

[25]       Le 28 août 2018, Infinitum et son dirigeant responsable de l’époque signent un engagement envers l’Autorité qui vise à corriger tous les manquements soulevés lors de l’inspection et plus particulièrement, d’assurer un encadrement et une supervision rapprochée des activités de Vladislav Adoniev conformément à la législation et aux conditions de supervision imposées par l’Autorité[20].

Inspection de suivi effectuée en octobre 2019

[26]       En octobre 2019, l’Autorité procède à une inspection de suivi qui révèle que nonobstant les engagements souscrits par le cabinet Infinitum et par son ancien dirigeant responsable, ces derniers n’ont pas mis en place des mesures correctives découlant de l’inspection initiale de février 2018.

[27]       Plus particulièrement, ils n’ont pas effectué, une fois de plus, de réelles vérifications des activités de Vladislav Adoniev, et ce, contrairement à leur obligation de supervision tant générale que rapprochée de ses activités.

[28]      L’inspection de suivi révèle qu’encore une fois, Vladislav Adoniev a fait défaut de compléter l’analyse de besoins financiers dans certains dossiers ou ne l’a pas complétée de façon convenable et qu’il ne tenait pas ses dossiers clients conformément à la législation.

[29]      De plus, il se présentait à ses clients de manière non conforme, c’est-à-dire comme représentant autonome alors que ce n’était pas son mode d’exercice réel ou comme un représentant rattaché à un cabinet qui n’était pas celui auquel il était rattaché.

[30]       En conséquence de ce qui précède, en juin 2020, l’Autorité dépose auprès du Tribunal un acte introductif par lequel elle réclame plusieurs ordonnances à l’égard d’Infinitum, de Vladislav Adoniev ainsi qu’à l’égard du dirigeant responsable de l’époque, qui devait effectuer la supervision rapprochée des activités de Vladislav Adoniev[21].

[31]      L’Autorité allègue dans l’acte introductif qu’Infinitum et son dirigeant responsable de l’époque avaient également fait défaut de respecter leur engagement écrit de corriger les irrégularités soulevées lors de son inspection de février 2018.

[32]       Toujours dans son acte introductif, l’Autorité demande au Tribunal d’imposer tant au certificat qu’à l’inscription de Vladislav Adoniev, une condition de « supervision stricte » par opposition à la condition de « supervision rapprochée » à laquelle il était déjà assujetti.

[33]      Le 10 décembre 2020, l’Autorité, Infinitum (représentée par son nouveau dirigeant responsable Andrei Crivoi), l’ancien dirigeant responsable et Vladislav Adoniev concluent un accord dans lequel ils admettent les manquements qui leur sont reprochés, c’est-à-dire d’avoir fait défaut de respecter plusieurs obligations prévues à la LDPSF et consentent à respecter les mesures administratives suggérées au Tribunal[22].

[34]      Plus particulièrement, dans l’accord conclu avec l’Autorité, Infinitum admet :

1)    avoir fait défaut de respecter l’engagement souscrit envers l’Autorité lors de la première inspection;

2)    avoir fait défaut de veiller à la discipline de son représentant, Vladislav Adoniev et de s’assurer que celui-ci agisse conformément à la LDPSF et à ses règlements;

3)    avoir fait défaut de mettre en place une structure d’encadrement permettant une supervision adéquate de son représentant, Vladislav Adoniev;

4)    avoir fait défaut de tenir les dossiers de ses clients conformément à la législation et à la réglementation;

5)    avoir fait de la publicité et des représentations susceptibles d’induire en erreur;

6)    que Vladislav Adoniev a fait défaut de compléter de façon adéquate ou en temps opportun l’analyse de besoins financiers dans les dossiers clients; et

7)    que Vladislav Adoniev a fait défaut de s’abstenir de faire toute publicité et toute représentation qui est susceptible d’induire en erreur.

[35]      En ce qui concerne l’ancien dirigeant responsable d’Infinitum, il admet :

1)    avoir fait défaut de respecter l’engagement souscrit envers l’Autorité lors de la première inspection;

2)    avoir fait défaut, à titre de superviseur, de superviser les activités de Vladislav Adoniev;

3)    avoir transmis de fausses informations à l’Autorité.

[36]      En ce qui concerne Vladislav Adoniev, celui-ci admet notamment :

1)    avoir omis de compléter adéquatement des analyses de besoins financiers ou ne pas les avoir complétées en temps opportun;

2)    avoir fait défaut de respecter son obligation de tenir ses dossiers clients conformément à la législation et à la réglementation;

3)    avoir fait défaut de respecter son obligation de se présenter conformément à la législation et à la réglementation; et

4)    avoir fait de la sollicitation ou des représentations qui sont susceptibles de prêter à confusion.

[37]      Dans une décision datée du 15 décembre 2020 (« Décision du Tribunal de décembre 2020 »)[23], le Tribunal a entériné l’accord conclu entre les parties et a imposé les mesures administratives suggérées par les parties.

[38]      Dans cette décision, le Tribunal a assorti, tant le certificat en assurance de personnes de Vladislav Adoniev que son inscription en épargne collective et sur le marché dispensé de plusieurs conditions, dont celle qui l’oblige à exercer ses activités sous la supervision stricte d’une personne nommée par le dirigeant responsable du cabinet pendant une période de dix-huit (18) mois.

[39]      À la suite de cette décision, Andrei Crivoi, alors dirigeant responsable d’Infinitum, informe l’Autorité qu’il agira comme superviseur pour exercer une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev en assurance de personnes et l’Autorité accepte sa nomination[24].

[40]      Andrei Crivoi, détient auprès de l’Autorité, un certificat l’autorisant à agir à titre de représentant dans la discipline de l’assurance de personnes depuis le 10 avril 2017 et à titre de représentant autonome dans la même discipline depuis le 1er août 2017[25].

[41]       Il agit à titre de dirigeant responsable du cabinet Infinitum depuis le 11 septembre 2020[26].

[42]       En ce qui concerne les activités de Vladislav Adoniev dans les catégories de représentant de courtier en épargne collective et de représentant de courtier sur le marché dispensé, celles-ci font également l’objet d’une supervision stricte. Celle-ci est effectuée par Richard Bernard qui était alors Chef de conformité de Whitehaven. Cette supervision stricte par Richard Bernard s’est terminée le 25 février 2022, à la suite d’une décision du Tribunal[27].

Inspections de suivis de la Décision du Tribunal de décembre 2020

[43]      Dans le but d’effectuer le suivi de la Décision du Tribunal de décembre 2020 et surtout s’assurer du bon fonctionnement de la supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev, entre janvier 2021 et mars 2022, l’Autorité procède à trois inspections et analyse 18 dossiers clients tant en assurance de personnes qu’en épargne collective et sur le marché dispensé.

[44]      L’Autorité analyse de façon détaillée 12 dossiers clients de Vladislav Adoniev dans la discipline de l’assurance de personnes (« Dossiers clients en assurance ») et six (6) dossiers clients en épargne collective et sur le marché dispensé (« Dossiers clients en épargne collective et sur le marché dispensé »).

[45]       Il est important d’ajouter que tous les Dossiers clients en assurance inspectés par l’Autorité comportent l’achat, par un client, d’un ou de plusieurs fonds distincts par l’entremise d’une stratégie d’emprunt à effet de levier.

[46]       Les conclusions de l’inspection des dossiers clients de Vladislav Adoniev amène l’Autorité à conclure qu’Infinitum, Andrei Crivoi, Vladislav Adoniev et Richard Bernard ont tous commis des manquements à leurs obligations légales incluant le défaut de respecter la Décision du Tribunal de décembre 2020. Devant ces constats, l’Autorité institue le présent recours contre eux.

[47]      D’après l’Autorité, les conclusions de ses inspections révèlent l’existence des manquements suivants :

         Activités en assurance de personnes

-       Défaut de compléter des analyses de besoins financiers ou défaut de les compléter convenablement;

-       Disparité entre le profil d’investisseur et le choix des placements;

-       Défaut de recommander des produits financiers et d’utiliser un prêt à effet de levier qui conviennent aux clients;

-       Défaut de tenir les dossiers clients conformément à la réglementation;

-       Représentations non conformes;

-       Défaut de s’acquitter du devoir de supervision générale;

-       Défaut de s’acquitter du devoir de supervision stricte à l’égard des activités de Vladislav Adoniev et transmission de fausses informations à l’Autorité; et

-       Retard dans la transmission de documents à l’Autorité.

         Activités en épargne collective et sur le marché dispensé

-       Défaut de s’acquitter du devoir de supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev;

-       Refus ou omission de ce dernier de s’assurer que ses activités étaient effectivement supervisées conformément aux conditions de supervision stricte imposées par le Tribunal;

-       Disparité entre le profil de risque et le choix des placements;

-       Transactions effectuées par Vladislav Adoniev alors qu’un nouveau superviseur qui exerce la supervision stricte de ses activités n’avait pas encore été nommé par l’Autorité; et

-       Publications non conformes.

[48]       L’Autorité demande au Tribunal notamment de radier l’inscription d’Infinitum et de suspendre, pour une période de 12 mois, le certificat de Vladislav Adoniev dans la discipline de l’assurance de personnes et son inscription dans les catégories de représentant de courtier pour un courtier en épargne collective et sur le marché dispensé.

[49]      Une fois la suspension de 12 mois terminée, l’Autorité demande au Tribunal d’assortir tant le certificat que l’inscription de Vladislav Adoniev d’une condition de supervision stricte, et ce, pour une période de trois (3) ans.

[50]       En ce qui concerne Andrei Crivoi, l’Autorité demande au Tribunal de lui interdire d’agir à titre de dirigeant responsable d’un cabinet et d’agir à titre de superviseur d’un autre représentant pour une période de cinq (5) ans.

[51]       Finalement, l’Autorité demande au Tribunal d’imposer des pénalités administratives à Infinitum, Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev, de l’ordre de 20 000 $, 10 000 $ et 8 000 $ respectivement.

[52]       En ce qui concerne Richard Bernard, suivant le dépôt des procédures, ce dernier et l’Autorité concluent un accord dans lequel Richard Bernard admet ne pas avoir bien supervisé les activités de Vladislav Adoniev et une décision datée du 25 février 2022 est rendue par le Tribunal laquelle lui interdit d’agir à titre de superviseur pendant une période de cinq (5) ans[28].

[53]      À la suite de cette décision, Whitehaven, désigne un nouveau superviseur pour effectuer la supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev. Cette désignation est confirmée par l’Autorité le 21 mars 2022[29].

[54]       Selon la Décision du Tribunal de décembre 2020, la condition de supervision stricte imposée au certificat de Vladislav Adoniev se terminait le 12 juillet 2022 et celle imposée à son inscription le 6 août 2022.

[55]       Puisque la condition de supervision stricte imposée par le Tribunal expire avant que le Tribunal ne puisse rendre sa décision sur le fond du présent dossier suite à son instruction[30], l’Autorité demande au Tribunal avant la prise en délibéré du dossier, de prolonger la condition de supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev pendant la période du délibéré.

[56]       Bien que les intimés contestent vigoureusement les conclusions que l’Autorité recherche sur le fond du dossier, ils ont consenti à ce que la condition de supervision des activités de Vladislav Adoniev demeure la même pendant la durée du délibéré du dossier[31].          

[57]       En date du 30 juin 2022, le Tribunal prolonge les ordonnances prononcées dans la Décision du Tribunal de décembre 2020 qui assortissait le certificat et l’inscription de Vladislav Adoniev d’une condition de supervision stricte, jusqu’à ce que le Tribunal rende une décision sur le fond de cette affaire (« Décision du Tribunal de juin 2022 »)[32].

[58]      Le Tribunal souligne que lors de la première journée de l’instruction du dossier, les intimés ont présenté à l’Autorité, ce qu’ils qualifient d’« offre judicaire » qu’ils ont par la suite déposée au dossier du Tribunal. Cette offre a été modifiée et retirée à plusieurs reprises en cours d’audience.

[59]      Lors de sa plaidoirie, le procureur des intimés a, de nouveau, référé à cette « offre » et l’a réitérée. L’Autorité a de nouveau refusé verbalement cette offre.

[60]      En vertu de la dernière version de l’offre contenue dans les Notes et autorités sommaires des intimés, les intimés proposent que les activités de Vladislav Adoniev continuent de faire l’objet d’une supervision stricte sous la supervision d’un planificateur financier proposé par les intimés, qui agirait à titre de consultant externe en conformité. Le but est d’assurer la conformité des obligations découlant de la supervision stricte, pour une période additionnelle de trois mois, à partir de l’expiration de la prolongation des conditions de supervision prononcée dans la Décision du Tribunal de juin 2022.

[61]      Cette offre prévoit qu’elle expire lors du prononcé de la décision par le Tribunal.

[62]      L’Autorité a toujours refusé l’offre des intimés.

ANALYSE

Question no 1 : Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de respecter son obligation de bien identifier les besoins de ses clients et de s’assurer, avant de faire une recommandation, que le placement et la stratégie de financement convenaient aux besoins des clients?

Conclusion

[63]      Le Tribunal conclut que la preuve démontre que Vladislav Adoniev a commis un manquement en omettant de bien identifier les besoins de ses clients en faisant défaut de compléter et de procéder à l’analyse de leurs besoins financiers avant de leur recommander l’achat de produits financiers.

[64]      Le Tribunal conclut que la preuve présentée par l’Autorité est insuffisante pour permettre au Tribunal de conclure à un manquement à l’obligation de convenance incombant à Vladislav Adoniev. Par conséquent, l’Autorité ne s’est pas déchargée de son fardeau de prouver que les placements recommandés et que la stratégie de financement utilisée, soit le prêt à effet de levier, ne convenaient pas aux besoins des clients de Vladislav Adoniev.

Le droit applicable

[65]       En matière d’offre et de vente de produits et services financiers, la législation prévoit que trois obligations fondamentales incombent aux professionnels qui œuvrent dans le domaine financier, soit celle de bien connaître son client, celle de bien connaître les produits financiers qu’il offre et celle de la convenance du produit financier offert au client[33]. Le respect de ces obligations est nécessaire pour assurer la protection des épargnants et des investisseurs.

[66]      Ces obligations ont fait l’objet de nombreuses décisions des tribunaux judiciaires, incluant de la Cour suprême du Canada[34] et la Cour d’appel[35]. Le Tribunal s’est également prononcé à de multiples reprises sur la nature et l’étendue de celles-ci[36]. En droit disciplinaire, le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a rendu de nombreuses décisions à ce sujet[37].

[67]      Dans le domaine des valeurs mobilières, les obligations de bien connaître son client, de connaître les produits financiers offerts et celle de la convenance d’un produit, sont énoncées aux articles 13.2, 13.2.1 et 13.3 du Règlement 31-103 sur les obligations de dispenses d’inscriptions et les obligations continues des personnes inscrites[38] (« Règlement 31-103 ») et son Instruction générale vient préciser les attentes de l’Autorité[39].

[68]      Comme le précise la professeure Raymonde Crête :

« Les obliga­tions les plus importantes à cet égard consistent, premièrement, à bien connaître le client (know your client rule ou KYC) et, deuxièmement, à fournir des services qui sont bien adaptés à la situation spécifique de ce dernier (« obligation de convenance » ou « suitability rule »). Pour remplir l'obligation de bien connaître son client, l'intermédiaire doit colliger les renseignements pertinents sur ce dernier, notamment au sujet de sa situation financière, de ses objectifs de placements, de ses connaissances et de son expérience en matière de placement, de sa tolérance au risque, de l'horizon temporel des placements, de sa situation d'emploi, etc. Cette obliga­tion s'applique tant au moment de l'ouverture du compte que durant la relation entre les parties, exigeant ainsi une mise à jour de l'information pertinente au sujet du client.

Sur la base de ces renseignements, il incombera alors au professionnel d'élaborer une stratégie de placements, de faire des recommandations et d'effectuer des placements qui conviendront au profil du client, à ses objectifs de placement et à ses attentes. Il s'agit de l’« obligation de convenance » (suitability rule) que les autorités régulatrices imposent expressément aux courtiers en placement, aux courtiers en épargne collective et aux gestionnaires de portefeuille. »[40]

[69]       Dans la discipline de l’assurance de personnes, l’obligation de bien connaître son client et celle de la convenance sont énoncées à l’article 27 de la LDPSF lequel précise ce qui suit :

« Un représentant en assurance doit s’enquérir de la situation de son client afin d’identifier ses besoins.

Il doit s’assurer de conseiller adéquatement son client, dans les matières relavant des disciplines dans lesquelles il est autorisé à agir, s’il lui est possible de le faire, il offre à son client un produit qui convient à ses besoins. »

[70]      Un représentant respecte l’obligation de bien connaître son client en collectant auprès de lui le plus de renseignements pertinents possible et en les maintenant à jour. C’est notamment ce qui lui permet de rencontrer son obligation de lui recommander un produit financier qui convient à sa situation et lui permet de satisfaire à ses obligations d’agir avec compétence et professionnalisme[41].

[71]       Toutefois, avant de pouvoir conseiller son client et lui recommander l’achat d’un produit financier, tel un fonds distinct, le représentant en assurance, doit, au préalable, analyser avec le client ses besoins.

[72]      Pour ce faire, la réglementation prévoit que le représentant doit recueillir auprès de son client investisseur, l’ensemble des renseignements nécessaires pour lui permettre d’analyser ses besoins[42], incluant ses objectifs de placement, sa tolérance au risque, le niveau de ses connaissances financières et tout autre élément important et nécessaire, tels ses revenus, son bilan financier, le nombre de personnes à sa charge et ses obligation personnelles et familiales[43].

[73]       Même si cette analyse des besoins du client peut varier selon la situation du client et la nature des produits financiers à lui recommander, elle doit présenter un portrait suffisamment détaillé afin de supporter les recommandations du représentant[44].

[74]      De plus, il doit consigner par écrit dans un document les renseignements recueillis de son client, dater ce document, en remettre une copie au client et l’inclure dans son dossier[45].

[75]       L’obligation du représentant de compléter, et ce, de façon adéquate, l’analyse de besoins financiers du client est souvent considérée comme la « pierre d’assise fondamentale » du travail de représentant[46].

[76]      L’utilisation du mot « doit » par le législateur à l’article 27 de la LDPSF dissipe tout doute quant à l’obligation d’un représentant en assurance de personnes de s’enquérir de la situation de son client pour identifier ses besoins. Lorsque le représentant offre à son client une police d’assurance ainsi qu’un placement dans des fonds distincts, celle-ci est donc impérative[47].

[77]      Plus spécifiquement, le représentant en assurance de personnes doit, avant d’offrir des fonds distincts, analyser les besoins de ses clients en tenant compte de ses objectifs de placements, sa tolérance aux risques, le niveau de ses connaissances financières et tout autre élément nécessaire, tel que ses revenus, son bilan financier, le nombre de personnes à sa charge et ses obligations personnelles et familiales. Rappelons aussi qu’il doit consigner les renseignements recueillis par écrit dans un document qu'il doit remettre au client et déposer dans son dossier.

Application du droit aux faits

A)           Vladislav Adoniev a-t-il omis de préparer, de compléter adéquatement et de procéder à une analyse de besoins financiers préalablement à la vente de fonds distincts à ses clients?

[78]       En janvier et février 2021 ainsi qu’en mars 2022, l’Autorité demande à Infinitum de lui transmettre 12 Dossiers clients en assurance de Vladislav Adoniev, pour s’assurer de leur conformité et du respect de la condition de supervision stricte imposée par la Décision du Tribunal de décembre 2020[48].

[79]      Un inspecteur de l’Autorité témoigne qu’il a révisé et a analysé les Dossiers clients en assurance et a préparé pour chaque client un tableau qui inclut ses constatations[49]. Il a analysé plusieurs éléments qui lui permettent de se prononcer sur leur conformité à la législation et à la réglementation applicables.

[80]       Dès le début de son témoignage, les intimés formulent une objection générale au témoignage de tout inspecteur de l’Autorité sur l’existence de manquements à la législation, tant dans les Dossiers clients en assurance que dans les Dossiers clients en épargne collective et sur le marché dispensé.

[81]       Selon les intimés, le témoignage des inspecteurs de l’Autorité sur l’existence de manquements constitue un témoignage d’opinion réservé aux témoins experts reconnus par le Tribunal. Ils s’objectent également à la production de tout document préparé par les inspecteurs, qui réfère aux manquements reprochés par l’Autorité.

[82]       Dans une décision rendue oralement lors de l’audience[50], le Tribunal rejette les objections des intimés. Les dispositions législatives sont claires et non équivoques. Le rôle des inspecteurs est précisément de s’assurer du respect des inscrits à la législation et à la réglementation. Les inspecteurs doivent pouvoir témoigner devant le Tribunal de leurs constatations et de leurs conclusions quant au respect ou non de la législation applicable et c’est au Tribunal de juger s’il y a manquement ou non, selon la preuve présentée durant l’instruction.

[83]      Le Tribunal rappelle que c’est l’Autorité qui a le fardeau de prouver l’existence de manquements, selon la règle de la prépondérance de preuve[51].

[84]      L’inspecteur reprend son témoignage à l’effet qu’avant de recommander l’achat de fonds distincts, financé au moyen d’un prêt à effet de levier, Vladislav Adoniev n’a pas complété l’analyse des besoins financiers des clients, et ce, dans sept (7) dossiers et que dans les cinq (5) autres dossiers les analyses sont incomplètes.

[85]      Vladislav Adoniev n’a apporté aucune preuve réfutant l’absence aux dossiers clients d’analyse de besoins financiers écrites ou réfutant que les autres analyses étaient incomplètes.

[86]      Lors de son témoignage, Vladislav Adoniev explique que ce n’est pas l’usage de la profession de compléter des analyses de besoins financiers pour vendre des fonds distincts. Il ajoute ne pas connaître de conseiller en sécurité financière qui le font.

[87]      Dans les Notes et autorités sommaires des intimés, ses procureurs prétendent que Vladislav Adoniev a prouvé par son témoignage qu’« il était l’usage de la profession de ne pas procéder à de telles analyses, ce qui en aucun temps ne fut contredit par l’AMF »[52].

[88]      Les procureurs réfèrent le Tribunal a des décisions en matière disciplinaire sur l’obligation du syndic de prouver les principes généralement reconnus dans la profession avec l’aide d’une preuve d’expert[53].

[89]      Avec égard, ce courant jurisprudentiel ne s’applique pas. L’Autorité ne reproche pas à Vladislav Adoniev de ne pas respecter les usages de la profession. Elle lui reproche de ne pas respecter ses obligations légales et réglementaires envers ses clients.

[90]      Vladislav Adoniev a également témoigné que pour bien cerner les besoins de ses clients, il les rencontre et leur pose des questions, dans le but de comprendre leur situation financière, personnelle et professionnelle. Il ajoute que malgré l’absence d’analyse de besoins financiers écrite dans les dossiers, il connaît ses clients et leur situation de « A à Z » et peut raconter la vie de chacun de ses 600 clients. 

[91]      Le Tribunal est d’avis que les démarches entreprises par Vladislav Adoniev pour cerner les besoins de ses clients ne le décharge pas de son obligation de consigner les renseignements recueillis dans un document et de procéder à l’analyse des besoins financiers. La décision dans Autorité des marchés financiers c. Couture[54] précise avec justesse ce qui suit : 

« [48] C’est en procédant à une analyse complète des besoins du client que le représentant pourra s’assurer de suggérer le produit qui conviendra le mieux à son client. Une telle analyse doit être consignée par écrit; elle ne peut rester que dans la tête du représentant. La confection de l’écrit respecte les obligations légales à cet égard. Cela permet autant d’assurer la protection des clients que de protéger le cabinet et son représentant relativement à la convenance du produit. » 

[92]      La preuve de l’Autorité démontre que Vladislav Adoniev n’a pas préparé d’analyse de besoins financiers pour sept (7) clients sur 12 avant de leur recommander l’achat de fonds distincts financé par un prêt à effet de levier, et ce, contrairement à la législation et réglementation applicables.

[93]      Dans les cinq (5) autres dossiers, l’Autorité reproche à Vladislav Adoniev d’avoir effectué une analyse de besoins financiers incomplète, avant de recommander à ses clients l’achat de fonds distincts toujours financé par un prêt à effet de levier.

[94]      L’inspecteur témoigne que l’analyse de besoins financiers pour ces cinq (5) clients ne comporte pas les renseignements importants, nécessaires et complets surtout afin de bien évaluer si l’achat de fonds distincts financé par un prêt à effet de levier convient aux clients. Il ajoute qu’il a constaté, entre autres, l’absence d’informations financières quant aux liquidités nettes des clients, sur les passifs, sur les obligations personnelles et familiales, sur le budget mensuel, sur la capacité d’emprunt, sur les revenus des clients et sur les actifs comme la résidence principale.

[95]      En effet le représentant doit recueillir, auprès de son client, des renseignements détaillés sur ses liquidités, ses dépenses mensuelles et sur ses autres obligations de prêt ou de dette afin d’établir les flux financiers du client et évaluer sa capacité d’emprunt et sa capacité de rembourser sans avoir à utiliser ses investissements. Le représentant devrait requérir du client un bilan financier[55].

[96]      La preuve présentée par l’Autorité permet au Tribunal de constater l’absence d’analyse de besoins financiers dans sept dossiers et que l’analyse de besoins financiers dans les cinq autres dossiers sont incomplètes.

[97]      Le Tribunal considère que les analyses sont incomplètes, parce qu’elles ne comportent pas des renseignements importants, nécessaires, complets et détaillés sur la situation financière des clients, tel que décrits dans les paragraphes ci-dessus ainsi que dans la LDPSF et sa réglementation, afin de permettre à Vladislav Adoniev de procéder à une analyse des besoins de ses clients et leur proposer ou non l’achat de fonds distincts financé par un prêt à effet de levier.

[98]      Le Tribunal conclut que Vladislav Adoniev a commis un manquement en omettant de préparer une analyse de besoins financiers pour sept (7) de ses clients et en omettant de préparer une analyse de besoins financiers complète pour ses cinq (5) autres clients.

B)           Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de conseiller et de recommander à ses clients des produits financiers qui respectent leur profil d’investisseur ou leur profil de risque?

[99]      L‘Autorité reproche à Vladislav Adoniev d’avoir manqué à son obligation de convenance[56]. Elle prétend qu’il a recommandé à ses clients des produits financiers qui ne respectent pas leur profil d’investisseur en assurance et leur tolérance au risque en épargne collective et sur le marché dispensé.

[100]   Tel que mentionné précédemment, l’évaluation de la convenance est l’une des obligations fondamentales que les représentants ont envers leurs clients[57].

[101]   Pour évaluer la convenance, le représentant doit préalablement remplir ses obligations liées à la connaissance du client et à la connaissance des produits financiers qu’il recommande. La connaissance du client et la connaissance des produits assurent que les produits financiers proposés conviennent à la situation du client. Pour évaluer la convenance, il doit utiliser l’ensemble des renseignements et de la documentation recueillis auprès du client.

[102]   Il doit ensuite exercer son jugement professionnel et déterminer quels produits financiers et quelles stratégies d’investissement conviendront à son client, tout en donnant préséance aux intérêts du client.

[103]   Alors, il doit tenir compte de l’analyse de ses besoins financiers, de ses objectifs de placement tout en respectant son profil d’investisseur ou son profil de risque.

[104]   Le profil d’investisseur résume ses objectifs financiers, sa situation financière, ses connaissances, son horizon de placement et sa tolérance au risque. Il est établi en fonction de ses objectifs d’épargne et est influencé par sa situation financière.

[105]   Cependant, le profil d’investisseur ou le profil de risque n’est pas le seul élément à considérer lors d’une analyse de la convenance d’un produit financier. En effet, l’évaluation de la convenance ne se fait pas uniquement en fonction du profil d’investisseur.

Fonds distincts

[106]   Le Tribunal constate qu’en dépit d’analyses de besoins financiers absentes ou incomplètes et de l’absence de renseignements importants, nécessaires, complets et détaillés sur la situation financière des clients, l’Autorité procède à l’analyse de la convenance des fonds distincts recommandés par Vladislav Adoniev à ses clients.

[107]   À la suite de cette analyse, l’Autorité reproche à Vladislav Adoniev d’avoir recommandé à ses clients des fonds distincts qui ne leur conviennent pas, parce qu’ils ne respectent pas leur profil d’investisseur.

[108]   L’inspecteur de l’Autorité témoigne au sujet de son analyse de la documentation trouvée dans les 12 Dossiers clients en assurance de Vladislav Adoniev. Il réfère le Tribunal aux tableaux qu’il a préparés[58] pour chaque dossier qui contiennent ses constatations. Celles-ci sont à l’effet que :

         dans deux (2) dossiers clients, les fonds distincts recommandés par Vladislav Adoniev ne respectent pas le profil d’investisseur des clients[59];

         dans deux (2) dossiers clients, il est impossible de déterminer si les fonds distincts recommandés respectent ou non le profil d’investisseur[60]; et

         dans huit (8) dossiers clients, le profil d’investisseur est respecté[61].

[109]   Il explique que dans le cadre d’une inspection, l’Autorité demande au cabinet de lui remettre les dossiers clients complets qu’elle a identifiés. Si des renseignements et des documents sont absents des dossiers reçus, il ne lui appartient pas de les demander, car c’est au cabinet qu’incombe l’obligation de tenir des dossiers complets et au représentant d’y consigner tous les documents et les renseignements recueillis[62].

[110]   Après avoir pris connaissance du contenu des tableaux préparés par l’inspecteur et des documents inclus dans chacun des Dossiers clients en assurance, le Tribunal constate que l’inspecteur semble avoir utilisé trois (3) méthodologies d’analyse différentes pour déterminer si les fonds distincts recommandés respectent ou non le profil d’investisseur des clients.

Analyse en comparant le résultat du profil d’investisseur avec le niveau de risque d’un fonds distinct[63]

[111]   Dans les deux (2) premiers dossiers, l’inspecteur témoigne que chacun des clients a acheté plusieurs fonds distincts, mais qu’il ne peut analyser l’ensemble des fonds pour « corroborer le respect du profil », parce qu’un seul aperçu de fonds se retrouve dans leur dossier respectif. Cependant, il procède quand même à l’analyse de ce seul aperçu.

[112]   Il déclare que dans un (1) dossier, l’aperçu indique que le fonds a un niveau de risque « Moderate » et dans l’autre dossier, le fonds a un niveau de risque « Medium ». Il les compare avec le profil d’investisseur de chacun des clients qui est établi à « High Growth »[64]. Il constate alors que le niveau de risque des fonds achetés par les clients et le profil d’investisseur ne correspondent pas. Selon lui, le niveau de risque du fonds doit correspondre au niveau de risque du profil d’investisseur.

[113]   En se basant sur cette constatation et sur le fait qu’il n’a trouvé aucune note dans les dossiers clients pour expliquer cet écart, il conclut que Vladislav Adoniev a recommandé à ses clients des fonds distincts qui ne leur conviennent pas, car ils ne respectent pas leur profil d’investisseur.

[114]   Le Tribunal remarque que ces deux dossiers contiennent un formulaire d’évaluation du profil d’investisseur qui a été complété pour chaque client. Ce formulaire précise que pour un profil d’investisseur établi à « High Growth », comme c’est ici le cas, les placements contenus dans le portefeuille du client devraient respecter la répartition d’actif recommandée, soit 90 % en actions et 10 % en biens[65].

[115]   Toutefois, l’inspecteur n’en fait aucune mention dans son témoignage. En effet, son analyse, qui porte uniquement sur la comparaison entre le profil d’investisseur et le niveau de risque du fonds, ne tient pas compte de la répartition d’actif recommandée pour le portefeuille des clients, selon leur profil d’investisseur qui se trouve dans leur dossier client.

[116]   Le Tribunal comprend, comme l’a mentionné l’inspecteur, que lorsqu’il analyse les Dossiers clients en assurance, il se base uniquement sur les renseignements et les documents qu’il trouve dans les dossiers. C’est pour cette raison que dans les deux (2) dossiers clients en question, l’inspecteur a limité son analyse uniquement au seul fonds distinct dont l’aperçu était au dossier, pour conclure qu’ils ne respectaient par le profil d’investisseur des clients, malgré qu’ils aient achetés plusieurs fonds distincts.

[117]   Cependant, tant les tableaux préparés par l’inspecteur que les dossiers des clients contiennent des renseignements reliés aux fonds distincts achetés par les clients, à la suite des recommandations de Vladislav Adoniev. On y retrouve tous les codes et les noms de ces fonds distincts, la répartition d’actif recommandé selon le profil d’investisseur « High Growth » ainsi que le pourcentage du capital total investi par fonds.

[118]   Le Tribunal constate la présence de nombreux renseignements dans les dossiers clients qui auraient permis d’effectuer une analyse plus approfondie. Néanmoins, seule une comparaison entre le niveau de risque « Moderate » et « Medium » d’un (1) seul fonds distinct par dossier avec le profil d’investisseur « High Growth » a été considérée pour conclure que ces deux (2) fonds ne respectaient pas le profil d’investisseur des clients.

 

Impossibilité d’analyse vu l’absence d’aperçu de fonds et de note explicative

[119]   Dans chacun des deux (2) autres dossiers, l’inspecteur témoigne que les clients ont acheté plusieurs fonds distincts recommandés par Vladislav Adoniev. Cependant, les dossiers ne contiennent aucun aperçu ni aucune notice explicative concernant ces fonds. À noter cependant qu’un (1) dossier contient un aperçu de fond, mais vu qu’il s’agit d’un fonds indiciel, l’inspecteur ne l’a pas analysé.

[120]   Il ajoute que les deux (2) dossiers contiennent un profil d’investisseur pour chaque client qui est établi à « Audacieux »[66]. Le formulaire de profil d’investisseur précise que pour ce type de profil, les placements contenus dans le portefeuille du client devraient respecter la répartition d’actif recommandée, soit 85 % en actions et 15 % en revenu avec certaines variantes possibles[67].

[121]   L’absence d’aperçu et de notice explicative l’amène à conclure qu’il lui est impossible de déterminer si les fonds distincts recommandés par Vladislav Adoniev respectent ou non le profil d’investisseur de ses clients.

[122]   Or, le Tribunal constate à nouveau que beaucoup de renseignements se trouvent dans les dossiers des clients[68] concernant les fonds distincts. Les dossiers contiennent tous les codes et les noms de tous les fonds distincts achetés par les clients, le pourcentage du capital total investi par fonds en plus de la répartition d’actif recommandé pour le portefeuille d’un client avec un profil « Audacieux ». À noter que tous ces renseignements se retrouvent également dans les tableaux préparés par l’inspecteur.

[123]   Malgré la disponibilité de ces renseignements, aucune analyse complète de l’ensemble de ces fonds n’a été effectuée.

Analyse du respect du profil d’investisseur au moyen de la répartition d’actif

[124]   Le Tribunal remarque que la méthodologie utilisée par l’inspecteur pour comparer le niveau de risque d’un fonds distinct avec le profil d’investisseur n’est pas la méthodologie utilisée pour les huit (8) autres dossiers clients[69].

[125]   En effet, dans trois (3) dossiers clients[70], on retrouve un formulaire d’évaluation du profil d’investisseur complété pour chaque client. Ce formulaire précise que pour un profil d’investisseur établi à « Audacieux », la répartition d’actif recommandée pour le portefeuille d’un client est 85 % en actions et 15 % en revenu, avec une variation possible de 0 % à 25 % en revenu et de 75 % à 100 % en actions.

[126]    Le Tribunal remarque que sur les tableaux préparés par l’inspecteur, il y est indiqué qu’un (1) seul aperçu de fonds se trouve dans chacun de ces trois dossiers. Sur ses tableaux, il y est inscrit pour chacun de ces dossiers, que le profil d’investisseur est respecté en considérant seulement la répartition d’actif. À noter que dans un de ces dossiers il y a un aperçu qui réfère au Fonds indiciel américain DAQ et que l’inspecteur conclut que le profil est respecté[71].

[127]   Le Tribunal remarque que cette méthodologie est différente de celle utilisée dans les autres dossiers. En effet, les tableaux de l’inspecteur indiquent que le profil d’investisseur est respecté, malgré l’existence d’une disparité entre le profil d’investisseur des clients établi à « Audacieux » et le niveau de risque « Moyen » des fonds distincts achetés par les clients.

[128]   Le Tribunal constate, encore une fois, qu’aucune analyse de l’ensemble des fonds distincts achetés par les trois (3) clients n’a pas été effectuée, malgré que les codes et les noms des fonds, le pourcentage du capital total investi par fonds et la recommandation de la répartition d’actifs pour un profil d’investisseur « Audacieux » sont dans les dossiers et sur les tableaux de l’inspecteur.

[129]   Le Tribunal constate dans les dossiers de cinq (5) autres clients[72] que tous les aperçus se trouvent dans les dossiers clients. Les tableaux de l’inspecteur indiquent que les fonds distincts achetés respectent le profil d’investisseur des clients en se basant sur la répartition d’actif. Il ne tient pas compte de la disparité entre le niveau de risque des fonds qui sont de « Moyen » à « Moyen-élevé » alors que les clients ont un profil d’investisseur « Audacieux ».

[130]   Finalement, l’inspecteur allègue que la disparité constatée entraîne un sous-investissement pour les clients. Toutefois le Tribunal note que tous les clients ont apposé leurs initiales à côté du niveau de risque mentionné sur le ou les aperçus de fonds qui se retrouvent dans leur dossier[73].

[131]   Après avoir entendu le témoignage de l’inspecteur et analysé la preuve, le Tribunal conclut que l’Autorité ne s’est pas déchargée de son fardeau de prouver par prépondérance de preuve que les fonds distincts recommandés par Vladislav Adoniev à ses clients ne respectent pas leur profil d’investisseur.

Épargne collective

[132]   LAutorité prétend que l’analyse des Dossiers clients en épargne collective et sur le marché dispensé de Vladislav Adoniev permet de constater des disparités, notamment, quant au profil de risque, aux objectifs d’investissements et sur le choix des placements qu’il a effectués.

[133]   Essentiellement, elle lui reproche d’avoir recommandé à ses clients des fonds communs de placement qui ne leur conviennent pas.

[134]   Le deuxième inspecteur témoigne de son analyse « à haut niveau » des six (6) Dossiers clients en épargne collective et sur le marché dispensé, reçus de Whitehaven à la demande de l’Autorité. Ces dossiers concernent des transactions réalisées par Vladislav Adoniev durant les mois de janvier, février et mars 2021.

[135]    Il ajoute qu’après avoir analysé les captures d’écran du logiciel VieFund[74] utilisé par Whitehaven, il constate que dans cinq (5) des six (6) Dossiers clients en épargne collective et sur le marché dispensé, les fonds communs recommandés par Vladislav Adoniev comportent des disparités avec le profil de risque des clients, tel que mentionné dans les systèmes de Whitehaven.

[136]   En effet, il explique que cette capture d’écran montre que les cinq (5) clients ont un profil de risque établi à « High 100% » et un objectif de placement établi à « Growth 100% ». C’est à partir de ces données qu’il procède à son analyse.

[137]   Il ajoute que son analyse consiste à comparer le niveau de risque des fonds communs de placement achetés durant la période visée par l’inspection avec le profil de risque des clients.

[138]   Durant cette analyse, il constate que le niveau de risque de la majorité des fonds communs achetés n’atteint pas la cible du profil de risque des clients établie à « High 100% » des clients. Dans les faits, les fonds communs de placement achetés par les cinq (5) clients, suite à la recommandation de Vladislav Adoniev, ont un niveau de risque allant de « Medium » à « Medium-High ».

[139]    Selon lui, pour atteindre la cible du profil de risque établi à « High 100% » des clients, Vladislav Adoniev aurait dû leur recommander uniquement l’achat de fonds communs dont le niveau de risque est « High ».

[140]   En se basant sur cette unique comparaison, il conclut que les clients seraient sous investis, parce que le niveau de risque des fonds achetés démontre une disparité avec leur profil de risque. Par conséquent, les fonds communs de placement que Vladislav Adoniev a recommandés à ses clients ne leur conviennent pas parce qu’ils ne respectent pas leur profil de risque.

[141]   L’inspecteur ajoute qu’en termes d’impact, il ne peut se prononcer, car les investissements sont sur un horizon de 20 ans. Cependant, il craint que le rendement des fonds communs de placement achetés ne rencontre pas les objectifs de placement que les clients ont établis avec Vladislav Adoniev, à « Growth 100% ».

[142]   L’Instruction générale relative à 31-103[75] précise que si le profil de risque du client est un élément essentiel de l’information le concernant, l’utilisation du niveau de risque d’un titre comme unique facteur de l’évaluation de la convenance n’est pas suffisant en soi pour remplir ses obligations prévues au Règlement 31-103[76].

[143]   D’ailleurs dans la décision Dean Evans, le Tribunal est d’avis que :

« [324]   Puisqu’il est reconnu dans le domaine des valeurs mobilières que la convenance ne se fait pas seulement à partir d’un formulaire et que l’experte elle-même mentionne l’importance de bien connaître individuellement chacun de ses clients et de les rencontrer en privé pour discuter de convenance, le Tribunal ne voit pas comment il peut établir la non-convenance des recommandations des intimés juste à partir de formulaires et sans connaître la situation des personnes concernées. »[77]

[144]   Le Tribunal est d’avis que l’analyse de la convenance des fonds communs que Vladislav Adoniev a recommandée à ses clients ne doit pas s’appuyer uniquement sur leur niveau de risque. Ainsi, la disparité entre le niveau de risque des fonds communs et le profil de risque des clients constatée par l’inspecteur ne permet pas à elle seule de conclure que les fonds communs ne conviennent pas aux clients.

[145]   Après avoir entendu le témoignage de l’inspecteur et analysé la preuve, le Tribunal conclut que l’Autorité ne s’est pas déchargée de son fardeau de prouver par prépondérance de preuve que Vladislav a recommandé à ses cinq (5) clients des fonds communs de placements qui ne respectent pas leur profil de risque.

C)           Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de respecter les ratios de prêt et d’endettement de ses clients lorsqu’il leur a conseillé de contracter un prêt à effet de levier pour l’achat de fonds distincts?

[146]   L’Autorité reproche à Vladislav Adoniev d’avoir conseillé à ses clients une stratégie de placement qui implique de contracter un prêt à effet de levier pour acheter des fonds distincts[78], alors que leurs ratios de prêt et leur ratio d’endettement étaient supérieurs aux meilleures pratiques élaborées par l’Autorité dans l’Avis de l’Autorité concernant les prêts à effet de levier (« l’Avis de l’Autorité »)[79].

[147]   Cette stratégie appelée « prêt à effet de levier » consiste à emprunter de l’argent pour l’investir dans l’achat de produits financiers. Elle est utilisée par les investisseurs qui espèrent accroître leur avoir net grâce à de l’argent emprunté et atteindre leurs objectifs financiers plus rapidement.

[148]   Cette stratégie comporte toutefois des risques. En augmentant la possibilité de gain, elle augmente également la possibilité de perte, en cas de fluctuation des marchés.

[149]    Lorsque le représentant conseille à ses clients un prêt à effet de levier, il doit s’assurer que cette méthode de financement leur convient et qu’elle donne préséance à leurs intérêts. Il doit également s’assurer que leur situation financière est saine, c’est-à-dire qu’ils seront en mesure de rembourser le montant emprunté et les intérêts, sans avoir besoin de piger dans leurs revenus de placement.

[150]   Pour ce faire, il doit, en plus de recueillir, auprès de ses clients, les renseignements nécessaires pour satisfaire à son obligation de connaissance du client, s’assurer de recueillir suffisamment de renseignements additionnels pour évaluer la convenance de l’utilisation d’un prêt à effet de levier.

[151]   Ces renseignements additionnels lui permettront de s’assurer de bien connaître la valeur des liquidités de ses clients, ses dépenses mensuelles, ses autres obligations de prêt ou de dette ainsi que tout autre élément de nature à influencer ou à agir sur son flux financier. Il devrait également exiger de ses clients un bilan financier complet et détaillé[80].

[152]   L’inspecteur témoigne que les 12 Dossiers clients en assurance contiennent la preuve que chaque client a contracté un prêt à effet de levier pour l’achat de fonds distincts[81].

[153]   Il réfère le Tribunal aux tableaux qu’il a préparés qui contiennent son analyse et ses constatations sur la convenance des prêts à effet de levier contractés par les clients en regard des renseignements financiers contenus dans leur dossier.

[154]   Il explique que son analyse des 12 dossiers clients démontre que Vladislav Adoniev n’a pas recueilli suffisamment de renseignements pour évaluer, dans tous les dossiers, si l’utilisation d’un prêt à effet de levier convient à ses clients. Seuls quatre (4) dossiers clients ont pu être analysés.

[155]   En utilisant les ratios énoncés dans l’Avis de l’Autorité et les renseignements contenus dans quatre dossiers clients, il procède à son analyse et constate que :

         un (1) prêt ne respecte ni les ratios de prêt ni le ratio d’endettement[82];

         trois (3) prêts respectent les ratios de prêt, mais pas le ratio d’endettement[83].

[156]   Il conclut que dans ces quatre (4) dossiers, l’utilisation de prêt à effet de levier ne convient pas aux clients, parce que les ratios de prêt et le ratio d’endettement sont largement supérieurs aux recommandations prévues à l’Avis de l’Autorité.

[157]   En ce qui concerne les huit (8) autres dossiers, l’absence de renseignement adéquat sur la situation financière et globale des clients ne lui permet pas d’analyser ces dossiers. Il lui est donc impossible de conclure si les prêts à effet de levier respectent ou non les ratios de prêt et le ratio d’endettement des clients et de déterminer si cette méthode de financement leur convient ou pas.

[158]   De plus, ces dossiers clients ne contiennent aucune documentation pour expliquer le fondement de la recommandation de Vladislav Adoniev d’utiliser le prêt à effet de levier comme méthode de financement pour l’achat de fonds distincts.

[159]   En premier lieu, le Tribunal constate, concernant les ratios de prêt et le ratio d’endettement, que l’Avis de l’Autorité mentionne que :

 « Généralement, un prêt pour l'achat d'un placement ne devrait pas dépasser 30 % de la valeur nette[84] du client et 50 % de sa valeur nette liquide[85]. De plus, l'endettement total du client ne devrait pas excéder 35 % de ses revenus totaux (excluant les revenus provenant de son placement). »

[160]   Par cet Avis, l’Autorité énonce ce qu’elle considère être les meilleures pratiques à suivre pour les cabinets, les courtiers et les représentants lorsqu’ils conseillent à leurs clients d’emprunter pour investir dans des fonds communs ou des fonds distincts.

[161]   En effet, lors de l’application des meilleures pratiques proposées dans l’Avis de l’Autorité, cette dernière prend soin de préciser que le représentant a une certaine latitude :

« Dans certains cas, on pourrait dépasser ces seuils, mais il faudrait que le représentant exerce un jugement éclairé avant de permettre à son client d’utiliser l’effet de levier. »[86]

[162]   Selon la preuve présentée, le Tribunal est d’avis qu’à première vue, l’endettement de certains clients semble dépasser largement leur capacité de remboursement des prêts contractés. Toutefois, l’absence de renseignements financiers nécessaires pour établir une analyse de besoins financiers complète et l’absence de renseignements supplémentaires suffisamment détaillés pour conseiller l’utilisation de prêt à effet de levier n’ont pas permis à l’inspecteur d’analyser adéquatement si cette méthode de financement convient ou pas aux clients.

[163]   Le Tribunal est d’avis qu’il incombe à Vladislav Adoniev, lorsqu’il conseille une méthode de financement par l’entremise de prêts à effet de levier, de s’assurer qu’elle convient à ses clients. Ainsi, il doit s’assurer que ses clients ont une situation financière saine et les liquidités requises pour rembourser le prêt contracté et les intérêts convenus sans qu’ils aient besoin de piger à même leurs placements, qu’il y ait ou non une baisse des marchés et que les rendements sont inférieurs au taux d’emprunt.

[164]   Pour ce faire, encore une fois aurait-il fallu que les Dossiers clients en assurance comportent une analyse de besoins financiers ou une analyse de besoins financiers complétée adéquatement, ainsi qu’un bilan financier complet de ses clients, incluant tant les passifs que les actifs, en plus de tout élément qui lui aurait permis de connaître la valeur de leurs liquidités, leurs dépenses mensuelles et tout autre élément de nature à agir sur leurs flux financiers, mais ce ne fut pas le cas.

[165]     En raison de l’utilisation de cette méthode de financement, le représentant doit faire preuve davantage de diligence dans sa cueillette de renseignements pour s’assurer qu’elle convient à ses clients.

[166]   Dans la décision Wang[87], le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière se penche sur l’importance, pour un représentant, de recueillir toute information pertinente qui lui permet de recommander l’achat d’un fonds distinct en utilisant le mécanisme du prêt à effet de levier :

 « [264] Sans une collecte d’informations pertinentes complète permettant de bien connaître ses clients, dont notamment leur budget et coût de vie, leur bilan (actifs/ passifs) ainsi que la tolérance au risque de chacun, l’intimé ne pouvait porter un jugement éclairé pour déterminer combien ils pouvaient emprunter et si la stratégie leur convenait. »

[167]   Le Tribunal constate l’absence dans les Dossiers clients en assurance de renseignements financiers importants, nécessaires et complets, dont les analyses de besoins financiers. Il constate de plus l’absence de renseignements pour évaluer la capacité d’emprunt des clients (un bilan financier complet incluant les passifs que les actifs) ainsi que l’absence de renseignements pour évaluer leur capacité de remboursement (les liquidités, les dépenses mensuelles, les autres prêts, les dettes et tout autre élément de nature à agir sur leurs flux financiers). Tous ces renseignements sont nécessaires pour recommander l’utilisation de prêts à effet de levier. Le Tribunal constate également l’absence de documentation et de notes de suivi aux dossiers.

[168]   Le Tribunal est d’avis que ces absences de renseignements rendent impossible l’évaluation de la convenance des prêts à effet de levier pour les clients, et ce, que ce soit en utilisant les seuils prévus au ratio de prêt et au ratio d’endettement suggérés par l’Avis de l’Autorité ou quel qu’autre seuil que ce soit qui aurait pu être utilisé par Vladislav Adoniev suivant son jugement éclairé et qui aurait été documenté.

[169]   En raison du manque de renseignements financiers importants, nécessaires et complets pour permettre d’évaluer les ratios de prêt et le ratio d’endettement, la preuve présentée par l’Autorité basée sur les renseignements trouvés dans les quatre (4) dossiers ne permet pas au Tribunal d’évaluer et de conclure si les prêts à effet de levier conviennent ou non aux clients et par conséquent, à l’existence d’un manquement de Vladislav Adoniev lorsqu’il a conseillé à ses clients l’utilisation de prêts à effet de levier pour l’achat de fonds distincts.

Question no 2 : Infinitum, Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev ont-t-il fait défaut de s’assurer de tenir les dossiers clients conformément à la LDPSF et à ses règlements?

Conclusion

[170]   Le Tribunal conclut qu’Infinitum, Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev ont commis des manquements en faisant défaut de s’assurer que les dossiers clients soient tenus conformément à la LDPSF et à ses règlements.

Droit applicable

[171]   En vertu de la LDPSF[88], un cabinet a l’obligation de tenir des dossiers pour chacun de ses clients conformément aux règlements.

[172]   Pour permettre au cabinet de se conformer à cette obligation, son dirigeant responsable doit s’assurer que les représentants respectent les exigences de la LDPSF et de ses règlements.

[173]   Ainsi, le représentant joue un rôle majeur en s’assurant de bien documenter les dossiers de ses clients. Le représentant qui documente bien ses dossiers en facilite leur compréhension. Cette documentation lui permet, notamment, de justifier les stratégies qu’il propose ainsi que ses recommandations.

[174]   Le Tribunal rappelle les obligations énoncées à la réglementation lesquelles prévoient que le représentant doit consigner par écrit dans un document, tous les renseignements qu’il a recueillis du client pour analyser ses besoins[89]. Ce document doit se retrouver au dossier du client.

[175]   Il doit également remettre avec le contrat individuel à capital variable par lequel le client a acheté des fonds distincts plusieurs renseignements[90], qui doivent également se trouver au dossier du client.

[176]   Un contrat individuel à capital variable est un contrat individuel d’assurance sur la vie comprenant un contrat constitutif de rente ou d’engagement de verser une rente. Le titulaire du contrat verse des cotisations ou des primes dans les fonds distincts de son choix.

[177]   Le dossier individuel de chacun des clients doit contenir, entre autres, ses renseignements nominatifs, personnels et de base, une description et le mode de paiement des produits vendus ou des services rendus, des informations quant au représentant et son mode de rémunération[91].

[178]   Il doit contenir de plus, une analyse de besoins financiers pour chaque client[92], des confirmations de placement[93], les divulgations de risque afférent à la souscription des fonds distincts[94] ainsi que tout autre renseignement ou document recueillis auprès du client, découlant des produits vendus ou des services rendus[95].

[179]   Les bonnes pratiques en matière d’assurance de personnes recommandent que le dossier client contienne plusieurs autres informations, dont principalement les propositions de placement et de revenu concernant les fonds distincts, la documentation à l’appui d’un prêt à effet de levier, les relevés annuels, le questionnaire établissant le profil d’investisseur, les projections et planification de retraite, un rapport sur la répartition de l’actif, les recommandations et les mises en garde, la motivation d’un client de suivre ou ne pas suivre les recommandations du représentant, la preuve de remise des documents exigés par la LDPSF et ses règlements, un sommaire complet des discussions et des rencontres avec le client, tous les échanges de correspondance avec le client (courriel, lettre, textos, etc.) et les notes de toutes tentatives d’entrer en communication avec le client, les mises à jour de l’information, les suivis effectués et les prochaines démarches convenues avec le client[96].

[180]   De plus, le Règlement sur les renseignements à fournir au consommateur[97] prévoit une section qui s’applique au « Contrat individuel à capital variable ».

[181]   Ainsi, ce règlement prévoit spécifiquement les informations et documents que le représentant doit fournir à tout client intéressé par un tel placement.

[182]    Plus particulièrement, le Règlement sur les renseignements à fournir au consommateur prévoit que :

« 4.16. Le représentant doit, préalablement à la signature par un client d’une proposition relative à un contrat individuel à capital variable, lui remettre un exemplaire de la version la plus à jour de la notice explicative afférente à ce contrat et, le cas échéant, de tout addenda s’y rapportant. Il remet en outre les aperçus du fonds relatifs aux fonds distincts sélectionnés en vertu de ce contrat, lorsque ceux-ci ne sont pas intégrés à la notice explicative. […] »

[183]   Par ailleurs, le Tribunal rappelle que dans tous les Dossiers clients en assurance, les clients ont investi par l’entremise d’un prêt à effet de levier pour financer l’achat des fonds distincts.

Application du droit aux faits

[184]   L’Autorité reproche à Infinitum, à son dirigeant responsable Andrei Crivoi et à son représentant Vladislav Adoniev de ne pas avoir tenu les dossiers clients conformément à la LDPSF et à sa réglementation.

[185]   Le premier inspecteur témoigne que l’analyse des Dossiers clients en assurance lui a permis de constater que plusieurs renseignements et documents requis par la LDPSF et sa réglementation étaient absents dans les dossiers clients de Vladislav Adoniev.

[186]   Il explique, entre autres, en référant aux tableaux qu’il a préparés[98], qu’en plus de l’absence de renseignements financiers importants, nécessaires et complets, d’analyse de besoins financiers absente ou incomplète, d’absence de notes explicatives et d’aperçus dans la majorité des dossiers, les dossiers clients ne contiennent aucun courriel entre le représentant et les clients concernant les placements proposés, aucune documentation ou note adéquate pour justifier l’utilisation de prêt à effet de levier, aucune confirmation de placement, aucun document pour appuyer certains renseignements financiers et aucune note de suivis ponctuels.

[187]   Il ajoute qu’Infinitum et son dirigeant responsable Andrei Crivoi, principalement en charge de la conformité au sein d’Infinitum, ont l’obligation de veiller à la discipline de Vladislav Adoniev et de s’assurer qu’il agisse en conformité avec la LDPSF et sa réglementation[99].

[188]   De plus, Infinitum avait l’obligation de tenir les dossiers de chaque client en conformité avec la réglementation[100] et avait aussi l’obligation de veiller à ce que son dirigeant responsable agisse en conformité avec la LDPSF et sa réglementation[101].

[189]    La preuve présentée au Tribunal lui permet de conclure que Vladislav Adoniev a omis:

a)     de préparer des analyses de besoins financiers et de les consigner aux dossiers clients, tel que requis par le Règlement sur l’exercice des activités des représentants et le Règlement sur le cabinet[102];

b)     d’inclure dans la majorité dossiers clients les notes explicatives et les aperçus de fonds distincts, tel que requis par le Règlement sur les renseignements à fournir au consommateur[103];

c)     d’inclure aux dossiers clients la confirmation de placement par les clients[104] contrairement au Règlement sur le cabinet; et

d)     d’inclure dans les dossiers clients des documents, des renseignements et des notes qui découlent des produits vendus et services rendus, tel que requis par le Règlement sur le cabinet[105].

[190]   Le Tribunal conclut que ces omissions de Vladislav Adoniev démontrent une tenue déficiente des dossiers clients et un manque de compétence et de professionnalisme, ce qui constituent des manquements à la LDPSF et sa réglementation[106].

[191]   Le Tribunal conclut qu’Infinitum et son dirigeant responsable Andrei Crivoi ont manqué à leur obligation de tenir les dossiers clients conformément à la LDPSF et à sa réglementation et qu’ils ont manqué à leur obligation de s’assurer que Vladislav Adoniev documente ses dossiers clients comme le requièrent la LDPSF et sa réglementation, en exerçant une supervision déficiente de ses activités.

[192]   Le Tribunal conclut qu’Infinitum a fait défaut de s’assurer que son dirigeant responsable Andrei Crivoi se conforme à la LDPSF et sa réglementation[107] en exerçant une supervision déficiente de la tenue des dossiers de Vladislav Adoniev.

Question no 3 : Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev ont-ils effectué des représentations non conformes relativement à leur mode d’exercice, leur rattachement à un cabinet d’assurance ainsi qu’à leur adresse professionnelle?

Conclusion

[193]   Le Tribunal conclut qu’Andrei Crivoi a commis un manquement en omettant de divulguer son mode d’exercice, de représentant autonome, ainsi qu’en s’identifiant à un cabinet auquel il n’est pas rattaché.

[194]   Le Tribunal conclut que Vladislav Adoniev a commis un manquement en déclarant être un représentant de plusieurs cabinets auxquels il n’est pas rattaché et en indiquant des adresses autres que celle du cabinet auquel il est rattaché.

Droit applicable

[195]   Tant le Règlement sur le cabinet que le Règlement sur l’exercice des activités des représentants[108] prévoient clairement l’obligation pour le cabinet et pour le représentant de s’abstenir de faire des représentations qui peuvent prêter à confusion.

[196]   Le cabinet doit dans ses représentations utiliser le nom qu’il utilise et qui a été déclaré à l’Autorité ainsi que le titre sous lequel il exerce ses activités[109].

[197]   Le représentant doit se présenter sous le nom inscrit sur son certificat, indiquer son adresse d’affaires et ses coordonnées, telles qu’inscrites auprès de l’Autorité. Il doit également indiquer son mode d’exercice (rattaché à un cabinet ou représentant autonome) et le titre sous lequel il exerce ses activités[110].

[198]   Vladislav Adoniev détient un certificat en assurance de personnes et est rattaché au cabinet Infinitum pour exercer ses activités professionnelles[111]. Il doit donc se présenter comme conseiller en sécurité financière[112] qui agit pour le compte du cabinet Infinitum et doit donner l’adresse d’affaires d’Infinitum à partir de laquelle il exerce ses activités.

[199]   Andrei Crivoi détient un certificat en assurance de personnes et exerce comme représentant autonome. Il doit se présenter comme conseiller en sécurité financière et indiquer qu’il est représentant autonome. Il doit également donner l’adresse et les coordonnées du lieu à partir duquel il fait affaires et qui ont été déclarés à l’Autorité.

Application du droit aux faits

[200]   L’Autorité reproche à Vladislav Adoniev et à Andrei Crivoi d’avoir effectué des représentations non conformes quant à leur mode d’exercice, leur rattachement à un cabinet d’assurance ainsi qu’à leur adresse professionnelle.

[201]   Le premier inspecteur témoigne que Vladislav Adoniev est inscrit auprès de l’Autorité dans la discipline de l’assurance de personnes et exerce des activités pour le cabinet Infinitum situé sur la rue Pearl à Salaberry-de-Valleyfield.

[202]   Il ajoute que son analyse des Dossiers clients en assurance lui a permis de constater que Vladislav Adoniev s’est présenté de façon différente de celle qu’il a déclarée à l’Autorité.

[203]   En effet, il s’est présenté à maintes reprises dans les dossiers clients comme exerçant ses activités pour le cabinet Aurrea Signature Inc., en y mentionnant une autre adresse et d’autres coordonnées que celles d’Infinitum[113].

[204]   Quant à Andrei Crivoi, l’inspecteur témoigne que sa carte d’affaires n’indique pas son mode d’exercice qui est représentant autonome, mais indique plutôt qu’il serait rattaché aux cabinets Aurrea Signature et Pro Vie Assurance[114].

[205]   De plus, dans les courriels échangés avec l’Autorité, il se présente de façon qui prête à confusion, en omettant également d’indiquer son mode d’exercice de représentant autonome et en indiquant le nom du cabinet « Aurrea Signature – Cabinet de service Financière (sic) », sous sa signature, laissant croire erronément qu’il est rattaché à ce cabinet, alors que ce n’est pas le cas[115].

[206]   Il conclut que tant Vladislav Adoniev qu’Andrei Crivoi se sont présentés de façon non conforme et en créant de la confusion.

[207]   Le Tribunal a révisé la documentation produite en preuve qui démontre que dans la majorité des Dossiers clients en assurance, Vladislav Adoniev s’est présenté à titre de représentant de cabinets auxquels il n’est pas rattaché, qu’il s’agisse des sommaires du portefeuille du client, formulaires d’institutions financières et autres documents.

[208]   Plus précisément, le Tribunal constate que les Dossiers clients en assurance contiennent des formulaires provenant de différentes institutions financières qui ont été complétés par Vladislav Adoniev pour acheter des fonds distincts, pour solliciter un emprunt ou pour octroyer une hypothèque sur rente.

[209]    Sur ces formulaires, il est indiqué que Vladislav Adoniev agit comme représentant non seulement pour Aurrea Signature Inc., mais pour IDCWIN Aurrea Signature Inc. et aussi pour IDC Worldsource Ins Network inc., alors que la preuve démontre que Vladislav Adoniev n’est rattaché qu’à un seul cabinet soit Infinitum.

[210]   De plus, les adresses d’affaires de Vladislav Adoniev qui y sont mentionnées ne correspondent pas à celle d’Infinitum[116]. Il est à noter que ces formulaires sont signés par Vladislav Adoniev ou portent ses initiales.

[211]   Pour sa part Vladislav Adoniev a témoigné que lorsqu’il distribue les produits de « Manuvie », il utilise les formulaires préimprimés que Manuvie met à sa disposition. Il ajoute que Manuvie a déjà complété la section relative à ses informations professionnelles en tant que représentant, et ce, préalablement à leur utilisation. C’est pourquoi il explique n’avoir aucun contrôle sur les informations préimprimées sur ce formulaire.

[212]   Le Tribunal est d’avis que même s’il s’agit de formulaires préimprimés et précomplétés par Manuvie, le représentant ne doit pas accepter de compléter des demandes pour des clients sur des formulaires qui contiennent des informations erronées, fausses et trompeuses.

[213]   De surcroît, le Tribunal n’a retrouvé dans les Dossiers clients en assurance concernés aucune trace de quelque tentative ou initiative que ce soit, tant de la part de Vladislav Adoniev que de son superviseur d’Andrei Crivoi, pour rectifier la situation auprès des institutions financières et pour corriger les informations erronées qui s’y trouvent. Mais le plus crucial, c’est que les dossiers clients ne contiennent non plus aucune information de démarches qui auraient dû être entreprises pour aviser les clients du véritable nom et de l’adresse du cabinet auquel Vladislav Adoniev se rattache.

[214]   Le Tribunal conclut que Vladislav Adoniev a fait des représentations fausses et trompeuses à ses clients et aux institutions financières dont il distribue les produits financiers. Ces représentations prêtent à confusion quant au nom et à l’adresse du cabinet auquel il est rattaché et pour lequel il agit. Il s’agit d’un manquement grave à ses obligations de se représenter conformément à la LDPSF et à sa réglementation ainsi qu’à celles d’agir avec honnêteté, loyauté, compétence et professionnalisme[117].

[215]   En ce qui concerne Andrei Crivoi, le Tribunal conclut qu’il a fait des représentations fausses et trompeuses en omettant de divulguer son mode d’exercice de représentant autonome dans plusieurs courriels échangés avec l’Autorité[118] ainsi qu’en s’identifiant à un cabinet auquel il n’est pas rattaché dans un document de sollicitation[119]. Ces représentations prêtent à confusion et induisent en erreur les clients et les personnes avec qui il transige.

Question no 4 : Infinitum et Andrei Crivoi ont-ils fait défaut d’assurer (a) une supervision générale et (b) une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev?

Conclusion

[216]      De l’avis du Tribunal, Infinitum et Andrei Crivoi ont fait défaut d’assurer une supervision générale des activités de Vladislav Adoniev, en n’adoptant pas des politiques et procédures de contrôle et de surveillance des activités des représentants convenables et suffisamment élaborées. Plus particulièrement, ils ont fait défaut d’adopter des politiques permettant d’encadrer l’utilisation des prêts à effet de levier et permettre d’effectuer l’évaluation et l’approbation préalable des recommandations d’emprunt.

[217]      Infinitum et Andrei Crivoi ont également fait défaut d’assurer une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev en omettant de s’assurer que Vladislav Adoniev respecte la législation et la réglementation applicables à l’exercice de ses activités, et ce, contrairement aux obligations prévues dans l’Engagement de supervision signé par Andrei Crivoi et celles prévues dans la Déclaration de supervision stricte.

a)    Infinitum et Andrei Crivoi ont-ils fait défaut d’assurer une supervision générale des activités de Vladislav Adoniev?

Droit applicable

Supervision générale par le cabinet et le dirigeant responsable

[218]      Tel que déjà mentionné en réponse à la deuxième question en litige, le cabinet et ses dirigeants veillent à la discipline de leurs représentants et s’assurent qu’ils agissent conformément à la LDPSF et à ses règlements[120]. Le cabinet veille également à ce que ses dirigeants et employés agissent conformément à la LDPSF et à ses règlements[121].

[219]      Le cabinet et le dirigeant responsable du cabinet exercent des rôles et des fonctions qui ne doivent pas être pris à la légère. Il n’y a aucune place pour quelques formes de laxisme ou même de lenteur dans l’exercice de leur rôle de gardien de la conformité. Ils ont l’obligation de s’assurer que les représentants respectent l’intégralité de la LDPSF et de ses règlements.

[220]      Le Tribunal réfère à la décision Autorité des marchés financiers c. 9218-6006 Québec inc. (Assurancia Groupe Tardif SF)[122], dans laquelle il décrit le rôle du cabinet et du dirigeant responsable de la façon suivante :

[83] « Un cabinet d’assurance et son dirigeant responsable doivent être capables, en tout temps, d’exercer leur jugement d’une manière indépendante et ils doivent avoir la compétence nécessaire pour déterminer si une proposition d’affaires et son modus operandi - relié à la sollicitation et à la vente de produits d’assurance au public - respectent l’intégralité de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et de ses règlements d’application. »

[221]      Comme le précise l’Autorité[123], la conformité est la responsabilité de tous dans un cabinet. Toutefois, il appartient au dirigeant responsable d’y porter une attention particulière, surtout s’il est la personne principalement responsable de la conformité du cabinet.

[222]      Toujours selon l’Autorité, le dirigeant responsable doit avoir pour mandat de veiller à :

         établir, maintenir et réviser périodiquement les politiques et procédures de conformité;

         appliquer ces politiques et procédures;

         effectuer des suivis plus stricts en cas de lacunes importantes;

         porter dès que possible à la connaissance de la haute direction ou du conseil d’administration les lacunes qui présentent un risque important pour l’inscrit, notamment celles qui sont récurrentes ou qui sont de nature à causer préjudice au client;

         présenter à la haute direction ou au conseil d’administration un rapport annuel sur la conformité des activités de l’inscrit.

[223]      Les obligations du cabinet et du dirigeant responsable ne sont pas tributaires de la taille du cabinet. D’ailleurs, une décision du Tribunal confirme que même dans le cas d’un cabinet de petite taille, le dirigeant responsable doit exercer l’ensemble de ses fonctions et est tenu aux mêmes obligations, car, « […] un client a droit au même niveau de protection que le cabinet soit petit ou qu’il soit grand. »[124]

[224]      Si le dirigeant responsable ne se sent pas à la hauteur de cette importante fonction, il ne devrait, sous aucune considération, accepter une telle responsabilité.

[225]      Pour occuper ce poste d’une importance capitale, la personne choisie doit avoir une connaissance approfondie des lois et des règlements qui s’appliquent aux disciplines dans lesquelles exercent les représentants supervisés, et de l’avis du Tribunal, la personne doit avoir une connaissance approfondie de l’industrie en général.

[226]      La personne qui agit comme dirigeant responsable doit également avoir le temps et la disponibilité nécessaires pour exercer ses fonctions. Cette personne doit avoir l’autorité requise pour intervenir auprès des représentants et s’assurer qu’ils respectent ses instructions et les correctifs demandés. Il n’y a pas de place à une quelconque complaisance dans la fonction de dirigeant responsable.

[227]      Dans une décision de la Cour du Québec, en appel d’une décision du Tribunal [125], voici comment la Cour décrit les habiletés nécessaires d’un dirigeant responsable d’un cabinet : « Il n’est pas inconséquent de requérir d’un dirigeant et responsable d’un cabinet un degré supérieur de professionnalisme, de compétence et de probité. »

[228]      Afin de s’assurer que les représentants adoptent une conduite conforme à la législation applicable, il est primordial pour un cabinet et son dirigeant responsable de mettre en place des mécanismes de contrôle et de surveillance des activités des représentants.

[229]       Ces mécanismes sont composés de plusieurs mesures distinctes, dont notamment, l’adoption de politiques et de procédures qui expliquent clairement les attentes du cabinet sur la façon dont un représentant doit exercer son droit de pratique. Ces mécanismes doivent également prévoir des mesures qui assurent la supervision des représentants afin d’éviter des manquements à la loi et aux règlements.

Application du droit aux faits

Les politiques et procédures d’Infinitum

[230]      L’Autorité reproche à Infinitum et à son dirigeant responsable, Andrei Crivoi, d’avoir fait défaut d’assurer une supervision générale des activités de Vladislav Adoniev, notamment en raison des politiques et procédures incomplètes et de mesures de contrôle interne inadéquates.

[231]      Lors de l’instruction, le premier inspecteur de l’Autorité témoigne que la supervision de Vladislav Adoniev par Infinitum et Andrei Crivoi était déficiente.

[232]      Bien qu’Infinitum ait adopté des politiques et procédures internes[126], l’inspecteur ajoute qu’elles sont incomplètes, car plusieurs sujets d’importance sont absents.

[233]      À titre d’exemple, il souligne qu’Infinitum ne dispose d’aucune politique ni d’aucune procédure à l’intention du personnel chargé de la surveillance des représentants.

[234]      Le Tribunal constate l’existence de politiques comportant des obligations d’ordre général. À titre d’exemple, le Tribunal réfère à la politique sur « L’éthique et la déontologie » dans lequel on retrouve la mention suivante :

 « Nos conseillers doivent toujours suivre les règlements des autorités financières comme l’Autorité des marchés financiers et la Chambre de la sécurité financière.

Nous vérifions les dossiers des représentants afin de nous assurer que les règles sont bien respectés (sic).

Dans l’éventualité qu’un représentant ne respecte pas les règles, il sera congédié »[127]. [Emphase ajoutée]

[235]      Le Tribunal constate qu’Infinitum a adopté une politique intitulée « Politique encadrant la pratique des représentants rattachés à Infinitum Succession et Patrimoine » qui prévoit la procédure de vente à suivre[128].

[236]      Plus spécifiquement, cette Politique prévoit une section intitulée « Procédure de vente » dans laquelle il y est fait mention que le représentant doit, au plus tard à la livraison de la police, verser au dossier client dans un système de « back office », l’intégralité de son dossier.  Ce dernier doit notamment inclure l’analyse de besoins financiers datée, signée et complétée qui doit contenir la cueillette complète de toute l’information pertinente, doit faire état des recommandations du représentant, l’instruction du client et la justification, si client ne les suit pas[129].

[237]      Il existe également une politique intitulée « La conformité des transactions » portant sur la révision des transactions par le chef de la conformité qui se lit comme suit :

« Chaque transaction est inspectée par notre chef de conformité qui est le dirigeant responsable du cabinet. Nous avons en place un registre de vente que le chef de conformité indique si tous les documents ont été ajoutés comme : l’analyse des besoins financiers, les préavis de remplacement, l’illustration, la déclaration du proposant et le profil d’investisseur.

 Notre chef de conformité s’assure également que la recommandation correspond aux besoins des clients. »[130] [Emphase ajoutée]

[238]      De l’avis du Tribunal, malgré l’existence de ces politiques entourant la vente de produits financiers et l’encadrement offert par le dirigeant responsable, Infinitum et Andrei Crivoi ne les ont pas appliquées ou ne les ont pas appliquées correctement. Ils ne se sont pas assurés de superviser adéquatement Vladislav Adoniev afin qu’il se conforme à ses obligations et respecte la législation applicable.

[239]      Contrairement aux politiques d’Infinitum, Vladislav Adoniev a omis de préparer et de compléter adéquatement une analyse de besoins financiers préalablement à la vente de fonds distincts à ses clients. Vladislav Adoniev a fait défaut de tenir des dossiers clients conformément à la LDPSF et à ses règlements. Vladislav Adoniev a également effectué des représentations non conformes relativement à son mode d’exercice, à son rattachement à un cabinet d’assurance ainsi qu’à son adresse professionnelle.

[240]      Le Tribunal rappelle que :

« la supervision adéquate […] des représentants et stagiaires au sein d’un cabinet ne sont pas […] des formalités encombrantes et inutiles et elles doivent être prises au sérieux par les inscrits. Ces obligations visent la protection des clients du cabinet et du public et ces derniers sont en droit de s’attendre à ce que ces fonctions soient exécutées avec sérieux et rigueur. »[131]

[241]      La preuve permet au Tribunal de conclure qu’Infinitum et Andrei Crivoi ont fait défaut d’assurer une supervision des activités de Vladislav Adoniev dans la discipline de l’assurance de personnes, qu’ils n’ont pas appliqué les propres politiques et procédures d’Infinitum, même si celles-ci ne sont pas très élaborées et n’ont pas respecté la LDPSF et ses règlements.

L’existence de politiques et procédures spécifiques à l’utilisation des prêts à effet de levier

[242]      Lors de son témoignage, le premier inspecteur souligne qu’Infinitum ne dispose d’aucune politique ni d’aucune procédure à l’intention du personnel chargé de la surveillance des représentants concernant l’obligation d’évaluer et d’approuver les recommandations d’emprunt. L’inspecteur rappelle l’importance d’une telle politique.

[243]      Effectivement, l’Autorité soutient qu’il est impératif qu’Infinitum se dote d’une procédure spécifique afin d’encadrer l’achat de fonds distincts financé par un prêt à effet de levier et rappelle que ce type d’investissement est une manœuvre sophistiquée qui s’adresse à une catégorie spécifique d’investisseurs comme en fait état l’Avis de l’Autorité[132].

[244]      Or, il est important de rappeler que dans tous les Dossiers clients en assurance[133], les clients de Vladislav Adoniev ont eu recours à un prêt à effet de levier afin de financer l’achat des fonds distincts.

[245]      Essentiellement, on retrouve dans l’Avis de l’Autorité les meilleures pratiques à suivre lorsque les représentants, les courtiers en épargne collective et les cabinets en assurance de personnes proposent à leur clientèle l’utilisation d’un prêt à effet de levier pour acheter des fonds distincts[134].

[246]      Plus précisément, l’Avis de l’Autorité prévoit qu’afin de se conformer à son obligation de « bien connaître son client », le représentant doit s’assurer que son client possède une tolérance au risque moyenne à élevée, un taux d’imposition suffisamment élevé, une situation financière saine et des connaissances sur les risques et les conséquences liées à ce type d’emprunt[135].

[247]      En matière de risques et de conséquences, le représentant doit s’assurer de bien informer le client du risque de l’utilisation d’un emprunt afin de financer l’achat de fonds distincts et de la possibilité que la valeur de l’investissement soit inférieure au prêt.

[248]      En ce qui concerne l’évaluation de la situation financière du client et de sa capacité de rembourser le prêt et les intérêts, l’Avis de l’Autorité recommande aussi l’utilisation de certains ratios[136].

[249]      Outre la responsabilité de bien connaître son client, selon l’Avis de l’Autorité, le représentant en assurance a aussi comme obligation de bien gérer le dossier du client. Cette obligation consiste à effectuer un suivi ponctuel du dossier afin de s’assurer que le prêt à effet de levier est toujours convenable au client. Le représentant devra aussi s’assurer de bien documenter son dossier et conserver toutes les notes afférentes au prêt.

[250]      Selon l’Avis de l’Autorité, la demande d’emprunter des fonds pour investir dans des fonds distincts devrait être approuvée par le chef de la conformité du cabinet préalablement à sa transmission à l’institution prêteuse.

[251]      En ce qui concerne les responsabilités des cabinets en assurance de personnes, l’Avis de l’Autorité prévoit qu’ils devraient bien superviser leurs représentants qui proposent des prêts à effet de levier afin d’assurer qu’ils comprennent bien les tenants et aboutissements de cette stratégie d’emprunt dans une perspective de placement.

[252]      Afin de s’assurer de respecter leurs obligations, l’Avis de l’Autorité prévoit que le cabinet en assurance de personnes doit mettre en place un manuel de politiques et procédures afin de permettre aux personnes responsables au sein du cabinet, au dirigeant responsable et aux représentants de respecter les règles de bonne conduite.

[253]      Ce manuel devrait au moins comprendre :

1)    une description des circonstances et critères[137] qui permettent au représentant de suggérer au client d’utiliser un prêt à effet de levier;

2)    une description de la procédure d’approbation du prêt incluant un rappel de faire approuver la demande par le chef de la conformité avant de la soumettre à l’institution prêteuse;

3)     une description du contenu du dossier client[138]; et

4)    la procédure à suivre afin d’identifier et d’examiner les opérations à effet de levier.

[254]      Le Tribunal doit déterminer si Infinitum et Andrei Crivoi ont adopté des politiques et procédures entourant l’utilisation des prêts à effet de levier et des politiques concernant l’évaluation et l’approbation des recommandations d’emprunt.

[255]      En ce qui concerne l’utilisation de la stratégie d’effet de levier, le Tribunal constate que la « Politique encadrant la pratique des représentants rattachés à Infinitum Succession et Patrimoine » prévoit l’obligation de compléter un profil d’investisseur dans le cas de produits à capital variable (tel un fonds distinct) [139] et l’obligation de verser au dossier client, notamment, des notes personnelles lesquelles doivent justifier la convenance du produit offert.

[256]      En ce qui concerne l’utilisation de l’effet de levier, cette Politique prévoit que le représentant doit respecter l’obligation suivante: « S’il vend ou tente de vendre un prêt levier, il doit dénoncer l’opération au chef de la conformité, dès la proposition; »[140].

[257]      Selon le Tribunal, l’obligation pour le représentant, qui se rattache au cabinet Infinitum, de dénoncer son intention de recommander un placement en utilisant un prêt à effet de levier, n’est pas suffisante.

[258]      Le Tribunal considère que la « Politique encadrant la pratique des représentants rattachés à Infinitum Succession et Patrimoine » est incomplète. Cette politique ne comprend pas suffisamment d’éléments permettant d’encadrer adéquatement le représentant qui recommande un prêt à effet de levier pour effectuer l’achat de fonds distincts. Cette politique ne décrit pas suffisamment la marche à suivre lors d’une telle recommandation.

[259]      Le Tribunal rappelle que l’utilisation de l’effet de levier pour acheter des fonds distincts est une stratégie sophistiquée :

« [225] En raison de la nature même des prêts à effet de levier, ceux-ci exigent plus de vigilance de la part du représentant. Il doit prendre toutes les mesures nécessaires afin de ne pas avoir de doutes quant à la capacité de son client à supporter les variations dans la valeur des investissements qu’il lui suggère. Il doit s’assurer que même dans le cas des pires scénarios, la situation financière de ce dernier ne sera pas compromise en cas de pertes des placements. »[141]

[260]      Le Tribunal est d’avis qu’Infinitum et Andrei Crivoi n’ont pas adopté des politiques et procédures convenables et suffisamment élaborées entourant l’utilisation des prêts à effet de levier et concernant l’évaluation et l’approbation des recommandations d’emprunt. Dans cette perspective, ils ont fait défaut d’assurer une supervision adéquate des activités de Vladislav Adoniev et de ce fait, d’assurer la convenance de cette stratégie.

b)   Infinitum et Andrei Crivoi ont-ils fait défaut d’assurer une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev ?

Droit applicable

Supervision stricte par Infinitum et Andrei Crivoi selon l’Engagement de supervision[142]

[261]      L’Autorité reproche également à Infinitum et Andrei Crivoi d’avoir fait défaut d’assurer une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev selon les conditions imposées par le Tribunal aux droits d’exercice de Vladislav Adoniev.

[262]      Le Tribunal doit maintenant déterminer si Infinitum et Andrei Crivoi ont respecté leur obligation de supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev, conformément aux restrictions imposées par le Tribunal.

[263]      Il existe deux (2) types de supervision des activités du représentant que l’Autorité peut demander au Tribunal d’assortir au certificat ou à l’inscription de celui-ci : la supervision dite « rapprochée » et celle dite « stricte ».

[264]      Ces deux (2) types de supervision sont pratiquement identiques à l’exception que la supervision « stricte » exige que le superviseur approuve, au préalable, chaque transaction que le représentant désire effectuer. Il va sans dire que le superviseur ne doit pas approuver des transactions qui posent des enjeux de conformité avant que ces enjeux ne soient réglés à sa satisfaction.

[265]      Lorsque les activités d’un représentant font l’objet d’une supervision, qu’elle soit « rapprochée » ou « stricte », cela implique que son droit de pratique fait l’objet de restrictions ou de conditions.

[266]      Ainsi, le représentant n’a pas le droit d’exercer ses activités sans qu’une supervision « stricte » ou « rapprochée » ne soit exercée sur ses activités par la personne nommée par l’Autorité à cette fin.

[267]      Par ailleurs, dans le cadre d’une supervision stricte, le superviseur doit remplir certaines obligations et transmettre à l’Autorité mensuellement certains renseignements par l’entremise du formulaire de l’Autorité intitulé Déclaration relative à une condition de supervision stricte (« Déclaration de supervision stricte »)[143].

[268]      La Déclaration de supervision stricte comporte une section qui explique, de façon très claire, les obligations relatives au type de supervision imposé dans les disciplines des valeurs mobilières, de l’assurance, de la planification financière et du courtage hypothécaire[144].

[269]      La Déclaration de supervision stricte, prévoit l’obligation pour Infinitum et le superviseur d’approuver au préalable chaque transaction que le représentant souhaite effectuer dans la discipline qui fait l’objet de la supervision stricte. L’expression « transaction » inclut « l’acquisition, la vente, la souscription ou tout autre forme de transfert de titres »[145].

[270]      Plus particulièrement, la Déclaration de supervision stricte prévoit qu’Infinitum et le superviseur ont l’obligation, avant d’approuver une transaction, de procéder à l’examen, c’est-à-dire à la révision des transactions et s’assurer entre autres que :

         « (…)

         La personne supervisée a respecté la législation, la réglementation ainsi que les règles d’éthiques professionnelles et de déontologie s’appliquant à l’exercice des activités du représentant;

         Les produits et services offerts ont été révisés et l’information relative à cette révision a été consignée dans le dossier du client;

         Les propositions d’assurance, les formulaires et tous les documents pertinents à l’offre de produits d’assurance, notamment les préavis aux fins de remplacement, ont été contresignés par le superviseur de conformité, le cas échéant.

         […]

         Les analyses de besoins du client ont été revues, les produits et services offerts correspondent à l’analyse ou tout écart est expliqué et documenté;

         […]

         Les opérations de fonds distincts utilisant l’effet de levier ont été approuvées préalablement à l’envoi des ordres de transactions (assurance de personnes);

         Dans le cas des fonds distincts, le profil de risque et les informations financières sont consignés dans le dossier du client (assurance de personnes);

         Les dossiers des clients ayant fait l’objet d’une transaction ont été revus afin de s’assurer que tous les documents et renseignements requis par la réglementation soient présents et complets »[146].

[271]      Une lecture même rapide de la Déclaration de supervision stricte permet au Tribunal de conclure que les obligations qui y sont prévues pour Infinitum et le superviseur sont considérables.

[272]      De plus, Infinitum et le superviseur ne doivent pas uniquement réviser les dossiers afin de s’assurer qu’ils soient conformes, mais doivent également décrire et consigner par écrit, pour les fins de l’Autorité, le processus d’examen des dossiers, les enjeux de conformité relevés et la façon dont ces enjeux ont été réglés, et ce, pour chaque transaction proposée à chaque client.

[273]      Finalement, la Déclaration de supervision stricte prévoit une attestation par Andrei Crivoi à titre de superviseur et à titre de dirigeant responsable qu’il a lu les instructions relatives à la supervision stricte qui y sont contenues, que toutes les activités de supervision prévues dans la Déclaration ont été exécutées adéquatement et que des mesures raisonnables ont été prises pour confirmer l’exactitude de l’information fournie dans la Déclaration de supervision stricte.

[274]      Le Tribunal rappelle que la Déclaration de supervision stricte doit être envoyée à l’Autorité de façon mensuelle.

[275]      Il y a également lieu de souligner qu’Andrei Crivoi a signé un Engagement de supervision[147] dans lequel il reconnaît avoir lu la Décision du Tribunal de décembre 2020 et surtout les motifs ayant conduit à cette décision.

[276]      Dans l’Engagement de supervision, il confirme également qu’il effectuera la supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev, tel que requis par l’Autorité. Il s’engage à compléter la Déclaration de supervision stricte et la faire parvenir à l’Autorité tous les mois, accompagnée des renseignements y demandés par l’Autorité.

[277]      Finalement, on retrouve dans l’Engagement de supervision une reconnaissance de l’avoir lu et d’en avoir compris la portée. Il s’est engagé à respecter les modalités de la supervision stricte.

[278]      Il est important de mentionner qu’en plus de transmettre à l’Autorité une copie de la Déclaration de supervision stricte, au plus tard la semaine suivant la fin du mois couvert par la déclaration, Andrei Crivoi devait également y joindre une liste des ventes mensuelles de Vladislav Adoniev afin de permettre à l’Autorité d’obtenir des dossiers clients. Andrei Crivoi devait aussi joindre à la Déclaration de supervision stricte des informations supplémentaires pour chaque dossier comportant des enjeux de conformité[148].

[279]      La Déclaration de supervision stricte prévoit la possibilité pour l’Autorité de prendre des procédures à l’égard d’Infinitum, du dirigeant responsable et du superviseur qui présenteraient des informations fausses ou inexactes entourant la supervision des activités du représentant. De plus, ils peuvent être tenus responsables des manquements commis par le représentant sous condition de supervision.

Application du droit aux faits

[280]       Selon l’Autorité, Infinitum et Andrei Crivoi n’ont pas respecté les obligations prévues à la Déclaration de supervision stricte en ne s’assurant pas que Vladislav Adoniev respecte la législation applicable. L’Autorité leur reproche de ne pas avoir complété, de façon conforme, la Déclaration de supervision stricte qu’ils faisaient parvenir à l’Autorité.

[281]      Le premier inspecteur témoigne qu’aucun des Dossiers clients en assurance ne comportait une contre-signature ou une marque d’approbation préalable aux transactions effectuées par Vladislav Adoniev. Il ajoute qu’Andrei Crivoi n’a pas effectué de réelle vérification des activités de Vladislav Adoniev. Il réfère aux tableaux qu’il a préparés pour chaque client et résume ses constatations en ce qui concerne la supervision effectuée.

[282]      Tout d’abord, il est important de noter que puisque le Tribunal a conclu que Vladislav Adoniev a effectivement omis de compléter des analyses de besoins financiers ou ne les a pas complétées de façon adéquate et qu’il a omis de tenir ses dossiers clients conformément à la législation et à la réglementation, forcément, en raison de ces manquements, Infinitum et Andrei Crivoi ont fait défaut de respecter leurs obligations. Essentiellement, ils ne se sont pas assurés que Vladislav Adoniev se conforme à la législation et réglementation applicable et prévue à la Déclaration de supervision stricte.

[283]      L’Autorité soutient que dans sept (7) des Dossiers clients en assurance, Andrei Crivoi n’a pas consigné aux dossiers clients la preuve de la révision préalable des transactions proposées par Vladislav Adoniev. Ces sept (7) Dossiers clients en assurance ne comportent aucune indication qu’une supervision ou qu’une révision a été effectuée[149].

[284]      Le Tribunal est d’avis qu’il est impossible d’établir que six (6) des 12 Dossiers clients en assurance ont été révisés par Andrei Crivoi, car il n’existe aucune preuve de révision des dossiers[150].

[285]      Par ailleurs, le Tribunal a révisé les documents intitulés « Approbation et notes Crivoi »,[151] mais le Tribunal n’a pu retracer aucune preuve écrite d’une révision des six (6) Dossiers clients en assurance.

[286]      Le Tribunal a également révisé un échange de courriels entre Andrei Crivoi et l’Autorité dans lequel il explique la façon dont il supervisait les activités de Vladislav Adoniev. Il y mentionne que Vladislav Adoniev communiquait avec lui pendant sa rencontre avec ses clients et qu’il vérifiait sa recommandation. Par la suite, il vérifiait si tous les documents étaient bien remplis et signés[152]. Cette façon de superviser est également reproduite dans les Déclarations de supervision stricte[153] qu’il a signées et produites à l’Autorité.

[287]      Le Tribunal rappelle que dans le cadre d’une supervision stricte des activités d’un représentant, le superviseur est tenu de consigner aux dossiers clients la preuve d’une révision des dossiers et que cette supervision doit être effectuée préalablement à l’envoi des ordres de transactions.

[288]      L’absence de révision d’un dossier par le superviseur constitue un manquement très sérieux. Ce manquement est contraire aux restrictions imposées au certificat et à l’inscription du représentant, lequel n’a aucun droit d’exercer des activités dans les disciplines dans lesquelles il était autorisé à agir à moins que ces activités soient supervisées.

[289]      Si le représentant n’a pas été supervisé conformément à la Déclaration de supervision stricte, il existe une possibilité que celui-ci ne se soit pas conformé à ses obligations légales. L’existence de cette possibilité est suffisante pour causer un préjudice sérieux aux clients et au public investisseur.

[290]      Le Tribunal note également que dans le cadre d’une supervision stricte, il ne suffit pas de se contenter de soulever un enjeu de conformité, il faut s’assurer de le résoudre.

[291]      À titre d’exemple, le Tribunal constate que dans deux (2) des Dossiers clients en assurance, Andrei Crivoi soulève la nécessité de déposer des aperçus de fonds distincts et des confirmations de placement au dossier sans que cela ait été fait[154] au moment de l’envoi des Dossiers clients en assurance à l’Autorité.

[292]      Les manquements constatés par le Tribunal dans les dossiers clients démontrent qu’Infinitum et Andrei Crivoi (a) n’ont pas approuvé préalablement les transactions effectuées par Vladislav Adoniev, (b) n’ont pas vérifié la conformité des transactions et (c) ont permis que les transactions soient exécutées alors même qu’Andrei Crivoi avait constaté l’existence d’enjeux de conformité.

[293]      Lors de son témoignage devant le Tribunal, Andrei Crivoi a expliqué qu’il avait développé une bonne relation avec une représentante de l’Autorité pour assurer que sa supervision soit conforme.

[294]      Il a témoigné de l’importance d’établir une bonne collaboration avec l’Autorité et a même référé à un document portant sur les activités de supervision de l‘Autorité[155] qui met l’accent sur l’esprit collaboratif entre les parties.

[295]      Il ajoute avoir établi avec l’Autorité une « entente » à l’effet qu’il devait s’adapter à ses nouvelles fonctions et corriger des irrégularités au fur et à mesure. Au surplus, il explique que selon sa compréhension, il travaillait avec l’Autorité pour faire la supervision stricte de Vladislav Adoniev et qu’il avait l’impression que l’Autorité le supervisait.

[296]      Il déclare avoir fait part à l’Autorité qu’il n’avait aucune expérience de supervision.

[297]      Le Tribunal est d’avis qu’il incombait à Infinitum et Andrei Crivoi d’exercer une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev, comme prévu dans la Déclaration d’engagement. Andrei Crivoi ne devait pas s’attendre à ce l’Autorité supervise Vladislav Adoniev de concert avec lui.

[298]      Le Tribunal a révisé les Déclarations de supervision stricte complétées par Andrei Crivoi et constate qu’il est difficile de comprendre les démarches qu’il a effectuées afin de s’assurer que les activités et les dossiers de Vladislav Adoniev soient conformes. Andrei Crivoi semble mal comprendre son rôle, nonobstant que les obligations lui incombant sont clairement contenues dans les Déclarations de supervision stricte et dans l’Engagement de supervision qu’il a signé.

[299] Le Tribunal conclut qu’Infinitum et Andrei Crivoi ont commis un manquement en faisant défaut d’assurer une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev et en omettant de s’assurer que Vladislav Adoniev respecte la législation et la réglementation applicables à l’exercice de ses activités et plus particulièrement en omettant de :

a)     s’assurer qu’il ait complété une analyse de besoins financiers;

b)     d’autoriser au préalable, l’achat de fonds distincts et le financement par un prêt à effet de levier; et

c)     confirmer que tous les documents et renseignements prévus dans la réglementation soient consignés aux dossiers clients.

[300]      Selon lAutorité, lorsqu’Andrei Crivoi lui fait parvenir les Déclarations de supervision stricte dans lesquelles il confirme avoir procédé à l’examen et la révision des transactions, alors que ce n’était pas le cas, Andrei Crivoi tant à titre de dirigeant responsable que de superviseur fait de fausses déclarations à l’Autorité.

[301]      De l’avis du Tribunal, lorsqu’Andrei Crivoi complète les Déclarations de supervision stricte dans lesquelles il confirme la conformité des transactions effectuées par Vladislav Adoniev sans que cela soit vrai, il transmet des informations fausses et trompeuses à l’Autorité.

[302]      Tant dans l’affaire Autorité des marchés financiers c. R. Beauchamp & Laplante Courtiers d'assurances inc.[156] que dans Autorité des marchés financiers c. 9190-4995 Québec inc.[157], le Tribunal conclut qu’un superviseur qui fait parvenir à l’Autorité des déclarations de supervision mal complétées transmet des informations fausses et trompeuses au régulateur.

[303]      Le Tribunal conclut qu’Infinitum et Andrei Crivoi ont commis un manquement en n’effectuant pas une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev selon les conditions de supervision stricte imposées par le Tribunal aux termes de l’Engagement de supervision de l’Autorité qu’il a signé.

[304]      Le Tribunal conclut également qu’Andrei Crivoi à titre de dirigeant responsable et de superviseur a commis un manquement en transmettant à l’Autorité des Déclarations de supervision stricte contenant des informations fausses et trompeuses quant à sa révision des transactions et des enjeux relatifs à sa révision, tels qu’énoncés dans la Déclaration de supervision stricte avant d’approuver ou non les transactions que Vladislav Adoniev désirait effectuer.

Transmission des Déclarations de supervision stricte incomplètes et hors délai

[305]      L’Autorité reproche à Andrei Crivoi d’avoir fait défaut de lui transmettre les Déclarations de supervision stricte dûment complétées dans la semaine qui suit la fin de mois, tel que précisé par l’Autorité[158]. Cette irrégularité serait survenue au début de la supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev par Andrei Crivoi.

[306]      Selon le Tribunal, la preuve démontre qu’Andrei Crivoi a été nommé superviseur le 12 janvier 2021[159]. Lors d’une conversation téléphonique en date du 13 janvier 2021[160], l’Autorité lui a demandé de lui transmettre en plus des informations et des documents requis par la Déclaration de supervision stricte[161], une liste des ventes mensuelles ayant fait l’objet d’une supervision.

[307]      La preuve démontre qu’Andrei Crivoi a accusé des retards de transmission de deux (2) Déclarations de supervision stricte, au commencement de sa supervision stricte, soit pour les mois de janvier et avril 2021. Le Tribunal note qu’Andrei Crivoi a fourni des explications crédibles et fiables des raisons de ces délais et était en contact avec l’Autorité durant cette période.

[308]      D’autre part, aucun autre retard n’a été porté à l’attention du Tribunal.

[309]      Le Tribunal souligne également que la période d’adaptation s’est déroulée au début de l’instauration des mesures sanitaires contraignantes en raison de la pandémie liée à la COVID-19.

[310]      Le Tribunal conclut donc que ces deux (2) retards ne constituent pas un manquement et ajoute qu’étant donné que la supervision stricte d’Andrei Crivoi a débuté à la mi-janvier, une période d’adaptation était nécessaire afin qu’il puisse remplir ses obligations conformément aux exigences de l’Autorité.

Question no 5 : Vladislav Adoniev a-t-il fait défaut de s’assurer que ses activités de représentant de courtier en épargne collective et sur le marché dispensé étaient, en tout temps, supervisées conformément aux conditions de supervision stricte imposées par le Tribunal?

Conclusion

[311]      Après avoir considéré la preuve, le Tribunal conclut que Vladislav Adoniev a commis un manquement en faisant défaut de s’assurer que ses activités de représentant en épargne collective et sur le marché dispensé étaient exercées en tout temps sous supervision stricte, tel qu’imposé par le Tribunal à son droit d’exercice et de ce fait, a contrevenu à la Décision du Tribunal de décembre 2020 et aux engagements souscrits dans l’accord conclut avec l’Autorité[162].

Le droit applicable

[312]   Par la Décision du Tribunal de décembre 2020, l’inscription de Vladislav Adoniev comme représentant de courtier pour un courtier en épargne collective et sur le marché dispensé a fait l’objet d’une condition de supervision stricte.

[313]   En effet, la Décision du Tribunal de décembre 2020 précise que « le représentant doit, pour une période de dix-huit (18) mois, alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités sous la supervision stricte d’une personne nommée par le dirigeant responsable du cabinet auquel il sera rattaché »[163].

[314]   La LVM prévoit que constitue un manquement le fait de contrevenir à une décision du Tribunal et à un engagement souscrit auprès de l’Autorité[164].

Application du droit aux faits

Transactions effectuées sans approbation préalable par le superviseur

[315]   Depuis le 23 juillet 2014, Richard Bernard est inscrit auprès de l’Autorité pour agir à titre de chef de la conformité pour Whitehaven, un courtier en épargne collective et sur le marché dispensé[165].

[316]   Le 20 avril 2017, l’Autorité a assorti l’inscription de Vladislav Adoniev dans les catégories de représentant de courtier en épargne collective et de représentant de courtier sur le marché dispensé d’une condition de supervision rapprochée de ses activités pour une période de trois années[166].

[317]   Durant cette période, Richard Bernard a supervisé les activités de Vladislav Adoniev dans les catégories de représentant de courtier en épargne collective et de représentant de courtier sur le marché dispensé, et ce, jusqu’au 1er juillet 2020[167].

[318]   En décembre 2020, le Tribunal rend la Décision du Tribunal de décembre 2020 et Richard Bernard est de nouveau nommé pour effectuer la supervision des activités de Vladislav Adoniev, mais cette fois en exerçant une supervision stricte.

[319]   Afin d’effectuer un suivi de la supervision stricte et s’assurer de la conformité des activités de Vladislav Adoniev et tel que le prévoit la Décision du Tribunal de décembre 2020, l’Autorité demande à Whitehaven, par l’intermédiaire de Richard Bernard, de lui transmettre six (6) Dossiers clients en épargne collective et sur le marché dispensé.

[320]   Lors de l’instruction, le deuxième inspecteur chargé de l’inspection des Dossiers clients en épargne collective et sur le marché dispensé témoigne qu’il procède à l’analyse de ceux-ci et constate que Richard Bernard n’a pas approuvé, préalablement à l’envoi des ordres de transactions, les transactions que Vladislav Adoniev désirait effectuer, contrairement à ce qui est prévu dans la Déclaration de supervision stricte et à l’Engagement de supervision qu’il a signée[168].

[321]   Plus particulièrement, il réfère le Tribunal à la capture d’écran du logiciel VieFund de Whitehaven des Dossiers clients en épargne collective et sur le marché dispensé[169], sur laquelle le Tribunal peut constater que les transactions de Vladislav Adoniev n’ont pas été approuvées au préalable.

[322]   Lors de son témoignage, le deuxième inspecteur fait référence à un document intitulé « Strict Supervision Red Flag Checklist »[170] qui se trouve dans cinq (5) dossiers clients. Un exemplaire de ce document est signé par Vladislav Adoniev et par Richard Bernard.

[323]   Il explique que bien que ce document contienne une reproduction de la liste des attentes de l’Autorité quant aux enjeux relatifs à l’examen des transactions d’un représentant sous supervision stricte, telles qu’énumérées dans la Déclaration de supervision stricte[171], aucune note d’examen ou de révision des transactions n’y sont inscrites de la part de Richard Bernard.

[324]   De plus, l’Autorité réfère à l’accord qu’elle a conclu avec Richard Bernard qui a été entériné le 25 février 2022 par une décision du Tribunal.

[325]   Dans cet Accord, Richard Bernard reconnaît avoir commis plusieurs manquements, dont notamment celui d’avoir fait défaut de superviser les activités de Vladislav Adoniev et de ne pas avoir approuvé, au préalable, les transactions qu’il effectuait.

[326]    Les procureurs de Vladislav Adoniev ont eu connaissance des conclusions de cet accord, car ils étaient présents à l’audition lors de sa présentation pour qu’il soit entériné par le Tribunal.

[327]    Lors de cette audition, les procureurs n’ont fait aucun commentaire quant au contenu de l’accord et, plus particulièrement, sur l’admission de Richard Bernard à l’effet qu’il n’avait pas approuvé au préalable les transactions proposées par Vladislav Adoniev. Cette décision a d’ailleurs été transmise, le 25 février 2022, par le Secrétariat du Tribunal aux procureurs de Vladislav Adoniev, d’Andrei Crivoi et d’Infinitum. Par ailleurs, dans la décision, le Tribunal a ordonné à l’Autorité de notifier la décision aux parties.

[328]   Le Tribunal considère que la preuve présentée par l’Autorité est conforme à l’admission de Richard Bernard dans l’accord, selon laquelle les transactions effectuées par Vladislav Adoniev n’ont pas été approuvées au préalable durant la période du 12 janvier 2021 au 25 février 2022[172].

[329]    L’Autorité ajoute que Vladislav Adoniev est la personne à qui incombe l’obligation et la responsabilité de s’assurer que, durant la période de dix-huit (18) mois, ses activités professionnelles font l’objet d’une supervision stricte, en tout temps, afin de respecter et de se conformer à la Décision du Tribunal de décembre 2020.

[330]   Pour l’Autorité, il doit également être tenu responsable du fait que son superviseur Richard Bernard a approuvé ses transactions postérieurement à l’envoi des ordres de transactions. Vladislav Adoniev avait l’obligation de s’assurer que ses activités étaient supervisées en tout temps en conformité avec la Décision du Tribunal de décembre 2020.

[331]   Le Tribunal est d’accord avec l’Autorité.

[332]   Selon le Tribunal, l’exercice de la supervision stricte n’est pas seulement la responsabilité du superviseur nommé à cette fin, elle est, d’abord et avant tout, la responsabilité du représentant visé par cette supervision stricte.

[333]   Après tout, c’est le droit d’exercice du représentant qui a été assorti d’une condition de supervision stricte de ses activités. Sans cette supervision, il n’a pas le droit d’exercer dans les disciplines dans lesquelles il était autrefois autorisé à exercer sans supervision.

[334]   Après avoir pris en considération la preuve, le Tribunal conclut que Vladislav Adoniev a contrevenu à une décision du Tribunal et aux engagements souscrits auprès de l’Autorité dans l’accord conclut avec elle[173], en omettant de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer, durant la période de supervision stricte de ses activités, que les transactions qu’il se proposait d’effectuer étaient préalablement révisées et approuvées par son superviseur avant de les réaliser.

Transactions effectuées sans supervision stricte

[335]   L’Autorité reproche aussi à Vladislav Adoniev de ne pas avoir respecté l’obligation de supervision stricte assortie à son inscription en effectuant des transactions entre le 25 février 2022 et le 21 mars 2022[174], alors qu’un nouveau superviseur n’avait pas encore été nommé.

[336]   En raison de la décision prononcée par le Tribunal le 25 février 2022[175] interdisant à Richard Bernard d’agir à titre de superviseur d’un représentant pour une période de cinq (5) ans, un nouveau superviseur devait être nommé par Whitehaven afin de permettre à Vladislav Adoniev de continuer d’exercer ses activités.

[337]    Le 21 mars 2022, un nouveau superviseur a été nommé pour exercer la supervision stricte des activités professionnelles de Vladislav Adoniev[176].

[338]   Or, le deuxième inspecteur témoigne à l’effet que, durant la période approximative d’un mois entre l’incapacité de Richard Bernard d’agir à titre de superviseur et la nomination du nouveau superviseur, Vladislav Adoniev a effectué une douzaine de transactions, sans supervision. Il réfère notamment le Tribunal à une liste des transactions effectuées par Vladislav Adoniev durant cette période, qui provient de Whitehaven[177].

[339]   Vladislav Adoniev témoigne à l’effet qu’il ne savait pas que ses activités ne faisaient plus l’objet d’une supervision stricte. Il ajoute n’avoir jamais reçu de lettre de la part de l’Autorité ou de Whitehaven l’informant qu’il n’avait plus le droit d’effectuer quelque transaction que ce soit, et ce, jusqu’à ce qu’un nouveau superviseur soit nommé. Il admet avoir continué à effectuer des transactions, comme à l’habitude.

[340]   La preuve de l’Autorité permet au Tribunal de conclure que Vladisalv Adoniev a effectué des transactions entre le 25 février 2022 et le 21 mars 2022 sans supervision stricte de ses activités.

[341]    Le Tribunal rappelle que sa décision qui entérine l’accord et interdit à Richard Bernard d’agir à titre de superviseur d’un représentant, pour une période de cinq (5) ans, a été transmise aux procureurs de Vladislav Adoniev par le secrétariat du Tribunal.

[342]   Le Tribunal conclut que Vladislav Adoniev a contrevenu à une décision du Tribunal et aux engagements souscrits auprès de l’Autorité dans l’accord conclu avec elle[178], en effectuant des transactions sans qu’un nouveau superviseur soit nommé pour effectuer une supervision stricte de ses activités.

Question no 6 : Vladislav Adoniev a-t-il effectué de la publicité susceptible d’induire le public en erreur et de prêter à confusion ?

[343]   Selon l’Autorité, Vladislav Adoniev fait la promotion de ses activités par l’entremise d’une page publicitaire via le site Internet « Russianmontreal.ca » et via le journal « Russian Montreal ». Cette publicité est rédigée majoritairement en langue russe.

[344]   L’Autorité prétend que ces publicités ne sont pas conformes à la réglementation en ce qu’elles contiennent des allégations susceptibles d’induire le public en erreur et prêtent à confusion.

[345]   Lors de l’instruction, l’Autorité cherchait à produire, auprès du Tribunal, une copie des publicités en langue russe ainsi qu’une traduction anglaise de quelques phrases de ces publicités[179] considérées problématiques. Cette traduction effectuée à la demande de Whitehaven était accompagnée d’une certification par une personne qui se présente comme « certified translator ». De plus, l’Autorité a utilisé « Google Translate » pour traduire le reste du document.

[346]   Les intimés se sont objectés à la recevabilité en preuve des publicités en langue russe et de la traduction anglaise des quelques phrases. Selon les intimés, l’Autorité devait produire une traduction intégrale des publicités effectuée par un traducteur officiel, dans l’une des deux langues officielles utilisées devant les tribunaux du Québec. De plus, ils se sont objectés à toute question visant à établir le contenu des publicités en langue russe lors du contre-interrogatoire de Vladislav Adoniev qui n’est pas un traducteur officiel.

[347]   Le Tribunal a maintenu les objections des intimés et a jugé que pour être recevables en preuve, les publicités devaient faire l’objet d’une traduction officielle intégrale certifiée, dans la langue française ou anglaise par un traducteur officiel qui doit pouvoir être assigné à l’audience afin d’y être interrogé, ce qui ne fut pas le cas[180].

[348]   De plus, en ce qui concerne la portion non traduite de la publicité, l’Autorité ne peut pas simplement produire une traduction qu’elle a effectuée à l’aide de « Google Translate ».

[349]   Par ailleurs, le Tribunal n’a pas permis de produire les publicités en langue russe par l’entremise de Vladislav Adoniev, qui n’est pas un traducteur officiel.

[350]   En raison de la décision du Tribunal de maintenir les objections des intimés, l’Autorité n’a pas été en mesure de faire la preuve de l’existence de publicités non conformes à la réglementation.

Question no 7 : S’il y a lieu, quelles sont les mesures administratives que le Tribunal doit imposer à Infinitum, Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev?

Droit applicable

[351]   Lorsque le Tribunal conclut qu’une partie a commis des manquements aux lois sous sa juridiction, il possède le pouvoir d’imposer plusieurs mesures administratives.

[352]    En vertu de l’article 115 de la LDPSF, le Tribunal a le pouvoir d’imposer une pénalité administrative pouvant aller jusqu’à deux (2) millions de dollars par contravention à cette loi ou aux règlements pris en application de celle-ci.

[353]   Le Tribunal a également le pouvoir, à l’égard du cabinet ou du représentant, selon le cas, de radier ou révoquer, suspendre ou assortir de restrictions ou de conditions son inscription ou son certificat[181].

[354]    Le Tribunal peut également interdire à une personne d’agir comme administrateur ou dirigeant d’un cabinet, et ce, pour une période maximale de cinq (5) ans[182].

[355]   Finalement, le Tribunal peut enjoindre au cabinet ou au représentant, selon le cas, de prendre des mesures permettant de se conformer à toute disposition de la LDPSF ou aux règlements applicables[183].

[356]   Le Tribunal a des pouvoirs similaires en vertu de la LVM[184].

[357]   L’Autorité demande au Tribunal d’imposer les mesures administratives suivantes, en ce qui concerne :

Infinitum :

         Radier son inscription et lui ordonner de transférer tous les dossiers clients, livres et registres du cabinet à un cabinet dûment inscrit et préalablement approuvé par l’Autorité;

         Imposer une pénalité administrative de 20 000 $.

Andrei Crivoi :

         Lui interdire d’agir à titre de dirigeant responsable d’un cabinet pour une période de cinq (5) ans,

         Assortir son certificat des conditions suivantes :

o   Ne pas agir à titre de superviseur d’un autre représentant pour une période de cinq (5) ans; et

o   Compléter et réussir la formation en ligne « La conformité à l’ère numérique » sur le site Internet de la Chambre de la sécurité financière;

         Imposer une pénalité administrative de 10 000 $.

Vladislav Adoniev :

         Suspendre son certificat et son inscription dans toutes les disciplines et les catégories de représentant dans lesquelles il est inscrit, pour une période de douze (12) mois;

         Assortir son certificat et son inscription, alors qu’il aura un droit d’exercice valide à l’expiration de la suspension, des conditions suivantes :

o   Se rattacher à un cabinet, dont il n’est pas le dirigeant responsable, pour une période de cinq (5) ans;

o   Exercer ses activités sous la supervision stricte d’une personne nommée par le dirigeant responsable du cabinet auquel il sera rattaché et par une personne nommée par le chef de conformité, et ce, pour une période de trois (3) ans; et

         Imposer une pénalité administrative de 8 000 $.

[358]   Le Tribunal rappelle qu’il a déterminé qu’Infinitum a fait défaut :

a)     de s’assurer de tenir des dossiers clients conformément à la LDPSF et à ses règlements;

b)     d’assurer une supervision générale et une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev dans la discipline de l’assurance de personnes.

[359]   Le Tribunal a également déterminé qu’Andrei Crivoi a fait défaut :

a)     à titre de dirigeant responsable d’Infinitum, de s’assurer de tenir des dossiers clients conformément à la LDPSF et à ses règlements;

b)     de se présenter conformément à son mode d’exercice et à son rattachement à un cabinet d’assurance;

c)     à titre de dirigeant responsable d’Infinitum, d’assurer une supervision générale des activités de Vladislav Adoniev dans la discipline d’assurance de personnes;

d)     à titre de superviseur des activités de Vladislav Adoniev, d’assurer une supervision stricte des activités conformément aux obligations prévues à la Déclaration de supervision stricte.

[360]   Finalement, le Tribunal a déterminé que Vladislav Adoniev a fait défaut :

a)     de préparer des analyses de besoins financiers pour chaque client et/ou d’avoir préparé des analyses de besoins financiers complètes;

b)     de s’assurer de tenir des dossiers clients conformément à la LDPSF et à ses règlements;

c)     de se présenter conformément à son mode d’exercice, son rattachement à un cabinet d’assurance ainsi qu’à son adresse professionnelle;

d)     de s’assurer que ses activités en épargne collective faisaient l’objet d’une supervision stricte conformément aux restrictions imposées par le Tribunal à ses droits d’exercice.

[361]   Puisque le Tribunal conclut que chacun des intimés a contrevenu à la législation et la réglementation applicables, il doit maintenant déterminer les mesures administratives qu’il doit leur imposer.

[362]   Le Tribunal rappelle que tant la LDPSF que la LVM sont des lois d’ordre public qui doivent être interprétées de façon large et libérale[185]. Le but de ces lois est sans contredit la protection du public[186].

[363]   Dans l’affaire Marston c. Autorité des marchés financiers[187], la Cour d’appel rappelle qu’un des moyens mis de l’avant afin de respecter la protection du public est le contrôle, par l’Autorité, de l’exercice des représentants inscrits auprès d’elle, afin de s’assurer qu’ils maintiennent une discipline rigoureuse[188].

[364]   L’exercice par une personne des activités régies par l’Autorité est un privilège, non un droit, et en contrepartie de ce privilège, les inscrits doivent respecter l’ensemble de la réglementation applicable[189].

[365]    Lorsque le Tribunal détermine les mesures administratives qu’il doit imposer, il exerce un pouvoir discrétionnaire. Ce pouvoir discrétionnaire lui est conféré en fonction de l’intérêt public[190] à la lumière des objectifs visés par la LDPSF et la LVM, notamment afin de protéger les investisseurs et les épargnants et à assurer la confiance du public dans les systèmes financiers[191].

[366]   Les ordonnances du Tribunal sont de nature réglementaire et en ce sens, elles ne sont ni réparatrices ni punitives[192]. En effet, le but d’une mesure administrative n’est pas de réparer un dommage causé aux investisseurs ou aux marchés financiers ni de punir la partie qui contrevient à la loi. Le but est plutôt de prévenir d’autres conduites répréhensibles futures qui risquent de porter atteinte à l’intérêt public[193]. Ces ordonnances sont de nature protectrice et préventive[194]. La mesure administrative doit essentiellement revêtir un caractère dissuasif[195].

[367]     Afin de déterminer les mesures administratives qui s’imposent dans l’intérêt public, le Tribunal tient compte d’une série de critères élaborés dans l’affaire Demers[196] qui est encore aujourd’hui régulièrement reprise par le Tribunal. Ces critères sont les suivants :

         « Le type et le nombre de sanctions ainsi que la gravité des gestes posés par le contrevenant;

         La conduite antérieure du contrevenant. Le tribunal pourra tenir compte de la conduite et des sanctions imposées dans d’autres juridictions ;

         La vulnérabilité des investisseurs sollicités;

         Les pertes subies par les investisseurs;

         Les profits réalisés par le contrevenant;

         L’expérience du contrevenant;

         La position et le statut du contrevenant lors de la perpétration des faits reprochés;

         L’importance des activités du contrevenant au sein des marchés financiers;

         Le caractère intentionnel des gestes posés;

         Le risque que le contrevenant fait courir aux investisseurs et aux marchés financiers si on lui permet de continuer ses activités;

         Les dommages causés à l’intégrité des marchés par la conduite du contrevenant;

         Le fait que la sanction peut, selon la gravité du geste posé, constituer un facteur dissuasif pour le contrevenant, mais également à l’égard de ceux qui seraient tentés de l’imiter;

         Le degré de repentir du contrevenant;

         Les facteurs atténuants; et

         Les sanctions imposées dans des circonstances semblables. »

[368]     Bien que ces critères ne soient pas exhaustifs, ils sont toujours de mise. Ils doivent être évalués, au cas par cas, selon les circonstances de chaque affaire et chacun de ces critères, pris individuellement, pourra avoir une importance propre et relative en fonction des faits pertinents du dossier.

[369]      L’analyse des critères à considérer afin de déterminer la mesure administrative ne se fait pas dans l’abstrait, mais en tenant compte notamment des principales tendances reflétées sur les marchés.

Application du droit aux faits

[370]   Dans le cadre de cette analyse, le Tribunal considère les critères suivants :

A)   Le type, le nombre, la gravité des gestes posés par les contrevenants et l’importance des activités exercées par les contrevenants

[371]   Le Tribunal considère que les intimés ont commis de nombreux manquements importants à la LDPSF et à la LVM.

[372]   Parmi ces manquements, le défaut de Vladislav Adoniev de satisfaire à son obligation de recueillir les renseignements nécessaires pour compléter et procéder à l’analyse des besoins financiers de ses clients conformément à la LDPSF et à sa réglementation constitue un manquement grave.

[373]   L’analyse de besoins financiers est l’outil par excellence qui permet au représentant de respecter son obligation fondamentale de bien connaître son client. L’omission d’analyser les besoins financiers des clients a un impact déterminant sur la connaissance de son client et est susceptible d’affecter la convenance du produit ou du service financier recommandé à celui-ci. En effet, l’absence d’analyse de besoins financiers soulève un questionnement au niveau de la convenance du produit[197].

[374]   Selon la LDPSF, le représentant en assurance de personnes doit s’enquérir de la situation financière de son client afin d’identifier ses besoins[198]. Le représentant doit obtenir tous les renseignements nécessaires lui permettant d’analyser les besoins financiers de son client et doit consigner les renseignements recueillis dans un document qu’il doit inclure au dossier client[199]. Il s’agit d’obligations impératives.

[375]   La jurisprudence reconnaît abondamment que l’analyse de besoins financiers constitue la pierre d’assise des recommandations d’un représentant[200]. L’analyse de besoins financiers d’un client ou d’un prospect est au cœur de la pratique des activités d’un représentant en assurance de personnes.

[376]   Il est difficile de concevoir qu’encore aujourd’hui un représentant propose un produit d’investissement à un client sans effectuer, d’abord et avant tout, une analyse de ses besoins financiers, après avoir recueilli les renseignements nécessaires pour ce faire.

[377]   Le Tribunal rappelle que Vladislav Adoniev concentre sa pratique dans la vente de fonds distincts en utilisant, comme mode de financement, un prêt à effet de levier, ce qui constitue une stratégie de financement risquée. L’utilisation d’un prêt à effet de levier afin de financer l’achat de fonds distincts convient à une certaine catégorie de clients que le représentant doit être en mesure d’identifier ou de reconnaitre, après avoir recueilli les renseignements lui permettant d’effectuer l’analyse de besoins financiers de son client.

[378] La preuve de l’Autorité démontre que Vladislav Adoniev n’a pas préparé d’analyse de besoins financiers avant de leur recommander l’achat de fonds distincts suivant une stratégie de prêt à effet de levier ou n’a pas préparé d’analyse de besoins financiers de façon complète et convenable dans tous les Dossiers clients en assurance inspectés par l’Autorité. Selon la preuve, il ne s’agit aucunement d’une erreur isolée dans un dossier, mais dans tous les dossiers inspectés.

[379] Contrairement aux prétentions des intimés, il ne s’agit pas de « peccadilles » ou « d’erreurs techniques » qui peuvent ne pas constituer des infractions en droit disciplinaire. Il ne s’agit pas d’une irrégularité ou d’un écart de conduite, comme le soulève le procureur des intimés, sans conséquence ou aussitôt corrigée.

[380]  La décision de Vladislav Adoniev d’exercer ses activités sans s’assurer qu’elles faisaient l’objet d’une supervision stricte constitue un autre manquement grave.

[381] Selon la Décision du Tribunal de décembre 2020, Vladislav Adoniev n’avait pas le droit d’exercer des activités professionnelles, et ce, dans toutes les disciplines dans lesquelles il était autorisé à agir, à moins que ses activités fassent l’objet d’une supervision stricte.

[382] Il s’agit d’une condition imposée à son certificat et à son inscription. Il devait obligatoirement s’assurer que chacune des transactions qu’il désirait effectuer soit approuvée au préalable par les personnes nommées pour exercer la supervision stricte de ses activités. Il lui était strictement interdit d’effectuer quelques transactions que ce soit sans approbation préalable. La supervision stricte de ses activités selon les restrictions imposées à ses droits d’exercice était, avant tout, sa responsabilité et non seulement celle des superviseurs.

[383] Lorsque Vladislav Adoniev décide d’exercer ses activités sans supervision stricte de celles-ci, nonobstant les restrictions imposées à son droit de pratique par le Tribunal, il exerce ses activités, sans droit, ce qui est déplorable et répréhensible dans une industrie hautement réglementée.

[384] Le Tribunal assimile la décision de Vladislav Adoniev d’effectuer des transactions sans aucune supervision stricte de ses activités à celle d’une personne qui propose ou vend un produit financier alors qu’elle n’est pas inscrite auprès de l’Autorité pour ce faire. Il s’agit d’exercer une activité sans être validement inscrit à ce titre, ce qui est illégal. Le Tribunal ne tolère pas ces manquements.

[385] Le fait que tant le cabinet Infinitum que le courtier Whitehaven aient permis que Vladislav Adoniev effectue des transactions sans supervision ne constitue pas une défense valable à l’exercice de ses activités sans droit.

[386] De l’avis du Tribunal, la décision de Vladislav Adoniev d’exercer ses activités sans droit dénote une insouciance et une indifférence de la Décision du Tribunal de décembre 2020.

[387] En ce qui concerne la gravité des manquements commis notamment par Infinitum et Vladislav Adoniev, dans la Décision du Tribunal de décembre 2020, après avoir fait un résumé des faits et manquements admis par Vladislav Adoniev et Infinitum, le Tribunal fait les commentaires suivants :

« [25] De l’avis du Tribunal, la résultante de cette cascade de manquements des intimés à la LDPSF et à sa réglementation est une situation mettant en danger l’intérêt public, les intérêts particuliers de leurs clients et la réputation même de tout un secteur névralgique de la Place financière, soit celui des services d’assurance.

[26] Une telle situation - causée par l’irresponsabilité, l’incompétence et la négligence des intimés dans la cadre de la présente affaire - est inacceptable et elle ne sera pas, dans l’intérêt public, tolérée. Le dispositif de la présente décision fait, à cet égard passer un message clair à tous les intervenants de la Place financière. 

[27] Fort heureusement, les procureurs de l’Autorité ont informé le Tribunal que, depuis le 21 août 2020, le cabinet intimé Infinitum succession et patrimoine Inc. a un nouveau dirigeant responsable, approuvé par le régulateur, et que les intimés […] ont suivi, avec succès, la formation intitulée « Cas vécus et déontologie en assurances de personnes ». »

[388] Or, il appert que le changement du dirigeant responsable du cabinet et le suivi de la formation en déontologie n’ont pas donné les résultats escomptés et seront nécessairement considérés par le Tribunal dans la détermination des mesures administratives à être imposées dans les circonstances.

[389] En ce qui concerne la tenue des dossiers, le Tribunal considère que le défaut de Vladislav Adoniev de tenir ses dossiers clients conformément à la LDPSF et à ses règlements est un manquement grave, surtout qu’il s’agit d’une récidive. Ce défaut dénote un relâchement dans son travail et dans sa conduite qui s’apparente à de la négligence. Ce laisser-aller crée également des dossiers incomplets, difficiles à consulter. La réglementation est pourtant claire au sujet des documents et informations qui doivent se retrouver dans les dossiers clients.

[390] Le Tribunal considère que le défaut de Vladislav Adoniev de se présenter, tant à ses clients qu’auprès des institutions financières dont il distribue les produits, à titre de représentant exerçant ses activités pour le compte du cabinet Infinitum, auquel il est rattaché, constitue un manquement grave à la législation et à la réglementation applicable.

[391] Un client a le droit fondamental de connaître le nom du cabinet pour lequel Vladislav Adoniev exerce ses activités et son mode d’exercice, tels qu’ils sont inscrits auprès de l’Autorité.

[392] En ne se présentant pas de façon conforme, Vladislav Adoniev fait des représentations fausses et trompeuses et il n’agit pas avec honnêteté, loyauté, compétence et professionnalisme[201].

[393] En ce qui concerne Andrei Crivoi, le Tribunal est d’avis qu’il a omis de remplir ses obligations de dirigeant responsable du cabinet Infinitum. En tant que personne responsable de la conformité, il a omis de s’assurer de la conformité des activités professionnelles de Vladislav Adoniev en négligeant de le superviser adéquatement. Ses omissions démontrent un manque de sérieux et de rigueur.

[394] De plus, il a omis de remplir ses obligations de supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev, tel qu’il s’était engagé à le faire auprès de l’Autorité conformément à l’Engagement de supervision qu’il a signée et à la Déclaration de supervision stricte, ce qui constitue de graves manquements.

[395] Lorsque le droit de pratique d’un représentant fait l’objet d’une condition de supervision stricte de ses activités, c’est parce que ce représentant nécessite un encadrement, sans quoi il lui serait interdit de pratiquer. Andrei Crivoi avait l’obligation d’assurer cet encadrement. Il devait s’assurer que Vladislav Adoniev se conforme à la loi, sa réglementation et aux meilleures pratiques de l’industrie pour ainsi réduire tout risque susceptible de porter atteinte à la protection du public.

[396]  L’Autorité est en droit de se fier sur le travail du dirigeant responsable d’un cabinet, de la personne nommée pour exercer une supervision stricte et est en droit de s’attendre à ce que le travail soit exécuté conformément à la loi, à la réglementation et conformément à ses attentes prévues dans l’Engagement de supervision et la Déclaration de supervision stricte.

[397]  En ce qui concerne l’importance d’un rôle du superviseur qui exerce une supervision stricte, tout comme le rôle de chef de la conformité ou de dirigeant responsable, le Tribunal réfère à sa décision de février 2022[202] par laquelle le Tribunal interdit à Richard Bernard d’agir à titre de superviseur pendant une période de cinq (5) ans. Le Tribunal s’exprime comme suit :

« [41] Par ailleurs, le respect d’exercer la supervision stricte d’un représentant tel qu’ordonné par le Tribunal est essentiel pour assurer la protection du public investisseur.

[43] […] Le chef de la conformité qui accepte d’exercer une supervision stricte tient un rôle très important et doit s’assurer d’exercer une surveillance assidue, constante et minutieuse des activités du représentant sous sa supervision.

[44] Le Tribunal considère que bien qu’aucune preuve de pertes ou de profits réalisés par les clients de Vladislav Adoniev n’a été portée à l’attention du Tribunal, il n’en demeure pas moins que l’intérêt général des clients a été mis à risque par les manquements de Richard Bernard ». [Référence omise]

[398] Le Tribunal réfère à sa décision dans Autorité des marchés financiers c. R. Beauchamp & Laplante Courtiers d'assurances inc.[203] dans laquelle le Tribunal se penche sur l’importance du rôle de superviseur pour la protection du public :

« [141] De surcroît, M. Beauchamp a transmis des informations fausses ou trompeuses à l’Autorité dans le cadre de la supervision de M. Lacasse. Son rôle à cet égard était important pour la protection du public et il a failli à ses obligations.

 [142] D’ailleurs, pour le tribunal la transmission d’informations fausses ou trompeuses à l’Autorité à douze reprises dans le cadre d’une supervision d’un représentant qui sans cette surveillance n’aurait pas dû pratiquer constitue un manquement dont la gravité objective et subjective est très importante. Un message clair doit être transmis que ce comportement ne peut être toléré

[143] Le Bureau a déjà souligné la gravité de la transmission d’informations fausses ou trompeuses à l’Autorité dans l’affaire De Leeuw :

« […] [L]es informations fausses ou trompeuses transmises à l’Autorité nuisent grandement au rôle de surveillance de cette dernière qui doit veiller à la conformité des personnes inscrites. La transmission de telles informations à l’Autorité représente un obstacle à l’efficacité des marchés et constitue une conduite contraire à l’intérêt public. »

[144] Si les mécanismes mis en place par le régulateur pour assurer la protection du public ne sont pas respectés et pris au sérieux, la confiance du public en sera affectée. »

[399]  À titre de dirigeant responsable du cabinet Infinitum et à titre de personne nommée pour exercer une supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev, Andrei Crivoi devait exécuter ses obligations avec diligence, soin et compétence.

[400] Andrei Crivoi a déclaré avoir débuté ses activités de représentant en assurance de personnes en 2017 et n’avoir aucune expérience de supervision stricte. Le Tribunal est d’avis que si Andrei Crivoi ne croyait pas posséder l’expérience, les habiletés et les connaissances nécessaires et suffisantes pour effectuer cette fonction, il n’aurait pas dû prendre l’initiative de se proposer à l’Autorité, pour assumer la responsabilité de la supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev.

[401] Non seulement Andrei Crivoi a fait défaut de respecter ses obligations à titre de dirigeant responsable et à titre de responsable de la supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev, mais il aussi laissé croire à l’Autorité qu’il effectuait une supervision stricte conforme et qu’il n’y avait aucun enjeu de conformité dans les dossiers de Vladislav Adoniev, alors que ce n’était pas le cas.

[402] De plus, Andrei Crivoi a commis un manquement grave en omettant de divulguer son mode d’exercice de représentant autonome ainsi qu’en s’identifiant à un cabinet auquel il n’est pas rattaché.

[403] En ce qui concerne le cabinet Infinitum, il a clairement et de façon répétée omis de veiller à la discipline de son représentant Vladislav Adoniev. Il a aussi omis de veiller à ce que son dirigeant responsable, Andrei Crivoi, agisse conformément à la LDPSF et à ses règlements. Ces omissions constituent des manquements graves.

B)           La conduite antérieure des contrevenants et la récurrence des manquements

[404] Sauf en ce qui concerne Andrei Crivoi, la majorité des manquements constatés par le Tribunal sont des manquements récurrents.

[405] En 2017, l’Autorité rend une décision par laquelle le certificat et l’inscription de Vladislav Adoniev sont assortis d’une condition de supervision rapprochée pour trois (3) années[204].

[406] En février 2018, l’Autorité procède à une première inspection du cabinet Infinitum et en octobre 2019 à une inspection de suivi. Elle constate alors des enjeux de conformité de la part d’Infinitum, de son ancien dirigeant responsable et de Vladislav Adoniev. Parmi ces enjeux se retrouvent, entre autres, l’analyse de besoins financiers, la tenue des dossiers clients et la représentation non conforme au niveau des cartes d’affaires. Ces constatations ont conduit à la Décision du Tribunal de décembre 2020.

[407]  Dans le présent dossier, l’Autorité soulève encore des enjeux de conformité de la part du cabinet Infinitum, de son nouveau dirigeant responsable Andrei Crivoi et de Vladislav Adoniev au niveau des analyses de besoins financiers, de la tenue des dossiers clients et au niveau d’informations non conformes.

[408] Plus important encore, cette première inspection de février 2018 a permis à l’Autorité de constater que les activités de Vladislav Adoniev n’ont fait l’objet d’aucune supervision particulière, malgré la condition de supervision rapprochée de ses activités imposée en 2017 par l’Autorité.

[409] De plus, l’inspection de suivi effectuée par l’Autorité en octobre 2019 démontre que les mêmes enjeux subsistent, et ce, malgré un engagement de la part d’Infinitum et de l’ancien dirigeant responsable, envers l’Autorité, de corriger les manquements décelés lors de la première inspection de février 2018.

[410] Cette situation amène l’Autorité à instituer des procédures devant le Tribunal dans lesquelles elle reproche à Infinitum, son nouveau dirigeant responsable Andrei Cirvoi et Vladislav Adoniev plusieurs manquements déjà constatés depuis la première inspection de février 2018, en plus du fait qu’Infinitum n’a pas respecté l’engagement souscrit auprès d’elle.

[411] Dans le cadre de ces procédures, Infinitum et son ancien dirigeant responsable concluent un accord avec l’Autorité auquel font également partie Vladislav Adoniev et Andrei Crivoi, ce dernier à titre de nouveau dirigeant responsable d’Infinitum. Dans cet accord, ils admettent les manquements reprochés, lesquels sont presque identiques aux manquements constatés par le Tribunal dans le cadre du présent dossier[205].

[412] Le Tribunal a alors entériné l’accord conclu entre eux. Dans la Décision du Tribunal de décembre 2020, en conséquence de la récurrence des manquements, le Tribunal impose une condition de supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev et ordonne le respect d’autres mesures destinées à corriger les inconduites au niveau de la conformité.

[413] Or, qu’en est-il?

[414] La preuve démontre que depuis février 2018, le cabinet Infinitum et Vladislav Adoniev ont de la difficulté au niveau des analyses de besoins financiers, de la tenue des dossiers clients et de la conformité de l’information qui apparaît dans des documents importants échangés avec les clients.

[415] Le Tribunal conclut donc que c’est depuis février 2018 qu’Infinitum et son dirigeant responsable sont incapables de superviser adéquatement les activités professionnelles de Vladislav Adoniev conformément aux restrictions imposées à son certificat par l’Autorité[206], et ensuite, par le Tribunal[207].

[416]  Le Tribunal constate que malgré une gradation des mesures administratives imposées à Infinitum et à Vladislav Adoniev, ces derniers n’ont pas encore révisé leurs pratiques afin de les rendre conformes.

[417] Non seulement les manquements commis sont presque identiques depuis 2018, mais Infinitum et Vladislav Adoniev contestent tous les manquements reprochés par l’Autorité à leur égard. Ils considèrent même que l’Autorité aurait commis un « abus de procédure » en instituant les procédures devant le Tribunal. Cet abus de procédure se refléterait notamment au niveau du mandat confié par l’Autorité à ses procureurs ainsi que dans les lacunes importantes de la preuve aux fins de l’exécution du mandat[208]. En considérant tous les manquements répertoriés dans ce dossier et leur récurrence, le Tribunal est d’avis que l’Autorité n’a commis aucun abus de procédure.

[418] Par ailleurs, le Tribunal est d’avis que la conduite d’Infinitum et de Vladislav Adoniev laisse présager l’existence d’un risque élevé de récidive.

[419] En ce qui concerne la récidive et la récurrence des manquements, le Tribunal rappelle ce qu’il a énoncé dans Autorité des marchés financiers c. 9190-4995 Québec inc.[209] à l’effet que :

« [45] Les manquements relatifs à la supervision de façon générale ont été soulevés répétitivement à l’occasion de trois inspections […] Cette récurrence dénote une incompréhension des obligations législatives et réglementaires de la part du cabinet et de sa dirigeante responsable ainsi qu’un manque de considération de l’importance de ces obligations. »

[420] De plus, le Tribunal réfère à la décision rendue dans Autorité des marchés financiers c. Beaudouin Rigolt & associés[210] dans laquelle le Tribunal s’exprime ainsi en ce qui concerne l’existence de manquements récurrents :

« [160] Plus haut dans la présente décision, le Bureau a souligné l’impression de laisser-aller et de laxisme existant au sein de Beaudoin Rigolt. Cela fut créé par la présentation de la preuve tout au long de l’audience dans le présent dossier. À la suite de l’inspection de l’Autorité, il appert que de nombreux problèmes ont été soulevés par cette dernière et que dans certains cas, il s’agissait de répétitions de manquements déjà constatés pendant l’inspection précédente de 2009. Les témoignages entendus et la preuve documentaire déposée laissent le soussigné sur l’impression d’une certaine incompréhension de la part des personnes intimées par rapport aux devoirs qu’ils doivent remplir pour la protection des épargnants et l’intégrité des marchés. »

[421] Le Tribunal tiendra compte de la récurrence des manquements et le risque élevé de récidive dans l’imposition des mesures administratives.

[422] De plus, le Tribunal constate qu’Infinitum n’a pas respecté ni l’engagement souscrit auprès de l’Autorité à la suite de l’inspection initiale de février 2018, ni celui souscrit dans l’accord entériné dans la Décision du Tribunal de décembre 2020.

[423] Quant à Vladislav Adoniev, il n’a pas respecté les engagements souscrits dans l’accord entériné par la Décision du Tribunal de décembre 2020.

[424] Voici comment le Tribunal s’est exprimé dans l’affaire Autorité des marchés financiers c. 9190- 4995 Québec inc.[211] concernant un engagement souscrit auprès de l’Autorité :

« [87] Un engagement d’un inscrit envers l’Autorité n’est pas comme une simple lettre à la poste. Il convient d’y donner suite et de réaliser ce à quoi on s’est engagé. De l’avis du Tribunal, un tel engagement ne devrait pas être suivi d’une inspection postérieure qui réitère de nouveau plusieurs les mêmes manquements et les mêmes irrégularités comme dans le présent cas. »

[425] Par ailleurs, le Tribunal considère que ni Infinitum ni Vladislav Adoniev n’ont respecté la Décision du Tribunal de décembre 2020. Malgré la nomination d’Andrei Crivoi à titre de dirigeant responsable d’Infinitum et à titre responsable de la supervision stricte des activités de Vladislav Adoniev, la situation ne s’est pas améliorée.

[426] Quant à Andrei Crivoi, le Tribunal rappelle qu’il a signé, à titre du nouveau dirigeant responsable d’Infinitum, l’accord entériné par la Décision du Tribunal de décembre 2020. Le Tribunal considère qu’il ne peut ignorer les manquements admis par Infinitum, son prédécesseur comme dirigeant responsable et par Vladislav Adoniev. Il ne peut pas non plus ignorer les correctifs qu’il devait mettre en place et le type de supervision qu’il devait exercer sur les activités de Vladislav Adoniev.

C)           Le fait que la mesure administrative peut, selon la gravité du geste posé, constituer un facteur dissuasif pour le contrevenant, mais également à l’égard de ceux qui seraient tentés de l’imiter

[427]   En raison de l’occurrence des mêmes manquements nonobstant deux engagements de la part d’Infinitum et un de la part de Vladislav Adoniev envers l’Autorité de corriger la situation et nonobstant la Décision du Tribunal de décembre 2020, le Tribunal est d’avis qu’il est nécessaire d’imposer des mesures administratives qui peuvent constituer un facteur dissuasif pour Infinitum et Vladislav Adoniev, mais également à l’égard de ceux qui seraient tentés de les imiter.

[428]   Le Tribunal ne cherche pas à punir Infinitum et Vladislav Adoniev, mais il doit s’assurer qu’ils corrigent leur pratique. Le Tribunal réfère à la décision dans l’affaire Couture[212] dans laquelle il s’est exprimé comme suit :

« [81] Par conséquent, le Bureau ne recherche pas tant à punir l’intimé pour les manquements qu’il a commis qu’assurer que l’encadrement des professionnels soit adéquat, en vue de la protection du public. La dissuasion générale et spécifique peut cependant être un facteur à évaluer par le tribunal dans l’imposition d’une ordonnance, pour éviter que d’autres professionnels soient enclins à commettre les mêmes manquements et pour dissuader l’intimé de les commettre de nouveau et ainsi, corriger sa pratique. »

[429]  En ce qui concerne Andrei Crivoi, tel que mentionné ci-haut, bien qu’il s’agisse de premiers manquements, le Tribunal ne peut ignorer qu’en signant l’accord entériné par le Tribunal dans la Décision du Tribunal de décembre 2020, il était au courant des manquements reprochés à Vladislav Adoniev, au cabinet pour lequel il agit comme dirigeant responsable et à son prédécesseur. Dans ce sens, les mesures administratives doivent refléter ces faits.

D)           L’expérience des intimés

[430] En ce qui concerne Vladislav Adoniev, le Tribunal rappelle qu’il est inscrit auprès de l’Autorité dans la discipline de l’assurance de personnes depuis 2011, à titre de représentant de courtier en épargne collective depuis 2012 et à titre de représentant de courtier pour un courtier sur le marché dispensé depuis 2017. De plus, il déclare lors de son témoignage avoir été directeur auprès de deux (2) institutions financières[213].

[431] Le Tribunal est surpris qu’une personne inscrite auprès de l’Autorité depuis plus de onze années, pour conseiller et offrir des produits et services financiers au public, ignore encore l’existence de certaines obligations fondamentales à l’exercice de sa profession, dont celle primordiale qui l’oblige à recueillir assez d’informations lui permettant de compléter et procéder à une analyse de besoins financiers avant de recommander un produit financier.

[432] Le Tribunal rappelle que c’est depuis 2017 que son droit de pratique fait l’objet de restrictions de façon répétitive.

[433] Par sa décision du 20 avril 2017, l’Autorité assortit son droit de pratique en assurance de personnes, en épargne collective et sur le marché dispensé de plusieurs conditions, dont notamment celle d’une supervision rapprochée de ses activités pour une période de trois (3) ans[214].

[434]  Dans sa décision, l’Autorité précise ce qui suit :

« Considérant l’ensemble des faits au dossier, l’Autorité est d’avis que les agissements du Représentant affectent sa probité et par le fait même, la protection du public. Ainsi, l’Autorité considère qu’un encadrement des activités du Représentant est nécessaire afin d’assurer la protection du public et celle des intervenants du domaine financier ».

[435] Encore une fois, il ne s’agit pas de « peccadilles », d’actes ou d’omissions sans conséquence véritable ou sans risque de préjudice. Dans sa décision du 20 avril 2017, l’Autorité est d’avis que Vladislav Adoniev s’est comporté de façon à mettre en doute et à affecter sa probité et que ce comportement nécessitait un encadrement particulier, sous la forme d’une supervision rapprochée.

E)           Le caractère intentionnel des gestes posés et le degré de repentir

[436] Selon le Tribunal, il n’existe pas de preuve d’intention malveillante de la part des intimés. Même si certains des manquements laissent présager l’existence d’une attitude d’indifférence, ils n’ont pas agi avec une intention malhonnête ou frauduleuse envers leurs clients.

[437] De plus, lors de l’instruction de ce dossier, le Tribunal a constaté une volonté de s’amender de la part des intimés.

F)            Les pertes subies par les investisseurs et le risque que les contrevenants font courir aux investisseurs et aux marchés financiers si on leur permet de continuer leurs activités

[438]  Les intimés ont fait grand état du fait qu’aucun client d’Infinitum et de Vladislav Adoniev ne se sont plaints de leurs actions et qu’aucun client n’aurait subi quelque préjudice ou perte que ce soit.

[439] En effet, aucune preuve de perte subie par les clients d’Infinitum et de Vladislav Adoniev n’a été présentée au Tribunal.

[440]  Cependant, le fait que Vladislav Adoniev ne complète pas systématiquement une analyse de besoins financiers ou en complète de façon insuffisante et inadéquate en ne recueillant pas de renseignements financiers importants sur ses clients soulève un questionnement sérieux sur la convenance des produits recommandés et la stratégie de financement proposée à ses clients[215].

[441] Dans ces circonstances, le Tribunal ne peut que se réjouir qu’aucun client de Vladislav Adoniev n’ait subi de pertes et n’ait porté plainte, toutefois cela ne permet pas de passer outre et d’excuser ces manquements[216].

G)           Les mesures administratives imposées dans des circonstances semblables

[442] Le Tribunal rappelle que l’Autorité réclame l’imposition de pénalités administratives de l’ordre de 20 000 $, 10 000 $ et 8 000 $ à Infinitum, Andrei Crivoi et Vladislav Adoniev respectivement.

[443] Selon le Tribunal, les pénalités administratives demandées à l’égard d’Infinitum, d’Andrei Crivoi et Vladislav Andrei sont raisonnables eu égard aux pénalités imposées dans des circonstances comparables[217].

[444] En ce qui concerne la demande de suspension provisoire des droits d’exercice de Vladislav Adoniev pour une période de 12 mois, le Tribunal considère que la demande de l’Autorité est trop sévère.

[445] Même si l’Autorité avait réussi à prouver l’ensemble des manquements allégués, ce qui n’est pas le cas, la suspension de 12 mois ne constitue pas une mesure justifiée dans les circonstances. Cette mesure ne serait pas de nature protectrice et préventive. Elle ne revêtirait pas un caractère dissuasif, mais plutôt un caractère punitif, ce qui n’est pas le but des mesures administratives imposées par le Tribunal[218].

[446] Or, le Tribunal considère que les décisions dans les affaires Autorité des marchés financiers c. Bourdon[219] et Autorité des marchés financiers c. Keven Gauthier Rivard[220] ne sont pas des comparables satisfaisants. Dans ces affaires, il s’agissait non seulement d’absence d’information financière suffisante et de la non-convenance des recommandations, mais aussi de la transmission aux institutions financières d’informations financières inexactes ou pouvant induire en erreur sur les clients afin qu'un prêt à effet de levier leur soit accordé.

[447] Dans le cas qui nous occupe, l’Autorité n’a présenté aucune preuve permettant au Tribunal de conclure à une intention malveillante de la part de Vladislav Adoniev à l’effet qu’il aurait volontairement fourni de l’information financière fausse afin que ses clients puissent bénéficier d’un prêt à effet de levier.

[448] Par ailleurs, le Tribunal ne considère pas la décision Autorité des marchés financiers c. Couture[221] comme un comparable acceptable en ce qui concerne la demande de suspension de Vladislav Adoniev pour une période de 12 mois. Dans cette affaire, le Tribunal a radié le certificat du représentant à titre de représentant autonome, mais le Tribunal lui avait permis d’exercer ses activités à la condition qu’elles soient supervisées et qu’il agisse pour le compte d’un cabinet auprès duquel il n’exerçait ni la fonction d’administrateur ni celle de dirigeant responsable.

[449] Finalement, le Tribunal ne considère pas, non plus, l’affaire Autorité des marchés financiers c. Simard[222] comme étant un comparable acceptable, parce que la radiation temporaire de cinq (5) mois n’avait pas été imposée pour le défaut d’avoir complété l’analyse de besoins financiers, mais pour avoir fait souscrire à ses clients un prêt investissement qui ne correspondait pas à leur profil d’investisseur et à leur situation financière.

[450] La suspension d’un droit de pratique, variant entre un et deux mois, pour le défaut de recueillir des renseignements pertinents auprès de clients et de compléter une analyse de besoins financiers conforme à la réglementation a été imposée à de nombreuses reprises par le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière[223]. Le Tribunal tiendra compte de ces décisions.

[451] La suspension d’un droit de pratique pour le défaut de compléter une analyse de besoins financiers dans des circonstances comparables à celles du présent dossier est imposée dans l’affaire Chambre de la sécurité financière c. Simard[224]. Dans cette affaire le Comité de discipline impose une radiation d’un mois pour l’absence d’analyse de besoins financiers.

[452] Le Tribunal tient également compte de l’affaire Autorité des marchés financiers c. Larue-Paradis[225]. Dans cette affaire le Tribunal a suspendu de façon provisoire le certificat du représentant pour une période de cinq mois[226]. Malgré une condition de supervision rattachée à son certificat, ses activités n’ont pas fait l’objet d’une réelle supervision. Par ailleurs, il a vendu un produit financier sans détenir de certificat lui permettant de le faire. Aussi, il laissait croire au public qu’il était autorisé à vendre certains produits financiers, alors qu’il n’avait pas ce droit.

[453] Après avoir considéré les critères établis dans l’affaire Demers le Tribunal va mettre en œuvre, dans l’intérêt public, une série de mesures administratives lesquelles permettront d’atteindre les objectifs de protection du public et de répondre aux critères de dissuasion spécifique et générale[227].

[454] En raison du nombre, de la gravité et du caractère répétitif des manquements, le Tribunal se doit de mettre en œuvre des mesures administratives qui incluent une suspension du certificat et de l’inscription de Vladislav Adoniev dans toutes les catégories dans lesquelles il est inscrit, pour une durée de trois (3) mois.

[455] Cette suspension temporaire de trois (3) mois tient également compte du risque élevé de récidive, du non-respect des engagements contenus dans l’accord conclu avec l’Autorité et du non-respect de la Décision du Tribunal de décembre 2020.

[456] Cette suspension temporaire de trois (3) mois tient compte de la gradation des mesures administratives imposées à Vladisalv Adoniev lesquelles n’ont pas eu l’effet escompté. Malgré l’imposition d’une supervision rapprochée et stricte de ses activités, celui-ci a continué de commettre, pour la plupart, des manquements identiques.

[457] Le Tribunal est également d’avis que la radiation de l’inscription d’Infinitum s’impose afin de protéger le public.

[458] Infinitum est inscrite auprès de l’Autorité pour lui permettre d’agir dans la discipline de l’assurance de personnes depuis février 2016[228]. Vladislav Adoniev est un de ses actionnaires et le seul représentant rattaché à ce cabinet[229].

[459] Depuis qu’Infinitum détient son inscription en assurance de personnes en 2016, elle a eu quatre différents dirigeants responsables, dont les deux (2) derniers Yannick Tarik Meddane et Andrei Crivoi[230] n’ont pas été en mesure d’assumer les responsabilités liées à leur fonction de dirigeant responsable en plus de ne pas avoir assuré une supervision adéquate et conforme des activités de Vladislav Adoniev.

[460] Depuis la première inspection de février 2018 jusqu’à la présente décision, la preuve démontre que le cabinet Infinitum est incapable de corriger des enjeux importants de conformité et de supervision, et ce, malgré plusieurs engagements envers l’Autorité et malgré la Décision du Tribunal de décembre 2020.

[461] Afin de radier l’inscription d’Infinitum, le Tribunal tient compte du non-respect de ses engagements envers l’Autorité et du non-respect de la Décision du Tribunal de décembre 2020 et de ses nombreuses récidives.

[462] Par ailleurs, dans la Décision du Tribunal de décembre 2020, le Tribunal ordonne à Infinitum de mettre en place des procédures de contrôle et de surveillance afin de s’assurer que le cabinet et son représentant respectent la LDPSF et ses règlements, plus spécifiquement en ce qui a trait à la supervision des représentants, la tenue des dossiers, la convenance des transactions et les pratiques de commercialisation. Force est de constater qu’Infinitum a fait défaut de respecter cette ordonnance du Tribunal.

[463] Rappelons que dans la décision du Tribunal de décembre 2020, le Tribunal qualifie les gestes d’Infinitum, de Vladislav Adoniev et du dirigeant responsable de l’époque comme « mettant en danger l’intérêt public, les intérêts particuliers de leurs clients et la réputation même de tout un secteur névralgique de la Place financière, soit celui des services d’assurance. »

[464] Le Tribunal est conscient qu’Infinitum est un cabinet de petite taille et qu’un seul représentant s’y rattache. Cependant, le Tribunal rappelle qu’un « client a droit au même niveau de protection que le cabinet soit petit ou qu’il soit grand » [231].

[465] Pour ces raisons, le Tribunal est d’avis que l’imposition d’une pénalité administrative n’est pas suffisante. Dans le but de protéger notamment les clients de Vladislav Adoniev et d’Infinitum et dans l’intérêt public en général, le Tribunal est d’avis que l’inscription d’Infinitum doit être radiée[232].

[466] Le Tribunal est d’avis que conformément à la demande de l’Autorité, suivant l’expiration du délai de suspension de son certificat, il y a lieu pour Vladislav Adoniev de se rattacher à un cabinet devant être préalablement approuvé par l’Autorité.

[467] En ce qui concerne la suspension du certificat et de l’inscription de Vladislav Adoniev, ainsi que la radiation du cabinet Infinitum, les intimés prétendent que si Vladislav Adoniev et Infinitum constituaient un réel danger pour le public, l’Autorité aurait pu recourir à des mesures provisoires. Selon eux, non seulement l’Autorité ne s’est pas prévalue de cette possibilité, mais au contraire, elle a demandé au Tribunal de rendre une ordonnance visant à maintenir le « statu quo » pendant le délibéré du dossier, ce que le Tribunal a accepté en raison du consentement des intimés.

[468] Selon les intimés, cette demande de l’Autorité de maintenir le « statu quo » et la décision du Tribunal à cet effet constitueraient une fin de non-recevoir à la demande de radiation de l’inscription d’Infinitum et à la demande de suspension des droits de pratique de Vladislav Adoniev.

[469] Sur ce moyen de défense, les intimés réfèrent à une trilogie de décisions rendues par le juge Raoul Barbe de la Cour du Québec en 2004 qui siégeait en appel de trois décisions rendues par le Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière[233].

[470] Dans ces affaires, le Comité de discipline avait refusé d’entériner des recommandations communes des parties qui prévoyaient uniquement le paiement d’une pénalité et a plutôt imposé des radiations temporaires des droits de pratique des intimés. Ces trois (3) décisions ont été rendues trois mois après l’expiration du délai prévu dans le Code de professions de l’époque. La Cour du Québec a accueilli les appels et a entériné les recommandations communes des parties.

[471]  La Cour du Québec a considéré que le délai pris par le Comité de discipline (trois mois après l’expiration du délai prévu par la loi) démontrait que celui-ci ne craignait nullement pour la protection du public durant cette période. Les intimés étaient libres d’exercer leurs activités professionnelles. La lenteur à rendre les décisions démontrait que la radiation n’était pas nécessaire.

[472]  De l’avis du Tribunal, ces décisions ne s’appliquent pas en l’espèce. Tout d’abord, les motifs de la décision de la Cour du Québec sur les conséquences du délai du Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière à rendre une décision ne sont pas opposables à l’Autorité.

[473]  De plus, le Tribunal a respecté le délai prévu à la Loi sur l’encadrement du secteur financier pour rendre la présente décision.

[474]  Mais il y a plus.

[475] Dans le présent dossier, contrairement aux dossiers devant la Cour du Québec, les intimés ne sont pas libres d’exercer leurs activités professionnelles comme bon leur semble. Les activités de Vladislav Adoniev en assurance de personnes continuent de faire l’objet d’une supervision stricte de la part d’Andrei Crivoi. Ce dernier doit notamment soumettre à l’Autorité, les Déclarations de supervision stricte, et ce, mensuellement. Les activités de Vladislav Adoniev doivent donc être encadrées et supervisées par Andrei Crivoi qui doit rapporter le résultat de l’exercice de sa supervision mensuellement à l’Autorité.

[476] Les activités de Vladislav Adoniev continuent également de faire l’objet d’une supervision stricte en épargne collective et sur le marché dispensé, suite à la nomination d’un nouveau superviseur pour effectuer cette supervision. Celui-ci doit également transmettre les Déclarations de supervision stricte et rapporter le résultat de l’exercice de sa supervision stricte mensuellement à l’Autorité.

[477]  Afin de contester les mesures administratives demandées par l’Autorité à l’égard de Vladislav Adoniev, les intimés réfèrent à la décision du Tribunal dans l’affaire Autorité des marchés financiers c. Dastous[234].

[478]  Dans cette affaire, l’Autorité reprochait au représentant en assurance de personnes de ne pas avoir bien tenu des dossiers clients, de ne pas avoir effectué l’analyse de besoins financiers de ses clients, ni d’avoir complété leur profil d’investisseur lors de l’achat de fonds distincts.

[479]  En plus d’une pénalité administrative, l’Autorité cherchait à assortir le certificat du représentant d’une obligation de rattachement à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable ni l’administrateur pour une période de deux (2) ans. Pour l’intimé Pierre Dastous, cette condition « reviendrait à signer son arrêt de mort ».

[480]  Dans cette décision, le Tribunal n’a pas assorti le certificat du représentant d’une obligation de rattachement, étant d’avis que la pénalité administrative était suffisante afin d’assurer la protection du public.

[481]  De l’avis du Tribunal, cette décision ne s’applique pas, car les faits et les circonstances sont très différents du présent dossier. Dans l’affaire Dastous, l’intimé avait admis tous les manquements reprochés par l’Autorité. Seule la sanction était contestée.

[482] De plus, contrairement au présent dossier, il s’agissait de manquements constatés lors de la première inspection de l’Autorité et d’une première plainte à l’égard de l’intimé. L’intimé avait déjà mis en place un système de conformité lui permettant d’assurer sa conformité et avait même retenu les services d’un consultant en conformité.

[483] Enfin, contrairement à Infinitum, Andrei Crivoi et à Vladislav Adoniev, l’intimé avait démontré au Tribunal qu’aussitôt qu’il avait pris connaissance de l’existence de manquements, il s’était amendé et avait démontré sa capacité à gérer sa pratique de façon conforme.

[484]  En ce qui concerne Andrei Crivoi, le Tribunal est d’avis qu’il est nécessaire, dans l’intérêt public, d’assortir le certificat en assurance de personnes d’une condition lui interdisant d’agir à titre de dirigeant responsable et comme superviseur d’un autre représentant. Cependant, contrairement à ce que l’Autorité demande, le Tribunal va limiter la condition à une période de trois (3) ans et non à cinq (5) ans.

[485] Compte tenu de ce qui précède et après avoir pris en considération la preuve et l’argumentation des parties, le Tribunal est d’avis qu’il doit imposer aux intimés dans l’intérêt public les mesures administratives suivantes.

CONCLUSION

POUR CES MOTIFS, le Tribunal administratif des marchés financiers, en vertu des articles 93, 94 et 97 al. 2 (7°) de la Loi sur l’encadrement du secteur financier[235], des articles 152 et 273.1 de la Loi sur les valeurs mobilières[236] et 115, 115.1 et 127 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[237] :

ACCUEILLE partiellement la demande de l’Autorité des marchés financiers;

Infinitum Succession et Patrimoine inc.

IMPOSE à Infinitum Succession et Patrimoine inc. une pénalité administrative de vingt mille dollars (20 000 $), payable dans les trente (30) jours de la présente décision, pour l’ensemble des manquements constatés par le Tribunal;

RADIE l’inscription d’Infinitum Succession et Patrimoine inc., portant le numéro 601694, dans toutes les disciplines dans lesquelles il est inscrit;

ORDONNE à Infinitum Succession et Patrimoine inc. de pleinement collaborer avec l’Autorité des marchés financiers en remettant, dans les trente (30) jours de l’entrée en vigueur de sa radiation, tous ses dossiers clients, livres et registres du cabinet à un cabinet dûment inscrit et préalablement approuvé par l’Autorité des marchés financiers. Les dossiers devront être remis à ce cabinet, dans une forme lui permettant d’y avoir accès en tout temps;

ORDONNE à Infinitum Succession et Patrimoine inc. d’informer l’Autorité des marchés financiers, dans les dix (10) jours de la présente décision, des démarches qu’il entend entreprendre pour trouver un cabinet dûment inscrit prêt à accepter tous ses dossiers clients, livres et registres;

ORDONNE à Infinitum Succession et Patrimoine inc. d’informer l’Autorité des marchés financiers, dans les quinze (15) jours de la présente décision, de l’identité du nouveau cabinet désigné;

ORDONNE à Infinitum Succession et Patrimoine inc. de transmettre un avis écrit à tous ses clients dans les dix (10) jours de la notification de la décision, suivant l’approbation préalable de l’Autorité des marchés financiers quant au texte de l’avis qui devra lui être soumis, en s’adressant à M. Louis Letellier, à l’adresse courriel louis.letellier@lautorite.qc.ca, dans les quarante-huit (48) heures de la signification de la décision, les informant :

1)            Du retrait de son inscription, la décision étant jointe;

2)            Du fait qu’ils devront prendre les mesures appropriées en vue de s’assurer du suivi de leur dossier soit en contactant :

a)            l’assureur directement où leurs polices d’assurance sont confiées;

b)            tout cabinet de leur choix; ou encore,

c)            un cabinet désigné par Infinitum Succession et Patrimoine inc., étant entendu que ledit cabinet aura été préalablement approuvé par l’Autorité des marchés financiers;

3)            Et de la nécessité de refaire une évaluation de leurs besoins d’assurance par un cabinet autre;

et de transmettre à l’Autorité des marchés financiers, à l’attention de M. Louis Letellier, à l’adresse courriel louis.letellier@lautorite.qc.ca, un compte rendu hebdomadaire du mouvement de la clientèle, le tout dès la radiation de l’inscription d’Infinitum Succession et Patrimoine inc.;

À défaut, la remise des dossiers s’effectuera auprès de l’Autorité des marchés financiers de la manière suivante :

Infinitum Succession et Patrimoine inc. devra communiquer, dès l’entrée en vigueur de la radiation du cabinet, avec la Direction de l’inspection – Assurances et ESM de l’Autorité des marchés financiers, au numéro 1-877-525-0337, afin de déterminer la date à laquelle les dossiers seront remis à l’Autorité des marchés financiers. Les dossiers devront être remis à l’Autorité des marchés financiers, dans une forme lui permettant d’y avoir accès en tout temps, au 800, rue du Square-Victoria, Tour de la Bourse, 20e étage, Montréal (Québec);

Andrei Crivoi

IMPOSE à Andrei Crivoi une pénalité administrative de dix mille dollars (10 000 $), payable dans les trente (30) jours de la présente décision pour l’ensemble des manquements constatés par le Tribunal;

INTERDIT à Andrei Crivoi d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable d’un cabinet, et ce, pour une période de trois (3) ans;

ASSORTIT le certificat, portant le numéro 218577, dans la discipline de l’assurance de personnes, au nom d’Andrei Crivoi, de la condition suivante :

-           Le représentant ne peut agir à titre de superviseur d’un autre représentant, et ce, pour une période de trois (3) ans;

ASSORTIT le certificat, portant le numéro 218577, dans la discipline de l’assurance de personnes, au nom d’Andrei Crivoi, de la condition suivante : le représentant doit, dans les trente (30) jours de la présente décision, compléter et réussir la formation en ligne « La conformité à l’ère du numérique », disponible sur le site Internet de la Chambre de la sécurité financière, laquelle ne pourra être comptabilisée dans le calcul des unités de formation continue obligatoires à être complétées par ce dernier;

ORDONNE à Andrei Crivoi de transmettre à l’Autorité des marchés financiers la preuve de réussite de la formation « La conformité à l’ère du numérique », et ce, dans les quinze (15) jours de la réussite;

Vladislav Adoniev

IMPOSE à Vladislav Adoniev une pénalité administrative de cinq mille dollars (5 000 $), payable dans les trente (30) jours de la présente décision, pour les manquements à titre de représentant en assurance de personnes constatés par le Tribunal;

SUSPEND le certificat, portant le numéro 189696, dans la discipline de l’assurance de personnes, au nom de Vladislav Adoniev, pour une période de trois (3) mois;

ASSORTIT le certificat, portant le numéro 189696, dans la discipline de l’assurance de personnes, au nom de Vladislav Adoniev, des conditions suivantes :

-               Le représentant doit, pour une période de trois (3) ans, alors qu’il a un droit d’exercice valide, être rattaché à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable. Le représentant devra, trente (30) jours avant l’expiration du délai de suspension de son certificat, transmettre à l’Autorité des marchés financiers une demande de rattachement, le cabinet devant être préalablement approuvé par l’Autorité des marchés financiers;

-               Le représentant doit, pour une période de deux (2) ans, alors qu'il a un droit d'exercice valide, exercer ses activités sous la supervision stricte d'une personne nommée par le dirigeant responsable du cabinet auquel il sera rattaché;

-               Le représentant doit faire parvenir à l'Autorité des marchés financiers, trente (30) jours avant l’expiration du délai de suspension de son certificat, une attestation de la part du dirigeant responsable du cabinet désignant la personne qui supervisera ses activités de représentant, le superviseur devant être préalablement approuvé par l’Autorité des marchés financiers. Le cabinet désigné devra démontrer à la satisfaction de l’Autorité des marchés financiers, la mise en place de mesures de conformité et de supervision. Au surplus, un rapport de supervision devra être transmis à l'Autorité des marchés financiers mensuellement pour la durée de la supervision;

-               L’Autorité des marchés financiers se garde le droit de demander des dossiers clients qui auront fait l’objet de la supervision stricte mentionnée dans les rapports mensuels pour la période de la supervision. Le cas échéant, les dossiers devront lui être remis dans un délai de dix (10) jours de la demande;

Et en vertu des articles 152 et 273.1 de la Loi sur les valeurs mobilières

Vladislav Adoniev

IMPOSE à Vladislav Adoniev une pénalité administrative de trois mille dollars (3 000 $), payable dans les trente (30) jours de la présente décision, pour les manquements à titre de représentant de courtier pour un courtier en épargne collective et à titre de représentant de courtier pour un courtier sur le marché dispensé constatés par le Tribunal;

SUSPEND l’inscription, portant le numéro 2862321, dans les catégories de représentant de courtier pour un courtier en épargne collective et représentant de courtier pour un courtier sur le marché dispensé, au nom de Vladislav Adoniev, pour une période de trois (3) mois;

ASSORTIT l'inscription, portant le numéro 2862321, dans les catégories de représentant de courtier pour un courtier en épargne collective et représentant de courtier pour un courtier sur le marché dispensé, au nom de Vladislav Adoniev, des conditions suivantes :

-               Le représentant doit, pour une période de deux (2) ans, alors qu'il a un droit d'exercice valide, exercer ses activités sous la supervision stricte d'une personne nommée par le chef de conformité de la société auquel il sera rattaché, entendu que le superviseur ne peut être Richard Bernard;

-               Le représentant doit faire parvenir à l'Autorité des marchés financiers, trente (30) jours avant l’expiration du délai de suspension de son inscription, une attestation de la part du chef de conformité de la société désignant la personne qui supervisera ses activités de représentant, le superviseur devant être préalablement approuvé par l’Autorité des marchés financiers. La société désignée devra démontrer à la satisfaction de l’Autorité des marchés financiers, la mise en place de mesures de conformité et de supervision. Un rapport de supervision devra être transmis à l'Autorité des marchés financiers mensuellement pour la durée de la supervision;

-               L’Autorité des marchés financiers se garde le droit de demander des dossiers clients qui auront fait l’objet de la supervision stricte mentionnée dans les rapports mensuels pour la période de la supervision. Le cas échéant, les dossiers devront lui être remis dans un délai de dix (10) jours de la demande;

AUTORISE l’Autorité des marchés financiers à percevoir le montant de cette pénalité administrative;

ORDONNE à l’Autorité des marchés financiers de notifier la présente décision aux parties intimées et d’en fournir une preuve au Tribunal.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Me Chantal Denommée

Juge administrative

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Me Antonietta Melchiorre

Juge administrative

 

 

 

 

Me Sarah Nadeau-Labbé et Me Marie A. Pettigrew

(Contentieux de l’Autorité des marchés financiers)

Pour l’Autorité des marchés financiers

 

Me Patrick Delisle et Me Carolyne Mathieu

(Delisle Mathieu Avocats)

Pour Infinitum Succession et Patrimoine inc., Vladislav Adoniev et Andrei Crivoi

 

 

 

Dates d’audience :

16, 17, 20, 21, 22, 23 juin et 11 juillet 2022

 



[1]     Article 4 (3) et (4) Loi sur l’encadrement du secteur financier, RLRQ, c. E-6.1 (« LESF »).

[2]     RLRQ, c. D-9.2.

[3]     RLRQ, c. V-1.1.

[4]     Marston c. Autorités des marchés financier, 2007 QCCQ 14913, appel rejeté par la Cour d’appel, 2009 QCCA 2178.

[5]     Article 184 LDPSF et article 276 LVM.

[6]     Le pouvoir d’inspection de l’Autorité est prévu notamment aux articles 9 à 17 LESF, aux articles 107 à 114.1 LDPSF et aux articles 151.1 à 151.5 LVM.

[7]     Pièce D-5.

[8]     Ibid.

[9]     Pièces D-5 et D-6.

[10]    Pièce D-2.

[11]    Pièce D-6.

[12]    Le Tribunal exposera plus loin les tenants et aboutissants d’une supervision dite « rapprochée ».

[13]    Pièce D-6.

[14]    Pièce D-5.

[15]    Pièce D-1.

[16]    Pièce D-3.

[17]    Pièce D-5.

[18]    Pièces D-14 et D-7.

[19]    Ibid.

[20]    Ibid.

[21]    Pièce D-14 (version modifiée de la demande originale).

[22]    Pièce D-7 (en annexe à la décision du Tribunal).

[23]    Pièce D-7.

[24]    Pièce D-16.

[25]    Pièce D-4.

[26]    Pièce D-2.

[27]    Pièce D-10.1, Autorité des marchés financiers c. Bernard, 2022 QCTMF 9.

[28]    Pièce D-10.1.

[29]    Pièce D-54.

[30]    L’instruction du présent dossier a eu lieu les 16, 17, 20, 21, 22, 23 juin et 11 juillet 2022.

[31]    Les intimés qualifient la demande de l’Autorité de prolonger la condition de supervision stricte comme une reconnaissance ou admission que la situation ne justifie pas une suspension des droits d’exercice de Vladislav Adoniev, argument sur lequel le Tribunal se penchera plus loin dans la décision.

[32]    Autorité des marchés financiers c. Infinitum Succession et Patrimoine inc., 2022 QCTMF 38.

[33]    Articles 27 et 28 LDPSF; article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants, RLRQ, c. D-9.2, r. 10; articles 13.2 et 13.3 du Règlement 31-103 sur les obligations et dispenses d’inscription et les obligations continues des personnes inscrites, RLRQ, c. V-1.1, r. 10; Instruction générale relative au Règlement 31-103 sur les obligations et dispenses et les obligations continues des personnes inscrites; article 15 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière, RLRQ, c. D-9.2, r. 3.

[34]    Laflamme c. Prudential-Bache Commodities Canada Ltd, 2000 CSC 26.

[35]    Richter & Associés inc. c. Merrill Lynch Canada inc., 2007 QCCA 124; Financière Banque Nationale c. Canonne, 2008 QCCA 2020; Mazzarolo c. BMO Nesbitts Burns Ltée, 2013 QCCA 245.

[36]    Voir notamment : Autorité des marchés financiers c. Dean Evans Service au client privé inc., 2020 QCTMF 35.

[37]    Chambre de la sécurité financière c. Simard, 2016 CanLII 21667 (QCCDCSF); Chambre de la sécurité financière c. Wang, 2017 QCCDCSF 44.

[38]    Préc., note 33.

[39]    Préc., note 33.

[40]    Raymonde Crête, Partie III : les manifestations du particularisme juridique des rapports de confiance dans les services de conseils financiers de la gestion de portefeuille, 2009 39-2 Revue générale de droit 581, 2009 CanLIIDocs 420.

[41]    En vertu de l’article 16 LDPSF : « Un représentant est tenu d’agir avec honnêteté et loyauté dans ses relations avec ses clients.

Il doit agir avec compétence et professionnalisme ».

En vertu de l’article 160.1 LVM « Dans ses relations avec ses clients et dans l’exécution du mandat reçu d’eux, la personne inscrite à titre de courtier, de conseiller ou de représentant est tenue d’apporter le soin que l’on peut attendre d’un professionnel avisé, placé dans les mêmes circonstances ».       

[42]    Article 6 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33.        

[43]    Ibid.

[44]    Avis relatif à l’application du Règlement sur l’exercice des activités des représentants, R.R.Q., c. 9.2, r.10.

[45]    Ibid et article 17(8) du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome, RLRQ, c. D-9.2, r. 2, (« Règlement sur le cabinet »).

[46]    Chambre de la sécurité financière c. Gélinas, 2014 CanLII 39920 (QC CDCSF); Autorité des marchés financiers c. Couture, 2013 QCBDR 138.

[47]    Autorité des marchés financiers c. Groupe Lemieux, 2013 QCBDR 103 (confirmé en appel : 2014 QCCQ 10759).

[48]    Les Dossiers clients en assurance se composent de quatre dossiers complétés entre janvier et février 2021, soit les pièces D-30 et D-31 A) à D) et de huit autres dossiers complétés entre juillet 2021 et janvier 2022, soit les pièces D-30.1 et D-31 E) à L).

[49]    Pièces D-30 et D-30.1.

[50]    Procès-verbal de l’audience du 16 juin 2022.

[51]    Article 81 Règlement sur les règles de procédure du Tribunal administratif des marchés financiers, RLRQ, c. E-6.1, r. 1.

[52]    Page 9 des Notes et autorités sommaires des intimés datées du 3 juillet 2022.

[53]    Malo c. Ordre des infirmières et infirmier du Québec, 2003 QCTP 132; Médecins (Ordre professionnel des) c. Bissonnette. 2019 QCTP 51.

[54]    2013 QCBDR 138.  

[55]    Article 6 Règlement sur l’exercice de l’activité des représentants, préc., note 33 ; article 17 (8) (10) et al. 2 du Règlement sur le cabinet, préc. note 45; Pièce D-35 ; Stratégie à effet de levier | CSF (chambresf.com); Emprunt aux fins de placement – Convenance et surveillance, Annexe A, www.ocrcvm.ca.

[56]    Article 27 LDPSF et art. 13.3 Règlement 31-103.

[57]    Article 27 LDPSF et art. 13.3 Règlement 31-103.

[58]    Pièces D-30 et D-30.1.

[59]    Pièces D-30, D-31 A) et B).

[60]    Pièces D-30, D-31 D), D-30.1 et D-31 G).

[61]    Pièces D-30 et D-31 C), D-30.1 et D-31 E), F), H) à L).

[62]    Article 88 LDPSF.

[63]    Le niveau de risque d’un fonds est un estimé de la volatilité passée du rendement de ce fonds. Voir Règlement 81-102 sur les fonds d’investissements, RLRQ, c. V-1.1, r. 39.

[64]    Ce qui signifie que l’investisseur est disposé à choisir des investissements qui fluctuent sur une courte période et qui sont à risques élevés et que sa tolérance au risque est élevée. Entre autres voir la pièce D-31 A, page 95.        

[65]    Pièces D-31 A) et B).

[66]    Ce qui signifie que l’investisseur possède une forte tolérance au risque et les fluctuations des marchés ne le tracassent pas. Il cherche une croissance plus élevée de son portefeuille et est prêt à assumer des variations substantielles de la valeur de son portefeuille d’une année à l’autre. Voir les Pièces D-31 D) et D-31 G).

[67]    Pièces D-31 D) et D-31 G).

[68]    Pièces D-30, D-31 D), D-30.1 et D-31 G).

[69]    Pièces D-30, D-30.1 et D-31 C), E), F), H) à L).

[70]    Pièces D-31 C), E) et F).

[71]    Pièce D-30.1, page 5.

[72]    Pièces D-31 H) à L).

[73]    Pièce D-31 A), page 84, D-31 B), page 9, D-31 C), pages 8, D-31 E), pages 39, D-31 F), page 114, D-31 G), page 71, D-31 H), pages 49, 52, 54 et 57, D-31 I), pages 55, 58, et 61, D-31 J), pages 18, 21, 24, et 27, D-31 K), pages 35, 38, 41 et 44 et D-31 L), pages 25, 28 et 31.

[74]    Pièce D-50. Ce logiciel permet de consigner de l’information reliée à la convenance des transactions effectuées par les représentants.

[75]    Préc., note 33, page 87.

[76]    Le paragraphe 1 du Règlement 31-103 précise que :

1) Avant d’ouvrir un compte pour un client, d’acheter, de vendre, de déposer, d’échanger ou de transférer des titres à l’égard du compte, ou de prendre, y compris en vertu d’un pouvoir discrétionnaire, ou de recommander toute autre mesure relative à un placement pour le client, la personne inscrite établit de façon raisonnable que la mesure respecte les critères suivants:

a) elle convient au client, selon les facteurs suivants:

i) l’information recueillie au sujet du client conformément à l’article 13.2;

ii) l’évaluation ou la compréhension du titre par la personne inscrite conformément à l’article 13.2.1;

iii) les conséquences de la mesure sur le compte du client, notamment la concentration et la liquidité des titres dans le compte;

iv) l’incidence réelle et potentielle des coûts sur les rendements des placements du client;

v) un ensemble raisonnable d’autres mesures qu’elle peut adopter par l’entremise de la société inscrite au moment de l’évaluation;

b) la mesure donne préséance à l’intérêt du client.

[77]    Autorité des marchés financiers c. Dean Evans Service au client privé inc., 2020 QTMF 35.

[78]    Par l’entremise d’emprunt bancaire de l’ordre de 100 000 $ chacun.

[79]    Pièce D-35.

[80]    Pièce D-35.

[81]    11 clients ont chacun contracté un prêt de 100 000 $ et un client a contracté un prêt de 60 000 $.

[82]    Pièces D-30 et D-31 B).

[83]    Pièces D-30 et D-31 A), C) et D).

[84]    La valeur nette est ce qu’une personne possède (son actif : argent à la banque, bâtiments, meubles, etc.) moins ses dettes (son passif : prêts hypothécaires, etc.). Emprunter pour investir? - Comprenez les risques! | AMF (lautorite.qc.ca)

[85]    La valeur nette liquide est la partie de la valeur nette qui peut être convertie en argent comptant de façon facile et rapide. Emprunter pour investir? - Comprenez les risques! | AMF (lautorite.qc.ca)

[86]    Pièce D-35, p. 2.

[87]    Chambre de la sécurité financière c. Wang, 2017 QCCDCSF 44.

 

[88]     Article 88 LDPSF et article 12 Règlement sur le cabinet, préc., note 45.

[89]     Article 6 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33. Ces renseignements incluent, entre autres, les polices ou contrats d’assurance en vigueur, les objectifs de placement, sa tolérance aux risques, le niveau de ses connaissances financières et tout autre élément nécessaire, tel que ses revenus, son bilan financier, le nombre de personnes à sa charge et ses obligations personnelles et familiales.

[90]     Article 16 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33. « Lorsque le produit d’assurance vendu contient une rente individuelle, le représentant doit remettre au client en plus de la police, un document lisible indiquant:

1° si les coûts d’assurance payables en vertu du contrat sont garantis et, le cas échéant, pour quelle durée ils le sont et s’ils peuvent fluctuer;

2° si les rendements des sommes d’argent placées pour un produit d’assurance sont garantis ou non;

3° si le capital d’assurance souscrit est garanti ou s’il peut fluctuer;

4° les exclusions particulières dont est affecté le contrat souscrit;

 5° si des frais de rachat ou des pénalités sont exigibles en cas de retrait;

(…)»

[91]    Articles 12 et 17 Règlement sur le cabinet, préc., note 45.

[92]    Article 17 (8) Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33.

[93]    Article 17 (5) Règlement sur le cabinet, préc., note 45.

[94]    Article 16 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33.

[95]    Article 17 al. 2 Règlement sur le cabinet, préc., note 45.

[96]    Document préparé par la Chambre de la sécurité financière portant sur le contenu du dossier client; Pièce D-35.

[97]    RLRQ, c. D-9.2, r. 18, Section IV.

[98]    Pièce D-30.1, p. 24.

[99]    Article 85 LDPSF.

[100] Articles 88 LDPSF et 12 du Règlement sur le cabinet, préc., note 45.

[101] Articles 85 et 86 LDPSF.

[102] Article 6 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33, et article 17 (8) Règlement sur le cabinet, préc., note 45 ; Pièces D- 30 et D-30.1 et D-31 A) B) C) D) E) F) et G).

[103] Article 4.16 Règlement sur les renseignements à fournir au consommateur, préc., note 97.

[104] Article 17 (5) Règlement sur le cabinet, préc., note 45.

[105] 2e alinéa de l’article 17 Règlement sur le cabinet, préc., note 45.

[106] Articles 6 et 16 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33, article 17 Règlement sur le cabinet, préc., note 45 et article 4.14 Règlement sur les renseignements à fournir au consommateur, préc., note 97.

[107] Article 86 LDPSF.

[108] Articles 1 et 5 Règlement sur le cabinet, préc., note 45 et article 14 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33.

[109] Article 1 Règlement sur le cabinet, préc., note 45. Voir également le Guide gouvernance et conformité de l’Autorité, www.lautorite.ca.

[110] Article 14 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33. Voir également le Guide sur les représentations de l’Autorité, www.lautorite.ca.

[111] Pièce D-5.

[112] Article 1 Règlement relatif à la délivrance et au renouvellement du certificat de représentant RLRQ, c. D-9.2, r. 7.

[113] Pièces D-30, D-30.1, D-31 A), B), C), D) et E).

[114] Pièce D-44.

[115] Pièces D-19, D-22, D-26 et D-33.I

[116] Pièces D-30, D-30.1 et D-31 A) à G), I) et J).

[117] Article 16 LDPSF et art. 14 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33.

[118] Pièces D-19, D-22, D-26 et D-33.

[119] Pièces D-19, D-22, D-26, D-33 et D-44.

[120] Article 85 LDPSF.

[121] Article 86 LDPSF.

[122] 2019 QCTMF 13.

[123] Dirigeant responsable et représentant autonome | AMF (lautorite.qc.ca)

[124] Autorité des marchés financiers c. 9190- 4995 Québec inc., 2018 QCTMF 82.

[125] Boileau c. Autorité des marchés financiers, 2020 QCCQ 2554, par. 34.

[126] Pièce D-34.

[127] Pièce D-34, page 5.

[128] Pièce D-34, page 59.

[129] Pièce D-34, page 59.

[130] Pièce D-34, page 7.

[131] Autorité des marchés financiers c. 9190-4995 Québec inc., 2018 QCTMF 82.

[132] Pièce D-35.

[133] Pièces D-36, D-36.1, D-50 et D-52.

[134] Beaudoin, Rigolt & Associés c. Autorité des marchés financiers, 2016 QCCQ 9295.

[135] Pièce D-35, pages 1 et 2.

[136] Pièce D-35, page 2.

[137] Ces circonstances et critères comprennent, entre autres, la connaissance du placement, la tolérance aux risques, l’âge, l’horizon de placement, la valeur nette et le revenu.

[138] Telle que l’obligation de verser au dossier client la convention de prêt, les informations relatives au prêt, si le client a déjà emprunté de l’argent sans la participation du représentant.

[139] Pièce D-34, page 59.

[140] Pièce D-34, page 61.

[141] Comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière c. Wang, 2017 QCCDCSF 44.

[142] Pièce D-37.

[143] Pièce D-39, Information apparaissant au premier paragraphe.

[144] Ibid.

[145] Ibid.

[146] Pièce D-39.

[147] Pièce D-37.

[148]  Pièces D-16, D-18, D-19 et D-20.

[149] Pièce D-30 et D-30.1 et par. 88 de l’Acte introductif modifié en date du 13 juin 2022 de l’Autorité.

[150] Pièces D-30, D-30.1 et D-31 A) à F).

[151] Pièce D-39.1.

[152] Voir également Pièce D-22.

[153] Pièces D-23, D-26 et D-27.

[154] Pièces D-31 G) et H).

[155] Pièce I-8.

[156] 2015 QCBDR 129.

[157] 2018 QCTMF 82.    

[158] Pièces D-16 et D-19 qui prévoient que la Déclaration de supervision stricte doit être transmise à l’Autorité au plus tard la semaine suivant la fin du mois couvert par la déclaration.

[159] Pièce D-16.

[160] Pièce D-18.

[161] Une description des enjeux de conformités rencontrés et documentés dans le dossier, le détail des corrections demandées et les explications quant aux corrections effectuées pour que le dossier devienne conforme tel que cela est requis.

[162] Pièce D-7.

[163] Pièce D-7, p. 19.

[164] Articles 195 (1) et (2) LVM.

[165] Pièce D-8.

[166] Pièces D-6 et D-8.

[167] Pièce D-8.

[168] Pièce D-37.

[169] Pièce D-50.

[170] Pièce D-49.

[171] Pièce D-45.

[173] Article 195 (1) et (2) LVM.

[174] Pièce D-55.

[175] Pièce 10.1, Autorité des marchés financiers c. Bernard, 2022 QCTMF 9.

[176] Pièce D-54.

[177] Pièce D-55.

[178] Article 195 (1) et (2) LVM.

[179] Pièce D-53.

[180] Procès-verbal de l’audience du 22 juin 2022.

[181] Article 115 LDPSF.

[182] Article 115.1 LDPSF.

[183] Article 115.9 LDPSF.

[184] Articles 266 et 273.1 LVM.

[185] Marston c. Autorité des marchés financiers, 2007 QCCQ 14913 (appel rejeté par la Cour d’appel, 2009 QCCA 2178).

[186] Ibid.

[187] 2009 QCCA 2178.

[188] Ibid, par. 52.

[189] Autorité des marchés financiers c. Mvondo, 2016 QCTMF 12.

[190] Article 93 LESF.

[191] Pezim c. Colombie-Britanique (Superintendant of Brokers), [1994] 2 RCS 557, 589.

[192]  Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos Ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), 2001 CSC 37.    

[193] Ibid.

[194] Ibid.

[195] Cartaway Ressources Corp. (Re), 2004 CSC 26.

[196] Autorité des marchés financiers c. Demers, 2006 QCBDRVM 17, p. 29 et 30.

[197] Autorité des marchés financiers c. R. Beauchamp & Laplante Courtiers d'assurances inc., 2015 QCBDR 129.

[198] Article 27 LDPSF.

[199] Article 6 Règlement sur l’exercice des activités des représentants, préc., note 33.

[200] Chambre de la sécurité financière c. Gélinas, 2014 CanLII 39920; Autorité des marchés financiers c. Couture, 2013 QCBDR 138; Autorité des marchés financiers c. Groupe Lemieux, 2013 QCBDR 103.

[201] Article 16 LDPSF.

[202] Pièce D- 10.1, Autorité des marchés financiers c. Bernard, 2022 QCTMF 9.

[203] Autorité des marchés financiers c. R. Beauchamp & Laplante Courtiers d'assurances inc., 2015 QCBDR 129.

 

[204] Pièce D-6.

[205] Pièce D-7.

[206] Pièce D-6.

[207] Pièce D-7.

[208] Notes et autorités sommaires des intimés datés du 3 juillet 2022. Au niveau de l’abus de procédure, les intimés invoquent une panoplie de raisons qui incluent le refus de l’Autorité de tenir le procès en mode présentiel, le refus de l’Autorité d’identifier la personne qui aurait requis les inspections, l’omission de l’Autorité de préciser, dans son acte introductif, les dispositions législatives et réglementaires justifiant les manquements reprochés à leur égard, l’existence d’importantes lacunes dans ses méthodes d’enquêtes et la nature démesurée des mesures administratives demandées.

[209] 2018 QCTMF 82.

[211] 2018 QCTMF 82.

[212] Autorité des marchés financiers c. Couture, 2013 QCBDR 138.

[213] Informations apparaissant également à la pièce D-5.

[214] Pièce D-6.

[215] Autorité des marchés financiers c. R. Beauchamp & Laplante courtiers d’assurances inc, 2015 QCBDR 129; Autorité des marchés financiers c. Groupe Financier Lemieux inc., 2013 QCBDR 103 (confirmé en appel, 2014 QCCQ 10759).

[216] Autorité des marchés financiers c. Dastous, 2013 QCBDR 128.

[217] Voir notamment Autorité des marchés financiers c. Beaudouin Rigolt & associés 2015 QCBDR 70 Autorité des marchés financiers c. Exigo Conseil financiers inc., 2017 QCTMF 68, Autorité des marchés financiers c. Groupe Financier Lemieux inc, 2013 QCBDR 103 (confirmé en appel 2014QCCQ 10759).

[218] Cartaway Ressources Corp. (Re), 2004 CSC 26.

[219] 2022 QCTMF 33.

[220] 2022 QCTMF 34.

[221] 2013 QCBDR 138.

[222] 2015 QCCDCSF 16.

[223] Chambre de la sécurité financière c. Simard, 2016 QCCDCSF 17; Chambre de la sécurité financière c. Couture, 2018 QCCDCSF 16; Chambre de la sécurité financière c. Bergeron, 2020 QCCDCSF 38; Chambre de la sécurité financière c. Pelletier, 2021 QCCDCSF 32; Chambre de la sécurité financière c. Lajoie, 2021 QCCDCSF 71; Chambre de la sécurité financière c. Baillargeon Bouchard, 2021 QCCDCSF 33; Chambre de la sécurité financière c. Fauteux, 2022 QCCDCSF 4 et Chambre de la sécurité financière c. Bourque, 2022 QCCDCSF 15.

[224] 2016 QCCDCSF 17.

[225] 2021 QCTMF 70.

[226] Il s’agit d’une suspension dans le cadre d’un accord conclu entre les parties.

[227] Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos Ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), préc., note 192; Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), préc., note 191; Cartaway Resources Corp. (Re), préc., note 195.

[228] Pièce D-2.

[229] Pièce D-3.

[230] Pièce D-2.

[231] 2018 QCTMF 82.

[232] Le Tribunal a considéré les décisions dans Autorité des marchés financiers c. Exigo Conseils inc., 2017 QCTMF 68, Autorité des marchés financiers c. Boileau, 2018 QCTMF 83 et Autorité des marchés financiers c. 9133-8079 Québec inc., 2020 QCTMF 9.

[233] Royer c. Rioux, ès qualité de syndic, 2004 CanLII 76507 (QC CQ); Blais c. Rioux, 2004 CanLII 76509 (QC CQ); Brisebois c. Rioux, 2004 AZ-50256254 (QC CQ).

[234] 2013 QCBDR 128.

[235] RLRQ, c. E-6.1.

[236] RLRQ, c. V-1.1.

[237] RLRQ, c. D-9.2.

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