Autorité des marchés financiers (Québec)

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Autorité des marchés financiers c. Tremblay

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DES MARCHÉS FINANCIERS

 

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

MONTRÉAL

 

 

 

DOSSIER N° :

2020-021

 

 

 

DÉCISION N° :

2020-021-001

 

 

 

DATE :

1 mars 2021

 

______________________________________________________________________

 

 

 

EN PRÉSENCE DE :

Me JEAN-PIERRE CRISTEL

______________________________________________________________________

 

 

 

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

 

Partie demanderesse

 

c.

 

DENIS TREMBLAY

 

Partie intimée

 

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

DÉCISION

 

______________________________________________________________________

 

 

 

APERÇU

[1]  L’Autorité des marchés financiers (« l’Autorité ») est l’organisme responsable de l’application de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[1] (« LDPSF ») et de la Loi sur les valeurs mobilières[2] (« LVM »). L’Autorité exerce les fonctions qui sont prévues par ces lois, et ce, conformément à l’article 7 de la Loi sur l’encadrement du secteur financier[3] (« LESF »).

[2]  L’intimé Denis Tremblay est inscrit auprès de l’Autorité à titre de représentant autonome dans la discipline de l’assurance de personnes et à titre de représentant de courtier en épargne collective[4].

[3]  L’Autorité reproche à cet intimé de nombreux manquements à la LDPSF et à ses règlements d’application durant la période du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2019[5]. L’Autorité lui reproche également d’avoir contrevenu à deux engagements écrits qu’il a souscrits auprès de l’Autorité les 23 septembre 2015[6] et 9 février 2018[7].

[4]  L’Autorité allègue que l’intimé Denis Tremblay a commis des manquements aux articles 11 et 12 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière[8] en contrevenant à ses obligations d’intégrité, de compétence et de conseil envers ses clients de même qu’à l’article 35 de ce code de déontologie en exerçant ses activités de représentant en assurance de personnes de manière négligente.

[5]  À cet égard, l’Autorité allègue notamment que l’intimé Denis Tremblay a fait défaut de respecter :

(i) l’article 27 de la LDPSF, l’article 17 (8o) du Règlement sur le cabinet, le représentant autonome et la société autonome[9] (« Règlement sur le cabinet »)  et l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants[10] en omettant de compléter des analyses des besoins financiers de clients ou en ne les complétant pas de façon adéquate;

(ii) l’article 22 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants et l’article 17 (9o) du Règlement sur le cabinet en faisant défaut de compléter adéquatement les préavis de remplacement des polices d’assurance de clients et en omettant de suivre la procédure prévue par la LDPSF et sa réglementation;

(iii) l’article 17 du Règlement sur le cabinet et l’article 16 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants en ne suivant pas les règles prescrites en matière de renseignements sur les produits offerts aux clients et en faisant défaut de tenir ses dossiers de manière à en permettre une compréhension globale;

(iv) l’article 103.1 de la LDPSF en ayant une politique de traitement des plaintes et de règlement des différends ne respectant qu’en partie les orientations retenues par l’Autorité; et

(v) l’article 56 de la LDPSF en s’affichant dans sa politique de traitement des plaintes à titre de planificateur financier alors qu’il ne détient pas ce titre.

[6]  Lors de l’audience, tenue le 10 février 2021, les parties ont informé le Tribunal qu’elles ont signé un document intitulé « Admissions de l’intimé Denis Tremblay en vue de l’audition au fond » dans lequel (i) l’intimé Denis Tremblay admet tous les manquements qui lui sont reprochés par l’Autorité, et (ii) « les parties conviennent que la seule question en litige qui demeure concerne la sanction appropriée qui devrait être imposée à l’intimé dans les circonstances ».

[7]  Par conséquent, après avoir considéré l’argumentation que les parties lui ont subséquemment présentée à cet égard, le Tribunal a décidé, dans l’intérêt public, de prononcer les ordonnances - de nature préventive, protectrice et dissuasive - suivantes :

         Imposer à l’intimé Denis Tremblay une pénalité administrative au montant de dix-sept mille cinq cent dollars (17 500 $) payable dans les trente (30) jours de la présente décision;

         Interdire à l’intimé Denis Tremblay d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable d’un cabinet, et ce, pour une période de cinq (5) ans à compter de la date de la présente décision;

         Assortir son certificat en assurance de personnes des conditions suivantes :

(i)    Le représentant doit être rattaché à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable pour une période de cinq (5) ans alors qu’il a un droit d’exercice valide, et ce, au plus tard dans les trente (30) jours de la présente décision;

(ii)  Le représentant doit pour une période de trois (3) ans, alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités sous la supervision d’une personne nommée par le dirigeant responsable du cabinet auquel il sera rattaché. Le représentant doit faire parvenir à l’Autorité, au plus tard dans les trente (30) jours de la présente décision, une attestation de la part du dirigeant responsable du cabinet dans laquelle celui-ci désignera la personne qui supervisera ses activités de représentant.

         Assortir le certificat en assurance de personnes de l’intimé Denis Tremblay de la condition additionnelle suivante :

Le représentant doit, dans les 30 jours de la présente décision, compléter et réussir la formation en ligne « cas vécus et déontologie en assurance de personnes », disponible sur le site Internet de la Chambre de la sécurité financière, laquelle ne pourra être comptabilisée dans le calcul des unités de formation continue obligatoires à être complétées par ce dernier.

         Ordonner à l’intimé Denis Tremblay de transmettre à l’Autorité, dans les 30 jours de la présente décision, une preuve de la réussite de la formation « cas vécus et déontologie en assurance de personnes »; 

         Radier l’inscription de l’intimé Denis Tremblay à titre de représentant autonome;

         Assortir les droits relatifs à son inscription à titre de représentant de courtier en épargne collective de la condition suivante : 

Le représentant doit pour une période de un (1) an, alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités sous la supervision d’une personne nommée par le chef de la conformité du cabinet pour le compte duquel il agira. Le représentant doit faire parvenir à l’Autorité, au plus tard dans les trente (30) jours de la présente décision, une attestation de la part du chef de la conformité du cabinet dans laquelle celui-ci désignera la personne qui supervisera ses activités de représentant.

         À défaut d’être rattaché à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable ni l’administrateur dans les trente (30) jours de la présente décision :

(i) le certificat d’exercice en assurance de personnes de l’intimé Denis Tremblay sera suspendu;

(ii) celui-ci devra remettre, dans les quinze (15) jours de la suspension de son certificat, tous ses dossiers clients, livres et registres du cabinet dûment inscrit et préalablement approuvé par l’Autorité. Les dossiers devront être remis à ce cabinet dans une forme lui permettant d’y avoir accès en tout temps;

o   À défaut, la remise des dossiers s’effectuera auprès de l’Autorité de la manière suivante :

L’intimé Denis Tremblay devra communiquer avec l’Autorité afin de déterminer la date à laquelle les dossiers seront remis à l’Autorité. Les dossiers devront être remis à l’Autorité, dans une forme lui permettant d’y avoir accès en tout temps à l’adresse de ses bureaux de Montréal.

 

ANALYSE

Question en litige : Considérant que l’intimé a essentiellement admis tous les manquements à la LDPSF qui lui sont reprochés par l’Autorité, quelles ordonnances le Tribunal doit-il, dans l’intérêt public, prononcer ?

[8]  Après avoir pris connaissance du document intitulé « Admissions de l’intimé Denis Tremblay en vue de l’audition au fond »[11] - dans lequel (i) l’intimé Denis Tremblay admet tous les manquements qui lui sont reprochés par l’Autorité, et (ii) « les parties conviennent que la seule question en litige qui demeure concerne la sanction appropriée qui devrait être imposée à l’intimé dans les circonstances » - le Tribunal a entendu l’argumentation des parties à l’égard de la question en litige susmentionnée et a décidé, dans l’intérêt public, de prononcer un ensemble d’ordonnances de nature préventive, protectrice et dissuasive, le tout pour les motifs ci-après exposés.

[9]  Durant l’audience, la procureure de l’Autorité a argumenté d’une manière exhaustive en faveur de la mise en œuvre de toutes les mesures recherchées dans la conclusion de la demande introductive d’instance.

[10]        Pour sa part, l’intimé Denis Tremblay a avoué explicitement avoir été négligent concernant ses activités en assurance de personnes et a verbalement exprimé son accord avec toutes les ordonnances dont l’Autorité recommande au Tribunal la mise en œuvre dans le cadre de la présente affaire, sauf (i) pour ce qui a trait au quantum des pénalités administratives recherchées, qu’il considère excessif, et (ii) pour ce qui a trait à la condition que l’Autorité veut assortir à son inscription à titre de représentant de courtier en épargne collective, soit un droit d’exercice sous la supervision d’une personne nommée par le chef de la conformité du cabinet pour le compte duquel il agira dans ce domaine.

[11]        À cet égard, l’intimé Denis Tremblay a fait valoir que 80% de ses activités professionnelles sont reliées au courtage en épargne collective et seulement 20% au domaine de l’assurance de personnes. Il a expliqué qu’il tient deux dossiers pour chacun de ses clients : le premier en épargne collective et le second en assurance de personnes. Or, a-t-il souligné au Tribunal, seuls ses dossiers en assurance de personnes ont fait l’objet d’inspections et de manquements dénoncés par l’Autorité. Les dossiers qui sont reliés à ses activités professionnelles en épargne collective n’ont jamais fait l’objet d’une inspection de la part de l’Autorité et la demande introductive d’instance du régulateur ne lui reproche aucun manquement concernant celles-ci. Il plaide donc qu’il serait injustifié pour le Tribunal d’imposer une quelconque condition au maintien de son inscription à titre de représentant de courtier en épargne collective.

[12]        Dans la présente affaire, l’intimé a consenti au dépôt de toutes les pièces[12] présentées au soutien de la demande de l’Autorité et en a admis le contenu. Il a aussi admis tous les faits et manquements qui le concerne, et ce, tels que décrits dans le document mentionné aux paragraphes 6 et 8 de la présente décision.

[13]        Qui plus est, il a explicitement admis avoir fait preuve de négligence dans l’exercice de ses activités en assurance de personnes, il a affirmé au Tribunal vouloir essentiellement mettre fin à ses activités professionnelles dans le domaine de l’assurance de personnes pour se concentrer sur celles reliées au courtage en épargne collective et il a donné son accord à la mise en œuvre de toutes les ordonnances recommandées par l’Autorité au Tribunal, sauf celles décrites au paragraphe 10 de la présente décision.  

[14]        Le Tribunal rappelle qu’il n’est jamais tenu d’accepter les conclusions d’un accord quelconque entre les parties ni les suggestions communes qui lui sont proposées. De plus, chaque dossier doit être évalué à la lumière de ses particularités.

[15]        Par ailleurs, le Tribunal doit déterminer si les ordonnances demandées à l’encontre d’un intimé sont raisonnables afin d’assurer la protection du public[13] et, à cet égard, dans le cadre de la présente affaire, il a considéré plusieurs critères[14].

[16]        Le Tribunal constate que les manquements admis par l’intimé Denis Tremblay sont graves, nombreux et qu’ils furent commis durant une période relativement courte, soit du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2019[15].   

[17]        Facteur aggravant, le Tribunal constate que cet intimé a contrevenu à deux engagements écrits qu’il a souscrits auprès de l’Autorité le 23 septembre 2015[16] et le 9 février 2018[17].

[18]        À cet égard, le Tribunal souligne que l’intimé Denis Tremblay s’était alors formellement engagé par écrit auprès du régulateur, à deux reprises, à corriger toutes les irrégularités décrites dans les rapports d’inspection de l’Autorité datés respectivement (i) du 21 septembre 2015, lequel couvrait la période d’activité de l’intimé en assurance de personnes allant du 1er janvier 2014 au 31 mars 2015[18], et (ii) du 21 décembre 2017, lequel couvrait la période d’activité de l’intimé en assurance de personnes allant du 1er juin 2015 au 30 avril 2017[19].

[19]        Or, il appert de la preuve que les manquements commis durant ces périodes sont essentiellement les mêmes que ceux commis durant la période du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2019.

[20]        Les manquements admis dans le cadre de la présente affaire sont reliés à des dérogations aux articles 11, 12 et 35 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière[20] de la part de l’intimée Denis Tremblay, lequel a contrevenu à ses obligations d’intégrité, de compétence et de conseil envers ses clients et a exercé ses activités de représentant en assurance de personnes essentiellement de manière négligente.

[21]        En particulier, il a fait défaut de respecter :

(i) l’article 27 de la LDPSF, l’article 17 (8o) du Règlement sur le cabinet et l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants en omettant de compléter des analyses des besoins financiers de clients ou en ne les complétant pas de façon adéquate;

(ii) l’article 22 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants et l’article 17 (9o) du Règlement sur le cabinet en faisant défaut de compléter adéquatement les préavis de remplacement des polices d’assurance de clients et en omettant de suivre la procédure prévue par la LDPSF et sa réglementation;

(iii) l’article 17 du Règlement sur le cabinet et l’article 16 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants en ne suivant pas les règles prescrites en matière de renseignements sur les produits offerts aux clients et en faisant défaut de tenir ses dossiers de manière à en permettre une compréhension globale;

(iv) l’article 103.1 de la LDPSF en ayant une politique de traitement des plaintes et de règlement des différends ne respectant qu’en partie les orientations retenues par l’Autorité; et

(v) l’article 56 de la LDPSF en s’affichant dans sa politique de traitement des plaintes à titre de planificateur financier alors qu’il ne détient pas ce titre.

[22]        De l’avis du Tribunal, la résultante de cette cascade de manquements répétés à la LDPSF et à sa réglementation constitue une situation qui met en danger l’intérêt public, les intérêts particuliers des clients de l’intimé et la réputation même de tout un secteur névralgique de la Place financière, soit celui des services en assurance de personnes.

[23]        Une telle situation - causée par l’irresponsabilité et la négligence de l’intimé dans la cadre de la présente affaire - est inacceptable et elle ne sera pas, dans l’intérêt public, tolérée. Le dispositif de la présente décision fait, à cet égard, passer un message clair à tous les intervenants de la Place financière.

[24]        Ainsi, le Tribunal est d’avis, qu’en vertu de l’article 115 de la LDPSF, l’inscription de l’intimé Denis Tremblay, à titre de représentant autonome en assurance de personnes,  doit - dans l’intérêt public - être radiée et que la poursuite de ses activités professionnelles dans ce domaine, à titre de représentant rattaché à un cabinet, doit être assortie de conditions étroites de supervision pour une période de trois ans ainsi que de la preuve de la réussite de la formation intitulée « cas vécus et déontologie en assurance de personnes ».

[25]        À titre de mesure dissuasive de portée spécifique et générale, le Tribunal est d’avis qu’il doit, en vertu de l’article 115 de la LDPSF, imposer à l’intimé Denis Tremblay une pénalité administrative de 17 500 $. À cet égard, le Tribunal souligne qu’il a pris en considération - dans la détermination du quantum de cette pénalité administrative - le nombre, la récurrence et la gravité des manquements commis par l’intimé de même que  la franchise qu’il a démontrée durant l’audience de même que la collaboration qu’il a offerte dans le cadre de la présente affaire afin de faciliter l’administration de la justice.

[26]        Par ailleurs, considérant que plusieurs manquements ont été commis dans le cadre de la présente affaire et que l’intimé fait l’objet d’une sanction prononcée en vertu de la LDPSF, le Tribunal est d’avis qu’il doit, en vertu de l’article 115.1 de la LDPSF, interdire à l’intimé Denis Tremblay d’agir, directement ou indirectement, comme dirigeant responsable d’un cabinet pour une période de cinq ans.

[27]        Enfin, le Tribunal est d’avis qu’il doit, en vertu de l’article 152 de la LVM, assortir l’inscription de l’intimé Denis Tremblay, à titre de représentant de courtier en épargne collective, d’une condition de supervision de ses activités par une personne nommée par le chef de la conformité du cabinet au sein duquel il exercera ces activités, et ce, pour une période de un an.

[28]        À cet égard, le Tribunal souligne que l’exercice d’une activité réglementée est un privilège et non un droit. La contrepartie de ce privilège est le respect de l’ensemble de la réglementation applicable[21].

[29]        La négligence avouée et répétée de l’intimé Denis Tremblay dans le domaine de l’assurance de personnes l’a conduit à commettre à répétition des manquements importants à la LDPSF et à sa réglementation et à mettre en cause l’intérêt de ses clients de même que l’intérêt public.

[30]        Le Tribunal n’exerce pas les responsabilités du régulateur mais, à la lumière de la preuve que l’Autorité lui a présenté dans le cadre de la présente affaire, il n’est pas rassuré par le fait qu’aucune inspection des activités professionnelles de l’intimé Denis Tremblay dans le domaine du courtage en épargne collective ne semble avoir été conduite alors que trois inspections de ses activités en assurance de personnes ont révélé une cascade de manquements répétés à la LDPSF et à sa réglementation.  

[31]        Par conséquent, à titre de mesure préventive et protectrice ayant pour but de protéger l’intérêt public, le Tribunal est d’avis qu’il est approprié d’assortir les activités professionnelles de l’intimé Denis Tremblay dans le domaine du courtage en épargne collective d’une obligation de supervision pour une période d’une année. Une telle période devrait être suffisante pour permettre au régulateur de s’assurer que la pratique professionnelle de l’intimé dans ce domaine est pleinement conforme à la LVM et à sa réglementation.

[32]        À cet égard, le Tribunal rappelle que l’article 152 de la LVM prévoit qu’il peut imposer des conditions à une inscription lorsqu’une personne ne respecte pas les dispositions de la loi ou lorsque l’intérêt public le justifie. Ainsi, l’intervention du Tribunal peut être justifiée afin de protéger l’intérêt public, et ce, même sans preuve de manquement à cette loi. Le Tribunal souligne qu’il faut éviter de cloisonner les activités qui relèvent d’un régulateur unique du secteur financier parce que les mêmes exigences d’honnêteté, de compétence et de professionnalisme sont au cœur de l’encadrement réglementaire de ce secteur d’activités[22]. Par conséquent, des manquements commis en vertu de la LDPSF peuvent justifier d’intervenir à l’égard de l’inscription d’une personne qui relève de la LVM, ce qui est le cas dans le cadre de la présente affaire.

POUR CES MOTIFS, le Tribunal administratif des marchés financiers, en vertu des articles 93 et 94 de la Loi sur l’encadrement du secteur financier, 115, 115.1, 115.9 et 127 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi que l’article 152 de la Loi sur les valeurs mobilières :

ACCUEILLE la demande de l’Autorité des marchés financiers et, dans l’intérêt public;

IMPOSE à l’intimé Denis Tremblay une pénalité administrative au montant de dix-sept mille cinq cent dollars (17 500 $) payable dans les trente (30) jours de la présente décision;

INTERDIT à l’intimé Denis Tremblay d’agir, directement ou indirectement, à titre de dirigeant responsable d’un cabinet, et ce, pour une période de cinq (5) ans à compter de la date de la présente décision;

ASSORTIT le certificat portant le numéro 132860 au nom de Denis Tremblay des conditions suivantes :

(i)    Le représentant doit être rattaché à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable pour une période de cinq (5) ans alors qu’il a un droit d’exercice valide, et ce, au plus tard dans les trente (30) jours de la présente décision;

(ii)  Le représentant doit pour une période de trois (3) ans, alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités sous la supervision d’une personne nommée par le dirigeant responsable du cabinet auquel il sera rattaché. Le représentant doit faire parvenir à l’Autorité, au plus tard dans les trente (30) jours de la présente décision, une attestation de la part du dirigeant responsable du cabinet dans laquelle celui-ci désignera la personne qui supervisera ses activités de représentant.

ASSORTIT le certificat portant le numéro 132860 au nom de Denis Tremblay de la condition suivante :

Le représentant doit, dans les 30 jours de la présente décision, compléter et réussir la formation en ligne « cas vécus et déontologie en assurance de personnes », disponible sur le site Internet de la Chambre de la sécurité financière, laquelle ne pourra être comptabilisée dans le calcul des unités de formation continue obligatoires à être complétées par ce dernier;

ORDONNE à l’intimé Denis Tremblay de transmettre à l’Autorité, dans les 30 jours de la présente décision, une preuve de la réussite de la formation « cas vécus et déontologie en assurance de personnes; 

RADIE l’inscription numéro 502176 à titre de représentant autonome de Denis Tremblay dans les trente (30) jours de la présente décision;

ASSORTIT les droits relatifs à l’inscription à titre de représentant de courtier en épargne collective de Denis Tremblay, portant le numéro 1747351, de la condition suivante : 

Le représentant doit pour une période de un (1) an, alors qu’il a un droit d’exercice valide, exercer ses activités sous la supervision d’une personne nommée par le chef de la conformité du cabinet pour le compte duquel il agira. Le représentant doit faire parvenir à l’Autorité, au plus tard dans les trente (30) jours de la présente décision, une attestation de la part du chef de la conformité du cabinet dans laquelle celui-ci désignera la personne qui supervisera ses activités de représentant.

À DÉFAUT d’être rattaché à un cabinet dont il n’est pas le dirigeant responsable ni l’administrateur dans les trente (30) jours de la présente décision :

SUSPEND le certificat d’exercice portant le numéro 132860 au nom de Denis Tremblay;

ORDONNE à l’intimée Denis Tremblay de remettre, dans les quinze (15) jours de la suspension de son certificat, tous ses dossiers clients, livres et registres du cabinet dûment inscrit et préalablement approuvé par l’Autorité. Les dossiers devront être remis à ce cabinet dans une forme lui permettant d’y avoir accès en tout temps;

À défaut, la remise des dossiers s’effectuera auprès de l’Autorité de la manière suivante :

L’intimé Denis Tremblay devra communiquer avec la Direction de l’inspection – Assurances et ESM de l’Autorité, au numéro 1-877-525-0337, poste 4711, afin de déterminer la date à laquelle les dossiers seront remis à l’Autorité. Les dossiers devront être remis à l’Autorité, dans une forme lui permettant d’y avoir accès en tout temps, au 800, Square Victoria, tour de la Bourse, 22e étage, Montréal (Québec).

 

 

 

 

 

 

__________________________________

Me Jean-Pierre Cristel

juge administratif

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Me Catherine Boilard et Gabriel Vachon, stagiaire en droit

 

(Contentieux de l’Autorité des marchés financiers)

 

Procureurs de l’Autorité des marchés financiers

 

 

 

Denis Tremblay, comparaissant personnellement

 

 

 

 

 

 

 

Date d’audience :

10 février 2021

 




[1]     RLRQ, c. D-9.2.

[2]     RLRQ, c. V-1.1.

[3]     RLRQ, c. E-6.1.

[4]     Pièce D-1.

[5]     Pièce D-14 et demande introductive d’instance amendée de l’Autorité.

[6]     Pièce D-7.

[7]     Pièce D-12.

[8]     RLRQ, c. D-9.2, r. 3.

[9]       RLRQ, c. D-9.2, r. 2.

[10]    RLRQ, c. D-9.2, r. 10.

[11]    Une copie de ce document est jointe à la présente décision.

[12]    D-1 à D-16.

[13]    Notamment Mizrahi c. Autorité des marchés financiers, 2009 QCCQ 10542.

[14]    Notamment Autorité des marchés financiers c. Demers, 2006 QCBDRVM 17; Autorité des marchés financiers c. Mieux planifier inc., 2020 QCTMF 26; Autorité des marchés financiers c. 9379-4899 Québec inc., 2020 QCTMF 43; Autorité des marchés financiers c. Groupe financier Lemieux inc., 2013 QCBDR 103, confirmé en appel 2014 QCCQ 19759; Autorité des marchés financiers c. Vaillancourt, 2017 QCTMF 23; Autorité des marchés financiers c. Couture, 2013 QCBDR 135.

[15]    Pièce D-14 et demande introductive d’instance amendée de l’Autorité.

[16]    Pièce D-7.

[17]    Pièce D-12.

[18]    Pièce D-6.

[19]    Pièce D-9.

[20]    RLRQ, c. D-9.2, r. 3.

[21]    British Columbia Securities Commission c. Branch, [1995] 2 R.C.S. 3, par. 77. La Souveraine, Compagnie d’assurance générale c. Autorité des marchés financiers, [2013] R.C.S. 756, 2013 CSC 63, par. 49.

[22]    Marston c. Autorité des marchés financiers2009 QCCA 2178 et Mastrocola c. Autorité des marchés financiers2011 QCCA 995.

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