Autorité des marchés financiers (Québec)

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Autorité des marchés financiers c. Glazer

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DES MARCHÉS FINANCIERS

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

MONTRÉAL

 

DOSSIER N° :

2017-046

 

DÉCISION N° :

2017-046-013

 

DATE :

Le 3 mars 2021

 

 

EN PRÉSENCE DE :

Me ELYSE TURGEON

 

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

Demanderesse

c.

DAVID GLAZER

et

CASTLE ROCK D.M.G. INVESTMENT MANAGEMENT INC.

Intimés

et

BANQUE ROYALE DU CANADA, personne morale légalement constituée ayant un établissement au 5500, rue RoyalMount, Montréal (Québec)  H4P 1H7

et

BANQUE ROYALE DU CANADA, personne morale légalement constituée ayant un établissement au 4849, rue Sherbrooke Ouest, Westmount (Québec) H3Z 1G6

et

BANQUE NATIONALE DU CANADA, personne morale légalement constituée ayant un établissement au 3550, Boul. des Sources à Dollard-des-Ormeaux (Québec) H9B 1Z9

et

BANQUE CANADIENNE IMPÉRIALE DE COMMERCE, personne morale légalement constituée ayant un établissement au 8000, boulevard Décarie, Montréal (Québec) H4P 2S4

et

SOCIÉTÉ DE L’ASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC, Case postale 19600, succursale Terminus, 333, boul. Jean-Lesage, Québec (Québec), G1K 8J6

et

TD WATERHOUSE, ayant une place d’affaires au 7250, rue Mile-End, 6e étage, Montréal (Québec) H2R 3A4

et

BANQUE SCOTIA, personne morale ayant un établissement 7885 Boul. Décarie, à Montréal (Québec), H4P 2H2

et

LA GREAT-WEST COMPAGNIE D’ASSURANCE-VIE, personne morale légalement constituée ayant son établissement principal au Québec au 1275-2001, boul. Robert Bourassa, Montréal (Québec) H3A 2A6

et

SERVICES D’INVESTISSEMENT QUADRUS LTÉE, ayant le bureau de son fondé de pouvoir au Québec au 1275-2001, boul. Robert-Bourassa, Montréal (Québec), H3A 2A6

et

LA SOCIÉTÉ DE GESTION AGF LIMITÉE, ayant son domicile élu au Québec au 1300-1, Place Ville-Marie, Montréal (Québec) H3B 0E6

et

LA COMPAGNIE D’ASSURANCE-VIE MANUFACTURERS, personne morale ayant un établissement au Québec au 900, boul. Maisonneuve-Ouest, Montréal (Québec) H3A 1A8

Mises en cause

 

 

DÉCISION

 

 

APERÇU

[1]  Le Tribunal administratif des marchés financiers (« Tribunal ») est saisi d’une demande déposée par l’Autorité des marchés financiers (« Autorité ») de levée d’ordonnances de blocage et de radiation permanente du certificat et de l’inscription de David Glazer ainsi que de radiation permanente de son cabinet en assurance Castle Rock D.M.G. Investment Management inc. (« Castle Rock »).

[2]  Le 22 février 2021, l’Autorité, David Glazer et Castle Rock ont conclu un accord relativement à cette demande et requièrent que le Tribunal entérine cet accord et rende les ordonnances qui en découlent. Une copie de cet accord est jointe à la présente décision.

[3]  En vertu de cet accord, David Glazer et Castle Rock admettent les faits allégués à leur encontre. Ils consentent à ce que le Tribunal prononce une décision par laquelle il entérine cet accord, le rend exécutoire et ordonne aux parties de s’y conformer.

[4]  Ainsi, David Glazer consent à la radiation permanente de son certificat en assurance de personnes et de son inscription en épargne collective. Il consent également à ce que l’inscription de son cabinet en assurance Castle Rock soit aussi radiée de façon permanente. Ils consentent à la levée de l’ensemble des ordonnances de blocage du Tribunal les concernant.

[5]  Selon l’accord, pour certaines sommes d’argent et biens, cette levée est en faveur du Directeur des poursuites criminelles et pénales (« DPCP ») afin de permettre à la Cour du Québec de se prononcer sur la remise et la distribution de fonds titres et autres biens appartenant à David Glazer qui ont été saisis dans le cadre d’une dénonciation criminelle  pour laquelle il a plaidé coupable.

[6]  Pour le reste, et vu que l’enquête de l’Autorité est maintenant terminée, en son sens large, les parties s’entendent également pour que le Tribunal lève l’ensemble des ordonnances de blocage restantes à l’encontre de David Glazer et de Castle Rock, dont notamment, l’ordonnance de blocage général qui les concerne.

[7]   Le Tribunal doit donc déterminer s’il y a lieu, dans l’intérêt public, d’accorder cette demande, d’entériner cet accord et de prononcer les ordonnances demandées.

[8]  Après considération, le Tribunal juge qu’il y a lieu, dans l’intérêt public, de prononcer les ordonnances demandées, de lever les ordonnances de blocage, de radier de façon permanente David Glazer ainsi que Castle Rock et d’entériner cet accord.

LES FAITS    

o   La demande de levée de blocage

[9]  Cette demande de levée fait suite à des ordonnances de blocage visant les fonds, titres ou autres biens appartenant à David Glazer et Castle Rock de même que ceux détenus pour eux par diverses institutions financières, lesquelles ont été prononcées par le Tribunal le 18 décembre 2017[1], le 22 février 2018[2] et le 2 août 2018[3].

[10]        Depuis, ces ordonnances ont été levées partiellement[4] et ont été prolongées à quelques reprises[5]. La dernière prolongation vient à échéance le 10 juin 2021.

[11]        Ces ordonnances de blocage ont été prononcées dans le cadre d’une enquête menée par l’Autorité à l’encontre de David Glazer et de Castle Rock en lien avec des manquements graves allégués à la Loi sur les valeurs mobilières[6] (« LVM ») et à la Loi sur la distribution de produits et services financiers[7] (« LDPSF »).

[12]        Suite à cette enquête et pour des faits en lien avec cette dernière, l’Autorité a déposé à la Cour du Québec à l’encontre de David Glazer une dénonciation pour fraude et pour fabrication et utilisation de faux en vertu du Code criminel[8].

[13]        Le 1er décembre 2020, David Glazer a plaidé coupable à une infraction regroupée de fraude visant neuf victimes de ses agissements pour une somme d’argent de près de 1 300 000 $[9].

[14]         Suivant l’enregistrement de ce plaidoyer devant l’Honorable André Perreault, j.c.q., la rédaction d’un rapport présentenciel a été ordonnée et ce dossier devait revenir sur le rôle de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, le 26 février 2021, au stade pro forma. En ce moment, les procédures se poursuivent[10].

[15]        Dans le cadre de ces procédures criminelles, le véhicule de David Glazer a été saisi et des ordonnances de blocage ont été rendues en faveur du DPCP visant plusieurs comptes bancaires et biens de David Glazer[11], lesquels sont également sujets à des ordonnances de blocage du Tribunal.

[16]        En raison des ordonnances de blocage prononcées par la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, l’Autorité demande au Tribunal de bien vouloir lever ses ordonnances de blocage afférentes aux biens suivants, afin que les sommes soient remises au DPCP pour que ce dernier puisse effectuer les remises aux victimes non indemnisées en totalité, selon l’ordonnance à être rendue à cet effet par la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale :

         Assurance vie portant le numéro [1] détenue auprès de Great West;

         Assurance vie portant le numéro [2] détenue auprès de Great West;

         Assurance vie portant le numéro [3] détenue auprès de Great West;

         Assurance vie portant le numéro [4] détenue auprès de Manuvie;

         Compte bancaire portant le numéro [1] détenu auprès de la RBC;

         Compte bancaire portant le numéro [2] détenu auprès de la RBC;

         Compte bancaire portant le numéro [3] détenu auprès de la RBC;

         Compte bancaire portant le numéro [4] détenu auprès de la CIBC;

         Compte REER portant le numéro [5] détenu auprès de (…) Great West;

         Compte REEE portant le numéro [6] détenu auprès de AGF;

         Véhicule automobile de marque BMW, modèle 650I 2010, immatriculé [...].

[17]        Ainsi, plus de 168 000 $ seront remis aux victimes non encore totalement indemnisées puisque l’Autorité, à titre d’administrateur du Fonds d’indemnisation des services financiers (« FISF »), a indemnisé la plupart des victimes de leur perte, allant dans certains cas jusqu’au montant maximal de couverture que le FISF peut offrir à une victime.

[18]        Notamment, l’une des victimes a reçu l’indemnisation maximale de 200 000 $ du FISF alors que plus de 580 730 $ ont été détournés de ses avoirs par David Glazer[12].

o   La demande de radiation permanente

[19]        Puisque dans l’accord intervenu, David Glazer et Castle Rock admettent l’ensemble des faits allégués par l’Autorité, cette dernière demande au Tribunal, dans l’intérêt public, la radiation permanente du certificat en assurance de personnes et de l’inscription en épargne collective de David Glazer, ainsi que celle de de Castle Rock en assurance de personnes en raison de la gravité des manquements admis.

[20]        Ces manquements admis se résument comme suit dans l’accord soumis au Tribunal :

         David Glazer, à titre de représentant en assurance de personnes et de représentant de courtier en épargne collective, a sollicité des chèques émis à l’ordre de Castle Rock D.M.G. Investment Management inc. sur la base de représentations frauduleuses à l’égard de neuf clients, notamment en indiquant qu’il ferait un investissement dans un véhicule approprié au meilleur moment;

         Suivant ces fausses représentations, David Glazer et Castle Rock D.M.G. Investment Management inc. se sont appropriés des sommes totalisant, en capital, plus de 1 300 000 $.

[21]        Selon l’Autorité, ces manquements sont en lien direct avec l’exercice de la profession de représentant et commis à l’encontre de sa clientèle.

[22]        Ainsi, l’Autorité représente au Tribunal que David Glazer ne dispose plus de la compétence, de l’honnêteté, de la loyauté et de la probité requises pour détenir un certificat de représentant en assurance de personnes ou de représentant de courtier en épargne collective.

[23]        L’Autorité ajoute que l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité à une accusation de fraude de plus de 5 000 $ devant la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, visant les mêmes faits et les mêmes victimes, est un élément additionnel justifiant la radiation permanente des droits de pratique de David Glazer dans toutes les disciplines.

[24]        Par ailleurs, puisque David Glazer était l’unique dirigeant, actionnaire et administrateur de Castle Rock, l’Autorité dit être justifiée de requérir la radiation permanente de l’inscription de ce cabinet en assurance.

[25]        Elle soumet qu’il est dans l’intérêt public que la présente demande soit accordée.

[26]        David Glazer et Castle Rock consentent au dépôt de toutes les pièces[13] alléguées au soutien de cette demande et en admettent le contenu.

[27]        Selon cet accord, aucune somme d’argent ne sera remise à David Glazer et à Castle Rock suivant le jugement à intervenir par la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale.

[28]        David Glazer a renoncé à l’insaisissabilité de deux polices d’assurance et consent à la remise des sommes contenues dans ces produits au DPCP.

[29]        Finalement, David Glazer consent dans cet accord à la radiation permanente de ses droits de pratique dans toutes les disciplines soit :

         Son certificat de représentant en assurance de personnes portant le numéro 114882;

         Son inscription de représentant de courtier en épargne collective portant le numéro 1376141.

[30]        Il consent également à la radiation permanente de l’inscription de son cabinet Castle Rock D.M.G. Investment Management inc. dans la discipline de l’assurance de personnes, portant le numéro 506555.

ANALYSE

[31]        Dans le cadre de son analyse, le Tribunal doit répondre à la question suivante, à savoir, l’accord soumis au Tribunal est-il raisonnable, conforme à la loi et conclu dans l’intérêt public?

[32]        Le Tribunal considère que l’accord est raisonnable, conforme à la loi et qu’il est dans l’intérêt public de l’entériner.

o   Cadre d’intervention du Tribunal

[33]        Le Tribunal a le pouvoir d’entériner un accord, s’il est conforme à la loi[14].

[34]        Le Tribunal rappelle qu’il n’est jamais tenu d’accepter les conclusions d’un accord ni les suggestions communes qui lui sont proposées.

[35]        À cet égard, le Tribunal rappelle qu’il ne peut écarter une suggestion commune que si elle est déraisonnable, inadéquate, contraire à l’intérêt public ou de nature à déconsidérer l’administration de la justice.

[36]        Les ordonnances du Tribunal sont de nature réglementaire[15] et en ce sens, elles ne sont ni réparatrices ni punitives malgré qu’elles puissent être dissuasives. Ces ordonnances sont de nature protectrice et préventive.

[37]        La LDPSF et la LVM sont des lois dont l’objectif principal est la protection du public[16].

o   Les devoirs et obligations des titulaires de certificats et des inscrits en lien avec les faits admis

[38]        Ces lois imposent une série d’obligations, de devoirs et de responsabilités aux représentants, dirigeants et cabinets.

[39]        Le respect des devoirs et obligations imposés par la LDPSF et la LVM est essentiel afin de protéger le public et maintenir sa confiance envers les marchés financiers et  l’industrie de l’assurance.

[40]        L’exercice des activités de représentant en assurance de personnes et en épargne collective dans un secteur protégé et hautement réglementé est un privilège qui implique que les personnes qui s’y engagent acceptent de se soumettre à des règles strictes encadrant leurs activités[17].

[41]        Le Tribunal rappelle que l’article 16 de la LDPSF prévoit qu’un représentant en assurance de personnes dûment inscrit auprès de l’Autorité a l’obligation d’agir avec honnêteté, loyauté, compétence et professionnalisme dans ses relations avec ses clients.

[42]        De plus, un représentant ne doit pas exercer ses activités de façon malhonnête ou négligente[18].

[43]        En tout temps, le représentant doit sauvegarder son indépendance et il doit éviter toute situation où il serait en conflit d’intérêts[19]. Il doit toujours subordonner son intérêt personnel à celui de son client[20].

[44]        Le code de déontologie du représentant en assurance prévoit qu’il est tenu d’exercer ses activités avec intégrité[21]. Il doit agir envers son client avec probité et en conseiller consciencieux[22]. Il doit aussi agir de manière diligente[23].

[45]        En ce qui a trait au cabinet en assurance, notamment Castle Rock, ce dernier a des obligations aussi strictes envers ses clients et a aussi le devoir de superviser ses représentants.

[46]        En effet, selon les articles 84, 85 et 86 de la LDPSF, les obligations suivantes incombent à un cabinet :

« 84.  Un cabinet et ses dirigeants sont tenus d’agir avec honnêteté et loyauté dans leurs relations avec leurs clients.

Ils doivent agir avec soin et compétence.

85. Un cabinet et ses dirigeants veillent à la discipline de leurs représentants. Ils s’assurent que ceux-ci agissent conformément à la présente loi et à ses règlements.

86. Un cabinet veille à ce que ses dirigeants et employés agissent conformément à la présente loi et à ses règlements. »

[47]        En matière de valeurs mobilières, l’article 160 de la LVM prévoit aussi que la personne inscrite à titre de représentant est tenue d’agir de bonne foi et avec honnêteté, équité et loyauté dans ses relations avec ses clients. 

[48]        En l’espèce et selon la preuve par admission soumise au Tribunal, David Glazer et Castle Rock auraient grandement failli à ces obligations par les multiples appropriations qui ont été faites à partir des comptes de leurs clients.

[49]        En effet, David Glazer s’est approprié des sommes substantielles en provenance d’investisseurs, ce qui constitue aussi une infraction au sens de l’article 199.1 de la LVM, puisque l’intimé devait savoir que cet acte constituait une fraude à l’encontre des investisseurs qu’il a floués.

[50]        Le Tribunal souligne que rien ne porte plus atteinte à l’intégrité des marchés financiers que la fraude, tel que le mentionnait la Commission des valeurs mobilières de la Colombie-Britannique dans l’affaire Manna Trading Corp Ltd.[24] :

« 18.  Nothing strikes more viciously at the integrity of our capital markets than fraud, and this case represents a particularly aggressive and flagrant assault on the public’s confidence in our markets. »[25]

[51]        Le Tribunal souscrit aux propos de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario dans la décision Al-Tar Energy corp. eu égard à la fraude à l’effet qu’il s’agit de l’une des violations les plus graves en matière de valeurs mobilières, laquelle est à la fois un affront à l’investisseur visé par cette fraude et un comportement qui diminue la confiance du public dans l’équité et l’efficience de l’entièreté du système financier[26].

[52]        Le Tribunal rappelle que la radiation d’une inscription ou d’un certificat  ne vise pas à punir l’intimé, mais a plutôt un caractère prospectif et vise à empêcher des conduites futures qui risqueraient de porter atteinte à l’intérêt public.

[53]        Le Tribunal reconnaît que la radiation permanente d’une inscription ou d’un certificat équivaut littéralement à enlever le droit à une personne de pratiquer sa profession et constitue une ordonnance qui ne peut être rendue que dans les cas les plus graves de manquements à la loi.

[54]        Or, une violation aussi grave que l’appropriation par une personne inscrite ou par un cabinet des avoirs de ses clients commande et justifie cette ordonnance la plus sévère.

[55]        Une telle ordonnance est justifiée en l’espèce à la lumière de la gravité des manquements constatés, et ce, afin d’assurer la protection du public en empêchant David Glazer et son cabinet Castle Rock d’exercer pour toujours des activités réglementées dans les domaines de l’assurance ou des valeurs mobilières.

[56]        Le Tribunal souligne par ailleurs que l’intimé David Glazer a consenti à ce que le Tribunal prononce la radiation permanente de son certificat, de son inscription et celle se de son cabinet; ayant manifesté au Tribunal lors de l’audience sur les présentes ne plus avoir l’intention d’œuvrer dans ce domaine.

[57]        En matière de valeurs mobilières, l’article 152 de la LVM permet au Tribunal de retirer les droits conférés par l’inscription, les suspendre ou assortir leur exercice de restrictions ou de conditions lorsqu’il estime qu’une personne inscrite ne respecte pas les dispositions de cette loi ou des règlements pris pour son application ou lorsqu’il estime que l’intérêt public le justifie.

[58]        En vertu de l’article 115 de la LDPSF, le Tribunal dispose également d’un pouvoir similaire en matière d’assurance en ce qui a trait au certificat du représentant et de l’inscription d’un cabinet. 

o   La levée des ordonnances de blocage en lien avec les faits admis

[59]        En ce qui a trait aux ordonnances de blocage qu’il a rendues, le Tribunal rappelle qu’une ordonnance de blocage est une mesure conservatoire destinée à protéger des sommes d’argent recueillies auprès d’épargnants d’une manière potentiellement illégale et qu’on estime mieux protégées si elles sont mises hors de la portée de ceux qui les ont réunies[27].

[60]        Une telle ordonnance « permet donc de préserver des fonds en attendant que des recours soient engagés, qu’ils soient menés à bonne fin, tels que les tribunaux le détermineront. »[28]

[61]        Selon l’article 249 de la LVM, les ordonnances de blocage du Tribunal se font à l’encontre de personnes qui font l’objet d’une enquête de l’Autorité et sont prolongées par le Tribunal jusqu’à la conclusion d’une telle enquête, y compris la terminaison des mesures de mise en application de la loi[29].   

[62]        Ainsi, il n’y a plus lieu pour le Tribunal de maintenir ou de prolonger de telles ordonnances une fois que l’enquête de l’Autorité, en son sens large, est terminée. Et ce, surtout lorsque les sommes bloquées sont sécurisées en faveur des investisseurs, lorsqu’il y a eu un manquement à la loi de constaté ou d’admis, ou lorsqu’il y a eu un plaidoyer de culpabilité au criminel comme dans le présent cas.

[63]        En l’instance, l’Autorité requiert la levée des ordonnances de blocage à l’encontre de David Glazer et de Castle Rock considérant son plaidoyer de culpabilité dans son dossier criminel en lien avec le présent dossier et considérant le fait que le DPCP distribuera les biens qu’il a saisis aux investisseurs.

[64]        Les sommes bloquées sont sécurisées entre les mains du DPCP pour être éventuellement remises aux investisseurs et l’enquête de l’Autorité est terminée puisque soldée par le plaidoyer de culpabilité de David Glazer dans le dossier criminel.

[65]        Dans ces circonstances, le Tribunal considère qu’il n’y a plus d’enjeu d’intérêt public qui requiert que ces ordonnances de blocage se poursuivent.    

CONCLUSION

[66]        Le Tribunal souligne également que, dans l’accord soumis, David Glazer accepte que le Tribunal entérine l’accord qu’il a signé, ce qui comprend la renonciation à l’insaisissabilité de ses polices d’assurance.

[67]        Après avoir considéré l’ensemble de la preuve et les arguments qui lui ont été présentés, le Tribunal convient d’entériner l’accord intervenu entre les parties et de prononcer les ordonnances demandées dont la radiation permanente du certificat de David Glazer, de son inscription et celle de son cabinet Castle Rock.

[68]        Puisque cette affaire sera maintenant close, que les sommes et avoirs bloqués seront maintenant remis par le DPCP aux investisseurs lésés et sécurisées, le Tribunal consent à lever les ordonnances de blocage qu’il a antérieurement rendues à l’encontre de David Glazer et de Castle Rock selon les modalités énumérées au dispositif du présent jugement.

[69]        Le Tribunal considère qu’il est dans l’intérêt public de mettre en œuvre les suggestions communes des parties.

POUR CES MOTIFS, le Tribunal administratif des marchés financiers, en vertu des articles 93 et 97 al. 2 (6o) de la Loi sur l’encadrement du secteur financier[30], des articles 152, 249 et 250 de la Loi sur les valeurs mobilières et des articles 115 et 115.3 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers :

ENTÉRINE l’accord intervenu entre l’Autorité des marchés financiers et les intimés David Glazer et Castle Rock D.M.G. Investment Management inc. et ordonne aux parties de s’y conformer;

LÈVE les ordonnances de blocage afin de donner pleine exécution aux ordonnances rendues par la Cour du Québec suivant les demandes de blocage et saisies sollicitées par le Directeur des poursuites criminelles et pénales et visant les sommes ou les biens suivants :

         Assurance vie portant le numéro [1] détenue auprès de La Great-West compagnie d’assurance-vie, ayant son principal établissement au Québec au 1275-2001, boulevard Robert-Bourassa, Montréal (Québec), H3A 2A6;

         Assurance vie portant le numéro [2] détenue auprès de La Great-West compagnie d’assurance-vie, ayant son principal établissement au Québec au 1275-2001, boulevard Robert-Bourassa, Montréal (Québec), H3A 2A6;

         Assurance vie portant le numéro [3] détenue auprès de La Great-West compagnie d’assurance-vie, ayant son principal établissement au Québec au 1275-2001, boulevard Robert-Bourassa, Montréal (Québec), H3A 2A6;

         Assurance vie portant le numéro [4] détenue auprès de La Compagnie d’assurance-vie Manufacturers, ayant un établissement au 900, boulevard Maisonneuve, Montréal (Québec), H3A 1A8;

         Compte bancaire portant le numéro [1] détenu auprès de la Banque Royale du Canada, succursale située au 5500, avenue Royalmount, Montréal (Québec), H4P 1H7;

         Compte bancaire portant le numéro [2] détenu auprès de la Banque Royale du Canada, succursale située au 5500, avenue Royalmount, Montréal (Québec), H4P 1H7;

         Compte bancaire portant le numéro [3] détenu auprès de la Banque Royale du Canada, succursale située au 4849, rue Sherbrooke Ouest, Montréal (Québec), H3Z 2G6;

         Compte bancaire portant le numéro [4] détenu auprès de la Banque Canadienne Impériale de Commerce, succursale située au 8000, boulevard Décarie, Montréal (Québec), H4P 2S4;

         Compte REER portant le numéro [5] détenu auprès de Services d’investissement Quadrus Ltée, ayant le bureau de son fondé de pouvoir au Québec au 1275-2001, boulevard Robert-Bourassa, Montréal (Québec), H3A 2A6;

         Compte REEE portant le numéro [6] détenu auprès de La Société de gestion AGF Limitée, ayant son domicile élu au Québec au 1300-1, Place Ville‑Marie, Montréal (Québec), H3B 0E6;

         Véhicule automobile de marque BMW, modèle 650I 2010, immatriculé [...];

LÈVE toute autre ordonnance de blocage prononcée, y compris l’ordonnance de blocage général;

PREND ACTE de la renonciation de David Glazer à l’insaisissabilité des produits financiers suivants et de son consentement à ce que les sommes contenues dans ces produits soient disposées selon la décision à être rendue par la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale :

a)            Une police d’assurance vie portant le numéro [2] détenue auprès de La Great-West Compagnie d’assurance-vie;

b)            Une police d’assurance vie portant le numéro [3] détenue auprès de La Great-West Compagnie d’assurance-vie;

RADIE de façon permanente le certificat et l’inscription de David Glazer, à savoir :

a)            Le certificat portant le numéro 114882 dans la discipline de l’assurance de personnes;

b)            L’inscription portant le numéro 1376141 dans la discipline du courtage en épargne collective;

RADIE de façon permanente l’inscription de Castle Rock D.M.G. Investment Management inc. portant le numéro 506555.

 

 

 

 

 

Me Elyse Turgeon, juge administratif

 

 

Me Sylvie Boucher

 

(Contentieux de l’Autorité des marchés financiers)

 

Procureure de l’Autorité des marchés financiers

 

 

 

 

 

David Glazer, comparaissant personnellement

 

 

 

Date d’audience :

24 février 2021

 

 

 

 




[1]     Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2017 QCTMF 137 (motifs détaillés rendus le 9 février 2018, rectifiés le 12 février 2018).

[2]     Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2018 QCTMF 15.

[3]     Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2018 QCTMF 81.

[4]     Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2018 QCTMF 15; Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2018 QCTMF 115; Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2019 QCTMF 24; Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2019 QCTMF 51; Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2020 QCTMF 12.

[5]     Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2018 QCTMF 30; Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2018 QCTMF 78; Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2018 QCTMF 115; Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2019 QCTMF 35; Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2019 QCTMF 62; Autorité des marchés financiers c. Glazer, 2020 QCTMF 24.

[6]     RLRQ, c. V-1.1.

[7]     RLRQ, c. D-9.2.

[8]     Pièces D-4 et D-5.

[9]     Pièce D-5.

[10]    Pièce D-5.

[11]    Pièces D-7 et D-8.

[12]  Pièce D-55.

[13]    Pièces D-1 à D-63.

[14]    Art. 97 al. 2 (6o), Loi sur l’encadrement du secteur financier, RLRQ, c. E-6.1 (« LESF »).

[15]    Cartaway Resources Corp. (Re), 2004 CSC 26 (CanLII), [2004] 1 R.C.S 672. 

[16]    Autorité des marchés financiers c. Assomption, compagnie mutuelle d’assurance-vie2007 QCCA 1062, par. 47; Marston c. Autorité des marchés financiers, 2009 QCCA 2178, par. 52.

[17]    La Souveraine, Compagnie d’assurance générale c. Autorité des marchés financiers, 2013 CSC 63, par. 49.

[18]    Art. 35, Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière, RLRQ, c. D-9.2, r. 3.

[19]    Id., art. 18.

[20]    Id., art. 19.

[21]    Id., Art. 11.

[22]    Id., art. 12.

[23]    Id., art. 24.

[24]    Manna Trading Corp Ltd. (Re)2009 BCSECCOM 595.

[25]    Ibid, par. 18.

[26]    Al-Tar Energy Corp., 2010 ONSEC 11, par. 214.

[27]    Nechi Investments Inc. c. Autorité des marchés financiers, 2009 QCBDRVM 22, confirmée par la Cour d’appel Nechi Investments Inc. c. Autorité des marchés financiers, 2011 QCCA 214.

[28]    Autorité des marchés financiers c. McKeown, 2010 QCBDR 60.

[29]    Autorité des marchés financiers c. Gestion Guychar (Canada) inc., 2010 QCBDRVM 13.

[30]    RLRQ, c. E-6.1.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.