Autorité des marchés financiers (Québec)

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Autorité des marchés financiers c. Groupe financier Securvie inc.

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DES MARCHÉS FINANCIERS

 

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

MONTRÉAL

 

 

 

DOSSIER N° :

2022-011

 

 

 

DÉCISION N° :

2022-011-001

 

 

 

DATE :

16 septembre 2022

 

DATE DE RECTIFICATION : 19 septembre 2022

 

______________________________________________________________________

 

 

 

EN PRÉSENCE DE :

Me JULIE BIRON

______________________________________________________________________

 

 

 

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

 

Partie demanderesse

 

c.

 

GROUPE FINANCIER SECURVIE INC.

 

et

ÉRIC HARVEY

Parties intimées

 

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

DÉCISION RECTIFIÉE

 

______________________________________________________________________

 

 

 

APERÇU

[1]           L’Autorité des marchés financiers (« Autorité »)[1] joue un rôle important afin d’assurer la protection du public et de veiller à ce que les différents acteurs du secteur financier se conforment aux obligations que leur impose la loi.

[2]           Conformément à l’article 7 de la LESF l’Autorité est chargée d’exercer les fonctions et pouvoirs qui lui sont attribués par la Loi sur la distribution de produits et services financiers[2] (« LDPSF ») ainsi que par ses divers règlements d’application.

[3]           Dans ce contexte, l’Autorité doit notamment assurer l’encadrement des activités de distribution de produits et services financiers en veillant au respect des règles applicables à l’exercice de ce type d’activités.

[4]           Groupe financier Sécurvie inc. (« Sécurvie »), une personne morale menant des activités d’intermédiaire financier, est inscrit auprès de l’Autorité à titre de cabinet dans la catégorie de l’assurance de personnes et de l’assurance collective de personnes depuis décembre 2015[3].

[5]           À ce titre, elle est assujettie aux obligations énoncées par la LDPSF ainsi que ses règlements d’application et elle peut notamment être soumise à des inspections de l’Autorité[4].

[6]           C’est d’ailleurs ce qui s’est produit en mars 2019, où l’Autorité a effectué une première inspection des activités de Sécurvie qui a révélé diverses irrégularités, ce qui a entraîné la rédaction d’un rapport détaillant les manquements constatés.

[7]           Devant ces constatations, Sécurvie et son dirigeant responsable, Éric Harvey[5], se sont engagés le 23 août 2019 à corriger toutes les irrégularités soulevées dans ce rapport.

[8]  Soulignons qu’en plus de son rôle de dirigeant responsable, Éric Harvey détient depuis au moins mai 2013 un certificat émis par l’Autorité qui lui permet d’agir à titre de représentant dans la discipline de l’assurance de personnes et de l’assurance collective de personnes ainsi qu’un certificat lui permettant d’agir à titre de représentant de courtier en épargne collective[6]. Il est également le président et secrétaire de Sécurvie, en plus d’être son actionnaire majoritaire par l’entremise de la société Les services financiers Éric Harvey inc.[7].

[9]           À la suite de ce premier rapport, l’Autorité a effectué le 2 septembre 2020 une inspection de suivi afin de vérifier si les correctifs convenus avaient été apportés.

[10]        Cette deuxième inspection a révélé de nombreux manquements et le fait que les intimés ne s’étaient pas conformés à l’engagement souscrit suivant l’inspection ayant eu lieu en mars 2019.

[11]        Afin d’assurer la protection du public, eu égard à l’absence de surveillance des représentants et aux lacunes dans les méthodes de travail d’Éric Harvey et des autres représentants, le 13 avril 2022, l’Autorité a signifié aux intimés un acte introductif d’instance. Dans ce dernier, l’Autorité reproche notamment aux intimés d’avoir commis plusieurs manquements à la LDPSF ainsi qu’à ses règlements d’application et demande l’imposition de pénalités administratives ainsi que différentes ordonnances.

[12]        Souhaitant régler le présent dossier, les parties en sont venues à un accord[8] (« Accord ») où les intimés consentent à ce que les sanctions et les mesures administratives qui y sont décrites leur soient imposées afin de régler le dossier hors cour.

[13]        L’Autorité s’adresse au Tribunal afin qu’il entérine l’Accord intervenu entre les parties et prononce les ordonnances suggérées.

[14]        La LESF prévoit que le Tribunal peut entériner un accord s’il est « conforme à la loi » [9].

[15]        Le Tribunal doit donc déterminer si, dans le présent dossier, l’Accord est conforme à la loi et s’il doit, dans l’intérêt public, l'entériner et ordonner aux parties de s’y conformer.

Question en litige : L’Accord conclu entre l’Autorité et les intimés est-il conforme à la loi, raisonnable et dans l’intérêt public?

[16]        Pour les motifs ci-après exposés, le Tribunal considère, à la lumière de la preuve et des arguments présentés lors de l’audience tenue le 9 septembre 2022, que l’Accord conclu entre l’Autorité et les intimés est conforme à la loi, raisonnable et qu’il est dans l’intérêt public de l’entériner et d’ordonner la mise en œuvre des suggestions communes qu’il contient.

ANALYSE

[17]        Un accord est conforme à la loi s’il permet au Tribunal d’établir l’existence d’un manquement aux lois qui relèvent de sa compétence ou d’un acte contraire à l’intérêt public[10] selon les dispositions législatives applicables. L’accord soumis doit également permettre au Tribunal de déterminer si les mesures administratives suggérées par les parties sont raisonnables, dans l’intérêt public et qu’elles permettent d’atteindre les objectifs de protection du public et de répondre aux critères de dissuasion spécifique et générale[11]. À cet égard, le Tribunal peut examiner plusieurs facteurs[12].

[18]        Rappelons que le Tribunal joue un rôle actif dans l’analyse qu’il doit effectuer pour entériner ou non un accord. Même si le Tribunal favorise les règlements de dossiers par la conclusion d’accords entre les parties[13], il n’est jamais tenu d’accepter les conclusions d’un accord ni les suggestions communes qui lui sont proposées et il ne peut être contraint d’entériner un accord qui est déraisonnable, inadéquat, contraire à l’intérêt public ou de nature à déconsidérer l’administration de la justice.

[19]        Les ordonnances du Tribunal sont de nature réglementaire et en ce sens, elles ne sont ni réparatrices ni punitives, bien qu’elles puissent être dissuasives[14]. Ces ordonnances sont de nature protectrice et préventive[15].

Manquements aux lois qui relèvent de la compétence du Tribunal

[20]        Dans l’Accord conclu entre les parties, Sécurvie ainsi qu’Éric Harvey admettent avoir commis plusieurs manquements à la LDPSF et à ces règlements d’application.

[21]        Notamment les intimés admettent avoir :

         Fait défaut de s’acquitter adéquatement de leur devoir de supervision générale notamment en raison de l’absence de mesures de contrôle interne au sein du cabinet, d’un manuel de politiques et de procédures inadéquates et du fait que les représentants vérifient eux-mêmes leur dossier de transactions.

         Fait défaut de s’acquitter adéquatement de leur devoir de supervision d’un stagiaire lors de sa période probatoire au sein du cabinet notamment en déléguant certaines fonctions à d’autres représentants en contravention de l’article 49 du Règlement sur la délivrance et le renouvellement du certificat de représentant[16]. Par ailleurs, comme le dossier du stagiaire a été détruit en contravention à l’article 48.3 du Règlement sur la délivrance et le renouvellement du certificat de représentant[17] il a été impossible de vérifier que le cabinet a respecté les obligations qui lui incombaient à titre de superviseur de stage.

         Fait usage d’un titre réservé et avoir fait défaut de s’assurer que les représentants du cabinet se présentaient en respectant la législation propre à leur domaine d’activité ce qui a permis à un représentant de faire des représentations trompeuses sur les permis de représentant qu’il détenait[18].

         Fait usage de formulaires pouvant induire le client en erreur considérant que plusieurs documents utilisés par Sécurvie et ses représentants ne comportaient pas soit son logo, son adresse ou une mention claire de son partenariat avec Cabinet d’assurance Banque Nationale (« CABN »). Or, en faisant uniquement usage du logo de la Banque Nationale Assurance (« BNA ») les documents prêtent à confusion et induisent en erreur en ne permettant pas aux clients de savoir aisément avec qui ils font affaire.

         Contrevenu à leur obligation de récolter et d’analyser les informations nécessaires afin de connaître les besoins financiers de leurs clients et d’être en mesure de comprendre leurs besoins le tout en contravention des articles 27 de la LDPSF, 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants[19] et 17(8) du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome[20].

         Fait défaut de respecter la procédure de remplacement d’une police d’assurance, notamment plusieurs lacunes ou problèmes ont été décelés dans les préavis de remplacement dont certains étaient incomplets ou comportaient des informations inexactes.

         Fait défaut de respecter un processus diligent visant à établir préalablement le profil de risque des clients en contravention à la LDPSF et à ses règlements d’application.

         Fait défaut de remettre un document d’information adéquat et représentatif (illustration) sur les produits offerts.

         Fait défaut de tenir ses dossiers conformément à la réglementation applicable à ce type d’activité.

         Fait défaut d’apporter les correctifs nécessaires, contrairement à l’engagement pris à cet effet, à la suite de l’inspection de 2019 qui avait déjà révélé la plupart de ces irrégularités.

[22]        Les intimés admettent également les manquements allégués dans l’acte introductif d’instance.

[23]        Ces admissions constituent des aveux judiciaires permettant au Tribunal de conclure qu’il y a effectivement eu de nombreux manquements à la LDPSF et à ses règlements d’application.

[24]        La LDPSF a pour principal objectif de s’assurer de la protection du public[21]. Elle impose une série d’obligations, de devoirs et de responsabilités aux représentants inscrits, ainsi qu’aux cabinets et aux dirigeants responsables afin de maintenir la confiance du public envers l’industrie de l’assurance[22].

[25]        Or à la lumière des admissions et de la preuve présentée lors de l’audience tenue le 9 septembre 2022, il appert que les intimés n’ont pas supervisé de manière adéquate le travail de leurs représentants afin de s’assurer que ces derniers, ainsi que les employés respectent les exigences réglementaires.

[26]        Spécifiquement, en ne s’assurant pas que les représentants respectent leurs obligations en matière de tenue de dossiers, Sécurvie et Éric Harvey ont manqué à leur devoir de surveillance ainsi qu’à leur obligation de tenir leurs dossiers clients conformément à la LDPSF.

[27]        De même, en conformité avec l’article 84 de la LDPSF, Sécurvie et Éric Harvey, à titre de dirigeant responsable, sont tenus d’agir avec honnêteté et loyauté dans leurs relations avec leurs clients. Malgré cette obligation, il s’avère que la documentation utilisée était susceptible d’induire le public en erreur en ne leur permettant pas de savoir avec qui ils faisaient affaires.

[28]        En ce qui concerne les préavis de remplacement, qui servent à informer les clients des caractéristiques des contrats qu’ils détiennent tout en leur présentant les avantages et désavantages d’un remplacement, le défaut de les remplir adéquatement ou de les transmettre dans les délais prescrits, constitue également un manquement grave à la LDPSF et à ses règlements d’application.

[29]        Par ailleurs, Éric Harvey, à titre de dirigeant responsable, un poste qui requiert « un degré supérieur de professionnalisme et d’habileté puisque cette fonction est garante de la conformité au sein du cabinet et, par conséquent, de la protection du public »[23] a également manqué à ses obligations alors qu’il était responsable de la conformité, du contrôle et de la surveillance des représentants de Sécurvie au même titre que le cabinet.

[30]        Enfin, Éric Harvey n’a pas respecté les engagements pris envers l’Autorité à la suite de la première inspection.

[31]        Ainsi, à la lumière des admissions des parties et des faits présentés, le Tribunal conclut que la preuve permet clairement d’établir l’existence de manquements aux obligations, devoirs et responsabilités qu’impose la LDPSF ainsi qu’à ses règlements d’application. De ce fait, le Tribunal est d’avis que cet Accord satisfait la première condition et qu’il est conforme à la loi.

Caractère raisonnable des mesures proposées par les parties

[32]        Les parties suggèrent au Tribunal d’imposer plusieurs ordonnances à Sécurvie ainsi qu’à Éric Harvey, et ce, dans l’intérêt public.

[33]        Spécifiquement, elles proposent que le Tribunal impose à Sécurvie une pénalité administrative d’un montant global de 15 000 $ qui se détaille ainsi : 5 000 $ pour avoir manqué à un engagement souscrit auprès de l’Autorité à la suite de l’inspection initiale de mars 2019 auquel s’ajoute un montant de 10 000 $ pour l’ensemble des manquements constatés lors de l’inspection de septembre 2020.

[34]        De même, elles demandent au Tribunal de prendre acte de l’engagement de Sécurvie à procéder au changement du dirigeant responsable en remplacement d’Éric Harvey ainsi qu’à mettre en place des mesures de contrôle et de surveillance permettant de s’assurer du respect de la LDPSF et de ses règlements d’application.

[35]        Elles recommandent également d’imposer une pénalité administrative de 3 500 $ à Éric Harvey, d’interdire à ce dernier d’agir à titre de dirigeant responsable de Sécurvie ou de tout autre cabinet pour une période de 18 mois et d’assortir le certificat permettent à Éric Harvey d’agir comme représentant dans la discipline de l’assurance de personnes et de l’assurance collective de personnes de conditions.

[36]        En ce qui a trait aux ordonnances suggérées par les parties, le Tribunal rappelle que celles-ci sont de nature réglementaire et en ce sens, elles ne sont ni réparatrices ni punitives, bien qu’elles puissent être dissuasives[24]. Ces ordonnances sont de nature protectrice et préventive[25].

[37]        Le rôle du Tribunal est de protéger les investisseurs, de favoriser la confiance dans les marchés ainsi que l’efficience de ces derniers.

[38]        Cela étant, les ordonnances prononcées par le Tribunal doivent avoir un effet suffisamment dissuasif pour permettre d’éviter que ce type de manquement soit commis de nouveau par les intimés ou par toute personne susceptible de se trouver dans une situation similaire[26]. Or qu’en est-il?

[39]        Le Tribunal constate que les manquements commis par Sécurvie et Éric Harvey sont graves.

[40]        En ce qui concerne l’imposition d’une pénalité administrative, le Tribunal rappelle qu’elles ne peuvent excéder 2 000 000 $ pour chaque contravention à la LDPSF ou à l’un de ses règlements d’application, si les faits portés à sa connaissance démontrent qu’une personne a, par son acte ou son omission, contrevenu ou aidé à l’accomplissement d’une telle contravention[27].

[41]        Lorsqu’il impose une pénalité administrative, le Tribunal doit s’assurer qu’elle est raisonnable, dans l’intérêt public et qu’elle répond aux critères de dissuasion spécifique et générale. Le Tribunal a établi plusieurs facteurs qui doivent le guider dans l’établissement du montant d’une pénalité administrative. Ces facteurs doivent être évalués, au cas par cas, selon les circonstances de chaque affaire[28].

[42]        À la lumière de cette analyse, le Tribunal exerce sa discrétion d’entériner ou non un accord en fonction de l’intérêt public[29].

[43]        Dans son analyse, le Tribunal a considéré les enseignements contenus dans la décision Demers[30] relatifs aux critères applicables pour évaluer les ordonnances qu’il rend en réponse à une contravention à la loi. L’analyse élaborée dans cette décision a été reprise dans de nombreuses décisions du Tribunal et permet de définir un encadrement qui tient compte des facteurs à considérer lors de l’imposition d’une sanction afin de protéger le public.

[44]        Ces facteurs sont notamment, le type, le nombre et la gravité des gestes posés par les contrevenants et leur conduite antérieure, la vulnérabilité des investisseurs, les pertes subies par ces derniers, l’expérience des contrevenants au moment des faits reprochés, les risques de récidives, la dissuasion spécifique et générale, le degré de repentir des contrevenants, le comportement suivant les manquements, les facteurs atténuants, les ordonnances imposées dans des circonstances semblables. Ces critères ne sont pas exhaustifs et chacun d’eux peut avoir une importance propre et relative en fonction des faits d’un dossier[31].

[45]        Dans le cadre de son analyse, le Tribunal a tenu compte de ces facteurs, et plus spécifiquement de ceux ayant été soulevés par les parties, et des admissions faites par les intimés qui sont consignées dans l’Accord.

[46]        Notamment, le Tribunal a pris en considération la volonté de Sécurvie et d’Éric Harvey de collaborer afin de trouver avec l’Autorité, sur une base consensuelle, un règlement à la présente affaire qui assure une protection adéquate au public investisseur ainsi que le maintien de l’intégrité des marchés financiers.

[47]        Les intimés ont en tout temps répondu avec empressement aux questions de l’Autorité et ont fait preuve de réactivité et de proactivité face aux diverses demandes.

[48]        Sécurvie a rapidement amorcé des démarches pour faire une revue stratégique de sa conformité dès l’été 2021, soit avant la signification de l’acte introductif d’instance. De même, la volonté d’Éric Harvey de travailler en amont pour rectifier certains manquements qui lui sont reprochés est une autre illustration de cette volonté de collaborer des intimés.

[49]        Même si les manquements sont graves, les parties ont souligné qu’avant ces événements, les intimés n’avaient jamais eu de démêlés avec l’Autorité et que le risque de récidive est nul ou quasi nul bien qu’une deuxième inspection ait été nécessaire pour amorcer les changements espérés et que les engagements pris envers l’Autorité n’aient pas été respectés à la suite de la première inspection.

[50]        Lors de l’audience, Éric Harvey a exprimé sa volonté de s’amender et a fait part au Tribunal de son travail en amont pour suivre les formations qu’il a complétées et réussies rapidement afin de corriger les situations problématiques.

[51]        Il a également été souligné lors de l’audience que les manquements observés n’ont pas entraîné de préjudice pour les clients ainsi que le fait que plusieurs des manquements ont été commis sans intention frauduleuse et de bonne foi.

[52]        Les intimés ont par ailleurs insisté sur le fait que certains manquements s’expliquent par la nature de la relation qui existe entre Sécurvie et CABN. En effet, Sécurvie est un partenaire de CABN et une majorité de ses ventes proviennent de références de client des différentes branches de la Banque Nationale. Dans ce contexte, CABN avait fait certaines représentations auprès de Sécurvie lesquelles n’étaient pas adéquates. Ces constatations ont d’ailleurs mené à des changements structurels dès l’été 2021 pour rendre Sécurvie plus autonome et créer une structure de conformité et de surveillance autonome.

[53]        Enfin, les pénalités administratives suggérées à l’encontre des intimés envoient un message clair de l’importance de ces règles pour assurer la protection du public et dissuadent l’adoption de comportements similaires.

[54]        Dans ce contexte et à la lumière des sanctions et des pénalités administratives imposées en semblable matière[32] le Tribunal conclut que les recommandations communes des parties sont raisonnables.

CONCLUSION

[55]        De ce fait, le Tribunal, tenant compte des admissions formulées par les intimés et des facteurs atténuants, exerce la discrétion que lui accorde la loi et considère que l’Accord présenté par les parties est conforme à la loi en ce qu’il permet d’établir des manquements à la LDPSF et que les ordonnances proposées sont raisonnables et dans l’intérêt public.

POUR CES MOTIFS, le Tribunal administratif des marchés financiers, dans l’intérêt public, en vertu des articles 93, 94 et 97 al. 2 (6°) et (7o) de la Loi sur l’encadrement du secteur financier[33] et des articles 115, 115.1 et 115.9 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[34] :

ACCUEILLE la demande de l’Autorité des marchés financiers;

ENTÉRINE l’Accord intervenu entre l’Autorité des marchés financiers, le Groupe Financier Sécurvie inc. et Éric Harvey, le rend exécutoire et ordonne aux parties de s’y conformer;

IMPOSE une pénalité administrative globale de 15 000 $ au Groupe Financier Sécurvie inc. qui se détaille ainsi :

         5 000 $ pour avoir manqué à un engagement souscrit auprès de l’Autorité des marchés financiers à la suite de l’inspection initiale de mars 2019;

         10 000 $ pour l’ensemble des manquements constatés lors de l’inspection de septembre 2020 et détaillé dans le présent Accord;

PREND ACTE de l’engagement du Groupe financier Sécurvie inc. à payer cette pénalité administrative d’un montant total de 15 000 $, payable en un seul versement, dans les trente (30) jours de la présente décision;

PREND ACTE de l’engagement de Groupe financier Sécurvie inc. à procéder au changement du dirigeant responsable en remplacement d’Éric Harvey dans les quarante-cinq (45) jours de la présente décision, étant entendu que le nouveau dirigeant responsable devra être soumis à l’approbation de l’Autorité des marchés financiers considérant notamment ses compétences, son expérience et sa capacité à remplir cette fonction en toute indépendance;

PREND ACTE de l’engagement du Groupe financier Sécurvie inc. à mettre en place des mesures de contrôle et de surveillance afin de s’assurer que le cabinet, son nouveau dirigeant responsable, ses représentants et ses employés respectent la Loi sur la distribution de produits et services financiers[35]  et ses règlements;

IMPOSE une pénalité administrative de 3 500 $ à Éric Harvey;

INTERDIT à Éric Harvey d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable de Groupe financier Sécurvie inc., ou de tout autre cabinet, et ce, pour une période de dix-huit (18) mois à compter de la date de la nomination du nouveau dirigeant responsable ou au plus tard quarante-cinq (45) jours de la présente décision, selon la date la plus rapprochée;

ASSORTIT le certificat, portant le numéro 136634, au nom d’Éric Harvey, de la condition suivante :

- Le représentant doit, pour une période de dix-huit (18) mois à compter de la date de la nomination du nouveau dirigeant responsable, alors qu’il a un droit d’exercice valide, être rattaché à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable;

ORDONNE à l’Autorité des marchés financiers de notifier la présente décision au Groupe Financier Sécurvie inc. et à Éric Harvey.

 

 

 

 

 

 

 

__________________________________

Me Julie Biron,

Juge administratif

 

 

 

 

 

 

 

Rectification

 

Me Suzie Cloutier et Me Sarah Nadeau-Labbé

(Contentieux de l’Autorité des marchés financiers)

Pour l’Autorité des marchés financiers

 

Me Estelle Savoie-Dufresne

(Estelle Savoie-Dufresne, Avocate et Médiatrice inc.)

Pour Groupe Financier Sécurvie inc. et Éric Harvey

 

 

 

Date d’audience :

9 septembre 2022

 


 



[1]     L’Autorité des marchés financiers a été instituée en vertu de l’article 1 de la Loi sur l’encadrement du secteur financier, RLRQ, c. E-6.1 (« LESF »).

[2]     RLRQ, c. D-9.2.

[3]     Pièce D-2.

[4]     Article 107 LDPSF.

[5]     Depuis le 10 décembre 2015 Éric Harvey agit à titre de dirigeant responsable de Sécurvie.

[6]     Pièce D-6.

[7]     Voir pièces D-1 et D-3.

[8]     Pièce D-1. Une copie de l’Accord est jointe à la présente décision.

[9]     Art. 97 al. 2 (6o) LESF.

[10]    Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), 2001 CSC 37, par. 39; Re Canadian Tire Corp., (1987) Vol. XVIII, no. 14, BCVMQ, A1, 1987 LNONOSC 47, conf. par (1987), 59 O.R. (2d) 79.

[11]    Autorité des marchés financiers c. Moreau, 2021 QCTMF 51; Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), 2001 CSC 37; Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), [1994] 2 R.C.S. 557; Cartaway Resources Corp. (Re), 2004 CSC 26, par. 58.

[12]    Autorité des marchés financiers c. Demers, 2006 QCBDRVM 17.

[13]    Autorité des marchés financiers c. Moreau, 2021 QCTMF 51, par. 28 et 31.

[14]    Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), 2001 CSC 37, par. 42; Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), [1994] 2 R.C.S. 557; Cartaway Resources Corp. (Re), 2004 CSC 26.

[15]    Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), 2001 CSC 37, par. 42; Autorité des marchés financiers c. Demers, 2006 QCBDRVM 17, p. 32 (PDF).

[16]    RLRQ, c. D-9.2, r. 7.

[17]    Id.

[18]    En contravention aux articles 10 à 12 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants, RLRQ, c. D-9.2, r. 10.

[19]    RLRQ, c. D-9.2, r. 10.

[20]    RLRQ, c. D-9.2, r. 2.

[21]    Autorité des marchés financiers c. Assomption, compagnie mutuelle d’assurance-vie, 2007 QCCA 1062, par. 47.

[22]    Autorité des marchés financiers c. Duclos Assurances inc., 2020 QCTMF 54, par. 24 et 25.

[23]    Autorité des marchés financiers c. 9190-4995 Québec inc., 2018 QCTMF 82, par. 59.

[24]    Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), 2001 CSC 37, par. 42; Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), [1994] 2 R.C.S. 557; Cartaway Resources Corp. (Re), 2004 CSC 26.

[25]    Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), 2001 CSC 37, par. 42; Autorité des marchés financiers c. Demers, 2006 QCBDRVM 17, p. 32 (PDF).

[26]    Autorité des marchés financiers c. Moreau, 2021 QCTMF 51, par. 72.

[27]    Art. 115 LDPSF.

[28]    Autorité des marchés financiers c. Demers, 2006 QCBDRVM 17.

[29]    Art. 93 de la LESF. L’expression « intérêt public » inclut la protection des investisseurs, l’efficacité des marchés financiers ainsi que la préservation de la confiance du public en la protection des investisseurs et l’efficacité des marchés : Comité pour le traitement égal des actionnaires minoritaires de la Société Asbestos ltée c. Ontario (Commission des valeurs mobilières), 2001 CSC 37; Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), [1994] 2 R.C.S. 557; Pacific Coast Coin Exchange of Canada Ltd. (Re) c. Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, [1978] 2 R.C.S. 112.

[30]    Autorité des marchés financiers c. Demers, 2006 QCBDRVM 17.

[31]    Autorité des marchés financiers c. Fortin-Dominguez, 2022 QCTMF 46, par. 42.

[32]    Voir notamment Autorité des marchés financiers c. Duclos Assurances inc., 2020 QCTMF 54.

[33]    RLRQ, c. E-6.1.

[34]    RLRQ, c. D-9.2.

[35]    RLRQ, c. D-9.2.

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