Autorité des marchés financiers (Québec)

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Autorité des marchés financiers c. 515963 NB inc. (APAC)

 

 

TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DES MARCHÉS FINANCIERS

 

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

MONTRÉAL

 

 

 

DOSSIER N° :

2017-040

 

 

 

DÉCISION N° :

2017-040-001

 

 

 

DATE :

Le 20 décembre 2018

 

 

 

 

 

EN PRÉSENCE DE :

Me JEAN-PIERRE CRISTEL

 

 

 

 

 

 

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

 

Partie demanderesse

 

c.

 

515963 N.B. inc., FASLRS APAC, anciennement connue sous le nom de PROTOCOL SERVICES FINANCIERS

 

 

Partie intimée

 

 

 

 

 

 

 

DÉCISION

 

 

 

 

 

 

HISTORIQUE

[1]   Le 19 octobre 2017, l’Autorité des marchés financiers (ci-après désignée                  « l’ Autorité ») a déposé au Tribunal administratif des marchés financiers (ci-après désigné le « Tribunal ») une demande (i) de pénalité administrative, (ii) d'interdiction d’agir à titre de dirigeant, (iii) de suspension d’inscription, (iv) de nomination d’un dirigeant responsable, (v) d’imposition de conditions à l’inscription, (vi) de mesure de redressement et (vii) de mesures propres à assurer le respect de la loi à l’encontre des intimés alors au dossier.

[2]   D’autres personnes étaient initialement visées par cette demande. L’Autorité s’est toutefois désistée de sa demande à leur égard en février et juillet 2018.

[3]   Le 20 novembre 2018, le secrétariat du Tribunal a reçu une copie d’un accord intervenu entre l’Autorité et l’intimée 515963 N.B. inc., FASLRS APAC, anciennement connue sous le nom de Protocol Services Financiers, (ci-après désignée « APAC »).

[4]   Le 29 novembre 2018, l’Autorité a déposé une demande remodifiée.

[5]   Le 3 décembre 2018, le procureur qui représentait les intimées APAC et Claudette Tremblay a cessé de représenter cette dernière.

[6]   Le 6 décembre 2018, l’Autorité a déposé deux demandes remodifiées et a informé le Tribunal de même que les parties intimées, soit APAC et Claudette Tremblay, qu’elle demanderait lors de l’audience du Tribunal prévue le 18 décembre 2018, une scission d’instances, et ce, afin de permettre de procéder rapidement à l’égard de l’accord susmentionné conclu avec APAC.

AUDIENCE

[7]   L’audience du 18 décembre 2018 s’est tenue au siège du Tribunal en présence des procureures de l’Autorité, du procureur de l’intimée APAC et de l’intimée Claudette Tremblay, laquelle n’était pas représentée par un avocat.

[8]   Les procureures de l’Autorité ont d’abord rappelé au Tribunal qu’un accord est intervenu entre l’Autorité et APAC le 16 novembre 2018 et qu’une copie de cette entente a été transmise au Tribunal le 20 novembre 2018.

[9]   Les procureures de l’Autorité ont aussi rappelé qu’elles ont fait parvenir au Tribunal le 6 décembre 2018 des demandes séparées pour chacune des parties intimées, soit APAC d’une part et Claudette Tremblay d’autre part.

[10]        À cet égard, elles ont demandé au Tribunal d’autoriser une disjonction des procédures à l’égard des deux parties intimées, et ce, afin de permettre à l’Autorité et à l’intimée APAC de rapidement présenter au Tribunal, pour décision, l’accord intervenu.  

[11]        L’intimée Claudette Tremblay et le procureur de l’intimée APAC ayant expressément exprimé leurs consentements à cette disjonction, le Tribunal l’a, dans l’intérêt public, prononcée et remis, pro forma, au 31 janvier 2019 à 14h00 le recours administratif relié à l’intimée Claudette Tremblay.

[12]        Par ailleurs, le Tribunal a accepté - à la demande des procureures de l’Autorité et de l’intimée APAC - d’entendre immédiatement au mérite la demande de l’Autorité à l’égard de cette intimée.

[13]        Les procureures de l’Autorité ont par la suite présenté d’une manière détaillée le contenu de l’accord intervenu entre l’Autorité et l’intimée APAC, lequel contient notamment une suggestion commune de pénalité administrative à l’encontre de cette intimée.   

[14]        Elles ont mentionné que l’intimée APAC reconnait, dans le cadre de cet accord,  tous les faits allégués à son encontre par l’Autorité et, en particulier, les manquements qui lui sont reprochés aux articles 3, 4, 27, 28, 84, 85 et 86 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[1].

[15]        À cet égard, les procureures de l’Autorité ont indiqué que l’intimée APAC consentait au dépôt des pièces D-1, D-7, D-9, D-10, D-12A et D), D-13 et D-14 alléguées au soutien de la demande à son encontre et en admettait leur contenu[2].  

[16]        Elles ont affirmé que l’intimée APAC a collaboré avec l’Autorité afin de trouver, dans l’intérêt public, une solution consensuelle à la présente affaire. À cet égard, elles ont souligné que l’intimée APAC a déjà procédé à un changement de dirigeant responsable auprès de l’Autorité et a mis fin à toute offre de produits d’assurance au Québec par l’entremise de personnes non certifiées à cette fin.

[17]        De plus, elles ont indiqué que l’intimée APAC a formellement pris l’engagement, dans le cadre de l’accord susmentionné, de se conformer à l’ensemble de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et à ses règlements.

[18]        Les procureures de l’Autorité ont plaidé que l’accord conclu avec l’intimée APAC est dans l’intérêt public.

[19]        Elles ont conclu leurs représentations en demandant au Tribunal d’entériner cet accord et, en particulier, d’ordonner à l’intimée APAC de payer – à titre de mesure dissuasive – une pénalité administrative de 90 000 $, le tout selon les termes prévus à l’accord.

[20]        Pour sa part, le procureur de l’intimée APAC a souligné au Tribunal que sa cliente a reconnu tous les faits et manquements qui lui sont reprochés dans la présente affaire et fait preuve de repentir.

[21]        De plus, il a indiqué que sa cliente avait effectué un changement de dirigeant responsable auprès de l’Autorité, mis fin à l’ensemble des pratiques qui lui étaient reprochées et formellement pris l’engagement de respecter la  Loi sur la distribution de produits et services financiers et à ses règlements.

[22]        Il a ajouté que sa cliente avait collaboré avec l’Autorité afin de trouver une solution consensuelle à la présente affaire, le tout dans l’intérêt public et dans l’intérêt de la justice.

[23]        Il a conclu ses représentations en demandant au Tribunal d’entériner, dans l’intérêt public, l’accord conclu entre sa cliente et l’Autorité.    

ANALYSE

[24]        Le Tribunal a pris connaissance de la demande remodifiée de l’Autorité à l’égard de l’intimée APAC, ainsi que de l’accord intervenu entre l’Autorité et cette intimée, laquelle est contenue dans un document intitulé « Entente Intervenue Avec APAC », dont copie est jointe à la présente décision.

[25]        En raison des faits admis par l’intimée APAC, le Tribunal constate qu’il y a eu de multiples manquements de sa part aux articles 3, 4, 27, 28, 84, 85 et 86 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers, notamment pour avoir toléré que ses représentants ne s’acquittent pas des obligations qui leur incombaient lors de la distribution de produits d’assurance vendus par télémarketing dans le cadre du programme de Sears Canada.

[26]        Le Tribunal a considéré la substance de l’accord qui lui a été présentée par les parties au regard des objectifs primordiaux de protection du public et de dissuasion qu’il est essentiel de rencontrer.

[27]        Le Tribunal souligne que chaque dossier doit être évalué au mérite à la lumière de ses particularités et rappelle qu’il n’est jamais tenu aux suggestions communes qui lui sont présentées par les parties.

[28]        Le Tribunal doit également déterminer si la pénalité administrative demandée à l’encontre de l’intimée APAC est raisonnable afin d’assurer la protection du public[3] et, à cet égard, il a considéré plusieurs critères[4].

[29]        Par ailleurs, dans le but de s’assurer que la pénalité administrative susmentionnée satisfait aux critères de dissuasion spécifique et générale[5], le Tribunal doit considérer les manquements reprochés à l’intimée tout en prenant compte les facteurs aggravants et atténuants de la présente affaire.

[30]        Le Tribunal constate que les manquements commis par l’intimée APAC sont graves et multiples. À cet égard, le Tribunal retient que pas moins de 8 883 certificats d’assurance furent émis à des Québécois, durant la période 2012-2013, et ce, à la suite des activités illicites qui sont reprochées à l’intimée APAC dans le cadre de la présente affaire. 

[31]        Le Tribunal rappelle que le régime d’obligations prévu dans la Loi sur la distribution de produits et services financiers constitue le cœur des mécanismes de protection mis en place par le législateur pour protéger le public.

[32]        Le respect de ces obligations est essentiel pour assurer la protection du public et, en particulier, de leurs clients. Le respect de ces obligations est aussi essentiel pour maintenir la confiance du public dans l’encadrement des services et des marchés financiers.

[33]        Cette confiance doit être maintenue pour assurer la pérennité de l’économie de marché contemporaine et de l’ensemble de la société qu’elle soutient. L’histoire nous rappelle régulièrement que cette confiance ne doit jamais être prise pour un éternel acquis.

[34]        Le Tribunal souligne que les obligations imposées aux cabinets d’assurance, à leurs dirigeants et à leurs représentants par la Loi sur la distribution de produits et services financiers et par ses règlements ne doivent pas être prises à la légère.   

[35]        Toutefois, dans la présente affaire, le Tribunal retient à titre de facteurs atténuants que l’intimée APAC a fait preuve de repentir, a collaboré avec l’Autorité afin de trouver une solution consensuelle au présent dossier, qu’elle s’est dotée d’un nouveau dirigeant responsable, dûment approuvé par l’Autorité, et qu’elle a cessé l’ensemble des pratiques délétères qui lui étaient reprochées par l’Autorité. 

[36]        De plus, l’intimée APAC a formellement pris l’engagement, dans le cadre de l’accord qu’elle a conclu avec l’Autorité, de se conformer à l’ensemble de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et à ses règlements.

[37]        Le Tribunal note que dans cet accord l’intimée APAC admet les faits allégués à son encontre dans la demande de l’Autorité, consent au dépôt des diverses pièces présentées au soutien de ces allégations et en admet le contenu.

[38]        À la lumière des représentations qui lui ont été faites par les procureurs des parties, le Tribunal considère que l’accord intervenu entre l’Autorité et l’intimée APAC est dans l’intérêt public. 

[39]        Par conséquent, le Tribunal est prêt - dans l’intérêt public - à imposer à l’encontre de l’intimée APAC la pénalité administrative qui lui a été suggérée, d’un commun accord, par les parties et à entériner l’accord que cette intimée a conclu avec l’Autorité.

DISPOSITIF

POUR CES MOTIFS, le Tribunal administratif des marchés financiers, en vertu des articles 93 et 97 de la Loi sur l’encadrement du secteur financier[6], ainsi que de l’article 115 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[7]:

ENTÉRINE l’accord intervenu entre l’Autorité des marchés financiers et le cabinet intimé 515963 N.B. inc., FASLRS APAC, anciennement connu sous le nom Protocol Services Financiers, lequel est annexé à la présente décision;

IMPOSE au cabinet intimé 515963 N.B. inc., FASLRS APAC, anciennement connu sous le nom de Protocol Services Financiers, une pénalité administrative de 90 000 $, pour avoir fait défaut de respecter les articles 3, 4, 27, 28, 84, 85 et 86 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers et pour avoir notamment toléré que ses représentants ne s'acquittent pas des obligations qui leur incombent lors de la distribution des produits d'assurance vendus par télémarketing dans le cadre du programme de Sears Canada, le tout, payable selon les modalités prévues dans l’accord susmentionné.

 

 

 

 

 

 

 

Me Jean-Pierre Cristel

Juge administratif

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Me Marie Pettigrew et MAurélie Gauthier

 

(Contentieux de l’Autorité des marchés financiers)

 

Procureures de l’Autorité des marchés financiers, demanderesse

 

 

 

Me   François-David Paré

 

Norton Rose Fulbright Canada S.E.N.C.R.L., s.r.l.

 

Procureur de l’intimée APAC

 

Claudette Tremblay

 

Se représentant personnellement

 

 

 

 

 

Date d’audience :

18 décembre 2018

 




 



[1]     RLRQ, c. D-9.2.

[2]     De consentement, le dépôt de la pièce D-2 n’a pas été demandé parce qu’elle ne concerne que l’intimée Claudette Tremblay, laquelle n’est plus une partie à la présente instance à la suite de la disjonction autorisée par le Tribunal.

[3]     Mizrahi c. Autorité des marchés financiers, 2009 QCCQ 10542.

[4]     Autorité des marchés financiers c. Demers, 2006 QCBDRVM 17.

[5]     Cartaway Resources Corp. (Re), [2004] 1 R.C.S. 672.

[6]     RLRQ, c. E-6.1.

[7]     RLRQ, c. D-9.2.

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